N° 1538

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 juin 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à la création d’une taxe sur les déchets touristiques,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. François-Xavier CECCOLI,

député.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les territoires d’accueil touristique assument chaque saison un surcroît de charges pour garder propres les espaces publics et traiter des tonnages de déchets nettement supérieurs à ceux produits par leurs seuls habitants. Les dépenses correspondantes, aujourd’hui financées quasi exclusivement par les résidents au travers de la fiscalité locale, essentiellement la taxe ou la redevance d’enlèvement des ordures ménagères, pèsent plus lourdement sur leur pouvoir d’achat ou mobilisent le budget général des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), au détriment de l’investissement local et du développement de services publics locaux.

Cette situation justifie d’être corrigée par le législateur. Dans son rapport thématique de 2022, la Cour des comptes souligne la spécificité des territoires touristiques et constate l’insuffisance des ressources dédiées, elle recommande ainsi la création d’une part additionnelle à la taxe de séjour afin de faire contribuer les visiteurs aux coûts qu’ils génèrent.

La présente proposition de loi vise donc à mettre en œuvre cette recommandation en instituant une taxe sur les déchets touristiques reposant sur le principe constitutionnel du pollueurpayeur : chacun doit assumer la réparation des dommages qu’il cause à l’environnement. L’objectif est double : rétablir l’équité fiscale entre usagers du service public des déchets et garantir aux collectivités compétentes les moyens d’offrir une collecte adaptée, sans alourdir la charge imposée aux ménages permanents, voire en permettant d’en diminuer la fiscalité.

Le dispositif conforte l’autonomie financière des collectivités ; la taxe est facultative et son tarif, compris entre 0,50 euro et 1,50 euro par personne et par nuitée, est librement arrêté par la collectivité ou l’établissement public compétent. Affecté exclusivement à la couverture des dépenses de collecte et de traitement, son produit vient en déduction du coût supporté par la fiscalité locale ou la tarification existante, qu’il s’agisse de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM), de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères (REOM) ou d’un financement par le budget général.

Perçue simultanément à la taxe de séjour, par les mêmes collecteurs et selon des modalités de recouvrement identiques, la surtaxe ne constitue ni une complexité supplémentaire pour les hébergeurs ni un obstacle à l’attractivité touristique. Au contraire, en améliorant la qualité du service de collecte, vecteur de propreté, et en rendant leur financement plus juste, elle participe au maintien de la compétitivité des destinations françaises.

Afin d’atteindre ces objectifs, la proposition de loi prévoit les mécanismes suivants :

L’article 1er crée, au sein du code général des collectivités territoriales, une section 10 bis intitulée « Taxe sur les déchets touristiques ». Elle habilite toutes les collectivités ou groupements compétents pour la collecte et le traitement des déchets ménagers, c’est‑à‑dire les communes, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ainsi que les syndicats mixtes fermés lorsque le transfert de l’intégralité des compétences collecte et traitement leur a été attribué, à instituer cette taxe.

L’assiette vise les personnes non domiciliées séjournant à titre onéreux dans les établissements d’hébergement touristique, conformément aux catégories déjà reconnues pour la taxe de séjour. Le tarif est fixé dans un cadre légal et les exonérations obligatoires sont harmonisées avec celles applicables à la taxe de séjour (mineurs, personnes hébergées d’urgence, saisonniers). Le recouvrement de la taxe par les hébergeurs s’opère dans le strict respect des règles déjà éprouvées pour la taxe de séjour, et le produit est affecté exclusivement au financement du service public de collecte et de traitement des déchets.

Il est également précisé que lorsque la collectivité ou l’établissement public compétent adopte la délibération d’institution de la taxe après le 1er juillet de l’année, l’application de la taxe est reportée d’un an supplémentaire afin de respecter les délais budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales.

L’article 2 crée un article L. 2333‑31‑1 dans le même code, afin de préciser que les plafonds de la taxe de séjour ne font pas obstacle à la perception de la taxe sur les déchets touristiques. Cette coordination garantit le caractère additionnel de la nouvelle imposition et sécurise juridiquement son cumul avec la taxe de séjour.

