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N° 1302

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2018.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2019 (n° 1255),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur Général

Député

 

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ANNEXE N° 34
 

 

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR :

 

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET VIE ÉTUDIANTE

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Fabrice Le VIGOUREUX

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

DONNÉES CLÉS

I. LE RENFORCEMENT DES MOYENS DES ÉTABLISSEMENTS (PROGRAMME 150)

A. UNE PROGRESSION DES CRÉDITS DES UNIVERSITÉS QUI SACCOMPAGNE DE MESURES FORTES SUR LE FINANCEMENT DES LABORATOIRES ET DES APPELS A PROJETS

1. Lévolution de la dépense intérieure déducation

2. Le financement des universités conforté par la mise en œuvre du plan étudiant

3. Laugmentation des effectifs étudiants et la mise en œuvre de Parcoursup

4. La recherche universitaire

5. Lallocation des moyens aux universités

6. Les ressources propres des universités

7. Des difficultés financières persistantes pour quelques établissements passés aux RCE

B. UNE STABILISATION DES EFFECTIFS SOUS PLAFOND DE LENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

C. LA SUBVENTION ACCORDÉE AUX ÉTABLISSEMENTS DENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR PRIVÉS

II. LES MOYENS RENFORCÉS DU PIA ET DU GRAND PLAN DINVESTISSEMENT POUR LENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

III. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA VIE ÉTUDIANTE (PROGRAMME 231)

A. LA STABILISATION DES BOURSES ET AIDES PORTÉES PAR LE PROGRAMME 231

B. Le budget des CROUS et du CNOUS

C. Les prêts étudiants garantis par la BPI demeurent à un niveau faible

D. La valorisation du parc immobilier universitaire et le plan logement

IV. LE DÉVELOPPEMENT SOUHAITABLE DE LA FORMATION CONTINUE DANS LENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Examen en commission

Article 39 et état B

Article 78 Renforcement de la mobilité étudiante

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

ANNEXE

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2018, 94 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.


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   PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Depuis un an, le Gouvernement et la majorité apportent des réponses aux défis qui sont posés à notre système d’enseignement supérieur.

La mise en place du système Parcoursup, malgré quelques inévitables difficultés de démarrage, apporte désormais une réponse à l’ensemble des étudiants quant à leur inscription dans un établissement d’enseignement supérieur. Le taux déchec en première année est donc amené à reculer fortement au cours des prochaines années, ce qui sera générateur déconomies.

D’un point de vue technique, Parcoursup a pleinement fonctionné : plus de 2,4 millions de propositions ont été faites, 730 000 jeunes – et 96 % des bacheliers généraux – en ayant reçu au moins une. En moyenne, les candidats ont reçu trois propositions, ce qui a permis à 583 000 jeunes de s’inscrire, soit 27 000 de plus qu’en 2017. Le nombre de candidats ayant accepté une proposition a également augmenté, signe de la pertinence d’un système qui a redonné la main aux étudiants. Parcoursup a aussi permis de faire un premier pas significatif vers la démocratisation de l’enseignement supérieur, grâce au système de quotas que le législateur a introduits dans la loi.

En cette rentrée 2018, le nombre des boursiers a augmenté de 28 % dans les classes préparatoires parisiennes, les bacheliers professionnels de 23 % dans les filières de brevets de techniciens supérieurs (BTS) et les bacheliers technologiques de 19 % dans les filières de diplômes universitaires de technologie (DUT). Les propositions des établissements parisiens adressées aux lycéens de l’académie de Créteil ont par ailleurs augmenté de 65 %.Cette réforme était d’autant plus nécessaire qu’elle doit être replacée dans un contexte démographique sous tension, avec environ 350 000 étudiants supplémentaires dici dix ans.

Au niveau budgétaire, les crédits de la Mission interministérielle recherche et enseignement supérieur (MIRES) progressent fortement en 2019, avec près de 500 millions deuros dabondement en crédits de paiement et 370 millions deuros supplémentaires en autorisations dengagement. Ils atteignent ainsi 28,17 milliards deuros en crédits de paiement, après une augmentation des crédits en 2018 qui avait déjà porté le budget de la recherche à 27,6 milliards deuros.

En trois ans, l’effort du Gouvernement et de la majorité en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche sera donc de près de 1,5 milliard d’euros supplémentaires. Il est supérieur à la trajectoire programmée par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) qui ne prévoyait que 27,87 milliards d’euros sur la MIRES en 2019.

Le budget consacré à lenseignement supérieur et à la vie étudiante sélèvera ainsi en 2019 à 16,3 milliards deuros en 2019, soit une augmentation de 173 millions deuros par rapport à la LFI 2018. Cette somme se décompose entre les programmes 150 et 231 de la manière suivante :

 13,52 milliards d’euros en AE et 13,6 milliards d’euros en CP pour le programme 150 Formation et recherche universitaire ;

 2,7 milliards d’euros en AE et en CP pour le programme 231 Vie étudiante.

Les universités commencent par ailleurs à bénéficier du Grand plan dinvestissement (GPI) qui consacre 1,55 milliard deuros sur le quinquennat à lenseignement supérieur, sur un total de 7,6 milliards d’euros consacrés à l’enseignement supérieur, à la recherche et à l’innovation. Ces sommes seront alloués à la réforme des cursus universitaires, et en particulier à la diversification des parcours en premier cycle et à la réforme du système d’orientation. Deux actions seront privilégiées.

La première action, intitulée « Nouveaux cursus à luniversité » et dotée de 250 millions deuros, doit permettre de mener des actions pour favoriser une meilleure prise en compte de la diversité géographique et sociale des étudiants qui arrivent en premier cycle de lenseignement supérieur. Avec le vote de la loi orientation et réussite des étudiants (ORE) en mars 2018 et la mise en œuvre de Parcoursup, la réforme du premier cycle est en effet la priorité du Gouvernement et de la majorité.

La seconde action concerne le développement duniversités de rang mondial. Elle est dotée de 700 millions d’euros de dotations décennales. Elle doit favoriser les tremplins entre les universités, les centres de recherches et le monde économique. Une enveloppe spécifique de 100 millions d’euros est prévue pour les projets de coopération menés à l’échelle européenne.

Des réformes structurelles doivent cependant accompagner ces évolutions positives. Elles passent notamment par une plus grande autonomie pédagogique accordée aux opérateurs bénéficiaires de la mission. Le passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE) est ainsi devenu le droit commun de toutes les universités. 105 établissements bénéficient désormais de ce régime.

Cependant, trop duniversités demeurent dans une situation financière difficile (13 en 2017) et lécart entre le plafond demplois autorisés et lemploi effectif demeure trop important (près de 12 000 ETP). Cela doit nous amener à réfléchir sur un nouvel équilibre entre moyens récurrents et financements par appels à projet, ce dernier ayant vraisemblablement pris trop de place.

Cela passe également par le grand chantier des ressources propres sur lequel de larges marges de progression subsistent. Ainsi en 2017, les ressources propres des universités représentent 2,2 milliards d’euros, soit 16 % de leur budget de fonctionnement (13,7 milliards d’euros). Mais ce chiffre n’a augmenté que de 10 millions d’euros par rapport à 2014. Cette stagnation est préoccupante.

Le renforcement de l’offre de formation continue pourrait être un moyen d’y remédier en partie. Cette faiblesse des ressources propres, corrélée à celle d’un modèle de financement s’appuyant pour l’essentiel sur l’État ou des acteurs publics s’avère également être un handicap pour développer dans les universités des politiques de développement international ambitieuses et des dispositifs d’accueil et de bourses renforcés pour les étudiants étrangers.

Concernant l’offre de formation, il est également souhaitable de faciliter la délivrance de diplômes reconnus dans le schéma LMD, y compris pour des écoles privées qui auraient fait l’objet d’une certification par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il s’agit en particulier des établissements qualifiés EESPIG (établissements denseignement supérieur privés dintérêt général) dont les missions de formation et la politique sociale sont étroitement définies avec l’État et qui participent ainsi de l’écosystème de l’enseignement supérieur sous contrat avec l’État.

Dans le maquis des bachelors et des diplômes d’établissements, illisible à l’international et pour de nombreuses familles, il est nécessaire de permettre à ces établissements sous contrat avec l’État de délivrer des diplômes reconnus. Il en va de l’insertion professionnelle des étudiants et de l’attractivité du système.

Enfin, concernant le volet vie étudiante (programme 231), le Gouvernement et la majorité poursuivent leurs efforts pour promouvoir et mettre en œuvre une politique du logement ambitieuse et la stabilisation des coûts de la vie étudiante. Le montant attribué aux bourses sur critères sociaux demeure stable à 2,1 milliards d’euros, de même que les moyens alloués aux CROUS à 480 millions d’euros.

La mise en œuvre de la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) permettra d’allouer, par ailleurs, plus de 100 millions d’euros à l’amélioration des conditions de vie étudiante ; tandis que le prix du ticket restaurant universitaire continue d’être gelé à la rentrée 2019 afin de maintenir le pouvoir d’achat des étudiants.

Au niveau du logement, le Grand Plan d’Investissement prévoit la construction de 60 000 logements pour les étudiants et de 20 000 logements pour les jeunes actifs. 22 195 nouveaux logements étudiants seront déjà construits d’ici à 2020.

Le rapporteur sera particulièrement attentif à la réaffectation intégrale de la CVEC collectée en 2018 comme dans les années à venir dans le champ des crédits de la mission.

 

 


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   DONNÉES CLÉS


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I.   LE RENFORCEMENT DES MOYENS DES ÉTABLISSEMENTS (PROGRAMME 150)

Le budget de la mission Recherche et enseignement supérieur est en hausse de 502 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2018. Si cette augmentation bénéficie principalement à la partie « recherche » de la mission (à hauteur de 329 millions d’euros), les crédits alloués au programme 150 sont fixés à 13,6 milliards d’euros pour 2019 (soit une augmentation de 166 millions d’euros).

Par ailleurs, 40 millions de crédits supplémentaires seront pris sur la réserve de précaution constituée au titre de 2018 et reportés sur l’exercice 2019.

Au total, 206 millions deuros de crédits supplémentaires seront donc disponibles en 2019 pour conforter le pouvoir dachat de la communauté universitaire, les mesures salariales et financer le plan étudiant.

Évolution des cRÉDITS SUR LES PROGRAMMES 150 ET 231
ENTRE LA LFI 2018 ET LE PLF 2019

 

 

Budget au PLF 2019

Variation par rapport à 2018

Programme 150 –

Formations supérieures et recherche universitaire

13,6 milliards d’euros

+ 166 millions d’euros (hors dégel dérogatoire de 40 millions)

Programme 231 –

Vie étudiante

2,7 milliards

+ 7 millions

Source : PAP 2019 de la MIRES.


A.   UNE PROGRESSION DES CRÉDITS DES UNIVERSITÉS QUI SACCOMPAGNE DE MESURES FORTES SUR LE FINANCEMENT DES LABORATOIRES ET DES APPELS A PROJETS

1.   L’évolution de la dépense intérieure d’éducation

En 2017, la DIE (dépense intérieure d’éducation) de l’enseignement supérieur atteint 31,4 milliards d’euros, soit 20,3 % de la DIE totale et 1,4 % du PIB. Elle est en hausse de 2 % par rapport à l’année précédente (Graphique 1).

Évolution de la DIE de l’enseignement supérieur depuis 2010

Source : DEPP, Compte de l’éducation.

Avec 1,4 % du PIB consacré à l’enseignement supérieur, la France est très proche de la moyenne des pays de l’OCDE (1,52 %). Elle devance des pays européens comme l’Espagne (1,28 %), l’Allemagne (1,22 %) ou l’Italie (0,92 %).

Le Royaume-Uni (1,87 %), la Norvège (1,74 %), la Finlande, les Pays-Bas (1,73 %) ou la Suède (1,62 %) y consacrent en revanche une part plus importante de leur PIB. Deux pays réalisent un effort financier pour l’enseignement supérieur très au-dessus de la moyenne : les États-Unis (2,58 %) et le Canada (2,45 %).

 

 

 

Dépenses annuelles des établissements d’enseignement supérieur

en % du PIB (2015)

Source : OCDE, Regards sur l’éducation 2018.

Les moyens alloués aux programmes 150 et 231, seuls programmes de la MIRES retenus dans le champ de la DIE, ont augmenté de 2,8 % en 2017, après deux années de croissance moins marquée (+ 0,4 % en 2016 après + 0,7 % en 2015). Ils progresseront à nouveau en 2019, après avoir progressé de 206 millions d’euros en 2018.

Concernant la répartition de la dépense, le ministère de l’enseignement supérieur de la recherche et de l’innovation (MESRI) finance 49,7 % (programmes 150 et 231) de la DIE de l’enseignement supérieur et le ministère de l’éducation nationale finance 10,6 %, notamment à travers les moyens alloués aux classes préparatoires et aux sections de technicien supérieur (STS). En tenant compte du financement apporté par les autres ministères, l’État assure donc plus des deux tiers du financement de la DIE. Les collectivités locales contribuent pour 10,7 %, les ménages pour 8,7 % et les entreprises pour 9,4 %. De manière globale, un effort budgétaire supplémentaire est encore nécessaire pour allouer à lenseignement supérieur le niveau de moyens qui lui permettront de se situer dans la moyenne des pays les plus performants au niveau international.

Dépenses d’éducation

(supérieur, en Dollars US – 2016 ou dernières données disponibles)

Allemagne

17 035,6

Argentine

5 045,3

Australie

20 344,2

Brésil

3 721,9

Corée

10 108,9

États-Unis

30 003,2

France

16 144,8

Indonésie

3 764,7

Italie

11 257,1

Japon

19 289,7

Mexique

8 169,7

Royaume-Uni

26 320,1

Russie

8 369,1

Turquie

8 900,7

Source : OCDE.

2.   Le financement des universités conforté par la mise en œuvre du plan étudiant

Le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire présente une augmentation de crédits de 90 millions d’euros en autorisation d’engagement (AE) (+ 1 %) et de 166 millions d’euros en crédits de paiement (CP) (+ 1,5 %).

Il sert ainsi de support aux annonces faites dans le cadre du plan Étudiants concrétisé par la loi 2018-166 du 8 mars 2018 relative à lorientation et à la réussite des étudiants (ORE). Ce plan prévoit une dépense de 500 millions deuros sur la durée du quinquennat. Cette enveloppe supplémentaire confortera le pouvoir d’achat de la communauté universitaire, (PPCR, indemnité compensatrice de la hausse de la CSG) et permettra également aux établissements d’accueillir davantage d’étudiants dans les filières les plus demandées (de l’ordre de 23 000 places ont été d’ores et déjà créées à la rentrée 2018-2019) et d’améliorer la réussite en licence par la création de dispositifs d’accompagnement et de parcours personnalisés. En outre, des moyens budgétaires nouveaux sont consacrés à la reconnaissance de l’investissement pédagogique des enseignants-chercheurs, à l’issue de la concertation sociale qui s’est engagée au printemps.

Le rapporteur spécial souligne que cette augmentation des moyens des universités, dans un contexte budgétaire contraint, sera également appuyée, au niveau de la recherche universitaire, par la progression des moyens alloués à lAgence nationale de la recherche (ANR), qui seront renforcés à hauteur de 86,2 millions d’euros en crédits de paiement et de 34 millions d’euros en autorisations d’engagement, ainsi que par la reconduction de lenveloppe de 25 millions deuros destinée à financer le fonctionnement récurrent des laboratoires.

Toutefois, le rapporteur spécial est conscient des difficultés provoquées par le flux massif de nouveaux étudiants qui a engendré, depuis quelques années déjà, une baisse de la dépense moyenne par étudiant. En effet, pour absorber l’augmentation du nombre d’étudiants en 2019 (+ 40 000), il aurait fallu une augmentation d’au minimum 400 millions d’euros de crédits en tenant compte d’une dépense moyenne par étudiant de 10 210 euros/an. À cet égard, la stabilisation du nombre d’étudiants arrivant dans les universités, par une meilleure orientation et un meilleur accompagnement, devrait à moyen terme être accompagnée par une remontée de la dépense publique par étudiant.

Enfin, les moyens dédiés à limmobilier (298 millions deuros en AE et 374 millions deuros en CP) augmentent de 14 millions deuros, en 2019, pour financer les contrats de plan État-régions (CPER) 2015-2020. Pour rappel, ceux-ci prévoient de nombreuses actions de réhabilitation de bâtiments universitaires ainsi qu’une enveloppe spéciale de 20 millions d’euros pour les premières études du projet emblématique de construction du centre hospitalo-universitaire Nord-Grand-Paris à Saint-Ouen (CHUNPG).

3.   L’augmentation des effectifs étudiants et la mise en œuvre de Parcoursup

Selon le bilan chiffré de la session 2018 de Parcoursup, 94,4 % des candidats ont reçu une proposition dadmission, contre 94,5 % sur APB, en moyenne sous huit jours, mais avec de fortes disparités selon leur filière.

PC signifie phase complémentaire et PP phase principale // © service statistique du ministère de l'Enseignement supérieur

Source : MESRI.

Les bacheliers généraux sont plus nombreux à avoir obtenu une proposition (98 %), contre 92 % des bacheliers de série technologique et 86 % de série professionnelle. Pour les bacheliers généraux, la majorité des propositions concerne la licence (51 %), puis les formations en CPGE (classes préparatoires aux grandes écoles) et en Paces (12 %). Pour les bacheliers technologiques et professionnels, les formations en BTS dominent, avec respectivement 45 % et 76 % des propositions acceptées.

