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N° 4856

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 décembre 2021.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

pour une politique de santé publique et pour que nos bons comportements en santé soient notre première médecine,

présentée par Mesdames et Messieurs

Cyrille ISAACSIBILLE, Jimmy PAHUN, Laurent GARCIA, JeanLuc FUGIT, Michèle de VAUCOULEURS, Nadia ESSAYAN, Laurence VICHNIEVSKY, Maud PETIT, Brahim HAMMOUCHE, JeanPierre CUBERTAFON, Philippe BERTA, Maud GATEL, Sophie METTE, JeanLouis BOURLANGES, Marie TAMARELLEVERHAEGUE, Hélène ZANNIER, Catherine DAUFÈSROUX Didier MARTIN, JeanLouis TOURAINE, Michèle PEYRON, Christophe BLANCHET, Christophe LEJEUNE, Patrice ANATO, JeanMichel MIS, Monique IBORRA, Carole BUREAUBONNARD, Nicole DUBRÉCHIRAT, Danièle CAZARIAN, Jacqueline DUBOIS, Dominique DA SILVA, JeanBernard SEMPASTOUS, Sereine MAUBORGNE, Michel LAUZZANA, Laurianne ROSSI, Frédérique TUFFNELL, Cécile RILHAC, Claire PITOLLAT, Françoise BALLETBLU, Luc LAMIRAULT, Annie CHAPELIER, Michèle CROUZET, Ludovic MENDES,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis plusieurs mois, la France traverse, avec l’épidémie de covid‑19, une crise de santé publique majeure. Cependant, la notion de « santé publique » est mal définie pour beaucoup d’entre nous.

La santé publique est une approche collective de la santé dans toutes ses dimensions, selon les déterminants de santé liés aux caractéristiques individuelles, aux milieux de vie, aux systèmes d’éducation et de santé ou aux contextes socioéconomiques. Sa finalité est d’améliorer l’état de santé de la population par une approche populationnelle, éducative et de promotion des bons comportements en santé.

Longtemps au cœur des préoccupations des pouvoirs publics, une approche individuelle de soin lui a été préférée. Jusqu’en 1974, les ministères étaient intitulés « Santé publique ». Maintenant, ils sont dénommés « ministère de la Santé »!

Depuis plusieurs années, les médecines de prévention, acteurs cruciaux de la prévention et de la réduction des inégalités de santé (PMI, médecine scolaire, médecine du travail), sont malmenées, voire délaissées. Pourtant, demeurent les deux grandes inégalités que sont la santé et l’éducation.

Alors que des modifications de nos modes de vies ‒ de nouveaux comportements alimentaires, plus gras, plus sucrés - une baisse constatée de l’activité physique ‒ des changements de comportements face aux écrans, au sommeil ‒ de nouvelles expositions environnementales, etc… - aggravent l’état de santé des Français, l’approche éducative de la santé est oubliée (ce que constituaient autrefois les cours d’hygiène).

Est apparue une forte croissance des maladies chroniques physiques et mentales, demandant toujours plus de soins, de traitements, d’hospitalisations, de prise en charge de complications.

La priorité a été donnée à une politique de soins, ceci aux dépens d’une politique de prévention. Le coût des soins devient si important qu’il déséquilibre financièrement notre système de protection sociale !

Si la France détient le record de longévité, elle possède aussi le record du vieillissement en mauvaise santé !

Comment réussir le basculement « plus de prévention ‒ moins de soins »

Aujourd’hui, les rapports et travaux foisonnent ; les constats sont connus et unanimes de la part des différents acteurs : insuffisance du pilotage et de la gouvernance, dispersion des acteurs et des interventions, financements émiettés et peu lisibles, défaut d’évaluation des actions et de formation des intervenants…

Le 18 septembre 2018, à l’occasion de son discours sur la transformation de notre système de santé, le Président de la République évoquait « ce paradoxe français où on soigne très bien mais, on n’est pas en meilleure santé que chez les voisins parce qu’on prévient résolument moins bien ».

Il est indispensable d’accorder un portage politique fort, à tous les niveaux, à notre politique de prévention, pour garantir son efficacité. Une réelle prise de conscience des enjeux de la prévention a émergé au cours des dix dernières années, des mesures ont été prises mais les choses n’avancent que lentement.

Le Gouvernement a affiché un engagement marqué en faveur de la prévention lors de la présentation de la Stratégie nationale de santé, en décembre 2017, et du plan « priorité prévention » de mars dernier. Pour donner une nouvelle dimension à notre politique de prévention, il est nécessaire de transformer cette impulsion de façon résolue et durable, en proposant des solutions pratiques et concrètes et en érigeant la prévention en priorité politique, tant au niveau national que local.

La pandémie que nous traversons actuellement est une crise de santé publique. Nous avons pu constater la difficulté que nous avons eu à y répondre dans ses débuts : notre système n’était pas prêt !

‒ Parce que la santé publique est un investissement, non un coût ;

‒ Parce que la crise sanitaire a révélé les faiblesses de notre système et l’urgence à agir pour la santé publique ;

‒ Parce que, dès 2002, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) nous ont démontré le bénéfice, à terme, d’une véritable politique de santé publique et de son financement, tant au regard de « l’espérance de vie en bonne santé », que des économies réalisées sur les coûts de prise en charge de la maladie ;

Il nous faut aujourd’hui réfléchir sur la refonte de notre système de santé publique dans son ensemble.

 

 


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant que la notion de « santé publique » est mal appréhendée dans notre pays ;

Considérant qu’une différence d’espérance de vie de treize ans existe entre les plus aisés et les plus pauvres et que les inégalités territoriales de santé largement corrélées aux inégalités sociales ne sont plus tolérables ;

Considérant que la gouvernance de la politique de santé publique est éparpillée avec des financements insuffisants et difficilement identifiables, qu’il existe une multitude d’acteurs et d’actions de prévention non évaluées, plus de 36 000, que le soin devenant toujours plus coûteux, le financement de la promotion de la santé est toujours plus réduit ;

Exprime la nécessité d’engager une réforme structurelle de notre système de santé publique et invite le Gouvernement à repenser son organisation, avec :

‒ une appropriation par les Français de la notion de santé publique permettant une implication plus forte et une mise en application de la démocratie sanitaire ;

‒ une approche multidimensionnelle de la santé et donc un exercice interministériel de sa politique associant les ministères de l’éducation nationale, de l’agriculture, des sports, des transports, du logement, du travail et les collectivités locales notamment ;

‒ un cadrage national fixant les priorités de santé publique par l’étude des déterminants de santé, et en charge de l’évaluation et la validation des actions ;

‒ une déclinaison locale associant et coordonnant tous les acteurs institutionnels et les collectivités locales, et s’appuyant sur les expérimentations déjà existantes et évaluées ;

‒ une politique de promotion de la santé en direction de tous les milieux dès le plus jeune âge et tout au long de la vie (scolaire et extra‑scolaire, travail, personnes âgées et handicapées) ;

‒ un financement dédié et identifié dans un sous‑objectif de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie examiné et voté lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale.