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N° 1212
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er avril 2025.
PROPOSITION DE LOI
visant à abroger l’article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Thomas PORTES, Mme Mathilde PANOT, les membres du groupe La France insoumise - Nouveau Front Populaire [(1)],
députés et députées.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
« La force publique est instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée » – Article 12 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.
L’abolition de la peine de mort, adoptée en 1981 et inscrite dans notre Constitution en 2007, devait marquer une rupture définitive avec l’idée qu’un représentant de l’État puisse disposer du droit de vie ou de mort sur un citoyen.
Pourtant, force est de constater qu’un permis de tuer subsiste encore dans notre pays.
Le 27 juin 2023, à Nanterre, Nahel, un adolescent de 17 ans, a été abattu à bout portant par un policier pour un refus d’obtempérer, alors même que la vie de ce dernier n’était en aucun cas menacée. Les images de la scène, largement diffusées, ont provoqué une onde de choc à l’échelle nationale. L’émotion, mêlée de colère, a rapidement donné lieu à une vague de mobilisation et de révolte. Le 4 mars dernier, le parquet de Nanterre a requis un procès pour meurtre à l’encontre du policier responsable du tir.
Nahel n’est pas seulement un mort de trop. Il est un mort de plus.
Il suffit de remonter deux semaines plus tôt pour retrouver un cas similaire. Le 14 juin 2023, Alhoussein Camara, un jeune homme de 19 ans, a perdu la vie dans des circonstances tragiquement identiques, alors qu’il se rendait au travail, au volant de sa voiture, vers 4 heures du matin, dans l’agglomération d’Angoulême.
Avant lui, Rayana, une jeune femme de 21 ans, a été tuée d’une balle dans la tête tirée par un policier dans le quartier de Barbès, alors qu’elle était passagère d’un véhicule dont le conducteur avait refusé d’obtempérer.
Avant elle, Jean‑Paul Benjamin a vu son omoplate perforée par une balle, traversant plusieurs organes vitaux avant de se loger dans son foie.
Avant lui, les deux frères Boubacar et Fadjigui, âgés respectivement de 31 et 25 ans, ont été tués à Paris lors d’un contrôle de police au niveau du Pont‑Neuf.
Avant eux, Souheil El Khalfaoui, un jeune père de famille de 19 ans, a perdu la vie au volant de sa voiture, abattu par un policier lors d’un contrôle routier.
En 2020, un policier de la BAC a tué Olivio Gomes, âgé de 28 ans, père de trois enfants, de trois balles, tirées en bas de son domicile à Poissy.
Mais aussi, Omar, Adam, Amine, Zyed, Inès, Amine, et tant d’autres. Une liste, loin d’être exhaustive, de vies brisées, de conducteurs ou passagers de véhicules qui n’auront jamais l’opportunité de défendre leurs droits devant un juge : ils ont été abattus par la police, pour un refus d’obtempérer.
Certains ont miraculeusement survécu. Tel est le cas de Nordine Ali‑Benyahia, en août 2021, lorsqu’à Stains, deux policiers de la BAC ont ouvert le feu, tirant 16 balles, dont 7 l’ont atteint, touchant la passagère Merryl, lui faisant perdre leur enfant qu’elle portait. Nordine a été condamné à deux ans de prison ferme pour refus d’obtempérer, tandis que trois ans plus tard, les policiers ont été condamnés à quatre ans de prison avec sursis. Cette décision repose sur un raisonnement clé : les magistrats ont estimé que les policiers, ayant tiré huit balles en six secondes, « ne pouvaient se prévaloir de l’article L. 435‑1 du code de sécurité intérieure », car ils n’étaient ni en uniforme ni munis d’insignes visibles lors de l’intervention.
L’application de l’article L. 435‑1 du code de sécurité intérieure aurait‑elle conduit à exonérer ces policiers de toute responsabilité ?
