N° 1546

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 juin 2025.

PROPOSITION DE LOI

relative au fonds de péréquation pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Sophie RICOURT VAGINAY, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, Mme Brigitte BARÈGES, M. Bernard CHAIX, M. Marc CHAVENT, M. Roger CHUDEAU, M. Frédéric FALCON, M. Olivier FAYSSAT, Mme Hélène LAPORTE, Mme Marie-France LORHO, M. Pascal MARKOWSKY, Mme Michèle MARTINEZ, Mme Alexandra MASSON, M. Laurent MAZAURY, M. Joseph RIVIÈRE, M. Emmanuel TACHÉ DE LA PAGERIE, M. Thierry TESSON,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La compétence GEMAPI (Gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations), créée par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) du 27 janvier 2014, puis enrichie par la loi NOTRe du 7 août 2015, la loi biodiversité du 8 août 2016, et la loi du 30 décembre 2017 dite « GEMAPI », regroupe sous une seule responsabilité des missions jusqu’alors dispersées, visant la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations.

Toutefois, cette compétence obligatoire confiée aux intercommunalités ne s’est pas accompagnée de moyens financiers structurels suffisants, ce qui compromet gravement la capacité d’action des territoires ruraux de montagne et d’amont hydrologique.

Le dispositif actuel de financement, fondé exclusivement sur la taxe GEMAPI ‑ taxe facultative affectée, votée par les Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dans la limite de 40 euros par habitant ‑ montre rapidement ses limites territoriales et fiscales.

Le financement repose sur une fiscalité locale déjà fragilisée : foncier bâti, non bâti, cotisation foncière des entreprises (CFE), taxe d’habitation (en voie de suppression). L’addition de la taxe GEMAPI dans ce contexte devient insoutenable pour les contribuables. Elle n’est ni territorialisée en fonction des risques ni mutualisée entre territoires bénéficiaires (aval) et contributeurs (amont).

La taxe GEMAPI pèse sur des zones déjà en difficulté et vulnérables aux changements climatiques, sans tenir compte de leur fonction de protection hydraulique au bénéfice de l’aval.

Face à ces constats, la présente proposition de loi vise à instituer un mécanisme de solidarité interterritoriale et volontaire, conforme à l’article 40 de la Constitution, sans création de charge nouvelle pour l’État.

Ce mécanisme :

– repose sur une participation volontaire des EPCI et des agences de l’eau ;

– est géré par un fonds de solidarité GEMAPI alimenté par des contributions locales, des redéploiements de crédits d’agences de l’eau, et des financements européens ou régionaux ;

- permet une péréquation fondée sur des critères objectifs : linéaire de cours d’eau, vulnérabilité aux crues, effort GEMAPI par habitant, richesse fiscale relative ;

– prend en compte le rôle hydraulique stratégique des territoires d’amont.

Cette loi n’induit aucune dépense obligatoire de l’État, mais crée un cadre juridique pour organiser la solidarité hydrologique, équitable, durable et mutualisée à l’échelle des bassins versants.

 


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proposition de loi

Titre Ier

Création d’un mécanisme de péréquation interterritoriale

Article 1er

Il est institué un fonds de solidarité pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, à caractère intercommunal et volontaire, destiné à assurer une péréquation financière entre les établissements publics de coopération intercommunale exerçant la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.

Article 2

Le fonds prend la forme d’un groupement d’intérêt public ou d’un établissement public partenarial, sans création de charge pour le budget de l’État. Il est administré par les parties prenantes que sont les établissements publics de coopération intercommunale contributeurs, l’Agence de l’eau, les régions et les syndicats de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.

Titre II

Alimentation et gestion du fonds

Article 3

Le fonds de solidarité prévu à l’article premier de la présente loi est alimenté par :

1° Des contributions volontaires des établissements publics de coopération intercommunale ou des syndicats de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations ;

2° Des affectations de crédits d’agences de l’eau, dans le cadre de leurs missions légales ;

3° Des subventions européennes ou régionales ;

4° Tout autre financement conforme à la réglementation.

Article 4

Le fonds de solidarité pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations ne donne lieu à aucun financement obligatoire de l’État. Il est exclusivement alimenté par des ressources préexistantes ou contractuelles. Cette disposition garantit la conformité à l’article 40 de la Constitution.

Article 5

Le fonds de solidarité pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations redistribue ses crédits sur dossier, en tenant compte :

1° Du linéaire de cours d’eau classé ;

2° Du niveau de risque inondation ;

3° De la population fiscale et de l’effort de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations par habitant ;

4° De l’éligibilité à des fonds tiers comme le fonds européen de développement régional ou le fonds de prévention des risques naturels majeurs.

Titre III

Gouvernance et clauses de suivi

Article 6

Un comité d’orientation composé de représentants des établissements publics de coopération intercommunale contributeurs, des agences de l’eau et des collectivités territoriales partenaires est chargé de la validation des critères et de l’approbation des projets financés.

Article 7

Un rapport annuel d’activité est rendu public. Une évaluation d’impact est prévue trois ans après la mise en œuvre.

Article 8

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier suivant sa promulgation.

Article 9

I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

II. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.