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N° 1679

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 septembre 2023.

PROJET DE LOI

portant mesures d’urgence pour adapter les dispositions du code
de commerce relatives aux négociations commerciales
dans la grande distribution,

(Procédure accélérée)

(Renvoyé à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de Mme Élisabeth BORNE,

Première ministre,

par M. Bruno LE MAIRE,
ministre de l’économie, des finances et
de la souveraineté industrielle et numérique,

et par Mme Olivia GRÉGOIRE,
ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances
et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites
et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Selon les prévisions de l’INSEE pour 2023, la baisse des cours des matières premières agricoles et énergétiques, entamée depuis l’été 2022, devrait exercer une pression baissière sur les prix agricoles à la production puis sur les prix à la production des industries agroalimentaires (IAA).

Cette baisse pourrait même être accentuée par une « normalisation » des comportements de marges des IAA (les prévisionnistes de l’INSEE anticipent en effet qu’après cinq trimestres de forte hausse, le taux de marge des IAA pourrait baisser et retrouver son niveau de long terme).

Cette baisse des prix à la production des IAA expliquerait le ralentissement des prix à la consommation des produits de grande consommation (PGC) alimentaires observé depuis la mi‑avril 2023, baisse qui devrait se poursuivre, mais qui serait toutefois atténuée par la dynamique des coûts salariaux et par de probables comportements de reconstitution de marges des distributeurs.

Au regard du repli des cours mondiaux des matières premières alimentaires et énergétiques, les prix à la production des IAA pourraient nettement ralentir, voire fléchir du fait du moindre coût de leurs intrants et d’un retour graduel de leur marge unitaire à leur niveau de long terme.

L’inflation des prix à la consommation des produits alimentaires poursuivrait son ralentissement d’ici fin 2023 (prévision de + 7,4 % sur un an en décembre 2023 contre + 12,7 % sur un an en juillet 2023).

Dans ce contexte économique qui demeure difficile, le Gouvernement souhaite tout mettre en œuvre pour soulager les consommateurs de la forte pression liée à l’inflation qui pèse sur leur pouvoir d’achat. Cette pression est d’autant plus forte qu’elle s’exerce sur les produits de grande consommation, qui constituent, pour certains, des produits de première nécessité.

À cet égard, le Gouvernement a pris des initiatives au cours du second semestre 2023 pour conduire les acteurs économiques de la grande distribution à baisser les prix de vente des produits de grande consommation : trimestre anti‑inflation et renégociations entre fournisseurs et distributeurs visant à faire baisser les prix de 5 000 produits du quotidien.

Il est nécessaire de renforcer cette action de lutte contre l’inflation. Pour cela, afin d’accélérer la répercussion sur les prix de détail de la tendance baissière des prix des matières premières, ce projet de loi propose de modifier le calendrier des négociations commerciales entre les fournisseurs et les distributeurs de produits de grande consommation afin de permettre une entrée en vigueur anticipée des nouveaux tarifs en 2024.

Chaque année les négociations commerciales se déroulent entre le 1er décembre et le 1er mars. À l’issue de cette période, de nouveaux prix de vente des produits de grande consommation sont établis entre les fournisseurs et les distributeurs. Ces prix de vente de « gros » déterminent les prix de vente au consommateur.

Compte tenu des perspectives économiques, les prix de gros devraient baisser en 2024 pour un nombre important de produits de grande consommation. En conséquence, les prix de vente au consommateur devraient également diminuer.

L’objectif du présent projet de loi est d’avancer le cycle annuel des négociations commerciales afin de faire bénéficier les consommateurs de ces nouveaux prix de vente, en baisse, et ce au plus tôt dès le 16 janvier 2024 au lieu du mois de mars 2024.

L’article unique du projet de loi est relatif à l’avancement des négociations commerciales.

Le I de cet article prévoit que ce dernier s’applique aux distributeurs de produits de grande consommation dans leurs relations commerciales avec tout fournisseur dont le chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos est supérieur à 150 millions d’euros ou, si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, supérieur à un milliard d’euros.

Ceci exclut les contrats des PME et petites entreprises et des grossistes, le dispositif s’appliquant aux fournisseurs de produits de grande consommation représentant l’essentiel du chiffre d’affaires des acteurs de la grande distribution alimentaire.

