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N° 1055

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juin 2018

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2017 (n° 980),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur général

Député

 

——

 

 

ANNEXE N° 24
 

 

ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

 

 

 

 

 

Rapporteure spéciale : Mme Catherine OSSON

 

Députée

____


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SOMMAIRE

___

Pages

I. Une exÉcution 2017 satisfaisante

A. Des dépenses de personnel dynamiques, conformÉment aux engagements pris

B. Une gestion perfectible des crÉdits

C. Des dépenses fiscales maÎtrisées

D. Un dispositif de performance qui pourrait être amÉliorÉ pour une meilleure information du Parlement

II. Points d’attention relevés au cours des travaux menés dans le cadre du printemps de l’évaluation

A. Le dédoublement des classes en REP+, une mesure nécessaire mais insuffisamment évaluée

B. « devoirs faits », un dispositif perfectible

C. L’école inclusive, une prioritÉ affirmÉe

D. des aides aDMinistratives aux directeurs d’école indispensables

Travaux de la commission

personnes AUDITIONNéES par lA rapporteurE spécialE


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La mission Enseignement scolaire est une mission interministérielle qui regroupe les crédits relevant de deux ministères : pour l’essentiel, du ministère de l’éducation nationale, et, pour une part résiduelle, de celui de l’agriculture et de l’alimentation.

Elle représente le premier poste de dépenses de l’État après la mission Remboursements et dégrèvements avec 70,3 milliards d’euros consommés en 2017. En effet, elle représente 21,7 % des crédits de paiement du budget général en loi de finance initiale 2017 contre 21,4 % en 2012 ([1]). Avec 1 022 853 ETPT, les emplois de la mission représentent 52,6 % (50 % en 2012) du total du plafond d’emploi autorisé par la LFI 2017 pour le budget de l’État et les budgets annexes.

La mission Enseignement scolaire comporte 6 programmes. Les quatre programmes dédiés à l’enseignement stricto sensu ont représenté en LFI 62,8 milliards d’euros de dépenses, soit 90 % des moyens alloués à la mission. Il s’agit des programmes 140 Enseignement scolaire public du premier degré, 141 Enseignement scolaire public du second degré, 139 Enseignement privé des premier et second degrés et 143 Enseignement technique agricole (public et privé confondus).

Les deux autres programmes, à vocation transverse (7,35 milliards d’euros) concernent les aspects logistiques et stratégiques de la mission. Il s’agit des programmes 230 Vie de l’élève, qui vise à améliorer les conditions de scolarité des élèves et 214 Soutien de la politique de l’éducation nationale, qui regroupe l’ensemble des fonctions support et l’appui métier.

Les dépenses de personnel ont représenté en 2017, 92,7 % des dépenses totales de la mission (92,4 % en 2016), ce qui laisse relativement peu de marges de manœuvre aux gestionnaires et ce, d’autant que les dépenses, hors personnels, sont, pour beaucoup d’entre elles, obligatoires (bourses d’enseignement, par exemple).

Le principal enjeu de gestion de la mission est constitué ainsi par le pilotage de la masse salariale et la gestion des ressources humaines des ministères.

 

 

 

 

 

Exécution de la mission enseignement scolaire

(en millions d’euros)

 

Exécution 2016

LFI 2017 (1)

Exécution 2017

Évolution 2016-2017

Exécution/
prévision

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 140 Enseignement scolaire public du premier degré

