N° 2561
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUINZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 janvier 2020.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Alexis CORBIÈRE, Clémentine AUTAIN, Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Caroline FIAT, Bastien LACHAUD, Danièle OBONO, Mathilde PANOT, Adrien QUATENNENS, Jean‑Hugues RATENON,
Députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Dans la doctrine du maintien de l’ordre en France, l’utilisation des grenades est progressivement devenue une pratique régulière des forces de sécurité intérieure. Cette catégorie d’armes inclut un panel d’engins aux composés chimiques divers, dont les grenades lacrymogènes, visant à provoquer irritation ou gêne physique incapacitante pour disperser et les manifestants.
Le mouvement des Gilets jaunes que connait notre pays depuis le 17 novembre 2018 a conduit à une utilisation chronique de grenades lacrymogènes, dont les fumées envahissent les places, rues et autres zones ciblées par les forces de sécurité intérieure. La concentration de ces substances à forte dose, y compris dans des lieux confinés tels que des cafés, des bars, des stations de métro jouxtant les zones ciblées doit nous alerter quant à ses effets sur les personnes présentes, qu’elles soient manifestantes ou non.
De nombreux témoignages attestent en effet de gênes physiques non seulement sur l’instant présent – cela étant la finalité de cet armement – mais aussi sur des périodes plus longues. Des malaises, tant des forces de l’ordre que des manifestant·es, ont été signalés en grand nombre. Ces conséquences sanitaires sur le court et moyen long terme interrogent la teneur des composés chimiques contenus dans les grenades lacrymogènes sans qu’aucune étude basée sur un bilan de santé des personnes exposées à ces gaz n’aient été menées jusqu’à présent.
Or, selon Jean‑Marc Sapori, médecin au centre anti‑poison de Lyon, l’ancrage dans la durée du mouvement des gilets jaunes conduit « à un cas atypique d’exposition répétée sur de nombreuses semaines au gaz lacrymogène qui mériterait une enquête épidémiologique sérieuse afin de mieux décrire les conséquences sanitaires de cette exposition chronique ».
Cette commission d’enquête aura pour objectif de faire toute la lumière sur la composition exacte des grenades utilisées par les forces de sécurité intérieure, d’en évaluer les conséquences sur la santé des personnes exposées et de redéfinir, au besoin, les conditions de leur utilisation.
proposition de rÉsolution
En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête de trente membres, chargée de :
1. Déterminer les composants exacts des grenades lacrymogènes.
2. Évaluer les conséquences sur la santé humaine de l’exposition, à court et moyen‑long terme aux substances contenues dans les grenades lacrymogènes.
3. Mettre en place des études de suivi et des enquêtes épidémiologiques afin de décrire les conséquences sanitaires d’une exposition chronique au gaz lacrymogène.
4. Établir des pistes de propositions pour déterminer une nouvelle doctrine de maintien de l’ordre notamment par des études comparatives des différents modèles de maintien de l’ordre à l’œuvre dans les États membres de l’Union européenne.