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N° 1213

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er avril 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à redéfinir le rôle de l’éducation nationale dans le domaine de la vie affective et sexuelle des élèves,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Roger CHUDEAU, Mme Marie-France LORHO, M. Kévin MAUVIEUX, M. Hervé DE LÉPINAU, Mme Stéphanie GALZY, M. Romain TONUSSI, Mme Tiffany JONCOUR, Mme Michèle MARTINEZ, M. Antoine VILLEDIEU, M. Nicolas MEIZONNET, M. José BEAURAIN, M. Sébastien HUMBERT, M. Philippe BALLARD, M. Frédéric FALCON, Mme Yaël MÉNACHÉ, Mme Sandrine DOGOR-SUCH, M. René LIORET, Mme Béatrice ROULLAUD, M. Jordan GUITTON, M. Christian GIRARD, Mme Florence GOULET, M. Jérôme BUISSON, M. Kévin PFEFFER, M. Jorys BOVET, M. Lionel TIVOLI, M. Emeric SALMON, M. Robert LE BOURGEOIS, M. Antoine GOLLIOT, M. Frédéric BOCCALETTI, M. Philippe LOTTIAUX, M. Christophe BENTZ, M. Christophe BARTHÈS, Mme Claire MARAIS-BEUIL, M. Frank GILETTI, Mme Katiana LEVAVASSEUR, Mme Géraldine GRANGIER, M. Emmanuel FOUQUART, Mme Laure LAVALETTE, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, Mme Manon BOUQUIN, Mme Julie LECHANTEUX, Mme Caroline PARMENTIER, M. Julien LIMONGI, Mme Lisette POLLET, Mme Catherine RIMBERT, Mme Florence JOUBERT, Mme Edwige DIAZ, M. Stéphane RAMBAUD, Mme Sophie BLANC, M. Maxime MICHELET, Mme Christelle D’INTORNI, Mme Bénédicte AUZANOT, M. Auguste EVRARD, M. Emmanuel BLAIRY, Mme Laurence ROBERT-DEHAULT, M. Alexandre SABATOU, Mme Joëlle MÉLIN, M. Romain BAUBRY, M. Marc CHAVENT, Mme Pascale BORDES, M. Guillaume BIGOT, M. Frédéric-Pierre VOS, M. Philippe SCHRECK, Mme Brigitte BARÈGES, M. Éric MICHOUX, M. Aurélien LOPEZ-LIGUORI, M. Julien GABARRON, M. Thibaut MONNIER, Mme Anne SICARD, M. Eddy CASTERMAN,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’éducation à la sexualité est devenue obligatoire à partir de la loi n° 2001‑588 du 4 juillet 2001. L’article L. 312‑16 du code de l’éducation prévoit « qu’une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles et par groupes d’âge homogène ».

La loi de 2001 affiche trois objectifs principaux : la prévention des risques liés aux comportements sexuels, notamment les infections sexuellement transmissibles et les grossesses précoces ; la promotion de l’égalité entre les sexes et le respect mutuel et la lutte contre les stéréotypes sexistes et les violences sexuelles.

La circulaire n° 2018‑111 du 12 septembre 2018 de M. Jean‑Michel Blanquer précise les objectifs et le cadre de mise en œuvre de l’éducation à la sexualité.

Malgré l’évolution du cadre juridique, la mise en place de ces trois séances à la vie affective et sexuelle est entravée, en pratique, par plusieurs difficultés.

D’abord, le déficit de personnels et son manque de formation : avec seulement 900 médecins scolaires et une insuffisance critique d’infirmiers et de psychologues scolaires dans les établissements, les programmes sont déployés dans les établissements de façon très variable et inégales sur le territoire. En l’absence de personnels formés, l’éducation à la sexualité est le plus souvent confiée à des intervenants extérieurs, en l’occurrence des associations agréées par le ministère de l’éducation nationale.

La seconde difficulté tient à l’absence de contrôle sur la manière dont les programmes d’éducation affective et sexuelle sont réellement appliqués par les associations. Malgré les circulaires ministérielles, ces séances donnent lieu parfois à des interprétations idéologiques éloignées des objectifs initiaux de la loi.

Plusieurs associations, comme SOS Éducation ou le Syndicat de la famille, se font les porte‑parole de l’inquiétude des parents d’élèves ou des professionnels de l’enfance et alertent sur le caractère manifestement inapproprié et déplacé de certains contenus explicites auxquels seraient exposés les plus jeunes élèves. Ces associations mettent en garde contre la non prise en compte de l’âge, de la sensibilité et du développement psychoaffectif des enfants dans la présentation de la sexualité.

En l’absence de contrôle, certaines associations interviennent dans les classes pour y présenter des discours clairement militants, où elles font profession d’enseigner la théorie du genre ou de promouvoir la transidentité, sans s’appuyer sur aucun consensus scientifique ou pédagogique.

