N° 1254
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 avril 2025.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
invitant le Gouvernement français à mettre fin aux importations de gaz naturel liquéfié russe et d’uranium sous contrôle russe,
présentée par
Mme Julie LAERNOES, Mme Cyrielle CHATELAIN, Mme Dominique VOYNET, M. Pouria AMIRSHAHI, Mme Christine ARRIGHI, Mme Clémentine AUTAIN, Mme Léa BALAGE EL MARIKY, Mme Lisa BELLUCO, M. Karim BEN CHEIKH, M. Benoît BITEAU, M. Arnaud BONNET, M. Nicolas BONNET, M. Alexis CORBIÈRE, M. Hendrik DAVI, M. Emmanuel DUPLESSY, M. Charles FOURNIER, Mme Marie-Charlotte GARIN, M. Damien GIRARD, M. Steevy GUSTAVE, Mme Catherine HERVIEU, M. Jérémie IORDANOFF, M. Tristan LAHAIS, M. Benjamin LUCAS-LUNDY, Mme Julie OZENNE, M. Sébastien PEYTAVIE, Mme Marie POCHON, M. Jean-Claude RAUX, Mme Sandra REGOL, M. Jean-Louis ROUMÉGAS, Mme Sandrine ROUSSEAU, M. François RUFFIN, Mme Eva SAS, Mme Sabrina SEBAIHI, Mme Danielle SIMONNET, Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN, M. Boris TAVERNIER, M. Nicolas THIERRY, M. Paul MOLAC, M. Laurent LHARDIT, Mme Colette CAPDEVIELLE, Mme Claudia ROUAUX, Mme Constance DE PÉLICHY, M. Mickaël BOULOUX, M. Maxime LAISNEY,
députées et députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie en février 2022 a marqué un tournant dans les relations internationales et a conduit l’Union européenne à adopter une série de sanctions économiques et énergétiques contre Moscou. Pourtant, alors que l’approvisionnement énergétique est présenté comme un enjeu stratégique majeur, certaines dépendances persistent dans une relative discrétion. Parmi elles, les importations françaises de gaz naturel liquéfié russe (GNL) et d’uranium sous influence du Kremlin.
Malgré les sanctions internationales visant à affaiblir les ressources économiques de Moscou et à limiter ses capacités militaires, la France a considérablement augmenté ses importations de GNL russe : les volumes importés ont augmenté de 81 % entre 2023 et 2024, représentant 2,68 milliards d’euros versés à des sociétés russes, selon l’Institute for Energy Economics and Financial Analysis (IEEFA). Elle est ainsi devenue, au premier semestre 2024, le premier importateur européen de GNL russe, concentrant 37 % des importations en Europe.
Le terminal méthanier de Dunkerque a réceptionné 27 % des importations européennes de GNL russe l’année dernière, suivi par celui de Montoir‑de‑Bretagne, également très actif dans les opérations de transbordement. La France, qui dispose de cinq terminaux méthaniers, est ainsi devenue une véritable plaque tournante pour la redistribution du GNL russe en Europe. Une fois regazéifié et injecté dans le réseau gazier, le GNL russe est mélangé aux autres flux et devient impossible à tracer. Une partie significative est très probablement ré‑exportée, notamment via les interconnexions vers l’Allemagne.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que l’Union européenne s’est fixé pour objectif de réduire sa dépendance aux énergies fossiles russes d’ici 2027, dans le cadre du plan REPower EU proposé par la Commission européenne en mai 2022. Pourtant, le GNL russe, contrairement au gaz naturel transporté par pipeline, reste exclu des régimes restrictifs de l’Union. Si le 14e paquet de sanctions, entrée en vigueur le 26 mars 2025, a introduit une mesure ciblée interdisant le transbordement du GNL russe vers des pays tiers hors Union européenne (20 % du GNL russe arrivé en Europe était jusqu’ici débarqué avant d’être réexpédié vers d’autres régions du monde), le 16e paquet de sanctions, adopté le 24 février 2025, n’inclut toujours pas d’interdiction directe des importations européennes de GNL russe. Cette exception permet à la Russie de maintenir des revenus énergétiques substantiels grâce à ces exportations. Elle constitue une aberration économique, écologique et géopolitique.