20 443,8

20 443,4

21 525,8

21 525,8

21 573,8

21 573,7

6 %

6 %

0,2%

0,2%

Programme 141 Enseignement scolaire public du second degré

31 467,0

31 466,2

32 463,0

32 463,0

32 436,8

32 436,3

3 %

3 %

– 0,1%

– 0,1%

Programme 230 Vie de l’élève

4 890,0

4 905,6

5 077,0

4 999,9

5 169,1

5 167,6

6 %

5 %

2 %

3%

Programme 139 Enseignement privé du premier et du second degrés

7 255,4

7 255,4

7 439,1

7 439,1

7 477,4

7 477,1

3%

3%

0,5%

0,5%

Programme 214 Soutien de la politique de l’Éducation nationale

2 288,4

2 287,7

2  335,6

2 352,6

2 229,0

2 277,6

-3%

0%

– 4,5%

– 3%

Programme 143 Enseignement technique agricole

1 370,2

1 370,3

1 417,7

1 417,7

1 396,4

1 396,4

2%

2%

– 2%

– 2%

Total

67 714,8

67 728,6

70 258,2

70 198,1

70 282,5

70 328,7

4 %

4 %

0%

0,2%

Source : commission des finances, d’après les données du rapport annuel de performances.

(1) y compris prévisions de fonds de concours et attributions de produits.

I.   Une exÉcution 2017 satisfaisante

A.   Des dépenses de personnel dynamiques, conformÉment aux engagements pris

Le plafond d’emplois de la mission a été fixé 1 022 853 ETPT pour 2017. 1 006 039 ETPT ont été consommés.

La sous-réalisation du plafond d’emploi s‘établit donc à 16 814 ETPT. Elle concerne principalement le programme 141 Enseignement scolaire public du second degré dont 9 654 emplois n’ont pas été consommés, ce qui correspond à un écart de 2,1 % avec le plafond du programme. La sous-consommation du plafond d’emplois est principalement liée à des facteurs techniques et des effets frictionnels dans la gestion des emplois. Cette sous-consommation est plus forte qu’en 2016 où elle s’établissait à 12 702 ETP du fait du report en année pleine des moindres créations d’emplois de la rentrée 2016, la montée en puissance progressive de la transformation des contrats aidés en Accompagnants aux élèves en situation de handicap (AESH) prévue à la rentrée 2017 et une sous-consommation des emplois dédiés au dispositif de l’apprentissage que ce soit le recours aux étudiants apprentis professeurs ou des apprentis administratifs.

L’année 2017 a marqué la fin du programme de création d’emplois du Ministère de l’Éducation nationale sur la période 2012-2017 dont l’objectif était de créer 54 000 emplois. Depuis 2012, le plafond d’emploi de la mission a traduit ces orientations et progressé de 53 270 équivalents temps plein travaillé soit une hausse de 5,5 %. En revanche, le nombre d’emplois effectivement consommés a augmenté de 45 635 ce qui correspond à une hausse de 4,75 %.

ÉVOLUTION DU PLAFOND D’EMPLOIS DEPUIS 2012

en ETPT

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2017/2012 en ETPT

2017/2012 en %

Plafond d’emplois (LFI)

969 583

970 031

979 716

989 546

1 002 421

1 022 853

53 270

5,5 %

Variation N-1 – N en ETPT

 

448

9 685

9 830

12 875

20 432

 

 

Variation N-1 – N en %

 

0,05 %

1 %

1 %

1,3 %

2 %

 

 

Exécution du plafond d’emplois

960 404

959 072

966 932

977 085

989 719

1 006 039

45 635

4,75 %

Variation N-1 – N en ETPT

 

– 1 132

7 860

10 153

12 634

16 320

 

 

Variation N-1 – N en %

 

– 0,1 %

0,8 %

1 %

1,3 %

1,6 %

 

 

Écart plafond/exécution

– 9 179

– 10 959

– 12 784

– 12 461

– 12 702

– 16 814

– 7 635

83,2 %

Variation N-1 – N en ETPT

 

– 1 780

– 1 825

323

– 241

– 4 112

 

 

Source : Cour des comptes, Note d’exécution de l’analyse budgétaire, Enseignement scolaire, 2017.

La rapporteure note que le Ministre a pris en compte cette problématique de la sous-consommation des emplois pour la programmation budgétaire 2018. Elle sera attentive aux résultats du Gouvernement sur ce point l’année prochaine.