Il est incontestable que l’augmentation des tirs mortels des forces de l’ordre sur des véhicules en mouvement n’est pas un phénomène fortuit. Ce permis de tuer, accordé pour un simple refus d’obtempérer, trouve son fondement dans l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure, instauré par la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique. Cette loi est le résultat dramatique d’un choix du législateur en 2017, impulsé par le gouvernement de M. Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur. Sous la pression des syndicats policiers d’extrême droite et dans un contexte sécuritaire marqué par les attentats du 13 novembre 2015, puis celui du 14 juillet 2016 à Nice, la loi du 28 février 2017 a introduit l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure. Son objectif prétendu était de clarifier et d’harmoniser les règles régissant l’usage des armes par l’ensemble des forces de l’ordre, qu’elles relèvent de la police ou de la gendarmerie. Pourtant, cette surenchère politique et syndicale a poussé le Parlement à mettre un véritable « permis de tuer » entre les mains des policiers.
L’objectif de cette proposition de loi est clair : empêcher qu’un refus d’obtempérer ne conduise à une sentence irrévocable, infligée par un policier sous forme de peine de mort.
La loi de 2017 a opéré un glissement de la légitime défense vers un régime d’exception, facilitant l’usage des armes par les forces de l’ordre.
Si cette réforme n’a pas fondamentalement modifié le régime juridique auquel les gendarmes sont soumis depuis plus d’un siècle, elle a en revanche profondément bouleversé les conditions d’usage des armes à feu par les agents de la police nationale. Désormais, ces derniers peuvent ouvrir le feu dans des situations dépassant largement le cadre strict du droit commun de la légitime défense, tel que défini par l’article 122‑5 du code pénal.
Avant cette réforme, les policiers étaient soumis, comme tout citoyen, aux principes de la légitime défense définis par l’article L. 122‑5 du code pénal. Ce dernier dispose qu’une personne ne peut être pénalement responsable si elle agit pour sauver sa vie ou celle d’autrui, en cas de danger immédiat et réel, sous plusieurs conditions strictement encadrées par la loi.
Désormais, ces derniers peuvent ouvrir le feu dans des situations dépassant largement le cadre strict du droit commun.
Sous couvert d’assurer une meilleure protection des forces de l’ordre, l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure a en réalité introduit une logique dangereuse, où l’appréciation subjective du danger remplace l’exigence d’attester d’un péril imminent et avéré pour tirer. En facilitant le recours aux armes létales sur la base d’une menace hypothétique, il remet en cause les principes fondamentaux « d’absolue nécessité » et de « stricte proportionnalité » qui devraient encadrer toute action policière.
Les conséquences sont dramatiques. Depuis son adoption en 2017, cette disposition a entraîné une explosion des tirs mortels contre les conducteurs et passagers de véhicules. Loin d’être un simple ajustement législatif, elle a profondément fragilisé les deux conditions légales d’ouverture du feu, à savoir l’« absolue nécessité » et la « stricte proportionnalité », en donnant aux policiers un pouvoir d’appréciation excessif, détaché de la réalité des menaces auxquelles ils sont confrontés.
Particulièrement préoccupants, les 3° et 4° de l’article L. 435‑1 permettent aux forces de l’ordre de tirer sur des individus en fuite dès lors qu’ils sont « susceptibles de perpétrer, dans leur fuite, des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d’autrui », une formulation floue qui légitime des interventions disproportionnées et potentiellement arbitraires. En instaurant une incertitude juridique majeure, cette réforme ne clarifie ni n’harmonise le régime applicable aux gendarmes et policiers : elle ouvre au contraire la voie à des dérives incompatibles avec les principes démocratiques et l’intérêt général.
La Cour européenne des droits de l’Homme est sans équivoque : toute interprétation qui permettrait l’usage des armes uniquement pour empêcher la fuite d’un individu, y compris s’il est soupçonné de meurtre, mais sans qu’aucun élément ne laisse penser qu’il pourrait réitérer son acte, serait contraire à l’exigence de nécessité posée par la Cour européenne des droits de l’Homme ([1]).