Une des raisons majeures de cette inertie coupable tient à la place de Total Energies dans l’architecture gazière russe. Le groupe français détient toujours 19,4 % de Novatek, le numéro deux du gaz russe, et reste actionnaire à hauteur de 20 % de Yamal LNG, la gigantesque usine installée en Sibérie. Total Energies y a investi des dizaines de milliards d’euros, ainsi que 10 % dans Arctic LNG 2, une nouvelle infrastructure en construction dans l’Arctique. L’entreprise française bénéficie d’un contrat de long terme avec Yamal LNG, qui lui permet de vendre plus de 4 millions de tonnes de GNL par an sur les marchés internationaux – soit 25 % de la capacité mondiale de Total Energies dans ce domaine. En avril 2022, son PDG, M. Patrick Pouyanné, justifiait encore cette position en déclarant : « Le volume sur ce contrat est énorme, il représente beaucoup d’argent et nous devons l’honorer tant que les sanctions nous permettent de le faire. ». Cette situation interroge fortement, non seulement la stratégie de Total Énergies, mais aussi le silence persistant des autorités françaises, qui jusqu’à présent n’ont pas remis en cause ces engagements industriels, malgré leurs implications géopolitiques et morales.
En ce qui concerne l’uranium, composant essentiel au fonctionnement des centrales nucléaires, la France continue d’importer des quantités significatives de ce combustible provenant directement de Russie ou via des pays faisant partie intégrante de la sphère d’influence politique et économique du Kremlin. Selon l’Agence d’approvisionnement du traité Euratom (ESA), la France a importé ces dix dernières années 88 200 tonnes d’uranium naturel, provenant notamment du Kazakhstan, du Niger, de l’Ouzbékistan ou encore de la Mongolie. Si les importations directes en provenance de Russie sont marginales, il convient de souligner que plusieurs de ces pays fournisseurs entretiennent des relations étroites avec Moscou, notamment au travers de partenariats énergétiques avec Rosatom, l’entreprise publique russe en situation de quasi‑monopole sur le transport et l’enrichissement d’uranium à l’échelle eurasiatique. Ainsi, même lorsque l’uranium ne provient pas directement du sol russe, son acheminement dépend largement d’infrastructures logistiques contrôlées par la Russie, qu’il s’agisse de voies ferrées, de ports ou de hubs de traitement.
Cette situation, largement documentée par l’association Greenpeace à travers les opérations de déchargement de conteneurs d’uranium naturel à Dunkerque, n’est pas seulement préoccupante à court terme : elle traduit une contrainte énergétique structurelle à l’égard de la Russie dans un secteur aussi critique que le nucléaire civil. La relance du programme nucléaire français, fondé notamment sur la construction d’au moins 6 réacteurs EPR dans les décennies à venir, rend cette dépendance encore plus critique. Alimenter ces installations pendant quarante à soixante ans nécessitera un approvisionnement stable en uranium naturel, dans un contexte international de plus en plus instable.
La situation au Niger, où le renversement du régime a remis en cause du jour au lendemain les relations de fourniture entre l’entreprise française Orano et l’État nigérien, démontre la fragilité des flux d’approvisionnement sur lesquels repose l’indépendance énergétique française. En continuant de s’appuyer sur des États sous influence russe ou des voies de transit contrôlées par Moscou, la France expose la sécurité et la sûreté de son parc nucléaire à des aléas géopolitiques majeurs. Cette vulnérabilité dépasse le seul cadre du conflit ukrainien : elle pose un enjeu de souveraineté énergétique nationale de long terme, qu’aucune politique d’indépendance sérieuse ne peut ignorer.
De surcroît, outre les importations d’uranium naturel liées à sa consommation nationale, la France est également importatrice et exportatrice de quantités importantes d’uranium enrichi pour y assurer des étapes indispensables du cycle du combustible, notamment pour le compte de pays tiers qui ne disposent pas des infrastructures et compétences nécessaires à cet effet. Ainsi, en 2023, selon les données des douanes françaises, près d’un tiers de l’uranium enrichi importé en France provenait de Russie, qui contrôle près de la moitié du marché mondial de l’enrichissement d’uranium. À ce jour, aucune information publique ne permet de distinguer ce qui est utilisé pour le parc français de ce qui transite simplement par la France. La transparence des données en la matière fait aujourd’hui défaut. Ces échanges se déroulent en toute discrétion, loin du débat public et parlementaire, mettant encore davantage en lumière notre fragilité, notre dépendance énergétique et notre incohérence stratégique en matière diplomatique et de souveraineté.
