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N° 214

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 août 2022.

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du RoyaumeUni de GrandeBretagne et d’Irlande du Nord relatif à la coopération sur les questions de sûreté maritime et portuaire s’agissant spécifiquement des navires à passagers dans la Manche,

(Procédure accélérée)

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de Mme Élisabeth BORNE,

Première ministre,

par Mme Catherine COLONNA,
ministre de l’Europe et des affaires étrangères,

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’accord intergouvernemental franco‑britannique relatif à la coopération sur les questions de sûreté maritime et portuaire s’agissant spécifiquement des navires à passagers dans la Manche s’inscrit dans la continuité des travaux engagés depuis 2015 dans le cadre de la lutte contre la menace terroriste. Il vise à structurer la coopération bilatérale franco‑britannique en matière de sûreté maritime et portuaire.

Dans un contexte de menace terroriste amplifiée par les attentats de 2015, les autorités françaises et britanniques sont convenues de la nécessité de renforcer la sûreté maritime dans la Manche. Un arrangement technique permettant l’embarquement d’équipes de protection de navires à passagers (EPNAP) françaises à bord des navires à passagers battant pavillon français a ainsi été signé dès 2016 entre le ministère des armées et le Home Office britannique.

Lors du sommet de Sandhurst en janvier 2018, les autorités politiques française et britannique ont annoncé un projet d’accord intergouvernemental franco‑britannique de sûreté maritime et portuaire destiné à renforcer la protection des navires à passagers en Manche. Cet accord a été signé le 26 juillet 2021. Il devra être complété par la rédaction d’un arrangement technique précisant les modalités d’embarquement des EPNAP et par l’élaboration d’une planification conjointe en matière d’opérations de contre‑terrorisme maritime.

L’accord intergouvernemental comporte quatre chapitres et dix‑huit articles.

Le chapitre Ier traite des stipulations générales de l’accord : objet, définitions, espaces maritimes couverts par l’accord.

L’article 1er précise l’objet de l’accord, lequel vise, d’une part, la poursuite de la coopération en matière de sûreté maritime et portuaire entre les parties et, d’autre part, le renforcement de la sécurité des passagers et de la sûreté des navires à passagers, en prévoyant les mesures destinées à prévenir et à faire cesser tout acte illicite défini à l’article 3 de la convention dite SUA ([1]). Ce dernier prévoit notamment que « 1. Commet une infraction pénale toute personne qui, illicitement et intentionnellement : / a) s’empare d’un navire ou en exerce le contrôle par violence ou menace de violence, /b) accomplit un acte de violence à l’encontre d’une personne se trouvant à bord d’un navire si cet acte est de nature à compromettre la sécurité de la navigation (…) c) détruit un navire ou cause à un navire ou à sa cargaison des dommages qui sont de nature à compromettre la sécurité de la navigation du navire (…) ».

L’article 2 définit les principaux termes utilisés dans l’accord et notamment les expressions « équipes de protection des navires à passagers », désignant les équipes composées d’agents de l’État (gendarmes maritimes pour la France et policiers pour le Royaume‑Uni) et « forces d’intervention », désignant des unités spécialisées dans la réponse opérationnelle aux actes illicites.

L’article 3 précise le champ géographique d’application de l’accord qui porte sur la zone maritime comprise entre la France et le Royaume‑Uni dans laquelle s’effectuent les liaisons transmanche.

Le chapitre II traite des mesures de coopération visant à prévenir les actes illicites relevant du champ d’application de l’accord, en mer et dans les ports.

L’article 4 prévoit le partage des informations relatives aux menaces en matière de sûreté maritime et portuaire.

L’article 5 énonce les dispositions générales de sûreté consistant en l’échange, dans le domaine de la sûreté maritime et portuaire, de toute information sur les bonnes pratiques sur ce sujet.

L’article 6 stipule que les parties réaliseront des exercices et des actions de formation dans le domaine de la sûreté maritime et portuaire.

L’article 7 prévoit le déploiement d’agents privés de sécurité sur les navires à passagers et précise que ces agents, qui ne sont pas armés, se conforment au droit de la partie d’envoi, et dans les eaux sous souveraineté de l’autre partie, au droit qui s’y applique.


L’article 8 porte sur le déploiement d’agents de l’État dont la vocation est de contribuer à assurer la sécurité des passagers et de l’équipage. Dans le cadre de la mission de prévention qui leur incombe en vertu de cet article, ces agents peuvent procéder à des patrouilles durant l’intégralité de la traversée et peuvent exercer des missions qui, pour les agents français, relèvent de la police administrative dans les eaux sous souveraineté française et en haute mer. Ces agents sont armés.