Viennent ensuite les formations de licence en seconde position, (27 % et 16 %). Pour les candidats en première année commune aux études de santé (PACES), 90 % obtiennent la formation désirée. En revanche, la proportion baisse dans les autres formations. Les candidats postulant majoritairement en CPGE sont 73 % à accepter cette formation (73 % pour un BTS et 62 % pour un DUT).

Selon le ministère de l’enseignement supérieur, les élèves auront reçu en moyenne 3,6 propositions à la fin de la procédure et près de 8 candidats sur 10 auront accepté l’une d’entre elles. Seuls 3,3 % des candidats n’ont reçu que des réponses négatives. En revanche, 15,5 % des bacheliers auraient démissionné malgré une réponse positive à lun de leurs vœux.

Au total, la campagne 2018 de Parcoursup a ainsi permis à près de 600 000 candidats de trouver leur place pour la rentrée 2018, sans quaucune contrainte nait été imposée à leurs souhaits, contrairement aux précédents usages. Sur APB au 29 septembre 2017, 3 729 bacheliers n’avaient reçu aucune proposition.

Sur Parcoursup, ils n’étaient que 955 bacheliers au 6 septembre. Par ailleurs, la phase dite « complémentaire » de Parcoursup a permis à de nombreux étudiants qui le souhaitaient de candidater sur plus de 120 000 places encore vacantes dans l’enseignement supérieur, y compris dans des filières très demandées.

Afin de permettre aux étudiants qui souhaitent les rejoindre de le faire, y compris lorsque cela suppose une mobilité géographique, une aide à la mobilité a été mise en place et des places ont été réservées dans les résidences universitaires. Cela a des effets dès cette année : à la fin de la phase principale, plus de 43 % des candidats de l’académie de Créteil avaient reçu une proposition dans une formation à Paris, contre 26 % l’année dernière. La loi du 8 mars 2018 a ainsi donné la possibilité aux candidats de s’émanciper des limites académiques, afin de poursuivre leurs études dans la filière de leur choix.

Par ailleurs, conformément aux objectifs de démocratisation inscrits dans la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, un pourcentage minimal de boursiers appelés dans l’ensemble des formations pour lesquelles le nombre de candidatures est supérieur à la capacité d’accueil, y compris sélectives, a été instauré.

Enfin, de nouvelles garanties ont été offertes par la loi pour favoriser l’accès des bacheliers technologiques et professionnels aux diplômes universitaires technologiques (DUT) et aux sections de technicien supérieur (STS). Ils plébiscitent en effet ces filières sélectives, qui avaient été initialement conçues pour eux, et où ils ont les meilleures chances de réussite :

– Parcoursup : près de 65 % des bacheliers professionnels ont eu une proposition en STS, contre 53 % en fin de procédure en 2017.

– Parcoursup : 21 % des bacheliers technologiques ont eu une proposition en DUT, contre 12 % en 2017.

Le ministère a dès le mois de janvier 2018 notifié aux établissements une enveloppe de 5,7 millions d’euros destinée notamment à la rémunération des personnels chargés de l’examen des dossiers de candidature dans les filières non sélectives des universités. En parallèle, une enveloppe de 6,5 millions d’euros a été consacrée au financement d’un large éventail de projets d’investissement destinés en premier chef à permettre aux établissements d’accueillir les étudiants dans les meilleures conditions grâce aux parcours adaptés et à la personnalisation des parcours accompagnés au travers des contrats de réussite pédagogique par les directeurs d’études.

4.   La recherche universitaire

La recherche universitaire puise son financement à plusieurs sources : il s’agit soit de subventions publiques, soit de recettes provenant de contrats de recherche. La source de financement la plus importante est le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, par le biais des crédits versés aux opérateurs à partir de l’action 17 Recherche du programme 150. Ces opérateurs fédèrent leurs actions par le biais de cinq alliances thématiques :

– l’alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (AVIESAN) ;

– l’alliance des sciences et technologies du numérique (ALLISTENE) ;

– l’alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie (ANCRE) ;

– l’alliance dans le domaine de la recherche environnementale (ALLENVI) ;

– l’alliance nationale des humanités, sciences humaines et sciences sociales (ATHENA).

Pour 2018, le montant total de cette action, réparties entre les alliances, sélevait à 3 924 millions deuros. À ce montant, il convient d’ajouter une quote-part des actions 5 (bibliothèques et documentations), 14 (immobilier) et 15 (support et pilotage) du programme 150, pour un total de 956 millions d’euros, portant ainsi le montant total du financement issu du programme 150 à 4 881 millions d’euros. En rajoutant les crédits issus d’autres programmes à hauteur de 330 millions d’euros, le montant total du financement de la recherche par l’ensemble des programmes contributeurs est de 5 211 millions d’euros.

Comme l’ont rappelé les travaux de la mission d’évaluation et de contrôle sur le financement de la recherche publique dans les établissements d’enseignement supérieur ([1]), ces crédits issus du programme 150 sont toutefois complétés par d’autres financements issus du programme 172 ou par des crédits issus du programme d’investissements d’avenir (PIA). Ils sont donc difficilement lisibles dans leur globalité.

Néanmoins, pour 2019, on constate une progression des crédits de base alloués à laction 17 qui représenteront 3 937 millions deuros (13 millions deuros supplémentaires). Le rapporteur spécial considère que les moyens récurrents de la recherche dans les universités doivent être préservés face à une logique d’appels à projet qui a pris trop de places. En effet, entre les crédits propres dévolus à l’ANR et les crédits du PIA, l’essentiel du financement du fonctionnement des laboratoires repose désormais sur les crédits inscrits dans les appels à projet. Cela génère beaucoup d’heures de travail perdues si l’on considère qu’il faut entre une semaine et 10 jours pour établir un dossier de recherche complet et détaillée et que l’on regarde ensuite le taux de sélection proche aujourd’hui de seulement 14 %. À titre d’exemple, sur les interventions de l’Agence nationale de la recherche (+ 32,7 millions d’euros en PLF 2019), presque 86 % des 6 023 projets qui lui ont été soumis en 2017 (appel d’offre générique) n’ont pas été retenus.

5.   L’allocation des moyens aux universités

La subvention pour charges de service public notifiée à chaque établissement est déterminée à partir du montant de la notification de l’année précédente à laquelle sont appliqués divers ajustements. Ceux-ci portent en premier lieu sur la masse salariale, par exemple les crédits correspondant aux créations d’emplois, aux variations d’emplois des personnels de santé et des contrats doctoraux, ou encore aux compensations des parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR), de la hausse de la valeur du point et des titularisations réalisées dans le cadre de la loi dite « Sauvadet ».

D’autres ajustements sont également réalisés chaque année sur la subvention de fonctionnement, comme la compensation de l’exonération de droits d’inscription des étudiants boursiers.

Entre 2009 et 2014, le modèle dit SYMPA (SYstème de répartition des Moyens à la Performance et à l’Activité) fournissait pour les universités une répartition théorique des crédits de fonctionnement et des emplois entre les établissements, selon des critères d’activité et de performance.

Au 1er janvier 2015, un nouveau modèle d’allocation, réservé aux écoles d’ingénieurs et baptisé MODAL (MOdèle D’ALlocation), est entré en vigueur. Dans ce modèle, lenseignement représente 69 % et la recherche représente 31 % de lenveloppe totale. Lactivité représente 86 % et la performance représente 14 % de lenveloppe totale.

Toutefois, afin d’exercer un pilotage plus fin des opérateurs, tenant compte notamment de la stratégie et des enjeux propres à chacun d’eux, lallocation des moyens sarticulera désormais autour dune procédure de dialogue stratégique menée conjointement par le ministère et les autorités académiques. Celle-ci sera expérimentée dès la rentrée 2018-2019 avec une dizaine d’établissements volontaires, avant d’être généralisée en 2019-2020. L’évaluation de la performance des établissements dans la réalisation des objectifs de la loi ORE sera un élément essentiel de ce dispositif, la grande majorité des moyens du plan étudiants ayant été allouée en contrepartie d’engagements concrets pour l’accueil et la réussite des étudiants.

6.   Les ressources propres des universités

En 2017, les ressources propres des universités représentent 2,2 milliards d’euros, soit 16 % de leur budget de fonctionnement (13,7 milliards d’euros). Ce chiffre présente une augmentation de 10 millions d’euros par rapport à 2014, où il représentait 16,5 % du budget de fonctionnement des établissements.

Évolution des ressources propres des opérateurs du programme 150

(en millions d’euros)

Universités

2014

2015

2016

2017

2014-2017

Ressources Propres

2 186

2 230

2 271

2 196

10

Produits fonctionnement

13 284

13 356

13 450

13 704

420

Part ressources propres

16,5 %

16,7 %

16,9 %

16 %

0,5 %

Source : tableau de synthèse ministère – périmètre établissement.

Si le taux de ressources propres varie entre 6 % et 26 % selon les établissements, il reste globalement identique sur la période : 80 % des universités présentent une variation du taux de ressources propres comprise entre – 3 et + 3 % sur trois ans. Cette stagnation est préoccupante. Le renforcement de loffre de formation continue pourrait être un moyen dy remédier en partie. Sur ce point, des blocages réglementaires peuvent encore être levés, notamment en matière d’affectation des bâtiments.

 

Durant 4 années consécutives, les droits d’inscription sont par ailleurs restés inchangés. Ils s’élevaient, respectivement, à 184 euros en licence, 256 euros en Master et 391 euros en Doctorat. Le taux du diplôme d’ingénieur était de 610 euros.

À compter de 2018-2019, la part du fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes (FSDIE) est intégrée à la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) créée par l’article 12 de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants. En conséquence, les droits de scolarité de lensemble des diplômes ont été réduits de 16 euros. Dès lors, les nouveaux droits sont moins élevés que ceux applicables depuis la rentrée universitaire 2014.

Ils correspondent à 170 euros pour la licence, 243 euros pour le master et 380 euros pour le doctorat. Le taux du diplôme d’ingénieur est de 601 euros. Cela représente une diminution moyenne pondérée des taux applicables depuis l’année 2014-2015 de – 7,60 % en licence, de ‑ 5,07 % en master et de – 2,81 % en doctorat.

Cette faiblesse des droits d’inscription dans les établissements universitaires français couplée à un système de bourses et d’exonérations significatif permet de limiter certaines barrières financières dans l’accès aux études supérieures et à notre pays de ne pas être confronté à la préoccupante dérive de l’endettement individuel étudiant pour frais de scolarité que l’on voit s’accentuer ou se développer dans d’autres pays du monde, en Angleterre ou aux États-Unis notamment. Notre modèle de financement reposant quasi‑exclusivement sur l’État ou des acteurs publics s’avère cependant être un handicap pour développer dans les universités des politiques de développement international ambitieuses et des dispositifs d’accueil et de bourses renforcés pour les étudiants étrangers.

Aussi, le rapporteur spécial estime qu’une contribution financière individuelle plus élevée d’une partie des étudiants étrangers (non communautaires) est sans doute un levier qu’il conviendra d’actionner à l’avenir pour doter les Universités de plus grandes capacités d’action pour développer des partenariats internationaux et susciter l’envie de nombreux nouveaux jeunes talents du monde entier de venir étudier dans les universités françaises.

 

 

7.   Des difficultés financières persistantes pour quelques établissements passés aux RCE

Au 1er septembre 2018, le programme 150 regroupe au total 201 opérateurs dont 105 établissements ont accédé aux responsabilités et compétences élargies (RCE).

NOMBRE D’ÉTABLISSEMENTS PASSÉS
AUX RESPONSABILITÉS ET COMPÉTENCES ÉLARGIES (RCE)

Catégories Opérateurs

RCE

Non RCE

Total

Universités et assimilés

68

2

70

Écoles et formations d’ingénieurs

24

10

34

Opérateurs de soutien à l’ESR

41

41

Autres opérateurs de l’ESR

9

27

36

Communautés d’universités et établissements

4

15

19

EPAURIF

1

1

Total – opérateurs P150

105

96

201

Source : MESRI.

Un dispositif de suivi, d’alerte et d’accompagnement des établissements a été mis en place au sein du ministère en charge de l’enseignement supérieur en 2012 afin de dresser un bilan de la situation financière nationale et de proposer des actions pour accompagner les établissements en difficulté.

Lanalyse des comptes financiers 2017 montre en effet que 8 universités présentent toujours un résultat déficitaire, contre 10 en 2016. Si le nombre d’établissements concernés est en baisse entre 2016 et 2017, le montant total des déficits cumulés, sur le même périmètre, augmente pour s’établir à 26 millions d’euros (20 millions d’euros en 2016). 15 établissements sont également dans la « grille d’alerte », document partagé par l’ensemble des acteurs du ministère afin de préciser le niveau de risque. Parmi ces 15 établissements, 6 présentent une situation très dégradée avec des difficultés financières avérées et un risque d’insoutenabilité à court ou moyen terme.

Ces 6 établissements sont :

– Pau – Pays de l’Adour ;

– Toulouse 3 – Paul Sabatier ;

– Orléans ;

– Bretagne occidentale – Brest ;

– Rennes 1 ;

– Lille.

B.   UNE STABILISATION DES EFFECTIFS SOUS PLAFOND DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Au niveau des effectifs des opérateurs, on constate une hausse tendancielle des emplois hors plafond depuis 2008, et une diminution des emplois sous plafond. À compter de 2014, la consommation des emplois sous plafond État augmente, mais demeure inférieure à son niveau de 2008. Du fait de cette progression de l’emploi hors plafond, les effectifs d’enseignants non permanents dans les établissements d’enseignement supérieur s’élèvent désormais à 19 242. Ils représentent 22,9 % de l’effectif total des personnels enseignants. Cela s’explique essentiellement par l’appropriation des nouveaux concepts et outils issus de la LRU par les établissements ainsi que par une tendance, encore trop faible, à l’augmentation des ressources propres des établissements.

Évolution des emplois du programme 150

 

RAP 2008

RAP 2009

RAP 2010

RAP 2011

RAP 2012

RAP 2013

RAP 2014

RAP 2015

RAP 2016

RAP 2017

Plafond État

162 628

164 029

164 825

161 372

158 724

157 780

158 019

158 293

159 127

159 701

Variation

 

1 401

796

 3 453

 2 648

 944

239

274

834

574

Hors plafond

6 698

12 750

15 718

20 146

22 211

23 875

24 695

26 327

26 939

27 592

Variation

 

6 052

2 968

4 428

2 065

1 664

820

1 632

612

653

Total

169 326

176 779

180 543

181 518

180 935

181 655

182 714

184 620

186 066

187 293

Variation

 

7 453

3 764

975

-583

720

1 059

1 906

1 446

1 227

Source : MESRI.

Concernant les emplois sous plafond, sans préjuger des décisions propres des établissements, le schéma demplois prévoit une évolution de 0, cest-à-dire quaucun poste supplémentaire ne sera financé sur lenveloppe destinée à la masse salariale (cf. tableau ci-dessous). Le choix fait par le Gouvernement et soutenu par le rapporteur spécial est ainsi de privilégier les moyens alloués aux chercheurs et le financement des mesures catégorielles plutôt que l’extension des effectifs sous plafond.

Évolution des crédits de personnels et des emplois sur le programme 150

Exercice

Crédits de Titre 2 du programme 150

Plafond demplois rémunérés sur Titre 2

Crédits de masse salariale hors titre 2 du programme 150

Plafond demplois rémunérés sur Titre 3 sous plafond État

2018 (LFI)

513 152 364

8 016

11 123 436 509

164 776

2019 (PLF)

526 808 533

7 960

11 294 945 741

164 838

Source : MESRI

 

 

 

Évolution des effectifs d’enseignements-chercheurs titulaires
ou stagiaires entre 2014 et 2018

Répartition par groupes de disciplines, catégorie et année

 

 

 

 

Professeurs des universités

Maîtres de conférences

Groupes de disciplines CNU

2014

2015

2016

2017

2018

2014

2015

2016

2017

2018

Groupe 1 : Droit et science politique

1 378

1 374

1 368

1 353

1 361

2 496

2 506

2 531

2 562

2 517

Groupe 2 : Sciences économiques et de gestion

1 020

1 018

1 047

1 065

1 091

2 985

3 010

3 001

3 001

2 935

SOUS-TOTAL DROIT

2 398

2 392

2 415

2 418

2 452

5 481

5 516

5 532

5 563

5 452

Groupe 3 : Langues et Littératures

1 752

1 743

1 726

1 637

1 635

4 485

4 437

4 412

4 392

4 260

Groupe 4 : Sciences humaines

2 162

2 163

2 162

2 150

2 162

4 541

4 567

4 567

4 572

4 518

Groupe Interdisciplinaire

577

580

564

553

568

1 892

1 895

1 915

1 934

1 921

Théologie

33

30

27

27

29

22

24

24

23

23

SOUS-TOTAL LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

4 524

4 516

4 479

4 367

4 394

10 940

10 923

10 918

10 921

10 722

Groupe 5 : Mathématiques et informatique

2 235

2 230

2 241

2 221

2 198

4 663

4 682

4 663

4 686

4 573

Groupe 6 : Physique

950

950

952

937

938

1 544

1 534

1 537

1 530

1 491

Groupe 7 : Chimie

1 069

1 065

1 057

1 040

1 055

2 215

2 192

2 179

2 185

2 130

Groupe 9 : Sciences de la terre

458

459

464

459

447

903

899

888

892

885

Groupe 9 : Mécaniques, Génie mécanique, Génie informatique, Energétique

2 297

2 327

2 338

2 330

2 335

4 816

4 824

4 843

4 829

4 713

Groupe 10 : Biologie et Biochimie

1 241

1 246

1 253

1 240

1 255

3 299

3 304

3 303

3 309

3 269

SOUS-TOTAL SCIENCES ET TECHNIQUES

8 250

8 277

8 305

8 227

8 228

17 440

17 435

17 413

17 431

17 061

SOUS-TOTAL PHARMACIE

585

588

587

571

561

1 224

1 225

1 226

1 205

1 202

TOTAL

15 757

15 773

15 786

15 583

15 635

35 085

35 099

35 089

35 120

34 437

Source : Fichiers Gesup 2014 et 2015 et RH-Supinfo 2016 à 2018 – hors corps spécifiques, médecine et odontologie – DGRH A1-1.

