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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUINZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 décembre 2017
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE, EN NOUVELLE LECTURE, SUR LE
PROJET DE loi de finances pour 2018 MODIFIÉ PAR LE SÉNAT
(n° 485),
Par M. Joël GIRAUD
Rapporteur général,
Député
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Voir les numéros :
Assemblée nationale : 1ère lecture : 235, 264 rect., 266 rect., 273 à 278 et T.A. 33.
Commission mixte paritaire : 493.
Nouvelle lecture : 485.
Sénat : 1ère lecture : 107, 108 à 114 et T.A. 26 (2017-2018).
Commission mixte paritaire : 168 (2017-2018)
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SOMMAIRE
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Pages
PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE PREMIER DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
Article 2 Indexation du barème de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation
Article 3 Dégrèvement de la taxe d’habitation sur la résidence principale
Article 7 ter (nouveau) Rétablissement du suramortissement exceptionnel de 40 % en 2018
Article 8 bis (nouveau) Prorogation du crédit d’impôt en faveur des maîtres‑restaurateurs
Article 9 ter Suppression de deux composantes de la TGAP
Article 10 ter Aménagements de dispositifs fiscaux propres à l’activité agricole
Article 11 Mise en œuvre du prélèvement forfaitaire unique
Article 11 ter Augmentation du taux de la taxe forfaitaire sur la cession des métaux précieux
Article 12 Création de l’impôt sur la fortune immobilière et suppression de l’ISF
Article 12 quater Taxe additionnelle sur l’immatriculation des voitures de sport
A. – Dispositions relatives aux collectivités territoriales
B. – Impositions et autres ressources affectées à des tiers
C. – Dispositions relatives aux budgets annexes et aux comptes spéciaux
Article 26 Relations financières entre l’État et la sécurité sociale
TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES
Article 28 Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois
SECONDE PARTIE : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE PREMIER AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2018 – CRÉDITS ET DÉCOUVERTS
Article 29 Crédits du budget général
Article 31 Crédits des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers
TITRE II AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2018 – PLAFONDS DES AUTORISATIONS D’EMPLOIS
Article 36 Plafonds des emplois de diverses autorités publiques
TITRE IV DISPOSITIONS PERMANENTES
I. – MESURES FISCALES ET MESURES BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES
Article 39 bis A (nouveau) Réforme de l’imposition des plus-values immobilières
Article 39 sexies Aménagement de la réduction d’impôt « Madelin »
Article 39 septies A (nouveau) Aménagement du volet solidaire de la réduction d’impôt « Madelin »
Article 39 septies C (nouveau) Simplification du compte « PME innovation »
Article 39 octies B (nouveau) Extension du crédit d’impôt en faveur du spectacle vivant au théâtre
Article 39 nonies Prorogation et aménagement du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE)
Article 40 Prorogation et réforme du prêt à taux zéro (PTZ)
Article 44 quinquies Suppression de trois dépenses fiscales de faible ampleur
Article 44 octies (nouveau) Réforme de la déduction pour aléas
Article 46 octies (nouveau) Rapport d’évaluation des conventions fiscales bilatérales
Article 47 bis Création d’une indemnité compensatrice de la hausse de la CSG pour les agents publics
Article 48 ter (nouveau) Déclaration par les plateformes en ligne des revenus de leurs utilisateurs
Administration générale et territoriale de l’État
Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales
Article 49 Suppression du fonds d’accompagnement de la réforme du micro-bénéfice agricole
Article 49 ter Rapport sur les modalités de financement de diverses aides agricoles
Article 52 Réforme des aides au logement et de la politique des loyers dans le parc social
Écologie, développement et mobilité durables
Article 54 octies Rapport sur le financement public de Business France
Engagements financiers de l’État
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Immigration, asile et intégration
Relations avec les collectivités territoriales
Article 59 Dotation de soutien à l’investissement local
Article 60 Répartition de la dotation globale de fonctionnement
Article 61 Modification des règles de répartition des dispositifs de péréquation horizontale
Article 62 bis Période de révision des attributions de compensation
Article 62 ter A (nouveau) Rapport sur les plans nationaux de santé publique
Solidarité, insertion et égalité des chances
Article 63 Champ des revenus professionnels pris en compte dans le calcul de la prime d’activité
Contrôle de la circulation et du stationnement routiers
Participations financières de l’État
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En première lecture, l’Assemblée nationale a inséré 106 articles additionnels et supprimé 2 articles (articles 8 et 53). Le texte adopté en première lecture, le 21 novembre 2017, comprenait ainsi 170 articles. La prévision de déficit budgétaire a été revue à 83,093 milliards d’euros.
En première lecture, le Sénat a :
– adopté conforme 91 articles et confirmé la suppression de 2 articles ;
– supprimé 23 articles ;
– modifié puis adopté 56 articles ;
– et inséré 71 articles additionnels.
Le texte adopté en première lecture, le 12 décembre 2017, comprenait ainsi 218 articles. La prévision de déficit budgétaire a été revue à 34,947 milliards d’euros, et celle du déficit public à 2,8 % du PIB.
Une commission mixte paritaire s’est réunie le 13 décembre 2017 pour examiner les dispositions restant en discussion, soit au total 150 articles supprimés, modifiés ou insérés par le Sénat. Celle-ci n’est pas parvenue à adopter un texte commun.
En effet, les positions des deux assemblées sont apparues inconciliables, le Sénat ayant supprimé les principales mesures fiscales du présent projet de loi de finances, dont le dégrèvement de taxe d’habitation sur les résidences principales et la création d’un impôt sur la fortune immobilière (IFI). Par ailleurs, le Sénat a rejeté les crédits de cinq missions budgétaires, ce qui a conduit à améliorer le solde budgétaire de l’État de manière artificielle et peu réaliste, sans toutefois en tirer les conséquences sur la prévision de déficit public.
Dans ces conditions, la commission mixte paritaire n’a pu que constater qu’elle ne pouvait parvenir à un accord sur l’ensemble des dispositions restant en discussion et a conclu à l’échec de ses travaux.
Une nouvelle lecture est dès lors nécessaire avant que le Gouvernement puisse demander à notre Assemblée de statuer définitivement par application du dernier alinéa de l’article 45 de la Constitution.
En nouvelle lecture, notre Assemblée est saisie du texte adopté par le Sénat en première lecture.
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Article liminaire
Prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble
des administrations publiques de l’année 2018, prévisions
d’exécution 2017 et exécution 2016
Aux termes de l’article 7 de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques ([1]), l’article liminaire du projet de loi de finances de l’année doit présenter « un tableau de synthèse retraçant, pour l’année sur laquelle elles portent, l’état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, avec l’indication des calculs permettant d’établir le passage de l’un à l’autre ».
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
Le présent article a été adopté par l’Assemblée nationale sans modification.
Il fixe, pour 2018, un objectif de déficit public de 2,6 % du produit intérieur brut (PIB), dont 2,1 points de déficit structurel, 0,4 point de déficit conjoncturel, et 0,1 point de mesures exceptionnelles.
Soldes DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES pour les années 2016 à 2018
(en % du PIB)
Soldes |
Exécution 2016 |
Prévision d’exécution 2017 |
Prévision 2018 |
Solde structurel (1) |
– 2,5 |
– 2,2 |
– 2,1 |
Solde conjoncturel (2) |
– 0,8 |
– 0,6 |
– 0,4 |
Mesures exceptionnelles (3) |
– 0,1 |
– 0,1 |
– 0,1 |
Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3) |
– 3,4 |
– 2,9 |
– 2,6 |
Source : présent article adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a adopté deux amendements, l’un augmentant pour 2018 la prévision de déficit public et des mesures exceptionnelles (A) et l’autre ajoutant au présent article un second tableau mentionnant, en euros, les informations contenues dans le tableau de synthèse (B).
A. Une augmentation de la prévision de déficit public et des mesures exceptionnelles pour 2018
Par un amendement de M. Jean-Claude Requier (Rassemblement démocratique et social européen - RDSE), ayant recueilli un avis favorable tant de la commission des finances que du Gouvernement, le Sénat a tiré les conséquences sur la prévision de déficit public de l’annulation par le Conseil constitutionnel de la contribution de 3 % sur les revenus distribués ([2]), d’une part, et de la création, par la première loi de finances rectificative pour 2017 ([3]), de deux contributions exceptionnelles sur l’impôt sur les sociétés dû en 2017 par les plus grandes entreprises, d’autre part.
Cet amendement rehausse la prévision de déficit public pour 2018 à 2,8 % du PIB au lieu de 2,6 %. Il rehausse également la prévision des mesures exceptionnelles à 0,2 % du PIB au lieu de 0,1 %.
En revanche, cet amendement ne modifie pas les prévisions d’exécution afférentes à l’année 2017.
Le Gouvernement avait présenté un amendement identique en séance mais l’a retiré au profit de celui de M. Jean-Claude Requier.
La mise en œuvre de la décision précitée du Conseil constitutionnel doit, en effet, entraîner une diminution des recettes fiscales nettes d’environ 10 milliards d’euros au titre des remboursements aux entreprises. Selon le Gouvernement, les remboursements de 10 milliards d’euros devraient être répartis en deux parts égales de 5 milliards d’euros sur les exercices 2017 et 2018. La décision du Conseil constitutionnel entraîne aussi 0,2 milliard d’euros de moindres recettes sur la seule année 2017.
Dans le même temps, les deux contributions crées par la première loi de finances rectificative pour 2017 devraient entraîner un gain budgétaire de 5,4 milliards d’euros dont 4,8 milliards d’euros dès 2017 et 0,6 milliard d’euros supplémentaires en 2018.
Le solde net de l’annulation du Conseil constitutionnel et des contributions devrait donc être de – 0,4 milliard d’euros sur 2017 et de – 4,4 milliards d’euros sur 2018.
impact budgétaire de l’invalidation par le Conseil constitutionnel
de la contribution de 3 % sur les montants distribués et des contributions créées par l’article 1er de la première loi de finances
rectificative pour 2017
(en milliards d’euros, sauf indication contraire)
Mesure |
Impact 2017 |
Impact 2018 |
Remboursements au titre de l’annulation de la contribution de 3 % sur les revenus distribués |
– 5,0 |
– 5,0 |
Moindres recettes au titre de la contribution de 3 % sur les revenus distribués |
– 0,2 |
0,0 |
Recettes des contributions exceptionnelles sur l’impôt sur les sociétés |
+ 4,8 |
+ 0,6 |
Total |
– 0,4 |
– 4,4 |
Total en % de PIB arrondi au dixième |
0,0 |
0,2 |
Source : commission des finances, d’après la première loi de finances rectificative pour 2017.
La prévision de déficit public pour 2017, exprimée en pourcentage de PIB arrondi au dixième, n’est pas impactée par le solde net de ces opérations. Une dégradation de 0,4 milliard d’euros du solde public correspond, en effet, à environ 0,018 point de PIB.
C’est la raison pour laquelle, l’amendement adopté n’a pas procédé à des modifications concernant les soldes prévus pour 2017.
Soldes DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES pour 2017
Soldes |
Version Assemblée nationale |
Version Sénat |
écart |
Solde structurel (1) |
– 2,2 |
– 2,2 |
0 |
Solde conjoncturel (2) |
– 0,6 |
– 0,6 |
0 |
Mesures exceptionnelles et temporaires (3) |
– 0,1 |
– 0,1 |
0 |
Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3) |
– 2,9 |
– 2,9 |
0 |
Source : présent article.
En revanche, la prévision de déficit public pour 2018 doit être rehaussée de 0,2 point de PIB pour tenir compte de la dégradation du solde public d’environ 4,4 milliards d’euros.
Par ailleurs, le solde net de ces opérations pour 2018 doit être traité en mesures exceptionnelles, ce qui conduit à rehausser également leur évaluation pour 2018.
Soldes DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES pour 2018
(en % du PIB)
Soldes |
Version Assemblée nationale |
Version Sénat |
écart |
Solde structurel (1) |
– 2,1 |
– 2,1 |
0 |
Solde conjoncturel (2) |
– 0,4 |
– 0,4 |
0 |
Mesures exceptionnelles et temporaires (3) |
– 0,1 |
– 0,2 |
– 0,1 |
Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3) |
– 2,6 |
– 2,8* |
– 0,2* |
* les règles d’arrondis expliquent l’écart de 0,1 point.
Source : présent article.
Le tableau de synthèse du présent article adopté par le Sénat se présente donc de la manière suivante :
Soldes DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES pour les années 2016 à 2018
(en % du PIB)
Soldes |
Exécution 2016 |
Prévision d’exécution 2017 |
Prévision 2018 |
Solde structurel (1) |
– 2,5 |
– 2,2 |
– 2,1 |
Solde conjoncturel (2) |
– 0,8 |
– 0,6 |
– 0,4 |
Mesures exceptionnelles et temporaires (3) |
– 0,1 |
– 0,1 |
– 0,2 |
Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3) |
– 3,4 |
– 2,9 |
– 2,8 |
Source : présent article adopté par le Sénat en première lecture.
B. un second tableau de synthèse en euros
Par un amendement de Mme Nathalie Goulet, ayant recueilli un avis de sagesse de la commission des finances et un avis défavorable du Gouvernement, le Sénat a ajouté au présent article un second tableau traduisant en euros les informations présentées en pourcentage de PIB dans le premier tableau.
Soldes DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES pour les années 2016 à 2018
(en milliards d’euros)
Soldes |
Exécution 2016 |
Prévision d’exécution 2017 |
Prévision 2018 |
Solde structurel (1) |
– 55,7 |
– 50,2 |
– 49,3 |
Solde conjoncturel (2) |
– 17,8 |
– 13,7 |
– 9,4 |
Mesures exceptionnelles et temporaires (3) |
– 2,2 |
– 2,3 |
– 2,3 |
Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3) |
– 75,8 |
– 66,2 |
– 61,1 |
Source : tableau inséré par le Sénat au sein du présent article.
III. La position DU RAPPORTEUR GÉNÉRAL
Le Rapporteur général propose d’adopter sans modification les alinéas 1 et 2 du présent article. Ces alinéas intègrent, en effet, la révision à la hausse de la prévision de déficit public et des mesures exceptionnelles pour 2018, exprimée en pourcentage de PIB.
Le Rapporteur général propose, en revanche, de supprimer les alinéas 3 et 4 relatifs au second tableau de synthèse, en euros, inséré par le Sénat.
En effet, l’article liminaire a essentiellement pour objet de permettre le suivi par la France de ses engagements européens en matière de finances publiques. Or, ces engagements sont exprimés en pourcentage de PIB, et non en euros. Le tableau en euros ne permet donc pas d’éclairer le débat parlementaire sur ce point.
Par ailleurs, les prévisions en euros sont plus précises et sont donc soumises à un aléa plus fort que les prévisions exprimées en pourcentage de PIB.
Enfin, le tableau inséré par le Sénat ne tient pas compte de la révision à la hausse de la prévision de déficit public et des mesures exceptionnelles pour 2018.
*
* *
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PREMIÈRE PARTIE :
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
Article 2
Indexation du barème de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
Le présent article vise à indexer sur l’inflation le barème de l’impôt sur le revenu, en revalorisant les différentes limites des tranches de 1 %, soit l’évolution prévisionnelle de l’indice des prix hors tabac en 2017 par rapport à 2016. Cette revalorisation emporte automatiquement celle de différents montants réputés être indexés chaque année comme la limite supérieure de la première tranche du barème, qui conditionnent selon les cas une exonération ou une minoration d’impôt, ou encore le plafonnement d’un avantage en impôt (par exemple, le plafond de la déduction forfaitaire de 10 % au titre des frais professionnels ou le plafond de l’abattement de 10 % sur les pensions).
Le présent article procède également à l’indexation de 1 % du montant de la décote, que ce soit pour les contribuables célibataires ou pour ceux soumis à imposition commune, et des plafonds de l’avantage retiré de l’application des différentes parts et demi-parts de quotient familial, y compris celles attribuées au titre de situations particulières (anciens combattants, personnes invalides, parents isolés…).
Cet article a été adopté par l’Assemblée nationale sans modification.
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a modifié cet article en adoptant deux amendements, le premier de M. Jean-Claude Requier (RDSE) et le second de la commission des finances, le Gouvernement ayant pour chacun d’entre eux émis une demande de retrait, tandis que la commission de finances a émis la même demande sur l’amendement de M. Requier.
● Le premier amendement modifie le barème de l’impôt sur le revenu prévu par l’article 197 du code général des impôts (CGI), en restaurant la tranche à 5,5 % qui a été supprimée par la loi de finances pour 2015 ([4]), tout en rehaussant, corrélativement, le seuil d’entrée dans la tranche à 14 %. Les modifications apportées visent ainsi à rétablir le barème de l’impôt sur le revenu applicable jusqu’à l’imposition des revenus de 2013, dont les tranches auraient été revalorisées selon l’indexation effectuée par les lois de finances successives (soit 0,5 % pour l’imposition des revenus de 2014, 0,1 % pour ceux de 2015 et 2016 et 1 % pour ceux de 2017).
Ainsi, le barème de l’impôt sur le revenu serait le suivant, à compter de l’imposition des revenus de 2017 :
Barème applicable pour l’imposition des revenus de 2017
Texte adopté par l’Assemblée nationale |
Texte adopté par le Sénat |
||
Fraction du revenu imposable |
Taux |
Fraction du revenu imposable |
Taux |
Inférieure à 9 807 euros |
0 % |
Inférieure à 6 114 euros |
0 % |
Supérieure à 6 114 euros et inférieure à 12 196 euros |
5,5 % |
||
Supérieure à 9 807 euros et inférieure ou égale à 27 086 euros |
14 % |
Supérieure à 12 196 euros et inférieure ou égale à 27 086 euros |
14 % |
Supérieure à 27 086 euros et inférieure ou égale 72 617 euros |
30 % |
Supérieure à 27 086 euros et inférieure ou égale 72 617 euros |
30 % |
Supérieure à 72 617 euros et inférieure ou égale à 153 783 euros |
41 % |
Supérieure à 72 617 euros et inférieure ou égale à 153 783 euros |
41 % |
Supérieure à 153 783 euros |
45 % |
Supérieure à 153 783 euros |
45 % |
Cet amendement a pour objectif d’élargir l’assiette de l’impôt sur le revenu, afin d’assujettir à l’impôt des foyers fiscaux qui ne sont pas imposables du fait du niveau de leurs revenus. Pour autant, la décote, telle que réformée par les lois de finances pour 2015 et pour 2016 ([5]), associée à la réduction d’impôt sous condition de revenu fiscal de référence (RFR) introduite par la loi de finances pour 2017 ([6]), viennent annuler l’impôt issu du barème lorsqu’il est inférieur à 715 euros pour un célibataire et à 1 150 euros pour un couple. De ce fait, l’amendement adopté n’emporte des effets sur le point d’entrée dans l’impôt et le niveau d’imposition des foyers fiscaux qu’au-delà de quatre parts, soit une famille de trois enfants, ce qui n’est probablement pas l’objectif poursuivi par l’amendement.
● Le second amendement porte le plafond de l’avantage retiré du quotient familial pour chaque demi-part de 1 512 à 1 750 euros. Il vise à redistribuer du pouvoir d’achat aux familles, après les deux diminutions du plafond du quotient familial réalisées par les lois de finances pour 2013 puis pour 2014. Ce relèvement du plafonnement bénéficierait aux foyers fiscaux relevant pour l’essentiel des deux derniers déciles.
Le coût de la mesure est estimé à 550 millions d’euros, pour 1,4 million de foyers fiscaux bénéficiaires, soit un gain moyen de près de 400 euros par foyer.
III. la position du rapporteur général
Le premier amendement, qui vise à rétablir la tranche à 5,5 %, n’aurait pas, en pratique, les effets escomptés par son auteur ; par ailleurs, l’objectif poursuivi par la présente majorité n’est pas d’alourdir l’impôt sur le revenu acquitté par les ménages aux revenus modestes.
Le rehaussement du plafond du quotient familial a fait l’objet d’un débat nourri dans notre commission des finances, mais il n’a pas été retenu, notamment au motif que la politique familiale devait faire l’objet de travaux approfondis au sein de la commission des affaires sociales, en incluant tous ses volets, à la fois fiscaux et sociaux.
Le Rapporteur général propose donc de rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale.
*
* *
Article 2 bis A (nouveau)
Régime fiscal et social applicable aux utilisateurs de plateformes en ligne
I. Les dispositions adoptées par le Sénat
Le présent article résulte de l’adoption par le Sénat d’amendements identiques déposés par M. Philippe Dallier (Les Républicains - LR), les sénateurs membres du groupe La République en Marche ainsi que ceux du groupe socialiste et républicain, avec l’avis favorable de la commission des finances mais contre l’avis défavorable du Gouvernement.
S’inscrivant dans la continuité des propositions nos 1 et 2 du rapport d’information de la commission des finances du Sénat du 29 mars 2017 ([7]), il vise à mettre en place un régime fiscal et social spécial pour les revenus perçus par l’intermédiaire de plateformes en ligne et relevant des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices non commerciaux (BNC) et des revenus fonciers.
Ce dispositif consiste :
– en un abattement forfaitaire de 3 000 euros sur ces revenus (pour les redevables relevant d’un régime micro-fiscal, il est prévu que l’abattement applicable au titre d’un tel régime ne peut être inférieur à 3 000 euros) ;
– en dispensant d’affiliation obligatoire au régime social des travailleurs indépendants (RSI) non agricoles les redevables qui perçoivent moins de 3 000 euros par l’intermédiaire de plateformes en ligne.
À cet effet, le présent article, à son I, introduit dans le code général des impôts (CGI) un nouvel article 155 et prévoit, à son II, l’absence d’affiliation obligatoire au RSI.
Concrètement, si les revenus tirés d’une activité réalisée au moyen d’une plateforme en ligne n’excèdent pas ce seuil de 3 000 euros, aucun impôt n’est dû à leur titre et leurs titulaires ne sont pas considérés comme des professionnels. S’ils sont supérieurs à ce seuil, les revenus ne sont imposés que pour leur part excédentaire.
L’entrée en vigueur du dispositif est prévue pour le 1er janvier 2019, dans la mesure où elle est conditionnée à celle des nouvelles obligations déclaratives incombant aux plateformes en ligne en vertu de l’article 1649 quater A bis du CGI.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Le dispositif adopté par le Sénat est similaire à celui qu’avait proposé le président de notre commission des finances lors de l’examen en première lecture de la première partie du présent projet de loi de finances et qui avait été rejeté, après avoir fait l’objet d’avis défavorables de la part de la commission et du Gouvernement. L’une des motivations qui avaient alors été avancées à l’appui de l’amendement reposait sur le fait qu’en l’état, de nombreux revenus tirés des plateformes en ligne n’étaient pas déclarés.
La fiscalité des revenus tirés de l’économie collaborative, notamment par l’intermédiaire d’une plateforme en ligne, pose de réelles questions qui ne sont pas toutes correctement appréhendées par le droit fiscal actuel. Le sujet est important et ne doit pas être éludé. Des premières mesures ont d’ailleurs été prises dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, qui a mis en place des plafonds de revenus en deçà desquels l’affiliation au régime social des travailleurs indépendants n’est pas obligatoire ([8]). Par ailleurs, l’article 45 du projet de loi de finances pour 2018 prévoit une exonération de cotisation minimum de cotisation foncière des entreprises pour les redevables dont le chiffre d’affaires n’excède pas 5 000 euros.
Pour le reste, et malgré l’intérêt du thème qu’il aborde, le dispositif adopté par le Sénat présente plusieurs difficultés.
● D’une part, son coût n’est pas chiffré mais pourrait se révéler conséquent et irait croissant, compte tenu de l’usage de plus en plus répandu des plateformes visées. Le volume des transactions et leurs montants sont considérables : à titre d’exemple, et pour reprendre les chiffres publiés dans le rapport d’information de mars 2019 précité, 350 000 annonces en France ont été publiées en 2016 sur le site Airbnb, tandis que près de 100 millions de transactions ont été réalisées via la plateforme Leboncoin, pour un total de 21 milliards d’euros.
● D’autre part, il est paradoxal de prévoir, aux fins d’un meilleur recouvrement de l’impôt sur le revenu (IR), un abattement de 3 000 euros. Comme le relevait d’ailleurs devant notre Assemblée le ministre de l’action et des comptes publics, M. Gérald Darmanin, « il est curieux de vouloir lutter contre la non-déclaration des revenus en créant une exonération » ([9]). Par ailleurs, au-delà de la question de principe, mettre en place une franchise de 3 000 euros risquerait de conduire à des abus importants.
● Enfin, le dispositif risquerait d’entraîner une rupture d’égalité entre acteurs de l’économie collaborative, en prévoyant un régime particulier au seul bénéfice des utilisateurs de plateformes en ligne. Or, l’économie collaborative réside aussi dans des échanges physiques et des annonces publiées par voie de presse. La circonstance que les revenus de l’économie collaborative soient générés depuis une plateforme en ligne ne semble pas devoir justifier une telle différence de traitement ([10]).
Le rapport d’information de la commission des finances du Sénat précité contestait l’inconstitutionnalité du dispositif proposé au motif qu’il poursuivait deux objectifs à valeur constitutionnelle, l’intelligibilité de la loi et la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales.
S’agissant du premier objectif, il n’apparaît pas évident qu’en créant une franchise d’impôt de 3 000 euros pour une catégorie particulière de revenus, fondée uniquement sur le moyen utilisé pour réaliser l’activité en question, le dispositif améliore la lisibilité du droit. Il risquerait, au contraire, de créer une confusion auprès des contribuables, du fait de la différence de traitement des revenus relevant pourtant d’activités identiques.
S’agissant du second objectif, ainsi qu’il a été vu, il ne va pas de soi qu’en exonérant des revenus au motif qu’ils sont peu déclarés, le législateur s’inscrirait dans l’objectif de lutte contre la fraude. Au contraire, là encore, il pourrait introduire un mécanisme propice aux abus.
Dès lors, une censure par le Conseil constitutionnel paraît probable, sinon acquise.
En conséquence, et en cohérence avec la position adoptée par notre Assemblée en première lecture, le Rapporteur général propose de supprimer cet article.
*
* *
Article 2 quater
Réduction d’impôt sur le revenu au titre des dons des mandataires sociaux, sociétaires, adhérents et actionnaires aux fondations d’entreprises
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
A. L’état du droit
● Les fondations d’entreprise ont été instituées par la loi du 4 juillet 1990 créant les fondations d’entreprises ([11]), qui a modifié la loi du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat ([12]) : les articles 19 à 19-12, ainsi introduits dans la loi du 23 juillet 1987, définissent le statut et les modalités de fonctionnement de la fondation d’entreprise. Il s’agissait de fournir aux entreprises un nouveau cadre pour leurs actions de mécénat, en instituant une nouvelle personne morale, à but non lucratif, créée par une ou plusieurs entreprises pour une durée limitée afin de réaliser une œuvre d’intérêt général.
Le régime juridique de la fondation d’entreprise, inspiré de celui des fondations reconnues d’utilité publique, bénéficiait d’assouplissements importants, en contrepartie desquels la fondation d’entreprise ne pouvait faire appel à la générosité publique, ni recevoir de dons ou de legs. L’article 19-8 de la loi prévoit ainsi que la fondation d’entreprise peut recevoir quatre catégories de ressources : les versements des fondateurs, les subventions de l’État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, le produit des rétributions pour services rendus et les revenus éventuels de la dotation initiale.
● La loi du 1er août 2003 relative au mécénat ([13]) a introduit la possibilité pour la fondation d’entreprise de recevoir des dons des salariés de l’entreprise fondatrice et des entreprises du groupe auquel appartient l’entreprise fondatrice. Parallèlement l’article 1er de la loi précitée du 1er août 2003 a ouvert le bénéfice de la réduction d’impôt au titre des dons, prévue par l’article 200 du CGI, s’agissant des dons effectués au profit des fondations d’entreprise par ces salariés.
La réduction d’impôt prévue par l’article 200, égale à 66 % des sommes versées ([14]) dans la limite de 20 % du revenu imposable, s’applique aux versements effectués auprès de différents organismes, notamment les œuvres ou organismes d’intérêt général qui présentent un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire ou encore culturel, les fondations ou associations reconnues d’utilité publique, mais aussi les établissements d’enseignement supérieur d’intérêt général et à but non lucratif, les fondations universitaires…
Cette réduction d’impôt n’est pas prise en compte pour le plafonnement général des niches fiscales prévu par l’article 200-0 A du CGI. Elle a représenté en 2016 une dépense fiscale de 1,365 milliard d’euros et elle a bénéficié à 5,75 millions de foyers fiscaux.
● La possibilité d’effectuer des dons aux fondations d’entreprise a été élargie par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire ([15]), au-delà des seuls salariés de l’entreprise ou des entreprises du même groupe : peuvent désormais effectuer des dons les mandataires sociaux, les sociétaires, les adhérents ou les actionnaires de l’entreprise fondatrice ou des entreprises du même groupe.
B. L’extension du champ des bénéficiaires de la réduction d’impôt au titre des dons aux fondations d’entreprise
Le présent article est issu d’un amendement de la commission des finances adopté à l’initiative de notre collègue Sarah El Haïry, et adopté par l’Assemblée avec un avis défavorable du Gouvernement. Il vise à étendre le champ de la réduction d’impôt prévue par l’article 200 du CGI s’agissant des dons aux fondations d’entreprise, en permettant aux mandataires sociaux, aux sociétaires, aux adhérents et aux actionnaires de l’entreprise fondatrice ou des entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient, de bénéficier de l’avantage fiscal au titre de leurs dons, de la même façon que les salariés des entreprises concernées.
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a supprimé cet article, en adoptant l’amendement de suppression déposé par le Gouvernement, qui a recueilli un avis de sagesse de la commission des finances.
À l’appui de son amendement, le Gouvernement a fait valoir que l’adoption d’une telle disposition en première partie du projet de loi de finances constituerait un effet d’aubaine, alors qu’elle bénéficierait aux mandataires, sociétaires, actionnaires et adhérents ayant réalisé des dons en 2017, et a renvoyé son examen en seconde partie du projet de loi de finances.
III. la position du rapporteur général
Compte tenu de l’adoption par le Sénat de l’article 39 octies C en seconde partie du présent projet de loi de finances, qui reprend les dispositions du présent article tout en prévoyant leur application aux versements et dons effectués à compter du 1er janvier 2018, le Rapporteur général vous propose de ne pas rétablir cet article.
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* *
Article 3
Dégrèvement de la taxe d’habitation sur la résidence principale
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
Le présent article prévoit la mise en place progressive, sous conditions de ressources, d’un dégrèvement de taxe d’habitation (TH) au titre de la résidence principale. Ce dégrèvement, total à compter de 2020, bénéficierait à 80 % des foyers. La mise en place de la mesure s’échelonne sur trois années, avec un dégrèvement égal à 30 % en 2018, à 65 % en 2019 et à 100 % en 2020.
Le dégrèvement est calculé sur la base des valeurs locatives de l’année, mais en retenant les taux et abattements appliqués pour l’établissement de la TH en 2017.
A. le nouveau dégrèvement de taxe d’habitation
Le présent article prévoit la mise en place progressive, sur trois ans, d’un dégrèvement de TH au titre de la résidence principale. Il rétablit à cette fin un article 1414 C au sein du CGI.
Le dégrèvement prévu par le présent article bénéficiera aux contribuables qui remplissent trois conditions :
– ne pas être déjà exonéré au titre des dispositifs existants ;
– disposer de revenus dont le montant n’excède pas 27 000 euros pour la première part de quotient familial, majorée de 8 000 euros pour chacune des deux premières demi-parts et 6 000 euros pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième. Ces revenus s’apprécient dans les mêmes conditions que pour l’application du plafonnement actuel en fonction du revenu prévu à l’article 1414 A du même code.
Un mécanisme destiné à limiter les effets de seuil pour les personnes dont les revenus excèdent ces montants et sont inférieurs à 28 000 euros pour la première part de quotient familial, majoré de 8 500 euros pour chacun des deux premières demi-parts et 6 000 euros pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième. Ainsi, une personne célibataire dont le revenu fiscal de référence s’élève à 27 500 euros verra le montant de son dégrèvement divisé par deux.
– ne pas être passible de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
La part des foyers n’acquittant aucune contribution devrait ainsi passer de 18 % actuellement à près de 80 % en 2020 (22,2 millions).
Évolution de la répartition des foyers TH entre foyers exonérés, plafonnés et dégrevés entre 2017 et 2020
Type de foyers |
Avant réforme, |
En 2018 |
Après réforme, |
Nombre de foyers exonérés de droit |
3,8 millions |
3,8 millions |
3,8 millions |
Nombre de foyers dont la cotisation est annulée par le plafonnement |
1,2 million |
1,2 million |
– |
Nombre de foyers dont la cotisation est minorée par le plafonnement |
7,5 millions |
17,2 millions |
|
Nombre de foyers dont la cotisation est minorée par le nouveau dégrèvement |
– |
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Nombre de foyers dont la cotisation est annulée par le nouveau dégrèvement |
– |
18,4 millions |
|
Nombre de foyers s’acquittant de la totalité de leur TH |
15,7 millions |
6 millions |
6 millions |
Total |
28,2 millions |
28,2 millions |
28,2 millions |
Source : évaluation préalable et commission des finances
Alors qu’en 2017, 15,7 millions de foyers s’acquittent de leur cotisation de TH en totalité, ils ne seront plus que 6 millions en 2020.
La part des foyers continuant à acquitter une TH en 2020, après application du nouveau dégrèvement, sera variable selon les communes, en fonction du niveau de revenu des habitants et en particulier de leur revenu fiscal de référence. La carte ci-dessous présente ces résultats par département, à partir de données transmises par la direction générale des finances publiques (DGFiP) à la commission des finances pendant la navette.
PART DES FOYERS CONTINUANT à acquitter une taxe d’habitation en 2020,
après application du nouveau dégrèvement, par département
Source : données DGFiP, simulation sur émissions de TH 2016, rapport spécial relatif aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales dans le présent projet de loi de finances.
Selon les informations transmises au Rapporteur général, le gain moyen retiré par les foyers bénéficiaires de la mesure en 2018, 2019 puis à compter de 2020 serait le suivant :
Évolution du gain moyen retiré de la réforme entre 2018 et 2020
Année |
2018 |
2019 |
2020 |
Part du dégrèvement par rapport à la cotisation de TH |
30 % |
65 % |
100 % |
Gain moyen |
166 euros |
360 euros |
554 euros |
Source : direction de la législation fiscale.
Le montant du dégrèvement est calculé à partir des éléments suivants.
La base imposable correspond à la valeur locative diminuée des abattements applicables en 2017. La valeur locative, appréciée en année N, prend en compte la revalorisation forfaitaire annuelle, prévue par l’article 1518 bis du CGI.
Le taux appliqué est le taux global de 2017. Il comprend le taux des taxes additionnelles à la TH, les taxes spéciales d’équipement et taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI). Souvent, la taxe GEMAPI n’est instituée qu’à compter de 2018. Son montant ne pourra alors être pris en compte dans le calcul du dégrèvement et restera à la charge du contribuable, sous réserve du seuil minimal de recouvrement.
Une exception est prévue afin de prendre en compte les évolutions de taux postérieures à 2017 résultant strictement des procédures de lissage, d’harmonisation, de convergence prévues en cas de création de communes nouvelles, de fusions d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ou de rattachement d’une commune à un tel établissement.
En cas de diminution du taux d’imposition par rapport à celui appliqué en 2017, le taux de l’année sera pris en compte. De même, lorsque les abattements en vigueur en 2017 sont inférieurs à ceux de l’année d’imposition, ce sont ces derniers qui devront être appliqués.
À l’inverse, en cas de hausse du taux d’imposition ou d’augmentation des abattements, la hausse de cotisation qui en résulte sera à la charge des contribuables. Il n’y aura donc aucune perte de recettes pour les communes et les EPCI.
B. les modifications adoptées par l’assemblée nationale
En première lecture, l’Assemblée nationale a adopté, avec l’avis favorable du Gouvernement, quatre amendements rédactionnels et de précision du Rapporteur général.
Elle a également adopté un amendement de notre collègue Charles de Courson prévoyant la transmission chaque année par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur la mise en œuvre du dispositif prévu par le présent article ainsi que sur « les possibilités de substitution d’une autre ressource fiscale », ce rapport devant notamment évaluer « l’application de la compensation totale par l’État du dégrèvement de la taxe d’habitation pour les communes » et « établir un bilan sur l’autonomie financière des collectivités territoriales ». La commission et le Gouvernement avaient émis un avis de sagesse.
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a supprimé cet article, à l’initiative de la commission des finances et contre l’avis défavorable du Gouvernement, pour les motifs suivants :
– la réforme prévue par le présent article ne règle pas le problème de l’obsolescence et de l’injustice des valeurs locatives sur lesquelles est assise la TH ;
– la taxe sera concentrée sur 20 % des ménages ;
– la réforme se traduirait par une aggravation des inégalités territoriales. Dans certaines communes, seuls quelques contribuables continueront d’acquitter cet impôt.
Surtout, la suppression de cet article permettrait d’envisager un scénario consistant à supprimer intégralement la TH, dans le cadre d’une réforme d’ensemble de la fiscalité locale, conformément à la lettre de mission adressée par le Premier ministre à MM. Alain Richard et Dominique Bur, chargés de réfléchir à une telle refonte, au sein de la Conférence nationale des territoires.
III. la position du rapporteur général
Le problème des valeurs locatives des locaux d’habitation ne sera pas davantage réglé par le maintien en l’état des règles applicables à la TH.
La concentration de cet impôt est déjà particulièrement forte, puisque plus de 80 % de son produit est acquitté par 20 % des contribuables.
La réforme proposée ne porte atteinte ni au pouvoir de taux ni à l’autonomie financière des collectivités territoriales, lesquelles ne subiront aucune perte de recettes.
Enfin, la réflexion sur la refonte de la fiscalité locale, déjà engagée, se poursuivra avec d’autant plus de chances d’aboutir que la réforme de la TH sera en vigueur dès l’an prochain.
La réforme proposée redistribue aux ménages 10 milliards d’euros de pouvoir d’achat en 2020.
Le Rapporteur général propose de rétablir cet article dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.
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Article 3 bis
Modalités d’application du dégrèvement de taxe d’habitation
aux pensionnaires des établissements d’hébergement de personnes âgées
sans but lucratif
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
Le présent article prévoit que les pensionnaires des établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes (EHPAD), sans but lucratif, peuvent bénéficier d’une répercussion, sur la facture qu’ils acquittent aux EHPAD, des dégrèvements et exonérations de TH dont ils auraient bénéficié s’ils avaient été redevables de cette taxe. Il résulte d’un amendement du Gouvernement adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, avec l’avis favorable de la commission.
A. L’état du DROIT
L’article 1407 du CGI prévoit que la TH est due pour tous les locaux meublés affectés à l’habitation. L’article 1408 du CGI précise que « la taxe est établie au nom des personnes qui ont, à quelque titre que ce soit, la disposition ou la jouissance des locaux imposables ».
Les pensionnaires des maisons de retraite sont, par conséquent, assujettis à la TH selon les modalités de droit commun, à condition qu’ils aient la disposition privative de leur logement.
S’ils n’ont pas la jouissance de leur logement, la règle dépend de la nature de l’établissement. Les établissements lucratifs sont dans le champ de la cotisation foncière des entreprises (CFE). Seuls les établissements sans but lucratif sont soumis à la TH et deux cas sont alors à distinguer.
Dans les maisons de retraite gérées sans but lucratif par des établissements publics d’assistance, les pensionnaires ne sont pas imposables à la TH et les locaux en sont exonérés. Dans les autres maisons de retraite gérées sans but lucratif, la taxe est alors établie au nom du gestionnaire, réputé en avoir la jouissance, et qui peut, sur réclamation, bénéficier d’un dégrèvement pour les locaux occupés par des pensionnaires qui auraient pu en bénéficier. Il s’agit ainsi de permettre à ces structures de répercuter le bénéfice du dégrèvement sur le prix de journée.
RÉGIME DE LA TAXE D’HABITATION
Établissements |
Maisons de retraite |
||
Gérées dans un but lucratif |
Gérées sans but lucratif |
||
Gérées par des établissements publics d’assistance (hôpitaux, CCAS) |
Autres gestionnaires sans but lucratif |
||
Occupation privative des chambres |
Chaque locataire doit payer la TH pour sa chambre, selon ses revenus |
Chaque locataire doit payer la TH pour sa chambre, selon ses revenus |
Chaque locataire doit payer la TH pour sa chambre, selon ses revenus |
Occupation non privative des chambres |
CFE |
Exonération des pensionnaires et de l’établissement |
La TH est établie sous une cote unique au nom de l’établissement
Le gestionnaire peut obtenir sur réclamation un dégrèvement pour les locaux occupés par des pensionnaires qui remplissent les conditions d’exonération ou de dégrèvement |
Locaux communs |
CFE |
Exonération de TH |
TH acquittée par le gestionnaire de l’établissement |
Selon le Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) ([16]), il a été décidé d’accorder, sur demande, un dégrèvement total ou partiel, au titre des articles 1414 ou 1414 A du CGI, de l’impôt mis à la charge du gestionnaire pour les locaux d’hébergement occupés par ceux des pensionnaires qui bénéficieraient d’un dégrèvement ou d’une exonération s’ils étaient personnellement imposés à la TH.
Le gestionnaire doit adresser au service des impôts des particuliers dont dépend l’établissement une demande de dégrèvement accompagnée d’une copie de l’avis d’imposition à la TH établi à son nom et de la liste des pensionnaires qui résidaient dans l’établissement au 1er janvier de l’année d’imposition et qui n’ont pas été personnellement imposés à cette taxe. Cette liste doit comporter les indications relatives à la situation des intéressés au regard de l’impôt sur le revenu au titre de l’année précédente.
Si tous les pensionnaires ont perçu en N – 1 des revenus fiscaux de référence dont les montants sont inférieurs aux seuils prévus au I de l’article 1417 du CGI, il est supposé qu’ils remplissent tous la condition d’âge et qu’aucun n’est passible de l’ISF au titre de l’année précédente. Le dégrèvement porte sur la totalité de la TH afférente à leurs logements.
Si certains pensionnaires ont des revenus fiscaux de référence supérieurs aux seuils précités, une cotisation moyenne par pensionnaire est calculée, en divisant le montant de la cotisation mise à la charge du gestionnaire et correspondant aux logements des pensionnaires par le nombre de ceux-ci.
B. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE
Le présent article vise à permettre aux résidents des maisons de retraite à but non lucratif de bénéficier du dégrèvement de TH prévu à l’article 3 du présent projet de loi de finances et à donner une base législative aux possibilités prévues par la doctrine pour les exonérations et dégrèvements existants, s’ils remplissent les conditions de ressources correspondantes, alors qu’ils verront par ailleurs, pour un certain nombre d’entre eux, augmenter leur cotisation sociale généralisée (CSG) sur leurs revenus de remplacement.
Le I du présent article intègre à cette fin un nouvel article 1414 D au sein du CGI, dans la section relative aux exonérations et dégrèvements d’office de TH. Il précise que les EHPAD à but non lucratif peuvent bénéficier des dégrèvements et exonérations de TH dont auraient bénéficié leurs résidents s’ils avaient été redevables de cette taxe au titre du logement qu’ils occupent dans l’établissement au 1er janvier de l’année d’imposition.
Les dégrèvements et exonérations visés concernent :
– les titulaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ou de l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI) ; sous condition de ressources, les titulaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), les personnes de plus de soixante ans ainsi que les veufs et veuves, les contribuables dont l’infirmité ou l’invalidité les empêche de subvenir par leur travail aux nécessités de l’existence (I de l’article 1414 du CGI) ; y compris celles qui bénéficient du mécanisme de sortie en sifflet (1° du I bis de l’article 1414) ;
– les personnes de plus de soixante ans ainsi que les veufs pour leur habitation principale, sous condition de ressources et lorsqu’ils occupent cette habitation avec leurs enfants majeurs lorsque ceux-ci sont inscrits comme demandeurs d’emploi et disposent de faibles ressources (IV de l’article 1414) ;
– les personnes qui bénéficient d’un plafonnement de leur cotisation de TH en fonction de leur revenu (article 1414 A) ;
– les bénéficiaires du nouveau dégrèvement de TH en fonction du revenu, prévu à l’article 3 du présent projet de loi de finances (article 1414 C nouveau).
Il est précisé que ce dégrèvement ne s’applique pas aux locaux communs et administratifs.
Pour en bénéficier, l’établissement doit présenter une réclamation dans les délais et dans les formes prévus au livre des procédures fiscales s’agissant des impôts directs locaux. Comme c’est déjà le cas actuellement, il doit fournir une copie de l’avis d’imposition et la liste des résidents présents au 1er janvier de l’année d’imposition qui ne sont pas personnellement imposés à la TH.
Le II du présent article prévoit que la fraction du dégrèvement dont bénéficie un EHPAD au titre d’un résident (calculée individuellement, en fonction de sa situation) est déduite du tarif journalier mis à sa charge du résident en contrepartie des prestations minimales d’hébergement. Cette fraction peut également, à défaut, lui être remboursée par l’établissement.
Les EHPAD doivent inscrire sur la facture de chaque résident le montant de TH à laquelle ces établissements sont assujettis au titre des locaux d’hébergement et le montant de dégrèvement dont ils bénéficient au titre du présent article.
C. l’impact budgétaire de cet article n’est pas chiffré
Le coût du présent article pour l’État n’est pas apparu clairement en première lecture. Dans la mesure où le présent article donne une valeur législative à des dispositions déjà mise en œuvre conformément à la doctrine fiscale, pour les dégrèvements relatifs aux articles 1414 et 1414 A du CGI, l’impact budgétaire pour l’État résulte de la seule possibilité, pour les EHPAD à but non lucratif, de bénéficier du nouveau dégrèvement prévu à l’article 3 du présent projet de loi de finances, par le nouvel article 1414 C du CGI. Toutefois, cette possibilité aurait pu également être prévue par voie réglementaire et son coût aurait pu être déjà intégré aux crédits prévus à la mission Remboursements et dégrèvements.
Tirant les conséquences budgétaires des articles 3 bis et 3 ter du présent projet de loi de finances, en première lecture, le Gouvernement a indiqué un coût de 166 millions d’euros en 2018, tantôt pour le seul article 3 ter ([17]), tantôt pour l’article 3 ter et l’article 3 bis ([18]). En séance publique, le 15 novembre 2017, le ministre de l’économie, M. Bruno Le Maire, a confirmé que le montant de 166 millions d’euros correspondait bien à la somme de ces deux dégrèvements. Toutefois, selon les informations transmises par le Gouvernement au Sénat, « le coût de cet article [3 bis] n’est pas chiffré faute de données disponibles permettant d’isoler cette population ».
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat ayant supprimé le dégrèvement de TH proposé par l’article 3 du présent projet de loi de finances dans sa rédaction initiale, il a adopté un amendement de la commission des finances qui supprime la référence à ce dégrèvement dans le présent article. Par cohérence également, le Gouvernement y avait donné un avis favorable.
III. la position du rapporteur général
Le Rapporteur général vous propose de modifier cet article pour rétablir la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, par cohérence avec le rétablissement proposé de l’article 3 du présent projet de loi de finances.
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Article 3 ter
Aménagements du dispositif de sortie en sifflet de l’exonération de taxe d’habitation et du dégrèvement de la contribution à l’audiovisuel public
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
Le présent article est issu d’un amendement du Gouvernement adopté par l’Assemblée nationale avec un avis favorable de la commission des finances. Il vise à assurer la transition entre le mécanisme de sortie en sifflet de taxe d’habitation (TH) instauré par la loi de finances pour 2016 ([19]) et le dégrèvement instauré par l’article 3 du présent projet de loi de finances. I permet aux personnes qui bénéficient du mécanisme de sortie en sifflet depuis 2015, et qui auraient été amenées à s’acquitter d’une partie de leur TH entre 2017 et 2019 pour être finalement dégrevées à 100 % en 2020, d’être exonérées en 2017 et de bénéficier d’un dégrèvement de 100 % en 2018 et 2019.
A. Le mécanisme de la sortie en sifflet introduit par l’article 75 de la loi de finances pour 2016
L’extinction de la demi-part dite « vieux parents », adoptée en loi de finances pour 2009 ([20]) mais produisant tous ses effets en 2014, ainsi que la fiscalisation des majorations de pension pour charges de famille votée en loi de finances pour 2014 ([21]) ont eu un impact sur le revenu fiscal de référence (RFR) d’un grand nombre de personnes retraitées. Ces dernières, sous l’effet de ces deux mesures, auraient, en effet, perdu en 2014 et en 2015 le bénéfice des exonérations de TH et de taxe foncière (TF) prévues par les articles 1414 et 1391 du CGI.
Une première mesure, concernant la TH, a été adoptée en première loi de finances rectificative pour 2014 ([22]). Puis a été introduit en loi de finances pour 2016 un dispositif comportant deux volets : une « clause de grand-père », destinée à maintenir les droits des contribuables qui bénéficiaient d’une exonération de TH en 2014, et un mécanisme de sortie en sifflet pour tous les contribuables perdant le bénéfice d’une exonération de TH ou de TF.
1. La clause de maintien des droits acquis
Le premier volet de l’article 75 vise à maintenir les droits acquis des personnes exonérées de TH et de TF en 2013. Il pérennise les exonérations d’imposition locale et de contribution à l’audiovisuel public (CAP) dont ont bénéficié en 2014 les personnes visées par l’article 28 de la première loi de finances rectificative pour 2014, dès lors qu’elles en auraient perdu le bénéfice uniquement en raison de la législation fiscale, c’est-à-dire la fiscalisation des majorations de pension et la réforme de la demi-part « vieux parents ».
Pour ce faire, les seuils de RFR conditionnant l’exonération de TF et de TH sont rehaussés pour ces seuls redevables, pour porter le seuil correspondant à une part au niveau d’une part et demie, en application du I bis de l’article 1417 du CGI. Pour ces redevables, le seuil de RFR est fixé à 13 567 euros pour la première part de quotient familial, au lieu de 10 708 euros pour la première part de quotient familial pour les autres redevables.
Outre la condition de respect de ces seuils de revenus rehaussés, ces redevables doivent bien évidemment continuer à remplir les conditions prévues par le 2° du I de l’article 1414 du CGI : en pratique, ils ne doivent pas être redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre de l’année précédant celle de l’imposition à la TH et ils doivent satisfaire aux conditions d’occupation de l’habitation prévues par l’article 1390 du CGI.
2. Le mécanisme de sortie en sifflet
Le deuxième volet de l’article 75, qui concerne l’ensemble des contribuables, vise à lisser les effets de seuil pour l’entrée dans l’imposition locale. Lorsqu’un contribuable est exonéré de TH et de TF et que sa situation fiscale change (du fait d’une hausse de revenus ou d’un changement de législation fiscale), il devient redevable de ces différentes impositions, à savoir de l’intégralité de la TF et de la CAP, et de la TH – le plus souvent minorée par le plafonnement prévu par l’article 1414 A.
L’article 75 permet aux contribuables ayant perdu le bénéfice de l’exonération de TH prévue par l’article 1414 en faveur des personnes aux revenus modestes de plus de soixante ans, veufs ou veuves, ou titulaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI), de conserver pendant deux ans le bénéfice de cette exonération – associée au dégrèvement de CAP. Il procède de même pour les contribuables bénéficiant de l’exonération de TF prévue par l’article 1391 en faveur des personnes aux revenus modestes de plus de soixante-quinze ans ou titulaires de l’AAH, de l’ASPA ou de l’ASI.
À l’issue de cette période de deux ans, la valeur locative utilisée pour établir la TF et la TH est réduite de deux tiers l’année suivante et d’un tiers l’année d’après.
En d’autres termes, ce dispositif permet d’établir une « sortie en sifflet » des exonérations de fiscalité locale, puisque les redevables ne remplissant plus les conditions de l’exonération – hors les redevables dans le champ de l’article 28 précité – continuent d’en bénéficier pendant deux années, en N + 1 et N + 2, puis s’acquittent d’un tiers de leur TH et de leur TF en N + 3, des deux tiers en N + 4 et de la totalité des impositions en N + 5. En revanche, ils sont redevables de l’intégralité de la CAP dès qu’ils perdent le bénéfice de l’exonération de TH, à partir de N + 3.
Le mécanisme de lissage s’applique à compter de l’année 2015. La clause de maintien des droits acquis ne s’applique qu’à compter de 2017, puisque les redevables concernés par la mesure bénéficient pendant les deux premières années, en 2015 et 2016, du dispositif de lissage de droit commun.
B. Les mesures de transition adoptées par l’Assemblée
1. Le mécanisme proposé
a. L’articulation entre mécanisme de sortie en sifflet et dégrèvement résultant de l’article 3 du présent projet de loi de finances
Les personnes relevant de la « clause de grand-père » conservent le bénéfice de l’exonération de TH et de CAP, en application du I bis de l’article 1417 et de l’article 1414 du CGI, tant que leur RFR n’excède pas le seuil majoré qui a été introduit. Elles se trouveraient par construction dans le champ du dégrèvement prévu par l’article 1414 C du même code introduit par le présent projet de loi de finances, compte tenu des seuils de RFR retenus, mais elles seront en tout état de cause exonérées de TH en 2017, 2018 et 2019. Elles ne sont donc pas concernées par le présent article.
Celui-ci vise les personnes bénéficiant du mécanisme de sortie en sifflet prévu par le I bis de l’article 1414. En effet, les personnes qui ont perdu en 2015 le bénéfice de l’exonération de TH sont restées en pratique exonérées de TH en 2015 et en 2016, mais elles doivent s’acquitter en 2017 d’une TH calculée sur la base d’une valeur locative réduite de deux tiers ; de façon schématique, elles devraient payer un tiers de leur TH.
En 2018, elles devraient acquitter les deux tiers de leur TH, laquelle serait minorée par le dégrèvement de 30 % prévu par l’article 3 du présent projet de loi de finances. En effet, on peut supposer que, dans la très grande majorité des cas, les personnes concernées seraient éligibles à ce dégrèvement.
En 2019, elles devraient payer les deux tiers de leur TH, laquelle serait dégrevée à hauteur de 65 %. Enfin, en 2020, elles devraient s’acquitter, dans le cadre du mécanisme de sortie en sifflet, de la totalité de leur TH, mais bénéficieraient du dégrèvement de 100 %.
L’on retrouverait un processus similaire pour les personnes entrant dans le mécanisme de sortie en sifflet en 2016 et en 2017, avec l’application combinée de la réduction de deux tiers ou d’un tiers de la TH, et du dégrèvement prévu par l’article 3 du présent projet de loi de finances.
Le tableau ci-après présente de façon simplifiée l’évolution de la situation des redevables se trouvant dans le champ du mécanisme de sortie en sifflet :
ÉVOLUTION DE LA SITUATION DES REDEVABLES BÉNÉFICIANT
DU MÉCANISME DE SORTIE EN SIFFLET AVANT ADOPTION
DE L’AMENDEMENT DU GOUVERNEMENT
Entrants |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2015 |
Maintien exonération |
Maintien exonération |
1/3 de TH |
2/3 de TH + dégrèvement de 30 % |
Totalité de la TH + dégrèvement de 65 % |
Totalité de la TH + dégrèvement de 100 % |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2016 |
|
Maintien exonération |
Maintien exonération |
1/3 de TH + dégrèvement de 30 % |
2/3 de TH + dégrèvement de 65 % |
Totalité de la TH + dégrèvement de 100 % |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2017 |
|
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Maintien exonération |
Maintien exonération |
1/3 de TH + dégrèvement de 65 % |
2/3 de TH + dégrèvement de 100 % |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2018 |
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|
|
Maintien exonération |
Maintien exonération |
1/3 de TH + dégrèvement de 100 % |
b. Le dispositif proposé par le présent article
Le présent article vise à faire bénéficier les personnes qui ont perdu le bénéfice de leur exonération de TH et sont entrées dans le mécanisme de sortie en sifflet en 2015, 2016 ou 2017, d’un maintien de leur exonération en 2017, 2018 et 2019, jusqu’à l’application du dégrèvement de 100 % en 2020 pour l’ensemble des contribuables dont le RFR est inférieur aux seuils prévus par l’article 3.
Pour ce faire, le présent article comporte deux volets.
D’une part, les redevables qui devraient s’acquitter en 2017 d’un tiers de leur TH et de la totalité de leur CAP, alors qu’ils entrent dans la troisième année du mécanisme de sortie en sifflet prévue par le 2° du I bis de l’article 1414, sont exonérés de TH (A du I) et de CAP (B du I). Cette exonération est d’ores et déjà appliquée par les services de l’administration fiscale, puisqu’elle concerne la TH acquittée au titre de 2017.
D’autre part, les redevables qui relèvent des troisième et quatrième années du mécanisme de sortie en sifflet, en application du 2° du I bis de l’article 1414, ou qui ont bénéficié du A du présent article, bénéficient d’un dégrèvement de 100 % de leur TH en 2018 et en 2019, au lieu du dégrèvement prévu par l’article 1414 C à hauteur de 30 % en 2018 et de 65 % en 2019 (C du I).
ÉVOLUTION DE LA SITUATION DES REDEVABLES BÉNÉFICIANT
DU MÉCANISME DE SORTIE EN SIFFLET APRÈS ADOPTION
DE L’AMENDEMENT DU GOUVERNEMENT
Entrants |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2015 |
Maintien exonération |
Maintien exonération |
Maintien exonération |
2/3 de TH + dégrèvement de 100 % |
Totalité de la TH + dégrèvement de 100 % |
Totalité de la TH+ dégrèvement de 100 % |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2016 |
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Maintien exonération |
Maintien exonération |
1/3 de TH + dégrèvement de 100 % |
2/3 de TH+ dégrèvement de 100 % |
Totalité de la TH +dégrèvement de 100 % |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2017 |
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Maintien exonération |
Maintien exonération |
1/3 de TH + dégrèvement de 100 % |
2/3 de TH+ dégrèvement de 100 % |
Entrants dans le mécanisme du sifflet en 2018 |
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Maintien exonération |
Maintien exonération |
1/3 de TH+ dégrèvement de 100 % |
Note de lecture : L’application du dégrèvement au taux de 100 % dès 2018 est subordonnée au respect par les redevables des plafonds de RFR prévus à l’article 3 du présent projet de loi à savoir 27 000 euros pour une personne seule et 43 000 euros pour un couple.
Ainsi, par exemple, un redevable qui perd le bénéfice de l’exonération de TH en 2016 et bénéficie de la sortie en sifflet devrait s’acquitter d’un tiers de TH en 2018, réduite du dégrèvement de 30 % ; en application du présent article, il bénéficierait d’un dégrèvement de 100 % sur le tiers de TH qu’il doit acquitter.
En pratique, et sous réserve des hausses de taux ou de baisse des abattements décidés par les collectivités territoriales, cela devrait se traduire par l’absence de paiement de la TH par ces redevables en 2018 et en 2019.
2. L’impact de la mesure
● Selon les chiffres transmis par la direction de la législation fiscale au rapporteur général de la commission des finances du Sénat, qui figurent dans son rapport sur la première partie du projet de loi de finances, le nombre de bénéficiaires de la mesure se répartirait comme suit :
– en 2017, 363 000 bénéficiaires, dont 223 000 ont bénéficié du maintien de l’exonération pendant deux ans en 2015 et 2016, conformément aux dispositions de l’article 75 précité, et 140 000 ont bénéficié du maintien de l’exonération pendant trois ans entre 2014 et 2016, conformément aux dispositions de l’article 28 précité. Ces 140 000 bénéficiaires se trouvent dans le champ de la clause de grand-père mais leur RFR dépasse les seuils majorés prévus par le I bis de l’article 1417 ;
– en 2018, 656 000 bénéficiaires, dont 363 000 auront bénéficié de la mesure en 2017 et 293 000 auraient dû s’acquitter d’un tiers de TH en 2018, minoré du dégrèvement de 30 % ;
– en 2019, 949 000 bénéficiaires, dont 656 000 auront bénéficié de la mesure en 2018 et 293 000 auraient dû s’acquitter d’un tiers de TH en 2019, minoré du dégrèvement de 65 %.
● Le coût de la mesure est évalué à 130 millions d’euros en 2017, dont 80 millions d’euros au titre de l’exonération de TH et 50 millions d’euros au titre de l’exonération de CAP. Il devrait atteindre 166 millions d’euros en 2018 et 161 millions d’euros en 2019.
Pour l’année 2017, le présent article prévoit un mécanisme d’exonération de TH, qui est compensé aux collectivités territoriales par l’État par l’intermédiaire du prélèvement sur recettes (PSR) de l’État, intitulé « compensations d’exonérations relatives à la fiscalité locale ». En application de l’article 21 de la loi de finances pour 1992 ([23]), le montant de cette compensation est égal à la base de l’année précédant celle de versement, multipliée par le taux applicable en 1991. Une partie de l’exonération se trouve donc mécaniquement à la charge des collectivités territoriales : sur les 84 millions d’euros au titre de l’exonération de 2017 pris en charge par les collectivités, 60 millions d’euros devraient donner lieu à compensation par l’État en 2018. En revanche, le dégrèvement de 100 % prévu pour les années 2018 et 2019 est entièrement financé par l’État.
Le tableau ci-après présente les coûts associés à la mesure :
ÉVOLUTION ET RÉPARTITION DU COÛT DU DISPOSITIF PROPOSÉ
(en millions d’euros)
Impôt |
Collectivité |
2017 |
2018 |
2019 |
Taxe d’habitation |
État |
– 4 |
226 |
161 |
Collectivités territoriales |
84 |
– 60 |
0 |
|
Total |
84 |
166 |
161 |
|
Contribution à l’audiovisuel public |
État |
50 |
0 |
0 |
Total |
130 |
166 |
161 |
Source : commission des finances du Sénat, sur la base des données de la direction de la législation fiscale.
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a adopté un amendement de suppression de cet article, déposé par la commission des finances et ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement. La suppression de cet article s’inscrit dans la logique de la suppression de l’article 3 du présent projet de loi de finances (voir supra) ; le présent article ayant vocation à assurer une transition entre le mécanisme de sortie en sifflet et le dégrèvement de 100 % à horizon de 2020 prévu par l’article 3, la suppression de ce dernier par le Sénat privait de pertinence le présent article.
III. la position du rapporteur général
Corrélativement au rétablissement de l’article 3 proposé supra, le Rapporteur général propose de rétablir cet article dans la rédaction de l’Assemblée nationale.
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* *
Article 3 quater (nouveau)
Encadrement de la redevance due par les stations de ski implantées
sur les bois et les forêts de l’État
I. Les dispositions adoptées par le Sénat
A. l’état du droit
1. Les redevances d’occupation du domaine privé
Les stations de ski implantées sur les bois et les forêts de l’État sont assujetties au paiement de redevances en contrepartie de l’utilisation ou de l’occupation de ce domaine, par les actes unilatéraux ou contractuels autorisant cette utilisation ou cette occupation.
Les bois et forêts des personnes publiques relevant du régime forestier font partie du domaine privé de l’État, conformément à l’article L. 2212-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP).
Les biens du domaine privé de l’État peuvent être mis à la disposition d’une activité d’intérêt général ou d’un service public qui dépend d’une autre personne publique. Cette affectation externe peut être prononcée soit de manière unilatérale, soit sur la base d’une convention d’occupation du domaine privé. L’acte portant affectation en fixe les conditions : le type d’utilisation, la durée et le régime financier de l’utilisation. Les opérations de mise à disposition ou de location ne peuvent être réalisées ni à titre gratuit, ni à un prix inférieur à la valeur locative (article L. 2222-6 du CGPPP).
2. Les redevances bénéficient à l’Office national des forêts (ONF)
Créé par la loi du 23 décembre 1964 de finances rectificative pour 1964 ([24]), l’Office national des forêts (ONF) est le gestionnaire unique des forêts publiques, permettant la mise en œuvre du régime forestier sur l’ensemble du territoire national. L’ONF est un établissement public à caractère industriel et commercial.
Le contrat d’objectifs et de performance 2016–2020 (COP) de l’ONF, signé en mars 2016, permet de consolider son équilibre financier sur cinq ans. Le financement des missions de l’ONF s’établit comme suit.
La gestion des forêts domaniales (programmation et mise en œuvre des récoltes, vente des bois, travaux, surveillance générale et gestion de la chasse et des concessions, accueil du public) est financée par le produit des ventes de bois et celui de la chasse et des concessions. Les missions d’intérêt général (prévention des risques, protection de la biodiversité) sont financées à coût complet dans le cadre de conventions nationales par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation et par le ministère de la transition écologique et solidaire.
La gestion des forêts des collectivités est financée à 18 % par les frais de garderie payés par les collectivités, soit 12 % des produits issus des forêts de l’année N – 1 (10 % en zone de montagne). Les 82 % restants sont pris en charge par l’État, par le biais du versement compensateur. L’ONF peut également assurer, par conventions, la mise en œuvre des travaux patrimoniaux pour les collectivités.
Les activités conventionnelles regroupent les services, les travaux et les prestations intellectuelles effectués pour les communes forestières, les collectivités territoriales et des clients tels que la SNCF ou la SNCF Réseau.
BUDGET PRÉVISIONNEL 2017 DE L’ONF
Charges |
En millions d’euros |
en % |
Produits |
En millions d’euros |
en % |
Personnel |
474 |
53,9 |
Subventions de l’État |
182,3 |
21 |
dont versement compensateur |
140,4 |
|
|||
Fonctionnement |
399,4 |
46,1 |
dont missions d’intérêt général nationales |
29,4 |
|
dont subvention d’équilibre |
12,5 |
|
|||
Frais de garderie + taxe de 2 euros à l’hectare payés par les collectivités |
30,5 |
3,5 |
|||
Ventes de bois |
268 |
31 |
|||
Chasses et concessions |
66,8 |
7,7 |
|||
Conventionnel et autres contributions, y compris les travaux patrimoniaux payés par les collectivités. |
317,8 |
36,7 |
|||
Total charges |
865,4 |
100 |
Total produits |
865,4 |
100 |
Source : ministère de l’agriculture et de l’alimentation.
Conformément aux recommandations de la Cour des comptes et aux engagements pris par le Gouvernement, l’ONF doit maîtriser son endettement, limitant son recours aux financements bancaires et réduisant ses frais de fonctionnement courant. En contrepartie, l’État et les communes forestières s’engagent sur un ensemble de financements sur la durée du contrat.
L’ONF dénombre soixante-huit contrats d’occupations liés à des pistes de ski ou des remontées mécaniques pour 12 000 dossiers d’occupations actuellement inscrits dans ses bases de données. Le montant de redevance prévu par ces contrats s’élève au total à 265 000 euros, ce qui correspond à 1 % du périmètre financier de l’activité de gestion des occupations (24,6 millions d’euros en 2016). Plus de la moitié du montant total de cette redevance est prévu par six contrats seulement, pour les forêts de Font-Romeu, Ax-les-Thermes, Gérardmer, Megève, l’Ayré et le Lisey et Barrès.
Près de trente contrats (44 %) d’occupation restent gracieux pour des raisons historiques. En 2031, tous ces contrats auront été renouvelés avec des conditions non gracieuses. Sur les trente-deux contrats restant, la moyenne de la redevance voisine 4 300 euros/an. En 2028, tous ces contrats nécessiteront de nouvelles autorisations.
Il n’existe pas de grille de prix au niveau national, du fait de l’hétérogénéité des installations et des domaines considérés. Les contrats sont négociés localement en fonction du coût et des pertes pour l’ONF (frais de gestion, perte de recette bois, etc.), du bénéfice pour l’opérateur lorsque l’activité commerciale est avérée et du risque financier porté par l’ONF (impayé, non reboisement…).
B. les modifications proposées par le sénat
Le Sénat a adopté un amendement de M. Alain Bertrand (RDSE), suivant l’avis favorable de la commission des finances et malgré l’avis défavorable du Gouvernement, visant à encadrer le montant des redevances dues par les stations de ski implantées sur les bois et les forêts de l’État, de sorte qu’elles ne puissent dépasser un pourcentage du chiffre d’affaires de la station de ski.
À cette fin, le présent article complète, au sein du code général des propriétés publiques, la section consacrée à la mise en valeur des terres incultes ou manifestement sous-exploitées, au sein du titre II du livre II, relatif à l’utilisation du domaine privé (alinéa 1), en y insérant un nouvel article.
Selon cet article, les actes, contrats et conventions qui ont pour objet l’utilisation ou l’occupation par une station de ski des bois et des forêts de l’État ou sur lesquels l’État a des droits de propriété indivis ne peuvent prévoir le paiement d’une redevance supérieure à un pourcentage du chiffre d’affaires de cette station, fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la forêt et du tourisme.
Le Gouvernement a donné un avis défavorable à l’amendement, ne souhaitant pas réduire la contribution des redevances au budget de l’ONF, dans un contexte marqué par les difficultés de la filière bois.
Cette proposition avait déjà été adoptée par le Sénat lors de l’examen en première lecture du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, le 13 décembre 2016. Le Gouvernement précédent avait alors donné un avis défavorable, considérant qu’une telle mesure relevait de la loi de finances et pour ne pas porter atteinte aux recettes de l’État. Cet article avait été supprimé en commission mixte paritaire. Mme Bernadette Laclais, rapporteure pour l’Assemblée nationale, indiquait qu’il souffrait d’un manque d’évaluation, le coût financier pour l’État de cette disposition n’était pas connu.
II. La position du rapporteur général
Sur le fond, l’amendement paraît mesuré. Il pose le principe d’un plafonnement de la redevance en pourcentage du chiffre d’affaires de la station et laisse une grande marge de manœuvre au pouvoir réglementaire, puisque ce pourcentage n’est pas encadré. Il suffirait que le Gouvernement le fixe au ratio appliqué dans la station la plus contributrice pour que la perte de recettes ne soit pas caractérisée.
