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N° 1545

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juillet 2023.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

visant à pour améliorer l’accompagnement des malades atteints d’Alzheimer et leurs proches,

présentée par

M. Pierre MORELÀL’HUISSIER,

député.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

D’après les dernières estimations basées sur des études et des échantillons, provenant du Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire (BEH) de Santé publique France en septembre 2016, il est estimé qu’en France, environ 1 200 000 personnes pourraient être affectées par la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée, dont 750 000 personnes ont déjà été diagnostiquées. La maladie touche environ 23 % de la population audelà de 80 ans. De plus, après l’âge de 65 ans, elle affecte environ deux fois plus de femmes que d’hommes. Avec le vieillissement de la population, des études prédisent un doublement du nombre de cas d’ici à 2050.

La prise en charge des personnes atteintes engendre d’importantes contraintes sur les finances publiques. Selon une étude de la fondation Médéric‑Alzheimer, le coût annuel de la prise en charge de la maladie d’Alzheimer est estimé à 19,3 milliards d’euros, comprenant les dépenses médicales et l’aide informelle des aidants familiaux. Les dépenses médicales s’élèvent à 5,3 milliards d’euros, principalement pour l’hospitalisation, les soins paramédicaux et les médicaments. L’aide informelle représente 14 milliards d’euros, couvrant les soins et l’assistance fournis par les proches.

Cette maladie présente un enjeu sociétal, principalement car les personnes atteintes deviennent dépendantes. L’enjeu public réside donc dans la prise en charge des proches aidants et la mise en place de structures adaptées.

Il s’agit ici de rappeler l’importance d’une prise en charge de qualité des malades afin d’œuvrer pour un meilleur accompagnement des aidants.

Depuis les travaux du rapport sur la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées de Mme Cécile GALLEZ, Députée, en 2005, des avancées ont permis aux travailleurs de consacrer plus de temps à leurs proches malades. Ainsi, la loi n° 2015‑1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement a institué le congé de proche aidant (CPA). Puis, le décret n° 2020‑1208 du 1er octobre 2020 a créé l’allocation journalière de proche aidant afin de soutenir financièrement l’entourage des malades. Finalement, le décret n°     du      21 décembre 2021 a permis aux bénéficiaires du congé de proche aidant de recourir au télétravail de façon étendue et la loi n° 2023‑171 du 9 mars 2023 a étendu le champ des bénéficiaires potentiels du CPA.

Ces décisions ont été motivées par le souhait de donner plus de latitude aux proches des malades nécessitant un accompagnement important, dont font clairement partie les personnes atteintes par la maladie d’alzheimer.

Pourtant, ce faisant, on a assisté en partie à un report de la charge de l’accompagnement sur les proches. Ce report emporte des effets extrêmement délétères. Selon un rapport de la Haute Autorité de Santé (HAS – février 2010), la surcharge de travail occasionnée par l’accompagnement d’une personne atteinte d’Alzheimer peut dépasser 6 heures par jour pour 70 % des conjoints et 50 % des enfants concernés. Les aidants se plaignent principalement d’épuisement moral (90 % des cas), de fatigue (48 %), de troubles du sommeil (32 %), mais aussi de troubles alimentaires (23 %).

Or, dans ce même rapport, la HAS note que ces difficultés ont des répercussions sur leur état de santé : plus de la moitié des conjoints de malades développent une dépression. Et il existe un risque de surmortalité de plus de 60 % des « aidants » dans les 3 années qui suivent le début de la maladie de leur proche. Sachant que dans quelques années, chaque famille comptera un malade d’Alzheimer, le sort des aidants devient un véritable enjeu de santé publique.

Il convient donc d’assurer un meilleur accompagnement des malades pour ne pas ajouter à leur souffrance celle de leur proche, pour ne pas faire peser outre mesure le poids de leur accompagnement sur leurs proches et pour faire face au vieillissement de la population en cours.

Or, force est de constater les difficultés que rencontre le secteur de l’accompagnement. Le rapport Bonnel et Ruffin de 2020 avait déjà mis en lumière la grande précarité des métiers du lien, et par conséquent la qualité de prise en charge. De ce fait, aujourd’hui, 63 % des EPHAD ont des postes vacants depuis plus de 6 mois. Il y a donc urgence à lancer un grand programme attractif de recrutement, en particulier de personnel qualifié pour accompagner les malades d’Alzheimer. Dans son rapport de 2020, Laurent VACHEY souligne la nécessité que la cinquième branche de la sécurité sociale, concernant l’autonomie, ne soit pas un simple exercice juridique et financier, mais un pas vers une nouvelle étape de la politique publique de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. Il fait état de l’importance de l’équité et de la qualité des soins. Enfin il souligne le besoin de déléguer à cette cinquième branche des prérogatives qui jusqu’alors échappent à son autorité.

Cette proposition de résolution réaffirme ces principes et invite à améliorer l’accompagnement de nos aînés atteints de la maladie d’Alzheimer.

 

 

 

 


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la loi n° 2022‑1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 ;

Vu le rapport Vachez de 2020 intitulé La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement ;

Vu le rapport de la concertation Grand âge et autonomie de Dominique Libault présenté en 2019 ;

Considérant que, au‑delà des avancées législatives de ces dernières années, le recours à l’Allocation Journalière de Proche Aidant pourrait encore être amélioré par un meilleur ciblage de la communication autour de la prestation, ainsi que grâce à une simplification des procédures de demande de l’allocation ;

Considérant que le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ne contribue plus qu’au financement de deux agences sanitaires : l’Institut national du cancer et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail ;

Considérant que le « bien vieillir » doit être un objectif de salubrité public et une ambition prioritaire de notre société ;

Considérant que la part des plus de 75 ans dans la population française aura doublé en 2050 en passant de 8 % aujourd’hui à 16 % demain ;

Considérant l’urgence de donner davantage de moyens à un secteur en grande souffrance par la revalorisation de métiers qui peinent à recruter ;

Considérant que toute personne âgée doit pouvoir être accueillie au sein de structures dédiées dans des conditions confortables et avec l’accompagnement adéquat, de surcroît à un tarif juste ;

Considérant que la 5ème branche de la sécurité sociale créée par la loi n° 2020‑992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale propose des mesures conjoncturelles alors qu’une réforme structurelle s’impose ;

1. Invite le Gouvernement à augmenter les fonds alloués à la prise en charge du grand âge et à la recherche afin de favoriser des avancées scientifiques en vue du développement de meilleurs soins pour les patients atteints d’Alzheimer et pour proposer des pistes de traitement ;

2. Suggère au Gouvernement de favoriser le développement de plusieurs centres d’accueil spécialisés dans l’accompagnement des personnes atteintes d’Alzheimer dans chaque département.

3. Invite le Gouvernement à tout mettre en œuvre pour atteindre l’objectif fixé de création de 50 000 postes en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes d’ici 2027 ;

4. Invite le Gouvernement à entamer une réflexion pour une évolution structurelle de la gestion du grand âge en France.

5. Invite le Gouvernement à simplifier les procédures d’octroi de l’allocation journalière de proche aidant et à communiquer afin de faire connaître ladite allocation.