L’article 3 impose au Gouvernement de présenter au Parlement, dans un délai de trois ans après la promulgation de la loi, un rapport d’évaluation portant sur le produit de la taxe, l’évolution des coûts de gestion des déchets dans les territoires qui l’auront instituée et l’incidence éventuelle sur la fréquentation touristique ainsi que sur la fiscalité locale. Ce rapport est élaboré à moyens constants afin de ne pas créer de charge nouvelle.

L’article 4 fixe l’entrée en vigueur de la loi au 1er janvier de l’année suivant sa promulgation.

L’article 5 vient gager cette proposition de loi.

 


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proposition de loi

Article 1er

Le chapitre III du titre III du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section 10 bis ainsi rédigée :

« Section 10 bis

« Taxe sur les déchets touristiques

« Art. L. 2333831. – Peuvent instituer par délibération, une taxe sur les déchets touristiques :

« 1° Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents pour la collecte et le traitement des déchets ménagers et assimilés au sens de l’article L. 2224‑13 ;

« 2° Les syndicats mixtes composés exclusivement de collectivités territoriales et d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, compétents pour la collecte et le traitement des déchets ménagers et assimilés au sens de l’article L. 2224‑13.

« Les syndicats mixtes sont substitués aux communes pour l’institution de la taxe sur les déchets touristiques, lorsqu’ils bénéficient du transfert de l’ensemble de la compétence de collecte et traitement des déchets ménagers et assimilés prévue à l’article L. 2224‑13. Ils votent le tarif de cette taxe dans les conditions prévues à l’article L. 2333‑83‑7 du présent code.

« Le produit de cette taxe peut faire l’objet d’un reversement, dans des conditions définies par convention, au profit du syndicat mixte bénéficiaire d’un transfert partiel. »

« Art. L. 2333832. – La délibération afin d’instituer la taxe au sens de l’article L. 2333‑83‑1 est prise avant le 1er juillet de l’année pour être applicable à compter du 1er janvier de l’année suivante.

« Toutefois, lorsque la délibération d’institution de la taxe est adoptée après le 1er juillet d’une année, celle‑ci ne s’applique qu’à compter du 1er janvier de la deuxième année qui suit cette délibération.

« Art. L. 2333833. – La taxe est due par toute personne qui n’est pas domiciliée sur le territoire de la collectivité ou de l’établissement public mentionné à l’article L. 2333‑83‑1.

« Art. L. 2333834. – Les articles L. 2333‑33 à L. 2333‑39 sont applicables à la taxe instituée par la présente section.

« Art. L. 2333835. – Sont exonérés de plein droit de la présente taxe :

« 1° Les personnes mineures ;

« 2° Les bénéficiaires d’un hébergement d’urgence ou temporaire ;

« 3° Les titulaires d’un contrat de travail saisonnier employés sur le territoire de la collectivité ou de l’établissement public.

« Art. L. 2333836. – Le produit de la taxe est affecté exclusivement au financement des dépenses de collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés exposées par la collectivité ou l’établissement public bénéficiaire.

« Art. L. 2333837. – Le tarif de la taxe sur les déchets touristiques instituée par la collectivité, l’établissement public ou le syndicat mixte dans les conditions fixées à l’article L. 2333‑83‑1, ne peut être inférieur à 0,50 euro et ne peut excéder 1,50 euro par personne et par nuitée, hors exonérations prévues à l’article L. 2333‑83‑5. »

Article 2

Le paragraphe 2 de sous‑section 1 de la section 6 du chapitre III du titre III du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 2333‑31‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2333311. – Le tarif de la taxe de séjour fixé à l’article L. 2333‑30 s’entend hors taxe sur les déchets touristiques, prévue aux articles L. 2333‑83‑1 à L. 2333‑83‑7. »

Article 3

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d’évaluation portant sur :

1° Le produit de la taxe sur les déchets touristiques et son affectation ;

2° L’évolution des coûts de collecte et de traitement des déchets dans les territoires l’ayant instituée ;

3° L’impact de la taxe sur la fréquentation touristique et sur la fiscalité locale.

Ce rapport est élaboré à moyens constants.

Article 4

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier de l’année suivant sa promulgation.

Article 5

La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.