Toutefois, le plafonnement en fonction du chiffre d’affaires n’est pas généralisé à l’ensemble des redevances d’occupation du domaine privé. Le présent article ne prévoit aucun critère relatif aux caractéristiques de l’emprise de la station de ski sur le domaine forestier.
Le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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* *
Article 4
Aménagement de l’assiette du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux services de presse en ligne
Il est proposé, par le présent article, de clarifier les règles de ventilation de l’assiette du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux services de presse en ligne inclus dans une offre composite donnant accès à un réseau de communications électroniques, c’est-à-dire inclus dans une offre associant pour un prix forfaitaire la vente de plusieurs services ou produits relevant de taux de TVA différents. Il a été adopté sans modification par l’Assemblée nationale.
Un amendement du Gouvernement, présenté et adopté au Sénat, a complété le texte issu de l’Assemblée nationale : d’une part, en clarifiant le type d’offre composite concernée ainsi que les règles de ventilation applicables pour les différents taux de TVA et, d’autre part, en appliquant des règles de ventilation similaires pour les offres composites comprenant la distribution d’un service de télévision.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
Le présent article établit une règle de ventilation de l’assiette de la TVA au taux réduit de 2,1 % pour les abonnements à un service de presse en ligne inclus dans un forfait mobile ou une offre dite « triple play », en limitant l’assiette du taux super-réduit de TVA au seul coût réel d’acquisition des services de presse en ligne ou d’une version numérisée d’une publication de presse auprès des éditeurs de presse. Ainsi, lorsque les prestations de presse en ligne sont comprises dans une offre qui comporte, pour un prix forfaitaire, l’accès à un réseau de communications électroniques (internet ou téléphone), le taux réduit de TVA n’est applicable qu’à la seule part de l’abonnement égale aux sommes payées par le fournisseur de service, par usager, pour l’acquisition des prestations. Il s’agit ainsi de ne prendre en compte dans l’assiette de la TVA pour le taux réduit uniquement la part de l’abonnement correspondant aux sommes facturées au fournisseur d’accès par les éditeurs de presse lorsqu’un abonné décide, par le biais d’une l’application mobile ou du site internet, d’accéder à une publication numérique de presse en ligne. Aux sommes payées pour l’acquisition des prestations de services de presse en ligne doivent toutefois être soustraits les frais de mise à disposition du public acquittés par les éditeurs de presse au fournisseur de service.
Il est également précisé que le taux réduit s’applique non seulement aux services de presse en ligne, mais également aux versions numérisées d’une publication de presse. La disposition vise ainsi la lecture, sur un support électronique, d’une version numérisée d’une publication de presse initialement imprimée sur papier. La disposition permet d’éviter de soumettre au taux normal les versions numérisées de presse imprimée, alors que les versions papiers de la presse imprimée et les services de presse en ligne sont soumis au taux de 2,1 %.
L’intervention du législateur répond à la nécessité de sécuriser juridiquement les fournisseurs d’accès à un réseau de communications électroniques souhaitant développer de telles offres en précisant le cadre juridique pour la ventilation de l’assiette du taux de TVA réduit de 2,1 % applicable aux services de presse en ligne inclus dans ces offres. Il permet aussi de préserver des règles de saines concurrences qui ne se fassent pas au détriment de la dépense fiscale de l’État et du soutien public au secteur de la presse en ligne.
L’Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Lors de l’examen de l’article au Sénat, un amendement du Gouvernement ([25]), qui a reçu un avis de sagesse de la commission des finances, a complété substantiellement le dispositif.
A. Une modification des offres composites concernées
et des règles de ventilation de l’assiette du taux réduit de TVA
L’amendement du Gouvernement vient, en premier lieu, préciser les offres composites concernées par le présent article. Il était initialement prévu d’appliquer la règle de ventilation uniquement lorsque des prestations de services de presse en ligne étaient comprises dans une offre composite comprenant l’accès à un réseau de communications électroniques au sens de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques. Ce dernier dispose qu’il faut entendre « par réseau de communications électroniques toute installation ou tout ensemble d’installations de transport ou de diffusion ainsi que, le cas échéant, les autres moyens assurant l’acheminement de communications électroniques, notamment ceux de commutation et de routage ».
Il est désormais prévu que la règle de ventilation de l’assiette s’applique également lorsque des prestations de services de presse en ligne sont comprises dans une offre composite comprenant la fourniture d’un service de télévision au sens de l’article 2 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, c’est-à-dire « tout service de communication au public par voie électronique destiné à être reçu simultanément par l’ensemble du public ou par une catégorie de public et dont le programme principal est composé d’une suite ordonnée d’émissions comportant des images et des sons » ([26]), ou encore un accès à un équipement terminal au sens de l’article L. 32 susmentionné, c’est-à-dire un « équipement destiné à être connecté directement ou indirectement à un point de terminaison d’un réseau en vue de la transmission, du traitement ou de la réception d’informations ».
L’amendement du Gouvernement modifie également les règles de répartition de l’assiette pour l’application du taux réduit de TVA dans le cadre de telles offres composites en distinguant désormais deux cas distincts :
– soit le taux réduit de TVA est applicable au supplément de prix payé par le client par rapport à une offre identique commercialisée dans des conditions comparables mais ne comprenant pas tout ou partie de ces mêmes prestations de services de presse en ligne ;
– soit, à défaut de l’existence d’une telle offre identique, le taux réduit est applicable aux sommes payées par le client pour l’acquisition des prestations de presse en ligne, nettes des frais de mise à disposition du public acquittés par les éditeurs de presse au fournisseur de service, dans la limite le cas échéant du prix auquel ces prestations sont commercialisées par ailleurs par le fournisseur.
B. Une extension des règles de ventilation d’assiette
des différents taux de TVA aux offres composites comprenant un service de télévision
Le législateur a imposé une règle de répartition spécifique pour les offres composites comprenant des services de télévision. L’article 26 de la loi de finances pour 2011 ([27]) a modifié l’article 279 du CGI, qui dispose que les abonnements à des services de télévision souscrits par les usagers bénéficient d’un taux de TVA de 10 %. Toutefois, le taux de 20 % est applicable à l’ensemble de la base imposable lorsque la distribution de services de télévision est comprise dans une offre unique qui comporte pour un prix forfaitaire l’accès à un réseau de communications électroniques, à l’instar des offres composites dites « triple play » groupant accès à internet, téléphonie et services de télévision.
L’amendement du Gouvernement met un terme à cette règle en prévoyant désormais l’application d’une règle de ventilation de l’assiette similaire à celle appliquée pour les prestations de distribution de services de presse en ligne comprise dans une offre composite. Désormais, il est proposé pour les prestations de distribution de services de télévision inclus dans une offre composite de ventiler l’assiette des taux de TVA en distinguant deux cas distincts :
– soit le taux réduit de TVA est applicable au supplément de prix payé par le client par rapport à une offre identique commercialisée dans des conditions comparables mais ne comprenant pas tout ou partie de ces mêmes prestations de distribution de service de télévision ;
– soit, à défaut de l’existence d’une telle offre identique, le taux réduit est applicable aux sommes payées par le client pour l’acquisition des droits de distribution des services de télévision, dans la limite, le cas échéant, du prix auquel ces prestations sont commercialisées par ailleurs par le fournisseur.
Il est ainsi mis un terme à la situation actuelle où une offre composite comprenant un service de télévision se voit appliquer un taux de TVA de 20 %. La mise en œuvre de cette nouvelle règle de ventilation est prévue pour le 1er juin 2018.
Par souci de cohérence, un sous-amendement parlementaire à l’amendement du Gouvernement ([28]), présenté par M. Roger Karoutchi (LR) et avec un avis de sagesse de la commission et favorable du Gouvernement, a aligné la date d’entrée en vigueur de la réforme des règles de ventilation de l’assiette des taux de TVA pour les offres composites comprenant un service de presse en ligne sur celles comprenant un service de télévision, soit le 1er juin 2018 au lieu initialement du 1er janvier 2018.
III. La position du Rapporteur général
Les modifications apportées par le Gouvernement permettent de compléter utilement les dispositions adoptées à l’Assemblée nationale, en particulier celles relatives à la clarification des offres composites concernées et aux règles de ventilation de l’assiette des différents taux de TVA.
Le Rapporteur général s’interroge toutefois sur l’extension des règles de ventilation aux offres composites comprenant un service de télévision, sans précisions sur le coût financier de la mesure ni sur les raisons économiques ou juridiques justifiant une telle modification. La solution proposée par le Gouvernement aurait pu faire l’objet d’une évaluation préalable dans le cadre de la présentation du présent projet de loi de finances.
Le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 6 bis A (nouveau)
Extension du régime d’exonération de CFE et de CVAE
à toutes les librairies de taille petite et intermédiaire
I. Les dispositions adoptées par le Sénat
Le présent article résulte d’un amendement de M. François-Noël Buffet (LR), adopté par le Sénat avec l’avis favorable de la commission et du Gouvernement. Il propose d’étendre le régime d’exonération de cotisation foncière des entreprises (CFE) et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) à toutes les librairies indépendantes de taille petite et intermédiaire.
A. L’exonération en vigueur est limitée aux PME
L’article 1464 I du CGI prévoit une exonération permanente de CFE, sur délibération de portée générale prise dans les conditions définies à l’article 1639 A bis du CGI par les communes et leurs EPCI à fiscalité propre, en faveur des établissements réalisant une activité de vente de livres neufs au détail qui disposent au 1er janvier de l’année d’imposition du label de librairie indépendante de référence. Facultative, cette exonération n’est pas compensée par l’État aux communes et EPCI.
Pour bénéficier de l’exonération prévue à l’article 1464 I du CGI, l’établissement doit être exploité par une entreprise répondant simultanément, au cours de la période de référence, aux conditions suivantes :
– être une petite et moyenne entreprise (PME) au sens du droit européen, c’est-à-dire une entreprise employant moins de 250 personnes, qui a, soit réalisé un chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros, soit un total de bilan inférieur à 43 millions d’euros ;
– avoir un capital détenu de manière continue à 50 % au moins par des personnes physiques, ou par une PME non liée à une autre entreprise par un contrat de franchise et dont le capital est détenu à hauteur de 50 % au moins par des personnes physiques ;
– ne pas être liée à une autre entreprise par un contrat de franchise.
Toutefois, il n’est pas tenu compte des contrats de franchise se rapportant aux activités autres que celles de vente de livres neufs.
Le label de librairie indépendante de référence est délivré par l’autorité administrative aux établissements qui réalisent une activité principale de vente de livres neufs, relèvent d’une entreprise remplissant les conditions mentionnées ci-dessus et, simultanément :
– disposent de locaux ouverts à tout public ;
– proposent un service de qualité reposant notamment sur une offre diversifiée de titres, la présence d’un personnel affecté à la vente de livres en nombre suffisant et des actions régulières d’animation culturelle.
Les conditions d’octroi du label sont précisées par le décret du 23 août 2011 relatif au label de librairie indépendante de référence ([29]).
L’exonération s’applique à l’ensemble des activités de l’établissement, et non pas à la seule activité de vente de livres neufs au détail, dès lors que cet établissement remplit toutes les conditions requises.
Les allégements d’impôts dont sont susceptibles de bénéficier les entreprises en application de l’article 1464 I du CGI sont subordonnés au respect du règlement de la Commission européenne du 18 décembre 2013 relatif aux aides de minimis ([30]).
L’exonération porte sur la totalité des bases d’imposition à la CFE de l’établissement éligible à l’exonération et de la part revenant à chaque commune ou EPCI ayant délibéré. Les bases exonérées s’entendent après application de toute réduction ou abattement.
L’exonération ne s’applique qu’à la CFE proprement dite et à la taxe spéciale d’équipement. Elle ne concerne ni la taxe pour frais de chambres de commerce et d’industrie, ni la taxe pour frais de chambres des métiers et de l’artisanat.
Conformément à l’article 1586 ter du CGI, l’exonération de CFE entraîne, pour les communes ou les EPCI, l’application automatique de l’exonération correspondante en matière de CVAE. Les départements et les régions doivent, quant à eux, prendre une délibération pour exonérer la part de CVAE qui leur revient, quelle que soit la décision prise par la commune ou l’EPCI.
Pour bénéficier de l’exonération, les contribuables déclarent, dans les délais fixés à l’article 1477 du CGI, les éléments entrant dans le champ d’application de l’exonération.
B. Le dispositif proposé par le sénat
1. L’extension aux librairies de taille intermédiaire
Le 1° du I du présent article (alinéa 2) étend le champ de l’exonération aux établissements qui réalisent une activité de vente de livres au détail et à terme, que les livres soient neufs ou d’occasion.
Le 2° du I du présent article (alinéas 3 à 5) supprime le renvoi aux critères de définition de la PME au sens européen et prévoit deux critères de substitution : un chiffre d’affaires annuel de 200 millions d’euros au maximum, réalisé au moins à 50 % avec la vente de livres, compte non tenu des reventes à des détaillants.
Les deux modifications proposées entreraient en vigueur au 1er janvier 2018, permettant aux librairies de bénéficier de l’exonération dès le prochain exercice fiscal (II du présent article, alinéa 7).
2. La suppression du plafond prévu pour les aides de minimis
Le 3° du I du présent article (alinéa 6) propose de supprimer la référence au règlement (UE) du 18 décembre 2013 précité, relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.
L’application de ce règlement aux librairies limite en effet les aides dont elles peuvent bénéficier à 200 000 euros sur une période de trois exercices fiscaux. Ce montant, qui contraint fortement le développement des librairies de proximité, n’est pas pertinent pour un certain nombre d’entre elles. Il ne constitue pas une aide suffisante au regard de la dégradation de leur environnement qui menace leur pérennité. À l’inverse, sa suppression permettra aux librairies concernées de bénéficier d’une aide significative et plus adaptée à l’évolution du marché du livre.
Le délai prévu par le III du présent article (alinéa 8) pour l’entrée en vigueur de cette modification, au 1er janvier 2019, permettra de soumettre le régime d’aide à la Commission européenne et de recueillir son approbation.
II. La position du Rapporteur général
Faute d’une évaluation précise des conséquences de cet article, le Rapporteur général vous propose de supprimer cet article.
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Article 6 ter A (nouveau)
Relèvement de 5,5 % à 10 % du taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux opérations immobilières dans le secteur du logement social
Cet article, inséré par le Sénat, vise à proposer une solution alternative à la hausse des cotisations des bailleurs sociaux versées au Fonds national des aides à la pierre (FNAP), via la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), pour un montant de 700 millions d’euros, hausse inscrite en première lecture par l’Assemblée nationale à l’article 52 en seconde partie du présent projet de loi de finances. Il prévoit ainsi de relever de 5,5 % à 10 % du taux de TVA applicable aux opérations immobilières dans le secteur du logement social.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR LE SÉNAT
A. Les dispositions de l’article 52 adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
L’Assemblée nationale n’a pas adopté de mesures spécifiques concernant la hausse de la TVA applicable aux opérations immobilières dans le secteur du logement social. Elle a, en revanche, adopté, à l’article 52, en seconde partie du présent projet de loi de finances, un dispositif de réduction du loyer des bailleurs sociaux – la RLS – et la diminution concomitante de l’aide personnalisée au logement (APL) pour les locataires concernés.
Ainsi, l’article 52, dans sa rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, dispose, en premier lieu, la mise en place d’une réduction de loyer de solidarité (RLS) mise en œuvre sur trois ans.
La RLS doit être appliquée par tous les organismes du logement social, à savoir les offices publics de l’habitat, les sociétés anonymes d’habitation à loyer modéré (HLM), les sociétés anonymes coopératives de production et les sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif d’HLM, et les fondations d’HLM. Elle ne vise toutefois pas tous les bénéficiaires des APL et s’applique uniquement « aux locataires dont les ressources sont inférieures à un plafond fonction de la composition du foyer et de la zone géographique ».
Les locataires qui bénéficient d’une RLS verront en contrepartie leur APL diminuer dans une fourchette comprise entre 90 % et 98 % de la RLS. La distinction entre la réduction de loyer et la diminution des aides, légèrement inférieure, permet aux allocataires de l’APL de bénéficier de la différence, soit de quelques euros de réduction de loyer.
Toutefois, face à l’opposition du secteur et dans le cadre d’une concertation avec les principales fédérations de bailleurs sociaux, un amendement a été présenté par le Gouvernement et adopté par l’Assemblée nationale, afin « de créer les conditions de la mise en œuvre de cette réduction de loyer par les bailleurs sociaux » ([31]). L’amendement modifie l’article 52, afin de permettre une hausse progressive sur trois ans de la RSL (à savoir 800 millions d’euros en 2018, 1,2 milliard en 2019 et 1,5 milliard à compter de 2020). En contrepartie, le nouvel article 52 prévoit la possibilité d’augmenter de 2,5 % à 8 % la cotisation prélevée par la CGLLS, contre 3,5 % initialement, afin d’en affecter une fraction au FNAP et de garantir ainsi, dès 2018, 1,5 milliard d’euros d’économies. Il est rappelé que le taux de la cotisation, qui ne pourra donc excéder 8 %, est fixé par arrêté des ministres chargés du logement, de l’économie et des finances.
En conséquence, la RLS sera limitée à 800 millions d’euros en 2018 au lieu de 1,5 milliard, puis passera à 1,2 milliard d’euros en 2019 et à 1,5 milliard d’euros à l’horizon 2020.
B. LE dispositif proposé
Le Gouvernement a toutefois annoncé, lors du centième congrès de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF), privilégier une alternative. Celle-ci consisterait, conformément à la demande des bailleurs sociaux, à compenser la perte de recettes entraînée par cet étalement sur trois ans de la RLS par une hausse de la TVA de 5,5 % à 10 % sur la construction et la rénovation de logements sociaux, en lieu et place de l’augmentation des cotisations des bailleurs sociaux versées à la CGLLS, augmentation adoptée à l’Assemblée nationale.
Lors de l’examen de la première partie du présent projet de loi de finances au Sénat, deux amendements identiques portant article additionnel présentés respectivement par M. Philippe Dallier (LR) et M. Hervé Marseille (Union centriste - UC) ([32]), avec un avis favorable de la commission et de sagesse du Gouvernement, ont été adoptés et proposent de mettre en œuvre cette annonce gouvernementale en relevant de 5,5 % à 10 % le taux de TVA applicable aux opérations immobilières dans le secteur du logement social.
1. L’état du droit
Les livraisons d’immeubles relèvent du taux normal, à l’exception de certaines livraisons réalisées dans le cadre du logement social qui bénéficient du taux réduit de 5,5 % et des livraisons de certains logements locatifs du secteur intermédiaire qui bénéficient, sous certaines conditions, du taux intermédiaire de 10 %.
L’article 278 sexies du CGI énumère l’ensemble des opérations immobilières réalisées dans le secteur du logement social qui sont éligibles au taux réduit de 5,5 %, à savoir :
– les livraisons de terrains à bâtir consenties aux organismes d’HLM ou aux opérateurs bénéficiaires d’un prêt de l’État pour la construction de logements sociaux à usage locatif ;
– les livraisons de logements sociaux neufs à usage locatif, lorsque l’acquisition est financée au moyen d’un prêt de l’État ou d’une subvention de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) ;
– le premier apport de logements sociaux à usage locatif dont la construction a fait l’objet d’une livraison à soi-même (LASM) au taux réduit, réalisée dans les cinq ans de l’achèvement de la construction, au profit d’un organisme HLM ;
– les livraisons de logements destinés à être occupés par des titulaires de contrats de location-accession qui font l’objet d’une convention et d’une décision d’agrément prise par le représentant de l’État dans le département ;
– les livraisons de logements aux structures d’hébergement temporaire ou d’urgence destinées à toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’existence ;
– les livraisons de logements sociaux à usage locatif à l’Association foncière logement (AFL) dont l’objet est de réaliser des programmes de logements, locatifs ou en accession à la propriété, contribuant à la mixité sociale des villes et des quartiers, mais aussi de contribuer par transfert d’actifs au financement des régimes de retraite complémentaire obligatoires des salariés du secteur privé ;
– les livraisons de logements à usage locatif à l’AFL ou à des sociétés civiles immobilières dont cette association détient la majorité des parts lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources et sont situés soit dans des quartiers faisant l’objet d’une convention dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), soit entièrement situés à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers ;
– les livraisons de logements à usage locatif aux organismes réalisant des opérations dans le cadre du programme national de renouvellement urbain (PNRU), dont la réalisation était initialement prévue par l’AFL, lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources ;
– les livraisons de locaux aux établissements qui accueillent des personnes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques ainsi qu’aux locaux des établissements dédiés à l’hébergement des mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation ;
– les cessions de droits immobiliers démembrés de logements sociaux neufs à usage locatif lorsque l’usufruitier bénéficie d’un prêt de l’État pour l’acquisition de logements sociaux à usage locatif ;
– les livraisons d’immeubles et les travaux réalisés en application d’un contrat unique de construction de logements dans le cadre d’une opération d’accession à la propriété à usage de résidence principale, lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources et sont situés, soit dans des quartiers faisant l’objet d’une convention dans le cadre du PNRU, soit entièrement situés à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers ;
– les livraisons d’immeubles et les travaux réalisés en application d’un contrat unique de construction de logements dans le cadre d’une opération d’accession à la propriété à usage de résidence principale, lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources et sont situés, soit dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) ou entièrement situés à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers, soit dans des quartiers faisant l’objet d’une convention dans le cadre du NPNRU ou intégrés à un ensemble immobilier entièrement situé à moins de 500 mètres de la limite de ces quartiers et partiellement à moins de 300 mètres de cette même limite ;
– les apports des immeubles sociaux neufs faits par des organismes d’HLM aux sociétés civiles immobilières d’accession progressive à la propriété ;
– les livraisons de terrains à bâtir à un organisme de foncier solidaire en vue de la conclusion d’un bail réel solidaire (BRS), les livraisons de logements neufs à un organisme de foncier solidaire en vue de la conclusion d’un BRS, ainsi que les cessions des droits réels immobiliers attachés aux logements construits ou réhabilités dans le cadre d’un tel bail et destinés à la résidence principale des acquéreurs.
Le taux réduit de TVA s’applique également aux LASM d’immeubles dont l’acquisition aurait bénéficié du taux réduit de 5,5 %. Il s’applique également aux LASM pour les travaux :
– d’extension ou de remise à l’état neuf d’un immeuble pour certains types de logements sociaux ou de structures d’hébergement temporaire ou d’urgence ;
– de rénovation, d’amélioration, de transformation ou d’aménagement lorsque l’acquéreur bénéficie pour cette opération d’un prêt accordé pour la construction, l’acquisition ou l’amélioration de logements locatifs aidés ou d’une subvention de l’ANRU ;
– de rénovation portant sur certains types de logements sociaux, ayant pour objet de concourir directement à la réalisation d’économies d’énergie et de fluides, à l’accessibilité de l’immeuble et du logement et à l’adaptation du logement aux personnes en situation de handicap et aux personnes âgées, à la mise en conformité des locaux avec les normes relatives à un logement décent, à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à une exposition à l’amiante ou au plomb, ou encore à la protection des locataires en matière de prévention et de lutte contre les incendies, de sécurité des ascenseurs, de sécurité des installations de gaz et d’électricité, de prévention des risques naturels, miniers et technologiques ou d’installation de dispositifs de retenue des personnes.
Lorsque les conditions d’application du taux réduit cessent d’être remplies dans un délai de quinze ans (ramené à dix ans dans certains cas), un complément de TVA (égal à la différence entre le taux normal et le taux réduit) doit en principe être versé, assorti de l’intérêt de retard (article 284 du CGI).
Les livraisons à soi-même (LASM) applicables aux opérations immobilières
L’article 257 du CGI soumet à la TVA les LASM de certains travaux de réhabilitation réalisés dans les logements sociaux et les structures d’hébergement temporaire ou d’urgence, ainsi que pour la livraison de ces logements.
Il s’agit de considérer, en l’absence de toute cession ou opération équivalente, que le redevable est censé, par une sorte de fiction purement fiscale, se livrer à lui-même certains biens ou services. Elle est destinée à permettre la déduction de la TVA d’amont supportée sur les dépenses de construction, et de placer l’ensemble des entreprises dans des conditions normales de concurrence en respectant le principe de neutralité fiscale qui s’attache à la TVA.
En particulier, une LASM vise à faire supporter une même charge de TVA entre l’assujetti qui fait fabriquer un bien et l’assujetti qui acquiert le même type de bien. Pour appréhender au mieux le dispositif, il paraît utile de raisonner à partir d’un exemple, que celui-ci reflète peu ou prou la réalité.
Considérons qu’un organisme décide de procéder à un investissement dans des logements sociaux neufs à usage locatif. Cet organisme peut soit décider d’acheter des logements sociaux neufs, soit de les construire.
Dans le cas où il achète le logement auprès d’un fournisseur, ce dernier délivre au bailleur social une facture sur laquelle sont notamment mentionnés le montant hors taxe, le montant de la TVA correspondante, et le taux appliqué. Sur la TVA facturée par le fournisseur, l’opérateur pourra exercer son droit à déduction.
Dans le cas où il construit lui-même le logement, l’opérateur utilise ses propres moyens pour construire le bien. Il s’agit d’opérations purement internes qui ne sont en principe pas soumises à la TVA, et l’opérateur échapperait à la rémanence de taxe susceptible d’être constatée dans la première hypothèse.
C’est la raison pour laquelle la loi prévoit, en cas de fabrication en interne, le recours à la LASM. Elle permet de remédier à cet inconvénient par une sorte de fiction fiscale, où l’opérateur devient à la fois le fournisseur et l’acquéreur du bien. En tant que fournisseur, il est redevable de la TVA exigible sur le prix de revient du bien. En tant qu’acquéreur, il peut exercer un droit de déduction dans les conditions de droit commun.
Ce procédé évite les distorsions de concurrence en plaçant sur un plan d’égalité l’ensemble des redevables, indépendamment des moyens auxquels ils ont recours pour disposer d’un bien affecté à leur exploitation (acquisition ou fabrication).
2. Le dispositif proposé
Il est proposé un relèvement de la TVA de 5,5 % à 10 % sur l’investissement des bailleurs sociaux en lieu et place de la hausse de la cotisation versée à la CGLLS et adoptée à l’Assemblée nationale à l’article 52 du présent projet de loi de finances.
La mesure ne pouvait néanmoins figurer à l’article 52, car une hausse de la TVA, à compter du 1er janvier 2018, est une disposition qui touche les ressources de l’État et affecte l’équilibre budgétaire de ce dernier : elle doit être placée à ce titre en première partie de la loi de finances ([33]).
Ce relèvement concerne la plupart des opérations actuellement prévues à l’article 278 sexies du CGI, en particulier :
– les livraisons de terrains à bâtir consenties aux organismes d’HLM ou aux opérateurs bénéficiaires d’un prêt de l’État pour la construction de logements sociaux à usage locatif ;
– les livraisons de logements sociaux neufs à usage locatif lorsque l’acquisition est financée au moyen d’un prêt de l’État ou d’une subvention de l’ANRU ;
– le premier apport de logements sociaux à usage locatif, dont la construction a fait l’objet d’une LASM au taux réduit, réalisée dans les cinq ans de l’achèvement de la construction, au profit d’un organisme HLM ;
– les livraisons de logements sociaux à usage locatif à l’AFL dont l’objet est de réaliser des programmes de logements, locatifs ou en accession à la propriété, contribuant à la mixité sociale des villes et des quartiers, mais aussi de contribuer par transfert d’actifs au financement des régimes de retraite complémentaire obligatoires des salariés du secteur privé ;
– les livraisons de logements à usage locatif à l’AFL ou à des sociétés civiles immobilières dont cette association détient la majorité des parts lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources et sont situés soit dans des quartiers faisant l’objet d’une convention dans le cadre du NPNRU, soit entièrement situés à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers ;
– les livraisons de logements à usage locatif aux organismes réalisant des opérations dans le cadre du PNRU, dont la réalisation était initialement prévue par l’AFL, lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources ;
– les cessions de droits immobiliers démembrés de logements sociaux neufs à usage locatif lorsque l’usufruitier bénéficie d’un prêt de l’État pour l’acquisition de logements sociaux à usage locatif.
La hausse de la TVA s’appliquera également aux LASM pour les travaux :
– de rénovation, d’amélioration, de transformation ou d’aménagement lorsque l’acquéreur bénéficie pour cette opération d’un prêt accordé pour la construction, l’acquisition ou l’amélioration de logements locatifs aidés ou d’une subvention de l’ANRU ;
– de rénovation portant sur certains types de logements sociaux, ayant pour objet de concourir directement à la réalisation d’économies d’énergie et de fluides, à l’accessibilité de l’immeuble et du logement et à l’adaptation du logement aux personnes en situation de handicap et aux personnes âgées, à la mise en conformité des locaux avec les normes relatives à un logement décent, à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à une exposition à l’amiante ou au plomb, ou encore à la protection des locataires en matière de prévention et de lutte contre les incendies, de sécurité des ascenseurs, de sécurité des installations de gaz et d’électricité, de prévention des risques naturels, miniers et technologiques ou d’installation de dispositifs de retenue des personnes.
La hausse de la TVA ne s’appliquera en revanche pas pour :
– les livraisons de logements aux structures d’hébergement temporaire ou d’urgence destinées à toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’existence ;
– les livraisons de locaux aux établissements qui accueillent des personnes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, ainsi qu’aux locaux des établissements dédiés à l’hébergement des mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation ;
– les livraisons de logements destinés à être occupés par des titulaires de contrats de location-accession qui font l’objet d’une convention et d’une décision d’agrément prise par le représentant de l’État dans le département ;
– les livraisons d’immeubles et les travaux réalisés en application d’un contrat unique de construction de logements dans le cadre d’une opération d’accession à la propriété à usage de résidence principale, lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources et sont situés, soit dans des quartiers faisant l’objet d’une convention dans le cadre du PNRU, soit entièrement situés à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers ;
– les livraisons d’immeubles et les travaux réalisés en application d’un contrat unique de construction de logements dans le cadre d’une opération d’accession à la propriété à usage de résidence principale, lorsque ces logements sont destinés à être occupés par des ménages respectant des conditions de ressources et sont situés, soit dans les QPV ou entièrement situés à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers, soit dans des quartiers faisant l’objet d’une convention dans le cadre du NPNRU ou intégrés à un ensemble immobilier entièrement situé à moins de 500 mètres de la limite de ces quartiers et partiellement à moins de 300 mètres de cette même limite ;
– les apports des immeubles sociaux neufs faits par des organismes d’HLM aux sociétés civiles immobilières d’accession progressive à la propriété ;
– les livraisons de terrains à bâtir à un organisme de foncier solidaire en vue de la conclusion d’un BRS, les livraisons de logements neufs à un organisme de foncier solidaire en vue de la conclusion d’un BRS ainsi que les cessions des droits réels immobiliers attachés aux logements construits ou réhabilités dans le cadre d’un tel bail et destinés à la résidence principale des acquéreurs.
Les travaux de rénovation énergétique éligibles au crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) restent soumis au taux de TVA à 5,5 %, dispositif applicable pour l’ensemble des logements (article 278-0 ter du CGI).
Le présent article prévoit en plus du relèvement du taux de TVA que les délais de paiement de la TVA pour les LASM d’immeubles neufs soient raccourcis de deux ans à trois mois afin de permettre à l’État d’obtenir le rendement nécessaire dès 2018. La mesure ne s’appliquerait pas pour les livraisons de logements aux structures d’hébergement temporaire ou d’urgence ainsi qu’aux livraisons de locaux aux établissements qui accueillent des personnes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques.
La mesure doit entrer en vigueur pour l’ensemble des opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2018, sans aucune mesure transitoire pour les acteurs économiques ayant déjà engagé des opérations de construction ou de rénovation éligibles au taux réduit.
Les auteurs de l’amendement estiment le rendement de la hausse proposée de la TVA et de ses mesures complémentaires à environ 600 millions d’euros : la mesure pourrait ainsi constituer une alternative au dispositif proposé par l’Assemblée nationale à l’article 52 du présent projet de loi de finances pour 2018.
II. La position du Rapporteur général
Le dispositif tel que proposé par le Sénat doit faire l’objet d’évolutions, afin de sécuriser juridiquement le rendement envisagé et de tenir compte de contraintes juridiques particulières. En effet, le Gouvernement s’est engagé devant le Sénat à faire évoluer le dispositif. Ces évolutions pourraient notamment permettre :
– de déterminer d’éventuelles dispositions de transition afin de ne pas remettre en cause l’équilibre économique des opérations déjà en cours de réalisation mais dont le fait générateur n’est pas encore réalisé ;
– de faire évoluer la réduction de la durée pour les LASM de trois mois à trois mois afin de ne pas contraindre trop fortement les délais de paiement des différents acteurs concernés.
Ces évolutions devraient avoir un impact plus ou moins significatif sur le rendement du relèvement de la TVA proposé. Le Rapporteur général sera donc attentif aux modifications proposées par le Gouvernement, afin de s’assurer que le rendement de la taxe ne soit pas insuffisant pour compenser les mesures prévues à l’article 52 du présent projet de loi de finances.
Dans l’attente, il propose d’adopter le présent article dans le texte du Sénat.
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Article 6 ter B (nouveau)
Aménagements des conditions du bénéfice de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) réduite pour l’acquisition de logements intermédiaires
Le présent article, inséré par le Sénat dans le présent projet de loi de finances, vise à compléter et diversifier les modes d’intervention des bailleurs sociaux et des investisseurs institutionnels dans le secteur du logement locatif intermédiaire, en aménageant les règles du bénéfice du taux de TVA réduit à 10 %.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR LE SÉNAT
L’article 279-0 bis A du CGI fait bénéficier du taux réduit de TVA les livraisons de logements neufs à des organismes HLM, à la société Action logement immobilier ou encore à des personnes morales dont le capital est détenu en totalité par des personnes passibles de l’impôt sur les sociétés (IS) ou des établissements publics administratifs (EPA). Les logements concernés doivent être destinés à la location à usage de résidence principale et être implantés sur le territoire des communes classées dans les zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement sur le parc locatif existant. Ces logements, dénommés logements locatifs intermédiaires, doivent également être, sauf exception, intégrés dans un ensemble immobilier comprenant au minimum 25 % de surface de logements locatifs sociaux, et être loués sous condition de ressources.
Le Sénat, avec un avis de sagesse de la commission des finances, mais avec un défavorable du Gouvernement, a adopté deux amendements présentés respectivement par M. Philippe Pemezec (LR) et M. Philippe Dallier (LR) ([34]), qui proposent d’étendre le bénéfice du taux réduit de TVA à 10 % :
– aux livraisons de logements locatifs intermédiaires aux caisses de retraite et de prévoyance du secteur privé ;
– aux opérations de logements locatifs intermédiaires réalisées selon le dispositif de l’usufruit locatif ([35]).
Le présent article effectue également les coordinations nécessaires avec l’article 284 du CGI, qui définit les règles de reprises en matière de TVA dans le logement locatif social ou intermédiaire, en cas de non-respect des conditions auxquelles est subordonné l’octroi des taux réduits.
II. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général estime que le présent amendement est en grande partie satisfait par le droit existant.
