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N° 2351

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 mars 2024.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête relative aux violences sexistes et sexuelles et aux mécanismes d’omerta dans le cinéma et le spectacle vivant,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Sarah LEGRAIN, M. Léo WALTER, Mme Mathilde PANOT, Mme Nadège ABOMANGOLI, M. Laurent ALEXANDRE, M. Gabriel AMARD, Mme Ségolène AMIOT, Mme Farida AMRANI, M. Rodrigo ARENAS, Mme Clémentine AUTAIN, M. Ugo BERNALICIS, M. Christophe BEX, M. Carlos Martens BILONGO, M. Manuel BOMPARD, M. Idir BOUMERTIT, M. Louis BOYARD, M. Aymeric CARON, M. Sylvain CARRIÈRE, M. Perceval GAILLARD, Mme Raquel GARRIDO, Mme Clémence GUETTÉ, M. David GUIRAUD, Mme Mathilde HIGNET, Mme Rachel KEKE, M. Andy KERBRAT, M. Bastien LACHAUD, M. Maxime LAISNEY, M. Arnaud LE GALL, M. Antoine LÉAUMENT, Mme Élise LEBOUCHER, Mme Charlotte LEDUC, M. Jérôme LEGAVRE, Mme Murielle LEPVRAUD, Mme Élisa MARTIN, Mme Pascale MARTIN, M. William MARTINET, M. Frédéric MATHIEU, M. Damien MAUDET, Mme Marianne MAXIMI, Mme Manon MEUNIER, M. Jean-Philippe NILOR, Mme Danièle OBONO, Mme Nathalie OZIOL, M. René PILATO, M. François PIQUEMAL, M. Thomas PORTES, M. Loïc PRUD’HOMME, M. Adrien QUATENNENS, M. Jean-Hugues RATENON, M. Sébastien ROME, M. François RUFFIN, M. Aurélien SAINTOUL, M. Michel SALA, Mme Danielle SIMONNET, Mme Ersilia SOUDAIS, Mme Anne STAMBACH-TERRENOIR, Mme Andrée TAURINYA, M. Matthias TAVEL, Mme Aurélie TROUVÉ, M. Paul VANNIER,

députées et députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Je parle, je parle, mais je ne vous entends pas. Où êtesvous, que ditesvous ? (…) Pourquoi accepter que cet art que nous aimons tant soit utilisé comme une couverture pour un trafic illicite de jeunes filles ? »

Judith Godrèche, cérémonie des Césars, 23 février 2024

Ce n’est pas un hasard si la première grande vague mondiale de libération de la parole des victimes de violences sexistes et sexuelles, le mouvement #MeToo, a émergé en 2017 suite à « l’affaire Weinstein », du nom d’un producteur de cinéma américain mis en cause par plusieurs dizaines de femmes et condamné pour viol et agression sexuelle, après des années de silence d’un entourage professionnel qui savait, et qui taisait.

Ce n’est pas un hasard si nous assistons depuis en France, et en particulier ces dernières semaines, à la multiplication de témoignages d’actrices, depuis Mme Adèle Haenel jusqu’à Mme Judith Godrèche, en passant par Mmes Valentine Monnier, Emmanuelle Debever, Charlotte Arnould, Anna Mouglalis…

Ce n’est pas un hasard si, après le mouvement #MeTooThéâtre et le #MusicToo dénonçant ce qui se passe « derrière le rideau », une trentaine de femmes humoristes révèlent, dans un #MeToo standup, les violences vécues, le silence dans le monde du spectacle et la responsabilité des programmateurs.

Si aucun domaine de la société n’est exempt de ces violences, si toutes les organisations et professions sont susceptibles d’exercer une omerta protégeant les agresseurs, les nombreux témoignages pointent vers des systèmes de prédation envers les femmes et les enfants à l’œuvre dans les mondes du cinéma et du spectacle vivant. Ils révèlent l’impact de ces environnements propices à l’emprise sur les corps et les esprits, et marqués par de forts rapports hiérarchiques et de pouvoir, dans la perpétuation des violences et la silenciation des victimes.

Il s’agit d’analyser les pratiques qui contreviennent au droit du travail comme aux droits de la personne humaine, en soumettant femmes et enfants à des risques d’abus sexuels ; il s’agit aussi d’étudier les mécanismes d’omerta, à savoir les pratiques qui organisent, autour de ces abus, des silences destructeurs.

Auditionnée par le Sénat puis par l’Assemblée nationale, Mme Judith Godrèche nous l’a rappelé : comme législateurs, nous avons le devoir d’examiner tout ce qui peut être mis en œuvre pour ne pas permettre que l’art serve de couverture à des agresseurs, et pour y assurer la protection des femmes et des enfants.

 


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proposition de rÉsolution

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, est créée une commission d’enquête de trente membres, chargée de :

– d’analyser les pratiques qui contreviennent au droit du travail ou aux droits de la personne humaine et singulièrement des enfants dans les industries et institutions du cinéma et du spectacle vivant ;

– d’analyser les mécanismes favorisant la perpétuation de violences sexistes et sexuelles et la protection de leurs auteurs dans les industries et institutions du cinéma et du spectacle vivant ;

– de formuler des recommandations visant à y remédier.