– 1 –
N° 1329
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 avril 2025.
PROPOSITION DE LOI
relative à la mise en place d’une taxe sur la valeur ajoutée circulaire,
(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Stéphane DELAUTRETTE, Mme Véronique RIOTTON, M. David TAUPIAC, M. Nicolas THIERRY, Mme Anne-Cécile VIOLLAND, Mme Farida AMRANI, M. Fabrice BARUSSEAU, Mme Béatrice BELLAY, M. Karim BENBRAHIM, M. Christophe BEX, M. Mickaël BOULOUX, M. Joël BRUNEAU, M. Pierre-Yves CADALEN, M. Michel CASTELLANI, Mme Sophia CHIKIROU, M. Mickaël COSSON, M. Pierrick COURBON, M. Alain DAVID, M. Arthur DELAPORTE, M. Inaki ECHANIZ, M. Denis FÉGNÉ, M. Emmanuel FERNANDES, Mme Pascale GOT, M. Emmanuel GRÉGOIRE, M. David GUIRAUD, Mme Ayda HADIZADEH, Mme Catherine HERVIEU, Mme Chantal JOURDAN, Mme Marietta KARAMANLI, Mme Sandrine LE FEUR, Mme Karine LEBON, Mme Élise LEBOUCHER, M. Stéphane LENORMAND, M. Gérard LESEUL, Mme Delphine LINGEMANN, M. Damien MAUDET, M. Emmanuel MAUREL, Mme Marianne MAXIMI, Mme Estelle MERCIER, Mme Sandrine NOSBÉ, M. Jacques OBERTI, M. Laurent PANIFOUS, Mme Sophie PANONACLE, Mme Sophie PANTEL, Mme Constance DE PÉLICHY, M. René PILATO, M. François PIQUEMAL, Mme Christine PIRÈS BEAUNE, M. Dominique POTIER, M. Nicolas RAY, Mme Valérie ROSSI, Mme Claudia ROUAUX, Mme Sandrine RUNEL, Mme Isabelle SANTIAGO, M. Thierry SOTHER, Mme Andrée TAURINYA, M. Matthias TAVEL, Mme Mélanie THOMIN, M. Boris VALLAUD, Mme Corinne VIGNON, M. Jean-François COULOMME, Mme Mathilde HIGNET, M. Hubert OTT, Mme Eva SAS, M. Maxime LAISNEY, Mme Sarah LEGRAIN, M. Boris TAVERNIER,
députés et députées.
– 1 –
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Près de cinq ans après l’adoption de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC), le passage d’une économie linéaire à une économie circulaire peine à se matérialiser. Pourtant, face au double défi que représentent la réindustrialisation notre pays et l’impérative décarbonation de notre économie, le modèle circulaire apporte une réponse efficace qui combine sobriété, préservation du pouvoir d’achat et attractivité économique dans nos territoires.
Pilier de la transition vers une économie circulaire, le secteur de la réparation est aujourd’hui en grande souffrance. Confrontés à des difficultés croissantes dues à un modèle économique peu rentable, à une profession qui vieillit et à une activité qui stagne, le nombre de réparateurs a considérablement chuté au cours des vingt dernières années. Or, sans force vive au plus près des utilisateurs, la réparation ne peut pas jouer pleinement le rôle qui lui est accordé par les pouvoirs publics dans la transition vers un modèle circulaire. Sans cordonnier, couturier, réparateur, aucun produit, même éco‑conçu pour être réparé, ne pourra l’être.
Un soutien d’envergure au secteur de la réparation est donc aujourd’hui indispensable si l’on veut rallonger la durée de vie des produits. Si le bonus réparation et l’indice de réparabilité, créés respectivement par les articles 16 et 62 de la loi AGEC, ont rencontré un succès auprès des consommateurs français, comme démontré dans le rapport d’évaluation de la loi AGEC présenté en commission du développement durable le 29 mai 2024, force est de constater que les pertes de savoir‑faire et de compétences que nous connaissons ces dernières années sont un frein réel au développement des mesures de soutien à la réparation des produits.
