N° 782

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 janvier 2025.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

visant à simplifier et améliorer la législation et la réglementation en vigueur concernant les défibrillateurs automatisés externes,

 

présentée par

M. Hubert OTT, M. Erwan BALANANT, Mme Françoise BUFFET, M. Laurent CROIZIER, M. Olivier FALORNI, M. Jean-Carles GRELIER, Mme Sandrine JOSSO, Mme Sandrine LE FEUR, Mme Delphine LINGEMANN, Mme Lise MAGNIER, Mme Laure MILLER, Mme Sophie PANONACLE, M. Christophe PLASSARD, M. Charles SITZENSTUHL, M. Nicolas TURQUOIS, Mme Agnès FIRMIN LE BODO, M. Éric WOERTH, M. Olivier BECHT, M. Jérôme BUISSON, M. Sébastien CHENU, M. Denis FÉGNÉ, Mme Hélène LAPORTE, M. Vincent LEDOUX, M. Laurent MAZAURY, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, M. Jean-Pierre BATAILLE, M. Xavier BRETON, M. Joël BRUNEAU, M. Stéphane BUCHOU, Mme Josiane CORNELOUP, Mme Julie DELPECH, M. Moerani FRÉBAULT, M. Michel GUINIOT, M. Sacha HOULIÉ, M. Laurent JACOBELLI, M. Bartolomé LENOIR, M. Pierre MEURIN, M. Christophe NAEGELEN, Mme Constance DE PÉLICHY, M. Kévin PFEFFER, Mme Christine PIRÈS BEAUNE, M. Nicolas RAY, Mme Mereana REID ARBELOT, M. Xavier ROSEREN, Mme Violette SPILLEBOUT, Mme Anne-Cécile VIOLLAND,

députés et députées.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Chaque année, entre 40 000 et 50 000 personnes en France sont victimes d’arrêts cardiaques soudains. L’intervention rapide est cruciale, chaque minute sans prise en charge diminuant les chances de survie de 10 %. L’utilisation d’un défibrillateur automatisé externe (DAE), associée à un massage cardiaque, peut doubler, voire tripler les chances de survie.

Deux chiffres soulignent l’ampleur de cet enjeu de santé publique :

– 3 267 : le nombre de décès sur les routes françaises en 2022 ;

– 46 000 : le nombre d’arrêts cardiaques extra‑hospitaliers en France chaque année, avec un taux de survie d’environ 7 % (mortalité finale de 93 %, soit 42 780 morts par an).

En 1972, la mortalité routière atteignait 16 545 décès annuels. Grâce à des mesures ciblées et à l’implication des citoyens, ce chiffre a été réduit de manière spectaculaire au fil des décennies. Ce progrès montre qu’une approche stratégique, associée à une mobilisation collective, peut avoir un impact majeur sur la réduction des décès évitables.

L’enjeu est désormais de reproduire ce modèle pour réduire la mortalité liée aux arrêts cardiaques, un défi à la fois technique, organisationnel et sociétal.

L’évolution législative a déjà posé des bases solides pour lutter contre les arrêts cardiaques :

– Le décret n° 2007‑705 du 4 mai 2007 a élargi l’utilisation des DAE à l’ensemble de la population française après une formation minimale.

– La loi n° 2018‑527 du 28 juin 2018, dite loi "Défibrillateurs", a défini les établissements recevant du public (ERP) devant s’équiper de DAE, institué la base nationale GéoDAE pour leur localisation et rendu obligatoire la déclaration et la maintenance de ces appareils.

– La loi n° 2020‑840 du 3 juillet 2020 du « Citoyen sauveteur » a donné un statut protecteur aux intervenants laïcs, les intégrant comme collaborateurs occasionnels du service public.

– La réglementation européenne (Règlement européen 2017/745) de mai 2017, en classant les DAE comme dispositifs médicaux de classe III, impose des exigences renforcées pour leur conception, leur évaluation clinique et leur mise sur le marché, tout en prévoyant leur utilisation par le grand public.

Cependant, malgré ces avancées, des lacunes subsistent dans la mise en œuvre et l’efficacité des dispositifs :

1. Complexité du recensement des DAE : La déclaration dans la base GéoDAE, comprenant 18 champs obligatoires, est perçue comme lourde par les gestionnaires d’ERP, ralentissant le recensement et limitant l’efficacité de cet outil.

2. Absence d’un outil centralisé pour le public : Le manque de standardisation dans les applications existantes complique la localisation des DAE en cas d’urgence.

3. Défauts de maintenance : Environ 30 % des DAE ne seraient pas fonctionnels, en dépit de l’obligation légale d’entretien.

4. Manque de formation et de sensibilisation : Bien que l’objectif présidentiel de former 80 % des Français aux premiers secours d’ici 2022 n’ait pas été atteint, les initiatives restent insuffisantes pour garantir une couverture rapide et massive.

5. Sous‑équipement des ensembles d’habitation : Près de 70 % des arrêts cardiaques survenant à domicile, les résidents restent mal équipés pour faire face à ces urgences vitales.

Ces défis sont confirmés par des données issues du registre RéAC (Registre électronique des Arrêts Cardiaques), qui montrent une utilisation encore limitée des DAE par le grand public :

– la réanimation cardio‑pulmonaire (RCP) immédiate n’est réalisée que dans 36 % des cas ;

– un DAE public est utilisé dans seulement 9,5 % des cas recensés, bien que son usage progresse (14,8 % en 2024) ;

– la survie à 30 jours est de 30,1 % lorsque le DAE délivre un choc, contre 4,8 % en l’absence d’appareil.

Face à ces constats, nous proposons un ensemble de mesures visant à transformer la chaîne de survie en France face à un arrêt cardiaque :

Simplifier le recensement des DAE dans GéoDAE : Collaborer avec les SAMU, l’Association pour le Recensement et la Localisation des Défibrillateurs (ARLoD) et autres acteurs de terrain pour alléger le processus administratif, tout en garantissant un recensement exhaustif.

Créer une plateforme nationale unique : Développer un outil centralisé et institutionnel permettant aux citoyens d’identifier facilement les DAE les plus proches en situation d’urgence.

Renforcer la formation et la sensibilisation : Accroître l’accès aux gestes qui sauvent en généralisant la formation dans les écoles, entreprises et clubs sportifs. Privilégier une approche de formation continue, combinant outils numériques et sessions pratiques.

Garantir la maintenance des DAE : Introduire des contrôles stricts, similaires à ceux appliqués aux extincteurs, pour assurer la fonctionnalité permanente des dispositifs.

Équiper les ensembles d’habitation : Sensibiliser et inciter les syndics, bailleurs sociaux et copropriétaires à s’équiper en DAE et à former les résidents.

Ces actions visent à démocratiser l’accès aux DAE et à réduire les délais d’intervention. En mobilisant tous les acteurs concernés, il est possible d’abaisser significativement la mortalité associée aux arrêts cardiaques, à l’instar des succès obtenus en matière de sécurité routière.

 


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proposition de RÉSOLUTION

Article unique

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu le décret n° 2001‑1154 du 5 décembre 2001 relatif à l’obligation de maintenance et au contrôle de qualité des dispositifs médicaux prévus à l’article L. 5212‑1 du code de la santé publique du code de la santé publique,

Vu le décret n° 2018‑1186 du 19 décembre 2018 relatif aux défibrillateurs automatisés externes,

Vu la loi n° 2018‑528 du 28 juin 2018 relative au défibrillateur cardiaque,

Vu l’arrêté du 3 mars 2003 modifié fixant les listes des dispositifs médicaux soumis à l’obligation de maintenance et au contrôle de qualité mentionnés aux articles L. 5212‑1 et D. 665‑5‑3 du code de la santé publique,

Vu les articles L. 5233‑1, R. 5211‑5, R. 5212‑25, R. 5212‑28, R. 6311‑15 du code de la santé publique,

Vu les articles R. 157‑1 à R. 157‑4 du code de la construction,

Considérant que chaque minute sans intervention réduit de 10 % les chances de survie lors d’un arrêt cardiaque ;

Considérant que près d’un tiers des défibrillateurs automatisés externes en France ne sont pas opérationnels en raison d’une maintenance insuffisante ;

Considérant que la base GéoDAE et les outils actuels restent sous‑exploités faute de simplicité et d’unification ;

Invite le Gouvernement à simplifier les démarches administratives liées au recensement des défibrillateurs automatisés externes dans la base GéoDAE pour en maximiser l’efficacité.

Invite le Gouvernement à créer une application ou plateforme publique centralisée pour localiser les défibrillateurs automatisés externes.

Invite le Gouvernement à renforcer les campagnes nationales de sensibilisation aux arrêts cardiaques et aux gestes de premiers secours sur l’exemple de l’octobre rose.

Invite le Gouvernement à généraliser les formations en réanimation cardio‑pulmonaire et utilisation des défibrillateurs automatisés externes dans les écoles, entreprises et clubs sportifs.

Invite le Gouvernement à légiférer pour garantir la maintenance régulière et stricte des défibrillateurs automatisés externes, en formant des techniciens qualifiés et en organisant des contrôles périodiques.

Invite le Gouvernement à inciter à l’installation de défibrillateurs automatisés externes dans les ensembles d’habitation, en accompagnant les bailleurs sociaux et les syndicats dans cette démarche.