L’Union européenne dispose pourtant d’instruments juridiques lui permettant de limiter les importations d’uranium enrichi en provenance de Russie. En effet, l’Agence d’approvisionnement du traité Euratom (ESA), créée en 1957, dispose du droit exclusif de conclure des contrats pour la fourniture de matières nucléaires aux exploitants de centrales dans l’Union européenne. Si vendeurs et acheteurs peuvent librement négocier les termes d’un contrat, celui‑ci ne peut entrer en vigueur sans être contresigné par l’ESA. De surcroît, tout contrat d’approvisionnement supérieur à dix années doit être expressément validé par la Commission européenne. L’article 14 du statut de l’ESA permet d’ailleurs à celle‑ci de refuser un contrat s’il « porte préjudice à l’achèvement des objectifs d’Euratom ». En dépit de ces prérogatives claires, l’ESA s’est abstenue jusqu’à présent de faire usage de ses pouvoirs de blocage à l’égard des contrats passés avec des entreprises russes, en raison notamment de tensions internes entre États membres, dont la France, qui s’oppose de manière récurrente à une lecture restrictive de ces dispositions. Cette interprétation libérale et passive entre pourtant en contradiction avec les engagements politiques pris depuis plusieurs décennies. Dès 1993, la Déclaration de Corfou affirmait la volonté commune des pays d’Euratom de limiter à 20 % la part de la Russie dans le marché européen des matières nucléaires. Cet engagement demeure, à ce jour, largement lettre morte.
Ainsi, le maintien de ces importations implique que la France contribue indirectement à l’effort de guerre du Kremlin, via ses industries énergétique et nucléaire, et offre à la Russie des moyens de pression supplémentaires sur notre pays et nos alliés. Dans le secteur du nucléaire international en particulier, l’influence de Poutine et de son entreprise Rosatom augmentent les risques stratégiques pour la France, pays le plus nucléarisé du monde. Cette triste réalité soulève de fortes interrogations sur la cohérence des engagements et des actions de la France en matière de souveraineté et de transition énergétique, et de diplomatie notamment vis‑à‑vis de l’Ukraine.
L’Ukraine mène depuis plus de deux ans une résistance héroïque face à l’agression brutale d’un régime qui ne respecte ni le droit international, ni les principes démocratiques. Or, en continuant d’importer du GNL et de l’uranium provenant directement de Russie ou via des pays faisant partie intégrante de la sphère d’influence politique et économique de la Russie, la France perpétue un paradoxe inacceptable : tout en affirmant son soutien à l’Ukraine, elle contribue indirectement, par cette dépendance énergétique, à offrir des ressources économiques et stratégiques à l’État qui bombarde Kiev, Kharkiv et d’autres villes ukrainiennes.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que le contexte géopolitique connaît une aggravation majeure. La Russie a intensifié ses offensives et a repris du terrain sur le front Est, mettant l’Ukraine sous une pression militaire accrue. L’aide occidentale, essentielle à la résistance ukrainienne, se heurte désormais à des blocages politiques et financiers. Aux États‑Unis, le retour de Donald Trump à la Maison Blanche marque un tournant critique : l’engagement américain en faveur de l’Ukraine est remis en question.
Dans ce contexte, la responsabilité européenne s’accroît. La France et l’Union européenne ne peuvent plus compter sur un soutien inconditionnel des États‑Unis pour défendre l’Ukraine, pour se défendre, et contenir les velléités expansionnistes russes. Elles doivent, plus que jamais, adopter une politique cohérente et ferme, non seulement sur le plan diplomatique et militaire, mais aussi économique, énergétique et climatique. Il est inacceptable que la Russie puisse continuer de s’appuyer sur ses exportations d’uranium et de gaz vers l’Europe, alors même qu’elles constituent des outils économiques, stratégiques et militaires contre l’Ukraine et nos nations européennes.