La masse salariale a progressé de 4,5 % soit 1,94 milliard d’euros entre 2016 et 2017, hors CAS Pensions. Cette évolution est cependant supérieure à celle des emplois consommés qui n’ont progressé que de 1,6 %. Cette tendance est observable sur l’ensemble du quinquennat puisqu’entre 2012 et 2017, la masse salariale a progressé deux fois plus vite (+ 10,2 %) que le nombre d’emplois (+ 4,8 % pour les emplois consommés).

En 2017, cette augmentation de la rémunération de l’emploi moyen est essentiellement liée à des mesures d’ordre général notamment la hausse de 0,6 % du point d’indice pour 385,6 millions d’euros, des mesures catégorielles notamment la mise en place du dispositif « Parcours professionnels carrières et rémunération » pour 500 millions d’euros et l’augmentation de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves pour 200 millions d’euros.

Il est important de souligner qu’une partie des emplois relevant de cette mission n’est pas placée sous les plafonds d’emplois. C’est notamment le cas des assistants d’éducation et d’une partie des assistants d’élèves en situation de handicap (AESH). La transformation des contrats aidés occupés par des personnels chargés de l’aide humaine en emplois d’AESH (voir infra) permet d’accroître le nombre de personnels placés sous ce plafond, ce qui constitue une amélioration notable.

B.   Une gestion perfectible des crÉdits

L’exécution des crédits de la mission Enseignement scolaire est très proche de la prévision : le taux de variation en autorisation d’engagement est inférieur à 0,1 % et il est de 0,2 % en crédits de paiement. En valeur absolue, cela correspond à un écart de 24,3 millions d’euros en AE et de 130,6 millions d’euros en CP.

Cependant ces données globales masquent des mouvements de régulation budgétaires :

– un montant total des reports de crédits de 77,55 millions d’euros en AE et 78,3 millions d’euros en CP pour l’année 2017. Ils concernent principalement le programme 214, Soutien de la politique de l’éducation nationale.

– douze décrets de transfert pour un solde positif de 97,3 millions d’euros en AE et 88,5 millions d’euros en CP pour les crédits hors titre 2 et 0,52 million d’euros pour les crédits de titre 2 ont été pris.

– deux décrets de virement ont permis de transférer 20 millions d’euros de crédits de titre 2 du programme 141 vers les programmes 139 et 140.

– deux décrets d’avance de crédits qui ont permis un solde positif d’un montant total de 272 millions d’euros en AE et 328,9 millions d’euros en CP. En effet, le décret d’avance n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 a procédé à des annulations de crédits à hauteur de 81,6 millions d’euros. Le décret d’avance n°2017-1639 du 30 novembre 2017 a annulé 113,7 millions d’euros en AE et 56,8 millions d’euros en CP, essentiellement sur des crédits mis en réserve. Il a également ouvert 467,3 millions d’euros en AE et en CP au titre des dépenses de personnel afin d’assurer le financement de la paie de décembre.

Ces dépenses de personnel semblent en partie avoir été mal anticipées dès leur prévision en loi de finance initiale. En effet, l’exécution des crédits de 2016 était déjà supérieure au niveau prévisionnel retenu et utilisé comme socle de préparation de la loi de finances de 2017. De plus, malgré les efforts consentis en loi de finances depuis 2016, le coût du GVT (Glissement vieillissement technicité) reste sous-budgété dès la prévision. Enfin, le coût de la mesure de transformation des contrats aidés en emplois d’Accompagnants des Élèves en Situation de Handicap (AESH) (183 millions d’euros), annoncée le 19 mai 2016 lors de la conférence nationale du handicap, aurait pu être mieux anticipé.

