N° 3011

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 mai 2020

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et dapprobation des comptes de lannée 2019 (n° 2899),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

  Député

 

  ——

 

ANNEXE N° 28

 

 

Immigration, asile et intégration

 

 

Rapporteurs spéciaux : M. Jean-Noël BARROT et Mme Stella DUPONT

 

Députés

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SOMMAIRE

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Pages

Synthèse, chiffreS-clés et recommandations

INTRODUCTION

PREMIÈRE PARTIE : lEXÉCUTION des crÉdits 2019

I. LEXÉCUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS EN 2019

A. Les grandes lignes de lEXÉCUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS

1. Les dépenses de la mission continuent de croître de manière importante mais déséquilibrée en raison dune sous-estimation de certaines dépenses du programme 303.

2. Lexercice 2019 a été marqué par une importante régulation budgétaire

B. La maquette budgétaire et le dispositif de performance

1. Une maquette budgétaire pouvant être améliorée en certains points

2. Des indicateurs de performance en voie denrichissement

II. LEXÉCUTION DÉTAILLÉE DES CRÉDITS EN 2019

A. Lexécution du programme 303 se caractérise par limportante sur-exécution de laction  2 Garantie de lexercice du droit dasile et par le niveau élevé des dépenses de lutte contre limmigration irrégulière

1. Limportante sur-exécution de laction n° 2 Garantie de lexercice du droit dasile

2. Bien quinférieures aux prévisions, les dépenses de lutte contre limmigration irrégulière se situent à un niveau élevé

B. Le programme 104 a été sous-exécuté mais ses dépenses demeurent en forte croissance

1. Un programme sous-exécuté

2. Des dépenses se situant à un niveau élevé

C. DEUX NOUVEAUX POINTS DE VIGILANCE : LA GESTION DES FONDS DE CONCOURS ET LES SUITES DE LA RÉFORME DE LA TAXE EMPLOYEUR

1. Les fonds de concours : une contribution élevée tempérée par dimportantes difficultés de gestion

2. Labsence regrettable dinformation sur les pertes financières nées de la réforme mal maîtrisée de la taxe employeur

SECONDE PARTIE : LINCIDENCE ATTENDUE DE LA CRISE SANITAIRE SUR LA MOBILISATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES ET LE DÉPLOIEMENT DES POLITIQUES PUBLIQUES RELEVANT DE LA MISSION IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

I. Le taux de consommation des crédits au 31 mars 2020

II. Limpact de la crise sanitaire sur le déploiement des politiques publiques et la mobilisation des crédits budgétaires

A. Les mesures prises dans le cadre de létat durgence sanitaire intéressant les politiques migratoires

1. La circulation des étrangers

2. La durée de validité des titres de séjour

3. Les délais administratifs et les procédures juridictionnelles

a. Les délais administratifs

b. Les procédures juridictionnelles

4. Lallocation pour demandeurs dasile

5. Les possibilités de travail saisonnier ouvertes aux étrangers

B. Lévolution attendue des politiques publiques et des dépenses relevant du programme 104 Intégration et accès à la nationalité française

1. Des politiques publiques à larrêt ou très ralenties puis reprises progressivement

2. Un surcroît de dépenses estimé à 11 millions deuros

C. Lévolution attendue des politiques publiques et des dépenses relevant du programme 303 Immigration et asile

1. Des politiques publiques diversement touchées par la crise sanitaire

a. La chaîne de lasile a été quasiment à larrêt de la mi-mars au mois de mai puis a repris progressivement

b. Le dispositif national daccueil a poursuivi et adapté son activité

c. Les centres de rétention et les éloignements : une activité maintenue à un bas niveau suivie dune reprise progressive

2. Un surcroît de dépenses estimé à 157 millions deuros

EXAMEN EN COMMISSION

QUESTIONNAIRES TRANSMIS PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

SOURCES UTILISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL


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   Synthèse, chiffreS-clés et recommandations 

Le présent rapport rend compte de lexécution budgétaire 2019 de la mission Immigration, asile et intégration composée des programmes 104 Intégration et accès à la nationalité française et 303 Immigration et asile.