Cependant, on constate un phénomène de non-saturation des emplois qui pouvait déjà se constater dans le contexte non-RCE dans des proportions moindres (le « gap » est aujourdhui de presque 12 000 emplois sur la partie enseignement supérieur de la MIRES et de presque 20 000 emplois si lon prend en compte les organismes de recherche).

Le rapporteur spécial note ainsi que les effectifs des organismes de recherche comme le CNRS, qui prévoit un recrutement annuel de 250 postes en 2019 contre 300 postes en 2018, ne permettent pas de compenser les flux de sortie d’effectifs. Pour les universités, cela pose un problème deffectifs et de taux dencadrement, car les enseignants-chercheurs doivent également assurer dautres tâches, notamment en matière de pilotage des formations, de responsabilités collectives et dheures complémentaires à leurs services denseignement.

Ainsi, le recours excessif aux heures complémentaires pour enrayer la baisse du taux d’encadrement (environ 50 heures en moyenne par enseignant-chercheur) se fait souvent au détriment de la recherche.

L’écart entre plafond d’emplois et emplois effectifs s’explique également par la vacance frictionnelle des emplois, elle-même favorisée par l’imposition d’un calendrier annuel strict pour les recrutements par concours (les recrutements d’enseignements-chercheurs au fil de l’eau, rendus possibles par la loi LRU, constituant une exception très minoritaire) ainsi que par des effets budgétaires tels que la charge du glissement vieillissement-technicité (GVT), qui n’a fait l’objet d’une compensation durable et partielle qu’en 2015 (32 millions d’euros).

Ce sous-financement a été facteur de gels de postes et de suppressions d’emplois, ou de non-activation des 5 000 créations d’emplois allouées entre 2013 et 2017. En 2018, les établissements RCE ont toutefois bénéficié de 50 millions deuros pour financer intégralement leur GVT. La conférence des présidents d’université (CPU) évalue cependant les dépenses salariales restantes à un minimum 80 millions d’euros (50 pour la compensation de la hausse de la CSG et 30 pour le PPCR).

Concernant les obligations des personnels enseignants, on note enfin que la récente modification du statut des enseignants-chercheurs, intervenue avec le décret n° 2017-854 du 9 mai 2017, prévoit désormais une formation obligatoire des maîtres de conférences stagiaires avec une décharge de service d’enseignement de 32 heures ainsi que la possibilité, pour les maîtres de conférences nouvellement recrutés, de bénéficier d’une formation, assortie d’une décharge de service d’enseignement de 32 heures, durant les cinq années qui suivent leur titularisation.

C.   LA SUBVENTION ACCORDÉE AUX ÉTABLISSEMENTS DENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR PRIVÉS

Cette subvention, inscrite à laction 4 du programme 150, est en augmentation de 2 millions deuros par rapport à 2018 (81,9 millions deuros contre 79,9 millions deuros en LFI 2018). Elle concerne 60 établissements supérieurs privés, dont 54 établissements qualifiés EESPIG (établissements d’enseignement supérieur privés d’intérêt général) dont les missions de formation et la politique sociale sont étroitement définies avec l’État et qui participent ainsi de l’écosystème de l’enseignement supérieur sous contrat avec l’État.

Ceux-ci reçoivent 71,9 millions d’euros. Les 10 millions d’euros restants servent au fonctionnement des associations qui assurent la formation initiale des enseignants de ces établissements privés sous contrat. Le modèle des EESPIG est ainsi un modèle hybride fonctionnant avec des droits d’inscription, des apports des collectivités territoriales et des entreprises, et une subvention de l’État.

Les EESPIG sont confrontés à une arrivée massive détudiants : les effectifs sont en augmentation de 13 % entre 2015 et 2018, soit une augmentation supérieure, en tendance, à celle observée pour les universités. Ces établissements réunissent ainsi, en 2017, 106 963 étudiants en formation initiale reconnue par l’État.

Par conséquent, malgré une augmentation du montant global de la subvention, la part de la dotation par étudiant connaît un déclin régulier depuis quelques années. Ce déclin est accentué par le maintien, en 2018, d’un niveau de mise en réserve des crédits de près de 7 % (non dégelés) sur l’ensemble de la subvention reçue. Le rapporteur spécial sétonne du maintien de ce niveau de réserves, sagissant en outre de crédits dintervention, alors que lobjectif fixé par lÉtat est de 3 % pour lensemble du budget (le budget destiné aux appels à projets de l’ANR subit également le maintien d’une réserve à 8 %). Il est donc nécessaire qu’il soit respecté pour l’ensemble des subventions versées par le ministère.

En outre, les EESPIG font l’objet d’une double discrimination. Il s’agit d’une part de la contribution vie étudiante dont les ESPIG ne récupèrent que 20 euros sur les 90 euros versés par leurs étudiants. D’autre part, les bourses de mobilité internationale destinées aux étudiants boursiers publics ne peuvent désormais plus être perçues que par les établissements publics, ce qui exclut les établissements privés sous contrat. Le rapporteur spécial juge cette situation inéquitable, en particulier dans le cas des bourses daide à la mobilité internationale.

Enfin, il serait souhaitable, aux yeux du rapporteur, de permettre la délivrance de diplômes reconnus dans le schéma LMD, y compris pour des écoles privées qui auraient fait l’objet d’une certification par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les EESPIG, dont les missions de formation et la politique sociale sont étroitement définies avec l’État, et qui participent ainsi de l’écosystème de l’enseignement supérieur sous contrat avec l’État, sont concernés au premier chef.

Dans le maquis des bachelors et des diplômes d’établissements, illisible à l’international et pour de nombreuses familles, il est en effet nécessaire de permettre à ces établissements sous contrat avec l’État de délivrer des diplômes reconnus. Outre le fait que cette reconnaissance offrirait un signal supplémentaire sur la qualité du grade de licence délivré par l’ensemble des Universités, elle permettrait de meilleures équivalences internationales et une plus grande lisibilité de ces formations.


II.   LES MOYENS RENFORCÉS DU PIA ET DU GRAND PLAN DINVESTISSEMENT POUR LENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Les moyens dédiés à l’enseignement supérieur au travers de la MIRES sont complétés assez largement, depuis quelques années, par des financements extrabudgétaires liés au programme d’investissement d’avenir (PIA). Ce mouvement est amplifié par la mise en œuvre du Grand plan d’investissement (GPI), voulu par le Gouvernement et la majorité conformément aux engagements du Président de la République, à hauteur de plus d’1,5 milliard deuros qui seront mobilisés pour la transformation de lenseignement supérieur. Sur la durée du plan (2018-2022), 250 millions d’euros permettront de financer la réforme du premier cycle universitaire et 800 millions d’euros seront investis pour accélérer le développement d’universités de rang mondial.

Le PLF 2019 prévoit donc un budget de 1,05 milliard deuros au titre des investissements davenir sur lensemble de la MIRES, dont 20 % consacrés au programme 421 Soutien des progrès de lenseignement supérieur et de la recherche de la mission Programmes dinvestissement davenir (PIA).

Dans le cadre de ce programme, l’action Nouveaux cursus à luniversité a fait l’objet de deux appels à projets en 2017 et en 2018. Le premier appel à projets avait pour objectif de soutenir des programmes de grande ampleur favorisant la diversification des parcours en licence pour une meilleure réussite des étudiants ou contribuant à développer l’offre universitaire de formation professionnelle et à soutenir l’évolution des formations supérieures induite par la révolution numérique. 17 projets ont été retenus sur 66 déposés : ils seront soutenus à hauteur de 150 millions d’euros pendant 10 ans. Le second appel à projets, recentré sur la priorité de la réussite en licence, a distingué 19 projets sur 48 déposés pour un montant total de 175,9 millions d’euros. Ils seront également financés sur une période de 10 ans.

Par ailleurs, l’action Écoles universitaires de recherche, vise à valoriser des consortia équilibrés entre laboratoires, masters et doctorats, dans une logique d’excellence et de renforcement de l’attractivité nationale et internationale, avec une cible de comparaison des « Graduate schools » anglo-saxonnes. 29 projets d’EUR ont été sélectionnés lors de la première vague en octobre 2017 pour un montant total de 216,22 millions d’euros. Un appel à projets spécifique pour les IDEX et les I-SITE est envisagé en 2019. Il sagit, dans ce contexte, de financer un projet global de structuration de la recherche et de loffre de formation aux niveaux Master et Doctorat et d’améliorer la synergie entre équipes de formation et de recherche dans des axes identifiés pour leur excellence par les étudiants, les chercheurs et l’ensemble des acteurs de la recherche publique et privé.

 

Enfin, l’action Territoires dinnovation pédagogique, dotée de 250 millions d’euros, comporte plusieurs volets :

 dispositifs territoriaux pour lorientation vers les études supérieures (70 millions d’euros), dont le but est de favoriser la transition entre l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur en mobilisant l’ensemble des acteurs à l’échelle d’un territoire ;

 solutions numériques pour lorientation vers les études supérieures – MOOC (10 millions d’euros), dont l’objectif est de développer des outils et des ressources numériques destinés à améliorer la transition « bac–3/bac+3 » et d’aider les futurs étudiants à s’orienter vers les filières les plus adaptées à leur projet et à leur profil ;

 écoles supérieures du professorat et de léducation (30 millions deuros), qui vise à répondre à l’enjeu majeur de la formation et, plus largement, du développement professionnel des enseignants tout au long du parcours professionnel en faisant émerger des pôles de recherche, de formation et de transfert des meilleures pratiques pédagogiques, portés par des universités, en lien étroit avec des établissements scolaires et les services académiques concernés.

Le P.I.A. 3 accompagnera enfin lintégration des « Grandes universités de recherche » pour amplifier leur stratégie dexcellence au meilleur niveau international et leurs relations avec le monde économique (700 millions deuros de dotations décennales). L’action Grandes universités de recherche vient également en appui des actions Nouveaux Cursus et Écoles Universitaires de Recherche en finançant les projets lauréats portés par des IDEX ou des I-SITE.

Une action propre Soutien aux universités européennes, réservée aux IDEX et aux I-SITE sera mise en place pour un montant de 100 millions d’euros de dotations décennales. Ces crédits seront attribués aux établissements français participant à des projets d’universités européennes lauréats des appels à projets de la Commission européenne.


III.   UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA VIE ÉTUDIANTE (PROGRAMME 231)

Le programme 231 Vie étudiante, recouvre les moyens budgétaires qui permettent à des étudiants, grâce aux aides directes et indirectes dont il est le support, de poursuivre des études auxquelles ils seraient contraints de renoncer sans ce soutien et d’améliorer leurs conditions de vie. Cela influe directement sur leur réussite académique, leur préparation à une insertion durable dans l’emploi et leur confiance en l’avenir. Le réseau des œuvres universitaires (CNOUS et CROUS) est le vecteur principal de cette politique.

Les crédits ouverts en loi de finances initiale pour lannée 2018 pour ce programme se sont élevés à 2,69 milliards deuros en AE et en CP. Ils sont portés à 2,70 milliards deuros en AE et CP en PLF 2019, soit une légère augmentation de 7 millions deuros précisément.

Toutefois, la vie étudiante et le pouvoir dachat des étudiants ont été améliorés par la suppression de la sécurité sociale étudiante et la mise en œuvre de la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), qui permettent non seulement de rendre 140 euros à chaque étudiant (soit 130 millions deuros au total), mais aussi dinvestir 100 millions deuros pour améliorer les conditions de vie étudiante dans les domaines de la politique de prévention et daccès aux soins des étudiants, de laccompagnement social, du développement de la pratique sportive et de laccès à la culture.

Par ailleurs, depuis la loi ORE, les étudiants peuvent être exonérés du paiement des droits d’inscription sur décision du président de l’établissement, si leur situation personnelle le justifie et dans la limite de 10 % des étudiants inscrits.

Concernant les ressources des CROUS, le prix du ticket restaurant à 3,25 euros est stable pour la troisième année consécutive. Conformément aux engagements du Gouvernement sur le plan Étudiants annoncés le 30 octobre 2017, le pouvoir dachat des étudiants est donc en augmentation à la rentrée 2018.

Enfin, sur le plan du logement, le gouvernement a lancé un nouveau plan quinquennal de 60 000 logements étudiants, dans le prolongement du plan précédent. 22 195 nouveaux logements étudiants seront construits d’ici à 2020.

 

 

A.   LA STABILISATION DES BOURSES ET AIDES PORTÉES PAR LE PROGRAMME 231

Le programme 231 finance des aides directes et indirectes pour les étudiants qui en ont le plus besoin.

Les aides directes sont celles accordées aux étudiants boursiers : elles représentent 2 259 millions deuros en AE et en CP, soit le même montant quen LFI 2018.

Les bourses sur critères sociaux représentent la quasi-totalité de la dépense au titre des aides directes (2 230 millions deuros). Ces bourses concernent une prévision de 717 143 étudiants boursiers en 2019, en hausse de 2,68 % par rapport à 2018, soit un taux similaire au nombre d’étudiants inscrits dans l’enseignement supérieur à la rentrée 2018. Un nouveau calendrier de versement permettra aux étudiants boursiers de mieux construire leur budget et de faire face plus facilement aux dépenses courantes. Pour la première fois, les CROUS mettront en paiement les bourses avant le 5 de chaque mois et cela tout au long de l’année.

Les aides indirectes connaissent en revanche une légère progression (de 274 millions deuros en LFI 2018 à 286 millions deuros en PLF 2019).

Dans le cadre du Plan Étudiants annonce le 30 octobre 2017, un ensemble de mesures sont mises en place afin d’améliorer la réussite des étudiants : cela suppose notamment d’accompagner les jeunes bacheliers dans leur mobilité lorsque des contraintes matérielles ne leur permettent pas d’envisager sereinement une mobilité qui les mettrait en mesure de suivre une formation au plus près de leurs projets. C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité mettre en place une aide spécifique à la mobilité pour les étudiants entrant en premier cycle et construire un dispositif daccès a cette aide qui permette aux recteurs de la mobiliser, en lien avec les CROUS, pour accompagner au mieux les projets des futurs étudiants. Son montant est compris entre 200 et 1 000 euros.

Par ailleurs, pour la deuxième année consécutive, les étudiants boursiers titulaires du diplôme national de licence qui changent de région académique entre leur troisième année de licence et leur inscription en première année du diplôme national de master bénéficient, en complément de leur bourse, d’une aide à la mobilité d’un montant de 1 000 euros.

Enfin, en matière de caution locative, le dispositif VISALE est étendu à la rentrée universitaire 2018 à tous les étudiants. VISALE est désormais le seul dispositif de caution locative gratuit. Il permet aux étudiants dont les parents ne peuvent pas se porter caution pour leur logement, de bénéficier d’un cautionnement gratuit ouvert sans condition de ressources.

 

B.   Le budget des CROUS et du CNOUS

Le montant global des crédits destinés aux CNOUS et CROUS pour 2019 est de 482,28 millions d’euros, stable par rapport à 2018.

Ventilation des crédits par action et par titre au PLF 2019

(En AE= CP)

(en millions d’euros)

 

SCSP

Dotations en fonds propres

Titre 6

Dépenses dintervention

TOTAL par action

Action 1

29,17

-

85,88

115,05

Action 2

171,42

92,59

-

264,01

Action 3

3,47

-

-

3,47

Action 4

97,12

2,63

-

99,75

Total par titre

301,18

95,22

85,88

482,28

Source : MESRI

Les crédits ouverts au PLF 2019 au titre des subventions pour charges de service public, d’un montant de 29,17 millions d’euros, sont destinés à couvrir la rémunération et les charges connexes des personnels administratifs chargés de la gestion des aides directes dans les 28 CROUS. Le montant de 85,88 millions d’euros alloué sur le titre 6 correspond au total des crédits des aides suivantes :

– aides spécifiques (48,78 millions d’euros) ;

– aide à la recherche du premier emploi (28 millions d’euros) ;

– aide à la mobilité master (6,1 millions d’euros) ;

– aide dans le cadre de la Grande École du Numérique (3 millions d’euros).

Par ailleurs, 171,42 millions d’euros sont destinés à financer les dépenses relatives à la gestion du logement et de la restauration universitaires, dont 15,49 millions d’euros pour la fonctionnarisation des personnels ouvriers du réseau des œuvres universitaires. Cette subvention est complétée d’une dotation en fonds propres de 92,59 millions d’euros destinée à financer les investissements du réseau pour ses activités logement et restauration.

Enfin, 97,12 millions d’euros sont destinés à financer la rémunération de personnels administratifs du réseau, les actions spécifiques et le fonctionnement du réseau des œuvres.

 

C.   Les prêts étudiants garantis par la BPI demeurent à un niveau faible

Un système de prêts bancaires garantis par l’État est ouvert à tous les étudiants qui le souhaitent, lesquels sont ainsi dispensés de caution bancaire ou familiale. Ce prêt permet de diversifier les sources de financement des étudiants et contribue à renforcer l’égalité des chances entre les étudiants devant l’emprunt. D’un montant maximal de 15 000 euros, ce prêt est ouvert à l’ensemble des étudiants sans condition de ressources et sans caution parentale ou d’un tiers. La possibilité de rembourser l’emprunt de manière différée est prévue. Le risque de défaillance est garanti par l’État à hauteur de 70 %.