La Cour des comptes, dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire ([2]), rappelle que le contrôle budgétaire et comptable ministériel (CBCM) a émis des avis défavorables sur le document prévisionnel de gestion des emplois et des crédits de personnels (DPEGCP). En effet, la programmation faisait apparaître un déficit incomplètement couvert par le dégel de la réserve de précaution et identifiait donc un besoin de crédits d’avance de plus de 380 millions d’euros. Le Gouvernement a annoncé dans l’exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2018 qu’il souhaite « rendre à la réserve de précaution sa vocation première qui est de faire face aux seuls aléas de gestion ». Ainsi, la rapporteure espère que cette anticipation du dégel de la réserve dès la programmation ne sera pas réitérée.

Il faut cependant souligner que les dépenses de personnel sont particulièrement rigides puisqu’elles sont notamment déterminées par des recrutements décidés en n-1. Le Gouvernement est donc contraint concernant les besoins d’ouverture des crédits mais il pourrait mieux les anticiper au moment de la programmation afin de présenter au Parlement une vision sincère des besoins de crédits pour l’année.

Ainsi, la rapporteure spéciale apprécie les engagements du Ministre d’une sincérité accrue pour le budget 2018. 

C.   Des dépenses fiscales maÎtrisées

Les quatre dépenses fiscales rattachées à la mission Enseignement scolaire représentent 1,823 milliard d’euros en 2017 soit seulement 2,5 % des crédits alloués à la mission. La progression de ces dépenses est maîtrisée à +0,4 % seulement par rapport à l’exécution de 2016 (+ 8 millions d’euros). La réduction d’impôts pour frais de scolarité dans l’enseignement secondaire constitue la seule mesure de dépenses fiscales contribuant à la mission de manière principale, les autres étant rattachées à titre subsidiaire.

ÉVOLUTION DES Dépenses FISCALES ENTRE 2015 ET 2017

(en millions d’euros)

 

Dépenses fiscales contribuant au programme de manière principale

Dépenses fiscales contribuant au programme de façon subsidiaire

Chiffrage définitif 2015

Chiffrage définitif 2016

Chiffrage actualisé 2017

Chiffrage définitif 2015

Chiffrage définitif 2016

Chiffrage actualisé 2017

Programme 141

 

 

 

 

 

 

Exonération des indemnités de stage en entreprise versées aux élèves et étudiants (jusqu’au 1er septembre 2015)

50

35

0

 

 

 

Exonération du salaire des apprentis (à compter du 1er septembre 2015

 

 

 

NC

440

450

Exonération d’impôt sur le revenu des salaires perçus par les jeunes au titre d’une activité exercée pendant leurs études secondaires ou supérieures ou leurs congés scolaires ou universitaires

 

 

 

280

290

295

Programme 230

 

 

 

 

 

 

Réduction d’impôt pour frais de scolarité dans l’enseignement secondaire

172

170

173

 

 

 

Taux de 5,5 % pour les recettes provenant de la fourniture par les cantines d’entreprises ou d’administrations ainsi que pour les repas livrés par des fournisseurs extérieurs aux cantines scolaires et universitaire

 

 

 

770

880

905

Total

222

205

173

1 050

1 610

1 650

Source : Cour des comptes, Note d’exécution de l’analyse budgétaire, Enseignement scolaire, 2017.

D.   Un dispositif de performance qui pourrait être amÉliorÉ pour une meilleure information du Parlement

Sur les cinq indicateurs représentatifs de la mission inscrits dans le rapport annuel de performance 2017, deux ne sont pas renseignés : celui concernant la maîtrise du socle commun en fin de sixième par tous les élèves et celui concernant cette même maîtrise en fin de sixième pour les élèves de l’enseignement public. En outre, le PAP 2017 de la mission comporte 9 indicateurs incomplètement renseignés (soit 15,5 %) et le PAP 2018 en comporte 11.

Un effort important doit donc être réalisé afin d’améliorer la programmation budgétaire et l’évaluation de cette politique publique.

Cependant, il convient de souligner les efforts entrepris sur cette mission pour rendre le dispositif plus lisible : le nombre d’indicateur a baissé de 27 % depuis le PAP 2014 pour se stabiliser à 55 indicateurs depuis 2016.

De plus, la rapporteure spéciale relève que le Ministre s’est engagé à améliorer le dispositif de performance dès l’année 2018 et a mis en place des évaluations systématisées de la maîtrise du socle commun par les élèves en début de CP et de 6e.

II.   Points d’attention relevés au cours des travaux menés dans le cadre du printemps de l’évaluation

La rapporteure a mené différentes auditions dans le cadre des travaux préalables à l’examen du projet de loi de règlement pour l’année 2017. Plusieurs dispositifs ont retenu son attention. La plupart d’entre eux ont été mis en œuvre à la rentrée 2017, l’évaluation est donc limitée à ce jour.

A.   Le dédoublement des classes en REP+, une mesure nécessaire mais insuffisamment évaluée

Le dédoublement des classes en CP dans les zones REP+ est une mesure nécessaire et particulièrement importante, mise en place depuis la rentrée de septembre 2017 à laquelle la rapporteure apporte son fort soutien.

En effet, l’analyse de l’indicateur 1.1 du programme 140 Enseignement scolaire public du premier degré montre que la maîtrise par les élèves, en fin de CE2, des principales composantes du domaine 1 « les langages pour penser et communiquer » du nouveau socle commun, est largement inférieure en REP et REP+ qu’en dehors de ces zones. L’écart entre les élèves de REP + et les élèves hors REP/REP+ est de 22,1 points concernant la maîtrise de la langue française pour les élèves de REP+ (60,1% en REP+ contre 82,1 % hors REP/REP+) et de 21,9 points concernant la maîtrise des langages mathématiques, scientifiques et informatiques (58,5 % en REP+ contre 80,4 % hors REP/REP+). Ces résultats pointent les inégalités entre les élèves de notre système scolaire.

Le dédoublement des classes en CP dans les zones REP + a permis d’augmenter l’écart du taux d’encadrement entre les REP+ et le hors éducation prioritaire qui est ainsi passé de -1,56 en 2016 à -3,07 en 2017 (indicateur 2.2 du programme 140), ce qui est primordial pour la progression des élèves. Ce taux connaîtra une nouvelle augmentation avec l’élargissement de cette mesure aux classes de CE1.

Le dispositif « plus de maîtres que de classes », mis en place en 2013, repose sur l’affectation dans une école d’un maître supplémentaire afin de mettre en œuvre de nouvelles organisations pédagogiques et venir en aide aux élèves en difficulté. Ce dispositif, apprécié des parents et des élèves, a été maintenu par le Gouvernement à la rentrée 2017 malgré la mise en place du dédoublement des classes en CP. Si l’avenir de ce dispositif a pu être questionné à la rentrée 2017, la rapporteure apprécie le maintien de ce dispositif à la rentrée 2018, annoncée par le Ministre de l’Éducation Nationale, malgré une diminution des effectifs qui lui sont consacrés (environ 30 %) pour les concentrer sur les CP/CE1 dans le cadre du dédoublement des classes.

La rapporteure spéciale note avec intérêt la réalisation d’une évaluation en cours de l’efficacité de ces deux dispositifs sur l’apprentissage des élèves afin de permettre des comparaisons préalables à une décision stratégique. Plusieurs études internationales ont déjà montré une efficacité plus grande des dispositifs de type dédoublement des classes par rapport à ceux proches de « plus de maîtres que de classes » mais une étude complète de leurs effets en France est aujourd’hui nécessaire.

B.   « devoirs faits », un dispositif perfectible

 Depuis la rentrée des vacances de la Toussaint 2017, le dispositif « devoirs faits » a été mis en place. Il permet de proposer aux collégiens, sur la base du volontariat, un temps d’étude gratuite accompagnée pour réaliser leurs devoirs.

Si cette initiative est particulièrement importante, elle repose sur le volontariat des élèves et d’une équipe enseignante qui accepte de la mettre en place. Cela crée donc des inégalités entre les territoires et au sein même des établissements puisque des cohortes d’élèves bénéficient plus de cet accompagnement que d’autres.