En effet, concernant les livraisons de logements locatifs intermédiaires aux caisses de retraite et de prévoyance du secteur privé, l’article 219 quater du CGI précise que « les caisses de retraite et de prévoyance sont assujetties à l’impôt sur les sociétés ». Or l’article 279-0 bis A du même code fait bénéficier du taux réduit de TVA à 10 % les livraisons de logements locatifs intermédiaires à des personnes morales dont le capital est détenu en totalité par des personnes passibles de l’IS. Aussi les caisses de retraite et de prévoyance privée peuvent-elles déjà bénéficier du présent dispositif.
Ensuite, concernant l’application du dispositif de l’usufruit locatif social au logement intermédiaire, l’article 257 du CGI prévoit déjà que les droits réels immobiliers suivent le régime de l’immeuble auxquels ils se rapportent. Par conséquent, la nue-propriété et l’usufruit de logements intermédiaires bénéficient déjà du taux de TVA de 10 %, pourvu que les titulaires de ces droits démembrés respectent les mêmes conditions que celles qui sont prévues pour que l’immeuble lui-même bénéficie du taux intermédiaire.
Le Rapporteur général propose dès lors de supprimer cet article.
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Article 6 ter
Allégement des conditions pour bénéficier du régime d’incitation fiscale à l’investissement institutionnel dans le logement intermédiaire
Le présent article, adopté à l’Assemblée nationale avec un avis favorable de la commission des finances et de sagesse du Gouvernement, vise à abaisser de 50 % à 35 % le seuil de logements sociaux dans une commune permettant d’obtenir le taux réduit de TVA de 10 % pour la livraison de logements locatifs intermédiaires, sans exiger la condition préalable de 25 % de logements sociaux dans l’ensemble immobilier à construire.
L’objectif est de favoriser le développement d’une mixité urbaine en soutenant la construction de logements intermédiaires dans les zones déjà fortement occupées par les logements sociaux.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
L’article 279-0 bis A du CGI fait bénéficier du taux réduit de TVA les livraisons de logements neufs à des organismes HLM, à la société Action logement immobilier ou encore à des personnes morales dont le capital est détenu en totalité par des personnes passibles de l’IS ou des EPA. Les logements doivent être destinés à la location à usage de résidence principale, sous condition de ressources, et être implantés sur le territoire des communes classées dans les zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement sur le parc locatif existant.
Les logements locatifs intermédiaires doivent également être intégrés dans un ensemble immobilier comprenant au minimum 25 % de surface de logements locatifs sociaux, sauf dans les communes comptant déjà plus de 50 % de logements locatifs sociaux et dans les quartiers faisant l’objet d’une convention dans le cadre du NPNRU.
Le présent article abaisse de 50 % à 35 % le seuil de logements sociaux dans une commune permettant d’obtenir le taux réduit de TVA de 10 % pour la livraison de logements locatifs intermédiaires, seuil permettant de s’exonérer de la condition de 25 % de logements sociaux dans l’ensemble immobilier à construire.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Ainsi que cela a été rappelé à l’occasion de l’examen de l’amendement en commission des finances de l’Assemblée nationale par le Rapporteur général, ainsi que par le Gouvernement lors de l’examen de cet article en séance, une telle extension pourrait être de nature à fragiliser le dispositif existant au regard du droit de l’Union européenne. En effet, ce dernier limite la possibilité pour les États membres d’appliquer un taux réduit de TVA aux seules opérations « de livraison, construction, rénovation et transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale ».
De plus, dans le contexte d’une remontée du taux de 5,5 % applicable au logement locatif social par l’article 6 ter A du présent projet de loi de finances ([36]), le Gouvernement a estimé nécessaire de s’assurer de la compatibilité de cette disposition avec le droit de l’Union européenne et de reporter son entrée en vigueur au 1er janvier 2019. Par conséquent, il a proposé par amendement, avec un avis de sagesse de la commission des finances du Sénat, de supprimer le présent article et s’est engagé à présenter en seconde partie un amendement de création d’un nouvel article avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2019 ([37]).
III. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général est favorable au maintien de la suppression du présent article.
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Article 6 quater
Prolongation du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les autotests de dépistage du virus de l’immunodéficience humaine (VIH)
Le présent article a pour objet de prolonger pour une année supplémentaire le taux de TVA réduit de 5,5 % pour les autotests de dépistage du virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Un amendement adopté au Sénat et présenté par le Gouvernement en a supprimé le gage qui prévoyait la création d’une taxe additionnelle sur les tabacs ([38]). Le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
L’article 61 de la loi de finances rectificative pour 2016 ([39]) prévoyait l’abaissement, uniquement pour l’année 2017, du taux de TVA à 5,5 % aux autotests de dépistage du VIH. Il prévoyait également, au plus tard le 1er octobre 2017, la remise par le Gouvernement d’une évaluation de l’effet du taux réduit sur le prix de vente des autotests de détection de l’infection du VIH. Le Rapporteur général souligne que ce rapport n’a toujours pas été communiqué à l’Assemblée nationale à ce jour.
Ces tests, apparus depuis un peu plus de deux ans, sont très prometteurs pour diminuer le nombre de personnes qui sont séropositives sans le savoir, car certaines personnes peuvent préférer la discrétion rendue possible par ces tests, ainsi que leur rapidité de diagnostic : le test, vendu en pharmacie, peut être fait par l’acheteur à son domicile avec une goutte de sang et donne un résultat en seulement 15 minutes.
C’est un enjeu important pour diminuer la diffusion du syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA) en France, puisqu’entre 30 000 et 50 000 personnes seraient actuellement séropositives sans le savoir, tandis que 150 000 personnes se savent contaminées. Le nombre de nouveaux cas de séropositivité a tendance à augmenter ces dernières années, notamment en raison d’un relâchement des comportements et des pratiques de prévention.
La baisse du taux de TVA proposée est conforme à la directive relative au système commun de TVA ([40]), dont l’annexe III prévoit la possibilité d’un taux réduit pour « les produits pharmaceutiques normalement utilisés pour les soins de santé, la prévention de maladies et le traitement à des fins médicales et vétérinaires ».
La mesure semble peu coûteuse pour l’État : à la fin de l’année 2016, le rythme des ventes d’autotests en France était estimé à 2 000 par semaine, ce qui correspondrait donc à 104 000 tests vendus par an. Même en imaginant que 200 000 tests soient achetés, le coût de la mesure resterait proche d’un million d’euros.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Un amendement du Gouvernement, adopté en séance avec un avis favorable de la commission des finances, a supprimé le gage qui prévoyait la création d’une taxe additionnelle sur les tabacs, afin de compenser la perte de recettes engendrée par la mesure.
III. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 6 quinquies (nouveau)
Aménagement des conditions d’assujettissement au taux réduit de taxe
sur la valeur ajoutée (TVA) pour les exploitants de campings classés
Le présent article, inséré dans le projet de loi par un amendement parlementaire adopté au Sénat, aménage les conditions d’assujettissement à la TVA au taux réduit de 10 % à laquelle les exploitants de campings classés sont soumis.
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
L’article 279 du CGI dispose que la TVA est perçue au taux réduit de 10 % en ce qui concerne la fourniture de logement dans les terrains de campings classés. Toutefois, pour bénéficier de ce taux réduit, il est précisé que l’exploitant du terrain de camping doit :
– délivrer à tout client une note en double exemplaire d’un modèle agréé par l’administration indiquant les dates de séjour et le montant de la somme due ;
– assurer l’accueil des clients : le terrain de camping doit posséder à cette fin un local d’accueil ouvert tous les jours en saison ;
– consacrer 1,5 % de son chiffre d’affaires total hors taxes à des dépenses de publicité qui doivent revêtir la forme de livraisons de biens (distribution gratuite ou vente de tee-shirts, casquettes, etc.) ou de prestations de service (journées portes ouvertes, fêtes et réceptions ouvertes à des non-résidents, etc.).
Pour les locations d’emplacements sur les terrains de campings classés, le taux réduit n’est conditionné qu’à la délivrance de la note mentionnée précédemment.
Un amendement de M. Michel Canevet (UC), adopté au Sénat avec un avis favorable du Gouvernement et de la commission, propose de supprimer ces conditions en raison de leur caractère obsolète ([41]). Le rapporteur général de la commission des finances du Sénat a ainsi estimé qu’il « est vrai que faire de la publicité sur internet est plus approprié que distribuer des objets publicitaires » et que « l’obligation de délivrer une facture conforme à un modèle fourni par l’administration paraît anachronique au regard de l’utilisation de logiciels d’édition de factures » ([42]).
L’auteur de l’amendement soulignait, par ailleurs, dans l’exposé sommaire de son amendement, l’existence d’une décision du tribunal administratif de Rennes du 24 mai 2017 qui disposait que « la condition figurant à l’article 279 a du code général des impôts tenant à l’engagement de dépenses de publicité méconnaît le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu’elle conduit à traiter différemment des prestations de service qui sont identiques ».
II. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général estime que ces conditions l’on peut qualifier d’obsolètes méritent en effet d’être revues. Il est, en conséquence, favorable au maintien de l’article dans sa rédaction actuelle, d’autant que les autres acteurs de l’hébergement touristique bénéficiant du même taux de TVA réduit ne sont assujettis à aucune condition similaire.
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Article 6 sexies (nouveau)
Lutte contre la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
sur les plateformes en ligne
Cet article vise à lutter contre la fraude à la TVA sur les plateformes en ligne. Il institue une responsabilité solidaire des plateformes en ligne en cas de non-paiement de la TVA par les vendeurs établis dans un État ou un territoire n’appartenant pas à l’Union européenne (UE), ainsi que la possibilité de prélever la TVA à la source, au moment de la transaction.
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
La mesure vise principalement à lutter contre la fraude à la TVA concernant les envois postaux faisant suite à des commandes passées sur des plateformes en ligne qui mettent en relation des vendeurs tiers à la plateforme, opérant souvent depuis des pays n’appartenant pas à l’UE, et des acheteurs situés en France.
A. l’état du droit
Les opérateurs de plateformes en ligne sont définis à l’article L. 111-7 du code de la consommation comme une « personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne reposant sur (…) la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service ». Les opérateurs de plateformes en ligne, dont l’activité dépasse un seuil de cinq millions de visiteurs uniques par mois ([43]), doivent élaborer et diffuser aux consommateurs des bonnes pratiques visant à renforcer des obligations de clarté, de transparence et de loyauté (article L. 111-7‑1 du code de la consommation).
Dans ce cadre, certaines plateformes en ligne mettent en lien des vendeurs tiers à la plateforme, opérant souvent depuis des pays n’appartenant pas à l’UE, et des acheteurs situés en France. Ces derniers effectuent une transaction ayant un caractère commercial, qualifiée de vente à distance, qui peut être soumise sous certaines conditions à la TVA.
1. Les modalités générales d’application de la TVA à l’importation et des acquisitions intracommunautaires
L’article 293 du CGI dispose qu’à l’importation, le fait générateur se produit et la taxe devient exigible au moment où le bien est considéré comme importé. La taxe doit être acquittée par la personne désignée comme destinataire réel des biens sur la déclaration d’importation. En application de l’article 291 du CGI, est considérée comme importation d’un bien :
– soit l’entrée en France d’un bien, originaire ou en provenance d’un État ou d’un territoire n’appartenant pas à l’Union européenne ;
– soit la mise à la consommation en France d’un bien placé lors de son entrée sur le territoire sous l’un des régimes suivants : conduite et mise en douane, magasins et aires de dépôt temporaire, zone franche, entrepôt franc, entrepôt d’importation, admission temporaire en exonération totale des droits à l’importation, transit externe ou sous le régime du transit communautaire interne, etc.
Inversement, dans le cas de l’achat d’un bien par une entreprise française à une entreprise située dans l’Union européenne, il convient de parler non pas d’importation mais d’acquisition intracommunautaire. Le redevable de la TVA due au titre d’une acquisition intracommunautaire dont le lieu se situe en France est l’acquéreur.
Toutefois, dans le cas particulier où la vente du bien est réalisée par un assujetti redevable implanté dans l’Union européenne à un particulier (non assujetti) implanté en France, il s’agit d’une vente à distance : dans ce cas, la vente à distance est une livraison taxable pour le vendeur. Cependant, la localisation de cette livraison est régie par les règles suivantes :
– jusqu’à un certain seuil de chiffre d’affaires (35 000 euros en France), le lieu de la livraison est réputé se situer dans l’État de départ des biens. En conséquence, la TVA de cet État s’applique ;
– au-delà du seuil, le lieu de la livraison est réputé se situer dans l’État d’arrivée des biens (en France dans le cas présent). La TVA de cet État s’applique.
2. Les modalités spécifiques d’application de la TVA pour les achats à distance et envois entre particuliers
Du fait de l’application des modalités générales d’application de la TVA à l’importation ou aux acquisitions intracommunautaires, les achats à distance sont normalement soumis à la TVA pour l’ensemble de la valeur du bien.
Toutefois, les marchandises contenues dans les envois adressés par un vendeur professionnel établi dans un État non membre de l’Union européenne (pays tiers), à un particulier demeurant en France, sont exonérées de droits de douane. Pour bénéficier de la franchise, ces importations de marchandises doivent correspondre à des envois de valeur négligeable (EVN) dont la valeur des marchandises n’excède pas 150 euros Toutefois, quelle que soit la valeur des marchandises importées, dès lors qu’il s’agit d’une vente à distance, les marchandises expédiées ne bénéficient d’aucune franchise de TVA : il revient à l’expéditeur de déclarer le contenu en valeur du colis, et au destinataire de s’acquitter des éventuels droits de douanes et de TVA.
À l’inverse, les marchandises contenues dans les envois adressés par un vendeur professionnel établi dans un État membre de l’Union européenne, à un particulier demeurant en France, sont exonérées de droits de douane (à l’exception de certains produits comme l’alcool ou le tabac soumis à des restrictions particulières) et la TVA sera acquittée lors de l’achat, généralement au taux en vigueur dans le pays du vendeur ou du pays de destination au-delà d’un certain montant de chiffre d’affaires. Il revient au vendeur de déclarer et de collecter la TVA.
Enfin, les marchandises contenues dans les envois adressés par un particulier établi dans un pays tiers, à un autre particulier demeurant en France, sont exonérées de droits de douane et de TVA, pour autant que la valeur des marchandises n’excède pas 45 euros et qu’il s’agit d’importations dépourvues de tout caractère commercial (réception occasionnelle pour un usage personnel ou familial et à titre gratuit).
B. le dispositif proposé
Le présent article, inséré dans le présent projet de loi de finances par un amendement du rapporteur général de la commission des finances du Sénat, avec un avis de sagesse du Gouvernement, vise à lutter contre la fraude à la TVA concernant les envois postaux faisant suite à des commandes passées sur des plateformes en ligne qui mettent en relation des vendeurs tiers à la plateforme, opérant souvent depuis des pays n’appartenant pas à l’UE, et des acheteurs situés en France ([44]).
En effet, la TVA à l’importation dans le cadre d’une vente à distance à un particulier repose sur une procédure purement déclarative de la part du vendeur favorable au développement de la fraude. En particulier, les biens peuvent être très fréquemment sous-évalués, non déclarés, ou déclarés abusivement comme des EVN. Or, la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) n’a pas les moyens humains ni matériels de contrôler l’ensemble des colis qui transitent chaque année dans les aéroports français, et qui représentent chacun un enjeu financier très faible.
Dans ce contexte, le présent article propose :
– de rendre les plateformes en ligne solidairement responsables du paiement de la TVA due par les vendeurs établis dans un État ou un territoire n’appartenant pas à l’Union européenne, lorsque ceux-ci leur ont été formellement signalés par l’administration fiscale et que les mesures n’ont pas été prises pour assurer leur mise en conformité ou, à défaut, leur exclusion (nouvel article 293 A ter du CGI) ;
– de donner la possibilité aux plateformes en ligne de collecter la TVA pour le compte des vendeurs établis dans un État ou un territoire n’appartenant pas à l’Union européenne en prélevant celle-ci à la source, au moment de l’achat en ligne, pour les ventes de biens commandés par voie électronique par une personne non assujettie qui est établie en France (nouvel article 293 A quater du CGI) ;
– d’imposer des obligations déclaratives aux opérateurs de plateforme en ligne en matière de TVA qui seront désormais tenus de collecter le nom ou la dénomination, l’adresse et le numéro de TVA de chacun des vendeurs, établis dans un État tiers, exerçant une activité par l’intermédiaire de cette plateforme ;
– de rendre le dispositif applicable à compter du 1er janvier 2018, sous réserve de l’autorisation du Conseil de l’UE prévue en application de l’article 395 de la directive relative au système commun de TVA ([45]), qui dispose que « le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser tout État membre à introduire des mesures particulières dérogatoires à la présente directive, afin de simplifier la perception de la taxe ou d’éviter certaines fraudes ou évasions fiscales ». Il prévoit toutefois une mise en œuvre immédiate pour les obligations déclaratives incombant aux opérateurs de plateforme.
II. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général partage l’objectif ainsi que les préoccupations portées par cet amendement en matière de lutte contre la fraude à la TVA. Il rappelle que l’écart de TVA, à savoir l’écart entre le montant de TVA effectivement collectée et le montant théorique de recettes de TVA, s’élevait en Europe à 151,5 milliards d’euros en 2015.
En France, l’écart de TVA est évalué à 20,1 milliards d’euros en 2015 par rapport à un montant théorique de recettes de TVA de 171,7 milliards d’euros, soit un écart de TVA représentant 11,7 % des recettes théoriques, en baisse par rapport à 2014 où il s’élevait à 12,9 % des recettes théoriques, mais en forte hausse par rapport à 2011 où il s’élevait à moins de 7,9 %. Ainsi, l’écart de TVA en France fluctue autour de 12 % depuis la hausse importante de 4 points observée en 2011.
Écart de TVA en France entre 2011 et 2015
(en millions d’euros)
TVA |
2011 |
2012 |
2016 |
2014 |
2015 |
TVA théorique |
152 667 |
162 380 |
162 708 |
170 435 |
171 735 |
TVA collectée |
140 552 |
142 527 |
144 490 |
148 454 |
151 622 |
Écart de TVA |
12 115 |
19 853 |
18 218 |
21 981 |
20 113 |
Écart de TVA (en %) |
7,94 % |
12,23 % |
11,20 % |
12,90 % |
11,71 % |
Source : Commission européenne, direction générale de la fiscalité et des douanes (DG TAXUD), Study and Reports on the VAT Gap in the EU-28 Member States : 2017 Final Report, 18 septembre 2017.
Toutefois, l’écart de TVA ne doit pas entièrement être assimilé au montant de fraude et d’évasion fiscale à la TVA, puisqu’il peut également être influencé par des faillites ou insolvabilités d’entreprises, des arriérés d’impôts non recouverts ou encore des imprécisions dans les montants ou le périmètre de la comptabilité nationale de chaque État membre.
Pour rappel, face à ce constat, la Commission européenne a lancé en avril 2016 un plan d’action sur la TVA, afin de rendre le système de TVA de l’Union européenne plus simple, plus étanche à la fraude et plus propice aux entreprises.
Dans ce cadre, elle a proposé le 4 octobre 2017 une réforme en profondeur du système de TVA pour les échanges intracommunautaires :
– un prélèvement de la TVA sur les ventes transfrontières par l’autorité fiscale du pays d’origine en lieu et place du dispositif actuel d’exonération des importations intra-communautaires et d’auto-liquidation dans le pays de destination ;
– la mise en place d’un guichet unique en ligne pour les entreprises qui réalisent des ventes transfrontières, sur le modèle de ce qui existe déjà pour les ventes de services électroniques ;
– et la création d’un label européen « assujetti certifié » pour les entreprises fiables qui pourront continuer à acheter des biens en exonération de TVA dans un autre État membre.
L’objectif affiché est de mettre un terme à 80 % de la fraude à la TVA transfrontière, dont le montant est estimé à environ 50 milliards d’euros par an dans l’Union européenne.
Pour ce qui concerne plus particulièrement les obligations en matière de TVA applicables aux ventes à distance de biens, une proposition de directive du Conseil de l’Union européenne ([46]) a été adoptée lors du Conseil pour les affaires économiques et financières de l’Union européenne du 5 décembre 2017. L’exposé des motifs de la directive dispose que « la complexité du système existant ainsi que l’exonération en vigueur pour l’importation de petits envois se traduisent par des pertes de recettes fiscales appréciables pour les États membres. Selon les estimations, entre la TVA non perçue et le non-respect des obligations dans le cadre du commerce électronique transfrontière, les pertes subies se chiffrent actuellement à 5 milliards d’euros par an ».
Les principales dispositions de la directive en matière de lutte contre la fraude à la TVA transfrontière dans ce domaine sont :
– l’extension du mini-guichet unique existant aux ventes à distance intracommunautaires de biens matériels et aux services autres que les services électroniques ainsi qu’aux ventes à distance de biens provenant de pays tiers ;
– l’introduction d’un régime simplifié pour la déclaration et le paiement globaux de la TVA à l’importation applicable aux importateurs de biens destinés à un consommateur final dans les cas où la TVA n’a pas été acquittée via le système du mini-guichet unique ;
– la suppression des seuils existants applicables aux ventes à distance intracommunautaires qui sont à l’origine de distorsions sur le marché unique ;
– la suppression de l’exonération de TVA en vigueur pour l’importation de petits envois provenant de fournisseurs situés dans des pays tiers qui porte préjudice aux vendeurs de l’Union.
La plupart de ces dispositions doivent faire l’objet d’une transposition en droit interne avant le 1er janvier 2021.
Aussi, si le Rapporteur général partage l’objectif affiché de lutte contre la fraude à la TVA, il préfère toutefois que le Gouvernement prenne le temps d’effectuer une transposition complète et effective de la présente directive. Il propose en conséquence la suppression du présent article.
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Article 7
Calcul du taux effectif d’imposition et modalités de répartition du produit
de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
Le présent article réforme les modalités de détermination du taux effectif de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) en tirant les conséquences d’une décision du Conseil constitutionnel du 19 mai 2017 ([47]). Il modifie également les modalités selon lesquelles le produit national de CVAE est réparti entre les collectivités territoriales attributaires.
A. La mise en conformité avec la Constitution des modalités de calcul du taux effectif de CVAE
La CVAE distingue un taux théorique de 1,5 %, qui correspond au produit attribué par l’État aux collectivités territoriales, et un taux effectif, qui est celui réellement supporté par les entreprises. Ce taux effectif, en application de l’article 1586 quater du CGI, est fonction du chiffre d’affaires de l’entreprise et dépend d’un barème progressif. Au-delà de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires, le taux effectif est de 1,5 %. La différence entre le montant du produit redistribué aux collectivités territoriales et celui des sommes acquittées par les entreprises correspond au dégrèvement barémique, pris en charge par l’État.
Des modalités particulières étaient prévues pour déterminer le chiffre d’affaires retenu pour les sociétés membres d’un groupe fiscalement intégré au sens des articles 223 A et suivants du CGI, dans le cadre duquel est notamment exigée une détention directe ou indirecte, par la société mère, d’au moins 95 % du capital des filiales membres de l’intégration fiscale.
Pour ces groupes, aux termes du I bis de l’article 1586 quater, le chiffre d’affaires retenu correspondait à la somme du chiffre d’affaires de chacune des sociétés membres du groupe. L’objectif de cette consolidation résidait dans la lutte contre l’optimisation fiscale consistant, pour un groupe fiscalement intégré, à structurer artificiellement son activité en petites entités pour diminuer le taux effectif supporté.
Néanmoins, et tout en reconnaissant l’intérêt général attaché à une telle consolidation, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 19 mai 2017 précitée, a censuré ce dispositif au motif qu’il reposait sur l’intégration fiscale, modalité propre à l’impôt sur les sociétés (IS) et qui, dès lors, ne pouvait servir de critère pour la détermination d’un autre impôt totalement distinct de l’IS tel que la CVAE.
Tirant les conséquences de cette décision, le A du I du présent article a rétabli la consolidation du chiffre d’affaires pour les sociétés membres d’un groupe fiscalement intégré et l’a élargie aux sociétés qui, sans être membres d’un tel groupe (par impossibilité, comme les sociétés à l’impôt sur le revenu, ou par choix), remplissent les conditions de détention du capital pour en constituer un.
Ce dispositif entraîne pour l’État la réalisation d’un gain de 340 millions d’euros à compter de 2018 par rapport au droit résultant de la censure, et de 40 millions d’euros par rapport au droit antérieur à cette dernière ([48]).
B. L’aménagement des modalités de répartition du produit
de CVAE
Le produit national de CVAE est réparti entre les régions (50 % du produit), les départements (23,5 %) et le bloc communal (26,5 %).
Les modalités de répartition sont fixées au III de l’article 1586 octies du CGI : la valeur ajoutée, assiette de la CVAE, est territorialisée, c’est-à-dire imposée dans le territoire où l’entreprise qui la produit dispose de locaux ou emploie des salariés exerçant leur activité plus de trois mois. Deux situations doivent être distinguées :
– si l’entreprise est mono-établissement, l’intégralité de la valeur ajoutée revient au territoire d’implantation ;
– si elle est multi-établissements, la valeur ajoutée est répartie entre les collectivités territoriales d’implantation au prorata, pour un tiers, des valeurs locatives et, pour les deux tiers, de l’effectif employé.
a. L’augmentation du coefficient de pondération des immobilisations industrielles
La valeur locative et les effectifs des immobilisations industrielles sont majorés d’un coefficient 5, destiné à maintenir une incitation dynamique des collectivités à soutenir les activités industrielles.
La révision des valeurs locatives des locaux professionnels, entrée en vigueur au 1er janvier 2017, a permis un réalignement de ces dernières sur les valeurs du marché. Néanmoins, cette révision n’a pas concerné les locaux industriels, dont le poids s’est dès lors trouvé sous-pondéré.
En conséquence, le 1° du B du I du présent article a augmenté le coefficient de pondération de ces locaux industriels, le faisant passer de 5 à 21.
b. La répartition de la valeur ajoutée des entreprises membres d’un groupe fiscalement intégré
L’article 51 de la loi de finances rectificative pour 2016 ([49]) a modifié les modalités de répartition de la valeur ajoutée des groupes fiscalement intégrés, pour lui appliquer les règles prévues pour les entreprises multi-établissements. L’objectif de ces nouvelles modalités était de neutraliser les éventuels transferts intra-groupes, mais aussi d’aboutir à une répartition plus juste du produit de CVAE entre territoires. Ce nouveau dispositif devait entrer en vigueur en 2018. Un rapport annuel, prévu au III de cet article 51, devait en outre analyser la variation du produit de CVAE et de sa répartition ([50]).
Les 3° du B du I et le II du présent article suppriment ces modalités de répartition de la valeur ajoutée des groupes, au motif que de nombreuses simulations sont nécessaires pour correctement appréhender l’impact du dispositif, qui induirait en outre un manque de lisibilité et de prévisibilité du produit de CVAE. Selon le Gouvernement, en effet, la variation du produit dépendrait des évolutions des périmètres des groupes, fréquentes et sur lesquelles, par définition, l’administration n’a pas de prise. Par ailleurs, l’assiette de la CVAE et l’identité du taux effectif supporté par les entreprises de ces groupes ne seraient pas propices à des comportements d’optimisation. Ils supprimaient également, dans la rédaction initiale du présent article, le rapport sur la variation du produit de CVAE et de sa répartition.
Si les difficultés que pouvaient présenter les nouvelles modalités de répartition de la CVAE due par les groupes n’étaient pas ignorées ([51]), une suppression sèche de l’ensemble du dispositif, y compris le rapport, n’est pas apparue opportune. En effet, il a pu être constaté que certains territoires, au sein desquels sont implantés les sièges des groupes, captent une part du produit de CVAE supérieure à leur contribution à la valeur ajoutée nationale.
En conséquence, et suivant l’avis favorable du Gouvernement, notre Assemblée a adopté un amendement de la commission des finances qui, sans revenir sur la suppression de ces nouvelles modalités, prévoit non seulement le maintien du rapport annuel, mais complète ce dernier afin qu’il permette, par l’éclairage qu’il apportera, de modifier les modalités de répartition du produit de CVAE à compter du 1er janvier 2019. Mesure de compromis acceptée par l’ensemble des groupes parlementaires de l’Assemblée nationale, cet amendement concilie réalisme pratique et nécessité d’aboutir à une évolution des règles applicables dans le sens d’une meilleure justice territoriale.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
La commission des finances du Sénat a proposé l’adoption de l’article 7 sans modification, en soulignant notamment l’intérêt de poursuivre la réflexion sur les modalités de répartition de la valeur ajoutée entre les territoires.
En séance, le Gouvernement a déposé un amendement, qui a fait l’objet d’un avis favorable de la commission, visant à apporter une précision sur le périmètre des entreprises prises en compte pour la consolidation du chiffre d’affaires au titre du calcul du taux effectif de CVAE.
La précision consiste à indiquer que cette consolidation s’applique y compris lorsque des entreprises ne sont pas membres d’un groupe fiscalement intégré : l’objectif est d’éviter toute confusion et de bien souligner le fait que l’interposition, dans la chaîne de détention à 95 %, d’une société non membre d’un groupe fiscalement intégré ne fait pas obstacle à la consolidation.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
La précision apportée par le Gouvernement peut surprendre dans la mesure où son contenu est précisément l’objet de la nouvelle rédaction du I bis de l’article 1586 quater du CGI à laquelle procédait le A du I du présent article dans sa rédaction initiale.
Dans le premier alinéa de ce I bis, en effet, il n’est pas fait référence à l’appartenance à un groupe fiscalement intégré, mais uniquement au fait, pour les entreprises, de remplir les conditions de détention de capital prévues pour ces groupes.
Néanmoins, la mention ajoutée à l’initiative du Gouvernement a le mérite de lever toute ambiguïté possible, prémunissant le dispositif d’une difficulté d’application future éventuelle.
Dès lors, le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 7 bis (nouveau)
Prorogation et rétablissement des dispositifs d’amortissement accéléré
des robots, imprimantes 3D et logiciels acquis par les entreprises
I. Les dispositions adoptées par le Sénat
Le présent article résulte de l’adoption par le Sénat d’un amendement de la commission des finances, malgré l’avis défavorable du Gouvernement.
Il vise à proroger ou rétablir, selon les cas, au titre des acquisitions réalisées jusqu’au 31 décembre 2018, trois dispositifs d’amortissement accéléré particuliers :
– l’amortissement accéléré sur vingt-quatre mois de robots industriels ([52]) acquis par les PME, prévu à l’article 39 AH du CGI et applicable aux acquisitions réalisées entre le 1er octobre 2013 et le 31 décembre 2016 ([53]) ;
– l’amortissement accéléré sur vingt-quatre mois des équipements de fabrication additive, c’est-à-dire des imprimantes 3D, acquis par les PME, prévu à l’article 39 AI du CGI et applicable aux acquisitions réalisées entre le 1er octobre 2015 et le 31 décembre 2017 ([54]) ;
– enfin, l’amortissement accéléré sur douze mois des logiciels acquis par les entreprises, prévu à l’ancien II de l’article 236 du CGI qu’a abrogé l’article 32 de la loi de finances pour 2017 ([55]).
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Le présent article porte sur un sujet qui a fait l’objet d’amendements voisins rejetés par notre Assemblée lors de l’examen en première lecture du présent projet de loi de finances. Les trois dispositifs concernés, qui visent à inciter les entreprises à faire l’acquisition de matériels particuliers, ne semblent plus se justifier.
● En premier lieu, l’intérêt d’un dispositif incitatif est d’être provisoire. Sa pérennisation réduit substantiellement ce caractère incitatif et entraîne, par ailleurs, de nombreux et importants effets d’aubaine.
À cet égard, le rétablissement de l’amortissement accéléré des robots éteint depuis le 31 décembre 2016 et sa prorogation jusqu’au 31 décembre 2018 aurait pour conséquence de rendre éligibles à cet outil toutes les acquisitions réalisées en 2017, qui l’ont été sans ce dispositif. L’effet d’aubaine serait patent.
L’amortissement accéléré des logiciels, bien qu’à l’origine non borné dans le temps, est lui aussi source d’effets d’aubaine. Créé en 1984, il avait pour finalité de permettre « aux entreprises françaises d’être mieux armées pour affronter la concurrence internationale » ([56]). Depuis cette époque, l’informatique a connu une évolution considérable, les outils sont devenus plus performants et les coûts se sont substantiellement réduits. Même sans cet amortissement dérogatoire, les entreprises s’équipent en logiciels : le maintenir plus de trente années après sa création ne semble pas indispensable.
Telle était d’ailleurs la conclusion du Comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, qui relevait un effet d’aubaine important, l’absence de justification du maintien de la mesure telle qu’elle existait alors au regard des changements de circonstances et la disparition des outils similaires chez nos principaux partenaires européens ([57]).
Enfin, le coût annuel cumulé des deux premiers dispositifs concernant les robots et les imprimantes 3D est de l’ordre de 3 millions d’euros. Si la relative faiblesse de ce montant pourrait militer pour les prorogations proposées, elle témoigne en réalité d’une efficacité limitée de ces amortissements accélérés.
● En deuxième lieu, l’investissement des entreprises connaît une bonne dynamique qui devrait se confirmer au cours des prochains exercices : après une augmentation de 3,6 % en 2016, l’investissement devrait connaître une progression de 3,7 % en 2017, de même qu’en 2018. S’agissant de l’investissement hors construction, plus pertinent en l’espèce compte tenu de l’objet des amortissements accélérés, la hausse de 3,9 % en 2016 serait accentuée en 2017 (+ 4,2 %) et confirmée en 2018 (+ 4,1 %) ([58]).
● En troisième et dernier lieu, le rétablissement de l’amortissement accéléré des logiciels risque d’entraîner un coût élevé. Chiffré à 15 millions d’euros par la commission des finances du Sénat, en cohérence avec les données figurant dans les documents budgétaires annexés au présent projet de loi de finances ([59]), ce rétablissement pourrait en réalité dépasser largement ces estimations.
En effet, le gain tiré par l’État de la suppression de l’amortissement accéléré des logiciels était chiffré, dans le projet de loi de finances pour 2017, à 240 millions d’euros sur deux ans : 72 millions d’euros dès 2017, 168 millions d’euros en 2018 ([60]).
Cette estimation, qui s’écartait du montant figurant dans le tome II Dépenses fiscales des Évaluations des voies et moyens du projet de loi de finances pour 2017 (13 millions d’euros en 2015), reposait sur une hypothèse de rétablissement des bénéfices des entreprises. L’année de référence avait en effet connu un nombre d’exercices déficitaires élevé. En revanche, le tome II Dépenses fiscales des Évaluations des voies et moyens du projet de loi de finances pour 2016 affichait au titre des exercices 2014 à 2016 un coût de 90 millions d’euros par an, plus proche des estimations faites dans le cadre de la suppression de cet outil l’année dernière.
● Dans ces conditions, non seulement la prorogation ou le rétablissement des trois dispositifs visés ne paraît pas nécessaire ni opportune, mais elle serait de nature à entraîner pour l’État un coût non négligeable.