Les réseaux bancaires qui offrent ce type de prêts sont les Caisses d’épargne et Banque Populaire du groupe BPCE, le Crédit mutuel, le Crédit industriel et commercial, et la Société générale. Le fonds de garantie mis en place est géré par BPI France. À fin décembre 2017, 58 650 prêts ont été accordés pour un montant total de près de 503 millions d’euros (soit un montant moyen de 8 600 €) et une durée moyenne légèrement supérieure à 6 ans (comprenant un différé de 2 ans). Les étudiants bénéficiaires de la garantie sont issus de toutes les filières et de tous les niveaux d’études.

Cependant, le volume de crédits limité accordé à ce type de garanties par lÉtat, soit 2 millions deuros en PLF 2019, limite le risque pris par un certain nombre détablissements bancaires au profit des étudiants les plus vulnérables. Il sagit certainement dun dispositif à renforcer.

D.   La valorisation du parc immobilier universitaire et le plan logement

Le parc immobilier universitaire, propriété de l’État pour l’essentiel, se caractérise par son étendue : 5 600 hectares de foncier non bâti, plus de 6 500 bâtiments représentant 18,6 millions de m². Il représente ainsi un actif stratégique mais aussi une charge à optimiser pour le MESRI et les établissements publics d’enseignement supérieur qui en assurent l’exploitation et l’entretien (il s’agit du deuxième poste de dépenses après la masse salariale dans le budget des opérateurs).

Lenveloppe contractualisée par lÉtat pour lenseignement supérieur, dans le cadre des CPER, représente 1 033,30 millions deuros (y compris les Collectivités dOutre-mer pour 8 millions deuros) dont 933,73 millions deuros sur le programme 150 pour des opérations immobilières universitaires et 99,57 millions deuros sur le programme 231 pour des opérations concernant le logement étudiant. Le taux dexécution du CPER 2015-2020 devrait atteindre 60,4 % fin 2018 (dont 59,4 % sur le programme 150 et 69,2 % sur le programme 231).

 

Toutefois, étant donné létat dégradé de plus dun tiers du patrimoine immobilier universitaire, le besoin en financement dune rénovation complète, non déjà pris en charge par le CPER 2015-2020 ou lopération Campus, est estimé à 7 milliards deuros.

Le rapporteur spécial souligne à ce titre que la dévolution du patrimoine immobilier aux établissements constitue un renforcement majeur de leur autonomie dautant plus quelle est considérée comme porteuse de progrès dans tous les domaines de la politique immobilière.

Pour mener à bien une politique immobilière soutenable financièrement, les établissements sont en effet incités à mettre en œuvre une véritable stratégie patrimoniale cohérente des sites qui se traduit par l’élaboration de schémas directeurs immobiliers dans lesquels doit être recherchée une maîtrise des besoins en surfaces et de leur impact financier (anticipation des coûts induits par les investissements immobiliers, programme pluriannuel immobilier…). À cet effet, le MESRI porte la nouvelle campagne de schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) des opérateurs, lancée fin 2016 et pilotée par la direction de l’immobilier de l’État (DIE).

Par ailleurs, au titre du Plan 40 000 logements pour les étudiants, les différents acteurs mobilisés ont créé 40 391 places nouvelles sur la durée de ce plan, avec 20 487 places en province et 19 904 places en Île-de-France. Ces places sont principalement ouvertes dans 11 académies (Aix-Marseille, Bordeaux, Créteil, Lille, Lyon, Nantes, Nice, Paris, Strasbourg, Toulouse, Versailles).

Avec 19 904 places créées, la région Île-de-France, qui comprend trois académies, et était sollicitée pour 20 000 places environ, soit la moitié de la production nationale, a atteint cet objectif. Plusieurs modifications de la réglementation ont été effectuées pour faciliter la construction et la gestion de résidences pour étudiants, notamment la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à légalité et la citoyenneté qui a donné la possibilité aux bailleurs sociaux de construire, acquérir et gérer des résidences universitaires dans les nouvelles conditions définies dans le code de la construction.

Le lancement dun nouveau Plan quinquennal de 60 000 logements étudiants qui sinscrit dans le prolongement du plan précédent a été décidé par le Gouvernement avec linstallation dune mission interministérielle le 14 février 2018. Enfin, un observatoire national du logement étudiant a été installé à la rentrée 2018.

 

 

IV.   LE DÉVELOPPEMENT SOUHAITABLE DE LA FORMATION CONTINUE DANS LENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Ces trois dernières années, la formation continue universitaire a bénéficié de la mise en œuvre de la feuille de route pour la formation tout au long de la vie élaborée en mars 2015. Elle ciblait des marges de progression dans différentes dimensions, au sein des établissements (stratégie, organisation, ressources humaines, réglementation, etc.).

Les travaux engagés au sein du groupe pilote constitué par les lauréats de deux appels à manifestation d’intérêt lancés en 2016 et 2017 ont permis à cette feuille de route de se concrétiser sous forme d’outils tels que le référentiel de coûts complets, un catalogue de textes réglementaires, un projet de portail national de l’offre de formation professionnelle de l’enseignement supérieur public. De plus, les orientations prises par le ministère en matière de certification pour rendre les diplômes plus visibles et plus lisibles, notamment à travers leur construction fondée sur une approche compétences et leur inscription au répertoire national des certifications professionnelles, ont contribué à améliorer la qualité de la formation continue et le service rendu aux usagers.

Toutefois, le chiffre d’affaires global des établissements de l’enseignement supérieur reste relativement stable. Il est à noter que celui du CNAM diminue alors que celui des universités progresse de 2,1 % par rapport à l’année 2015. Au regard des éléments disponibles, il n’est pas possible d’estimer la part du chiffre d’affaires de l’activité formation continue au regard des ressources propres des universités.

Volumes financiers (chiffre d’affaires)

(en millions d’euros)

 

2015

2016

Évolution

Universités, INP, UT et écoles

326

333

2,1 %

CNAM : EP et CRA

119

116

– 2,5 %

Ensemble

445

449

0,9 %

Source : MESRI

En outre, le nombre de stagiaires a diminué entre 2015 et 2016, alors que le nombre d’heures de formation s’est stabilisé. Cela traduit une demande plus forte pour des formations dont le volume horaire est supérieur à 100 heures (diplômes nationaux et diplômes d’universités).

Nombre de stagiaires de la formation continue

(en milliers)

 

2015

2016

Évolution

Universités, INP, UT et écoles

377

355

– 5,84

CNAM : EP et CRA

83

83

0,00

Ensemble

460

438

– 4,78

Source : MESRI

En revanche, on constate que le nombre de diplômes nationaux et diplômes duniversités délivrés est en nette croissance.

Diplômes délivrés dans les universités, INP, IUT, UT

 

2015

2016

Évolution

Diplômes nationaux

52 473

56 358

7,4 %

Diplômes d’Université

32 938

34 154

3,7 %

Total

85 411

90 512

6,0 %

 

Le rapporteur spécial souligne ainsi la nécessité de continuer à faciliter la mise en place de mécanismes de formation continue au sein des établissements du supérieur, dans le secteur public comme dailleurs dans le secteur privé. Cela va de pair avec la question qui doit être posée de la reconnaissance des formations délivrées par ces établissements, notamment par l’attribution de diplômes d’État pour ceux qui sont contrôlés par le HCRES au même titre que les établissements du public.

 


—  1  —

   Examen en commission

Lors de sa deuxième réunion du lundi 29 octobre 2018, la commission examine les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur.

(…)

M. Fabrice Le Vigoureux, rapporteur spécial (Enseignement supérieur). Comme l’a rappelé Amélie de Montchalin, les crédits de la MIRES seront en hausse : ils s’élèveront au total à 28,17 milliards d’euros, alors qu’ils n’étaient que de 26,6 milliards d’euros en 2017. Cela représente une augmentation de 1,5 milliard d’euros en trois ans.

En ce qui concerne la partie relative à l’enseignement supérieur, c’est-à-dire les programmes 150, Formations supérieures et recherche universitaire, et 231 Vie étudiante, l’augmentation sera de 173 millions d’euros par rapport à la LFI pour 2018. Il y aura 166 millions d’euros d’augmentation pour le programme 150 et 7 millions d’euros supplémentaires pour le programme 231. Par ailleurs, le Gouvernement prévoit de reporter 43 millions d’euros non consommés sur 2019, ce qui portera le total des ouvertures de crédits à 216 millions d’euros. Les crédits s’élèveront à 13,52 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 13,6 milliards d’euros en crédits de paiement (CP) pour le programme 150, et à 2,7 milliards d’euros en AE comme en CP pour le programme 231.

Les crédits de masse salariale et les subventions pour charges de service public récurrentes qui sont versées aux opérateurs augmenteront de 117,8 millions d’euros par rapport à 2018, ce qui représente une hausse de 1 %. Cela permettra aux universités de financer des mesures salariales, au premier rang desquelles figurent le glissement vieillesse technicité et la titularisation d’une partie des personnels contractuels, comme le prévoit la loi du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dite loi « Sauvadet ».

La recherche universitaire bénéficiera d’une augmentation de 34 millions d’euros, en autorisations d’engagement, des crédits accordés à l’ANR. Nous sommes toutefois conscients que cela ne suffit pas : sur près de 6 000 dossiers déposés auprès de l’ANR l’an dernier, seul un millier a été retenu. Il en résulte une perte de temps et d’énergie pour les chercheurs qui ont déposé les 5 000 autres dossiers. Il faut tendre vers un ratio beaucoup plus incitatif, ou en tout cas moins décourageant, pour les équipes de chercheurs – c’est d’ailleurs que l’on fait.

Le budget des universités sera également renforcé par des crédits du Grand plan d’investissement, qui consacrera 1,55 milliard d’euros sur le quinquennat à l’enseignement supérieur, sur un total de 7,6 milliards d’euros destinés à l’enseignement supérieur, à la recherche et à l’innovation. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2019 prévoit 1,05 milliard d’euros au titre des investissements d’avenir pour l’ensemble de la MIRES, dont 20 % iront au programme Soutien des progrès de lenseignement supérieur et de la recherche. Deux actions sont privilégiées dans ce cadre.

La première est relative aux « Nouveaux cursus à l’université ». Dotée de 250 millions d’euros en autorisations d’engagement, cette action doit favoriser une meilleure prise en compte de la diversité géographique et sociale des étudiants qui arrivent dans le premier cycle de l’enseignement supérieur. Avec l’adoption de la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, en mars dernier, et la mise en œuvre de Parcoursup, on voit bien que la réforme du premier cycle est une priorité. L’objectif est de diminuer l’échec au cours des premières années et de faciliter l’orientation et le suivi des étudiants. Cela devrait permettre, à court et moyen termes, une meilleure efficacité de la dépense, car les erreurs d’orientation et de parcours des étudiants coûtent cher à l’ensemble du système. Cette réforme est d’autant plus nécessaire dans le contexte démographique sous tension que nous connaissons : il y aura environ 350 000 étudiants supplémentaires dans dix ans alors que les capacités d’absorption du système arrivent à saturation.

La seconde action a pour objet le développement d’universités de rang mondial. Elle dispose d’une dotation décennale de 700 millions d’euros en vue de favoriser les passerelles entre les universités, les centres de recherche et le monde économique. Une enveloppe spécifique de 100 millions d’euros est prévue pour les projets européens.

En ce qui concerne la structure des opérateurs de la mission, en particulier les universités, le passage aux responsabilités et compétences élargies est devenu le droit commun de toutes les universités – 105 établissements bénéficient désormais de ce régime. Trop d’universités, cependant, demeurent dans une situation financière difficile, et l’écart entre le plafond d’emplois autorisés et l’emploi effectif demeure important : il est de près de 12 000 équivalents temps plein. Cela doit nous amener à réfléchir à un nouvel équilibre entre les moyens récurrents et les financements par appels à projets, ce dernier mode de financement ayant vraisemblablement pris trop de place.

Il y a aussi le grand chantier des ressources propres, qu’il est nécessaire de diversifier et d’augmenter afin de permettre aux établissements d’avoir une réelle autonomie. En 2017, les ressources propres des universités représentaient 2,2 milliards d’euros, soit 16 % de leur budget de fonctionnement. Ce montant n’avait alors augmenté que de 10 millions d’euros par rapport à 2014. Une telle stagnation est assez préoccupante. Le renforcement de l’offre de formation continue peut être un moyen d’y remédier en partie. Sur ce point, des blocages peuvent encore être levés. Par ailleurs, la possibilité offerte aux établissements de monter des programmes internationaux attractifs et mieux autofinancés reste largement sous-utilisée, ce qui nuit certainement au rayonnement de nos formations universitaires.

Je voudrais également plaider pour que l’on facilite la délivrance de diplômes reconnus dans le schéma « licence, master, doctorat » dans des écoles qui font l’objet d’une certification par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il s’agit en particulier des établissements d’enseignement supérieur privé d’intérêt général, dont les missions de formation et la politique sociale sont étroitement définies avec l’État, et qui participent à l’écosystème de l’enseignement supérieur sous contrat avec l’État. Il existe un véritable maquis des « bac+3 », des bachelors et des diplômes d’établissement : c’est absolument illisible à l’international et pour beaucoup de familles. Il serait pertinent de faire un certain ménage et de permettre aux établissements sous contrat avec l’État de délivrer des diplômes reconnus. Il y va de l’insertion professionnelle des étudiants et de l’attractivité globale de notre système d’enseignement supérieur.

En ce qui concerne le volet relatif à la vie étudiante, le montant attribué aux bourses sur critères sociaux demeurera stable, à 2,1 milliards d’euros, de même que les moyens alloués aux centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), qui s’élèveront à 480 millions d’euros. La contribution « vie étudiante et de campus » permettra d’allouer plus de 100 millions d’euros à l’amélioration des conditions de vie des étudiants, et le ticket de restaurant universitaire restera gelé à la rentrée 2019 afin de maintenir le pouvoir d’achat des étudiants. Enfin, le Grand plan d’investissement prévoit la construction de 60 000 logements pour des étudiants et de 20 000 logements pour de jeunes actifs. Ces logements seront accessibles sans dépôt de garantie ni demande de caution. D’ici à 2020, 22 000 logements étudiants ont déjà été identifiés.

M. Julien Aubert. J’ai bien entendu ce que propose la rapporteure spéciale, et je suis d’accord avec l’idée que le financement du CEA est un véritable sujet, notamment en ce qui concerne le programme ASTRID : c’est un projet de quatrième génération qui est extrêmement important pour garantir le cycle et le retraitement des déchets. Il y a d’abord un problème politique : la loi de 1991 qui portait sur le projet de centre industriel de stockage géologique (Cigéo) avait prévu que les déchets seraient certes enfouis, mais qu’il y aurait une recherche sur la transmutation. À défaut, on va mettre du plutonium dans Cigéo alors que les populations n’avaient pas été prévenues que cela se produirait. Il existe ensuite un problème technique : on risque tout simplement d’asphyxier la filière nucléaire sous les déchets, ce qui fera le bonheur de tous ceux qui expliquent qu’ils sont un problème du nucléaire, mais pas le bonheur du citoyen sous l’angle énergétique.

S’agissant du démantèlement, sujet sur lequel j’ai commis un rapport avec Barbara Romagnan, il faut bien voir que le CEA est un cas à part : il bénéficie, en la matière, de dotations de l’État, contrairement à EDF et à d’autres acteurs, tels qu’Orano, qui font appel à leurs fonds propres et doivent constituer des provisions. Chacun étant responsable de ses installations, je ne crois pas qu’il soit possible de mutualiser les provisions du CEA avec celles d’EDF et d’Orano – c’est ce que vous avez proposé, si j’ai bien compris vos propos. C’est d’autant moins possible que les installations du CEA ont pour particularité d’être des prototypes, qui sont très différents entre eux, et pour lesquels l’idée de constituer une filière est plus compliquée que dans le cas d’EDF, par exemple. EDF a des dizaines de réacteurs qui se ressemblent, ce qui permet une courbe d’apprentissage et un effet d’échelle, alors que ce n’est pas possible au CEA.

Lorsque nous avons fait notre rapport, c’était à peu près le seul domaine où l’on avait une idée des dotations et où il n’y avait pas de problème de quantification. Je suis donc un peu surpris que vous voyiez une difficulté, mais je vous ai peut-être mal comprise. En tout cas, l’idée de partager la manne n’est ni possible juridiquement, en termes de responsabilité, ni souhaitable budgétairement, car cela reviendrait à mélanger des choux et des carottes.

M. Michel Larive. En ce qui concerne la recherche fondamentale, le Gouvernement adopte une logique de privatisation en développant l’entrepreneuriat et les interactions entre la recherche publique et les entreprises. L’objectif est toujours le même : faire porter sur la dépense publique la part non rentable de la recherche et privatiser le secteur capable de produire de la plus-value : c’est une façon d’organiser la fuite des investissements publics vers les entreprises.

Nous remarquons aussi que le budget alloué à la recherche dans les domaines de lénergie, du développement et de la mobilité durables diminue de 36 millions deuros, cestàdire de 2 %. Nous avons beaucoup de mal à comprendre la logique de cette baisse des crédits : navons-nous pas besoin, en la matière, dune recherche accrue et soutenue par lÉtat ?

Le programme 150, relatif aux formations supérieures et à la recherche universitaire, est un parfait exemple de la démarche du Gouvernement : les crédits prévus sont en baisse de 63 millions d’euros, soit de 0,46 %, alors que le nombre total d’étudiants est en très forte hausse. Si l’on prend en compte la progression des effectifs depuis cinq ans, on voit que le budget par étudiant a diminué de 10 %. C’est un signe clair du désengagement de l’État à l’égard des questions universitaires.

