N° 1545
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 juin 2025.
PROPOSITION DE LOI
visant à améliorer les conditions et la prédictibilité de l’exercice du droit de grève dans les transports,
(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Mathieu LEFÈVRE,
député.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, intégré au bloc de constitutionnalité de notre République, consacre en son alinéa 7, la valeur constitutionnelle du droit de grève. À ce titre, la présente proposition de loi ne remet nullement en cause ce droit essentiel pour la liberté des salariés.
Cet alinéa 7 précise également que « le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ». La possibilité pour le législateur de se saisir de ce droit est donc préservée, d’autant plus lorsqu’il doit être concilié avec un autre principe constitutionnel, celui de la continuité du service public.
À ce titre, dans les transports publics urbains et ferroviaires une législation spécifique a été mise en place pour concilier ces deux droits et les lois du 21 août 2007 et du 19 mars 2012 sont venues compléter cet arsenal législatif.
Si des avancées ont été obtenues via les plans de transports, les plans d’informations aux usagers, la demande de négociation préalable ou la déclaration préalable, de trop nombreuses fragilités demeurent. Les préavis reconductibles sine die ou courant parfois sur plusieurs années, les grèves de moins d’une heure, les déclarations individuelles de grève ou les déclarations tardives sont autant de freins à l’organisation convenable des offres de transport public dans un cadre de mouvement social.
Ces pratiques, si elles sont actuellement légales et souvent confirmées par la jurisprudence des cours d’appel et de cassation, sapent le dialogue social et la confiance de nos concitoyens dans les transports publics et les syndicats.
En outre, elles empêchent les gestionnaires de réseaux de pouvoir s’organiser convenablement en amont de la grève, créant parfois des désorganisations bien supérieures à l’impact réel de la grève en elle‑même.
Concomitamment, ce sont de nombreuses personnes qui se voient parfois empêchées dans leurs projets professionnels ou personnels, et doivent par conséquent décaler ou annuler des voyages pourtant essentiels pour elles.
L’enjeu de la régulation de ces pratiques est aussi ailleurs. En effet, dans une société qui doit s’organiser face aux enjeux du réchauffement et du changement climatiques, l’utilisation des modes de transport en commun décarbonés est une nécessité absolue. Le report modal qui peut s’opérer par anticipation ou par obligation se tourne souvent vers un moyen de mobilité plus carboné.
Aussi, cette proposition de loi entend améliorer les conditions et la prédictibilité de l’exercice du droit de grève, dans le but de renforcer ce droit et son acceptabilité par nos concitoyens, pour construire un climat de confiance entre les salariés et les usagers.
L’article 1er vise à lutter contre les grèves de très courte durée, c’est‑à‑dire de moins d’une heure, en considérant que la grève s’arrête à la reprise effective du travail ou, à défaut, à l’heure prévue de fin de service.
L’article 2 vise à interdire la pratique des préavis « dormants », qui comprennent les préavis de grève illimitée, les préavis de grève de très longue durée ou les préavis de grève reconductible sine die.
L’article 3 entend corriger les problématiques d’indisponibilité du salarié n’ayant pas déclaré 48 heures avant la grève son intention d’y renoncer.
L’article 4 vise à corriger les difficultés liées aux déclarations individuelles de grève.
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proposition de loi
Article 1er
L’article L. 1324‑11 du code des transports est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les catégories de salariés indispensables à l’exécution du plan de transports mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 1222‑7, le décompte de l’absence débute à l’heure où le salarié cesse le travail jusqu’à sa reprise effective du travail ou, à défaut de réaffectation possible, jusqu’à l’heure prévue de fin de service. »
Article 2
La section 2 du chapitre IV du titre II du livre III du code des transports est complétée par un article L. 1324‑6‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1324‑6‑1. – Un préavis qui ne donne pas lieu à une cessation concertée du travail d’au moins deux salariés pendant une période de vingt‑quatre heures est caduc. L’employeur informe par tout moyen les salariés du constat de la caducité du préavis. En cas de caducité du préavis, les déclarations individuelles antérieures à ce constat, mentionnées à l’article L. 1324‑7, ne peuvent produire d’effet. »
Article 3
Le premier alinéa de l’article L. 1324‑7 du code des transports est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Un salarié ne peut être considéré comme gréviste qu’à compter du moment où il cesse le travail. » ;
2° À la deuxième phrase, les mots : « de ces » sont remplacés par le mot : « des ».
Article 4
La première partie du code des transports est ainsi modifiée :
1° Au deuxième alinéa de l’article L. 1222‑7, après le mot : « indispensables », sont insérés les mots : « immédiatement ou à terme » ;
2° L’article L. 1324‑7 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, le mot : « quarante‑huit » est remplacé par le mot : « soixante‑douze » ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, le mot : « vingt‑quatre » est remplacé par le mot : « quarante‑huit » ;
– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Le début de l’exercice du droit de grève par un salarié, postérieurement à l’heure du début de la grève mentionnée par le préavis, n’est possible qu’à l’heure de la première prise de service quotidienne dudit salarié, pour chaque journée couverte par la durée de la grève mentionnée dans le préavis. » ;
c) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « vingt‑quatre » est remplacé par le mot : « quarante‑huit ».