Le I précise en outre que cet article s’applique à toute convention entre un fournisseur et un distributeur portant sur des produits ou des services commercialisés sur le territoire français. Ces dispositions seront d’ordre public et tout litige portant sur leur application relèvera de la compétence exclusive des tribunaux français, sous réserve du respect du droit de l’Union européenne et des traités internationaux ratifiés ou approuvés par la France et sans préjudice du recours à l’arbitrage.

Le II de l’article fixe, exceptionnellement pour l’année 2024, une nouvelle date limite de signature des contrats.

Par dérogation, les conventions visées seront conclues, pour l’année 2024, au plus tard le 15 janvier 2024 et prendront effet au 16 janvier 2024. Par conséquent, il est aussi prévu que les conventions visées en cours d’exécution au moment de l’entrée en vigueur de la présente loi prendront automatiquement fin le 15 janvier 2024.

Le III et le V prévoient des dispositions de coordination avec ces nouvelles échéances, le régime de sanction applicable et l’habilitation des agents de la DGCCRF à contrôler ces dispositions étant précisés au IV et au VI de l’article.

 


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projet de loi

La Première ministre,

Sur le rapport du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et de la ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi portant mesures d’urgence pour adapter les dispositions du code de commerce relatives aux négociations commerciales dans la grande distribution, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et la ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, qui seront chargés d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Fait à Paris, le 27 septembre 2023.

Signé : Élisabeth BORNE

Par la Première ministre :

Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

Signé : Bruno LE MAIRE

 

La ministre déléguée auprès du ministre de l’économie,
des finances et de la souveraineté industrielle et
numérique, chargée des petites et moyennes entreprises,
du commerce, de l’artisanat et du tourisme,
Signé : Olivia GRÉGOIRE

 


Article unique

I. – Les dispositions du présent article s’appliquent à tout distributeur de produits de grande consommation dans ses relations commerciales avec tout fournisseur dont le chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos est supérieur à 150 millions d’euros ou, si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, supérieur à un milliard d’euros.

Elles s’appliquent également à toute convention entre un fournisseur et un distributeur portant sur des produits ou des services commercialisés sur le territoire français.

Ces dispositions sont d’ordre public. Tout litige portant sur leur application relève de la compétence exclusive des tribunaux français, sous réserve du respect du droit de l’Union européenne et des traités internationaux ratifiés ou approuvés par la France et sans préjudice du recours à l’arbitrage.

II. – Par dérogation au IV de l’article L. 441‑3 du code de commerce et au B du V de l’article L. 443‑8 du même code, les conventions mentionnées au I de l’article L. 441‑4 et au I de l’article L. 443‑8 de ce code, lorsqu’elles sont signées avec un distributeur, sont, pour l’année 2024, conclues au plus tard le 15 janvier 2024 et prennent effet au plus tard le 16 janvier 2024.

Les conventions en cours d’exécution au moment de l’entrée en vigueur de la présente loi qui ont été signées avant le 1er septembre 2023 et dont le terme est postérieur au 16 janvier 2024 prennent automatiquement fin le 15 janvier 2024.

III. – Par dérogation au VI de l’article L. 441‑4 et au B du V de l’article L. 443‑8 du code de commerce, le fournisseur communique ses conditions générales de vente au distributeur au plus tard quarante‑cinq jours avant le 15 janvier 2024.

Par dérogation au C du V de l’article L. 443‑8, le distributeur dispose d’un délai de quinze jours à compter de la réception des conditions générales de vente pour soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu’il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation.

IV. – Tout manquement aux dispositions du II du présent article est passible de l’amende administrative prévue au troisième alinéa de l’article L. 441‑6 du code de commerce.

Tout manquement aux dispositions du III est passible de l’amende administrative prévue au premier alinéa du même article.

V. – Pour l’application aux conventions mentionnées par le présent article du II de l’article 9 de la loi n° 2023‑221 du 30 mars 2023 tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, les dates du 1er mars et du 1er avril sont remplacées, respectivement, par les dates du 15 janvier 2024 et du 15 février 2024.

VI. – Les agents mentionnés au II de l’article L. 450‑1 du code de commerce sont habilités à relever les manquements aux dispositions du présent article dans les conditions et avec les pouvoirs mentionnés aux articles L. 450‑2 à L. 450‑10 du même code.