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N° 315

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2024.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête relative à l’infiltration des idéologies contraires aux valeurs de la République dans l’enseignement supérieur,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Lionel TIVOLI, Mme Bénédicte AUZANOT, M. Romain BAUBRY, M. Théo BERNHARDT, M. Anthony BOULOGNE, Mme Manon BOUQUIN, Mme Christelle D’INTORNI, Mme Sandra DELANNOY, M. Auguste EVRARD, Mme Alexandra MASSON, M. Bryan MASSON, M. Joseph RIVIÈRE, M. Thierry TESSON, M. Romain TONUSSI, M. Frédéric-Pierre VOS, M. Bruno BILDE, M. Gaëtan DUSSAUSAYE, M. Frédéric FALCON, M. Emmanuel FOUQUART, Mme Stéphanie GALZY, M. José GONZALEZ, M. Julien GUIBERT, M. Stéphane RAMBAUD, Mme Angélique RANC, M. Matthias RENAULT, Mme Sophie-Laurence ROY, M. Emmanuel TACHÉ DE LA PAGERIE, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, M. José BEAURAIN, M. Alexandre DUFOSSET, M. Emmanuel BLAIRY, M. Frédéric BOCCALETTI, M. Marc CHAVENT, Mme Nathalie DA CONCEICAO CARVALHO, M. Frank GILETTI, Mme Marine HAMELET, M. Pascal JENFT, Mme Laure LAVALETTE, M. Pierre MEURIN, M. Kévin PFEFFER, M. Julien RANCOULE, M. Franck ALLISIO, M. Philippe BALLARD, M. Guillaume BIGOT, Mme Sophie BLANC, M. Roger CHUDEAU, M. Bruno CLAVET, Mme Sandrine DOGOR-SUCH, M. Jordan GUITTON, M. Sébastien HUMBERT, M. Robert LE BOURGEOIS, Mme Gisèle LELOUIS, Mme Katiana LEVAVASSEUR, M. Julien LIMONGI, M. René LIORET, Mme Marie-France LORHO, M. Philippe LOTTIAUX, Mme Claire MARAIS-BEUIL, Mme Yaël MÉNACHÉ, M. Serge MULLER, Mme Lisette POLLET, Mme Laurence ROBERT-DEHAULT, M. Michaël TAVERNE, M. Antoine VILLEDIEU, M. Frédéric WEBER, M. Jorys BOVET, M. Jérôme BUISSON, M. Sébastien CHENU, Mme Géraldine GRANGIER, Mme Tiffany JONCOUR, M. Kévin MAUVIEUX, M. Nicolas MEIZONNET, M. Julien ODOUL, Mme Catherine RIMBERT, M. Emeric SALMON, M. Aurélien DUTREMBLE, M. Jonathan GERY, Mme Hanane MANSOURI,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’enseignement supérieur français est aujourd’hui confronté à un mal croissant, résultant de la prolifération de plusieurs idéologies dites « intersectionnelles » dans les établissements d’enseignement.

Les campus universitaires, participant autrefois au rayonnement de la France, sont depuis plusieurs années gangrénés par des courants de pensée, parfois violents, censurant quiconque ne partagerait pas leurs opinions. Ils développent également une haine, parfois absolue, de notre pays et de ses institutions.

Ces idéologies, venues des États‑Unis, qualifiées de « wokistes », se veulent prétendument « éveillées », « déconstruites », « antiracistes » et « anti‑discriminations ». Pourtant, ces idées issues de la « French Theory » – dénommée ainsi car développée sur les campus américains à partir d’idées souvent issues d’intellectuels français – ne sont que le boomerang de la déconnexion, de l’inaction ou même de la complaisance de certains dirigeants universitaires face aux actions menées par ces courants de pensées.

La violence est de retour sur les campus universitaires après plusieurs années de disparition. Les prétendues associations antiracistes n’hésitent en aucun cas à utiliser ce champ d’action pour imposer leurs opinions et nuire à la majorité silencieuse. Les violences sur les campus touchent aussi bien les professeurs que le personnel administratif et les étudiants. Elles peuvent être physiques, morales ou psychologiques. En mai 2023, une inscription sur les murs de l’Université de Grenoble « mort à Yvenn, mort à Samuel » deux étudiants de l’association de droite UNI, faisait polémique. Dans cette même ville, quelques mois seulement après l’assassinat de Samuel Paty, les noms de deux professeurs étaient placardés à l’entrée de leur établissement. La raison, avoir réfuté le terme d’ « islamophobie ». L’un des professeurs menacés de mort a été sanctionné par la direction de l’établissement et n’y a plus enseigné. Les auteurs des faits, se revendiquant du syndicat Union nationale des étudiants de France (UNEF), ont quant à eux été acquittés et ont pu poursuivre leurs études. 

Les complaisances et l’inaction des directions d’établissements ou des présidences d’universités à l’égard des groupuscules d’extrême gauche sont légion. Dans plusieurs établissements d’enseignement supérieur, les présidents d’université et les directeurs d’établissement se couchent face à des minorités d’individus, qui bloquent, censurent et agressent. À Science Po Paris, la direction de l’établissement a cédé au blocage du campus en annonçant la fin des procédures disciplinaires à l’encontre de certains étudiants. Durant les blocages survenus à l’occasion de la réforme des retraites, plusieurs campus ont été dégradés. En tout, ce sont près de 6 millions d’euros de dégâts enregistrés, sans que cette facture ne soit répercutée par les universités sur les responsables des dégradations, pourtant facilement identifiables.

