N° 818
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 janvier 2025.
PROPOSITION DE LOI
visant à protéger les microentreprises et les collectivités des contraintes liées à la reconduction tacite,
(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
Mme Blandine BROCARD,
députée.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les microentreprises, moteurs essentiels de l’économie française, sont souvent confrontées à des pratiques commerciales abusives ou dissimulées. Ces pratiques, insérées dans les conditions générales de vente, sont conçues pour passer inaperçues auprès des structures ne disposant pas des ressources nécessaires, comme des services juridiques ou comptables, pour en identifier les risques.
Contrairement aux grandes entreprises, les microentreprises et commerçants, focalisés sur leurs activités principales, négligent fréquemment une lecture détaillée des contrats et conditions générales. Bien que la législation offre des protections aux consommateurs, les personnes morales restent exposées, leurs relations commerciales étant régies exclusivement par le contrat et ses clauses.
Une pratique récurrente illustre bien cette asymétrie : un commerçant se voit offrir la création gratuite d’un site internet ou une prestation d’hébergement, souvent présentée comme un « cadeau » obtenu lors d’un salon ou par le biais d’un jeu‑concours. L’année suivante, une facture disproportionnée lui est adressée pour le renouvellement de l’hébergement, assortie de menaces de recouvrement judiciaire en cas de non‑paiement. Ne disposant pas des outils pour contester efficacement, le commerçant se résigne souvent à payer, le fournisseur ayant la Loi de son côté.
La présente proposition de loi vise à renforcer la protection des microentreprises en imposant une obligation d’information claire et dans un délai raisonnable avant toute reconduction tacite de contrat. Ces mesures garantiront aux microentreprises la possibilité de rejeter une reconduction qui leur serait préjudiciable.
Par ailleurs, cette proposition de loi s’étend aux administrations, en particulier aux petites collectivités locales, en précisant dans le code de la commande publique les modalités de rétractation en cas de reconduction tacite. Actuellement, bien que ce code impose des durées limitées pour les contrats, il reste flou sur la gestion des clauses de reconduction tacite, bien qu’il soit de jurisprudence constante que la tacite reconduction ne peut être appliquée à la commande publique, notamment du fait qu’il est nécessaire que le crédit afférent soit voté annuellement par l’assemblée délibérante.
Il semble nécessaire d’inscrire dans le code de la commande publique la nullité des mentions de reconduction tacite afin, d’une part, de clarifier la situation pour les élus – et a fortiori pour les nouveaux élus – afin d’éviter d’éventuelles actions en justice liées au refus de paiement d’une facture arrivant après le délai de rétraction indiqué sur le contrat, et d’autre part, pour éviter que l’argent public ne soit gaspillé par le paiement de factures pour une prestation obsolète.
Il est en effet fréquent que des communes soient liées par des contrats obsolètes, parfois oubliés, mais toujours renouvelés automatiquement. Ces contrats, comme l’entretien d’une alarme pour un bâtiment démoli ou remplacé, une ligne téléphonique inexistante, représentent un gaspillage de fonds publics et une entrave à la bonne gestion des ressources.
En dotant les microentreprises et les administrations de protections renforcées et de mécanismes clairs, cette proposition contribue à une économie plus transparente et équitable, tout en luttant contre les dépenses inutiles ou abusives.
L’article 1 organise les modalités de reconduction tacite lorsque le client est une microentreprise.
L’article 2 précise dans le code de la commande publique la nullité des mentions de tacite reconduction.
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proposition de loi
Article 1er
La section 1 du chapitre Ier du titre IV du livre IV du code du commerce est complétée par deux articles L. 441‑2‑1 et L. 441‑2‑2 ainsi rédigés :
« Art. L. 441‑2‑1. – Lorsque l’acheteur est une microentreprise au sens de l’article 51 de la loi n° 2008‑776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie et que les conditions générales de vente du fournisseur stipulent une clause de reconduction tacite, elles indiquent le canal utilisé pour la communication prévue à l’article L. 441‑2‑2 du présent code en recueillant son approbation pour l’utilisation de ce canal.
« Art. L. 441‑2‑2. – Lorsqu’un contrat stipulant une clause de reconduction tacite arrive à échéance, le fournisseur informe l’acheteur par écrit, lorsque celui‑ci est une microentreprise au sens de l’article 51 de la loi n° 2008‑776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, par lettre nominative ou courrier électronique dédiés, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu’il a conclu avec une clause de reconduction tacite. Cette information, délivrée dans des termes clairs et compréhensibles, mentionne, dans un encadré apparent, la date limite de non‑reconduction. »
Article 2
L’article L. 5 du code de la commande publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute clause impliquant une reconduction tacite est réputée non écrite. »