Le chapitre III traite des mesures visant à faire cesser les actes illicites relevant du champ d’application de l’accord, en mer et dans les ports.

L’article 9 prévoit l’intervention des agents privés ou des agents de l’État, en cas d’urgence, afin de faire cesser les actes illicites. Dans cette situation, les agents privés peuvent recourir à la légitime défense, les agents de l’État étant autorisés à mettre en œuvre « toutes les mesures provisoires nécessaires » comprenant au besoin le recours à la force.

L’article 10 organise une action conjointe des deux parties destinée à faire cesser l’acte illicite, faisant intervenir des unités gouvernementales spécialisées, autres que les agents des équipes de protection des navires à passagers.

Le chapitre IV traite des stipulations particulières de l’accord (stipulations financières, coopération en matière d’enquêtes, juridictions compétentes, règlement des dommages, règlement des différends).

L’article 11 prévoit que chaque Partie supporte les coûts lui incombant.

L’article 12 énonce les stipulations relatives aux enquêtes diligentées à la suite d’infractions présumées commises par un tiers ou un agent d’une partie à l’accord. Il distingue, d’une part, les enquêtes pénales réalisées dans le cadre d’infractions présumées commises par une tierce partie ou un agent de l’État de l’une ou l’autre des parties et, d’autre part, les enquêtes, pouvant revêtir un caractère administratif, s’agissant de faits qui ne reçoivent pas de qualification pénale.

L’article 13 a trait aux priorités de juridiction lorsqu’un agent d’un des deux États parties à l’accord a commis une infraction dans l’exercice de la mission prévue au présent accord. Ces stipulations reconnaissent une priorité de juridiction permettant à chaque partie de juger ses propres agents mais organise également la possibilité d’une renonciation et réaffirme le principe « non bis in idem ».

L’article 14 porte sur le règlement des dommages et distingue, d’une part, les dommages causés à une partie par un agent de l’autre partie et, d’autre part, les dommages causés par l’une des parties à un tiers. Dans le premier cas, les parties sont convenues de renoncer à toute demande d’indemnisation pour tout dommage commis par un membre du personnel de l’autre partie dans l’exercice de ses fonctions telles qu’elles sont décrites aux articles 8, 9 et 10. Seuls pourront donner lieu à indemnisation, après accord amiable des parties, les dommages résultant d’une faute intentionnelle ou d’une négligence grave. En cas de dommage causés à des tiers, l’accord prévoit la faculté pour une Partie de demander à être substituée par la partie sur le territoire de laquelle est engagée une action amiable ou contentieuse. L’accord règle la répartition de l’indemnisation du dommage entre les deux parties.

L’article 15 énonce les stipulations se rapportant, d’une part, à la protection des données à caractère personnel et, d’autre part, à l’échange d’informations classifiées.

L’article 16 organise le suivi de la coopération et crée, à cette fin, un groupe de coordination et de suivi qui se réunira annuellement ou à la demande de l’une des parties.

L’article 17 prévoit que le règlement des différends sera réglé par voie de consultation ou de négociation.

L’article 18 précise les stipulations finales relatives à l’entrée en vigueur de l’accord, à la faculté d’amender, de suspendre temporairement ou de dénoncer l’accord. L’entrée en vigueur est prévue pour le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière des notifications.

Telles sont les principales observations qu’appelle l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord relatif à la coopération sur les questions de sûreté maritime et portuaire s’agissant spécifiquement des navires à passagers dans la Manche.

 

 


projet de loi

La Première ministre,

Sur le rapport de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord relatif à la coopération sur les questions de sûreté maritime et portuaire s’agissant spécifiquement des navires à passagers dans la Manche, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, qui sera chargée d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

 

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord relatif à la coopération sur les questions de sûreté maritime et portuaire s’agissant spécifiquement des navires à passagers dans la Manche, signé à Paris le 26 juillet 2021, et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

Fait à Paris, le 24 août 2022.

 

Signé : Élisabeth BORNE,

Par la Première ministre :

 

La ministre de l’Europe
et des affaires étrangères

Signé : Catherine COLONNA

 


([1]) Convention pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime et décret n°2018-782 du 10 septembre 2018 portant publication de la convention pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime.