N° 2414

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 mars 2024.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

visant à lutter contre la disparition des abeilles et à sauver les apiculteurs français,

 

présentée par

M. Éric PAUGET, Mme Emmanuelle ANTHOINE, Mme Sylvie BONNET, M. Jean-Yves BONY, M. Fabrice BRUN, M. Éric CIOTTI, Mme Christelle D’INTORNI, Mme Marie-Christine DALLOZ, M. Vincent DESCOEUR, M. Julien DIVE, M. Francis DUBOIS, M. Nicolas FORISSIER, M. Jean-Jacques GAULTIER, Mme Annie GENEVARD, M. Victor HABERT-DASSAULT, M. Meyer HABIB, M. Mansour KAMARDINE, M. Marc LE FUR, Mme Véronique LOUWAGIE, Mme Alexandra MARTIN (ALPES-MARITIMES), Mme Frédérique MEUNIER, M. Yannick NEUDER, Mme Isabelle PÉRIGAULT, Mme Nathalie SERRE, M. Pierre VATIN, M. Stéphane VIRY,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Si l’abeille disparaissait du globe, l’Homme n’aurait plus que quatre années à vivre. » Voilà peut‑être comment Albert Einstein aurait pu définir sa théorie de la relativité, s’il décidait aujourd’hui, de l’appliquer au lien vital qui unit l’espèce humaine, les animaux et l’environnement.

Aussi discrète qu’imperceptible, la pollinisation véhiculée par les animaux qui collectent et répandent le pollen des fleurs par leurs déplacements, est indispensable pour la reproduction des plantes et des cultures. D’ailleurs, trois quarts des plantes produisant 90 % de la nourriture mondiale ont besoin de cette aide extérieure cruciale pour survivre.

Butinant de fleur en fleur, l’abeille est l’un des pollinisateurs les plus courants et le plus connu. Par son action vitale, elle préserve la diversité de la flore, de la faune et protège l’environnement. Enfin, outre le miel qu’elle produit et la filière apicole qu’elle fait vivre, cette véritable sentinelle de l’environnement est à l’origine de 35 % de la production alimentaire mondiale d’après l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture.

Alors que le tiers de notre alimentation dépend directement de ces insectes, la diminution des populations d’abeilles ne cesse de s’accroître depuis la fin des années 1970. Pire encore, cette mortalité s’est accélérée depuis une vingtaine d’année comme en témoignent les taux de décès annuels observés sur les colonies d’abeilles mellifères dépassant fréquemment les 30 % d’après le plan de développement durable de l’apiculture émis en 2013 par le ministère en charge de l’Agriculture.

Si de multiples facteurs concourent à la surmortalité des abeilles, leur plus grande menace réside désormais dans le frelon asiatique.

Accidentellement importé en 2004 par le commerce international avec la Chine, cet insecte allogène se révèle être un redoutable prédateur pour les colonies d’abeilles qu’il peut décimer en quelques heures. Désormais présent sur l’ensemble du territoire national, l’expansion fulgurante du frelon asiatique est particulièrement préoccupante pour la préservation de la biodiversité, car il attaque et se nourrit d’espèces pollinisatrices et d’abeilles mellifères.

D’ailleurs, outre la raréfaction des produits ruchers et les pertes économiques majeures causées à nos apiculteurs par ces frelons, la disparition mondialement reconnue de l’abeille par la communauté scientifique, pourrait aussi menacer notre sécurité alimentaire.

Chers collègues, alors qu’une espèce d’abeille sur dix est au bord de l’extinction en Europe, et que les trois quarts des bourdons pourraient disparaître d’ici un siècle si la température augmentait de trois degrés, promouvoir la sauvegarde des pollinisateurs doit s’imposer comme une nécessité. Tel était d’ailleurs l’objet de l’initiative portée par l’’ONU ayant proclamé le 20 mai « Journée mondiale de l’abeille » pour encourager les gouvernements et les citoyens à les protéger.