La proposition 78 du rapport d’évaluation de la loi AGEC, conduit par M. Stéphane Delautrette et Mme Véronique Riotton propose donc la mise en place d’une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) circulaire sur les opérations de réparation de l’électroménager, des chaussures et articles en cuir et des vêtements et du linge de maison.
Cette proposition s’appuie sur le rapport « Proposition pour la mise en place d’une TVA circulaire », rédigé par Mme Emmanuelle Ledoux et M. Emery Jacquillat, à la suite d’une demande du Parlement et remis en novembre 2023, à M. Christophe Béchu, ministre chargé de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Cette mission visait à évaluer la mise en place d’un dispositif de TVA circulaire pour rendre plus compétitifs les produits permettant de diminuer les externalités négatives en matière environnementale, ou de santé publique.
Aujourd’hui, les taux de TVA sont encadrés au niveau européen par la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. Son annexe III précise la liste des biens et des prestations de service pouvant faire l’objet de taux réduit. Depuis 2022, sont notamment inclus « les prestations de services de réparation d’appareils ménagers, chaussures et articles en cuir, vêtements et linge de maison (y compris les travaux de raccommodage et de modification) ». Le rapport précité précise qu’au sein de l’Union européenne, 12 États membres ont d’ores et déjà mis en place une TVA à taux réduit sur la réparation. La France apparaît donc à la traîne au niveau européen sur le soutien à la réparation par la TVA. Il y est par ailleurs indiqué que « sans cette fondation solide que constitue la TVA circulaire, les autres mesures mises en œuvre comme le bonus réparation et l’indice de réparabilité n’auront qu’un impact superficiel sur l’activité économique des réparateurs ». Cette proposition de TVA à 5,5 % sur la réparation correspond donc parfaitement avec le cadre européen et mettrait la France au même niveau que plusieurs pays voisins qui ont déjà mis en place une TVA réduite pour les activités de réparation.
L’objectif principal d’une modification des taux de TVA, telle que proposée par la présente proposition de loi, est de soutenir l’économie circulaire, non pas en agissant sur la demande, mais au contraire en agissant sur l’offre afin d’augmenter les marges des entreprises et ainsi rendre ces activités profitables. A l’heure où de nombreux artisans, comme les cordonniers, ferment aux quatre coins du territoire hexagonal créant de véritables déserts de service, un abaissement de la TVA permettrait de leur redonner de la compétitivité et d’assurer un meilleur rendement de leurs activités. Le rapport « Proposition pour la mise en place d’une TVA circulaire » précise en effet que « les marges dégagées iront pour partie dans la soutenabilité du modèle économique des activités de réparation et dans la revalorisation des salaires, renforçant ainsi l’attractivité du métier »
Ce coup de pouce au secteur de la réparation est impératif, car sans un maillage fin du territoire, la réparation ne pourra se développer, les consommateurs préférant acheter un nouveau produit neuf au lieu de faire réparer le produit existant. C’est donc une mesure indispensable pour préserver des emplois locaux, durables et non délocalisables.
Evidemment cet effort ne sera pas indolore pour les finances publiques qui se verront privées d’une part de TVA aujourd’hui perçue. Cependant, l’amélioration de l’offre de réparation doit à moyen‑terme conduire à l’achat de produits réparables, plus durables, qui aujourd’hui coûtent souvent bien plus cher que les modèles non‑réparables, et généreront donc davantage de taxes.
Composée de deux articles, dont le gage, cette proposition de loi a pour but d’ajouter à la liste des produits pouvant bénéficier dans le code général des impôts d’une TVA réduite de 5,5 %, les opérations de réparation des cycles, de l’électroménager, des chaussures et articles de cuir, des vêtements et du linge de maison en vertu du droit européen en la matière. La mise en place de cette « TVA circulaire » serait un signal fort envoyé à destination des réparateurs partout en France et permettrait de perpétuer l’engagement de notre Assemblée en faveur de l’économie circulaire, cinq ans après le vote de la loi AGEC.
– 1 –
proposition de loi
Article 1er
L’article 278‑0 bis du code général des impôts est complété par un P ainsi rédigé :
« P. – Les opérations de réparation des cycles, de l’électroménager, des chaussures et articles de cuir, des vêtements et du linge de maison. »
Article 2
La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.