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N° 1709

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 juillet 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à modifier les conditions de maintien des candidatures au second tour des élections législatives,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Sylvain BERRIOS, M. Xavier ALBERTINI, M. Henri ALFANDARI, Mme Béatrice BELLAMY, M. Thierry BENOIT, M. Bertrand BOUYX, M. Jean-Michel BRARD, M. Paul CHRISTOPHE, Mme Nathalie COLIN-OESTERLÉ, M. Philippe FAIT, Mme Agnès FIRMIN LE BODO, Mme Félicie GÉRARD, M. François GERNIGON, M. Pierre HENRIET, M. François JOLIVET, M. Xavier LACOMBE, M. Thomas LAM, M. Didier LEMAIRE, Mme Lise MAGNIER, M. Jean MOULLIERE, Mme Naïma MOUTCHOU, M. Jérémie PATRIER-LEITUS, Mme Béatrice PIRON, M. Christophe PLASSARD, M. Jean-François PORTARRIEU, Mme Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK, Mme Isabelle RAUCH, M. Xavier ROSEREN, Mme Laetitia SAINT-PAUL, M. Frédéric VALLETOUX, Mme Anne-Cécile VIOLLAND,

députés et députées.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le régime parlementaire mis en place en France après la Seconde guerre mondiale a complexifié, si ce n’est empêché, la réforme et la reconstruction de notre pays en raison de l’instabilité chronique inhérente à ce régime. Le choix fait à l’époque d’élire les députés à la proportionnelle n’a fait qu’entériner l’incapacité de la IVe République à gouverner : incapacité d’assurer la mise en œuvre de politiques de long terme nécessaires à la reconstruction du pays, instabilité gouvernementale chronique, difficultés des territoires de l’Union française et une profonde crise budgétaire et économique conduisent en effet à la chute de la IVe République.

Pourtant, dès le 16 juin 1946, le général de Gaulle prononçait à Bayeux un discours aussi visionnaire que fondateur, énonçant les grands principes de la Constitution de la Vème République. Il aura fallu plus d’une décennie pour que ces derniers voient le jour, avec la Constitution du 4 octobre 1958.

En parallèle de ces évolutions constitutionnelles, le retour à la stabilité reposait en grande partie sur la capacité de la jeune Ve République à mettre en place un mode de scrutin assurant la stabilité nécessaire, et tant attendue. Le choix du législateur a donc été de revenir à un scrutin majoritaire à deux tours pour l’élection des représentants de la Nation. Ce mode de scrutin a conduit à une stabilisation du pouvoir exécutif et a permis de dégager une majorité claire permettant de gouverner et de réformer le pays.

Le mode de scrutin majoritaire a porté ses fruits : de 1958 à 2022, les périodes de cohabitation ont été brèves, le fait majoritaire prégnant, et les censures du Gouvernement rares. Sur ce dernier point en effet, sur 154 motions de censure déposées sous la Ve République, seules deux ont abouti à renverser le Gouvernement (en 1962, et en 2024).

La nécessité de maintenir un mode de scrutin majoritaire est donc incontestable : lui seul est capable de garantir une majorité claire à l’exécutif, lui permettant de mener l’action résolue dont notre pays a besoin. Au‑delà de la stabilité offerte par ce mode de scrutin, il permet également de garantir un lien de proximité entre l’électeur et le député. C’est pour l’ensemble de ces raisons que le Groupe Horizons & Indépendants est défavorable à l’instauration de la proportionnelle.

Toutefois, les difficultés liées à la composition de la représentation nationale nous appellent cependant à réinterroger une des modalités de ce mode de scrutin : les conditions de maintien des candidatures au second tour des élections législatives. En effet, depuis vingt ans, les triangulaires, voire des quadrangulaires, se multiplient, et trois ou quatre candidats se disputent souvent les suffrages des électeurs au second tour des élections législatives. Les élections législatives anticipées de 2024 ont même conduit à un nouveau record du nombre de triangulaires en raison du taux inédit de participation, dans 285 à 315 circonscriptions. Toutefois, après le dépôt des listes pour le second tour, il ne restait que 89 triangulaires et 2 quadrangulaires.

La multiplication de ces « triangulaires » est due aux dispositions actuelles de l’article L. 162 du code électoral, qui dispose que nul ne peut être candidat au deuxième tour s’il ne s’est présenté au premier tour et s’il n’a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du nombre des électeurs inscrits.

Cette multiplication des triangulaires affecte la légitimité des candidats élus. En effet, le candidat élu dans sa circonscription ne l’est souvent qu’avec à peine un tiers des suffrages exprimés en raison du nombre de candidats qui se maintiennent au second tour. Pour reprendre les mots éclairants d’une proposition de loi déposée par M. André Vallet au Sénat le 6 avril 2001, « La loi assure l’égalité des électeurs devant le suffrage universel ; il est donc logique qu’elle assure également celle des élus. »

La présente proposition de loi vise donc à ne permettre qu’aux deux candidats ayant recueilli le plus grand nombre de suffrages au premier tour de se maintenir au second tour.

Les modalités proposées par ce texte rejoindraient ainsi le modèle de l’élection présidentielle, qui fait d’ailleurs toute la légitimité du président élu : en n’autorisant à se maintenir au second tour que les deux candidats arrivés en tête au premier, l’élection présidentielle consacre la logique du scrutin majoritaire en complétant la légitimité que confère le suffrage universel par celle de la majorité absolue des suffrages exprimés. Imaginerait‑on trois candidats au second tour de l’élection présidentielle ? Une réponse honnête à cette question nous pousse à soutenir une évolution des modalités de maintien de candidats au second tour des élections législatives. C’est la légitimité individuelle des députés qui en serait renforcée mais, aussi et surtout, la légitimité de l’Assemblée dans son ensemble.

 


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proposition de loi

Article 1er

L’article L. 162 du code électoral est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Les députés sont élus à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour de scrutin, il est procédé, le septième jour suivant, à un second tour. Sous réserve des dispositions de l’article L. 163, seuls peuvent s’y présenter les deux candidats qui, le cas échéant après retrait de candidats plus favorisés, se trouvent avoir recueilli le plus grand nombre de suffrages au premier tour. » ;

2° Les quatrième et cinquième alinéas sont supprimés.

Article 2

La présente loi s’applique à compter du prochain renouvellement général de l’Assemblée nationale suivant sa promulgation.