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N° 219

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 septembre 2022.

PROJET DE LOI

portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi,

(Procédure accélérée)

(Renvoyé à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

PRÉSENTÉ

au nom de Mme Élisabeth BORNE,

Première ministre,

par M. Olivier DUSSOPT,

ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion

 

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Le plein emploi est accessible si l’on prend sans tarder des mesures visant à améliorer le fonctionnement du marché du travail. Tendu vers cet objectif, le Gouvernement engage une première étape à travers le présent projet de loi.

Depuis la fin de la crise sanitaire, le marché du travail a déjà créé plus de 700 000 emplois et il continue de connaître une effervescence inédite : les actifs modifient leurs aspirations professionnelles et changent plus souvent d’entreprise, voire de métier. Les entreprises connaissent de ce fait des difficultés de recrutement bien plus importantes qu’avant la crise et une part grandissante des chefs d’entreprise déclare limiter leur activité faute de candidats disponibles. C’est le cas, par exemple, dans le secteur sanitaire, dans l’industrie ou les transports, où infirmiers, techniciens et conducteurs manquent massivement, la formation initiale et continue n’étant pas en capacité de répondre à court terme à la demande.

À l’urgence de la situation, le Gouvernement entend répondre par une première série de mesures visant à intervenir sur le régime d’assurance chômage, la valorisation des acquis de l’expérience et, de manière très circonstanciée, les élections professionnelles. Ces mesures doivent tout à la fois répondre à la pénurie de main‑d’œuvre en augmentant le nombre de personnes aptes à occuper un métier en tension, et accompagner les reconversions professionnelles des salariés en simplifiant l’accès à la validation des acquis de l’expérience.

Entrée en vigueur le 1er décembre 2021, la réforme de l’assurance chômage n’a pas encore pu produire tous ses effets. Or, ses règles prennent fin le 1er novembre 2022. Dans ces conditions et afin d’éviter toute rupture très fortement préjudiciable dans l’indemnisation des chômeurs et le recouvrement des contributions d’assurance chômage, il est nécessaire d’assurer rapidement la continuité du régime actuel. À défaut du cadre classique de fixation du régime d’indemnisation (lettre de cadrage et négociation des partenaires sociaux) qui se heurte à une absence de recul quant aux effets mêmes des règles actuelles et qui de plus nécessite un certain délai de mise en œuvre, l’article 1er du présent projet de loi confie temporairement au Gouvernement la définition des mesures d’application du régime d’assurance chômage, dont celles de Mayotte, à titre exceptionnel – au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023 – par décret en Conseil d’État. Ce délai permettra d’engager les concertations nécessaires sur l’évolution des règles d’indemnisation et les négociations sur la gouvernance, dont l’organisation actuelle ne correspond plus aux équilibres souhaités entre les partenaires sociaux, l’État, l’Unédic et Pôle Emploi.

Pour les mêmes motifs, cet article permet au Gouvernement de prolonger jusqu’à la date du 31 août 2024 le dispositif de modulation de la contribution patronale d’assurance chômage prévu à l’article L. 5422‑12 du code du travail, dit « bonus‑malus ».

L’article 2 prévoit que les données nécessaires à l’établissement du nombre de fins de contrats de travail imputées à l’employeur pour le calcul de son taux de contribution modulé seront communiquées par les organismes chargés du recouvrement, et en premier lieu l’Urssaf, à l’employeur, dans des conditions prévues par décret, afin que celui‑ci dispose de l’ensemble des éléments ayant conduit au calcul du taux qui lui est appliqué.

L’urgence commande également d’intervenir dès maintenant afin de sécuriser les élections professionnelles, qui permettent notamment de désigner les représentants des salariés, en raison de la censure par le Conseil constitutionnel des dispositions du code du travail définissant le corps électoral dans les entreprises, à compter du 1er novembre 2022. Afin de permettre la préparation et l’organisation des élections qui se tiendront à compter de cette date, il est nécessaire de définir dès à présent les règles applicables en la matière. L’article 3 du projet de loi définit ainsi les conditions requises pour être électeur. Il inscrit pour la première fois dans la loi les critères d’exclusion en matière d’éligibilité retenus de façon constante par la chambre sociale de la Cour de cassation et non remis en cause par la décision du Conseil constitutionnel.