Or, ni l’arrêté pris en ce sens par la France le 28 novembre 2003, ni le plan national d’actions « France Terre de pollinisateurs » couvrant la période 2016‑2020, n’ont permis de protéger efficacement nos abeilles.

De même, le manque de résultats et de communication du Comité national de suivi du Plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation 2021‑2026, comme l’absence de véritable animation régionale de ce plan par les services de l’État pourtant censés répondre à la disparition annoncée des abeilles, n’ont permis d’enrayer leur déclin ou la prolifération des frelons asiatiques.

Face à l’urgence d’une situation qui perdure et condamne chaque jour davantage nos abeilles, notre biodiversité et l’avenir des générations futures, agir est un devoir. Tel est le sens de cette proposition de résolution visant à protéger les abeilles et à soutenir l’apiculture française.

Comptant sur la responsabilité et la mobilisation de tous, elle invite le Gouvernement à prendre des mesures concrètes permettant de promouvoir et de protéger efficacement et durablement nos abeilles, tout en luttant résolument pour l’éradication du frelon asiatique. Ensemble, osons cette priorité absolue, en passant de la parole aux actes !

Enfin, Mesdames et Messieurs les Députés, connaissant votre engagement résolu en faveur de la préservation de l’environnement et notre engagement solidaire des générations futures, c’est en confiance que je vous demande de voter la présente proposition de résolution que j’ai l’honneur de porter devant la représentation nationale.

 

 


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proposition de DE RÉSOLUTION

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 de son Règlement,

Vu la Charte de l’environnement de 2004, et particulièrement son article 2,

Vu la stratégie de l’Union européenne en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030,

Vu l’article L. 411‑3 du code de l’environnement, et le plan national d’actions « France Terre de pollinisateurs » couvrant la période 2016‑2020 qu’il met en œuvre,

Vu le décret n° 2012‑845 du 30 juin 2012 relatif aux dispositions générales organisant la prévention, la surveillance et la lutte contre les dangers sanitaires de première et deuxième catégorie,

Vu l’arrêté du 28 novembre 2003 relatif aux conditions d’utilisation des insecticides et acaricides à usage agricole en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs,

Vu l’arrêté du 26 décembre 2012 relatif au classement dans la liste des dangers sanitaires du frelon asiatique,

Vu le plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation 2021‑2026,

Considérant que les ressources et les équilibres naturels ont conditionné l’émergence de l’humanité ;

Considérant que l’avenir des générations futures est indissociable de son milieu naturel ;

Considérant que l’environnement est le patrimoine commun des êtres humains ;

Considérant que le respect de la diversité biologique et le maintien du fragile équilibre qu’elle a construit, assurent un accès vital aux ressources naturelles pour l’Homme ;

Considérant que nous devons constamment œuvrer à la préservation de l’environnement, de la flore et de la faune ;

Considérant que nous devons assurer un développement durable par des choix permettant de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins ;

Considérant que la disparition alarmante des abeilles en France constitue un drame écologique qui ne cesse de s’accélérer ;

Considérant que la mise en œuvre des mesures gouvernementales et des plans s’y rattachant, n’ont pas permis d’enrayer le déclin des colonies d’abeilles ;

Considérant que les frelons asiatiques constituent une menace persistante pour les abeilles et notre apiculture française ;

Considérant que la disparition des abeilles pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement et menacer le futur de l’Homme ;

Considérant que nous avons le devoir de répondre à l’urgence en prenant des mesures de lutte contre la disparition des abeilles ;

1. Rappelle au Gouvernement que toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement, notamment par la défense de la flore et de la faune ;

2. Invite le Gouvernement à déclarer la défense des abeilles « Grande cause nationale 2025 » ;

3. Encourage le Gouvernement à réfléchir à l’élaboration d’un plan national de lutte contre le frelon asiatique ;

4. Propose au Gouvernement d’inscrire les frelons parmi les espèces nuisibles afin de favoriser leur éradication ;

5. Demande au Gouvernement de renforcer le plan de soutien à la filière de l’apiculture française.