Le budget pour 2019 n’est en aucun cas un budget de rupture, chacun le sait. Nous avons l’impression que le Gouvernement pose tout simplement la question suivante : l’université doit-elle rester publique ? À nos yeux, la recherche et l’université sont deux piliers de la puissance de la France à l’intérieur de ses frontières et à l’international. C’est pourquoi nous défendrons une série d’amendements qui visent à corriger certains manquements dans ce PLF pour 2019.

M. Charles de Courson. Je voudrais revenir sur le CEA. La « présentation stratégique » du projet annuel de performances (PAP) du programme 190 rappelle que, « en matière de nucléaire civil, le CEA mène des programmes de recherche et dinnovation dans deux grands domaines : le soutien à lindustrie nucléaire française, notamment avec la construction du réacteur de recherche Jules-Horowitz, et le développement de systèmes nucléaires de quatrième génération avec le programme ASTRID ». Pourriez-vous faire le point sur ce volet ? Où en est-on notamment de la construction du réacteur ASTRID ? Les crédits dont le CEA dispose permettent-ils d’avancer dans des délais raisonnables ?

Je vais maintenant vous lire l’indicateur 3.1 que je trouve très amusant. Il concerne le « taux de grands projets d’investissement n’ayant pas dépassé de plus de 10 % le coût à terminaison incluant la marge pour aléas sur responsabilité CEA ». Le taux prévisionnel était de 85 % dans le PAP pour 2018, mais on serait en réalité à 70 %, aux dernières nouvelles. Il existe une explication savoureuse, que je vais également citer : « Il est à noter que les projets en dépassement de coût concernent principalement les installations de service nucléaire utilisées au profit des programmes dassainissement-démantèlement (6 sur 8 en 2017 et 2018). Ils ont essentiellement été causés par des aléas techniques, des nouvelles exigences dautorités compétentes (sûreté nucléaire ou inspection du travail) ou des défaillances du maître dœuvre prestataire. » La rapporteure spéciale a-t-elle eu le temps de mettre son nez dans cette affaire ? Comment de tels dépassements des programmes – il en existe vingt‑six – s’expliquent-ils ?

Mme la rapporteure spéciale. Vous parlez bien du programme 190 ?

M. Charles de Courson. Tout à fait. Vous avez d’ailleurs évoqué, dans votre propos liminaire, la question du réacteur Jules-Horowitz, et M. Julien Aubert vous a interrogée sur le programme ASTRID.

Mme Sarah El Haïry. Je voudrais poser une question à Amélie de Montchalin sur la question du mécénat, et plus particulièrement sur les fondations qui accompagnent les universités. Ces fondations ne sont reconnues d’utilité publique que dans très peu de cas, et on a vu les réactions à l’idée d’un plafond de 10 millions d’euros. Quelle est votre analyse ? Partagez-vous les craintes actuelles ? Comment accompagner les fondations qui soutiennent la recherche et les étudiants afin de mieux maîtriser les dépenses fiscales tout en restant performant ? Ces acteurs apportent des réponses bien spécifiques, en fonction des spécialités des territoires.

Mme la rapporteure spéciale. Je vais répondre conjointement à Julien Aubert et à Charles de Courson en ce qui concerne le CEA. Ce que j’ai voulu dire à propos du démantèlement et de l’assainissement, c’est qu’il est très sain d’avoir 740 millions d’euros bien identifiés pour ces opérations au CEA, mais que, comme Charles de Courson l’a souligné, l’efficacité de ces dépenses est en deçà des attentes car il y a des retards, des surcoûts et un suivi à améliorer fortement. C’est pourquoi j’ai dit qu’il est important d’être bien clair sur ce que ces 740 millions d’euros permettent de faire chaque année. Il existe un lissage budgétaire annuel qui est assez préjudiciable au CEA, car celui-ci n’a pas exactement besoin de 740 millions d’euros tous les ans – un peu plus de souplesse pluriannuelle aiderait. Yannick d’Escatha a été missionné par François Jacq et le Gouvernement pour mener un audit très précis et très complet sur la situation et sur la meilleure manière de conduire les projets de démantèlement. Mon idée n’était pas de mutualiser les moyens mais de s’assurer que toutes les connaissances scientifiques, d’expertise d’ingénierie et issues des opérations de démantèlement, notamment celles de sites pollués pendant des décennies, permettent à EDF et aux autres acteurs concernés de s’organiser. Il est essentiel d’avoir une filière industrielle en matière de démantèlement et de retraitement des déchets nucléaires.

Je suis d’accord avec ce qui a été dit à propos du réacteur ASTRID. De mémoire, 750 millions d’euros ont déjà été dépensés pour des études et des prévisions, mais il n’y a pas de crédits pour financer la construction effective du réacteur. Comme vous l’avez souligné, c’est une brique essentielle pour la fermeture du cycle et donc pour la viabilité de notre politique nucléaire.

Je reviens sur l’amendement déposé par Émilie Cariou : il est essentiel de disposer d’une expertise complète, en termes de sûreté et d’enjeux financiers, sur les solutions techniques permettant de gérer à très long terme les déchets nucléaires, que ce soit l’enfouissement ou d’autres technologies. La transmutation dont vous avez parlé est coûteuse, mais nécessaire si l’on veut enfouir durablement les déchets. Mon propos était qu’il y a matière à travailler sur les plans budgétaire, technique, scientifique et technologique, et que l’investissement public réalisé doit non seulement garantir notre sûreté en ce qui concerne les déchets radioactifs, mais aussi permettre l’émergence d’acteurs économiques compétitifs.

J’espère avoir été très claire et avoir répondu à vos interrogations – mais j’ai l’impression que nous aurons à en reparler plus tard...

Je ne sais pas très bien où M. Larive trouve une baisse des crédits de 36 millions d’euros. La nomenclature budgétaire a évolué entre 2018 et 2019 : l’ancienne action Recherche dans le domaine de lénergie a été scindée en deux lignes. Le total, qui s’élève à 610 millions d’euros, est supérieur au montant antérieur, qui était de 606 millions. Il y a donc une augmentation des crédits, et non une baisse.

S’agissant du mécénat, je pense que c’est plutôt Fabrice Le Vigoureux qui vous répondra, car les universités relèvent du programme 150.

M. Charles de Courson. Il y avait aussi une question concernant le réacteur Jules-Horowitz...

M. le rapporteur spécial. Il n’y a pas de diminution de 63 millions des crédits du programme 150, monsieur Larive, que ce soit en AE ou en CP – ces derniers augmentent de 166 millions d’euros.

Je ne partage pas vos propos sur la privatisation de notre système d’enseignement supérieur : 98 % de la formation initiale des étudiants sont financés par l’État, et à peine 2 % par les étudiants eux-mêmes. Ce système public, auquel nous sommes nombreux ici à être attachés, n’est en rien menacé par ce budget.

Je n’ai pas d’éléments particuliers à apporter au débat en ce qui concerne les fondations. Il est clair, néanmoins, que les fondations universitaires sont sous-développées dans notre système d’enseignement supérieur. Il n’est pas dans la culture et les modèles de financement de nos établissements de s’appuyer beaucoup sur ce levier. Je ne suis même pas sûr que le seuil de 10 millions d’euros soit atteint, à part dans quelques établissements très spécifiques. Il y a beaucoup à faire dans ce domaine : l’un des principaux leviers pour augmenter les ressources propres est de valoriser l’offre de formation auprès des entreprises, notamment sous la forme de modules courts, et de développer une logique de capitalisation pour permettre des parcours de formation continue, tout au long de la vie.

La commission en vient à lexamen des amendements.

Article 39 et état B

La commission examine lamendement II-CF642 de Mme Sabine Rubin.

M. Michel Larive. Cet amendement vise à transférer les crédits de l’ANR au CNRS. L’ANR, organe de sélection et de répartition des crédits entre les programmes de recherche, constitue un échelon administratif supplémentaire qui complexifie et ralentit le processus scientifique. Il est plus que nécessaire de privilégier l’efficience de la recherche française en soutenant financièrement les opérateurs tels que le CNRS, dont la seule vocation est la production scientifique.

Le CNRS, qui a été créé après la Libération, a fonctionné de façon autonome jusqu’en 2005, date de création de l’ANR. Pendant plus de cinquante ans, le CNRS a donc mené des programmes de recherche qui ont débouché sur des découvertes majeures, récompensées par les plus hautes distinctions internationales.

Cet établissement public a subi par la suite un lent détricotage de ses prérogatives dont certaines, comme l’évaluation et la répartition des crédits entre les programmes de recherche, ont été confiées à l’ANR.

En conséquence, et pour assurer la recevabilité financière de cet amendement, le nouveau programme Centre national de la recherche scientifique est abondé des crédits de l’action 02 Agence nationale de la recherche, ainsi que des crédits qui revenaient de droit au CNRS.

Mme la rapporteure spéciale. Nous ne souhaitons pas opposer le financement par appel à projets et le financement récurrent. C’est pourquoi que je me félicite que le financement récurrent augmente. Nous avons vu, en 2017, un taux de sélection des projets de l’ANR atteindre 15 %. C’est bien parce que c’est trop peu que nous continuons à augmenter de 86 millions d’euros, en 2019, les crédits de paiement de l’ANR et que je plaide, ce que vous verrez dans un amendement à venir, pour une baisse de la mise en réserve des crédits alloués à l’ANR pour regagner quasiment 2 points de succès sur les appels à projets.

Il n’est pas du tout illégitime qu’une société comme la nôtre puisse exprimer des choix sur les projets qu’elle souhaite financer en particulier. Il y a une stratégie nationale de recherche qui amène à des appels à projets, et qui permet, comme dans tous les grands pays scientifiques du monde, d’orienter une partie de notre recherche sur des sujets d’importance sociétale particulière. Je pense que la suppression de l’ANR amènerait, dans de nombreux cas, à une baisse des crédits, y compris du CNRS puisqu’il bénéficie, comme beaucoup d’autres opérateurs, de ces crédits d’appels à projets quand ils font partie des projets retenus. Vous remarquerez que le CNRS a vu sa stratégie totalement soutenue par le Gouvernement puisque l’effort est mis aujourd’hui sur l’appel à des doctorants qui pourront faire leur thèse au CNRS pour soutenir les projets internes où le CNRS voudra, par stratégie interne et décidée de manière collégiale, abonder des crédits.

Avis défavorable.

La commission rejette lamendement.

Puis elle étudie lamendement II-CF623 de M. Éric Coquerel.

M. Michel Larive. Il est proposé de créer, au sein de cette mission, un nouveau programme, le programme 901, intitulé Recherche pour la transition écologique.

Cet amendement vise à doter les opérateurs financés sur l’action 13 Recherche partenariale dans le développement et laménagement durable du programme 190 d’une part, et sur les activités financées par l’action 16 Recherche dans le domaine de lénergie nucléaire d’autre part. Nous souhaitons insister sur l’urgence climatique, qui doit présider à tout projet de recherche.

S’il est évident qu’il faut lutter pour la transition écologique et qu’une partie de la recherche doit être consacrée à la transformation d’un parc énergétique durable, propre et sans danger, il semble que ce n’est clairement pas la voie suivie par le Gouvernement. Nous souhaitons donc, pour abonder ce nouveau programme, diminuer à due concurrence les actions 13 et 16 du programme 190.

Mme la rapporteure spéciale. Au vu de la discussion qui vient de se tenir, je souhaite alerter mes collègues sur le fait que si nous votions votre amendement, nous supprimerions une grande partie des crédits destinés à la recherche sur le retraitement des déchets nucléaires, sur la sûreté des centrales nucléaires, sur le démantèlement, et plus généralement sur la fermeture du cycle.

Ces crédits sont évidemment nécessaires pour affronter les défis qui sont devant nous, que nous soyons ou non favorables à l’énergie nucléaire. Beaucoup de vos arguments tiennent plus de la loi de programmation pluriannuelle de l’énergie que du budget de la recherche.

Votre amendement évoque également les crédits de l’action 13 dévolus à l’ANSES, sans que l’on comprenne très bien ce que cela a à voir avec la transition énergétique. Je tiens à noter également que, dans le projet de loi de finances pour 2019, l’action 16 Recherche dans le domaine de lénergie nucléaire et l’action 17 Recherche dans le domaine des nouvelles technologies de lénergie visent justement à pouvoir faire la distinction entre ce qui est consacré à l’une et à l’autre. Néanmoins, il est important de noter que le CEA sera désormais doté d’une seule direction de recherche dans l’énergie, car nous voyons bien que réfléchir au nucléaire et aux énergies renouvelables ensemble, notamment quand il s’agit de la bonne gestion d’un réseau énergétique, est une piste essentielle au progrès.

Aussi faut-il regarder la recherche énergétique comme un tout. C’est d’ailleurs ce que l’on demande au CEA dans sa nouvelle lettre de mission à l’administrateur général. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. Julien Aubert. C’est typiquement le genre d’amendement qui permet de pointer toute l’ambiguïté de ce qu’on appelle la transition énergétique en France. Si l’on souhaite une économie décarbonée et lutter contre le réchauffement climatique, on devrait se battre pour protéger l’industrie nucléaire qui produit de l’électricité de manière décarbonée. Un jour, il faudra choisir entre la décarbonation et la dénucléarisation. Ce sont deux objectifs contradictoires. Certains pays, qui ont fait le choix de se dénucléariser, se sont « carbonisés », sans jeu de mots : ils ont fermé des centrales nucléaires et ils ont ouvert des centrales à charbon.

M. le président Éric Woerth. C’est vrai.

M. Michel Larive. M. Aubert propose deux solutions. Pour ma part, j’en vois une troisième : les énergies renouvelables. Ce que je dis n’est pas du tout manichéen.

Madame la rapporteure spéciale, nous prônons effectivement une organisation différente de la distribution des fonds de l’État. Cela dit, je comprends bien qu’il faille continuer les recherches sur le nucléaire, pour le démantèlement des centrales auquel nous sommes favorables, sur le stockage puis la résorption des déchets.

Cette troisième voie, ce n’est pas la transition énergétique, mais plutôt la transition écologique. Tel est l’objet de notre amendement.

La commission rejette lamendement.

Elle étudie ensuite lamendement II-CF617 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Régis Juanico. Dans la ligne des discussions que nous avons eues à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE), nous proposons de créer un nouveau programme budgétaire intitulé Fonds pour linnovation de rupture et doté de 250 millions d’euros. Ces crédits pourraient être abondés par une fraction du produit des dividendes perçus par l’État au titre de ses participations dans le capital des entreprises dont il est actionnaire.

Cet amendement est une contre-proposition au projet du Gouvernement qui veut aussi créer un fonds, mais qui serait alimenté par les intérêts du placement du produit de la cession du capital détenu par l’État dans Aéroports de Paris (ADP), La Française des jeux (FDJ) et Engie. Or, comme nous l’avons démontré lors de la discussion, ADP et la FDJ ont généré pour 300 millions d’euros de dividendes en faveur de l’État en 2017, montant très nettement supérieur à la cible du Gouvernement. Le fonds pour l’innovation de rupture que nous souhaitons créer serait une meilleure solution.

Mme la rapporteure spéciale. D’un point de vue financier, le versement de dividendes varie d’une année sur l’autre, alors que les 250 millions d’euros du fonds pour l’innovation seront bien sanctuarisés année après année. Ils seront issus des 8,5 milliards d’euros de participations qui ont été transférés à l’établissement public à caractère industriel et commercial Bpifrance, lequel gérera le fonds. Ce fonds permettra par ailleurs de financer des appels à projets réellement innovants, choisis de manière interministérielle. Nous savons que les premiers appels à projets, notamment sur la santé et l’intelligence artificielle, sont des compléments de dotations pour les lignes budgétaires déjà existantes, notamment pour le programme 172.

Au vu des choix faits, nous pensons que nous avons ici une sûreté plus grande sur la capacité à assurer, dans les années qui viennent, 250 millions d’euros par an, sans nous soucier du cycle économique ou de la santé stratégique des entreprises qui sont aujourd’hui dans le portefeuille de l’Agence des participations de l’État.

Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Je voterai contre cet amendement. Toutefois, il a l’intérêt de poser une question : où sont, budgétairement parlant, les 250 millions d’euros produits par les 8 milliards – je rappelle que, dans les comptes spéciaux du Trésor, il n’y a que 8 milliards – et qui va les gérer ? Sont-ils dans le budget ou dans un fonds extrabudgétaire géré par Bpifrance ? Madame la rapporteure spéciale, avez-vous pu mettre votre nez dans ce dossier ?

Mme la rapporteure spéciale. Ce sont en fait exactement 8,5 milliards qui ont été transférés à l’EPIC Bpifrance.

M. Charles de Courson. Non, nous avons regardé les comptes spéciaux du Trésor la semaine dernière : ce sont bien 8 milliards, plus 2 milliards consacrés au désendettement. Pouvez-vous nous expliquer le montage budgétaire de ces 250 millions ? Où sont-ils ?

Mme la rapporteure spéciale. A priori, ils ne sont pas dans le budget puisqu’il n’y a pas de ligne ouverte sur la partie pour laquelle je suis rapporteure spéciale. C’est un fonds avec un appel à projets interministériel...

M. Charles de Courson. Il y a une ligne budgétaire.

Mme la rapporteure spéciale. Non, il n’y a pas de ligne budgétaire puisque c’est un comité interministériel qui se réunit et qui fait un appel à projets. Les décisions de ce comité interministériel sont suivies d’un décaissement par Bpifrance des 50 millions en question.

M. Charles de Courson. Mais où est le contrôle du Parlement ? Pourquoi ces 250 millions d’euros ne sont-ils pas versés sous forme de fonds de concours à l’État avec rétablissement d’un crédit budgétaire de 250 millions d’euros ? Sinon, mes chers collègues, ce sont encore 250 millions d’euros qui échapperont au contrôle direct de l’Assemblée nationale. Ce n’est pas de bonne politique.

