N° 1059
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 mars 2025.
PROPOSITION DE LOI
visant à instaurer une contribution forfaitaire obligatoire des détenus condamnés et incarcérés,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Christophe NAEGELEN,
député.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Selon la direction de l’administration pénitentiaire, la population carcérale s’établit au 1er décembre 2024 à 80 792 détenus, pour une capacité d’accueil de 62 404 places. La densité carcérale atteint ainsi 129,5 % en France, et près de 144,2 % en Outre‑mer. La situation serait bien pire encore, si l’on appliquait strictement les peines de prison prononcées par la justice, en attente d’exécution. En effet, au 1er janvier 2023, on dénombrait environ 88 000 peines d’emprisonnement ferme prononcées par les tribunaux correctionnels, en attente de mise à exécution.
Ce constat entraîne une propagation de la violence dans notre pays. D’une part en dehors des prisons, par l’absence de réponse pénale immédiate qui suscite un sentiment d’impunité chez les délinquants, et d’autre part par la surpopulation carcérale qui fait de la France, le troisième pays européen derrière Chypre et la Roumanie, présentant les taux de surpopulation carcérale les plus importants et inquiétants d’Europe. Surpopulation qui crée un climat de tension généré par la cohabitation contrainte entre des « petits » délinquants, des criminels, et parfois des terroristes.
Pour remédier à cette situation, il est nécessaire de maintenir le principe de privation de liberté, mais dans des conditions plus dignes et par la responsabilisation des détenus. Il faudrait donc construire plus de prisons, pour obtenir plus de places.
Ce programme a toutefois un coût qui doit être pris en charge au niveau de l’investissement par l’État, et une partie du fonctionnement par les détenus eux‑mêmes, condamnés et incarcérés en établissement pénitentiaire, au travers d’une contribution financière obligatoire adaptée aux moyens de chacun.
Sachant qu’un détenu coûte en moyenne 100 euros par jour (source : Observatoire international des prisons), il serait en effet intéressant d’introduire une participation pouvant atteindre 25 % pour les détenus disposant de revenus les plus importants, et moindre pour les détenus les plus précaires. En effet, tout citoyen amené à se faire soigner dans un établissement de santé, doit s’acquitter d’un forfait hospitalier, s’établissant depuis 2018 à 20 euros par jour, selon la caisse d’assurance maladie. Aussi, lorsqu’une personne âgée doit être placée en maison de retraite ou en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), si elle n’a pas les moyens de le faire, ses enfants doivent participer. Il serait donc juste et équitable que les détenus, s’acquittent eux aussi d’un forfait pour leur incarcération en établissement pénitentiaire, résultante de leur choix et de leur volonté propre.
Pour leur permettre d’acquitter cette contribution, trois formules peuvent être envisagées : le prélèvement sur les ressources personnelles du détenu condamné ou son patrimoine, à défaut sur les ressources financières ou le patrimoine de ses descendants et ascendants, ou enfin par le travail en prison. En 2024, selon les chiffres du ministère de la justice, seulement 31 % des personnes incarcérées travaillaient en prison.
Ainsi, l’objet de cette proposition de loi est d’instaurer une contribution obligatoire aux frais d’incarcération des détenus condamnés et incarcérés en établissement pénitentiaire, afin d’alléger le coût de fonctionnement des prisons pour le contribuable et l’État, mais également de responsabiliser et réinsérer les détenus.
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proposition de loi
Article 1er
L’article 23 de la loi n° 2009‑1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi rétabli :
« Lors de son admission dans un établissement pénitentiaire, la personne détenue est informée oralement, dans une langue compréhensible par elle, et par la remise d’un livret d’accueil, des dispositions relatives à son régime de détention, à ses droits et obligations et aux recours et requêtes qu’elle peut former. Les règles applicables à l’établissement sont également portées à sa connaissance et lui sont rendues accessibles pendant la durée de sa détention.
« Il est instauré une contribution forfaitaire pour chaque jour d’incarcération.
« Les détenus condamnés et incarcérés en établissement pénitentiaire s’acquittent de cette contribution sur leurs ressources personnelles ou leur patrimoine, à défaut sur les ressources financières ou le patrimoine de leurs descendants ou ascendants.
« Le montant de cette contribution est fixé par décret en Conseil d’État, et doit être adapté et échelonné aux situations financières de chaque détenu condamné et incarcéré en établissement pénitentiaire, pour atteindre 25 % maximum du coût moyen d’incarcération journalier. »
Article 2
L’article 27 de la loi n° 2009‑1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi rétabli :
« Toute personne condamnée est tenue d’exercer au moins l’une des activités qui lui est proposée par le chef d’établissement et le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation dès lors qu’elle a pour finalité la réinsertion de l’intéressé et est adaptée à son âge, à ses capacités, à son handicap et à sa personnalité.
« Lorsque la personne condamnée ne maîtrise pas les enseignements fondamentaux, l’activité consiste par priorité en l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul. Lorsqu’elle ne maîtrise pas la langue française, l’activité consiste par priorité en son apprentissage. L’organisation des apprentissages est aménagée lorsqu’elle exerce une activité de travail.
« L’administration pénitentiaire est tenue de proposer, à tout détenu majeur qui en fait la demande, un travail en atelier adapté à son âge et ses capacités intellectuelles et physiques. Ce travail est géré par l’intermédiaire du service de l’emploi pénitentiaire. »