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N° 2198

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 août 2019.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création dune commission denquête sur lattentat
de la rue des Rosiers du 9 août 1982 à Paris et ses suites,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Meyer HABIB, Damien ADAM, Louis ALIOT, Sophie AUCONIE, Olivier BECHT, Thierry BENOIT, Émilie BONNIVARD, PierreYves BOURNAZEL, Guy BRICOUT, Jacques CATTIN, Gérard CHERPION, Éric CIOTTI, Fabienne COLBOC, PaulAndré COLOMBANI, Stéphane DEMILLY, Béatrice DESCAMPS, Laurent GARCIA, Claude GOASGUEN, Brahim HAMMOUCHE, Antoine HERTH, JeanChristophe LAGARDE, Constance LE GRIP, Geneviève LEVY, Sylvain MAILLARD, Emmanuelle MÉNARD, Pierre MORELÀL’HUISSIER, Christophe NAEGELEN, JeanPierre PONT, François PUPPONI, Didier QUENTIN, JeanLuc REITZER, Nicole SANQUER, Éric STRAUMANN, Sira SYLLA, Michèle TABAROT, Agnès THILL, Laurence TRASTOURISNART, Philippe VIGIER, Michel ZUMKELLER,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 9 août 2019, on commémorait les 37 ans de l’attentat antisémite de la rue des rosiers.

Pour rappel, le 9 août 1982, un commando terroriste faisait irruption dans le restaurant « Jo Goldenberg », rue des Rosiers à Paris 4e dans le quartier juif de la capitale, faisant 6 morts et 22 blessés.

Après l’échec de plusieurs pistes dont celle dite des « Irlandais de Vincennes », longtemps, l’enquête n’aboutit pas.

Il fallut toute la détermination du parquet anti‑terroriste dirigé par le juge Marc Trévidic pour identifier en 2015 les quatre terroristes présumés. Tous sont palestiniens : deux vivent en Jordanie, un dans les Territoires palestiniens, le dernier en Norvège.

Les demandes d’extradition restent à ce jour lettre morte. Les auteurs présumés sont en liberté et coulent des jours heureux. Les victimes et leurs familles attendent toujours que justice soit faite.

Déposée le 26 juillet 2016, ma question écrite n° 98113 demeure sans réponse comme le fut ma lettre à l’ancien président de la République François Hollande du 17 mars 2017.

Le 7 mars 2018 – enfin ! – le Président de la République Emmanuel Macron évoque le dossier lors de son allocution au dîner annuel du CRIF.

Je cite le Chef de l’État : « [...] 35 ans après la douleur est encore très vivement ressentie par les familles, par les juifs de France et par la communauté nationale, je veux ici vous l’assurer. Après tout ce temps passé, cette enquête particulièrement ardue n’a pas abouti à la condamnation des auteurs et c’est une blessure, pour autant la justice n’a jamais baissé les bras et n’a jamais refermé le dossier. Vous évoquez l’extradition demandée à la Norvège, les magistrats agissent pour surmonter les difficultés juridiques invoquées par ce pays, que sont justement la prescription et le fait que l’auteur norvégien ne peut en principe pas être extradé, je veux ici vous dire que tout sera mis en œuvre pour que cette enquête se poursuive et aille à son terme. »

En juin 2018, j’ai été reçu à l’Élysée par la cellule diplomatique avec le porte‑parole d’une famille de victimes. Un conseiller diplomatique du Président de la République m’a assuré que des actions concrètes seraient engagées dans les meilleurs délais. Lesquelles ?

Le 17 juillet 2018, j’ai interrogé en commission des affaires étrangères le ministre Jean‑Yves Le Drian. Il m’a promis une réponse circonstanciée, toujours attendue à ce jour.

Puis vint cette incroyable révélation d’un pacte secret le 13 novembre 2018 dans le documentaire « Histoire secrète de l’anti‑terrorisme », diffusé sur France 2.

L’ancien directeur de la surveillance du territoire (DST) Yves Bonnet dévoile qu’au lendemain de l’attentat, la France aurait négocié un accord oral secret d’impunité avec l’organisation terroriste palestinienne Fatah conseil révolutionnaire, dit « groupe Abou Nidal », responsable de l’attentat. Les terroristes se sont vu octroyer le droit de circuler librement sur notre territoire contre l’assurance qu’ils ne frapperaient plus le pays.

Les ordres auraient émané directement du sommet de l’État.

Entendu par la justice le 30 janvier dernier, l’ancien DST a confirmé ses propos et assumé.

Il semble bien que nous soyons face à un scandale d’État.

L’affaire de l’attentat de la rue des Rosiers met en question notre stratégie antiterroriste dans sa globalité. Plus généralement, elle interroge la gestion des affaires réservées au sommet de l’État et sa capacité et détermination à assurer la sécurité de tous les Français sans distinction.

37 ans après les faits, les Français ont droit à la vérité. Surtout, justice doit être rendue pour que victimes et familles puissent enfin faire leur deuil. 

Dans ce contexte, à l’heure où la lutte contre le terrorisme et la lutte contre l’antisémitisme sont affichées comme des priorités gouvernementales, il appartient aujourd’hui à la Représentation nationale de mettre au jour :

– quelles actions concrètes ont été menées et seront mises en œuvre dans le court terme pour traduire en justice les terroristes présumés ?

– dans quelles conditions précises un tel pacte a‑t‑il pu être conclu ?

– est‑ce que d’autres pacte de même nature ont pu être passé avec d’autres organisations terroristes ?


proposition de rÉsolution

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, est créée une commission d’enquête de trente membres, chargée de faire un état des lieux sur l’attentat de la rue des Rosiers du 9 août 1982 à Paris, de sa gestion par les services de renseignements et les services politiques, tant au niveau de l’enquête que par la suite. Pour les victimes et leurs familles, la commission devra faire toute la lumière sur cette affaire.