En conséquence, le Rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 7 ter (nouveau)
Rétablissement du suramortissement exceptionnel de 40 % en 2018
I. Les dispositions adoptées par le Sénat
Le présent article résulte de l’adoption par le Sénat d’un amendement de Mme Élisabeth Lamure (LR), sous-amendé à l’initiative de la commission des finances, après un avis favorable de cette dernière et malgré l’avis défavorable du Gouvernement.
Il consiste à rétablir, pour l’année 2018 et pour les petites et moyennes entreprises (PME), la déduction exceptionnelle en faveur de l’investissement plus connue sous l’appellation de « suramortissement de 40 % », éteinte depuis le 15 avril 2017 et prévue à l’article 39 decies du CGI que réécrit l’article. Créé par l’article 142 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ([61]) et initialement applicable aux acquisitions faites entre le 15 avril 2015 et le 14 avril 2016, ce dispositif a été prorogé jusqu’au 14 avril 2017 par l’article 75 de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique ([62]).
En application de ce « suramortissement », les entreprises pouvaient, au titre des acquisitions réalisées entre le 15 avril 2015 et le 14 avril 2017, déduire 140 % de la valeur d’origine des biens acquis (100 % en vertu du droit commun, 40 % au titre du « suramortissement »).
Le dispositif adopté par le Sénat diffère du « suramortissement » applicable entre 2015 et 2017 du point de vue des investissements éligibles.
Certaines dépenses ne figurent en effet pas dans le champ de la mesure (matériels de manutention, installations destinées à l’épuration des eaux et à l’assainissement de l’atmosphère, installations productrices de vapeur, de chaleur ou d’énergie, matériels dédiés au transport par câbles, dont les remontées mécaniques). Les dépenses éligibles portent sur les opérations de mécanisation et de numérisation et correspondent à celles prévues aux 1°, 5° et 7° à 9° du I de l’article 39 decies dans sa rédaction actuelle.
D’autres dépenses, en revanche, sont rendues éligibles au « suramortissement » et figurent au 5° du I de l’article 39 decies dans sa rédaction adoptée par le Sénat. Il s’agit des acquisitions de robots, qui ont fait l’objet d’un dispositif d’amortissement accéléré entre 2013 et 2016 en application de l’article 39 AH du CGI. Ce dispositif fait d’ailleurs l’objet, à l’article 7 bis du présent projet de loi, d’un rétablissement jusqu’à la fin de l’année 2018. Les dépenses concernées pourraient donc à la fois faire l’objet d’un amortissement sur vingt-quatre mois et conduire au bénéfice du « suramortissement » de 40 %.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
● Le présent article, dont le dispositif fait écho à des amendements similaires rejetés par notre Assemblée lors de l’examen en première lecture du présent projet de loi de finances, peut être rapproché de l’article précédent, l’article 7 bis, qui prévoit de rétablir ou proroger notamment deux dispositifs d’amortissement accéléré, dont un portant sur les robots.
Ainsi qu’il a été vu dans le cadre de cet article 7 bis, l’intérêt d’un dispositif incitatif est d’être provisoire. Sa pérennisation réduit substantiellement ce caractère incitatif et entraîne, par ailleurs, de nombreux et importants effets d’aubaine, quand bien même le dispositif ne s’appliquerait que pour le futur : les entreprises ayant intégré à leur stratégie d’équipement la disparition du « suramortissement » de 40 %, son rétablissement le rendrait applicable à des acquisitions qui auraient en tout état de cause été réalisées.
● Le coût de la mesure risque d’être très élevé – elle n’est d’ailleurs pas chiffrée.
Lors de sa création en 2015, le coût pour l’État d’une seule année d’application du « suramortissement » avait été évalué à 2,5 milliards d’euros, répartis sur cinq exercices budgétaires, soit une moyenne d’un demi-milliard d’euros par an. La dernière estimation du coût au titre du prochain exercice, 2018, s’élève à 720 millions d’euros ([63]).
Si certaines dépenses initialement éligibles ne figurent plus dans le dispositif adopté par le Sénat, d’autres y sont introduites (l’acquisition de robots), ne permettant pas de conclure à un moindre coût lié à l’évolution du périmètre du « suramortissement », qui serait en tout état de cause très élevé compte tenu de l’ordre de grandeur des sommes en jeu. Par ailleurs, le cantonnement du bénéfice de la mesure aux seules PME n’est pas nécessairement de nature à réduire substantiellement ce coût, les PME représentant l’écrasante majorité des entreprises françaises.
● S’agissant du contexte économique, ainsi que cela a été souligné dans le commentaire de l’article 7 bis, l’investissement des entreprises est en hausse et devrait continuer sur cette trajectoire, tout particulièrement hors construction où la hausse de 3,9 % constatée en 2016 devrait s’accentuer en 2017 (+ 4,2 %) et en 2018 (+ 4,1 %) ([64]).
● Dans ces conditions, il ne paraît pas opportun de rétablir un dispositif dont la principale vertu résidait dans son caractère ponctuel et qui serait particulièrement coûteux pour l’État.
En conséquence, le Rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 8 bis (nouveau)
Prorogation du crédit d’impôt en faveur des maîtres‑restaurateurs
I. Les dispositions adoptées par le Sénat
Le présent article résulte de l’adoption par le Sénat d’un amendement de Mme Pascale Gruny (LR), avec l’avis favorable de la commission des finances mais contre l’avis défavorable du Gouvernement.
Il proroge pour trois ans le crédit d’impôt en faveur des maîtres‑restaurateurs, prévu à l’article 244 quater Q du CGI et actuellement applicable aux entreprises dont le dirigeant ou un salarié a obtenu ce titre jusqu’au 31 décembre 2017, en repoussant cette échéance au 31 décembre 2020.
Ce dispositif a été créé par l’article 63 de la loi de finances rectificative pour 2006 ([65]) et reconduit successivement, pour la dernière fois par l’article 13 de la loi de finances pour 2015 ([66]). Aux termes de cet article, les entreprises imposées d’après leur bénéfice réel ou bénéficiant d’un dispositif d’exonérations zonées et dont le dirigeant ou un salarié est titulaire du titre de maître‑restaurateur, bénéficient d’un crédit d’impôt correspondant à 50 % des dépenses de mise aux normes d’aménagement et de fonctionnement prévues par le cahier des charges du titre de maître‑restaurateur.
Sont notamment pris en compte les dotations aux amortissements d’immobilisations permettant d’améliorer les capacités de stockage et de conservation, l’hygiène alimentaire ainsi que l’accueil de la clientèle et des personnes à mobilité réduite. Les dépenses éligibles sont plafonnées à 30 000 euros.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
La prorogation pour trois années du crédit d’impôt en faveur des maîtres‑restaurateurs représente un coût total de 15 millions d’euros, à raison de 5 millions d’euros par an.
Si la relative modestie de ce coût pourrait militer pour adopter la mesure, elle peut également traduire une efficacité limitée du dispositif, dont la prorogation ne serait dès lors pas justifiée.
Lors de l’évaluation de cette dépense, en 2011, le Comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales concluait au fait que, malgré son ciblage et son encadrement pertinents, le dispositif n’avait qu’un effet incitatif modeste : « Le faible nombre de bénéficiaires du crédit d’impôt conduit à douter de son efficacité en termes d’effet incitatif. » ([67])
En 2016, l’outil a bénéficié à seulement 1 649 entreprises ([68]). D’après les données fournies par le Gouvernement à l’Assemblée nationale non seulement lors de l’examen d’amendements ayant la même finalité, mais aussi dans le cadre d’une réponse à une question écrite ([69]), sur les 91 700 restaurateurs établis en France, seuls 3 400 font usage du titre de maître‑restaurateur ([70]), tandis que le taux de renouvellement de ce titre serait d’à peine deux tiers ([71]).
La dépense fiscale en cause n’apparaît donc pas efficace, ou du moins pas suffisamment ; la proroger ne semble donc guère opportun. Il ne s’agit nullement de refuser de soutenir le secteur de la restauration, ni de reconnaître l’excellence française en matière d’arts de la table, mais simplement de ne pas maintenir un outil qui ne paraît pas adapté à ses objectifs.
D’autres mesures sont en revanche prévues à destination de ce secteur et pour développer la notoriété du titre de maître-restaurateur :
– en lien étroit avec l’Association française des maîtres-restaurateurs, le ministère de l’économie et des finances travaille à valoriser ce titre et à encourager les restaurateurs à en solliciter l’obtention ;
– le Gouvernement a annoncé la présentation en 2018 d’un texte sur la transformation du secteur du tourisme, lequel comprendra un volet dédié à la restauration ;
– plusieurs actions sont mises en œuvre pour accompagner les restaurateurs, qu’il s’agisse de la campagne de communication « Au resto, la vie a du goût » conduite au cours du printemps et de l’été de cette année ou de la prochaine création d’un baromètre de la restauration ;
– lors de l’examen en première lecture des crédits de la mission Action extérieure de l’État, notre Assemblée a adopté un amendement du Gouvernement augmentant les crédits alloués à Atout France, l’agence de développement touristique du pays, au titre de sa nouvelle mission de promotion de la gastronomie française et de structuration de l’offre française dans le secteur de la restauration ([72]).
En conséquence, le Rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 9
Trajectoire de la composante carbone pour la période 2018-2022 et conséquences en matière de tarifs des taxes intérieures de consommation
Le présent article contient deux mesures :
– il fixe une trajectoire de la composante carbone pour la période 2018-2022, en retenant un objectif plus ambitieux que celui fixé par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) ([73]). Pour offrir plus de visibilité aux opérateurs, la valeur de la composante carbone des tarifs des taxes intérieures de consommation (TIC) est fixée à 44,60 euros par tonne de dioxyde de carbone en 2018, 55 euros en 2019, 65,40 euros en 2020, 75,80 euros en 2021 et 86,20 euros en 2022 ;
– il intègre, dans les nouveaux tarifs de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), une convergence du tarif du gazole vers les tarifs des essences en quatre années, soit à l’horizon 2021. Cette mesure conduit à une hausse de la part fixe de la TICPE applicable au gazole routier de 2,6 euros par hectolitre par an pendant quatre ans, hausse qui s’ajoute à celle de la part carbone programmée pour la période 2018-2022.
Lors de l’examen du texte au Sénat, plusieurs amendements ont supprimé la programmation pluriannuelle en ne maintenant que le tarif applicable pour 2018, et ont inséré un nouveau tarif spécifique au biocarburant de type gazole B 100. Il a également été demandé la remise d’un rapport afin d’évaluer les conséquences du présent article pour le pouvoir d’achat des français. Le Rapporteur général propose de rétablir l’article dans sa version issue de l’Assemblée nationale, sous réserve d’une modification rédactionnelle effectuée par le Gouvernement au Sénat.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
L’Assemblée nationale a procédé à deux modifications :
– un premier amendement soumettant progressivement à la part carbone de la TICPE le gaz de pétrole liquéfié (GPL) utilisé comme combustible pour des usages non résidentiels et non agricoles ;
– un second amendement gelant le tarif de TICPE pour le gaz naturel pour véhicules (GNV) à son niveau 2017 pour les cinq prochaines années.
A. L’assujettissement progressif du gaz de pétrole liquéfié (GPL) utilisé comme combustible à la part carbone de la TICPE
Les GPL (butane et propane) sont soumis à la TICPE uniquement lorsqu’ils sont destinés à être utilisés comme carburants. Toutefois, lorsqu’ils sont destinés à être utilisés comme combustibles, ces derniers sont expressément exemptés de la taxe. Ils ne sont donc pas soumis, par extension, à la contribution climat énergie (CCE), alors même que leur combustion émet du dioxyde du carbone comme la combustion de l’ensemble des produits pétroliers.
Un amendement de notre collègue Charles de Courson ([74]), adopté avec un avis favorable du Rapporteur général et de sagesse du Gouvernement, soumet à la part carbone de la TICPE les GPL utilisés par les entreprises comme combustibles. La taxation normale sera atteinte progressivement en cinq années, ce qui permet d’éviter un choc économique trop soudain pour les entreprises utilisant cette source d’énergie.
Par ailleurs, la mesure ne touche pas :
– les usages non résidentiels du GPL : le prix de la bouteille de butane ou propane utilisée par les particuliers, notamment en milieu rural (par exemple pour faire la cuisine avec une gazinière) ne sera pas concerné ;
– les agriculteurs : l’article met en place un remboursement sur le modèle de celui existant pour cette profession pour le gazole non routier, le fioul lourd et le gaz naturel.
B. Le gel du tarif de TICPE pour le gaz naturel pour véhicules (GNV)
Il s’agit de maintenir la compétitivité du GNV par rapport au gazole. En effet, le maintien du plancher de remboursement pour le gazole utilisé pour le transport routier de marchandise (43,19 euros par hectolitre) et celui utilisé pour le transport routier de voyageurs (39,19 euros par hectolitre), couplé à la hausse du GNV pour l’ensemble des utilisateurs du fait de la hausse du prix de la tonne de carbone, conduit à déstabiliser la filière des poids lourds roulant au GNV, pourtant moins polluant que le gazole.
Or, la mise en place d’un mécanisme de remboursement pour le GNV, sur le modèle de ce qui existe pour le gazole, est explicitement contraire à la directive relative à la taxation des produits énergétiques : l’article 5 de la directive ne prévoit pas la possibilité de différencier pour l’application d’un tarif entre l’usage commercial et l’usage privé d’un carburant ; l’article 7 dispose par exception que « les États membres peuvent établir une différence entre le gazole à usage commercial et le gazole à usage privé utilisé comme carburant » ([75]).
La directive autorise toutefois les États membres à appliquer des réductions du niveau de taxation « au gaz naturel et au GPL utilisés comme carburants » (à partir du moment où cette exonération respecte l’article 5). Ainsi, plusieurs amendements présentés par le Rapporteur général, le groupe La République en Marche, M. Julien Dive, M. Martial Saddier et M. Bertrand Pancher ([76]), adoptés en séance avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement, ont procédé au gel des tarifs, ce qui permet de donner de la visibilité à la filière et de laisser le temps au Gouvernement de trouver une solution plus durable au problème identifié, soit au niveau national, soit au niveau européen.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Lors de l’examen du texte au Sénat, plusieurs amendements ont été adoptés au présent article contre l’avis du Gouvernement :
– la suppression de l’ensemble des tarifs des taxes intérieures de consommations pour les années 2019, 2020, 2021 ainsi que pour la période à compter de 2022, à l’initiative de M. Jean-François Husson (LR) ([77]) ;
– la création, dans la nomenclature des tarifs de la TICPE, d’un nouveau tarif spécifique avantageux pour le carburant constitué à partir de 100 % d’ester méthyliques d’acides gras (B 100), nouveau biocarburant de type gazole, à l’initiative de M. Jean Bizet (LR) ([78]) ;
– la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport évaluant les conséquences du présent article sur le pouvoir d’achat des ménages, à l’initiative de M. Jean-Claude Tissot (groupe socialiste et républicain) ([79]).
Enfin, le Gouvernement a procédé à une modification de nature rédactionnelle ([80]).
III. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général n’est pas favorable aux modifications introduites par le Sénat.
Il estime en effet que :
– la suppression du caractère pluriannuel des différents tarifs des TIC est de nature à supprimer toute visibilité pour les différents acteurs économiques et pour les particuliers ; or l’objectif de la CCE est d’inciter à moyen terme ces derniers à investir dans des technologies moins consommatrices en énergie ou à effectuer des investissements de rénovation énergétique en anticipant une hausse progressive des prix de l’énergie. En retirant tout signal prix à moyen terme, la mesure que propose le Sénat retire une partie de l’efficacité du dispositif et rend plus aléatoire les variations futures du prix de l’énergie ;
– la création d’un tarif spécifique pour le B 100 ne profite en réalité qu’à un seul acteur économique, pour le fonctionnement d’une flotte captive de poids lourds, et pour une consommation annuelle de moins de 5 000 hectolitres de carburant en 2018. La mesure pose également un problème de concurrence avec les autres formes d’ester méthyliques d’acides gras. Il est ainsi préférable de soutenir l’incorporation de biogazole dans les carburants par la composante « carburants » de la TGAP, qui est un outil mieux adapter que la TICPE pour y parvenir ;
– la remise d’un rapport évaluant les conséquences du présent article uniquement sur le pouvoir d’achat des ménages se limite qu’à l’étude d’une partie des effets de la CCE, qui doit être évaluée en lien avec la mise en place d’un ensemble de mesures de compensation (généralisation du chèque énergie, aides au remplacement de vieille chaudière au fioul, bonus automobile, etc.) et pour l’ensemble des acteurs économiques (ménages, entreprises, État, collectivités territoriales, etc.).
Pour ces raisons, le Rapporteur général propose de rétablir l’article dans sa rédaction issue de l’Assemblée nationale, en effectuant toutefois les modifications suivantes :
– convergence des tarifs du GPL combustibles avec ceux du GPL carburants à l’horizon de 2022 ;
– report du délai d'entrée en vigueur de la fiscalisation du GPL combustible de trois mois, afin de permettre la mise en œuvre des nouvelles modalités de taxation par l’administration des douanes ;
– maintien de modifications rédactionnelles proposées par le Gouvernement au Sénat.
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Article 9 bis A (nouveau)
Versement d’une dotation aux collectivités en charge de l’élaboration
et de la mise en œuvre de plans climat
I. Les dispositions adoptées par le Sénat
Le présent article résulte de l’adoption par le Sénat de deux amendements identiques de Mme Christine Lavarde (LR) et de M. Rémi Féraud (groupe socialiste et républicain), malgré l’avis défavorable de la commission des finances et du Gouvernement. Il vise à doter les collectivités en charge de l’élaboration et de la mise en œuvre des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) et des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) d’une fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Il s’agit de faciliter l’atteinte des objectifs fixés par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ([81]) : réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre, réduction de 50 % de la consommation d’énergie finale, augmentation à 32 % de la part des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie, rénovation énergétique de 500 000 logements par an à partir de 2017.
A. des instruments de planification en matière de développement durable
a. Les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET)
Les PCAET ont été institués par l’article 188 de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique précitée, dont les dispositions sont codifiées à l’article L. 229-26 du code de l’environnement.
La métropole de Lyon et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre existant au 1er janvier 2015 et regroupant plus de 50 000 habitants adoptent un PCAET au plus tard le 31 décembre 2016. Le délai est prolongé jusqu’au 31 décembre 2018 pour les EPCI existant au 1er janvier 2017 et regroupant plus de 20 000 habitants.
Le PCAET définit, sur le territoire de l’EPCI ou de la métropole :
– les objectifs stratégiques et opérationnels afin d’atténuer le changement climatique et de s’y adapter, en cohérence avec les engagements internationaux de la France ;
– le programme d’actions à réaliser afin notamment d’améliorer l’efficacité énergétique, de développer de manière coordonnée des réseaux de distribution d’électricité, de gaz et de chaleur, d’augmenter la production d’énergie renouvelable, de valoriser le potentiel en énergie de récupération, de développer le stockage et d’optimiser la distribution d’énergie, de développer les territoires à énergie positive, de favoriser la biodiversité pour adapter le territoire au changement climatique, de limiter les émissions de gaz à effet de serre et d’anticiper les impacts du changement climatique ;
– selon les compétences de l’EPCI ou de la métropole, un volet spécifique au développement de la mobilité sobre et décarbonée, un volet spécifique à la maîtrise de la consommation énergétique de l’éclairage public et de ses nuisances lumineuses, le schéma directeur des réseaux de chaleur ou de froid, le programme des actions permettant, au regard des normes de qualité de l’air de prévenir ou de réduire les émissions de polluants atmosphériques.
Il est compatible avec le SRADDET et le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE).
b. Les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET)
Le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) est le nouveau cadre de la planification régionale en matière d’aménagement du territoire. Il est prévu par l’article 10 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite loi NOTRe) ([82]), dont les dispositions sont codifiées aux articles L. 4251-1 et suivants du code général des collectivités territoriales (CGCT).
Il intègre le schéma régional d’aménagement et d’égalité des territoires (SRADT), auquel il se substitue, ainsi que d’autres documents de planification : schéma régional des infrastructures et des transports, schéma régional de l’intermodalité, schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE) et plan régional de prévention des déchets. Le SRADDET s’applique à l’ensemble des régions du territoire national à l’exception de l’Île-de-France, des régions d’outre-mer et des collectivités territoriales à statut particulier exerçant les compétences d’une région.
Les premiers SRADDET doivent être adoptés en 2019–2020. Les documents d’urbanisme seront mis en compatibilité lors de leur première révision qui suivra l’adoption du schéma régional.
Le SRADDET définit les objectifs obligatoires régionaux, en matière :
– d’infrastructures de transport, d’intermodalité et de développement des transports de personnes et de marchandises ;
– de maîtrise de l’énergie, d’atténuation du changement climatique, de lutte contre la pollution de l’air ;
– de protection et de la restauration de la biodiversité (identification des espaces formant la trame verte et bleue) ;
– de prévention, de recyclage et de valorisation des déchets.
Le projet de schéma est soumis à enquête publique. Il fait l’objet d’un bilan dans les six mois suivant le renouvellement général des conseils régionaux.
c. Les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE)
L’article 68 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « loi Grenelle 2 » ([83]) institue des schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE). Élaboré conjointement par le préfet de région et le président du conseil régional, le SRCAE fixe, à l’échelon du territoire régional :
– les orientations permettant d’atténuer les effets du changement climatique et de s’y adapter, conformément à l’engagement pris par la France de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 ;
– les objectifs régionaux en matière de maîtrise de l’énergie ;
– les orientations permettant de prévenir ou de réduire la pollution atmosphérique ou d’en atténuer les effets et les normes de qualité de l’air propres à certaines zones lorsque les nécessités de leur protection le justifient ;
– les objectifs qualitatifs et quantitatifs à atteindre en matière de valorisation du potentiel énergétique terrestre, renouvelable et de récupération et en matière de mise en œuvre de techniques performantes d’efficacité énergétique. Il intègre les schémas éoliens et les schémas de services collectifs de l’énergie.
Ces dispositions sont codifiées à l’article L. 222-1 du code de l’environnement. La loi NOTRe du 7 août 2015 précitée intègre le SRCAE au SRADDET.
B. Le dispositif proposé
1. L’affectation d’une fraction du produit de TICPE
Le I du présent article propose d’attribuer une fraction du produit de la TICPE prévue à l’article 265 du code des douanes revenant à l’État aux collectivités territoriales, collectivités à statut particuliers et établissement publics territoriaux ayant adopté un PCAET application de l’article L. 229-26 du code de l’environnement, lequel ne s’applique toutefois qu’à la métropole de Lyon et aux EPCI.
Cette fraction est calculée de manière à ce que le montant versé à chaque collectivité concernée s’élève à 10 euros par habitant pour les EPCI. Par exception, cette fraction est calculée pour être égale, sur le territoire de la Métropole du Grand Paris (MGP), à 5 euros par habitant pour la MGP, à 5 euros par habitant pour ses établissements publics territoriaux et à 5 euros par habitant pour Paris.
Le II du présent article propose d’attribuer une fraction du produit de la TICPE revenant à l’État est attribuée aux collectivités territoriales ayant adopté un SRCAE ou un SRADDET. Cette fraction est calculée de manière à ce que le montant versé à chaque collectivité concernée s’élève à 5 euros par habitant.
Le III du présent article renvoie les modalités d’attribution de ces fractions de TICPE à un contrat conclu entre l’État et la collectivité ou le groupement concerné, la région pouvant être partie aux contrats entre l’État et les collectivités locales situées sur son territoire.
2. Un coût estimé à trois cents millions d’euros au moins pour l’État
Le IV du présent article prévoit la compensation de la perte de recettes résultant pour l’État de la mesure proposé par la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du CGI. Le Gouvernement n’a pas levé ce gage.
L’impact budgétaire du présent article n’a pas pu être précisément chiffré. Le coût pour l’État est estimé à 300 millions d’euros, si un tiers des collectivités étaient concernées. Ce coût pourrait être largement supérieur et conduire à une perte de recettes considérable pour l’État si davantage de collectivités établissaient plans et schémas. Des amendements similaires déposés l’an dernier prévoyaient le transfert de 3,19 % de la TICPE, pour un besoin de financement de 600 millions d’euros. 3,19 % de la part État de TICPE en 2018, correspondraient à 650 millions d’euros.
Selon les auteurs des amendements, si l’élaboration d’un plan ou schéma coûte environ un euro/habitant, sa mise en œuvre à l’échelle du territoire coûte environ de 100 à 200 euros/habitant.
Un quart du produit de la TICPE est déjà consacré à des politiques de développement durable (compte d’affectation spéciale Transition énergétique, pour le financement des obligations de service public d’EDF, notamment le tarif de rachat des énergies renouvelables ; part dite « Grenelle des régions » pour le financement d’infrastructures, part attribuée à l’Agence de financement des infrastructures de transport – AFITF).
Sur la hausse de produit de TICPE de 3,7 milliards d’euros en 2017, 2,7 milliards d’euros sont liés à la trajectoire carbone et 900 millions à la hausse du gazole. Le présent projet de loi de finances fixe une trajectoire d’augmentation de la contribution climat Énergie (CCE), qui passera de 30 euros/tonne de CO2 à 44,6 euros/tonne de CO2 dès l’année prochaine, et augmentera progressivement pour atteindre 86 euros/tonne de CO2 en 2022. L’augmentation prévue pour 2018 générera environ 2,5 milliards d’euros de recettes supplémentaires, portant le total des recettes de la fiscalité sur le carbone à environ 8 milliards d’euros.
Les collectivités perçoivent déjà plus du tiers de la recette de TICPE, pour le financement de transferts de compétences.
II. la position du rapporteur gÉnÉral
L’Assemblée nationale a été rejetée à plusieurs reprises, lors de l’examen du présent projet de loi de finances en première lecture et lors de l’examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2017 des amendements proposant des dispositions similaires à celles du présent article, notamment du fait de son impact budgétaire, certain, même si son évaluation doit encore être précisée.
Comme l’ont rappelé la commission des finances du Sénat et le Gouvernement, une concertation doit avoir lieu dans le cadre de la Conférence nationale des territoires.
Le Rapporteur général propose la suppression du présent article.
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Article 9 ter
Suppression de deux composantes de la TGAP
Le présent article, inséré dans le présent projet de loi de finances par un amendement du Gouvernement adopté à l’Assemblée nationale avec un avis favorable du Rapporteur général, supprime deux composantes de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) applicable aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE).
Un amendement adopté au Sénat, avec un avis défavorable du Gouvernement, a également modifié le tarif de la composante « déchets » de la TGAP applicable dans certains départements d’outre-mer.
Le Rapporteur général propose de rétablir le présent article dans la rédaction de l’Assemblée nationale.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
L’Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement, avec un avis favorable du Rapporteur général, proposant la suppression de la TGAP applicable aux ICPE ([84]).
Les articles 266 sexies à 266 terdecies du code des douanes assujettissent les ICPE au paiement de deux composantes particulières au sein des différentes composantes de la TGAP :
– d’une part, la taxe sur la délivrance de l’autorisation ICPE, dite « taxe à l’installation » (a du 8 de l’article 266 sexies du code des douanes) ;
– d’autre part, la taxe annuelle à l’exploitation d’ICPE (b du 8 du même article).
Elles sont applicables à tout exploitant d’un établissement industriel ou commercial ou d’un établissement public à caractère industriel et commercial dont les installations sont soumises à autorisation au titre du livre V du code de l’environnement (autorisation ICPE).
Le fait générateur de la TGAP à l’installation est la délivrance d’une autorisation ICPE, c’est-à-dire l’autorisation initiale, l’autorisation d’extension, l’autorisation de changement d’exploitant, le renouvelle d’une autorisation, etc. Le tarif de la taxe s’élève à 2 525,35 euros pour une entreprise contre 501,61 euros pour un artisan n’employant pas plus de deux salariés.
Le fait générateur de la TGAP à l’exploitation est l’exploitation au cours d’une année civile d’une installation présentant par sa nature ou son volume des risques particuliers pour l’environnement. Le montant de la taxe due chaque année par l’établissement au titre de ses activités est égal au produit du tarif de base (339,37 euros pour les installations EMAS ou ISO14001 et 380,44 euros pour les autres installations), auquel est appliqué un coefficient multiplicateur compris entre un et dix en fonction de la nature et du volume des activités.
Ces deux composantes de la TGAP ne sont toutefois pas incitatives et présentent un rendement faible. En effet, le montant de ces composantes diminue d’année en année, du fait du déploiement constant du régime de l’enregistrement, non taxé, en lieu et place du régime de l’autorisation. Le montant mis en recouvrement pour l’année 2016 a été de seulement 19 millions d’euros (17 millions d’euros pour la composante exploitation et 2 millions d’euros pour la composante autorisation) contre 25 millions d’euros pour l’année 2014, alors qu’elle représente pour les services concernés une charge administrative importante.
Par ailleurs, ces deux composantes de la TGAP ne sont pas incitatives pour réduire les pollutions et les risques des activités industrielles, puisqu’elles se fondent, d’une part, sur les projets et, d’autre part, sur l’existence de l’installation, et non sur les niveaux de pollution des installations soumises aux prélèvements. En conséquence, la suppression des composantes ICPE de la TGAP contribue au développement d’une fiscalité environnementale plus efficace et plus simple.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Le Sénat n’a apporté aucune modification concernant la suppression des deux composantes ICPE de la TGAP.
Il a, en revanche, modifié les tarifs applicables dans certains départements d’outre-mer concernant la composante « déchets » de la TGAP. La TGAP « déchets » est une taxe qui s’applique à tous les déchets qui sont stockés ou incinérés en pénalisant les modes de traitement les moins performants en matière de pollution ou de valorisation. Les taux bénéficient de modulations selon les critères de performances énergétique et environnementale des installations : de 25 à 158 euros la tonne pour le stockage et de 3 à 15 euros la tonne pour l’incinération.
Toutefois, il est prévu que sur les territoires de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion, les tarifs de la TGAP « déchets » applicables sont multipliés par un coefficient égal à 0,75. Ainsi, les tarifs applicables dans ces territoires sont égaux aux trois-quarts des tarifs applicables en métropole. Il s’agit de tenir compte des spécificités de la collecte des déchets dans ces territoires, de l’absence de mode de traitement alternatif, des conséquences de l’éloignement géographique et du caractère insulaire de ces territoires.
Un amendement visant à porter ce coefficient à 0,4 a été adopté par le Sénat, à l’initiative de Mme Viviane Malet (LR), avec un avis défavorable du Gouvernement, afin d’aligner le tarif applicable sur ces territoires avec celui applicable en Guyane et à Mayotte. En effet, ces deux territoires bénéficient de tarifs encore plus avantageux, du fait de difficultés particulières pour la collecte et la valorisation des déchets :
– sur le territoire de la Guyane, pour les déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets accessible par voie terrestre, le tarif de la taxe est fixé à 10 euros par tonne jusqu’au 31 décembre 2018 et, pour les déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets non accessible par voie terrestre, le tarif de la taxe est fixé à 3 euros par tonne jusqu’au 31 décembre 2018 ;
– sur le territoire de Mayotte, pour les déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets, le tarif de la taxe est nul jusqu’au 31 décembre 2017, puis est fixé à 10 euros par tonne en 2018.
À compter de 2019, sur les territoires de la Guyane et de Mayotte, les tarifs de la TGAP « déchets » applicables seront multipliés par un coefficient égal à 0,4.
III. La position du Rapporteur général
Si le Rapporteur général reconnaît l’existence de difficultés particulières auxquelles sont soumis les territoires concernés dans la collecte et la valorisation des déchets, il estime néanmoins que cette harmonisation des tarifs à la baisse réduirait le caractère incitatif de la TGAP « déchets » dans ces territoires, ce qui ne serait pas cohérent avec les orientations de la politique gouvernementale en matière de développement de l’économie circulaire et de lutte contre la production de déchets. Il propose, en conséquence, de rétablir le présent article dans la rédaction de l’Assemblée nationale.
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Article 9 quater
Élargissement de l’assiette de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux biocarburants remplaçant le gazole
Le présent article modifie les règles applicables pour la détermination de l’assiette et de la minoration de la composante « carburant » de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
L’article 266 quindecies du code des douanes institue un prélèvement supplémentaire de la TGAP pour les personnes qui mettent à la consommation certains carburants d’origine fossile. Le taux de la taxe est fixé à 7,5 % dans la filière essence et à 7,7 % dans la filière gazole. Toutefois, l’incorporation de certains biocarburants dans les carburants d’origine fossile a pour effet de minorer le taux applicable à due proportion des quantités incorporées. Il est diminué à proportion de la quantité d’énergie renouvelable des biocarburants contenus dans les carburants soumis au prélèvement mis à la consommation en France, sous réserve que ces biocarburants respectent des critères de durabilité fixés par la loi. Si la part d’énergie renouvelable des biocarburants est supérieure ou égale au taux de la taxe, alors l’opérateur n’acquittera pas de TGAP. Il pourra dans ce cas émettre des certificats représentatifs des biocarburants que ces carburants contiennent, afin de les vendre à d’autres opérateurs n’ayant pas atteint leurs objectifs de minoration.
Toutefois, la part d’énergie renouvelable, prise en compte pour le calcul de cette minoration, ne peut être supérieure aux valeurs suivantes :
– dans la filière essence, la part d’énergie renouvelable maximale des biocarburants produits à partir de céréales et d’autres plantes riches en amidon ou sucrières est de 7 % (carburants de première génération). Cette part est de 0,6 %, en comptage double, pour les biocarburants avancés fait à partir de matières premières non comestibles (déchets agricoles ou industriels) ;
– dans la filière gazole, la part d’énergie renouvelable maximale des biocarburants produits à partir de plantes oléagineuses est de 7 % (carburants de première génération). Cette part est de 0,7 % en comptage double pour les biocarburants avancés, fait par exemple à partir d’huiles usagées.
La liste des biocarburants éligibles à cette minoration de taux est définie par arrêté conjoint des ministres chargés des douanes, de l’écologie, de l’énergie et de l’agriculture.