Plus fondamentalement, une telle conception de l’usage des armes heurte les principes mêmes d’un ordre démocratique et républicain : les armes ne sauraient se substituer à la loi, qui seule est l’expression de la souveraineté populaire ([2]).
En pratique, l’application des règles prévues par l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure revient à introduire une forme inédite de « légitime défense anticipative », fondée sur un pronostic du comportement futur des individus refusant d’obtempérer. Dès lors, tout refus d’obtempérer peut légitimer l’ouverture du feu, dès lors que les forces de l’ordre estiment ‑ selon leur propre appréciation subjective ‑ que le fugitif représente un danger pour elles‑mêmes ou pour autrui.
Dans son avis du 17 janvier 2017, le Défenseur des droits s’est fermement opposé à cette évolution législative, soulignant les risques d’un usage accru des armes à feu :
« […] le projet de loi complexifie le régime juridique de l’usage des armes, en donnant le sentiment d’une plus grande liberté pour les forces de l’ordre, au risque d’augmenter leur utilisation, alors que les cas prévus sont couverts par le régime général de la légitime défense et de l’état de nécessité, dès lors que l’usage de la force doit être nécessaire et proportionné, conformément aux exigences de l’article 2 la Convention européenne des droits de l’Homme » ([3]).
Alors même que les sanctions réprimant les refus d’obtempérer se sont durcies, la loi du 24 janvier 2022 ayant doublé les peines encourues jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende, un véritable blanc‑seing a été accordé aux forces de l’ordre pour ouvrir le feu, en violation des standards européens. Si le premier alinéa de l’article L. 435‑1 affirme le respect des principes d’« absolue nécessité » et de « stricte proportionnalité », des chercheurs, à l’instar de Sebastian Roché, directeur de recherche au CNRS, ont mis en évidence le caractère illusoire de ces garanties en raison de la formulation des 3° et 4° de cet article. Comme ils l’analysent :
« Peut‑être les élus croyaient‑ils que les principes supérieurs de proportionnalité et d’absolue nécessité allaient prévaloir et encadrer cette liberté plus grande de tirer ? Si tel est le cas, ils se sont trompés, et c’est la règle la moins haute dans la hiérarchie des normes qui a finalement prévalu. » ([4]).
Face à la dangerosité et à l’inefficacité de ce cadre juridique, il est impératif d’abroger l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure.
Nous appelons à un retour au régime de droit commun, dans lequel la possibilité d’ouvrir le feu s’exerce dans des conditions strictes de la légitime défense, prévues par l’article L. 122‑5 du code pénal et interprétées strictement par la jurisprudence. Les policiers agiront ainsi dans le respect strict de la légitime défense, comme ils l’ont toujours fait avant la loi du 28 février 2017, et, à l’instar de chaque citoyenne et chaque citoyen, sous le contrôle vigilant de la justice.
La loi de 2017 est le fruit d’une stratégie sécuritaire aussi inefficace que meurtrière.
Inefficace, car elle ne parvient aucunement à enrayer la hausse des refus d’obtempérer constatée ces dernières années, alors même que plus de quatre sur cinq ne présentent aucun caractère dangereux, selon les chiffres de la sécurité routière.
Meurtrière, car son bilan humain est accablant. L’entrée en vigueur de l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure a entraîné une augmentation immédiate et incontestable du nombre de tirs mortels à la suite de refus d’obtempérer. Les chiffres officiels de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) sont édifiants : depuis la loi Cazeneuve, les tirs sur les véhicules en mouvement ont bondi de 35 %. Pire encore, entre 2012‑2017 et 2017‑2022, non seulement le nombre de tirs a nettement augmenté, mais le nombre de tirs mortels a été multiplié par près de cinq.
La France détient désormais un sinistre record en Europe. À titre de comparaison, l’Allemagne a enregistré un seul tir mortel pour refus d’obtempérer en dix ans.
L’étude statistique menée par les chercheurs Sebastian Roché, Paul Le Derff et Simon Varaine ([5]) en apporte une démonstration implacable : la hausse du nombre de tirs mortels depuis 2017 est indubitable et, pour l’essentiel, imputable aux forces de police, comme le confirme une analyse comparative approfondie.