Mme la rapporteure spéciale. Je pense que le secrétariat général pour l’investissement (SGPI) aura, comme pour tous les fonds extra-budgétaires liés à l’innovation, la même procédure habituelle de rapport. Et nous savons que notre collègue Marie-Christine Dalloz prête beaucoup d’attention à l’amélioration de la qualité de l’évaluation et du contrôle des fonds. Il serait intéressant que ce débat ait lieu en séance publique, peut-être avec la commission des affaires économiques, pour que nous ayons, en tant que parlementaires éclairés, avisés en tout cas sur les sujets de recherche et d’innovation, un suivi dédié de la bonne utilisation de ces fonds.

M. Charles de Courson. Il faudrait budgétiser ces fonds.

M. Laurent Saint-Martin. La rapporteure spéciale a raison de faire une comparaison avec le SGPI. Aujourd’hui, une partie des 57 milliards d’euros du plan d’investissement sont déjà des intérêts de placements et ne sont pas sous forme de ligne budgétaire au sens d’une mission, d’un programme. C’est la même chose pour les 250 millions d’euros. En revanche, il faudrait que le Parlement soit mieux informé sur la façon dont le SGPI contrôle et pilote les dépenses. C’était vrai également pour les programmes d’investissements d’avenir (PIA).

En tant que membre du comité de surveillance du SGPI, Olivia Gregoire et moi nous étions engagés à davantage de transparence à l’égard des autres parlementaires. Et c’est ce que nous ferons.

M. Charles de Courson. Il y a là un vrai problème d’orthodoxie budgétaire. On a fait la même chose sur les PIA pour des sommes considérables, et on finit par ne plus rien y comprendre. Il faut faire appel à la Cour des comptes qui, après des heures de travail, essaie de nous dire quelle est la dépense réelle. C’est cela qui est malsain, alors que l’on pouvait parfaitement demander à Bpifrance de verser le produit des intérêts du fonds pour l’innovation sous forme de fonds de concours à l’État, avec un rétablissement sur fonds de concours, ce qui permettait au moins d’avoir une lecture claire. Dans le contrat de performance, il est question de 64 millions, mais vous ne les trouvez nulle part.

Mme Christine Hennion. Je ne m’exprimerai pas sur l’amendement, mais sur le contrôle parlementaire. Effectivement, dans la mesure où il s’agit d’innovations de rupture, donc de projets extrêmement risqués, il serait très intéressant qu’il y ait un contrôle du Parlement et que l’on puisse discuter de l’utilisation qui est faite de ce fonds.

M. le président Éric Woerth. Ce sera le cas indirectement puisque nous poserons des questions et que nous lancerons des missions. La question juridique de l’hébergement de ces dépenses dans le Grand plan d’investissement se pose, puisque cela fait, en réalité, un fonds supplémentaire. En commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi PACTE, le ministre avait répondu que ce serait plus rapide. Mais les modalités juridiques de fonctionnement des PIA et du Grand plan d’investissement avaient déjà cette particularité d’échapper aux lenteurs, aux lourdeurs administratives, ce qui ne veut pas dire échapper aux lenteurs ou aux lourdeurs du contrôle du Parlement. C’est une autre histoire...

La commission rejette lamendement.

Puis elle est saisie de lamendement II-CF625 de Mme Christine Hennion.

 

Mme Christine Hennion. Bpifrance finance des projets innovants qui lui sont présentés par les entreprises, principalement sous forme d’aides individuelles. Ces aides, financées par l’État sur le programme 192, prennent la forme d’avances récupérables et de prêts et constituent le socle indispensable sur lequel repose l’écosystème des entreprises innovantes françaises. Elles sont fortement orientées vers les entreprises qui ne disposent pas encore des caractéristiques leur permettant d’être financées par les banques classiques.

Ces aides ont néanmoins été affectées par l’érosion de la dotation du programme 192. À près de 250 millions d’euros en 2011, les moyens mis à disposition par l’État ont progressivement décru pour atteindre 135 millions d’euros en 2018.

Le présent projet de loi de finances prévoit une dotation de 115,9 millions d’euros, qui pourrait être complétée par 4,1 millions d’euros issus du fonds de modernisation de la restauration qui est clôturé, soit une dotation effective de 120 millions d’euros.

Compte tenu de l’effet de levier associé aux dotations budgétaires, toute diminution des crédits du programme 192 confiés à Bpifrance conduit à une baisse au moins triple des moyens apportés aux entreprises innovantes.

Le présent amendement propose ainsi de transférer 80 millions d’euros supplémentaires vers l’action 02 du programme 192 en faveur du financement des projets d’innovation technologique et industrielle pilotés par Bpifrance. Ces crédits sont imputés sur l’action 15 du programme 150.

Mme la rapporteure spéciale. Le responsable du programme 192 est le directeur général des entreprises, sous l’autorité de Bruno Le Maire. Si les aides à l’innovation sont inscrites sur le programme 192 de la mission Recherche et enseignement supérieur, l’action et les crédits de Bpifrance relèvent plutôt du programme 134 de la mission Économie. Nous voyons ici une des limites du caractère interministériel de la MIRES, qui conduit à un éclatement des financements et du bon suivi du contrôle et de l’évaluation des crédits.

D’un point de vue financier, comme vous l’avez dit, les crédits, qui s’élevaient à 140 millions d’euros en 2018, passent à 120 millions d’euros en 2019. La baisse des dotations budgétaires est donc bien de 20 millions d’euros. Même si je comprends que vous aimeriez pouvoir compenser pleinement les potentiels effets de levier, 80 millions semblent donc beaucoup plus que 20 millions.

Je comprends le sens de votre amendement. Il semble néanmoins assez délicat, et je pense que Fabrice Le Vigoureux vous le confirmera, de retirer 80 millions d’euros aux universités, car l’action n° 15 du programme 150 finance la masse salariale des personnels de support et d’encadrement des universités, mais aussi les bourses de mobilité et les systèmes d’information des établissements.

Si je comprends votre démarche, elle paraît difficilement acceptable aujourd’hui du point de vue de la bonne équité budgétaire. Je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

Mme Christine Hennion. Si vous voyez un autre poste sur lequel pourrait être effectué le transfert, nous pourrons en discuter.

La commission rejette lamendement.

M. Charles de Courson. Madame la rapporteure spéciale, y a-t-il des prêts sur les lignes du programme 192 ? Je sais que la Cour des comptes considère que cela ne devrait pas relever d’un programme du budget général, mais de comptes d’affectation spéciale. Si vous partagez cet avis, madame la rapporteure spéciale, allez-vous proposer un amendement ?

Mme la rapporteure spéciale. Je vous confirme qu’il y a bien des avances remboursables sur le budget et le programme 192 et que je trouve toujours cela assez étonnant, puisque le budget de l’État ne devrait pas se substituer à celui d’une banque quasi publique. Je peux tout à fait réfléchir à la façon d’obtenir des éclaircissements sur l’hétérodoxie budgétaire qui consiste à faire des avances remboursables à partir d’un budget.

La commission en vient à lamendement II-CF769 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. C’est un amendement que je présente avec un certain nombre de mes collègues.

J’ai déjà défendu cet amendement en première partie du PLF, sous l’angle des taxes affectées, et je le présente aujourd’hui sous celui des crédits.

Il s’agit de mieux lutter contre le cancer de l’enfant. Si la recherche n’est pas nulle en la matière, elle est faible. En tout cas, c’est ce qui est dit assez largement. Nul besoin d’épiloguer, chacun mesure la profondeur et la difficulté du sujet qui n’est probablement pas abordé comme il le devrait. Il convient donc de renforcer les capacités de recherche spécifiques, car 3 % seulement de l’ensemble de la recherche sur le cancer est consacré aux cas très particuliers des différentes formes de cancer qui peuvent atteindre les enfants. Si le sujet est considérable, les crédits ne le sont pas. Selon les associations que chacun connaît, parfois pour les avoir rencontrées, soit localement, soit nationalement, il manque entre 15 et 20 millions d’euros, même si je n’ai pas les moyens de l’expertiser exactement.

On m’a déjà répondu, comme à certains membres de cette commission, qu’il y avait suffisamment d’argent et de recherches sur le sujet. Je ne le crois pas. Les crédits en question restent, à ce niveau-là, relativement modestes. Je propose donc le déplacement de crédits existants de l’INSERM vers l’Institut national du cancer (INCa), organisme compétent dans ce domaine.

Je pense, pour reprendre une formule célèbre, qu’on n’a pas tout essayé et que, compte tenu des moyens proposés et du fait que cela n’augmente pas la dépense publique, nous devrions adopter cet amendement et ne pas en rester aux réponses qui nous sont données par l’administration ou par la ministre, quelle que soit la compétence de cette dernière sur le sujet.

Mme la rapporteure spéciale. Vous le savez, la lutte contre le cancer pédiatrique est une priorité que nous partageons tous. En tant que rapporteure spéciale du budget de la recherche, cela fait maintenant plus d’un an que j’essaie de comprendre de quoi on parle. Suite aux travaux de la MEC, je vous avais présenté également la résolution qui avait été mise au vote lors du printemps de l’évaluation. Je pense que le premier défi, c’est d’avoir davantage de lisibilité et de fluidité dans les montants. Je pourrais citer une longue liste de programmes qui financent partiellement ou intégralement des projets en lien avec les cancers de l’enfant : le programme d’actions intégrées de recherche, programme international qui y a consacré 5 millions d’euros sur cinq ans, les projets pédiatriques dans le cadre du programme « Libre biologie cancer » à hauteur de 12 millions d’euros, la recherche translationnelle pour 6 millions d’euros, l’accès sécurisé aux thérapies ciblées innovantes pour 1 million d’euros, le PIA aux alentours de 6 millions d’euros, le programme hospitalier de recherche clinique en cancérologie (PHRC-K) dont six projets sur les trente-neuf sélectionnés concernent les cancers pédiatriques. Nous n’en faisons probablement pas assez, mais il faut souligner qu’aucun des chiffres dont nous disposons ne couvre la masse salariale et les coûts complets, et que les montants que vous citez sont bien ceux des appels à projets supplémentaires menés par l’INCa, notamment pour la recherche clinique.

Je ne saurais donc que trop vous conseiller d’adopter une réflexion d’ensemble. Je suis en discussion assez avancée avec, d’un côté le ministère de la recherche, de l’autre le ministère de la santé, afin que nous puissions disposer au plus vite, dans la suite des travaux que j’ai pu mener jusqu’à maintenant, d’une vision consolidée.

Il est à noter également qu’il est difficile de savoir ce qu’est la recherche sur le cancer pédiatrique en dehors des essais cliniques. En effet, lorsque l’immunologie, la radiologie, l’oncologie en général font des progrès, elles peuvent concourir à améliorer les résultats en oncopédiatrie. Par exemple, les CAR-T cells, qui sont aujourd’hui un énorme progrès pour l’ensemble de la recherche liée au cancer, ont d’abord été utilisées en oncopédiatrie. Les initiatives prises à l’étranger pour flécher un financement dédié à la lutte contre le cancer pédiatrique sont encore trop peu documentées. Certains effets pervers apparaissent puisque, quand un laboratoire bénéficie de ce financement fléché, bien souvent les autres financements cessent. Aux États-Unis, le Gabriella Miller Kids First Research Act mérite une analyse plus fouillée afin d’en dresser le bilan.

Je souhaiterais, monsieur le président, que nous puissions avoir un débat plus large sur le sujet – je crois que nos collègues du MoDem ont déposé une proposition de loi en ce sens – qui traite non seulement du financement, mais aussi de l’accès aux médicaments et du soutien aux familles, car on voit bien que ces sujets sont très liés les uns aux autres.

Mon propos n’est pas de démontrer que nous aurions fait assez, mais de dire qu’il y a déjà beaucoup à faire pour gagner en lisibilité et savoir si les 18 millions d’euros dont vous parlez doivent être mieux calibrés.

À défaut d’un retrait de l’amendement, je serai obligée d’émettre un avis défavorable.

M. Jean-Louis Bourlanges. Je comprends très bien les explications de Mme de Montchalin. Nous sommes très préoccupés, comme elle l’a rappelé, par ce problème. Pour ma part, j’ai été très sensibilisé par un certain nombre de praticiens. Deux choses m’ont frappé. D’une part, il y a une dimension clinique particulière du cancer pédiatrique, ce qui ne veut pas dire que les progrès réalisés dans la lutte contre le cancer ne bénéficient pas aussi aux enfants. D’autre part, les professionnels sont absolument convaincus qu’avec des moyens sensiblement plus importants, les résultats pourraient être spectaculaires. Si je comprends tout à fait les raisons techniques, comptables, je pense qu’un signal doit être donné. Je voterai donc l’amendement de M. Woerth parce qu’il répond à un besoin, sur lequel nous pouvons agir fortement et rapidement, indépendamment de la forte dimension émotionnelle du sujet.

M. François Pupponi. J’irai dans le même sens que M. Bourlanges. Le hasard fait que, juste avant cette réunion, j’étais avec la responsable d’une association de Sarcelles qui offre des anniversaires dans les hôpitaux aux enfants victimes de cancers. Elle m’a indiqué que le nombre de cas augmentait de manière très inquiétante depuis quelques années.

J’entends les arguments de la rapporteure spéciale, mais tous les spécialistes et les médecins s’accordent pour dire que ce sujet prend une grande ampleur. Il serait symboliquement regrettable pour tout le monde que nous nous divisions sur un vote comme celui-là. Certes, 18 millions d’euros sont une somme importante, mais qui reste raisonnable.

Je n’en appelle pas aux bons sentiments – ce n’est pas le sujet - mais il y a là un vrai sujet de santé sociale qui est en train de se développer sous nos yeux, et une vraie demande des médecins, des associations et des parents. Voter cet amendement reviendrait à dire que nous sommes conscients du problème, et je pense que nous en sortirions tous grandis.

M. Julien Aubert. Cet amendement a été proposé dans une autre commission, et rejeté. À la suite de ce vote négatif, j’ai reçu beaucoup de courriels d’associations centrées sur le cancer pédiatrique, qui ont été vivement choquées. Elles ont perçu ce vote négatif comme une forme au mieux d’impuissance, au pire d’indifférence. Adopter l’amendement nous permettrait d’engager un débat dans l’hémicycle avec le Gouvernement, qui pourrait prendre des engagements – car après tout, ce n’est peut-être pas la ligne budgétaire idoine. Comme il y a une forme de consensus sur le fond, un avis de sagesse de la rapporteure spéciale permettrait peut-être à chacun d’émettre librement un vote qui, de toute façon, aura de nouveau lieu dans l’hémicycle.

M. Charles de Courson. Ce sujet concerne tout le monde. La ministre Agnès Buzyn avait répondu à l’un de nos collègues à ce propos ; elle semblait ouverte. Que nous réaffections 10 millions d’euros ou 18 millions d’euros de crédits, le Gouvernement y trouvera l’occasion de s’exprimer, dans un cas comme dans l’autre.

Alors que beaucoup prétendent que la commission des finances n’aurait pas de cœur, montrons que si.

Mme Bénédicte Peyrol. Nous avons certes tous envie de progresser sur cette question des cancers pédiatriques. Mais allons au-delà de la symbolique. Une proposition de loi nous offrira prochainement l’occasion de traiter le sujet en profondeur, plutôt que de déplacer simplement quelques millions d’euros.

Même sans adoption de l’amendement, nous pourrons interroger la ministre en séance publique. Je serais donc d’avis que nous prenions plutôt le sujet à bras-le-corps, en l’envisageant de manière globale.

M. Jean-Louis Bricout. Je rappelle qu’il ne s’agit en aucun cas d’une demande récente. Je suis d’accord avec notre collègue Pupponi lorsqu’il souligne que c’est un domaine sensible, où les choses évoluent à une vitesse vertigineuse, de même que je rejoins notre collègue Bourlanges lorsqu’il observe que le montant est somme doute modique – 17 millions d’euros au regard du volume global du budget – même s’il peut permettre de faire levier.

Je soutiendrai donc cet amendement.

M. Michel Larive. Le groupe La France insoumise soutient également cet amendement, qui ne représente en effet qu’une goutte d’eau dans le budget. Alors qu’il s’agit d’une question très importante, nos collègues du groupe La République en Marche proposent de remettre à plus tard et de reporter les solutions. Je dis non à cette approche. Allons de l’avant.

M. le président Éric Woerth. Je ne comprends pas les arguments avancés pour remettre à plus tard la recherche d’une solution. Ils nous ont été opposés des milliers de fois, y compris quand nous étions au gouvernement... N’avons-nous pas entendu de nos collègues de la majorité que nous avions changé de monde ? Je crains que rien n’ait changé du tout, ou alors peut-être en pire...

Nous pouvons tout de même encore, en tant que Parlement, transférer des crédits au sein du cadre budgétaire. Il ne s’agit tout de même pas de bouleverser notre politique étrangère ou notre politique de défense ! Nous voulons seulement chercher à montrer qu’on peut faire plus et mieux sur ce sujet. À vrai dire, cet amendement, loin de toute recherche en paternité, aurait pu être signé par tous les groupes.

Quant à la proposition de loi annoncée, nous savons qu’il faut s’attendre à un avis de sagesse du Gouvernement, avant qu’il ne reprenne lui-même la main sur le sujet. Provoquons‑le plutôt par cet amendement ! Si ces crédits ne sont finalement pas déplacés, ils ne seront pas perdus, mais seulement dépensés ailleurs. Nous aurons au moins fait une tentative. Il n’y là rien d’anormal.