L’Assemblée nationale a modifié, à la suite de l’adoption d’un amendement de notre collègue Charles de Courson avec un avis favorable du Gouvernement ([85]), l’assiette de la composante « carburants » de la TGAP afin d’y inclure toutes les formes de biocarburants substituables au gazole. Ainsi, sont désormais assujettis à la TGAP « carburants » les opérateurs mettant à la consommation toutes formes de biogazoles, ces derniers étant également éligibles à la minoration de la TGAP pour la part de biocarburants qu’ils contiennent. L’amendement permet ainsi de prendre en compte non seulement le B 10 ou le B 100, mais également toutes les formes de biogazoles intermédiaires.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Le Sénat a adopté de nombreux amendements visant à modifier l’assiette de la TGAP « carburants » :
– quatre amendements identiques présentés respectivement par M. Claude Kern (UC), M. Emmanuel Capus (Les Indépendants-République et Territoires), M. Jean Bizet (LR) et M. Jean-Claude Requier (RDSE) ([86]), avec un avis défavorable du Gouvernement, visant à intégrer dans l’assiette de la TGAP « carburant » ainsi que dans la minoration le biogazole B10 (biocarburants substituables au gazole) ;
– quatre amendements identiques des mêmes auteurs ([87]), avec un avis défavorable du Gouvernement, visant à intégrer dans l’assiette de la TGAP « carburant » ainsi que dans la minoration le biogazole B 100 (biocarburants substituables au gazole) ;
– cinq amendements identiques présentés respectivement par M. Pierre Cuypers (LR), M. Claude Kern, Mme François Férat (UC), M. Yves Daudigny (groupe socialiste et républicain) et M. Emmanuel Capus ([88]), avec un avis défavorable du Gouvernement et de la commission des finances, visant à sortir de l’assiette de la TGAP « carburant » le carburant ED 95, tout en le maintenant explicitement dans la minoration ;
– trois amendements identiques présentés par M. Pierre Cuypers, Mme François Férat et M. Yves Daudigny ([89]), avec un avis défavorable du Gouvernement, visant à exclure les biocarburants fait à partir de plantes oléagineuses de la minoration de la TGAP carburants pour la filière essence ;
– quatre amendements identiques présentés par M. Pierre Cuypers, Mme François Férat, M. Yves Daudigny et M. Emmanuel Capus ([90]), avec un avis défavorable du Gouvernement, visant à exclure les biocarburants fabriqués à partir d’huiles acides de la minoration de la TGAP carburants pour la filière essence.
Enfin, le Gouvernement a présenté un amendement rédactionnel, adopté par le Sénat, permettant de privilégier à la notion de « biocarburants substituables au diesel » celle de « biocarburants équivalents au gazole » ([91]).
III. La position du Rapporteur général
L’article tel qu’adopté à l’Assemblée nationale, sous réserve du maintien de l’amendement rédactionnel du Gouvernement, permet de satisfaire les deux premières séries d’amendements adoptées au Sénat, en tant que le B 10 et le B 100 sont tous les deux des biocarburants équivalents au gazole.
Concernant la sortie de l’assiette de la TGAP « carburant » le carburant ED95, le Parlement a adopté son inclusion dans l’assiette lors de la loi de finances rectificative pour 2016 ([92]) : il est sans doute préférable de privilégier un peu de stabilité de la norme fiscale en la matière.
Concernant l’exclusion des biocarburants faits à partir de plantes oléagineuses ou d’huiles acides, qui est une référence indirecte à l’huile de palme, le Rapporteur général rappelle que rien ne justifie de traiter de manière différente des carburants qui respectent tous les critères d’éligibilité et de durabilité fixés par la directive européenne ([93]). Aussi, l’objet des amendements qui visent à ne pas encourager l’incorporation de carburants produits dans des conditions nuisibles pour l’environnement est déjà satisfait : en effet, ne sont pas pris en compte, dans le calcul du tarif dégressif de la TGAP, les carburants qui ne satisfont pas aux critères de durabilité définis par l’article L. 661-5 du code de l’énergie, qu’ils soient ou non issus de l’huile de palme. Pour rappel, l’article L. 661-5 dispose que « les biocarburants et bioliquides ne doivent pas être produits à partir de matières premières qui proviennent de terres de grande valeur en termes de biodiversité [ou] de terres présentant un important stock de carbone ».
Aussi le Rapporteur général préconise-t-il le retour à la version adoptée à l’Assemblée nationale, sous réserve de conserver la modification rédactionnelle apportée par le Gouvernement au Sénat.
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Article 9 quinquies A (nouveau)
Inclusion des installations soumises à enregistrement dans l’assiette des installations soumises à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)
Le présent article, introduit par un amendement gouvernemental adopté au Sénat, vise à maintenir les installations de combustion classées, qui basculent du régime de l’autorisation vers le régime de l’enregistrement, dans le champ d’application de la TGAP.
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
Il existe en France trois niveaux de classement des ICPE, qui sont fonction des seuils indiqués dans la nomenclature des installations classées :
– le régime de la déclaration, dans lequel l’installation classée doit faire l’objet d’une déclaration au préfet avant sa mise en service : l’installation génère un risque qualifié d’acceptable moyennant le respect de prescriptions standards au niveau national et peut également, dans certains cas, faire l’objet d’un contrôle périodique effectué par un organisme agréé par le ministère du développement durable ;
– le régime de l’enregistrement, dans lequel l’installation classée doit, préalablement à sa mise en service, déposer une demande d’enregistrement qui prévoit d’étudier l’adéquation du projet avec les prescriptions générales applicables ;
– le régime de l’autorisation, dans lequel l’installation classée dépassant un seuil d’activité doit, préalablement à sa mise en service, faire une demande d’autorisation avant toute mise en service, démontrant l’acceptabilité du risque. Le préfet peut autoriser ou refuser le fonctionnement.
Or, l’article 266 sexies du code des douanes dispose que la TGAP est due par tout exploitant d’une installation soumise à autorisation, au titre de la nomenclature des ICPE. Toutefois, dans le cadre de la simplification des procédures relatives aux ICPE, certaines installations sont susceptibles de basculer du régime de l’autorisation vers le régime de l’enregistrement. Tel devrait notamment être le cas au 1er janvier 2018 pour les installations de combustion classées d’une puissance comprise entre 20 et 50 mégawatts.
En l’absence de modification du code des douanes, alors que leurs émissions de polluants atmosphériques resteraient inchangées, ces installations nouvellement soumises à la procédure de l’enregistrement ne seraient plus soumises à la TGAP, en particulier la composante applicable pour les émissions polluantes dans l’air (composante « air » de la TGAP). Le Gouvernement a estimé qu’une telle situation entraînerait une perte de recettes pour l’État évaluée à environ 7 millions d’euros.
Une telle exemption irait à l’encontre des objectifs de réduction des émissions et des concentrations de polluants atmosphériques, alors même que les valeurs limites de concentration en particules fines et en dioxyde d’azote sont actuellement dépassées dans de nombreuses zones du territoire.
II. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général propose d’adopter conforme le présent article. Il rappelle à ce titre que le Conseil d’État a récemment enjoint au Gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour ramener les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines sous les valeurs limites de la directive n° 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur en Europe ([94]).
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Article 9 quinquies
Prolongation du dispositif de suramortissement pour l’achat de véhicules
de 3,5 tonnes et plus roulant au gaz naturel pour véhicules (GNV)
et biométhane carburant (BioGNV)
Le présent article, inséré par l’Assemblée nationale dans le présent projet de loi de finances, prolonge de décembre 2017 à décembre 2019 le dispositif de suramortissement en vigueur appliqué à l’achat de véhicules de 3,5 tonnes et plus roulant au gaz naturel pour véhicules (GNV) et biométhane carburant (BioGNV). Le Rapporteur général propose de rétablir le présent article qui a été supprimé au Sénat.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
L’article 142 de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ([95]) a introduit un dispositif temporaire d’amortissement supplémentaire au profit de certains types d’investissements réalisés entre le 15 avril 2015 et le 14 avril 2016, codifié à l’article 39 decies du CGI. L’article 75 de la loi pour une République numérique a prolongé ce dispositif jusqu’au 14 avril 2017 ([96]).
La loi de finances pour 2016 ([97]) a instauré un dispositif de suramortissement temporaire similaire au profit des véhicules de plus de 3,5 tonnes qui utilisent exclusivement comme énergie le gaz naturel pour véhicules (GNV) et le biométhane carburant (bioGNV), pour une durée de deux ans, entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2017. La mesure a pour objectif « de stimuler l’investissement des petites et moyennes entreprises (PME) de transport routier en les incitant à l’acquisition de poids lourds fonctionnant au GNV et au bioGNV, contribuant ainsi à la transition énergétique et à l’amélioration de la compétitivité des entreprises françaises mais aussi au développement de la méthanisation agricole » ([98]). Elle permet aux entreprises soumises à l’IS de déduire de leur résultat imposable une somme égale à 40 % de la valeur d’origine des véhicules affectés à leur activité dont le poids total autorisé en charge (PTAC) est supérieur à 3,5 tonnes et qui utilisent exclusivement comme énergie le gaz naturel et le biométhane carburant.
La loi de finances pour 2017 ([99]) a procédé, à l’initiative de la rapporteure générale de la commission des finances de l’Assemblée nationale et de M. Joël Giraud, à deux modifications du dispositif. Elle a, d’une part, étendu l’amortissement fiscal aux véhicules dont le PTAC est égal à 3,5 tonnes et, d’autre part, étendu le suramortissement fiscal aux poids lourds qui utilisent le carburant ED 95 composé d’un minimum de 90 % d’alcool éthylique d’origine agricole.
Le coût total du suramortissement pour les finances publiques est évalué à près de 10 millions d’euros.
Lors de l’examen du texte en séance publique, un amendement à l’initiative de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, et sous-amendé par le Gouvernement, a conduit à l’adoption du présent article qui prolonge au-delà du 31 décembre 2017 et jusqu’au 31 décembre 2019 le dispositif de suramortissement pour l’acquisition d’un poids lourds. Il s’agit d’éviter un arrêt du dispositif qui mettrait en difficulté la dynamique de développement de la filière poids-lourds fonctionnant au GNV. En effet, les auteurs de l’amendement estiment que « la période de mise en application du dispositif récemment créé a été trop courte pour permettre à la filière de bénéficier pleinement de ce dispositif » ([100]).
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Le rapporteur général de la commission des finances du Sénat a déposé un amendement visant à supprimer le présent article, au motif que le dispositif, qui visait en premier lieu l’investissement productif industriel, ne constitue pas un outil efficace pour répondre à des objectifs environnementaux. Il rappelle également qu’aucune étude d’impact n’a été effectuée concernant cette niche fiscale et que la prolongation du dispositif a été adoptée sans en connaître ni le coût ni l’efficacité réelle. L’amendement de suppression a été adopté avec un avis de sagesse du Gouvernement.
III. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général s’étonne que le Gouvernement émette un avis de sagesse à un amendement de suppression d’une mesure pour laquelle il était lui-même favorable à l’Assemblée nationale.
Il fait siennes les critiques concernant l’absence d’évaluation préalable concernant le coût et l’efficacité de la niche fiscale en question. Il souligne toutefois qu’il est essentiel de soutenir l’investissement des entreprises vers des flottes de poids lourds plus propres. Le dispositif proposé permet ainsi de contribuer à la transition énergétique et d’amélioration la compétitivité des entreprises françaises ainsi que le développement de la méthanisation agricole.
Pour ces raisons, le Rapporteur général propose le retour au texte de l’Assemblée nationale.
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Article 10 ter
Aménagements de dispositifs fiscaux propres à l’activité agricole
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
Cet article résulte de l’adoption par notre Assemblée d’un amendement de notre collègue Véronique Louwagie ayant fait l’objet d’une demande de retrait de la part de la commission et d’un avis de sagesse du Gouvernement. Il vise à assouplir la prise en compte des revenus accessoires des exploitants agricoles dans le bénéfice agricole.
En l’état du droit, afin d’encourager la pluriactivité des exploitations agricoles, l’article 75 du CGI prévoit la prise en compte, dans le bénéfice agricole, des revenus tirés d’activités accessoires et relevant des catégories fiscales des BIC et des BNC.
Ces revenus accessoires, pour être intégrés au bénéfice agricole, ne doivent cependant excéder ni 30 % des recettes tirées de l’activité agricole, ni 50 000 euros.
Le présent article relève ces plafonds à 50 % des recettes agricoles et à 100 000 euros. Il procède également à une coordination à l’article 298 bis du CGI, relatif au régime de remboursement forfaitaire en matière de TVA. En outre, et par cohérence, il abroge l’article 75 A du CGI qui prévoit, par dérogation aux plafonds actuels de l’article 75 A, la prise en compte des revenus accessoires tirés d’une activité de production d’électricité éolienne ou photovoltaïque s’ils n’excèdent pas 50 % des recettes agricoles ni 100 000 euros : ces plafonds dérogatoires devenant, avec le présent article, le droit commun, le dispositif n’a plus d’objet.
Enfin, pour éviter d’éventuels abus, le présent article prévoit que les revenus tirés des activités accessoires ne peuvent bénéficier de certains dispositifs propres à la fiscalité agricole, tels que les déductions pour investissement et pour aléas (DPI et DPA) ou encore l’abattement prévu en faveur des jeunes agriculteurs.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement ayant fait l’objet d’un avis de sagesse de la commission des finances, qui tire toutes les conséquences des modifications apportées par le présent article et prévoit les coordinations restantes :
– au second alinéa de l’article 75 A du CGI, qui porte sur la détermination des revenus accessoires en cas de début d’activité ;
– à l’article 206 du CGI, qui porte sur l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés des sociétés civiles agricoles dont les revenus relevant des BIC ou des BNC excèdent les plafonds de pluriactivité.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
Le relèvement des plafonds prévus à l’article 75 du CGI est de nature à développer la pluriactivité des exploitations agricoles et donc à soutenir le monde agricole et rural. En cela, il apparaît bienvenu.
Néanmoins, et c’était l’un des motifs de la demande de retrait faite en séance lors de la discussion par notre Assemblée du dispositif en première lecture, ce relèvement pourrait entraîner une distorsion de concurrence entre exploitants agricoles et personnes se livrant, à titre principal, aux activités relevant des BIC ou des BNC ([101]). Cette préoccupation est d’ailleurs partagée par le rapporteur général de la commission des finances du Sénat, qui relève dans son rapport que « les acteurs concernés par la concurrence des activités annexes développés par les agriculteurs [pourraient] se plaindre d’une concurrence déloyale liée à l’application d’un régime fiscal plus favorable que le leur » ([102]).
En conséquence, en appelant à une évaluation précise de ses effets, notamment sous l’angle de la concurrence, le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 10 quater
Prorogation et modification des conditions d’application du taux réduit d’impôt sur les sociétés pour les plus-values de cessions de locaux professionnels transformés en logements
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
En application de l’article 210 F du CGI, la plus-value nette résultant de la cession d’un local professionnel ([103]) par une personne morale soumise à l’IS dans les conditions de droit commun est imposée au taux réduit de 19 %, sous réserve :
– que la cession soit réalisée au profit d’une autre personne morale soumise à l’IS dans les conditions de droit commun, d’une société immobilière spécialisée ou d’un organisme, d’une société ou d’une association en charge du logement social ;
– que la personne cessionnaire s’engage à transformer, dans un délai de quatre ans suivant la date de clôture de l’exercice au cours duquel l’acquisition est faite, le local acquis en local à usage d’habitation (sous peine d’une amende correspondant à 25 % du prix de cession, en application du III de l’article 1764 du CGI) ;
– que la cession soit réalisée entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2017, en application du III de l’article 10 de la loi de finances pour 2015 ([104]).
Le présent article résulte de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement du Gouvernement ayant fait l’objet d’un avis favorable du Rapporteur général ([105]) et visant à substantiellement améliorer ce dispositif d’imposition à taux réduit. L’article prévoit ainsi :
– de proroger pour trois ans ce dispositif, qui sera ainsi applicable aux cessions réalisées jusqu’au 31 décembre 2020. Un assouplissement est par ailleurs prévu, rendant applicable le dispositif aux cessions réalisées jusqu’au 31 décembre 2022, dès lors qu’elles auront fait l’objet d’une promesse synallagmatique de vente conclue entre 2018 et 2020 ;
– d’inclure dans le champ des biens faisant l’objet de la cession les terrains à bâtir, définis comme les terrains sur lesquels des constructions peuvent être autorisées en application d’un document d’urbanisme. En conséquence, l’engagement de transformation de la destination du local, qui n’a pas de sens s’agissant d’un terrain à bâtir, est transformé dans cette hypothèse en engagement de construire, dans le même délai de quatre ans, des locaux à usage d’habitation ;
– de cibler le dispositif aux communes situées dans des zones géographiques sensibles caractérisées par une forte tension en matière de logement.
Le dispositif prévu à l’article 210 F du CGI se trouve donc prorogé, enrichi et voit son efficacité accrue, en cohérence avec la volonté du Gouvernement et de la majorité de mettre en place un choc d’offre en matière de logement et dans la ligne de la stratégie gouvernementale en faveur du logement.
Le coût de la mesure, qui n’a pas été chiffré, doit être mis en relation avec son objectif opportun et avec le montant actuel de la dépense fiscale, qui s’élève à 2 millions d’euros ([106]).
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Le Sénat a adopté deux amendements de sa commission des finances ayant fait l’objet d’un avis favorable de la part du Gouvernement. Le premier est de précision rédactionnelle. Le second étend le bénéfice du dispositif prévu à l’article 210 F du CGI aux cessions faites au profit des sociétés civiles prévues à l’article 239 ter du CGI et dont l’objet est la construction d’immeubles en vue de la vente.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
L’extension du périmètre des cessionnaires éligibles aux sociétés civiles de construction-vente paraît pertinente et s’inscrit dans le cadre global du soutien à l’offre de logement.
En conséquence, le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 10 sexies
Maintien temporaire du dispositif applicable dans les zones de revitalisation rurale pour les communes sorties du classement
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
En application de l’article 44 quindecies du CGI, les entreprises employant moins de onze salariés et implantées dans une zone de revitalisation rurale (ZRR) bénéficient d’une exonération temporaire d’IR ou d’IS. Sont également prévues des exonérations d’impôts locaux et de cotisations sociales patronales.
Les critères de classement en ZRR, définis à l’article 1465 A du CGI, ont été modifiés par l’article 45 de la loi de finances rectificative pour 2015 ([107]). Le classement des communes en ZRR résultant de ces nouveaux critères a été constaté par un arrêté du 16 mars 2016. Il est entré en vigueur au 1er juillet 2017 ([108]).
Ce nouveau zonage a eu pour effet de faire entrer dans le classement de nouvelles communes, mais également d’en faire sortir certaines qui bénéficiaient jusque-là du dispositif ZRR. Aussi, afin d’éviter que ces sorties soient trop brutales, le bénéfice du dispositif d’exonérations a été maintenu pendant trois ans (soit jusqu’au 30 juin 2020) pour les communes de montagne n’étant plus incluses dans une ZRR au 1er juillet 2017, en application de l’article 7 de la loi du 28 décembre 2016 dite « Montagne II » ([109]).
Le présent article résulte de l’adoption à l’unanimité des votants de trois amendements identiques présentés par la commission des finances et ayant pour origine une initiative de notre collègue Émilie Cariou, par M. Jean‑Noël Barrot et certains membres du groupe Mouvement démocrate et apparentés et par Mme Amélie de Montchalin et certains membres du groupe La République en Marche. Ces amendements ont recueilli l’avis favorable du Gouvernement. Ils s’inscrivent dans la suite de la loi « Montagne II ».
Le présent article vise, en effet, à étendre, jusqu’au 31 décembre 2019, le maintien temporaire du bénéfice des exonérations aux communes sorties du classement ZRR et qui ne sont pas des communes de montagne, afin de leur ménager une période de transition souple pour qu’elles puissent s’adapter.
L’article prévoit également la remise au Parlement, par le Gouvernement et au plus tard le 31 mai 2018, d’un rapport sur la mise en œuvre de la sortie progressive du classement pour ces communes, analysant notamment les possibilités d’expérimentations et de politiques contractuelles avec les collectivités territoriales.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Le Sénat a adopté quatre amendements au présent article.
Les deux premiers, de sa commission des finances et qui ont fait l’objet d’un avis favorable du Gouvernement, portent sur le terme du maintien temporaire du dispositif d’exonération :
– l’un étend jusqu’au 30 juin 2020 le maintien prévu pour les communes autres que celles de montagne, consistant ainsi en un alignement avec la période prévue pour les communes de montagne sorties du classement ;
– l’autre, qui introduit un nouveau IV, apporte une précision à la loi « Montagne II » pour substituer au délai de trois ans la date du 30 juin 2020 (qui correspond au terme de ce délai triennal).
Le troisième, déposé par M. Charles Guené (LR) et qui a recueilli un avis favorable de la commission et un avis de sagesse du Gouvernement, vise à compléter l’objet du rapport devant être remis au Parlement pour y inclure l’étude de la pertinence d’une évolution des critères de classement en ZRR, notamment pour retenir à l’avenir le revenu médian de chaque commune.
Enfin, le quatrième amendement, déposé par M. Alain Marc (Les Indépendants-République et Territoires) et ayant fait l’objet d’un avis de sagesse de la commission et un avis défavorable du Gouvernement, introduit un nouveau III au présent article. Il prévoit un critère de classement en ZRR alternatif à celui reposant sur la densité de population, qui porte sur le déclin démographique. L’introduction de ce III s’est accompagnée de celle de nouveau V à VII, gageant la perte de recettes associée.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
Les aménagements apportés au Sénat, notamment l’harmonisation de la période du maintien temporaire du dispositif ZRR pour toutes les communes sorties du classement, qu’elles soient de montagne ou non, apparaissent bienvenus.
En conséquence, le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 11
Mise en œuvre du prélèvement forfaitaire unique
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
L’Assemblée nationale a adopté quatorze amendements à cet article, dont dix amendements rédactionnels.
Les amendements non rédactionnels sont les suivants :
– un amendement du Gouvernement opérant plusieurs ajustements relativement techniques exposés ci-dessous ;
– un amendement de la commission des finances et de Mme Amélie de Montchalin ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, visant à préciser que le taux du prélèvement forfaitaire unique (PFU) s’appliquera également en cas de rachat d’un contrat d’assurance vie de moins de huit ans, dont l’encours est inférieur à 150 000 euros ;
– un amendement de la commission ayant reçu un avis favorable du Gouvernement visant à créer un comité de suivi de cette réforme.
L’amendement du Gouvernement a permis d’apporter les précisions suivantes :
– il permet d’aligner le taux d’imposition des produits des contrats d’assurance vie attachés à des primes versées à compter du 27 septembre 2017 et bénéficiant à des non-résidents sur celui applicable aux résidents ;
– il précise également que l’abattement fixe de 500 000 euros prévu à l’article 150-0 D ter du CGI s’applique en priorité, en matière d’actions gratuites, au gain de cession. Le surplus éventuel est imputé sur l’avantage salarial, qui bénéficie d’un abattement spécifique de 50 % mais qui est imposé au barème de l’impôt sur le revenu ;
– il précise enfin les conséquences d’une remise en cause, après l’entrée en vigueur de la réforme, d’un abattement appliqué avant la réforme. À titre d’exemple, si un dirigeant de PME bénéficie de l’abattement le 15 novembre 2017 mais ne prend finalement pas sa retraite avant le 15 novembre 2019, l’abattement dont il a bénéficié pourrait être remis en cause en 2020.
Dans ce cas, le contribuable aura le choix entre opter pour l’imposition au barème et bénéficier des abattements pour durée de détention qui étaient en vigueur lors de la cession, ou bien opter pour le PFU et être taxé sur une assiette sans abattement.
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a adopté treize amendements dont dix de sa commission des finances, deux du Gouvernement et un de M. Vincent Éblé (groupe socialiste et républicain), président de la commission.
A. Les amendements de la commission des finances et de son président
1. Un dispositif destiné à éviter l’ « income shifting » des salaires vers les dividendes
● Le Sénat a adopté un amendement de la commission des finances, ayant reçu un avis de sagesse du Gouvernement. Il vise, d’une manière générale, à éviter que la mise en place du PFU, à un taux proportionnel inférieur aux taux marginaux du barème de l’impôt sur le revenu, ne se traduise, pour les redevables en mesure de piloter leurs revenus entre salaire et dividendes, par un report vers une forme de rémunération basée sur le versement de dividendes plutôt que sur le versement de salaires.
Cette faculté de report est particulièrement aisée dans les PME ou pour les indépendants. Du fait du taux du PFU, il en résulterait, selon le Sénat, un coût global de la réforme largement supérieur au chiffrage établi par le Gouvernement, dont l’évaluation est réalisée à comportements constants.
La théorie économique a mis en évidence un tel phénomène pour les pays qui ont mis en place une « flat tax » sur les revenus du capital depuis plusieurs années, phénomène appelé « income shifting » (évasion des revenus).
Ce phénomène a fait l’objet d’une attention accrue depuis qu’une tribune de l’économiste M. Gabriel Zucman dans Le Monde ([110]) en a détaillé les effets aux États-Unis ou en Finlande, ainsi que le coût potentiel d’un tel phénomène en France.
Selon l’économiste, il y aurait à l’issue de la réforme un différentiel de taxation entre salaire et dividende de l’ordre de 15 points, les salaires étant taxés à un taux global de 65 % contre 50 % pour les dividendes.
Les modalités de calcul de ce différentiel sont publiées sur le site personnel de l’auteur.
Le différentiel de taxation entre dividendes et salaires
après la mise en place du PFU selon M. Gabriel Zucman
Taux de 65 % sur les plus hauts salaires.
Sur 100 de salaire super brut,
Cotisations (salariales + patronales) déplafonnées (après réforme qui supprime les 0,75 % de part salariale sur les cotisations maladie) et CRDS = 23,9 %
CSG (après augmentation de 1,7 point) = 9,2 %
Impôt sur le revenu = (45 % + 4 % de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus) × (1 – 23,9 % – 9,2 %) = 32,8 % [je néglige le fait qu’une partie de la CSG et la CRDS ne sont pas déductibles de l’IR, et à l’inverse que les marginaux de cotisations en % du super-brut sont plus faibles qu’en % du brut].
Total = 65,9 % [taux exact après prise en compte des non-déductibilités etc. : 66,2 %]
Taux de 50 % sur les plus hauts dividendes.
Sur 100 de profits,
Impôt sur les sociétés après réforme = 25 %
Impôt sur le revenu = (30 % de « flat tax » + 4 % de contribution exceptionnelle) × (1 – 25 %) = 25,5 %
Total = 50,5 %
Comparaison des deux taux
Les cotisations déplafonnées sont non contributives, donc assimilables à des taxes. Il s’agit pour l’essentiel de cotisations maladie et famille (et non pas retraite ou chômage) ; elles n’ouvrent droit à aucun bénéfice particulier. La comparaison que j’effectue est donc entièrement justifiée.
Selon l’économiste, la mise en place du PFU pourrait par conséquent avoir un impact budgétaire non pas de 1,5 milliard d’euros mais « sans doute de l’ordre de dix fois plus » en intégrant ce report, ce qui selon lui remettrait fondamentalement en cause l’équilibre comptable du projet de loi de finances.
Le calcul de l’impact budgétaire du PFU selon M. Gabriel Zucman
Aux États-Unis, l’article « Capitalists in the Twenty First Century » montre qu’environ 1,3 % du PIB américain perçu sous forme de dividendes payés par des S-corporations correspond en fait à des salaires déguisés, en raison d’un différentiel d’imposition de 2,9 points (3,8 points depuis 2013) entre salaires et dividendes de S-corporations.
(N.B. : le texte original de ma tribune mentionne un différentiel de 2,5 points, qui est en fait de 2,9 points avant l’Additional Medicare Tax. Je corrige ici.)
Scénario bas : malgré un différentiel de taux bien supérieur (de l’ordre de 15 points), en France 1,3 % du PIB va également être déplacé de salaires en dividendes.
Avec un PIB 2022 aux alentours de 2 300 milliards d’euros, cela représente une masse de 28 milliards d’euros sur laquelle le manque à gagner est de 15 % soit 4 milliards environ. Auxquels il faut ajouter les 1,5 milliard de coûts budgétés pour la flat tax. Total = 5,5 milliards.
Scénario central : 2,5 points de PIB se déplacent en dividendes. C’est ce qu’on observerait aux États-Unis si le différentiel de 2,9 points pour les S-corporations s’appliquait aussi aux partnerships. Avec 2,5 points de « faux » dividendes, le coût total de la réforme dépasse les 10 milliards.
Fourchette haute : 5 points de PIB se déplacent vers les dividendes, pour un coût total approchant les 20 milliards.
Ce chiffrage a fait l’objet d’une critique par un autre économiste, M. Antoine Lévy, doctorant en économie au Massachussetts Institute of Technology (MIT) dans une tribune publiée dans le même quotidien quelques jours plus tard ([111]).
Cet économiste relève que le coût de 10 milliards d’euros peut paraître élevé compte tenu du rendement total de l’impôt sur le revenu, de l’ordre de 70 milliards d’euros, sachant par ailleurs que les redevables soumis à la tranche marginale de l’impôt sur le revenu n’ont acquitté en 2015 au titre de l’IR que 9,5 milliards d’euros.
En outre, les dirigeants d’entreprise qui disposeront d’une telle liberté d’arbitrage ne sont pas, dans leur immense majorité, soumis à ce différentiel de taux de 15 %.
Au total le coût la réforme devrait être selon ce second économiste très inférieur à celui évoqué par le premier.
● L’amendement adopté par le Sénat prévoit un dispositif relativement complexe selon lequel, pour les dirigeants d’entreprise possédant plus de 10 % de leur entreprise, le montant des dividendes excédant 10 % de la valeur de leurs parts ne pourra plus bénéficier du PFU mais sera automatiquement imposé au barème de l’impôt sur le revenu. Il convient d’ailleurs de souligner que, dans cette hypothèse, ces revenus deviendraient éligibles à l’abattement de 40 % qui reste en vigueur en cas de barémisation.
Dans le détail, les dirigeants visés par cette mesure sont :
– les gérants nommés conformément aux statuts d’une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions ;
– les associés en nom d’une société de personnes ;
– les présidents, directeurs généraux, présidents du conseil de surveillance ou membre du directoire d’une société par actions.
Ces fonctions doivent donner lieu à une rémunération représentant plus de la moitié des revenus du redevable.
Le critère de possession de 10 % s’applique aux droits de vote attachés aux titres émis par la société (directement ou par l’intermédiaire d’un proche).
Cette condition fait l’objet de dispositions particulières en cas d’augmentation du capital de l’entreprise.
2. Les autres amendements adoptés au Sénat
● Le Sénat a, par ailleurs, adopté un amendement de sa commission des finances, ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, visant à maintenir le régime actuel d’abattements applicables aux plus-values de cession réalisées par des dirigeants d’une PME partant en retraite.
Alors que le régime actuel prévoit la possibilité de cumuler un abattement fixe de 500 000 euros au moment du départ à la retraite et un abattement pour durée de détention qui peut aller, pour les PME, jusqu’à 85 % au bout de huit ans, le projet d’article 11 prévoit la suppression, pour l’avenir, de l’ensemble des seuls abattements pour durée de détention.
Il en résulterait, selon l’auteur de l’amendement, un alourdissement de la fiscalité des dirigeants de PME. L’amendement prévoit, par conséquent, la possibilité de continuer à cumuler les deux abattements à l’avenir.
● Le Sénat a adopté un amendement de M. Vincent Éblé, président de sa commission des finances, ayant reçu un avis de sagesse de la commission et une demande de retrait de la part du Gouvernement, visant à élargir la mission de suivi prévue par l’Assemblée nationale à l’évaluation des effets macroéconomiques de la réforme, la quantification économétrique des changements comportementaux, l’incidence de la réforme sur la durée de détention des titres et son incidence sur les départs et les retours de contribuables français.
Les autres amendements adoptés à l’initiative de la commission des finances sont rédactionnels, en ayant tous reçu un avis favorable du Gouvernement.
B. les amendements du gouvernement
Le Sénat a en outre adopté deux amendements du Gouvernement ayant reçus un avis favorable de la commission des finances :
– le premier propose de soumettre au taux du PFU les gains de cession des titres souscrits en exercice de bons de souscriptions de parts de créateurs d’entreprises (BSPCE), lorsque le contribuable exerce son activité dans la société dans laquelle il a bénéficié de ces bons depuis moins de trois ans ;
Dans ce cas, le taux applicable est actuellement de 30 %, auquel il faut ajouter les prélèvements sociaux. L’article 11, dans sa rédaction initiale, prévoyait que le gain d’exercice du bon serait imposé comme un salaire au barème de l’impôt sur le revenu, tandis que le gain de cession serait imposé au taux global du PFU.
L’amendement du Gouvernement permet d’unifier ces gains en les soumettant dans leur ensemble au taux du PFU ;
– le second est un amendement de précision.
III. la position du rapporteur général
Le Rapporteur général propose de retenir les deux amendements du Gouvernement adoptés au Sénat, ainsi que les amendements rédactionnels de sa commission des finances adoptés avec l’accord du Gouvernement.
S’agissant des trois autres amendements adoptés au Sénat, le Rapporteur général considère que :
– l’amendement visant à permettre de cumuler l’abattement fixe et l’abattement pour durée de détention pour les dirigeants de PME est contraire à l’esprit de la réforme de la fiscalité du capital, qui tend à une simplification globale permettant aux dirigeants et aux investisseurs de ne plus prendre des décisions de gestion aussi importantes qu’un départ en retraite ou une cession des titres en fonction de critères fiscaux mais uniquement en fonction de l’intérêt de l’entreprise ;
– l’amendement relatif à la mission de suivi de la réforme encadre par trop les fonctions de celle-ci, qui doit pouvoir orienter ses investigations en fonction des problèmes qui apparaîtront au stade de la mise en œuvre du PFU ;
– s’agissant du dispositif destiné à éviter un « income shifting », le Rapporteur général tient à saluer l’initiative de la commission des finances du Sénat, qui a incontestablement mis en lumière un sujet particulièrement important non abordé à l’Assemblée nationale ; mais le débat entre économistes montre toutefois qu’il n’existe pas encore de consensus sur cette question au plan théorique qui permettrait de légiférer.
Au plan pratique, le dispositif adopté au Sénat comporte certainement quelques aspects méritant une expertise plus poussée :
– le double seuil de 10 % risque de créer de nombreux effets de seuil, qui vont à l’encontre même de l’objectif de la présente réforme. On peut craindre, en particulier, que le dirigeant n’optimise sa situation fiscale en opérant un versement de dividendes régulièrement en-dessous de 10 % de la valeur de ses titres, quand bien même les résultats de l’entreprise ne le permettraient pas en année N, afin d’éviter qu’un versement trop important en année N + 1 n’entraîne une imposition plus importante ;
– ainsi, la fiscalité deviendrait la variable d’ajustement du montant des dividendes versés alors qu’à l’évidence, certaines entreprises ont intérêt à aller beaucoup plus loin certaines années en fonction de leurs résultats. C’est notamment le cas lorsque des dividendes importants sont versés en vue d’assurer la transmission de titres entre générations (pour les entreprises familiales) ;
– il convient, par ailleurs, de relever que la valorisation des sociétés non cotées peut parfois être relativement complexe, plusieurs méthodes concurrentes pouvant s’appliquer. De ce fait, la mise en œuvre pratique de la mesure pourrait donner lieu à un contentieux important ;
– enfin, il n’y a aucune urgence à légiférer dans ce domaine, dans la mesure où un éventuel report ne commencera véritablement à produire ses effets budgétaires qu’en 2019.
Un ajustement du dispositif au vu des évolutions effectivement constatées pourrait donc être envisagé dans une prochaine loi de finances ou dans le cadre du prochain projet de loi relatif aux PME, dont l’examen est annoncé au printemps 2018.
*
* *
Article 11 ter
Augmentation du taux de la taxe forfaitaire
sur la cession des métaux précieux
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
Cet article a été inséré en première lecture à l’Assemblée nationale par l’adoption d’un amendement de la commission des finances et de Mme Amélie de Montchalin, ayant reçu un avis favorable du Gouvernement.