La protection du droit à la vie de toutes les citoyennes et citoyens impose de mettre un terme à cette fuite en avant sécuritaire qui perdure.
La situation est aggravée par les multiples dérives qui affectent l’institution policière.
Le corporatisme acharné des syndicats représentatifs de la police nationale ne parvient pas à dissimuler les défaillances systémiques qui gangrènent l’institution. L’assouplissement des conditions d’usage des armes constitue ainsi un danger accru, d’autant plus que la formation au tir demeure gravement déficiente au sein de la police. En effet, la Cour des comptes a souligné que « la formation des professionnels est contrariée […] en 2017, la majorité des policiers (51 %) n’avait pas bénéficié de ces trois séances réglementaires, ce qui traduit une dégradation par rapport aux années récentes » ([6]).
L’impact de cette évolution législative ne peut être analysé indépendamment du système policier dans lequel elle s’applique : un système profondément ancré dans un racisme systémique et marqué par les violences policières.
Cet appel à une réforme urgente s’inscrit dans une prise de conscience croissante des dérives racistes au sein de la police.
Il est impératif d’examiner les profils des jeunes décédés, de regarder leurs noms, leur couleur de peau : ce sont principalement des personnes racisées, noires ou arabes, dont les vies ont été fauchées.
En janvier 2017, le Défenseur des droits a rendu publique une enquête sur les « relations police‑population », qui met en lumière la réalité de la pratique policière des contrôles d’identité, systématiquement dirigée contre les jeunes hommes issus des minorités visibles. Selon les résultats de cette enquête, « 80 % des personnes correspondant au profil de “jeune homme perçu comme noir ou arabe” déclarent avoir été contrôlées dans les cinq dernières années, comparé à seulement 16 % pour le reste des enquêtés ». Ce constat révèle que ces profils sont ainsi « vingt fois plus » susceptibles d’être soumis à un contrôle, une disproportion choquante et systématique.
En décembre 2022, le Comité de l’Organisation des Nations-unies (ONU) pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) a exprimé son inquiétude face aux « interpellations discriminatoires […] ciblant de manière disproportionnée certaines minorités » par les forces de l’ordre françaises.
À la suite de la mort de Nahel, Madame Ravina Shamdassani, porte‑parole de la Haut‑Commissaire aux droits de l’Homme de l’Organisation des Nations unies (ONU), avait déclaré que « la France doit s’attaquer sérieusement aux profonds problèmes de racisme et de discrimination parmi les forces de l’ordre ».
Ainsi, dans ce contexte, où l’ONU presse la France d’agir face aux « problèmes profonds » de racisme au sein de ses forces de l’ordre, l’insécurité juridique et la place laissée à l’interprétation subjective des policiers par l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure deviennent d’autant plus préoccupantes.
C’est pourquoi nous considérons cette proposition de loi comme un premier pas décisif vers une réforme plus large, nécessaire et indispensable, de notre police.
Par ailleurs, cette proposition de loi se veut un moyen de rendre justice, à l’échelle législative, en reconnaissant le sacrifice et la détermination des familles de victimes dans leur quête inlassable de justice et de vérité. Ce combat, pour les familles, est souvent un véritable sacrifice.
Les victimes tuées suites à un refus d’obtempérer se voient systématiquement criminalisées, décrédibiliser, attaquées dans leur honneur et leur réputation, la machine politico‑médiatique soutenue par les syndicats policiers et l’extrême droite s’efforçant de justifier les actes policiers et de défendre leur présomption de légitime défense.
Face à des défis insurmontables, les familles se battent pour une justice souvent insaisissable. Les familles témoignent toutes des innombrables obstacles procéduraux qui entravent leur quête de vérité. Les entraves imposées par la police aux demandes légitimes des familles, telles que l’accès aux images de vidéosurveillance ou la réalisation de contre‑expertises et de reconstitutions, soulèvent des interrogations profondes sur le traitement judiciaire des violences policières. Ces dernières, souvent couvertes par une omerta et un entre‑soi, laissent la justice dans une situation d’impuissance flagrante. L’accès aux reconstitutions est entravé, obligeant les familles à faire appel à des organes indépendants pour mener de véritables investigations.