La rapporteure a été alertée par plusieurs directeurs d’école sur le fait que des crédits attribués finançant la mise en œuvre du dispositif « devoirs faits » n’allaient pas être utilisés, du fait d’un manque de volontariat de certaines équipes enseignantes au sein des établissements. Ce dispositif étant encore très récent, il serait pertinent de mettre en place d’un dispositif d’évaluation solide qui permettrait d’engager une réflexion sur des pistes d’amélioration. La rapporteure spéciale portera une attention particulière au montant des crédits non consommés en 2018, que le Ministre estime pour sa part limitée. En effet, d’après ses prévisions, dans 70 % des cas, le dispositif s’est déployé de façon satisfaisante.

C.   L’école inclusive, une prioritÉ affirmÉe

La scolarisation des élèves en situation de handicap est une priorité affichée du Gouvernement pour rendre l’école réellement « inclusive ».

En 2017, conformément aux engagements pris lors de la conférence nationale du handicap du 19 mai 2016, la transformation sur cinq ans des 56 000 contrats aidés occupés par des personnels chargés de l’aide humaine en 32 000 emplois d’accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), a débuté. En conséquence, 8 533 ETPT ont été créés.

La gestion des élèves en situation de handicap connaît cependant plusieurs limites. Premièrement, les élèves scolarisés dans les unités spécialisées dans l’inclusion scolaire (ULIS) ne sont toujours pas pris en compte dans les calculs d’effectifs pour établir la carte scolaire et les déclenchements d’ouverture de postes. Deuxièmement, les enseignants ne sont pas suffisamment formés à gérer les élèves en situation de handicap physique et/ou mental. Enfin, la concentration des moyens en personnel sur l’accompagnement des élèves en situation de handicap (emplois supplémentaires en AESH, 50 000 contrats aidés sauvegardés) porte préjudice à l’ensemble des autres missions confiées par les services de l’éducation nationale aux bénéficiaires de contrats aidés.

Une réflexion plus large sur la situation des élèves en situation de handicap doit donc aujourd’hui être engagée. Si des progrès importants ont été réalisés pour favoriser l’insertion des élèves handicapés dans le système scolaire, les résultats ne sont toujours pas à la hauteur des efforts consentis.

D.   des aides aDMinistratives aux directeurs d’école indispensables

Les contrats aidés exerçant des missions de support et d’assistance aux directeurs d’école ont été supprimés à la rentrée 2017. Dans le premier degré, les directeurs d’écoles exercent une activité d’enseignement en plus de leurs charges de direction pour lesquelles ils ont des décharges limitées. Les aides administratives effectuaient donc un travail important et indispensable au bon fonctionnement de l’école. Sans ces personnels, de nombreuses missions sont aujourd’hui impossibles à réaliser, telles que les tâches de secrétariat, portier ou médiateur.

La rapporteure souhaite insister sur le fait qu’aucune évaluation du rapport entre le coût de ces contrats aidés dévolus aux aides administratives et leur efficacité n’a été réalisée avant leur suppression. L’attention que le Gouvernement porte au cas particulier des directeurs d’école qui ne bénéficient pas de décharges hebdomadaires par la circulaire n°2017-0589 du 31 juillet 2017 ne permet pas de régler le problème dans son ensemble. En effet, si 65 % des directeurs d’école bénéficient de cette décharge et ne sont donc pas concernés par cette dérogation, elle n’est pas suffisante pour permettre au directeur d’école de remplir l’ensemble des fonctions administratives indispensables au bon fonctionnement d’une école au quotidien. Dans un contexte de réduction des moyens généralisé, les collectivités territoriales ont aussi fait des économies sur leurs dépenses de personnel, aggravant ainsi les difficultés à effectuer des tâches ponctuelles telles que l’ouverture d’une porte lorsqu’un élève revient d’un rendez-vous médical en milieu d’après-midi.