Il vise à augmenter d’un point, de 10 à 11 %, le taux de la taxe forfaitaire pesant sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection et d’antiquité.
Il convient de rappeler que cette taxe forfaitaire s’applique à défaut d’option du contribuable pour le régime de droit commun d’imposition des plus-values sur biens meubles. Il en est notamment ainsi lorsque le redevable ne peut pas prouver la date d’acquisition de l’objet permettant de déterminer les modalités d’application de l’abattement pour durée de détention.
Actuellement, le taux de cette taxe est de :
– 10 % pour les métaux précieux ;
– 6 % pour les bijoux, les objets d’art, de collection ou d’antiquité.
Ces taux étaient respectivement de 7,5 % et de 4,5 % jusqu’à leur augmentation résultant de l’article 19 de la loi de finances pour 2014 ([112]).
Selon le Bulletin officiel des finances publiques – Impôts (BOFiP-I), les métaux précieux comprennent l’or, le platine, l’argent ainsi que les déchets ou débris de ces métaux (notamment sous forme de plaquage). Les monnaies d’or et d’argent entrent dans le champ de cette disposition si elles sont postérieures à 1800 (dans le cas contraire, elles sont considérées comme des objets de collection).
Rendement de la taxe sur les métaux précieux, les bijoux
et les objets d’art, de collection ou d’antiquité
(en millions d’euros)
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
100,1 |
70,5 |
76,8 |
73,3 |
79,5 |
Source : annexes « Développement des recettes du budget général et des dépenses fiscales »
L’objectif poursuivi par cette hausse modérée du taux de la taxe forfaitaire sur les métaux précieux est de compenser partiellement la sortie de ces éléments de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune, du fait de l’article 11 du présent projet de loi créant l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Contre l’avis du Gouvernement, le Sénat a adopté un amendement de sa commission des finances supprimant cet article, au motif qu’il s’agit d’une simple mesure d’affichage visant à justifier au regard de l’opinion publique le fait que certains biens sortent de l’assiette de l’IFI.
III. la position du rapporteur général
Le Rapporteur général propose de rétablir cet article dans sa rédaction issue de l’Assemblée nationale.
Il est, en effet, erroné de considérer que l’augmentation de la taxe forfaitaire sur les métaux précieux viserait à justifier la réforme de l’IFI : cette réforme ayant été annoncée au cours de la campagne présidentielle, elle est de fait souhaitée par les Français qui ont porté au pouvoir une nouvelle majorité.
En revanche, le présent dispositif est guidé par le souci d’éviter certains effets de bord liés à cette réforme, notamment un report des placements immobiliers vers ce type de biens. Le Parlement est dans son rôle en opérant ce type d’ajustements.
*
* *
Article 11 quater
Ouverture d’un PEA par toute personne majeure ayant son domicile
en France, même si elle n’est pas encore contribuable
I. Les dispositions adoptées par le sénat
Cet article a été inséré par l’adoption d’un amendement de M. Vincent Delahaye (UC), ayant reçu un avis de sagesse de la commission des finances et un avis défavorable du Gouvernement.
Il vise à permettre, à compter du 1er janvier 2018, l’ouverture d’un plan d’épargne en actions (PEA) au nom de l’enfant d’un contribuable, à condition que cet enfant soit majeur et à la charge du contribuable, dans la limite de 25 000 euros.
L’objectif de ce dispositif est d’inciter les jeunes Français à participer au financement de nos entreprises.
II. la position du Rapporteur général
Ce dispositif, qui avait également été présenté sous forme d’amendement à l’Assemblée nationale en première lecture, conduirait en réalité davantage à offrir une possibilité supplémentaire de défiscalisation au profit des redevables qui auraient atteint le plafond du PEA qu’à initier les jeunes Français à la vie de l’entreprise.
Dans la très grande majorité des cas, en effet, un jeune majeur à la charge de ses parents n’a pas les moyens d’investir dans l’économie par le biais d’un PEA, sauf exceptions.
Il y a, en revanche, tout lieu de craindre que les parents n’ouvrent un compte au nom de leur enfant à charge pour bénéficier de la fiscalité avantageuse du PEA.
Du reste, les PEA étant placés principalement en actions, il s’agit d’un placement risqué, vers lequel il est compliqué d’attirer de jeunes investisseurs peu expérimentés.
Le Rapporteur général propose donc de supprimer cet article.
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Article 12
Création de l’impôt sur la fortune immobilière et suppression de l’ISF
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
A. Les amendements adoptÉs
En première lecture, l’Assemblée nationale a adopté treize amendements dont neuf rédactionnels.
Les quatre amendements de fond sont :
– un amendement du Gouvernement procédant à de nombreux ajustements du dispositif initial de l’article 12 présentés en détail ci-dessous ;
– un amendement de M. Marc Fesneau, ayant reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement, visant à préciser que les certificats et engagements permettant de bénéficier d’une exonération d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) à hauteur de 75 % pour les propriétés en nature de bois et forêts resteront valables au titre de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) ;
– deux amendements identiques de la commission des finances et de Mme Amélie de Montchalin, ayant reçu un avis favorable du Gouvernement prévoyant que le remplacement de l’ISF par l’IFI fera l’objet d’une mission de suivi et d’évaluation visant à mesure les impacts économiques et sociaux de la réforme.
B. L’amendement du gouvernement
Ayant été déposé après la réunion de la commission des finances tenue au titre de l’article 88 du Règlement, l’amendement du Gouvernement n’a pas fait l’objet d’une décision formelle de sa part, ni d’un examen poussé par ses membres.
Avant son adoption, le Rapporteur général s’est engagé à réaliser une expertise la plus complète possible dans les délais impartis avant la nouvelle lecture.
L’amendement tend à régler plusieurs problèmes différents apparus au cours des échanges, souvent techniques, avec le Gouvernement au moment de l’examen de cet article.
En premier lieu, il tend à supprimer, à l’alinéa 6 ([113]), la mention selon laquelle il est institué un impôt annuel sur les actifs immobiliers « non affectés à l’activité professionnelle de leur propriétaire ».
La suppression de ce membre de phrase ne signifie pas que l’IFI est étendu à l’ensemble des actifs immobiliers. Au cours des échanges techniques sur cet article, la question a toutefois été posée de savoir si cet alinéa préliminaire impliquait une exclusion de portée générale distincte des régimes particuliers prévus dans la suite de l’article, à savoir le régime des biens professionnels issu de l’actuel ISF et l’exclusion des actifs affectés à une entreprise selon les modalités prévues au nouvel article 965 du CGI.
Il est, de fait, apparu que ce membre de phrase était davantage un effet d’affichage, comme le relevait du reste le Rapporteur général dans le rapport de première lecture, qui pourrait introduire de la confusion.
En deuxième lieu, l’amendement du Gouvernement tend à préciser les modalités selon lesquelles est déterminée l’assiette de l’IFI en cas de détention de l’immobilier à travers les parts d’une société.
L’article, dans sa rédaction initiale, prévoyait logiquement que le redevable était taxé sur les parts détenues à hauteur de la fraction représentative des droits immobiliers.
L’amendement précise les modalités de calcul de cette fraction. Il sera appliqué à la valeur des parts du redevable un coefficient correspondant au rapport entre :
– d’une part, la valeur vénale réelle des biens immobiliers imposables ;
– et la valeur vénale réelle de l’ensemble des actifs de la société.
Il semble que la valeur vénale réelle des biens immobiliers et comme de l’ensemble des actifs s’entende d’une valeur nette des éventuels emprunts contractés par la société pour les acquérir.
En troisième lieu, l’amendement introduit deux alinéas 22 et 23 ([114]) qui sont particulièrement importants, dans la mesure où ils conduisent à étendre l’exonération d’IFI applicable aux actionnaires minoritaires (en-dessous du seuil de détention de 10 %) aux détentions indirectes.
L’article, dans sa rédaction initiale, instaurait une règle « de minimis » consistant à exclure de l’assiette de l’IFI les biens immobiliers détenus à travers une société, lorsque le redevable détient moins de 10 % de cette société. Celui-ci a, en effet, alors trop peu de poids dans la société, en tant qu’actionnaire minoritaire, pour influer sur sa politique immobilière et même pour être correctement informé des éléments permettant de déterminer l’assiette de son propre impôt.
Ce dispositif est sain dans son esprit, même s’il n’est pas à exclure que l’on constate, dans la pratique, une optimisation fiscale consistant à étaler des propriétés immobilières dans plusieurs sociétés détenues en dessous de ce seuil par le redevable.
Le présent amendement complète le dispositif initial en prévoyant que l’exclusion de l’assiette de l’IFI, en cas de détention de moins de 10 %, s’applique également avec un niveau d’interposition.
En d’autres termes, l’IFI ne s’appliquera pas aux actifs immobiliers lorsque le redevable détient moins de 10 % d’une société A mais également si, détenant plus de 10 % de la société A, celle-ci détient moins de 10 % des parts d’une société B. Dans ce cas, les actifs immobiliers de la société B sont exclus.
L’amendement prévoit toutefois que cette exclusion avec un niveau d’interposition ne s’applique pas si le redevable contrôle la société A au sens du CGI (c’est-à-dire possède plus de 50 % des titres ou des droits de vote).
En quatrième lieu, l’amendement prévoit une règle « de minimis » particulière pour les sociétés foncières et les fonds immobiliers.
Les alinéas 45 à 48 ([115]) prévoient une exclusion similaire, en cas de détention de moins de 10 % des droits, pour les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), les fonds d’investissement à vocation générale, les fonds de capital investissement, les fonds professionnels à vocation générale et de fonds d’épargne salariale ainsi que les sociétés d’investissement à capital fixe et les organismes de titrisation.
Pour ces structures, le dispositif adopté prévoit toutefois spécifiquement que l’exclusion en cas de détention inférieure à 10 % ne s’applique que dans l’hypothèse où la structure possède un actif composé à moins de 20 % en biens imposables au titre de l’IFI.
En cinquième lieu, l’amendement procède à une clarification extrêmement importante des règles relatives au passif déductible de l’assiette de l’IFI, dont la version initiale comportait de nombreuses imprécisions.
Les alinéas 43 et 51 à 55 du projet initial semblaient en effet viser plusieurs fois des cas similaires, notamment le cas de la dette d’une société contractée après du redevable détenant lui-même les parts de la société, tandis que les règles relatives aux dettes contractées à l’intérieur du cercle familial n’étaient pas totalement claires.
Afin de clarifier cet aspect de la réforme, l’article 12 tel qu’amendé par le Gouvernement fait la liste claire des dettes qui ne seront pas déductibles au titre de l’IFI.
S’agissant de la valorisation de titres détenus par un redevable, sont exclues les dettes contractées par la société correspondante :
– auprès d’un redevable pour l’acquisition d’un bien immobilier imposable par la société, dans un but principalement fiscal ;
– plus généralement, auprès d’un redevable pour l’acquisition d’un bien immobilier, à hauteur de sa participation (ou de celle de ses proches) dans le capital de la société ;
– auprès d’une société interposée, dans laquelle le redevable ou ses proches détiennent des parts (à proportion de leur participation dans cette société interposée) ;
– auprès d’une société ou d’un organisme contrôlé directement ou indirectement par le redevable ou ses proches.
Le dispositif adopté prévoit, pour l’ensemble de ces cas, une clause de bonne foi, selon laquelle le redevable sera en tout état de cause en mesure de démontrer que le prêt est réalisé dans des conditions normales, auquel cas la dette reste déductible. Cette généralisation répond à plusieurs amendements déposés en première lecture à l’Assemblée nationale.
S’agissant des dettes qui peuvent être déduites directement de l’actif immobilier taxable du redevable (et non pas pour la valorisation des titres d’une société), le dispositif adopté clarifie la liste déjà prévue par le projet initial.
Les alinéas 54 à 59 ([116]) du nouveau dispositif précisent qu’en cas de détention directe d’un bien immobilier ou de titres de société, ne sont pas déductibles les dettes liées à des prêts contractés :
– auprès du redevable ou de ses proches (conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin notoire, enfants mineurs) directement ou par l’intermédiaire d’une société. Pour ces proches, le dispositif adopté ne prévoit pas de clause de bonne foi ;
– auprès d’un ascendant, d’un descendant (autre qu’un enfant mineur), frère ou sœur, sauf si le redevable justifie du caractère normal des conditions de prêt ;
– par l’un des proches du redevable mentionnés à l’alinéa précédent auprès d’une société contrôlée par le redevable ou l’un de ses proches. Une clause de bonne foi similaire est prévue dans ce cas.
La clause de bonne foi n’est, par conséquent, exclue que pour les prêts contractés auprès du conjoint, du partenaire lié par un PACS, du concubin notoire ou des enfants mineurs. L’article présume que les dettes contractées auprès de ces personnes ne pourraient qu’abusivement être déduites de l’assiette de l’IFI, ce qui mériterait d’être démontré.
Enfin, faisant suite à des discussions ayant eu lieu en commission des finances en première lecture, le dispositif adopté maintien le décalage des dons déductibles au titre de l’IFI.
Alors que le dispositif initial prévoyait que les dons déductibles de l’IFI seraient ceux réalisés jusqu’au 31 décembre de l’année précédente, la commission des finances avait adopté un dispositif transitoire maintenant la déductibilité jusqu’au 15 juin (en cas de déclaration spécifique d’ISF) ou jusqu’à la date limite de la déclaration d’impôt sur le revenu (lorsque l’ISF est déclaré en même temps que les revenus sous une forme simplifiée). Ce dispositif transitoire était limité à la seule année 2018.
L’amendement du Gouvernement maintient une déductibilité des dons à des œuvres d’intérêt général jusqu’à la date limite de dépôt de la déclaration d’IR, dans le cadre de laquelle la déclaration de patrimoine soumis à l’IFI devra être réalisée en tout état de cause à compter de 2018.
Ce décalage pérenne permettra aux œuvres concernées d’organiser leurs appels au don en deux vagues (l’une en fin d’année pour l’IR et l’autre à la fin du printemps pour l’IFI).
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a adopté un amendement de sa commission des finances visant à transformer cet article 12 en une suppression totale de l’ISF.
Cette suppression, à compter du 1er janvier 2018, est prévue au 29° du I de cet article, dans la rédaction issue du Sénat.
L’ensemble des autres modifications prévues par cette nouvelle rédaction sont des conséquences de cette suppression, sur l’ensemble des articles du CGI en lien avec l’ISF ou faisant référence à l’une de ses dispositions.
Les arguments, multiples, avancés au cours de ce débat, peuvent être synthétisés de la manière suivante :
– le secteur immobilier ne serait pas improductif, en particulier le secteur de la « pierre-papier », alors que sa contribution à l’économie française serait importante ;
– l’assiette du nouvel IFI conduirait à exclure de son assiette des actifs ne contribuant pas à l’économie réelle (liquidités, biens de consommation) ;
– une stratégie consistant à vendre un bien immobilier pour laisser le produit de la vente sur un compte courant suffirait à réduire son imposition au titre de l’IFI ;
– l’IFI serait source d’iniquité, dans la mesure où les valeurs mobilières constituent une part croissante des hauts patrimoines. L’IFI conduirait, par conséquent, à concentrer l’impôt sur les « petites » fortunes dont certaines relèvent de la classe moyenne supérieure ;
– l’IFI serait un impôt complexe, nécessitant des clauses anti-abus et soulevant des difficultés juridiques et pratiques, en particulier pour les actifs situés à la frontière entre valeurs mobilières et immobilières ;
– le rendement de l’IFI serait modeste compte tenu de ces difficultés ; le chiffrage de 850 millions d’euros ne tient pas compte de l’impact budgétaire des éventuelles réallocations d’actifs, ce qui pourrait encore diminuer son rendement effectif.
Il convient, par ailleurs, de souligner la publication, le 8 novembre dernier, d’un rapport d’information ([117]) du rapporteur général du Sénat dont l’objet est d’analyser les « mythes et réalités » d’une prétendue « rente immobilière » ([118]).
Ce rapport présente trois arguments principaux :
– l’immobilier ne représenterait pas une rentabilité avant impôts anormalement élevée ;
– la fiscalité française n’y apparaît pas particulièrement biaisée en faveur de l’immobilier, une fois les spécificités liées au statut de propriétaire occupant prises en compte ;
– l’immobilier contribuerait à la croissance de l’économie réelle.
En marge de ces trois arguments, le rapport avance des pistes de réflexion, dont certaines conclusions pourraient d’ailleurs être utilisées à l’appui ou en marge de la présente réforme :
– la hausse des prix de l’immobilier exercerait des effets contrastés sur l’évolution des inégalités ;
– le débat sur la rente immobilière ne devrait pas masquer la nécessité de réorienter la politique du logement.
III. la position du rapporteur général
Sans revenir dans le présent rapport sur un débat qui a largement eu lieu en commission des finances et dans l’hémicycle, le Rapporteur général propose d’en revenir à la rédaction issue de l’Assemblée nationale, en soulignant d’ailleurs que les amendements qui y ont été adoptés en première lecture apportent certaines solutions aux risques soulignés dans ce rapport, notamment en excluant de l’assiette de l’IFI certains actifs à la frontière entre l’immobilier et le placement productif.
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Article 12 bis
Extension de dispositions applicables à la Préfon et aux PERP,
aux contrats « article 83 » et contrats « loi Madelin »
I. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture
Cet article, inséré à l’Assemblée nationale par l’adoption d’un amendement de M. Mohamed Laqhila avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement, vise à permettre un rachat anticipé des contrats d’épargne retraite dits « Madelin » ou « article 83 » à hauteur de 20 % lors de la cessation d’activité du titulaire.
Actuellement, cette possibilité existe pour les contrats des régimes « Préfon », que le dispositif a tendu à ouvrir à ces deux autres contrats d’épargne retraite, applicables respectivement aux travailleurs non salariés ou aux agriculteurs et aux salariés d’entreprises décidant de la mise en place d’un tel outil d’épargne retraite.
II. Les modifications adoptées par le Sénat
Le Sénat a adopté un amendement de Mme Catherine Procaccia (LR), avec un avis favorable de la commission et un avis défavorable du Gouvernement, visant à prendre en compte la situation des affiliés des contrats retraites « article 83 » dont l’entreprise souscriptrice a disparu ou dont le contrat a été résilié.
Dans ce cas, aucun avenant au contrat intégrant ces nouvelles dispositions ne pourra être proposé par l’assureur au souscripteur.
Afin d’éviter un tel blocage, l’amendement prévoit qu’en l’absence de dispositions contractuelles spécifiques et si l’assureur l’accepte, lorsque les affiliés à ces contrats sont des salariés, ils peuvent opter pour le rachat de la valeur de leurs droits individuels dans les mêmes conditions.
III. la position du Rapporteur général
L’amendement proposé conduit à ouvrir très largement les possibilités de rachat des contrats épargne retraite, ce qui n’est pas souhaitable.
Le Rapporteur général propose d’en revenir à la rédaction de cet article issue de l’Assemblée nationale.
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Article 12 ter A (nouveau)
Inclusion des sommes perçues au titre des plans de retraite par capitalisation dans le régime de l’impatriation
I. Les dispositions adoptées par le sénat
Le présent article a été inséré au Sénat par l’adoption d’un amendement de Mme Jacky Deromedi (LR), avec un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
Il vise à inclure dans le régime de l’impatriation les sommes inscrites dans un plan de retraite par capitalisation constitués à l’étranger par le redevable qui s’est ensuite impatrié en France.
Le régime des impatriés, fixé à l’article 155 B du CGI, prévoit une exonération des éléments de leur rémunération liés à cette impatriation.
En outre, les revenus de capitaux mobiliers et les gains de cessions de valeurs mobilières provenant hors de France sont exonérés à hauteur de 50 %.
II. la position du rapporteur général
Le régime des impatriés a déjà été considérablement renforcé en 2015 et dans le cadre de la loi de finances pour 2017 ([119]).
Il ne semble donc pas opportun d’aller plus loin en y incluant les produits d’épargne retraite ; il faut en effet rappeler que l’épargne retraite des résidents fiscaux français bénéficient de certaines exonérations, mais sous plusieurs plafonds et conditions auxquelles les impatriés visés par cet article ne seront pas soumis.
Le Rapporteur général propose donc la suppression de cet article.
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Article 12 ter
Augmentation du barème du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) et du droit de passeport pour les grands navires de plaisance
ou de sport
Le présent article prévoit une forte hausse du barème du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) pour les grands navires de plaisance ou de sport, afin de compenser en partie la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour ces navires. Le Rapporteur général propose de rétablir le présent article qui a été supprimé au Sénat.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
L’article 217 du code des douanes dispose que la francisation d’un bateau ou navire lui confère le droit de porter le pavillon de la République française avec les avantages et les obligations qui s’y rattachent. Cette opération administrative est constatée par l’acte de francisation.
L’article 223 du même code dispose que les navires francisés dont la longueur de coque est supérieure ou égale à 7 mètres ou dont la puissance administrative des moteurs est supérieure ou égale à 22 chevaux (CV) ainsi que les véhicules nautiques à moteur francisés dont la puissance réelle des moteurs est supérieure ou égale à 90 kilowatts (kW) sont soumis au paiement d’un droit annuel, dénommé droit de francisation et de navigation (DAFN). Le montant de la taxe varie en fonction de la longueur de la coque du navire ainsi que de la puissance administrative des moteurs. Les navires de commerce et les navires de pêche, quel que soit leur tonnage, sont exonérés de ce droit. En revanche, il s’applique aux navires de plaisance ou de sport.
Le produit de la taxe est affecté au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, dans la limite d’un plafond fixé à 38,5 millions d’euros pour 2018. Le rendement de la taxe est évalué dans les documents budgétaires annexés au présent projet de loi de finances à 38,2 millions d’euros en 2018.
Le présent article est issu d’un amendement présenté par les membres du groupe La République en Marche (LaREM) qui a reçu deux avis favorables de la commission des finances de l’Assemblée nationale et du Gouvernement ([120]). Il vise à compenser en partie la suppression par l’article 12 du présent projet de loi de finances de l’ISF par une hausse du barème du DAFN applicable pour les grands navires de plaisance ou de sport.
Il fixe un nouveau barème spécifique pour les navires de plaisance et de sport d’une longueur supérieure ou égale à 30 mètres et d’une puissance propulsive supérieure ou égale à 750 kW. Le nouveau barème varie selon la longueur et la puissance des navires concernés de 30 000 euros à 200 000 euros.
L’augmentation des droits concerne ainsi tous les résidents français battant pavillon français ou étranger, indépendamment du lieu de stationnement du navire. Elle ne concerne toutefois pas les non-résidents venant accoster pour un été.
Le rendement de cette nouvelle taxe est évalué à près de 10 millions euros. Les sommes ainsi récoltées sont affectées au fonctionnement et aux investissements de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) qui assure une mission de service public en secourant bénévolement et gratuitement les vies humaines en mer.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Le Sénat a procédé à la suppression du présent article, à la suite de l’adoption d’un amendement du rapporteur général de la commission des finances et malgré un avis défavorable du Gouvernement. Il a, en effet, estimé que le présent article introduit « une " mesure d’affichage " visant à justifier auprès de l’opinion publique le fait que la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI), exclura la détention des navires de plaisance ou de sport de l’assiette du nouvel impôt » ([121]).
III. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général est favorable au rétablissement du présent article. Il estime que, dans un objectif de justice fiscale, il est important d’éviter, pour certains biens ostentatoires de richesse, toute réduction fiscale injustifiée sur des biens entrant auparavant dans l’assiette de l’ISF mais pas dans celle de l’IFI.
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Article 12 quater
Taxe additionnelle sur l’immatriculation des voitures de sport
Le présent article prévoit la création d’une taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation pour les voitures de sport très puissantes destinée à compenser en partie l’exclusion de ces biens mobiliers du champ de l’IFI. Le Rapporteur général propose de rétablir le présent article qui a été supprimé au Sénat.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
La délivrance par les préfectures du certificat d’immatriculation d’un véhicule (CIV) est soumise au paiement de plusieurs taxes, droits, ainsi que d’une redevance d’acheminement, à savoir :
– la taxe régionale sur les CIV (articles 1599 quindecies et suivants du CGI) : il s’agit d’une taxe proportionnelle dont le taux unitaire par cheval-vapeur (CV) est déterminé par le conseil régional ; le taux de la taxe varie actuellement en France métropolitaine de 27 euros pour la Corse à 51,20 euros pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ; pour certaines situations, une réduction de la taxe est accordée, notamment pour les véhicules propres propulsés à l’énergie électrique, au gaz naturel pour véhicules, au gaz de pétrole liquéfié ou encore au super-éthanol E 85 (exonération en totalité ou à concurrence de la moitié de la taxe par décision du conseil régional) ;
– la taxe additionnelle à la taxe régionale pour les véhicules utilitaires, perçue au profit de l’Association pour le développement de la formation professionnelle dans les transports (article 1635 bis M du CGI) : il s’agit d’une taxe additionnelle qui s’applique uniquement à l’immatriculation des véhicules utilitaires (notamment transport de marchandises ou transport en commun de personnes) ; le tarif applicable varie entre 38 euros pour les véhicules automobiles de transport de marchandises dont le PTAC est inférieur ou égal à 3,5 tonnes à 305 euros pour ceux dont le PTAC est supérieur ou égal à 11 tonnes, ainsi que pour les tracteurs routiers et les véhicules de transport en commun de personnes ; la taxe finance les formations qualifiantes et professionnelles obligatoires des conducteurs routiers ;
– la taxe additionnelle à la taxe régionale pour les communes de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy (article 1585 I du CGI) pour financer l’amélioration de leur réseau routier ; elle est due pour les résidents des communes de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, et le taux en est fixé par ces mêmes collectivités ;
– la taxe additionnelle à la taxe régionale lors des immatriculations postérieures à la première immatriculation sur les voitures les plus polluantes (article 1010 bis du CGI) : pour les véhicules mis en circulation à partir du 1er juin 2004, une taxe additionnelle est perçue lors de l’immatriculation postérieure à la première immatriculation d’une voiture particulière ; elle se calcule en fonction du taux d’émissions, soit le nombre de grammes de CO2 émis par kilomètre, pour les véhicules qui ont fait l’objet d’une réception communautaire et en fonction de la puissance fiscale pour les véhicules qui n’ont pas fait l’objet d’une telle réception (2 euros par gramme de CO2 au-dessus de 200 grammes de taux d’émissions ; 4 euros au-dessus de 250 grammes) ;
– la taxe additionnelle à la taxe régionale lors de la première immatriculation sur les voitures les plus polluantes (article 1011 bis du CGI), dénommée malus automobile : une taxe additionnelle est perçue lors de la première immatriculation d’une voiture particulière ; elle se calcule en fonction du taux d’émissions pour les véhicules qui ont fait l’objet d’une réception communautaire et en fonction de la puissance fiscale pour les véhicules qui n’ont pas fait l’objet d’une telle réception (de 50 euros pour les véhicules ayant un taux d’émissions de 127 grammes par kilomètre à 10 000 euros pour ceux ayant un taux d’émissions de plus de 191 grammes par kilomètre ([122])) ;
– un droit de timbre dit « taxe pour la gestion des CIV » (article 1628-0 bis du CGI), afin d’assurer le financement de la fabrication des certificats d’immatriculation par l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) ainsi que le fonctionnement du système d’immatriculation des véhicules (SIV) : le montant de la taxe est fixé à 4 euros par CIV ([123]) ;
– enfin, une redevance pour l’acheminement du CIV au domicile du titulaire ([124]) dont le tarif est fixé à 2,76 euros ([125]).
Le présent article est issu de deux amendements identiques présentés par le Rapporteur général ainsi que par les membres du groupe LaREM ([126]). Ils ont reçu un avis favorable du Gouvernement.
Il s’agit de créer une nouvelle taxe additionnelle à la taxe sur les certificatifs d’immatriculation pour les véhicules de tourisme qui comptent plus de 36 CV. Le barème de cette nouvelle taxe est de 500 euros par cheval fiscal à partir du trente-sixième cheval fiscal inclus. Le montant total de ce prélèvement ne peut excéder 8 000 euros. Le montant de la taxe est donc dans un premier temps progressif, puis plafonné, afin d’éviter tout effet de seuil susceptible de créer des distorsions entre contribuables ou entre modèles de véhicules présentant des caractéristiques techniques proches.
Cette taxe est ainsi limitée à des véhicules de très haute puissance répondant à une demande spécifique d’un nombre de consommateurs limité.
Un sous-amendement du Rapporteur général a exclu de l’assiette de ce nouvel impôt les véhicules de collection ([127]), qui doivent, pour être reconnus comme tels, respecter trois critères cumulatifs précisés à l’article R. 311-1 du code de la route : avoir été construits ou immatriculés pour la première fois il y a au moins trente ans ; ne plus être produits ; être préservés sur le plan historique et maintenus dans leur état d’origine.
Le produit de la nouvelle taxe serait affecté à l’État pour un montant d’environ 30 millions d’euros.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Le Sénat a procédé à la suppression du présent article, à la suite de l’adoption d’un amendement du rapporteur général de sa commission des finances et malgré un avis défavorable du Gouvernement, au motif qu’il introduit une mesure qui « constitue un exemple de fiscalité strictement punitive mal calibrée puisqu’elle risque de pénaliser des passionnés d’automobiles qui n’étaient pas nécessairement redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), et non d’anciens redevables de cet impôt » ([128]).
III. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général est favorable au rétablissement du présent article. Il estime que dans un objectif de justice fiscale, il est important d’éviter, pour certains biens ostentatoires de richesse, toute réduction fiscale injustifiée sur des biens entrant dans l’assiette de l’ISF mais pas dans celle de l’IFI.
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Article 12 sexies
Durcissement du barème de la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules d’occasion
Le présent article durcit le barème de la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules d’occasion. Le Rapporteur général propose de rétablir le présent article qui a été supprimé au Sénat, moyennant quelques précisions de nature rédactionnelle.
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
La délivrance par les préfectures du CIV est soumise au paiement de plusieurs taxes, droits, ainsi que d’une redevance d’acheminement. Parmi ces taxes, il convient de citer notamment :
– la taxe régionale sur les CIV (articles 1599 quindecies et suivants du CGI) : il s’agit d’une taxe proportionnelle dont le taux unitaire par cheval-vapeur (CV) est déterminé par le conseil régional ; le taux de la taxe varie actuellement en France métropolitaine de 27 euros pour la Corse à 51,20 euros pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ; pour certaines situations, une réduction de la taxe est accordée, notamment pour les véhicules propres propulsés à l’énergie électrique, au gaz naturel pour véhicules, au gaz de pétrole liquéfié ou encore au super-éthanol E 85 (exonération en totalité ou à concurrence de la moitié de la taxe par décision du conseil régional) ;
– la taxe additionnelle à la taxe régionale lors des immatriculations postérieures à la première immatriculation sur les voitures les plus polluantes (article 1010 bis du CGI) : pour les véhicules mis en circulation à partir du 1er juin 2004, une taxe additionnelle est perçue lors de l’immatriculation postérieure à la première immatriculation d’une voiture particulière ; elle se calcule en fonction du taux d’émissions, soit le nombre de grammes de CO2 émis par kilomètre, pour les véhicules qui ont fait l’objet d’une réception communautaire et en fonction de la puissance fiscale pour les véhicules qui n’ont pas fait l’objet d’une telle réception (2 euros par gramme de CO2 au-dessus de 200 grammes de taux d’émissions ; 4 euros au-dessus de 250 grammes) ;
– la taxe additionnelle à la taxe régionale lors de la première immatriculation sur les voitures les plus polluantes (article 1011 bis du CGI), dénommée malus automobile : une taxe additionnelle est perçue lors de la première immatriculation d’une voiture particulière ; elle se calcule en fonction du taux d’émissions pour les véhicules qui ont fait l’objet d’une réception communautaire et en fonction de la puissance fiscale pour les véhicules qui n’ont pas fait l’objet d’une telle réception (de 50 euros pour les véhicules ayant un taux d’émissions de 127 grammes par kilomètre à 10 000 euros pour ceux ayant un taux d’émissions de plus de 191 grammes par kilomètre ([129])).
La taxe additionnelle prévue à l’article 1011 bis du CGI ne concerne que les voitures neuves (première immatriculation) et fait l’objet d’une revalorisation par l’article 24 du présent projet de loi. Inversement, la taxe additionnelle prévue à l’article 1010 bis du CGI ne concerne que les voitures d’occasion (immatriculation postérieure à la première immatriculation) et n’a pas fait l’objet d’une revalorisation depuis la création de la taxe.
Le présent article, adopté à l’initiative du Rapporteur général avec un avis favorable du Gouvernement, revalorise le barème de la taxe additionnelle ([130]). Il propose :
– d’asseoir la taxe uniquement sur la puissance fiscale du véhicule ;
– de faire évoluer les tarifs de manière modérée pour les véhicules de tourisme dont la puissance est comprise entre 10 et 14 CV fiscaux ;
– d’instituer une taxe plus importante pour les véhicules dont la puissance fiscale est supérieure ou égale à 15 CV qui devront s’acquitter d’une taxe de 1 000 euros lors de l’immatriculation du véhicule contre seulement 300 euros actuellement.
Le présent article permet de créer un véritable signal visant à inciter les automobilistes à choisir des véhicules moins puissants pour une mobilité plus sobre en énergie. L’objectif de ce durcissement du barème de la taxe est de taxer davantage des véhicules très puissants qui échappent lors de leur revente au malus automobile, en particulier des véhicules hybrides rechargeables qui émettent beaucoup de dioxyde de carbone lorsqu’ils ne roulent pas en mode électronique.
Par ailleurs, le présent article prévoit que la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules d’occasion n’est pas due :
– sur les certificats d’immatriculation des véhicules immatriculés dans le genre « Véhicule automoteur spécialisé » ou voiture particulière carrosserie « Handicap » ;
– sur les certificats d’immatriculation des véhicules acquis par une personne titulaire de la carte « mobilité inclusion » portant la mention « invalidité » mentionnée à l’article L. 241-3 du code de l’action sociale et des familles ou par une personne dont au moins un enfant mineur ou à charge, et du même foyer fiscal, est titulaire de cette carte.
Il s’agit de deux exceptions d’ordre social qui sont déjà appliquées pour le malus automobile applicable aux voitures particulières les plus polluantes prévu à l’article 1011 bis du CGI.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
Le Sénat a procédé à la suppression du présent article, à la suite de l’adoption d’un amendement du rapporteur général de la commission des finances et malgré un avis défavorable du Gouvernement, au motif qu’il introduit une mesure dont les informations indispensables sur son impact (rendement, nombre de véhicules concernés, etc.) n’ont pas été transmises ([131]).
III. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général est favorable au rétablissement du présent article. Il estime nécessaire de revaloriser la présente taxe afin d’inciter également les acheteurs de véhicules d’occasion – et non pas uniquement ceux de véhicules neufs – à effectuer des choix cohérents avec les objectifs de lutte contre la pollution de l’air et les émissions de gaz à effet de serre.