Certains campus universitaires sont devenus des lieux pré‑insurrectionnels, souvent bloqués, occupés pendant des jours, des semaines voire plus. À l’Université Bordeaux Montaigne, le co‑fondateur du groupe terroriste Action Directe, condamné à la perpétuité pour tentative d’assassinat et apologie du terrorisme fut accueilli en grande pompe dans les amphithéâtres de l’Université par le syndicat étudiant Le Poing Levé, sans aucune réaction de la Présidence.

En parallèle d’une minorité qui impose ses discours, la censure s’installe. De nombreuses conférences d’universitaires, journalistes ou politiques sont annulées sous pressions des groupes d’extrême gauche. 

Annulation d’une conférence de M. François Hollande à l’Université de Lille ; 

Annulation de la pièce de théâtre Les Suppliantes d’Eschyle à Sorbonne Université, où les comédiens ont été empêchés de rentrer dans l’amphithéâtre par des activistes et des étudiants, à l’initiative du Conseil représentatif des associations noires de France (Cran) ;

Annulation de l'intervention d’une philosophe opposée à la Gestation Pour Autrui à l’Université Bordeaux Montaigne ; 

Annulation de la conférence du président de Génération Z à l’Université Côte d’Azur ;

Annulation d’une conférence en présence d’un essayiste à l’Université de Nantes ;

Pourtant, violence et censure ne sont, hélas, pas les seuls maux. Depuis plusieurs années, les universités sont des lieux de compromission où la laïcité est menacée. À l’Université Côte d’Azur, en 2021, un examen était décalé par un professeur pour « s’accommoder de la rupture du jeûne du ramadan ». Cette même institution récidive en 2024, avec l’annulation d’un examen, par un professeur, la veille de sa date uniquement pour les élèves musulmans afin de « célébrer l’aïd à la maison ». 

Dans plusieurs universités, les salles de classe sont parfois transformées en des lieux de prière. Les accointances entre milieux d’extrême gauche et revendications prosélytes sont à leur paroxysme depuis les récents évènements de Science Po Paris, où des actions et slogans à caractère antisémite ont été scandés : « from the river to the sea », « résistance palestienne » pour qualifier le Hamas ou encore l’utilisation du symbole « mains rouges ». 

En 2021, la ministre de l’Enseignement supérieur demandait au centre national de la recherche scientifique (CNRS) d’enquêter sur islamo-gauchisme à l’Université. Le CNRS réfutant le terme, ce coup de communication ne donna rien et l’accointance des établissements supérieurs avec l’islamisme s’est accrue. En parallèle, une anthropologue, chercheuse au CNRS, révéla dans une étude sur l’entrisme islamiste dans nos institutions et a mis en garde contre « la volonté des fréristes d’islamiser l’Occident ».

Pour avoir osé s’en prendre à l’islam politique, cette dernière, en plus d’être attaquée par les réseaux intégristes islamistes, fut largement critiquée par son directeur de recherche de l’époque, ainsi que par une partie du milieu universitaire français. 

Cet islamo‑gauchisme que certains ne veulent pas voir ou ne veulent pas nommer est pourtant l’élément fondamental du développement de l’antisémitisme dans les campus universitaires.

Une étudiante sortie d’amphithéâtre car juive, des fichages organisés par certaines associations à l’encontre d’étudiants et de professeurs sur la base de leur supposée appartenance politique. Des manifestations sauvages organisées en brandissant des drapeaux de la Palestine, des slogans de soutien au groupe terroriste Hamas et hostiles à l’État hébreu. Tout soutien à l’État d’Israël est aujourd’hui proscrit pour la sécurité des étudiants dans certains campus. Ces exemples, survenus à Science Po et ailleurs, traduisent la poussée des actes antisémites depuis le 7 octobre. Ils sont les conséquences de la passivité et de la lâcheté d’une classe dirigeante à l’égard de l’entrisme islamiste soutenu par les associations « wokes » et d’extrême gauche. 

Par la création d’un discours victimaire, censé défendre les opprimés, les mouvements wokes et islamo‑gauchistes, aux relents antisémites, se veulent aujourd’hui intouchables dans nos établissements d’enseignement supérieur. Les gouvernements et les directeurs d’établissements, parfois complices, sont aux abonnés absents et la récupération politique du conflit international dans la bande de Gaza fait ressurgir aux yeux du monde entier le mal qui ronge nos campus.

Une commission d’enquête parlementaire menée par le parti républicain aux États‑Unis a mis en lumière la complaisance et l’inaction des élites universitaires. Elle a également contribué à la démission de plusieurs présidents d’universités prestigieuses, dont la présidente de l’Université de Harvard. Lors de la précédente législature, une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative au respect des valeurs de la République et du pluralisme dans l’enseignement supérieur devant être débattue à l’Assemblée nationale n’a jamais pu voir le jour en raison de la précoce dissolution.

Sur ce même modèle, cette proposition de résolution prévoit donc de demander la création d’une commission d’enquête parlementaire. 

Tel est l’objet de cette proposition de résolution.

 


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proposition de rÉsolution

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, est créée une commission d’enquête de trente membres, chargée : 

1° De mesurer l’impact de l’infiltration des idéologies contraires aux valeurs de la République dans l’enseignement supérieur ;

2° D’analyser la censure dans les établissements d’enseignement supérieur ;

3° D’identifier les accointances de certains universitaires, présidents d’université, directeurs de campus et directeurs de formation avec des groupuscules prônant un discours de haine et de violence, excluant du débat et du dialogue social quiconque ne penserait pas comme eux ;

4° De diagnostiquer la prolifération de l’antisémitisme sous couvert d’antisionisme ;

5° D’émettre des recommandations sur les réponses à y apporter.