Enfin, la dernière difficulté tient au manque de concertation parentale. Les parents sont souvent insuffisamment informés des contenus enseignés ou des intervenants, ce qui nourrit une défiance croissante des parents vis‑à‑vis de l’institution scolaire. Et l’on comprend légitimement les réticences des parents lorsqu’ils ont l’impression que l’éducation nationale s’immisce dans l’intimité de leurs enfants.

Le problème de fond posé par l’« éducation à la vie affective et sexuelle » tient au terme même d’ « éducation ». Les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Et la finalité première de l’État n’est pas d’éduquer mais d’instruire, c’est‑à‑dire de transmettre des connaissances. Par conséquent, l’État n’a pas vocation à se substituer à la famille dans l’éducation, a fortiori dans la vie personnelle de leurs enfants.

La vie affective et sexuelle relève de la sphère privée et de la construction personnelle des individus. A ce titre, l’école doit rester neutre. Il n’est pas acceptable que l’éducation nationale donne l’impression d’empiéter sur le droit des parents à éduquer leurs enfants comme ils l’entendent. N’oublions cet avertissement de Jules Ferry dans sa « Lettre aux instituteurs » : « Vous êtes l’auxiliaire et, à certains égards, le suppléant du père de famille […]. Au moment de proposer aux élèves un précepte, une maxime quelconque, demandez‑vous s’il se trouve à votre connaissance un seul honnête homme qui puisse être froissé de ce que vous allez dire. »

Si l’État n’a pas pour mission d’éduquer, il a, en revanche, le devoir d’informer. Nous proposons de recentrer le rôle de l’État en transformant l’éducation à la sexualité en une information relative à la sexualité. Pour répondre aux enjeux de santé publique, cette information comprend une politique de prévention des risques liés à la sexualité et des violences sexuelles, fondée sur des données factuelles et scientifiques.

Transformer l’éducation à la sexualité en une information, c’est garantir la neutralité de l’éducation nationale quant à la vie privée des élèves et le respect des sensibilités morales, culturelles et religieuses des familles. C’est aussi reconnaître, par la loi, le rôle central des familles en offrant à leurs enfants un cadre protecteur et transparent, susceptible de dissiper toute forme de méfiance vis‑à‑vis de l’institution scolaire.

Au fil des décennies, les pouvoirs publics, pour répondre à des injonctions sociales de plus en plus fortes, ont assigné à l’école de nouvelles missions. Cela s’est traduit par une multiplication des « éducations à » : sexualité, développement durable, santé, etc. Si bien que le code de l’éducation possède aujourd’hui plus de 70 priorités !

À mesure que s’est élargi le champ d’intervention de l’école s’est réduite la performance du système à assurer sa mission première : apprendre aux élèves à lire, écrire et compter. Rappelons qu’en 2022, un élève sur deux à l’entrée en 6è ne sait pas lire et écrire de façon fluide. D’après les tests réalisés lors des journées Défense et citoyenneté, un élève sur dix est en situation de quasi‑illettrisme à sa sortie du système scolaire.

L’urgence est‑elle pas à mettre fin à cette inflation des enseignements périphériques et à recentrer de l’école sur sa finalité principale ?

L’objet de la présente proposition de loi est de redéfinir le rôle de l’éducation nationale dans le domaine de la vie affective et sexuelle des élèves.

Cette proposition a plusieurs objectifs :

– limiter le rôle de l’État à une information concernant la vie affective et sexuelle plutôt qu’à une éducation ;

– interdire l’intervention d’associations extérieures et garantir que l’information est donnée par des personnels de l’éducation nationale dotés d’une solide formation en matière de psychologie de l’enfance.

 


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proposition de loi

Article 1er

Le premier alinéa de l’article L. 312‑16 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° La première phrase est ainsi modifiée :

a) Les mots : « et une éducation » sont remplacés par le mot : « relative » ;

b) Les mots : « sont dispensés » sont remplacés par les mots : « est dispensée » ;

c) Les mots : « collèges et » sont remplacés par le mot : « collèges, » ;

d) Après le mot : « lycées », sont insérés les mots : « et les centres de formation d’apprentis » ;

2° L’avant‑dernière phrase est remplacée par trois phrases ainsi rédigées : « Elles assurent une prévention aux agressions pédocriminelles. Elle comprend également la prévention des risques liés à la sexualité à partir du second degré. Elles sont dispensées par les médecins, les infirmiers, les psychologues de l’éducation nationale. » ;

3° La dernière phrase est ainsi rédigée : « Les conseillers principaux d’éducation et enseignants dûment formés peuvent assurer ces séances. »

Article 2

I.  La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

II.  La charge pour les collectivités est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.