L’autorité de poursuite elle‑même est étroitement liée aux acteurs incriminés : l’IGPN oriente tendanciellement les enquêtes vers la thèse de l’homicide involontaire. En 2021, parmi les 836 dépositaires de l’autorité publique mis en cause pour violences volontaires, cinq sur six ont été classés sans suite, soit le double de la moyenne générale. Ce constat est d’autant plus choquant que leur statut de fonctionnaire devrait constituer une circonstance aggravante en cas de violences, et non une circonstance atténuante comme cela semble être le cas en pratique.
Les non‑lieux, perçus comme une véritable "double peine", alimentent encore plus l’injustice. Ainsi, selon Basta !, en juillet 2022, sur les 38 personnes tuées après un refus d’obtempérer, seule une poignée d’affaires ont abouti à une condamnation des policiers impliqués : deux peines de sursis et une condamnation à 5 ans de prison, dont 3 avec sursis.
Ce texte représente ainsi une opportunité de rendre un début de justice aux familles qui ont perdu un être cher. Il s’inscrit dans un combat soutenu par de nombreux collectifs de familles et associations de défense des droits humains, dont la Ligue des droits de l’Homme ([7]).
La multiplication d’événements tragiques, qui suscitent la tristesse et la colère légitimes des familles, des quartiers populaires et de la majorité des citoyennes et citoyens, nous incite à vouloir adopter cette mesure urgente et nécessaire.
Elle représenterait un signal fort, marquant le souhait de mettre un terme à une spirale de violences qui a déjà coûté la vie à trop de victimes innocentes. Elle doit s’inscrire dans une réforme en profondeur du système policier, visant à en éradiquer les dérives. Elle devrait notamment s’accompagner de la suppression de l’IGPN et la mise en place d’un organe de contrôle externe, indépendant, disposant des moyens nécessaires pour mener des enquêtes approfondies et impartiales sur les violences policières, et ainsi garantir justice pour les citoyennes et citoyens victimes d’abus.
Sacrifier le droit à la vie, protégé par l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’Homme, ne renforcera jamais la sécurité.
Le refus d’obtempérer constitue un délit, certes. Mais un délit justifie‑t‑il que l’on mette une vie en jeu ? Peut‑on continuer à fermer les yeux sur la réalité évidente de dérives meurtrières engendrées par la législation actuelle ?
Combien de collectifs « justice pour », de collectifs « vérité pour » faudra‑t‑il encore pour obtenir la suppression de ce permis de tuer ?
Nous demandons l’abrogation immédiate de l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure. C’est le sens de cette proposition de loi.
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proposition de loi
Article unique
I. – Au dernier alinéa de l’article L. 227‑1 du code pénitentiaire, les mots : « ainsi que dans ceux prévus par les dispositions des 1° et 2° de l’article L. 435‑1 du code de la sécurité intérieure » sont supprimés.
II. – Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Le chapitre V du titre III du livre IV est abrogé ;
2° L’article L. 511‑5‑1 est abrogé.
III. – L’article L. 2338‑3 du code de la défense est ainsi rédigé :
« Art. L. 2338‑3. – Les officiers et sous‑officiers de gendarmerie ne peuvent, en l’absence de l’autorité judiciaire ou administrative, déployer la force armée que dans les cas suivants :
« 1° Lorsque des violences ou des voies de fait sont exercées contre eux ou lorsqu’ils sont menacés par des individus armés ;
« 2° Lorsqu’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent, les postes ou les personnes qui leur sont confiés ou, enfin, si la résistance est telle qu’elle ne puisse être vaincue que par la force des armes ;
« 3° Lorsque les personnes invitées à s’arrêter par des appels répétés de "Halte gendarmerie" faits à haute voix cherchent à échapper à leur garde ou à leurs investigations et ne peuvent être contraintes de s’arrêter que par l’usage des armes ;
« 4° Lorsqu’ils ne peuvent immobiliser autrement les véhicules, embarcations ou autres moyens de transport dont les conducteurs n’obtempèrent pas à l’ordre d’arrêt.