En tant que grande nation européenne, il est impératif que la France cesse d’être un maillon faible dans cette politique de sanction et prenne ses responsabilités en mettant fin à cette complaisance et à cette soumission énergétique. Cela implique une volonté politique claire d’engager une véritable planification énergétique, mais aussi de soumettre à des exigences claires les partenariats privés, notamment ceux de Total Energies, qui contredisent les objectifs de souveraineté énergétique et de solidarité internationale affichés par la France. Les politiques de réduction des consommations d’énergie, notamment dans l’industrie, le bâtiment et les transports, doivent enfin devenir une priorité budgétaire. Enfin, les énergies renouvelables doivent être soutenues à la hauteur des enjeux, en leur garantissant des conditions de financement, avec une volonté politique ferme de leur accorder toute la place qu’elles méritent dans notre mix énergétique. Une coopération renforcée avec les partenaires européens est également indispensable afin d’assurer une transition énergétique cohérente avec les engagements géopolitiques et environnementaux de la France.
La présente proposition de résolution vise ainsi à poser les bases d’une politique énergétique et commerciale plus cohérente, qui prenne pleinement en compte la nécessité d’une indépendance réelle, fondée sur des choix stratégiques clairs et responsables, tout en réaffirmant avec force le soutien inébranlable de la France à l’Ukraine et la protection de l’intégrité de l’Union européenne. Mettre fin aux importations de GNL et d’uranium sous influence russe est une étape essentielle vers un modèle industriel et énergétique plus souverain et soutenable, en accord avec les objectifs climatiques, diplomatiques et sécuritaires que la France entend défendre. C’est aussi un impératif moral et stratégique : chaque contrat avec Gazprom, Rosatom, Yamal LNG ou avec des infrastructures russes associées est une ressource de plus pour alimenter la machine de guerre et géopolitique russe, et une trahison de l’engagement pris aux côtés du peuple ukrainien. Plus encore, face à une conjoncture mondiale incertaine, l’Europe et la France doivent dès maintenant renforcer leur autonomie énergétique et ne plus dépendre des ressources d’un État qui nous est hostile, qui est hostile à la paix et à la démocratie.
– 1 –
proposition de RÉSOLUTION
Article unique
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 34‑1 de la Constitution,
Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,
Vu la loi n° 2015‑992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte,
Vu le décret n° 2020‑456 du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l’énergie,
Vu le décret n° 2020‑457 du 21 avril 2020 relatif aux budgets carbone nationaux et à la stratégie nationale bas‑carbone,
Vu le règlement (UE) n° 2021/1119 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) n° 2018/1999 (« loi européenne sur le climat »),
Vu le plan REPower EU présenté par la Commission européenne le 18 mai 2022,
Vu les engagements pris par les États membres d’Euratom lors de la Déclaration de Corfou de 1993, visant à limiter la part de la Russie à 20 % du marché nucléaire européen,
Vu le statut de l’Agence d’approvisionnement d’Euratom, notamment son article 14,
Vu les conclusions du Conseil européen adoptées entre février 2022 et mars 2025,
Vu les conclusions du sommet de Versailles des 10 et 11 mars 2022 et la Déclaration des membres du Conseil européen du 30 septembre 2022 sur l’annexion illégale de territoires ukrainiens,
Vu les résolutions du Parlement européen relatives à l’agression de la Russie contre l’Ukraine, notamment les résolutions n° 2022/2564, n° 2022/2655, n° 2022/2851, n° 2022/1896 (RSP) et n° 2024/2799 (RSP),
Vu les règlements (UE) n° 208/2014, n° 269/2014, n° 692/2014, n° 833/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie contre l’Ukraine, régulièrement modifiés,
Vu le règlement (PESC) n° 2022/266 concernant des mesures restrictives en réponse à la reconnaissance, à l’occupation ou à l’annexion illégales par la Russie de certaines zones d’Ukraine non contrôlées par le gouvernement,
Vu le règlement (UE) n° 2022/263 concernant des mesures restrictives en réaction à la reconnaissance, à l’occupation ou à l’annexion illégales par la Russie de certaines zones d’Ukraine non contrôlées par le gouvernement,
Considérant que l’invasion et l’annexion illégales de la Crimée par la Fédération de Russie ont débuté le 20 février 2014, suivies par des opérations de déstabilisation dans les régions de Donetsk, Louhansk et Kharkiv à partir d’avril 2014, en violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine ;
Considérant que la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine depuis le 24 février 2022 constitue une rupture majeure avec le droit international ;