Ces tâches sont particulièrement importantes dans les quartiers en politique de la ville dans lesquels l’accompagnement des familles est primordial. Les outils informatiques et la simplification des procédures administratives, aussi importants soient-ils, ne permettront pas aux directeurs d’école de répondre aux besoins des élèves et de leurs familles en grande difficulté. Les directeurs d’école en REP et REP+ doivent bien souvent gérer des situations compliquées, qui s’étendent à un périmètre plus large que celui de l’école. Un retour des aides administratives a minima dans ces écoles serait nécessaire aujourd’hui pour faciliter la tâche de ces personnels qui s’investissent dans une mission difficile mais indispensable au bon fonctionnement de l’école républicaine.

La rapporteure estime qu’il est temps d’engager une réflexion sur le métier de directeur d’école. Certes le numérique améliorera une partie des tâches administratives mais la prise en charge des matériels informatiques n'est pas uniforme sur le territoire car les collectivités territoriales ne disposent pas toutes des mêmes ressources. La place de l'école a changé dans les familles sans qu’aient été donnés aux écoles les moyens d’y faire face.

Elle portera donc une attention toute particulière aux travaux de la mission sur les directeurs d’école, créée le 23 mai dernier au sein de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation.

 

 


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   Travaux de la commission

 

Lors de sa réunion de 18 heures, le mercredi 6 juin 2018, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu M. Jean Michel BLANQUER, ministre de l’éducation nationale.

 

 

Le compte rendu de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

 

La vidéo de cette réunion peut être consultée sur le site de l'Assemblée nationale.

 

 

 

 

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   personnes AUDITIONNéES par lA rapporteurE spécialE

Fédération Syndicale Unitaire : M. Régis METZGER, secrétaire national et M. Bruno LEVEDER, secrétaire national.

Syndicat général de l'Éducation nationale CFDT : Mme Catherine NAVE-BEKHTI, secrétaire générale et M. Adrien ETTWILLER, secrétaire national.

Syndicat national des lycées et collèges (SNALC) : M. Jean-Rémi GIRARD, vice-président ; Mme Anne-Marie LE GALLO PITEAU, secrétaire national à l'enseignement technologique et professionnel ; M. Xavier PERINET-MARQUET, responsable SNALC 2nd degré ; Mme Ghislaine SPENLE, directrice d'école et membre du SNALC.

Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP) : M. Thierry DUMORTIER, trésorier général adjoint

Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) : Mme Carla DUGAULT, secrétaire générale et Mme Alizée OSTROWSKI, chargée de Mission

Union nationale des associations autonomes de parents d'élèves (UNAAPE) : Mme Sophie FONTAINE, présidente ; M. Lucien-Michel DIMEGLIO, président de la région Île-de-France ; Mme Lydie BENAY, vice-présidente de l’Union régionale Île-de-France ; M. Nicolas HARDY, secrétaire général

Union nationale lycéenne (UNL) : M. Louis BOYARD, membre du bureau national et Mme Laura PFISTER, vice-Présidente

Association des maires de France : Mme Agnès Le Brun, maire de Morlaix et vice-présidente de l’AMF ; M. Sébastien Ferriby, conseiller technique ; Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

Ministère de l’Education nationale : M. François Jonchère, contrôleur budgétaire et comptable ministériel et M Jean-Yves PARSSEGNY, contrôleur général, chef du département du contrôle budgétaire

Ministère de l’Éducation nationale : M. Jean-Marc HUART, directeur général de l'enseignement scolaire et M. Alexandre GROSSE, chef du service du budget de la performance et des établissements

Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation : M. Philippe VINÇON, directeur général de l’enseignement et de la recherche ; M. Jean-Luc TRONCO, sous-directeur des établissements, des dotations et des compétences (DGER), M. Gilbert THUILLIER, chef de la mission d'appui au pilotage et des affaires transversales à la DGER


([1])  Hors mission Remboursements et dégrèvements

([2])  Cour des Comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2017, mission Enseignement scolaire