L’urgence de la situation commande en outre de poser les premiers jalons d’une réforme de la validation des acquis de l’expérience (VAE), qui constitue la troisième voie d’accès à la certification aux côtés de la formation initiale et de la formation continue. Parce qu’elle est un levier majeur de promotion et d’aide à la résorption du chômage de longue durée dans des secteurs où les tensions de recrutement sont plus qu’exacerbées, l’article 4 du présent projet de loi ouvre plus largement cette voie d’accès, en autorisant les proches aidants et les aidants familiaux à faire valoir les compétences acquises dans la prise en charge de la dépendance ou de la fin de vie d’un membre de la famille, en permettant la comptabilisation des périodes de mise en situation en milieu professionnel au titre de la durée minimale d’expérience requise pour prétendre à la validation des acquis de l’expérience et en simplifiant certaines procédures.

Enfin, l’article 5 du présent projet de loi ratifie, sans aucune modification, vingt‑et‑une ordonnances portant mesures d’urgence dans les domaines du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle pour faire face à la crise sanitaire et ses conséquences.

Ce projet de loi est une première étape dans les adaptations législatives visant à lever les freins au plein emploi.

 


1

projet de loi

La Première ministre,

Sur le rapport du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

 

Fait à Paris, le 7 septembre 2022.

Signé : Élisabeth BORNE

Par la Première ministre :

Le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion,
Signé : Olivier DUSSOPT

 

 


Article 1er

Par dérogation aux dispositions des articles L. 5422‑20 à L. 5422‑24 et à celles de l’article L. 5524‑3 du code du travail, un décret en Conseil d’État, pris après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, détermine à compter du 1er novembre 2022 les mesures d’application des dispositions législatives relatives à l’assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422‑20 du même code. Ces mesures sont applicables jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023.

Toutefois les mesures d’application des dispositions des deuxième à septième alinéas de l’article L. 5422‑12 du code du travail peuvent recevoir application jusqu’au 31 août 2024. Le décret en Conseil d’État mentionné à l’alinéa précédent précise, notamment, les périodes de mise en œuvre de la modulation du taux de contribution des employeurs concernés, ainsi que les périodes au cours desquelles est constaté le nombre de fins de contrat de travail et de contrats de mise à disposition pris en compte pour le calcul du taux modulé.

Article 2

I. – L’article L. 5422‑12 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les données nécessaires à la détermination de la variable mentionnée au 1°, y compris celles relatives aux personnes concernées par les fins de contrats prises en compte qui sont inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi, peuvent être communiquées à l’employeur par les organismes chargés du recouvrement des contributions d’assurance chômage, dans des conditions prévues par décret. »

II. – Le I est applicable aux taux notifiés aux employeurs pour les périodes courant à compter du 1er septembre 2022.

Article 3

I. – Dans la sous‑section 3 de la section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre III de la deuxième partie du code du travail, il est rétabli un article L. 2314‑18 ainsi rédigé :

« Art. L. 231418. – Sont électeurs l’ensemble des salariés âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relatives à leurs droits civiques. »

II. – Le premier alinéa de l’article L. 2314‑19 est complété par les mots : « , ainsi que des salariés qui disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise ou qui le représentent effectivement devant le comité social et économique ».

III. – Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er novembre 2022.

Article 4

I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Au II de l’article L. 335‑5 :

a) Au premier alinéa, après les mots : « fonction élective locale », sont insérés les mots : « , ou apportant une aide en tant que proche aidant au sens de l’article L. 113‑1‑3 du code de l’action sociale et des familles, ou comme aidant familial au sens de l’article L. 245‑12 du même code, » ;

b) La dernière phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : « et les périodes de mise en situation en milieu professionnel mentionnées à l’article L. 5135‑1 du code du travail » ;