Je ne comprendrais pas que nous n’adoptions pas cet amendement.

Mme la rapporteure spéciale. Cela fait un an que j’essaye, par tous les moyens, de trouver les « bons tuyaux » et, surtout, d’obtenir de la lisibilité.

L’INCa finance un certain nombre de projets, l’INSERM un certain nombre d’autres projets, les centres hospitaliers universitaires (CHU), ou encore les fonds européens, d’autres projets encore.

La MEC a fait du cancer pédiatrique l’exemple même d’un sujet sociétal urgent, brûlant et humainement très difficile, sur lequel nous n’avons, ni comme députés ni même seulement comme citoyens, aucune information fiable quant à la manière dont les choses s’organisent.

Nous pourrions tous rêver, c’est vrai, que les choses aillent plus vite. Le budget de l’INCa est d’un peu moins de 100 millions d’euros. Je n’ai rien contre le fait de l’augmenter, mais est-ce qu’y ajouter 18 millions d’euros est la meilleure chose à faire pour les cancers pédiatriques et pour l’immunologie ?

Aujourd’hui, quand on parle de tumeurs du tronc cérébral, j’entends dire partout que la solution réside dans les lasers précis. Or les lasers précis relèvent de la physique ; ce n’est pas l’INCa qui est compétent pour ce type de recherche. Il faudrait plutôt chercher, sur le plateau de Saclay, du côté de laboratoires qui ne se consacrent pas à la recherche anticancéreuse, mais qui pourraient peut-être arriver à fabriquer des lasers puissants et précis capables d’apporter une solution.

Je ne veux pas ici apparaître comme celle qui s’oppose. Sur le terrain, nous rencontrons tous les mêmes familles – l’Institut Gustave-Roussy n’est pas loin de ma circonscription. Nous cherchons donc à faire avancer les choses de manière crédible. Même si je n’ai rien à dire contre la volonté qui est la vôtre, je ne suis pas sûre que cet amendement constitue le bon outil.

Si notre commission décide de le voter, nous aurons le débat en séance publique. Mais je pense que la proposition de loi déposée par le groupe du MoDem permettra également, si elle est débattue, de faire le point sur un certain nombre d’autres problèmes qui se posent en parallèle : l’accès aux médicaments, l’âge minimal d’accès à des traitements aujourd’hui réservés aux adultes, les indemnités journalières... En tout cas, ne faisons pas de mauvaise politique sur des sujets qui sont extrêmement graves et douloureux.

M. le président Éric Woerth. Mon intervention n’avait certes rien de polémique. Mais, à un moment donné, il faut mettre les questions sur la table – ou alors nous n’avons qu’à enterrer tous les sujets. De temps à autre, on peut aussi dire oui.

On prétend que cet amendement serait inefficace. En réalité, il se heurte simplement à l’opposition habituelle du Gouvernement, des cabinets, de la technocratie, qui invoqueront toujours une solution plus globale, prétendument plus efficace. Pour ma part, je pense que c’est une mauvaise manière de faire.

Quand l’enjeu financier n’est pas énorme, tout en offrant la possibilité d’un effet de levier, on peut constater entre nous une unanimité politique qui devrait nous conduire à demander au Gouvernement de revoir sa position.

M. Laurent Saint-Martin. Voilà pourtant, monsieur le président, des propos qui me semblent polémiques. Ne faisons pas accroire que les députés du groupe La République en Marche sont contre la recherche d’une solution !

L’avis défavorable de la rapporteure spéciale sur le déplacement de 18 millions d’euros ne signifie pas qu’elle s’oppose à l’accroissement des moyens sur ce sujet précis. Comme l’a rappelé Mme Peyrol, une proposition de loi sera prochainement examinée, qui va plus loin encore. Car l’enjeu, précisément, est beaucoup plus large.

Vous prétendez ne pas faire de polémique ? Eh bien moi je crois que si. Sur un sujet aussi grave, je refuse de me laisser enfermer par vous dans un rôle.

M. Charles de Courson. La proposition de loi dont il est question ne sera examinée, et éventuellement adoptée, qu’après la loi de finances. Vous voyez donc bien, mes chers collègues, que cet amendement nous offre une vraie occasion d’obtenir quelques crédits supplémentaires, même s’ils devaient finalement s’élever à moins de 18 millions d’euros. Si nous voulons montrer que nous servons à quelque chose, c’est maintenant qu’il faut le faire !

En adoptant cet amendement à lunanimité, nous serions bien plus forts en face du Gouvernement pour obtenir une rallonge de crédits, ne serait-ce que de 10 ou de 5 millions deuros. Fort de mes vingt-six années dexpérience comme parlementaire, je puis vous dire que la commission des finances na jamais obtenu de lui quelque chose quen montrant quelle existait. On veut nous faire passer pour des gens qui ne sont pas responsables, alors que nous le sommes : nous nallons pas, en adoptant cet amendement, dégrader le déficit public. Si nécessaire, nous pourrons également changer le gage de lamendement. Mais le montant considéré ne représente, dans lesquisse budgétaire générale, que lépaisseur du trait.

Faisons œuvre utile !

M. François Pupponi. Je crains de savoir trop bien comment les choses vont finir si les députés de la majorité ne nous suivent pas. C’est pourquoi je pense que la situation se réduit à une alternative : soit cet amendement est retiré, soit nous l’adoptons de manière unanime et nous assumons nos responsabilités en séance publique.

Sur un tel sujet, je ne veux pas entendre demain de fausses polémiques, que ce soit au sein du milieu associatif ou dans la presse, où nous pourrions être mis en cause pour notre vote. A-t-on tellement insisté, depuis le début de l’examen budgétaire, pour faire adopter d’autres amendements de l’opposition ? Je n’ai pas envie, sur ce sujet, de laisser simplement faire la majorité. Au contraire, mettons-nous tous d’accord entre nous.

M. Benjamin Dirx. Je commence à être un peu mal à l’aise quand j’entends ces mises en garde voilées. Pour ma part, j’ai connu le drame de perdre, dans ma famille, un proche décédé à 10 ans des suites d’un cancer. Si l’on pouvait régler tous les problèmes avec 18 millions d’euros, nous retiendrions tout de suite cette option. Mais ce n’est pas le cas.

Écoutons plutôt la rapporteure spéciale. Je plaide pour un retrait de l’amendement, quitte à ce qu’il soit déposé à nouveau en séance publique. Car, s’il vous plaît, travaillons de manière cohérente : une proposition de loi sera prochainement examinée sur le sujet.

En tout cas, cessons d’attirer constamment l’attention des députés sur le sens qui sera attribué à leur vote. Ce n’est pas ma vision du Parlement et de la démocratie.

M. le président Éric Woerth. Ai-je rien dit de tel ? Heureusement que nous pouvons tout de même avoir ce débat entre nous ! Puisque vous êtes en ce moment aux responsabilités, vous devez simplement assumer vos positions. L’opposition peut encore avoir des positions différentes des vôtres, peut-être inspirées, d’ailleurs, par son expérience un peu plus longue du pouvoir...

M. Jean-Louis Bourlanges. Monsieur le président, je regrette de dire que vous avez eu tort de répondre comme vous l’avez fait à Amélie de Montchalin. Elle était si près de nous donner la consigne de sagesse qu’attendait d’elle notre collègue Pupponi ! Je regrette de voir au contraire se développer une polémique inter-partisane. À cet égard, monsieur Saint-Martin, vous avez eu tort, vous aussi, de surenchérir.

En réalité, le problème est simple. Face à ce problème extrêmement douloureux, nous proposons l’adoption d’un amendement qui n’est pas très coûteux, même s’il est plus que symbolique et permet de mettre de l’argent sur la table. Viendra ensuite une proposition de loi. Pour l’heure, nous devons cesser de nous déchirer et adopter ensemble cet amendement. Si nous n’en sommes pas capables, c’est que nous ne sommes pas capables de faire ensemble de la politique.

Mme la rapporteure spéciale. Monsieur Bourlanges, vous m’avez retiré les mots de la bouche. Étant donné le tour que prend la discussion et l’importance du sujet, il me semble important que nous ayons une discussion avec le Gouvernement dans l’hémicycle, puisque c’est l’exécutif qui est aux manettes.

Pour ma part, je ne prendrai donc pas part au vote sur cet amendement. Quelle que soit son issue, je souhaiterais que nous ayons tous la sagesse d’entendre les arguments du Gouvernement en séance publique, notamment au regard de la proposition de loi qui sera prochainement examinée. J’aimerais que nous puissions, sur ce sujet qui recouvre des enjeux politiques, des enjeux humains et des enjeux de recherche, voter en conscience.

La commission adopte lamendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF645 et IICF648 de la rapporteure spéciale.

Mme Amélie de Montchalin, rapporteure spéciale. Il s’agit d’un sujet plus technique, mais toutefois important, puisqu’il concerne les énergies renouvelables, la transition écologique et la transition climatique.

Je propose, par l’amendement II-CF645 de transférer 10 millions d’euros supplémentaires à l’action n° 17 du programme 190 Recherche dans les domaines de lénergie, du développement et de la mobilité durables. De prime abord, je semble puiser dans les crédits du Centre national d’études spatiales (CNES), mais, en fait, la manipulation consiste à prendre ces crédits sur une ligne du même programme 190. Cette ligne, dédiée aux moteurs et à la transition énergétique dans l’aviation, est gérée en partenariat avec la direction générale de l’aviation civile et le SGPI. Cette ligne inclut également des avances remboursables sur lesquelles, cher collègue de Courson, j’ai beaucoup de mal à avoir de la visibilité.

L’IFPEN est un institut de recherche extrêmement intéressant, puisqu’il génère du chiffre d’affaires et de l’innovation grâce à des start-up. Il faut donc pouvoir le doter de moyens à la hauteur de l’ambition qui est la sienne. Je rappelle que les énergies renouvelables représentent non seulement une ambition, mais également des techniques, des technologies et des emplois.

M. Charles de Courson. Vous savez que l’IFPEN, anciennement Institut français du pétrole, était autrefois financé par une taxe parafiscale. Quand on a supprimé les taxes parafiscales pour les remplacer par une dotation budgétaire, on a considérablement réduit ses ressources propres.

Parallèlement, le sigle s’est enrichi de deux lettres supplémentaires signifiant « énergies renouvelables », c’est-à-dire qu’il n’est plus simplement actif dans le pétrole, mais consacre une part croissante de son action aux énergies renouvelables. L’amendement proposé irait donc dans la bonne direction. Ma question est la suivante : avec ces 10 millions d’euros, s’agit-il simplement de freiner sa chute ? Madame la rapporteure, comment vous êtes-vous arrêtée à cette somme ?

Mme la rapporteure spéciale. Le projet de loi de finances prévoit une réduction de ses crédits de 3,5 millions d’euros. Mon but est de rattraper une partie de la baisse brutale subie par l’Institut ces deux ou trois dernières années, de sécuriser son fonctionnement et les projets de recherche déjà lancés.

Quant à l’amendement II-CF648, il s’agit là d’un amendement technique, qui consiste à ne pas prélever les 10 millions sur la ligne du CNES, mais sur l’action 14, Recherche et développement dans laéronautique civile, laquelle mêle subventions et avances remboursables bénéficiant aux grands groupes du secteur, à commencer par Airbus. Cette ligne n’entre pas dans le champ du contrôle exercé par les responsables du programme 190, de sorte qu’un certain flou existe à son sujet. Je suis certaine que, dans les heures qui viennent, beaucoup de gens vont pouvoir m’expliquer comment elle fonctionne... Mais je pense que c’est un bon choix de gage.

M. Charles de Courson. Si je puis me permettre, ayant été rapporteur spécial pendant dix ans sur l’aviation civile, je me souviens qu’à l’époque il y avait un compte d’affectation spéciale.

J’avais d’ailleurs examiné beaucoup de conventions et proposé des rachats de conventions : vous savez qu’elles donnent lieu à des versements de royalties – il pouvait donc être intéressant pour l’État de les racheter. Pour ma part, j’avais obtenu toutes les informations voulues. Le taux de succès de ces contrats est, contrairement à ce qu’on peut croire, élevé : les cas d’échec sont très faibles. Je ne suis donc pas enthousiasmé par le gage, mais j’accepte d’y voir un amendement de cohérence par rapport à l’amendement II-CF645.

La commission adopte successivement les deux amendements.

Puis elle examine lamendement II-CF554 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Régis Juanico. Cet amendement vise à permettre de développer l’amplitude horaire d’ouverture des bibliothèques. En ce domaine, les progrès sont significatifs depuis l’an 2000, avec une moyenne de 61 heures d’ouverture par semaine. Mais nous sommes encore en retard par rapport à nos partenaires européens, chez qui la moyenne se situe plutôt autour de 65 heures. Il faut savoir que moins de quinze bibliothèques universitaires sont ouvertes le dimanche en France, pour 2,5 millions d’étudiants. C’est pourquoi l’amendement propose d’abonder les crédits de l’action Bibliothèques et documentation, à hauteur de 2 millions d’euros.

M. le rapporteur spécial. Vous abordez un vrai sujet, d’ailleurs plus large que la seule question du travail dominical des personnels de bibliothèques.

Comme vous l’avez rappelé, la moyenne d’ouverture des bibliothèques se situe plutôt autour de 65 heures chez nos partenaires européens – c’est même 69 heures en Allemagne. Un plan est en cours de déploiement, pour faire qu’on propose une place assise pour douze étudiants environ, en 2025. Là encore, les comparaisons internationales ne sont pas très flatteuses, puisqu’il y a une place pour six étudiants au Royaume-Uni et aux États‑Unis, où les contributions individuelles au financement des infrastructures et de ce genre d’équipements sont cependant très différentes du nôtre.

Ce qui n’est pas mentionné dans l’exposé des motifs, mais qu’il faut rappeler ici, c’est que le PLF 2019 est en ligne avec les objectifs, assez ambitieux, du plan « Bibliothèques ouvertes + ». 2 millions d’euros supplémentaires y sont ainsi consacrés, concentrés dans l’action 5 du programme 150, lequel passe de 447,6 à 449,5 millions d’euros. Le PLF 2019 marque donc une poursuite de l’effort.

Au contraire, il semble délicat de remettre en cause des engagements sur d’autres lignes, telles que la recherche spatiale. Encore s’agit-il plus d’arriérés que d’engagements. C’est pourquoi mon avis, à ce stade, est défavorable. Mais il aurait été favorable s’il n’y avait pas eu cet effort déjà acté dans le PLF 2019.

La commission rejette lamendement.

Puis elle examine lamendement II-CF568 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Régis Juanico. Cet amendement tend à rétablir le budget alloué à la culture scientifique et technique, qui est en baisse de 2 millions d’euros. Il est indiqué, dans le PLF 2019, que cette baisse se justifie par le fait que les besoins réels et les capacités de financement d’Universcience ne nécessiteraient que 1,15 million d’euros pour ses dépenses d’opérations financières. Pour notre part, nous pensons que ces 2 millions de baisse sont plutôt de l’ordre du « rabot » et du souci d’économies recherchées par le Gouvernement. C’est pourquoi nous proposons de rétablir ces crédits.

Mme la rapporteure spéciale. Le ministère de la culture a effectivement pour mission dassurer la diffusion plus large au public des connaissances scientifiques. Cette action est conduite par Universcience, à savoir lalliance entre le Palais de la découverte et la Cité des sciences de La Villette. La dotation est de 99,6 millions deuros dans le PLF 2019, établi conformément au projet détablissement et au contrat dobjectifs et de performance de 2017.

Mais il y a une petite subtilité puisque, sur ces 99,6 millions d’euros, 98,5 millions d’euros correspondent à la subvention pour charges de service public et 1,1 million correspondent à des dépenses d’opérations financières, c’est-à-dire à des fonds propres versés à l’établissement pour la poursuite des travaux d’entretien et de mise aux normes de la Cité des sciences et de l’industrie. Or, si la subvention pour charges de service public est stable par rapport à 2018 et même par rapport à 2017, la dotation en fonds propres varie selon les travaux à réaliser : il était prévu 3,1 millions d’euros de travaux l’an dernier, et seulement 1,1 million d’euros cette année.

Nous n’observons donc pas de recul des moyens consacrés à la diffusion de la culture scientifique ; il s’agit seulement du lissage annuel des travaux menés à La Villette pour accueillir le public. À défaut de retrait, je devrai donc formuler un avis défavorable à votre amendement.

La commission rejette lamendement.

Puis elle adopte les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur, modifiés.

*

*     *


Elle examine ensuite l’article 78 rattaché à cette mission.

Article 78
Renforcement de la mobilité étudiante

 

Le présent article vise à supprimer l’aide à la recherche pour le premier emploi (ARPE) qui bénéficiait depuis 2016 aux étudiants boursiers ou aux apprentis diplômés de l’enseignement supérieur. Cette aide semble moins adaptée aux enjeux actuels compte tenu de la dynamique du marché de l’emploi et de l’existence d’autres dispositifs, tels que la garantie jeunes, qui permettent de cibler des publics proches.

Le Gouvernement justifie par ailleurs cette suppression en indiquant que les sommes économisées ont vocation à alimenter un dispositif d’aide exceptionnelle à la mobilité destiné aux personnes qui, dans le cadre de la procédure nationale de préinscription Parcoursup, souhaitent s’inscrire à une formation de l’enseignement supérieur. Cette aide est attribuée pour accompagner le bachelier qui doit effectuer une mobilité géographique, suite à une proposition d’inscription du recteur après analyse de la commission académique d’accès à l’enseignement supérieur, sur demande du candidat. Son montant est compris entre 200 et 1 000 euros.