Considérant que la Russie manifeste de manière explicite sa volonté de mettre fin à l’existence de l’Ukraine en tant qu’État souverain et indépendant ;
Considérant que la Fédération de Russie a violé de manière flagrante les principes fondamentaux de la Charte des Nations unies, notamment l’interdiction du recours à la force, le respect de la souveraineté des États et de l’intégrité de leurs frontières ;
Considérant que malgré les sanctions imposées par l’Union européenne, la France demeure l’un des principaux importateurs européens de gaz naturel liquéfié en provenance de Russie ;
Considérant que ces importations génèrent des ressources économiques et stratégiques substantielles pour l’État russe, qui sont susceptibles d’alimenter son effort de guerre contre l’Ukraine ;
Considérant que le 14e paquet de sanctions européennes, entré en vigueur le 26 mars 2025, interdit les opérations de transbordement de gaz naturel liquéfié russe vers des pays tiers hors Union européenne, mais que cette mesure ne s’applique pas aux importations européennes elles‑mêmes ;
Considérant que le 16e paquet de sanctions, adopté le 24 février 2025, n’interdit toujours pas explicitement l’importation de gaz naturel liquéfié russe dans l’Union, en contradiction avec les objectifs du plan REPowerEU ;
Considérant que des acteurs économiques français majeurs, tels que Total Energies, maintiennent des engagements contractuels et capitalistiques dans les infrastructures gazières russes ;
Considérant que la chaîne d’approvisionnement en uranium utilisée par la France demeure, de manière directe ou indirecte, soumise à l’influence ou au contrôle de l’entreprise publique russe Rosatom ;
Considérant que l’Union européenne, via l’Agence d’approvisionnement d’Euratom, dispose de leviers réglementaires explicites pour contrôler les contrats d’importation de matières nucléaires, et notamment d’uranium enrichi, mais qu’elle s’abstient d’en faire usage à l’encontre des fournisseurs russes, en dépit des risques géopolitiques identifiés et des engagements pris en 1993 par les États membres visant à limiter à 20 % la part de la Russie dans le marché nucléaire européen ;
Considérant que la France ne peut soutenir l’Ukraine dans sa lutte pour la souveraineté et la démocratie tout en continuant à entretenir une dépendance énergétique vis‑à‑vis de l’État agresseur russe ;
Considérant que cette dépendance énergétique compromet aussi les objectifs de transition énergétique, de diversification des sources d’approvisionnement, et de sécurité stratégique de la France ;
Considérant que la France, en tant que puissance européenne dotée d’une forte capacité diplomatique et énergétique, a un rôle moteur à jouer dans l’établissement d’une politique européenne cohérente, alignée sur les valeurs de solidarité, de paix et d’indépendance énergétique ;
Considérant que la France a toujours affirmé un attachement particulier à la souveraineté de l’Ukraine, au respect du droit international et à la recherche d’une paix juste et durable sur le continent européen ;
Considérant que la situation géopolitique actuelle appelle un renforcement de la cohérence entre les engagements diplomatiques de la France et sa politique énergétique ;
Invite le Gouvernement français :
– à cesser, dans les plus brefs délais, toute importation de gaz naturel liquéfié en provenance directe ou indirecte de la Fédération de Russie ;
– à mettre fin à l’importation d’uranium naturel, enrichi ou sous toute autre forme, lorsqu’il transite par des infrastructures ou des entités sous contrôle ou influence de l’entreprise Rosatom ;
– à établir un mécanisme de transparence et de traçabilité sur l’origine et les flux d’uranium et de GNL, notamment en rendant public l’ensemble des données relatives aux importations et aux transitaires concernés ;
– à engager une révision des contrats commerciaux et des accords intergouvernementaux susceptibles de maintenir une dépendance à l’égard de l’énergie d’origine russe ;
– à conditionner tout soutien public aux entreprises du secteur de l’énergie à leur désengagement effectif des partenariats industriels avec des entités russes, notamment dans le domaine du gaz naturel liquéfié ;
– à soutenir activement, au sein de l’Union européenne, l’activation des pouvoirs de blocage de l’Agence d’approvisionnement du traité d’Euratom sur les contrats d’importation de matières nucléaires impliquant Rosatom ;
– à présenter une loi de programmation énergétique, au sens de l’article L. 100‑1 A du code de l’énergie, en renforçant les mesures de sobriété et d’efficacité énergétique, en soutenant massivement le développement des énergies renouvelables ;
– à inscrire ces objectifs dans une stratégie nationale bas‑carbone et une programmation pluriannuelle actualisée, cohérente avec les engagements climatiques et géopolitiques de la France.