« Les militaires mentionnés au premier alinéa et les volontaires dans les armées, en service au sein de la gendarmerie sont également autorisés à faire usage de tous engins ou moyens appropriés tels que herses, hérissons, câbles, pour immobiliser les moyens de transport quand les conducteurs ne s’arrêtent pas à leurs sommations. »
([1]) Cour européenne des droits de l'Homme, Guerdner et autres c. France, arrêt du 17 avril 2014.
([2]) Rapport de la mission relative au cadre légal de l’usage des armes par les forces de sécurité, novembre 2016, p. 60.
([3]) Défenseur des droits, avis n° 17-01 du 16 janvier 2017.
([4]) Sebastian Roché, Paul Le Derff et Simon Varaine, Revue Esprit, Refus d’obtempérer, septembre 2022.
([5]) Sebastian Roché, Paul Le Derff et Simon Varaine, Revue Esprit, Refus d’obtempérer, septembre 2022.
([6]) Cour des comptes, L’équipement des forces de l’ordre : un effort de mutualisation à poursuivre, mai 2018, p. 117).
([7]) Ligue des Droits de l'Homme, Note d'analyse et proposition sur l'usage des armes, novembre 2023.
[(1)](1) Ce groupe est composé de : Mme Nadège ABOMANGOLI, M. Laurent ALEXANDRE, M. Gabriel AMARD, Mme Ségolène AMIOT, Mme Farida AMRANI, M. Rodrigo ARENAS, M. Raphaël ARNAULT, Mme Anaïs BELOUASSA-CHERIFI, M. Ugo BERNALICIS, M. Christophe BEX, M. Carlos Martens BILONGO, M. Manuel BOMPARD, M. Idir BOUMERTIT, M. Louis BOYARD, M. Pierre-Yves CADALEN, M. Aymeric CARON, M. Sylvain CARRIÈRE, Mme Gabrielle CATHALA, M. Bérenger CERNON, Mme Sophia CHIKIROU, M. Hadrien CLOUET, M. Éric COQUEREL, M. Jean-François COULOMME, M. Sébastien DELOGU, M. Aly DIOUARA, Mme Alma DUFOUR, Mme Karen ERODI, Mme Mathilde FELD, M. Emmanuel FERNANDES, Mme Sylvie FERRER, M. Perceval GAILLARD, Mme Clémence GUETTÉ, M. David GUIRAUD, Mme Zahia HAMDANE, Mme Mathilde HIGNET, M. Andy KERBRAT, M. Bastien LACHAUD, M. Abdelkader LAHMAR, M. Maxime LAISNEY, M. Arnaud LE GALL, M. Aurélien LE COQ, M. Antoine LÉAUMENT, Mme Élise LEBOUCHER, M. Jérôme LEGAVRE, Mme Sarah LEGRAIN, Mme Claire LEJEUNE, Mme Murielle LEPVRAUD, Mme Élisa MARTIN, M. Damien MAUDET, Mme Marianne MAXIMI, Mme Marie MESMEUR, Mme Manon MEUNIER, M. Jean-Philippe NILOR, Mme Sandrine NOSBÉ, Mme Danièle OBONO, Mme Nathalie OZIOL, Mme Mathilde PANOT, M. René PILATO, M. François PIQUEMAL, M. Thomas PORTES, M. Loïc PRUD’HOMME, M. Jean-Hugues RATENON, M. Arnaud SAINT-MARTIN, M. Aurélien SAINTOUL, Mme Ersilia SOUDAIS, Mme Anne STAMBACH-TERRENOIR, M. Aurélien TACHÉ, Mme Andrée TAURINYA, M. Matthias TAVEL, Mme Aurélie TROUVÉ, M. Paul VANNIER.