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N° 1852

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 novembre 2023.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête sur l’offensive de l’extrême droite contre l’école publique,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Benjamin LUCAS, Mme Nadège ABOMANGOLI, M. Gabriel AMARD, Mme Ségolène AMIOT, Mme Farida AMRANI, M. Rodrigo ARENAS, Mme Clémentine AUTAIN, M. Mickaël BOULOUX, M. Idir BOUMERTIT, M. Sylvain CARRIÈRE, Mme Cyrielle CHATELAIN, M. Hadrien CLOUET, M. Jean-François COULOMME, M. Hendrik DAVI, M. Arthur DELAPORTE, Mme Martine ETIENNE, Mme Elsa FAUCILLON, M. Emmanuel FERNANDES, Mme Sylvie FERRER, Mme Marie-Charlotte GARIN, Mme Raquel GARRIDO, Mme Marietta KARAMANLI, Mme Fatiha KELOUA HACHI, M. Andy KERBRAT, M. Bastien LACHAUD, Mme Julie LAERNOES, M. Maxime LAISNEY, M. Arnaud LE GALL, Mme Élise LEBOUCHER, M. Jérôme LEGAVRE, Mme Sarah LEGRAIN, Mme Pascale MARTIN, M. William MARTINET, M. Damien MAUDET, Mme Danièle OBONO, Mme Mathilde PANOT, M. Thomas PORTES, M. Jean-Claude RAUX, M. Sébastien ROME, M. Aurélien SAINTOUL, M. Hervé SAULIGNAC, Mme Sabrina SEBAIHI, Mme Danielle SIMONNET, Mme Ersilia SOUDAIS, Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN, Mme Andrée TAURINYA, M. Paul VANNIER, M. Léo WALTER, M. Aurélien TACHÉ,

députées et députés.

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Samedi 4 novembre 2023 les « parents vigilants », groupuscule directement construit par l’entourage d’un candidat à la dernière élection présidentielle, a organisé au cœur du Sénat un colloque manifestant auprès du grand public la réalité de sa volonté de transposition de son projet raciste et violent dans la vie de la communauté éducative.

Cette association se targue régulièrement d’un véritable entrisme dans les institutions scolaires, grâce notamment à son infiltration des élections de parents d’élèves, le plus souvent en avançant masquée. Ses méthodes sont celles historiques de l’extrême droite : délation, harcèlement, menaces et violence.

Les conditions d’accueil de ces militants d’extrême droite au cœur de la chambre haute de notre Parlement posent question et suscitent à juste titre l’indignation de tous les citoyens soucieux de préserver l’école de la République des propagandistes de la haine et de la division.

Nos institutions républicaines doivent protéger l’école publique de l’offensive raciste et réactionnaire qui s’organise. C’est toute la liberté pédagogique qui est visée : les cours sur les migrations, l’éducation à la sexualité, l’enseignement moral et civique, ou encore l’histoire coloniale.

Ce groupuscule d’extrême droite assume pleinement sa volonté de peser sur les contenus éducatifs, remettant en cause la liberté d’enseignement, d’infuser au sein même de notre école le poison de la haine et la détestation des valeurs qui fondent la République et d’infiltrer pour y parvenir les conseils de parents d’élèves.

Cette organisation a déjà sévi et menacé des enseignantes et des enseignants, via des raids numériques à la source de menaces de mort, d’injures et de harcèlement.

Ainsi, cette résolution demande la constitution d’une commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la pénétration des réseaux d’extrême droite dans l’école publique et à ses abords, et sur les pressions qu’elle exerce et pourrait exercer contre la communauté éducative.

La réalité de cette menace doit être prise au sérieux, tant l’histoire de notre pays et du monde témoignent des offensives abjectes de l’extrême droite contre l’école. De Vichy à aujourd’hui, des États‑Unis d’Amérique de Trump au Brésil de Bolsonaro en passant par la Hongrie d’Orban, c’est toujours le même système qui se met en place : chasse aux pédagogies émancipatrices, exclusion sociale et tri par l’échec au nom d’une idéologie méritocratique absurde, réécriture des programmes, affaiblissement des sciences humaines et sociales, refus de comprendre le monde dans ses réalités.

Notre système est par ailleurs rendu vulnérable face à cette offensive par une politique et des discours qui ont emprunté trop souvent à l’extrême droite ses thèmes et ses termes, dénonçant avec obsession une incursion fantasmée du « wokisme » et de « l’islamogauchisme » dans nos systèmes scolaires et universitaires.

Il est temps de protéger notre école républicaine, pour lui permettre d’assurer sa mission émancipatrice sans pressions de groupuscules obscurantistes animés par les partisans de la guerre civile et de la haine.

 


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PROPOSITION DE RESOLUTION

 

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête de trente membres chargée d’estimer et d’analyser la menace que constitue l’offensive de groupuscules d’extrême droite pratiquant l’entrisme, l’intimidation et le harcèlement contre l’école de la République et d’élaborer des réponses institutionnelles afin de protéger les élèves et la communauté éducative.