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N° 2553

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 mai 2024.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

invitant le Gouvernement à se prononcer contre les « mégacamions »
et à bâtir une politique de report modal vers le ferroviaire
au niveau européen,

(Renvoyée à la commission des affaires européennes)

présentée par Mesdames et Messieurs

JeanMarc ZULESI, Damien ABAD, Caroline ABADIE, Damien ADAM, Clément BEAUNE, Fanta BERETE, Debis BERNAERT, Anthony BROSSE, Anne BRUGNERA, Danielle BRULEBOIS, Christine DECODTS, Ingrid DORDAIN, Stella DUPONT, Philippe FAIT, Philippe FREI, Joël GIRAUD, Yannick HAURY, Brigitte KLINKERT, Michel LAUZANNA, Mathieu LEFEVRE, Christophe MARION, Lisiane METAYER, Marjolaine MEYNIERMILLEFERT, Karl OLIVE, Sophie PANONACLE, Patrice PERROT, Cécile RILHAC, AnneLaurence PETEL, Robin REDA, Claire COLOMBPITOLLAT, Philippe SOREZ, David VALENCE, Juliette VILGRAIN, Violette SPILLEBOUT, Mathilde DESJONQUIERES, Olivier FALORNI, Mohamed LAQHILA, Delphine LINGEMANN, Didier PADEY, Jimmy PAHUN, Luc LAMIRAULT, AnneCécile VIOLLAND, Philippe PRADAL, Véronique RIOTTON, Mireille CLAPOT, Louise MOREL, David AMIEL, Olga GIVERNET,

députés.

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le Parlement européen a adopté le 12 mars 2024 la révision de la directive autorisant des méga‑camions à circuler sur les routes européennes. Ces camions ("mégatrucks") avec deux remorques attachées peuvent mesurer jusqu’à 25 mètres et peser jusqu’à 60 tonnes contre 18,75 mètres et 44 tonnes actuellement.

Cette décision est incontestablement un message très négatif envoyé au fret ferroviaire européen.

L’Union Européenne, avec le Pacte vert s’est fixée des objectifs extrêmement ambitieux en termes de réduction d’émissions nettes de gaz à effets de serre : une diminution de 55 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990 et une neutralité des émissions à l’horizon 2050. Si ces objectifs font de notre continent l’un des plus vertueux sur le plan écologique, des politiques publiques adéquates doivent être menées.

En France, les transports représentent toujours le secteur le plus émetteur de gaz à effets de serre, et ce depuis 1998. En 2020, les transports sont responsables de 28,7 % des émissions nationales de GES, une contribution relativement moins forte qu’en 2019 où ils en représentaient 31,1 %, dont la réduction est en partie dû à la pandémie. Parmi cela, 28,6 % sont imputables aux camions. Au niveau mondial, les transports sont le deuxième émetteur au monde avec une part de 24,4 % des émissions totales. Bien que l’avion soit évidemment à comptabiliser dans ce total, la route, au sein de cette division reste responsable pour ¾ de ces émissions.

L’électrification des flottes de véhicules de poids lourds est pour l’instant largement insuffisante pour ne pas avoir recours au fret ferroviaire.

En effet, selon les scénarios les plus volontaristes, seulement 30 % des poids lourds seraient électrifiés à l’horizon 2035. En outre, le rétrofit des véhicules poids lourds est pour l’instant trop balbutiant et non rentable économiquement pour être considéré comme une alternative crédible. Ce scénario favorable nécessiterait en outre d’énormes investissements en installation de bornes de recharge mais aussi en stationnement. Si la volonté du législateur européen d’inclure une part de véhicules « très faibles émissions » dans les 60 tonnes est louable, elle semble se heurter à un principe de réalité.

Par ailleurs, l’intégration de véhicules aussi larges et lourds sur les infrastructures routières, notamment secondaires, auraient des effets délétères en termes d’entretien, d’adaptation mais aussi de trafic et de cohabitation avec les autres usagers.

Dans ces conditions, le report modal vers le ferroviaire semble être l’alternative idéale pour décarboner les mobilités mais aussi désengorger nos routes.

L’arsenal législatif européen en la matière existe avec les directives portant sur la création d’un espace ferroviaire unique européen ainsi que d’interopérabilité des systèmes ferroviaires. En sus, les différents paquets ferroviaires européens, mis en place depuis 2001, vont dans le sens d’une meilleure prise en compte du fret ferroviaire dans les politiques publiques nationales, en vue de faire émerger un fret ferroviaire paneuropéen pouvant servir de base solide à la décarbonation du transport de marchandise.

Aussi, il semble primordial de bâtir sur l’arsenal législatif existant, une politique volontariste de report modal vers le fret ferroviaire, dont la France pourrait prendre le leadership.

Tel est l’objet de la présente proposition de résolution.

 


proposition de résolution europÉenne

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu le Traité sur l’Union Européenne et le Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne,

Vu la directive 2023/0265 (COD) modifiant la directive 96/53/CE du Conseil fixant, pour certains véhicules routiers circulant dans la Communauté, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international,

Vu la directive (UE) 2012/34 établissant un espace ferroviaire unique européen,

Vu la directive (UE) 2016/797 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 relative à l’interopérabilité du système ferroviaire au sein de l’Union Européenne,

Vu le règlement (UE) 2021/1153 du parlement européen et du conseil du 7 juillet 2021 établissant le mécanisme pour l’interconnexion en Europe et abrogeant les règlements (UE) no 1316/2013 et (UE) no 283/2014.

Vu le règlement d’exécution (UE) 2023/1693 de la commission du 10 août 2023 modifiant le règlement d’exécution (UE) 2019/773 concernant la spécification technique d’interopérabilité relative au sous‑système « Exploitation et gestion du trafic » du système ferroviaire au sein de l’Union européenne,

Considérant la nécessité de décarboner durablement les mobilités de transports de marchandises ;

Considérant que seulement 30 % des poids lourds, selon les scénarios volontaristes, seraient électrifiés d’ici 2035 ;

Considérant l’impact des camions de 60 tonnes sur les infrastructures routières et la circulation ;

Considérant les objectifs du Pacte vert européen de réduction des émissions de gaz à effets de serre de 55 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux des années 1990 et de la fin des émissions nettes de gaz à effets de serre d’ici à 2050 ;

Considérant les enjeux d’interopérabilités ferroviaire à l’échelle européenne du transport de marchandises ;

Considérant l’apport décisif du fret ferroviaire dans la décarbonation du transport de marchandise ;

Invite la France à repousser la directive 2023/0265 (COD) modifiant la directive 96/53/CE du Conseil fixant, pour certains véhicules routiers circulant dans la Communauté, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international ;

Invite la France à jouer un rôle moteur dans la détermination d’une politique européenne globale de développement et de pérennisation du fret ferroviaire.