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Article 14
Suppression de l’encadrement de la déductibilité des charges financières afférentes à l’acquisition de titres de participation
I. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
Le présent article porte sur le dispositif encadrant les modalités de déductibilité des charges financières afférentes à l’acquisition, par une société établie en France, de titres de participation, prévu au IX de l’article 209 du CGI. Aux termes de ce paragraphe IX, ces charges sont déductibles si la gestion effective des titres est assurée par la société française qui en fait l’acquisition ou par une société qui lui est liée, si cette dernière est également établie en France. À défaut, elles sont réintégrées dans l’assiette imposable à l’IS.
Dans sa rédaction initiale, l’article prévoyait la suppression de l’ensemble du dispositif, en raison du renforcement substantiel, notamment depuis 2011, des outils d’encadrement de la déductibilité des charges financières par les sociétés. Le droit fiscal français compte, en effet, pas moins d’une demi-douzaine de dispositifs destinés à lutter contre certaines pratiques d’optimisation reposant sur les charges financières : encadrement de la déductibilité des intérêts d’emprunt, plafonnement de la déductibilité intégrale des charges financières nettes, outil de lutte contre les dispositifs hybrides, etc.
L’un des autres motifs avancés au soutien de cette suppression résidait dans une mise en compatibilité préventive avec le droit de l’Union européenne, eu égard à la limitation de la dispense de réintégration des charges financières au bénéfice imposable aux seules hypothèses où la gestion effective des titres est assurée par des sociétés françaises.
Lors de l’examen de cet article en première lecture, notre Assemblée a néanmoins considéré que l’outil prévu au IX de l’article 209 du CGI, s’il était désormais partiellement couvert par d’autres dispositifs introduits après 2011, n’en revêtait pas moins une certaine utilité et permettait de lutter contre des schémas non appréhendés par ces autres dispositifs.
En conséquence, elle a adopté un amendement présenté par notre collègue Émilie Cariou ayant fait l’objet d’un avis de sagesse de la part de la commission et du Gouvernement, procédant à une réécriture du présent article pour maintenir l’outil de lutte contre l’optimisation fiscale tout en le faisant évoluer au regard du droit européen. Le dispositif de l’amendement consistait, pour l’application du IX de l’article 209, à assimiler à une société établie en France toute société dont le siège se situe dans un État membre de l’Union européenne ou dans un État partie à l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en matière fiscale, si cette société est soumise à un impôt équivalent à l’IS français.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement ayant reçu un avis favorable de la commission des finances et apportant une précision au dispositif résultant des travaux de notre Assemblée, afin d’y supprimer la condition tenant à l’assujettissement de la société européenne à l’IS ou un impôt équivalent.
Dans la mesure où, pour les sociétés établies en France liées à la société ayant acquis les titres, aucune condition semblable n’est requise, le fait de l’exiger pour les seules sociétés étrangères aurait présenté un risque d’incompatibilité avec le droit européen.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
La modification proposée par le Gouvernement et adoptée par le Sénat est opportune en ce qu’elle garantit la pérennité du maintien souhaité par notre Assemblée d’un outil utile contre l’optimisation fiscale.
Le Rapporteur général propose donc d’adopter cet article sans modification.
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Article 15 bis (nouveau)
Suppression, au moment du divorce, de la taxation de l’attribution
d’un bien propre de l’un des époux à l’autre époux en paiement
d’une prestation compensatoire en capital
I. Les dispositions adoptées par le sénat
Le présent article a été inséré au Sénat par l’adoption d’un amendement de M. François Pillet ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, la commission s’en remettant à l’avis de celui-ci.
Il vise à mettre fin, au moment du divorce, à la taxation au titre des plus-values immobilières de l’attribution d’un bien immobilier de l’un des époux à l’autre époux, en paiement d’une prestation compensatoire en capital.
L’administration considérerait que cette attribution constitue une cession à titre onéreux, constituant le fait générateur de l’imposition de la plus-value immobilière.
II. la position du Rapporteur général
Le Rapporteur général propose de supprimer cet article, qui risque d’introduire une rupture d’égalité entre les personnes divorçant qui décident de vendre leur bien et celles qui feraient usage de la possibilité ouverte par le présent article.
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Article 15 ter (nouveau)
Adaptation du régime fiscal des paris hippique, sportif
et sur les jeux de cercles en ligne
Le présent article adapte les prélèvements fiscaux et sociaux sur les paris hippiques, les paris sportifs et les jeux de cercles en ligne (le poker) en basant l’assiette des prélèvements fiscaux et sociaux applicables non plus sur les sommes engagées par les parieurs mais sur le produit brut des jeux (PBJ). Le Rapporteur général propose la suppression du présent article.
I. Les dispositions adoptées par le sénat
Le présent article, adopté par le Sénat à l’initiative de Mme Anne-Catherine Loisier (UC) avec un avis défavorable du Gouvernement, modifie les règles d’assiette concernant les prélèvements fiscaux et sociaux sur les paris hippiques, les paris sportifs et les jeux de cercles en ligne (poker).
Les paris hippiques mutuels en dur, opérés en droit exclusif par le Pari mutuel urbain (PMU), et les paris hippiques en ligne, ouverts à la concurrence, font l’objet d’un prélèvement fiscal assis sur les mises (montant brut des sommes engagées par les joueurs) au taux de 5,7 % (article 302 bis ZG du CGI) et d’un prélèvement social au taux de 1,8 % (article L. 137-20 du code de la sécurité sociale).
Les paris sportifs font l’objet d’un prélèvement fiscal de 5,7 % des sommes engagées au titre des paris (article 302 bis ZK du CGI) et d’un prélèvement social de 1,8 % (article L. 137-21 du code de la sécurité sociale). Ils font également l’objet d’un prélèvement fiscal complémentaire de 1,8 % au profit du Centre national pour le développement du sport (CNDS), assis sur les sommes engagées par les parieurs (article 1609 tricies du CGI)
La fiscalité sur les jeux de cercles en ligne (poker) résulte des dispositions fiscales introduites par la loi relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne et codifiées à l’article 302 bis ZI du CGI ([132]). Elle est composée de prélèvements assis sur les mises avec un taux faible de 2 % en cumulant les prélèvements fiscaux et sociaux (articles 302 bis ZK du CGI et L. 137-22 du code de la sécurité sociale). Ce taux faible est à comparer au taux important de retour aux joueurs (TRJ), supérieur à 95 % pour les jeux de cercle en ligne, et dont la différence avec les mises définit le PBJ.
L’ensemble de ces prélèvements ont, en effet, pour point commun d’être assis sur les mises, c’est-à-dire le montant des sommes engagées par les joueurs et parieurs, les gains réinvestis par ces derniers sous forme de nouvelles mises étant également assujettis à ces prélèvements (article 302 bis ZJ du CGI et article L. 137-23 du code de la sécurité sociale).
De nombreux rapports ([133]) ont engagé une réflexion sur un changement d’assiette fiscale afin de substituer le PBJ aux mises des parieurs ou des joueurs : le PBJ est défini comme étant le revenu de l’opérateur. Il se compose des déductions opérées par l’opérateur sur les sommes engagées par les parieurs, diminuées de toutes les sommes données aux parieurs (et dépend donc du taux de retour aux joueurs).
Ces rapports soulignaient les inconvénients d’une assiette sur les mises, notamment le fait qu’elle conduise, dans certaines configurations, à l’imposition des pertes des opérateurs, ou encore qu’elle favorise un régime fiscal élevé, en particulier comparativement à ceux pratiqués dans les autres pays européens, sans tenir compte des efforts des opérateurs en matière de TRJ. Ainsi, la proposition n° 7 du rapport de nos collègues Régis Juanico et Jacques Myard préconisait déjà de « substituer le produit brut des jeux aux mises comme assiette de la fiscalité sur le poker en ligne et [de] mettre à l’étude cette substitution pour l’ensemble des prélèvements portant sur les jeux d’argent et de hasard » ([134]).
Le présent article met en œuvre cette proposition pour l’ensemble des prélèvements fiscaux et sociaux pour les paris hippiques, les paris sportifs et le poker.
II. La position du Rapporteur général
Le Rapporteur général ne dispose pas des éléments lui permettant d’effectuer une étude d’impact suffisamment solide pour s’assurer des conséquences d’un tel revirement dans les temps impartis. En effet, les modifications proposées sont substantielles, puisque l’ensemble des prélèvements serait assis non plus sur les mises, mais sur le produit brut des jeux, c’est-à-dire après soustraction des retours faits aux joueurs.
C’est pourquoi il propose, en l’état des débats, de supprimer le présent article, tout en appelant de ces vœux la mise en œuvre d’une véritable réflexion sur le sujet au cours des prochains projets de loi de finances.
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Article 15 quater (nouveau)
Baisse du taux de 2,5 % à 1,10 % du droit d’enregistrement sur les partages de biens meubles et immeubles entre copropriétaires, cohéritiers et coassociés
I. Les dispositions adoptées par le sénat
Le présent article a été inséré par l’adoption d’un amendement de M. Jean-Yves Leconte (groupe socialiste et républicain) ayant reçu un avis de sagesse de la commission et un avis défavorable du Gouvernement.
Il vise à baisser de 2,5 à 1,1 % le droit de partage des biens meubles et immeubles entre copropriétaires, cohéritiers et coassociés.
Selon l’exposé sommaire de l’article, le droit de partage a été fortement augmenté par la première loi de finances rectificative pour 2011 ([135]), le taux étant passé de 1,1 % à 2,5 %.
Cette somme représente une somme conséquente à débourser puisque l’assiette est la valeur totale du bien soumis à droit de partage. Opportunément, l’exposé sommaire évoque en particulier les cas de divorce.
II. la position du Rapporteur général
Le Rapporteur général considère que l’article adopté au Sénat est trop large, dans la mesure où il abaisse le droit de partage quelles que soient les circonstances.
Toutefois, une mesure spécifique mériterait d’être trouvée dans le cas particulier des divorces pour le partage des biens immobiliers.
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Article 15 quinquies (nouveau)
Extension des exonérations de taxes et de droit de timbre prévues
à l’article L. 311-18 du CESEDA à la délivrance de duplicatas
I. Les dispositions adoptées par le sénat
Le présent article a été inséré par un amendement de M. Jean-Yves Leconte et de membres du groupe socialiste et républicain, avec l’avis favorable du Gouvernement. Il a pour objet d’étendre les exonérations de taxes et de droit de timbre prévues à l’article L. 311-18 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) à la délivrance de duplicatas.
A. l’état du droit
L’article L. 311-18 du CESEDA prévoit l’exonération de taxes et de droit de timbre au titre de la délivrance et du renouvellement de titre de séjours aux étrangers.
Les titres visés sont la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », délivrée ou renouvelée à un étranger :
– ayant subi des violences familiales ou conjugales ;
– en cas de violence commise après l’arrivée en France du conjoint étranger ;
– ayant déposé plainte contre une personne qu’il accuse d’avoir commis à son encontre les infractions relevant de la traite des êtres humains ([136]) ou du proxénétisme ([137]), ou ayant témoigné dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions ;
– bénéficiant d’une ordonnance de protection ([138]), en raison de violences exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin ;
– ayant déposé plainte pour une infraction commise par le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ([139]) ;
– ou ayant subi des violences conjugales de la part de son conjoint et que la communauté de vie a été rompue, ou en cas de violence commise après l’arrivée en France du conjoint étranger, dans le cadre d’un titre de séjour accordé au titre du regroupement familial.
Les taxes visées sont prévues aux articles L. 311-13 et L. 311-14 du CESEDA et le droit timbre d’un montant de 19 euros à l’article L. 311-16 du même code.
B. le dispositif proposé
Le présent article vise à étendre les cas d’exonération des taxes et du droit de timbre précités à la délivrance de duplicatas des titres de séjour mentionnés supra.
Le coût de la délivrance du duplicata varie selon le type de titre de séjour. Le présent article devrait entraîner une perte de recettes pour le budget général de l’État et l’Office français de l’immigration et de l’intégration. Le Gouvernement a accepté de lever le gage de l’amendement en séance.
II. la position du rapporteur général
Le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
*
* *
A. – Dispositions relatives aux collectivités territoriales
Article 16
Fixation pour 2018 de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et des allocations compensatrices d’exonérations d’impôts directs locaux (IDL)
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale en premiÈre lecture
Dans sa rédaction initiale, le présent article fixe, d’une part, le montant pour 2018 de la dotation globale de fonctionnement (DGF) à 27,050 milliards d’euros, soit une baisse de 3,8 milliards d’euros par rapport au montant voté pour 2017. Cet écart s’explique essentiellement par la suppression de la DGF des régions (3,9 milliards d’euros en 2017), à laquelle est substituée une fraction de TVA. Hors cet effet, la DGF est stable par rapport à la DGF 2017.
Le présent article ajuste également la base de calcul de la fraction de TVA transférée aux régions. Les crédits du fonds de soutien exceptionnel à destination des régions ne sont plus prises compte.
Il détermine, enfin, la minoration de certaines compensations d’exonération de fiscalité directe locale, dites « variables d’ajustement », destinée à gager 323 millions d’euros d’augmentation des transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales, afin de respecter le plafond de l’enveloppe normée prévu par l’article 13 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Selon le projet de loi initial, le besoin de financement à gager sur les variables pour respecter l’enveloppe normée était le suivant :
BESOIN DE FINANCEMENT COUVERT
PAR LA MINORATION DES VARIABLES D’AJUSTEMENT
(en millions d’euros)
Évolutions tendancielles de la mission Relations avec les collectivités territoriales (RCT) |
263 |
Moitié de la hausse de la péréquation verticale au sein de la DGF |
95 |
Évolution spontanée des compensations d’exonération, soit, pour l’essentiel, prorogation et élargissement de l’exonération de taxe d’habitation pour les personnes à revenus modestes (compensation en 2018 de l’exonération en 2017) |
– 35 |
Total |
323 |
Source : évaluation préalable du projet d’article.
Pour couvrir ce besoin de financement, le présent article propose pour la première fois la minoration de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) du bloc communal.
À l’initiative du Rapporteur général et avec l’avis favorable du Gouvernement, l’Assemblée nationale a adopté un amendement de la commission tirant les conséquences au présent article de l’adoption du nouvel article 3 ter du présent projet de loi de finances, compte tenu :
– des informations disponibles au moment de son adoption sur le coût de l’amendement n°I-1368 du Gouvernement, soit un coût pour l’État de 60 millions d’euros au titre de la compensation, en 2018, du maintien de l’exonération totale de TH pour des personnes entrant pour la première fois dans le champ de la « sortie en sifflet » prévue par l’article 75 de la loi de finances pour 2016 ([140]) ;
– de la volonté de réduire la minoration de la DCRTP du bloc communal, dans des proportions destinées à évoluer encore d’ici la fin de la navette parlementaire ;
– de ne pas modifier pour autant le total des prélèvements sur recettes.
L’amendement adopté proposait donc de réduire de 90 millions d’euros le montant de la DGF afin de compenser, à hauteur de 60 millions d’euros, la perte de recettes résultant de l’article 3 ter du présent projet de loi de finances et de réduire de 30 millions d’euros la minoration de la DCRTP du bloc communal, ainsi ramenée de 200 à 170 millions d’euros.
Cette baisse de la DGF était également envisagée, par plusieurs autres amendements déposés par des députés de différents groupes, afin de réduire le besoin de financement à gager par les variables d’ajustement. Cependant, la hausse de 95 millions d’euros du montant global de la DGF provient uniquement de l’augmentation de la péréquation. Afin de maintenir cette augmentation, la dotation forfaitaire de certaines communes devra faire l’objet d’un écrêtement.
Par ailleurs, face à la volonté de l’ensemble des députés de revenir sur la minoration de la DCRTP communale, le ministre de l’action et des comptes publics s’est engagé en séance à ce que la minoration prévue initialement pour le bloc communal (pour un total de 200 millions d’euros) soit supprimée, à condition de trouver un gage.
À l’issue de la première lecture à l’Assemblée nationale, les taux de minoration des variables d’ajustement par rapport à la loi de finances pour 2017 ([141]) sont donc provisoirement les suivants :
ÉVOLUTION DES VARIABLES D’AJUSTEMENT PRÉVUE PAR LA loi de finances
pour 2017 et le présent projet de loi de finances
(en millions d’euros)
Collectivités |
Dotations et compensations |
Montant |
Évolution par rapport à la LFI 2017 |
Taux d’évolution par rapport à la LFI 2017 |
Montant |
Taux d’évolution par rapport à la LFI 2017 |
|
LFI 2017 |
PLF 2018 |
PLF 2018 |
PLF 2018 |
Changements après 1ère lecture AN |
|||
Départements |
Dot² déjà minorée (depuis 2011) |
102,9 |
436 |
– 0,5 |
– 0,11 % |
|
|
Dot² |
333,6 |
|
|
||||
DCRTP |
1 306,9 |
1 303,4 |
– 3,5 |
– 0,27 % |
|
|
|
Total |
1 743,4 |
1 739,4 |
– 4 |
– 0,23 % |
|
|
|
Régions |
Dot² déjà minorée (depuis 2011) |
21,3 |
96,7 |
– 3,2 |
– 3,2 % |
|
|
Dot² |
78,6 |
|
|
||||
DCRTP |
617,6 |
578,8 |
– 38,8 |
– 6,3 % |
|
|
|
Total |
717,5 |
675,5 |
– 42 |
– 5,9 % |
|
|
|
Bloc communal |
AC minorées (« gelées » en 2018) |
56,8 |
55,2 |
– 1,6 |
– 2,8 % |
|
|
AC non minorées |
1 996,7 |
1 963,4 |
– 33,3 |
– 1,7 % |
2 023,4 |
– 1,3 % |
|
Total AC |
2 053,5 |
2 018,5 |
– 35 |
– 1,7 % |
2 048,5 |
– 0,2 % |
|
DUCSTP |
50,9 |
41,8 |
– 9,1 |
– 17,9 % |
|
|
|
FDPTP |
389,3 |
323,5 |
– 65,8 |
– 16,9 % |
|
|
|
Total bloc communal hors DCRTP |
2 493,7 |
2 383,9 |
– 109,8 |
– 4,4 % |
2 413,8 |
– 3,2 % |
|
DCRTP |
1 175 |
976,3 |
– 198,7 |
– 17 % |
1 006,3 |
– 14,4 % |
|
Total bloc communal avec DCRTP |
3 668,7 |
3 360,2 |
– 308,5 |
– 8,4 % |
3 420,1 |
– 6,8 % |
|
Ensemble |
6 129,6 |
5 775,1 |
– 354,5 |
– 5,8 % |
5 835 |
– 4,8 % |
Sources : loi de finances pour 2017, présent projet de loi de finances, direction du budget, commission des finances.
Enfin, à l’initiative du Rapporteur général, l’Assemblée nationale a adopté huit amendements rédactionnels.
II. Les modifications adoptÉes par le SÉnat
À l’initiative de son rapporteur général, la commission des finances ayant émis un avis favorable et le Gouvernement un avis défavorable, le Sénat a adopté un amendement visant à supprimer la minoration de 65,8 millions d’euros (–17 %) en 2018 des FDPTP qui bénéficient très majoritairement à des communes fragiles.
À l’initiative de MM. Arnaud Bazin (LR), Pascal Savoldelli (groupe communiste républicain citoyen et écologiste) et Jean-Claude Requier (RDSE), malgré l’avis défavorable de la commission des finances et du Gouvernement, le Sénat a adopté des amendements proposant de supprimer de la liste des variables d’ajustement minorées en 2018 la dotation pour transfert de compensations d’exonération de fiscalité directe locale (DTCE-FDL) et la DCRTP des départements.
Ces amendements sont particulièrement coûteux, puisqu’ils suppriment non seulement la minoration proposée pour 2018, mais aussi la reconduction de celle appliquée en 2017 et prévoient en réalité un retour aux montants de 2016.
Dans les mêmes conditions, le Sénat a adopté un amendement de M. Jean-François Rapin (LR), visant à supprimer la minoration de la DCRTP du bloc communal.
Lors de l’examen du présent article en séance publique au Sénat, le Gouvernement a confirmé qu’il recherchait une solution au problème posé par la minoration de la DCRTP du bloc communal et travaillait « sur différentes hypothèses, notamment tenir compte du niveau des recettes réelles de fonctionnement, de manière que l’on puisse préserver les collectivités ayant véritablement besoin d’une compensation de la perte liée à la réforme de la taxe professionnelle ». Il a souligné que « la DCRTP connaît un phénomène de concentration et que, pour un certain nombre d’intercommunalités et de communes qui enregistrent une dynamique économique ou industrielle et qui ont retrouvé des activités fortes depuis la réforme de la taxe professionnelle, l’attribution de cette dotation de compensation peut paraître moins justifiée, la fiscalité nouvelle depuis 2010 étant peut-être plus favorable ». « C’est la raison pour laquelle les services de Bercy travaillent actuellement à un amendement relatif à la DCRTP. Grâce à ces dispositions, les collectivités et les territoires fragiles garderaient le bénéfice de ce dispositif ; et, en même temps, on éviterait tout effet de surpéréquation en faveur de territoires qui, en définitive, auraient moins besoin de cette aide. »
Pour 11 des 481 EPCI qui perçoivent des crédits au titre de la DCRTP en 2017, la DCRTP représente plus de 20 % des recettes réelles de fonctionnement.
EPCI dont la DCRTP reprÉsente plus de 20 % des recettes rÉelles
de fonctionnement
(en euros)
Département |
EPCI |
DCRTP 2017 |
Population |
Recettes |
DCRTP/RRF |
59 |
CU de Dunkerque |
64 565 728 |
208 109 |
171 039 093 |
37,8 % |
68 |
CC du Centre du Haut-Rhin |
737 888 |
15 453 |
2 056 825 |
35,9 % |
59 |
CC Flandre Lys |
2 740 761 |
40 025 |
8 363 387 |
32,8 % |
57 |
CC Rives de Moselle |
4 912 103 |
51 896 |
16 337 173 |
30,1 % |
76 |
CA Caux Vallée de Seine |
13 026 773 |
78 766 |
50 270 550 |
25,9 % |
59 |
CA de la Porte du Hainaut |
18 943 121 |
160 522 |
76 344 210 |
24,8 % |
84 |
CC Rhône Lez Provence |
2 327 171 |
24 906 |
9 488 202 |
24,5 % |
40 |
CC du Seignanx |
1 684 118 |
27 571 |
7 128 874 |
23,6 % |
38 |
CC le Grésivaudan |
10 393 541 |
111 212 |
45 407 611 |
22,9 % |
76 |
CA Havraise (Co.D.A.H.) |
20 038 538 |
241 729 |
92 432 433 |
21,7 % |
44 |
CA de la Région Nazairienne et de l’Estuaire (Carene) |
8 537 778 |
134 975 |
41 621 738 |
20,5 % |
Source : DGFiP.
C’est également le cas de 6 des 1 828 communes qui perçoivent des crédits au titre de la DCRTP en 2017.
Département |
Commune |
DCRTP 2017 |
Population DGF |
Recettes |
DCRTP/RRF |
01 |
Magnieu |
237 721 |
501 |
363 549,68 |
65 % |
79 |
Doux |
89 409 |
244 |
377 827,34 |
24 % |
02 |
Mezy Moulins |
164 346 |
553 |
733 120,56 |
22 % |
16 |
Salles-de-Villefagnan |
90 080 |
375 |
422 723,76 |
21 % |
32 |
Lalanne Arque |
29 397 |
170 |
139 883,09 |
21 % |
57 |
Xouaxange |
103 484 |
318 |
529 509,45 |
20 % |
Source : DGFiP.
Enfin, malgré l’avis défavorable du Gouvernement, que la commission des finances avait interrogé, le Sénat a adopté un amendement de M. Georges Patient (La République en Marche) visant à substituer une fraction de TVA à la dotation générale de décentralisation (DGD) des régions ultra-marines de l’article 73 de la Constitution.
La commission des finances a rappelé qu’au regard de la DGF, les collectivités ultramarines font l’objet d’un traitement différencié, puisque le montant de DGF par habitant, entre 20 et 40 euros, est nettement inférieur à celui des régions de métropole (62 euros en moyenne). Le Gouvernement a toutefois indiqué que l’adoption de cet amendement pourrait créer un précédent pour d’autres collectivités en cours d’évolution vers une collectivité unique, ce qui n’était pas souhaité. Il a appelé à rechercher d’autres modalités pour la prise en compte des spécificités des territoires ultramarins.
III. la position du rapporteur gÉnÉral
Compte tenu des engagements du Gouvernement à trouver une solution au problème de la minoration de la DCRTP du bloc communal, le Rapporteur général réserve son avis. Du point d’équilibre qui sera trouvé et des précisions sur le chiffrage de l’article 3 ter dépend également la fixation du montant global de la DGF.
Sous réserve de ces modifications relatives à la DCRTP et à la DGF, le Rapporteur général propose de rétablir le texte adopté en première lecture par l’Assemblée nationale.
*
* *
Article 16 bis (nouveau)
Extension du FCTVA aux communes classées en « zones à surveiller »
en application du schéma régional de santé
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
À l’initiative de M. Dominique de Legge (LR), le Sénat a adopté, malgré l’avis défavorable du Gouvernement, un amendement visant à étendre l’éligibilité au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) à des dépenses pour le développement de maisons de santé, dans des communes classées en « zones à surveiller » en application du schéma régional de santé. La commission des finances a donné un avis favorable à l’amendement, sous réserve d’une évaluation de son impact budgétaire.
A. L’ÉligibilitÉ dÉrogatoire au FCTVA pour certaines maisons de santÉ
1. L’éligibilité au FCTVA est strictement encadrée
Le FCTVA est un prélèvement sur recettes de l’État (PSR) versé aux collectivités territoriales et à leurs groupements. Il est destiné à assurer une compensation de la charge de TVA qu’ils supportent sur leurs dépenses d’investissement : celles-ci n’étant pas assujetties à la TVA, elles ne peuvent pas bénéficier du droit à déduction. Le FCTVA constitue le principal dispositif de soutien de l’État à l’investissement public local, à hauteur de 5,5 milliards d’euros en 2017.
Il ne constitue pas un remboursement de la TVA, ce qui serait contraire à la directive du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA ([142]), mais une subvention d’aide à l’investissement des collectivités territoriales. Il est régi par les articles L. 1615–1 à L. 1615–13 du CGCT.
Six conditions cumulatives doivent être remplies pour bénéficier de ce dispositif :
– la dépense doit être réalisée par un bénéficiaire du fonds ;
– le bénéficiaire du fonds doit être propriétaire de l’équipement considéré, sauf dérogations particulières et dispositions applicables aux EPCI ;
– le bénéficiaire doit être compétent pour agir dans le domaine concerné ;
– la dépense doit être grevée de TVA ;
– elle ne doit pas avoir été exposée pour les besoins d’une activité soumise même partiellement à la TVA ;
– enfin, l’équipement ne doit pas être cédé à un tiers non bénéficiaire du fonds, ni être confié à un tiers sauf dans les cas de dérogations prévus par la loi.
Le taux de compensation, forfaitaire est fixé à 16,404 % pour les dépenses éligibles réalisées à compter du 1er janvier 2015.
Le versement du FCTVA s’effectue selon trois régimes de versement distincts. Le régime de droit commun, correspondant à un versement intervenant deux ans après la réalisation de la dépense, ne représente plus que 25 % des demandes. 61 % des demandes sont éligibles à un versement intervenant un an après et 13 % à un versement en année N.
2. Une dérogation est prévue depuis 2011 pour des maisons de santé
a. Un instrument de lutte contre la désertification médicale
La loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux ([143]) a introduit, à l’article L. 1511–8 du CGCT la faculté, pour les collectivités et leurs groupements d’attribuer différentes aides dans le cadre de leur action contre la désertification médicale.
L’article 52 de la loi de finances pour 2011 ([144]) a étendu, à compter de 2011, l’éligibilité au FCTVA aux investissements immobiliers réalisés par les communes et leurs groupements dans les zones en déficit en matière d’offre de soins, les zones de revitalisation rurale ou les territoires ruraux de développement prioritaire et destinés à l’installation des professionnels de santé ou à l’action sanitaire et sociale.
Le dispositif de soutien, au moyen du FCTVA, aux investissements immobiliers des collectivités territoriales destinés à certaines maisons de santé est resté concentré sur les zones les plus exposées aux problèmes liés à la démographie médicale, tant pour des raisons budgétaires que pour des raisons liées au droit de la concurrence. Il s’agit ici d’une dérogation au principe prévu par l’article L. 1615-7 du CGCT selon lequel la dépense éligible au FCTVA ne doit pas être relative à un bien cédé ou confié à un tiers non bénéficiaire du fonds.
b. Trois catégories de zones sont concernées
Cette dérogation est permise dans trois catégories de zones.
Les zones en déficit en matière d’offre de soins sont prévues par l’article L. 1434-4 du code de la santé publique. Elles sont déterminées par arrêté du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS). La carte de ces zones a été modifiée par l’arrêté du 13 novembre 2017 relatif à la méthodologie applicable à la profession de médecin pour la détermination des zones prévues au 1° de l’article L. 1434‑4 du code de la santé publique.
La nouvelle méthodologie s’appuie sur un indicateur développé par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) : l’indicateur d’accessibilité potentielle localisée (APL) au médecin, qui s’exprime en nombre de consultations accessibles par an par habitant. Cet indicateur recouvre trois dimensions : l’activité de chaque praticien (mesurée par le nombre de consultations ou visites effectuées par le praticien) ; le temps d’accès au praticien ; la consommation de soins des habitants par classe d’âge (pour tenir compte des besoins différenciés en offre de soins).
Chaque région est constituée de « territoires de vie-santé » qui constituent la maille territoriale du zonage et regroupent plusieurs communes. L’indicateur APL est calculé au niveau du territoire de vie-santé comme la moyenne, pondérée par la population de chaque commune, des indicateurs APL des communes composant cette unité territoriale. Dans la détermination de son zonage, chaque ARS bénéficie toutefois d’une latitude lui permettant de tenir compte de dimensions non intégrées dans l’indicateur, comme la dimension sociale.
En moyenne, un habitant bénéficie de 3,8 consultations par an. C’est le cas dans 9 000 communes environ. Selon la nouvelle méthodologie, une offre médicale est insuffisante dès lors qu’elle est inférieure à 2,5 consultations par an par habitant. Le niveau de l’offre de soins ne permet pas de répondre de manière satisfaisante aux besoins de la population lorsque l’indicateur APL est inférieur à 4 consultations par an par habitant.
Les ZRR sont définies au II de l’article 1465 A du CGI et correspondent aux communes membres d’un EPCI qui satisfait aux conditions suivantes :
– sa densité démographique n’excède pas la densité médiane des EPCI métropolitain ;
– son revenu fiscal par unité de consommation médian n’excède pas la médiane des revenus médians des EPCI métropolitains.
Le zonage résultant de ces critères est entré en vigueur le 1er juillet 2017. Auparavant, les critères d’éligibilité étaient appréciés au niveau des communes et reposaient sur un déclin de la population générale, un déclin de la population active et une forte proportion d’emplois agricole.
Afin d’éviter une sortie brutale de certaines communes du fait du nouveau zonage, le bénéfice du dispositif d’exonérations a été maintenu jusqu’au 30 juin 2020 pour les communes de montagne n’étant plus incluses dans une ZRR au 1er juillet 2017 ; en application de l’article 7 de la loi du 28 décembre 2016 dite « Montagne II » ([145]).
L’article 10 sexies du présent projet de loi de finances, adopté à l’initiative de notre collègue Émilie Cariou, prévoit un mécanisme similaire pour les autres communes sorties du zonage, jusqu’au 31 décembre 2019, ainsi que la remise d’un rapport avant le 1er juin 2018 sur les dispositifs susceptibles d’accompagner les communes sortant du dispositif d’exonérations. Un amendement adopté par le Sénat a prolongé ce mécanisme jusqu’au 30 juin 2020.
13 845 communes métropolitaines et 45 communes d’outre-mer sont classées en ZRR, auxquelles doivent être ajoutées les 1 011 communes de montagne bénéficiant du dispositif transitoire prévu par la loi « Montagne II ».
Les TRDP sont des zones éligibles aux programmes d’aménagement concerté des territoires ruraux des contrats de plan État-régions, ainsi que des zones rurales d’intervention prioritaire pour l’attribution des primes à l’amélioration de l’habitat.
La délimitation des territoires ruraux de développement prioritaire figure à l’annexe du décret définissant les territoires ruraux de développement prioritaires ([146]). Elle recoupe largement celle des ZRR.
B. Le dispositif proposÉ par le SÉnat
Le présent article complète le quatrième alinéa du I de l’article L. 1511-8 du CGCT, pour ajouter les « zones à surveiller en application du schéma régional de santé » à la liste des zones dans lesquelles les investissements immobiliers réalisés par les communes et leurs groupements, pour les maisons de santé, sont éligibles au FCTVA.
La loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé ([147]) a réformé le projet régional de santé (PRS), désormais constitué, à compter du 1er janvier 2018, d’un cadre d’orientation stratégique (COS), d’un schéma régional de santé et d’un programme régional relatif à l’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS).
Le schéma régional de santé (SRS) est établi pour cinq ans, sur la base d’une évaluation des besoins sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Il détermine pour l’ensemble de l’offre de soins et de services de santé, y compris en matière de prévention, de promotion de la santé et d’accompagnement médico-social, des prévisions d’évolution et des objectifs opérationnels.
Conformément aux articles R. 1434-4 et suivants du code de la santé publique, le schéma régional de santé est élaboré par l’agence régionale de santé sur le fondement d’une évaluation des besoins. Le diagnostic porte sur la continuité des parcours de santé, l’identification d’éventuels points de rupture au sein de ces parcours et les difficultés de coordination entre professionnels, établissements ou services.
Le schéma tient compte notamment des exigences d’accessibilité, de qualité, de sécurité, de permanence, de continuité des prises en charge. Il comporte des objectifs visant à améliorer l’organisation des parcours de santé en favorisant la coordination et la coopération des acteurs de l’offre sanitaire, sociale et médico-sociale, et à favoriser l’accès aux soins. Il mobilise notamment des mesures d’aide à l’installation des professionnels de santé et des outils d’appui et de coordination des acteurs du soin et des accompagnements sociaux et médico-sociaux ainsi que des investissements immobiliers et des équipements.
Les « zones à surveiller » mentionnées par le présent article ne sont toutefois pas définies explicitement, ni par l’article L. 1434-4 ni par l’article R. 1434-4.
II. la position du Rapporteur général
Le Gouvernement a indiqué en séance au Sénat que, d’une part, l’éligibilité au FCTVA était déjà prévue sur un zonage très large qui couvrait une large partie des zones à surveiller et, d’autre part, qu’il était difficile d’estimer le coût de cet article, puisqu’il dépendait des décisions d’investissement des collectivités territoriales et de leurs groupements.
Par ailleurs, le Gouvernement a annoncé le 13 octobre 2017 un plan de lutte contre les déserts médicaux, autour de quatre priorités :
– assurer une présence médicale et soignante accrue dans les territoires : aides à l’installation et à l’exercice des médecins dans les zones en tension, nouveau zonage des te