2° Au deuxième alinéa de l’article L. 613‑3 :

a) Les mots : « , ainsi que les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel suivie de façon continue ou non » sont supprimés ;

b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : « Elle peut également prendre en compte, que celles‑ci soient réalisées de manière continue ou non, les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel, ainsi que les périodes de mise en situation en milieu professionnel mentionnées à l’article L. 5135‑1 du code du travail. »

II. – Le code du travail est ainsi modifié :

1° Au 4° de l’article L. 6121‑1, les mots : « après la recevabilité de leur dossier de candidature » sont supprimés ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 6423‑1 :

a) Les mots : « dont la candidature a été déclarée recevable en application de l’article L. 6412‑2 » sont supprimés ;

b) Les mots : « dans la préparation de son dossier et », sont remplacés par les mots : « dans la constitution de ses dossiers de recevabilité et de validation, ainsi que dans la préparation » ;

3° À l’article L. 6323‑17‑6, il est inséré un deuxième alinéa ainsi rédigé :

« Cette commission peut, sous réserve du caractère réel et sérieux du projet, financer les dépenses afférentes à la validation des acquis de l’expérience du salarié, dans des conditions définies par voie réglementaire. »

Article 5

Sont ratifiées :

1° L’ordonnance n° 2020‑322 du 25 mars 2020 adaptant temporairement les conditions et modalités d’attribution de l’indemnité complémentaire prévue à l’article L. 1226‑1 du code du travail et modifiant, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation ;

2° L’ordonnance n° 2020‑323 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos ;

3° L’ordonnance n° 2020‑324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421‑2 du code du travail ;

4° L’ordonnance n° 2020‑346 du 27 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

5° L’ordonnance n° 2020‑386 du 1er avril 2020 adaptant les conditions d’exercice des missions des services de santé au travail à l’urgence sanitaire et modifiant le régime des demandes préalables d’autorisation d’activité partielle ;

6° L’ordonnance n° 2020‑388 du 1er avril 2020 relative au report du scrutin de mesure de l’audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés et à la prorogation des mandats des conseillers prud’hommes et membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles ;

7° L’ordonnance n° 2020‑389 du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives aux instances représentatives du personnel ;

8° L’ordonnance n° 2020‑507 du 2 mai 2020 adaptant temporairement les délais applicables pour la consultation et l’information du comité social et économique afin de faire face à l’épidémie de covid‑19 ;

9° L’ordonnance n° 2020‑770 du 24 juin 2020 relative à l’adaptation du taux horaire de l’allocation d’activité partielle ;

10° L’ordonnance n° 2020‑1255 du 14 octobre 2020 relative à l’adaptation de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle ;

11° L’ordonnance n° 2020‑1441 du 25 novembre 2020 portant adaptation des règles relatives aux réunions des instances représentatives du personnel ;

12° L’ordonnance n° 2020‑1442 du 25 novembre 2020 rétablissant des mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421‑2 du code du travail ;

13° L’ordonnance n° 2020‑1502 du 2 décembre 2020 adaptant les conditions d’exercice des missions des services de santé au travail à l’urgence sanitaire ;

14° L’ordonnance n° 2020‑1597 du 16 décembre 2020 portant mesures d’urgence en matière de congés payés et de jours de repos, de renouvellement de certains contrats et de prêt de main‑d’œuvre ;

15° L’ordonnance n° 2020‑1639 du 21 décembre 2020 portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

16° L’ordonnance n° 2021‑135 du 10 février 2021 portant diverses mesures d’urgence dans les domaines du travail et de l’emploi ;

17° L’ordonnance n° 2021‑136 du 10 février 2021 portant adaptation des mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

18° L’ordonnance n° 2021‑797 du 23 juin 2021 relative au recouvrement, à l’affectation et au contrôle des contributions des employeurs au titre du financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage ;

19° L’ordonnance n° 2021‑1013 du 31 juillet 2021 modifiant l’ordonnance n° 2020‑324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421‑2 du code du travail ;

20° L’ordonnance n° 2021‑1214 du 22 septembre 2021 portant adaptation de mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

21° L’ordonnance n° 2022‑543 du 13 avril 2022 portant adaptation des dispositions relatives à l’activité réduite pour le maintien en emploi.