I.   Le fonctionnement de l’ARPE et ses limites

A.   Les règles de fonctionnement et le budget de l’ARPE

Créée par l’article 50 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, l’aide à la recherche du premier emploi (ARPE) permet d’accompagner financièrement la période d’insertion professionnelle qui sépare la sortie des études et l’accès au premier emploi.

Cette aide, non imposable et exonérée de charges sociales, est réservée aux jeunes diplômés, de moins de 28 ans, qui ont bénéficié d’une bourse de l’enseignement supérieur ainsi qu’aux apprentis diplômés de l’enseignement supérieur. Ceux-ci doivent rechercher un emploi et s’engager à ne pas reprendre de formations dans l’année s’ils veulent bénéficier de l’aide.

Elle est versée mensuellement au bénéficiaire pendant une durée maximale de quatre mois. Son montant est fixé de manière forfaitaire par l’arrêté du 8 août 2016 à :

– 200 euros par mois pour les titulaires d’un diplôme de l’enseignement scolaire à finalité professionnelle ;

– 300 euros par mois pour ceux l’ayant obtenu par la voie de l’apprentissage ;

– au montant mensuel de leur précédente bourse sur critères sociaux, soit entre 100 et 550 euros, pour les personnes ayant obtenu un diplôme de l’enseignement supérieur à finalité professionnelle par la voie de la formation initiale sous statut d’étudiant 300 euros pour les apprentis.

Si, au cours de ces quatre mois, le bénéficiaire trouve un emploi dont la rémunération excède 78 % du SMIC (soit 927 euros en 2018), il est tenu d’en informer le CROUS qui met alors fin au paiement.

Cette aide ne peut par ailleurs se cumuler avec le revenu de solidarité active (RSA) ou avec la Garantie jeunes de même, sont exclues du bénéfice de l’aide les personnes bénéficiant d’un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation au moment où elles présentent leur demande.

En 2017, lARPE a bénéficié à 25 800 étudiants et 2 000 apprentis. Lenveloppe budgétaire destinée à ce dispositif était de 58 millions deuros mais la consommation des crédits ne sest élevée quà 33,66 millions deuros, en raison dune demande inférieure aux attentes.

B.   Une dépense de guichet sans accompagnement

Le réseau des œuvres universitaires s’est vu confier l’instruction des demandes et le paiement de l’ARPE. L’ARPE constitue sans conteste une aide pour les jeunes dans la transition vers le premier emploi. Toutefois, les effets de cette aide ne sont pas mesurables.

On notera ainsi que le délai moyen de recherche du premier emploi des jeunes diplômés est de deux mois et demi selon le baromètre publié en 2017 par l’Association pour l’emploi des cadres.

Pour les personnes connaissant un temps plus long de recherche d’emploi, l’ARPE – du fait de son caractère non cumulatif – entre en concurrence avec des dispositifs comme la Garantie jeunes qui permettent, pourtant, un accompagnement personnalisé vers l’emploi et un suivi renforcé des bénéficiaires – ce que ne prévoit pas l’ARPE.

II.   Objectif de la réforme et problématiques éventuelles

La présente disposition doit prendre effet à compter du 1er janvier 2019. Toutefois, les étudiants diplômés avant le 1er janvier 2019 disposent de quatre mois pour déposer un dossier de demande d’ARPE. Des dossiers de demande d’ARPE sont donc susceptibles d’être acceptés jusqu’au 30 avril 2019.

A.   Accompagner la mobilité des étudiants dès l’élaboration de leur projet

Afin d’accompagner la mise en œuvre de la réforme de l’orientation dans l’enseignement supérieur, le Gouvernement prévoit que les sommes économisées sur le dispositif ARPE seront redéployées en un dispositif d’aide exceptionnelle à la mobilité destiné aux personnes qui, dans le cadre de la procédure nationale de préinscription Parcoursup, souhaitent s’inscrire à une formation de l’enseignement supérieur. Cette aide permettra notamment de favoriser la mobilité géographique des personnes souhaitant s’inscrire à une formation de l’enseignement supérieur et de cofinancer des projets d’investissements portés par une ou plusieurs collectivités territoriales, permettant notamment de faciliter le logement et les conditions de vie des étudiants.

Un fonds sera créé à cette fin par voie réglementaire, dont la gestion sera confiée, pour le compte de l’État, au Centre national des œuvres universitaires et scolaires, qui dispose d’une expertise dans la gestion des aides aux étudiants. À moyen terme, l’objectif poursuivi est d’assurer une meilleure insertion professionnelle des diplômés grâce à une meilleure répartition des formations.

Le rapporteur sera particulièrement attentif à la publication des textes réglementaires qui préciseront les modalités de fonctionnement de ce nouveau fonds.

B.   Un problème potentiel de dispositif d’accompagnement pour les jeunes de 25 à 28 ans

Si le renforcement du dispositif de la garantie jeunes en 2018 et en PLF 2019, notamment à travers le plan d’investissement dans les compétences (PIC) inscrit sur la mission Travail emploi, est un progrès considérable pour accompagner les jeunes en difficultés dans leurs parcours professionnels et de formation, la garantie jeunes ne bénéficie qu’aux personnes âgées de moins de 25 ans. Or, l’ARPE bénéficiait à un public dont l’âge pouvait aller jusqu’à 28 ans. Toutefois, le rapporteur spécial rappelle que lorsque les étudiants sont insérés dans un parcours d’étude qui les amène au-delà de 25 ans, celui-ci conduit vraisemblablement à l’obtention de diplômes élevés.

III.   La position du Rapporteur spécial

Le rapporteur spécial émet un avis favorable sur cet article.

*

*     *

 

La commission examine les amendements identiques II-CF602 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF633 de M. Éric Coquerel.

M. Régis Juanico. L’aide à la recherche d’un premier emploi (ARPE), instaurée en 2016, était une revendication ancienne des représentants des étudiants et permettait d’accompagner l’insertion de plus en plus tardive des jeunes sur le marché du travail. Elle permettait aussi le prolongement des bourses sur critères sociaux pendant quatre mois après l’obtention du diplôme. En 2017, ce dispositif a bénéficié à 26 000 étudiants et à 2 000 apprentis.

Alors que votre document de présentation de l’évaluation préalable des articles du PLF reconnaît qu’il s’agit « sans conteste dune aide pour les jeunes dans la transition vers le premier emploi », vous la supprimez brutalement pour la remplacer par un dispositif d’aide exceptionnelle à la mobilité aux personnes qui, dans le cadre de la procédure nationale de préinscription à Parcoursup, souhaitent s’inscrire à une formation de l’enseignement supérieur.

Notre amendement vise donc à supprimer cet article 78, qui lui-même supprime le dispositif.

M. Michel Larive. Cet article prévoit la suppression de l’ARPE au motif qu’elle serait, aux dires du Gouvernement, redondante avec la garantie jeunes. Nous considérons qu’au contraire, ces deux types d’aides sont complémentaires : elles ne touchent pas le même public et n’ont pas les mêmes finalités.

En effet, la garantie jeunes ne concerne que les jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en étude et en situation de grande précarité sociale. Elle concerne les jeunes âgés de 16 à moins de 26 ans. L’ARPE, en revanche, bénéfice à des jeunes pouvant avoir jusqu’à 28 ans et qui ont obtenu un diplôme à finalité professionnelle. Au demeurant, cette aide est ciblée, puisqu’elle ne s’adresse qu’aux étudiants boursiers, ce qui permet d’accompagner les jeunes au plus près de leurs besoins.

Le Gouvernement argue aussi du fait qu’il veut créer un dispositif exceptionnel d’aide à la mobilité destiné aux jeunes qui, dans le cadre de leur préinscription Parcoursup, souhaitent s’inscrire à une formation de l’enseignement supérieur. Faute de précisions sur ce nouveau dispositif, et ne croyant pas sur parole à la générosité du Gouvernement, nous souhaitons, par cet amendement, nous assurer de la pérennité de l’ARPE.

M. le rapporteur spécial. Les crédits de l’ARPE sont chaque année de plus en plus sous-consommés : dans le dernier budget, 58 millions d’euros étaient prévus pour le financement de cette aide, mais seuls 33 millions d’entre eux ont été consommés. Le défaut majeur du dispositif est qu’il ne fait l’objet d’aucun accompagnement particulier. Les rapporteurs spéciaux au Sénat l’ont d’ailleurs souligné : ce dispositif produit des effets d’aubaine. Il n’est pas contrôlé ou, en tout cas, les contrôles sont très difficiles à effectuer et les CROUS n’ont pas les moyens de s’assurer que le demandeur n’est plus en formation, qu’il recherche bien un emploi et qu’il n’en a pas trouvé. L’aide peut même, en outre, retarder l’insertion professionnelle.

Nous faisons donc clairement un autre choix, celui de quadrupler les crédits consacrés à la mobilité étudiante – crédits qui passent de 7 à 30 millions d’euros –, de renforcer les parcours personnalisés pour améliorer la réussite des étudiants et de privilégier les dispositifs réels d’insertion professionnelle qui se développent assez bien. Nous faisons aussi le choix d’étendre la garantie jeunes pour ceux d’entre eux qui sont dans une situation de rupture sociale et qui ont véritablement besoin à la fois d’un accompagnement financier et d’un accompagnement humain qui fait défaut dans le cadre de l’ARPE. Nous préférons investir en amont plutôt que dans un dispositif qui n’a pas fait ses preuves, qui n’a pas trouvé son public et qui est assez coûteux au regard de son efficacité. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur spécial, pourriez-vous nous rappeler le montant de l’ARPE ?

M. le rapporteur spécial. L’aide est en moyenne de 300 euros par mois pendant quatre mois à compter de l’obtention du diplôme.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte larticle 78 sans modification.

*

*     *

(…)

 

*

*     *

 

 


—  1  —

   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

 

Conférence des grandes écoles (CGE) : Mme Anne-Lucie Wack, présidente, M. Gérald Majou de La Débutrie, et M. Jules Meunier

Direction générale de lenseignement supérieur et de linsertion professionnelle (DGESIP) : Mme Brigitte Plateau, directrice générale, M. Christophe Castell, sous-directeur de la vie étudiante, et M. Éric Piozin, chef de service de la stratégie de contractualisation, du financement et de l’immobilier

CNOUS : Mme Marchand, présidente, Mme Leca, directrice générale déléguée, et M. Bosle, sous directeur de la performance et des finances

Conférence des présidents duniversité (CPU) : M. Gilles Roussel, président, M. Bernard Saint-Girons, délégué général, ancien recteur, M. Michel Dellacasagrande, conseiller moyens et personnels, et M. Kévin Neuville, conseiller en charge des relations avec le Parlement

Campus France : M. Bertrand Monthubert, président, et M. Thierry Valentin, directeur général adjoint

Fédération des établissements d'enseignement supérieur d'intérêt collectif (FESIC) : M. Philippe Choquet, président, Mme Delphine Blanc-Le Quilliec, déléguée générale, et M. Germain Comerre, chargé des relations institutionnelles

Syndicat national de l’enseignement supérieur (SNESUP-FSU) : M. Hervé Christofol, secrétaire général

Syndicat national des chercheurs scientifiques (SNCS-FSU) : M. Patrick MONFORT, Directeur de recherche au CNRS, Secrétaire général du SNCS-FSU

Fédération de l’Enseignement, de la recherche et de la culture (CGT FERC SUP) : Mme Josiane Tack, secrétaire générale, délégation FERC CGT

Confédération Syndicale de lÉducation Nationale (CSEN FGAF) : M. Frédéric Moreno Lopez, président et Mme Françoise MARQUAIS, secrétaire générale

SUD recherche EPST : Mme Marie-Bernadette ALBERT et Mme Janique GUIRAMAND

Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) : M. Michel Cosnard, président

Cabinet de la ministre chargée de lenseignement supérieur, de la recherche et de linnovation : M. Philippe Baptiste, directeur de cabinet, M. David Cavaillolès, conseiller budgétaire, industriel et spatial, et M. Lloyd Cerqueira, conseiller parlementaire

 

 

 


—  1  —

   ANNEXE

Évolution des autorisations d’engagement de la mission recherche
depuis 2016

 

 

LFI 2016

LFI 2017

LFI 2018

PLF 2019

Variation PLF 2019
LFI 2018 en %

Variation PLF 2019

LFI 2018 en valeur absolue

150 Formations supérieures et recherche universitaire

13 007 128

13 264 420

13 437 798

13 524 917

0,65 %

87 119

action 17 recherche

3 831 689

3 896 774

3 924 739

3 937 904

0,34 %

13 165

231 Vie étudiante

2 541 920

2 691 972

2 694 501

2 704 594

0,37 %

10 093

172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

 

 

Pilotage et animation

 

176 929

176 514

205 406

16,37 %

28 892

Agence nationale de la recherche

 

703 411

736 114

768 839

4,45 %

32 725

Recherches interdisciplinaires et transversales

 

62 730

62 658

62 658

0,00 %

0

Diffusion, valorisation et transfert des connaissances

 

149 001

149 020

149 020

0,00 %

0

Grandes infrastructures de recherche

 

239 415

257 331

264 143

2,65 %

6 812

Moyens généraux d’appui à la recherche

 

847 486

886 227

917 135

3,49 %

30 908

Recherches scientifiques/technologiques en sciences de la vie et de la santé

 

1 219 788

1 215 923

1 216 442

0,04 %

519

Recherches sciences et techniques de l’information

 

983 226

982 627

982 627

0,00 %

0

Recherches dans le domaine de l’énergie

 

630 361

726 356

743 841

2,41 %

17 485

Recherches dans le domaine de l’environnement

 

1 096 475

1 122 804

1 122 946

0,01 %

142

Recherches en sciences humaines et sciences sociales

 

405 087

405 110

405 110

0,00 %

0

Total

6 244 300

6 513 909

6 720 684

6 838 167

1,75 %

117 483

193 - Recherche spatiale

 

 

 

 

 

 

Développement de la technologie spatiale au service de la science

 

184 389

202 151

230 501

14,02 %

28 350

Développement au service de l’observation de la terre

 

280 099

297 992

326 552

9,58 %

28 560

Développement au service de l’information et de la communication

 

119 336

133 545

156 225

16,98 %

22 680

Maîtrise de l’accès à l’espace

 

517 095

577 487

673 877

16,69 %

96 390

Maîtrise des techniques orbitales et de l’innovation

 

223 347

240 452

267 752

11,35 %

27 300

Moyens généraux et d’appui à la recherche

 

84 170

83 147

86 647

4,21 %

3 500

Développement des satellites de météorologie

 

58 148

83 329

81 458

– 2,25 %

– 1 871

Total

1 371 720

1 466 584

1 618 103

1 823 013

12,66 %

204 910

190 - Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

 

 

Recherche dans le domaine de l’énergie

 

619 312

606 639

 

 

– 606 639

Recherche dans le domaine des risques

 

177 338

176 856

178 006

0,65 %

1 150

Recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l’aménagement

 

100 490

101 406

102 426

1,01 %

1 020

Recherche partenariale dans le développement et l’aménagement durable

 

1 551

1 551

1 551

0,00 %

0

R&D dans l’aéronautique civile

 

68 289

135 000

135 000

0,00 %

0

Charges nucléaires de long terme des installations du CEA

 

740 000

740 000

740 000

0,00 %

0

Recherche dans le domaine de l’énergie nucléaire

 

 

 

433 369

 

433 369

Recherche dans le domaine des nouvelles technologies de l’énergie

 

 

 

176 940

 

176 940

Total

1 718 070

1 706 980

1 761 452

1 767 292

0,33 %

5 840

192 Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

 

 

Organismes de formation supérieure et de recherche

321 912

311 810

317 928

323 256

1,68 %

5 328

Soutien et diffusion de l’innovation technologique

 

346 735

346 249

341 700

– 1,31 %

- 4 549

Soutien de la recherche industrielle stratégique

 

110 749

74 379

13 500

– 81,85 %

– 60 879

Total

776 518

769 294

738 557

678 456

 8,14 %

 60 101

191 Recherche duale

 

 

 

 

 

 

Recherche duale en sciences du vivant

 

7 775

7 940

7 851

– 1,12 %

– 89

Recherche duale en sciences et techniques de l’information

 

6 350

6 698

8 891

32,74 %

2 193

Recherche duale dans le domaine aérospatial

 

152 757

152 201

150 201

– 1,31 %

– 2 000

Autres recherches et développements duaux

 

13 193

12 680

12 576

– 0,82 %

– 104

Total

180 075

180 075

179 519

179 519

0,00 %

 1

186 Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

 

 

Recherche culturelle

 

9 947

10 271

11 0670

7,75 %

796

Culture scientifique et technique

 

105 464

101 692

99 692

– 1,97 %

– 2 000

Total

122 147

115 411

111 963

110 759

 1,08 %

 1 204

142 Enseignement supérieur et recherche agricoles

 

 

 

 

 

 

Enseignement supérieur

296 812

303 821

309 334

314 799

1,77 %

5 465

Recherche, développement et transfert de technologie

 

36 686

35 787

37 254

4,10 %

1 467

Total

331 764

340 507

345 121

352 053

2,01 %

6 932

Total mission

26 293 626

27 048 552

27 607 698

27 978 770

1,34 %

371 072

Dont partie recherche (hors 150 et 231)

10 744 578

11 092 760

11 475 399

11 749 259

2,39 %

273 860

Dont partie recherche (hors P231 et P150, avec toutefois l’action 17 du P150)

14 576 267

14 989 534

15 400 138

15 687 163

1,86 %

287 025

Dont partie recherche périmètre MIRES (action 17 du programme 150 moins enseignement sup agricole et économique)

13 957 543

14 373 903

14 722 876

15 049 108

1,87 %

276 232

Source : projets annuels de performances.


([1]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/rap-info/i1213.asp.