Lexécution de ces postes budgétaires sest établie (hors fonds de concours) à 1 948 millions deuros en autorisations dengagement (AE) et 1 780 millions deuros en crédits de paiement (CP), soit des montants supérieurs denviron 5 % à ceux ouverts par la loi de finances pour 2019. Le dépassement sétablit à 97 millions deuros en AE et à 91,5 millions deuros en CP. En incluant les fonds de concours, ces dépenses se sont élevées à 2 004,5 millions deuros en AE et à 1 839,4 millions deuros en CP.

Lexécution budgétaire 2019 est marquée par la poursuite dévolutions antérieures. Les dépenses de la mission continuent ainsi de croître de manière importante mais déséquilibrée. En cinq ans, les CP exécutés des programmes 104 et 303 sont passés de 677,5 millions deuros en 2015 à 1 780 millions deuros en 2019. Ces dépenses peinent à trouver leur équilibre puisque lexercice 2019 est le onzième exercice consécutif de dépassement des crédits initiaux. Depuis la création de la mission en 2008, le niveau des crédits inscrit en loi de finances initiale na suffi à couvrir quune seule fois les besoins réels de financement.

Une nouvelle fois, le déséquilibre constaté provient dune importante sur-exécution du programme 303 (+ 150 millions d’euros) partiellement compensée par une sous-exécution du programme 104 (– 55 millions d’euros). La fragilité continue du programme 303 pose question en raison de la (nouvelle) sous-estimation de l’évolution de la demande d’asile et de son effet sur les crédits de l’allocation pour demandeurs d’asile. Les rapporteurs souhaitent que l’hypothèse d’évolution de la demande d’asile figurant dans le prochain projet de loi de finances soit plus robuste que celle retenue dans les précédents exercices. À ce titre, lors du prochain projet de loi de finances, ils solliciteront du ministère de l’intérieur, la communication détaillée de la méthodologie retenue pour déterminer cette prévision.

La seconde partie du rapport est consacrée à lanalyse de lincidence attendue de la crise sanitaire sur la mobilisation des crédits budgétaires et sur le déploiement des politiques publiques relevant des programmes 104 et 303. Pour lheure, la crise sanitaire est susceptible de majorer les dépenses de la mission Immigration, asile et intégration denviron 168 millions deuros, soit un accroissement de 9,27 % par rapport aux crédits de paiement ouverts par la loi de finances pour 2020.

 

Exécution 2019 des crédits de paiement des programmes 104 Intégration et accès à la nationalité française et 303 Immigration et asile

Source : commission des finances.

 

 

 


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   INTRODUCTION

Le Printemps de l’évaluation associe une démarche d’examen de l’exécution financière d’une mission du budget de l’État en année N–1 avec l’analyse d’une politique publique reposant, en totalité ou en partie, sur les crédits de cette mission.

Dans ce cadre, les rapporteurs examineront l’exécution 2019 des crédits relevant de la mission Immigration, asile et intégration qui s’établissaient, en loi de finances pour 2019, à 1 850,91 millions d’euros en AE et 1 688,41 millions d’euros en CP. Initialement, les rapporteurs avaient prévu de compléter ce travail par lévaluation de la mise en œuvre de la stratégie nationale pour laccueil et lintégration des réfugiés. Cependant, le contexte actuel a conduit la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire à réorienter le printemps de lévaluation sur lexamen de lincidence attendue de lactuelle crise sanitaire sur la mobilisation des crédits budgétaires et le déploiement des politiques publiques de l’ensemble des programmes et missions du budget de l’État. Les rapporteurs examineront donc cette incidence attendue sur les crédits placés sous leur contrôle.

Lévaluation de la mise en œuvre de la stratégie nationale pour laccueil et lintégration des réfugiés a donc été provisoirement interrompue et fera lobjet dune communication ultérieure.

 

*


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   PREMIÈRE PARTIE : l’EXÉCUTION des crÉdits 2019

Dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2019, les crédits de la mission Immigration, asile et intégration s’élevaient, hors fonds de concours et attribution de produits attendus, à 1 850,91 millions d’euros en AE et 1 688,40 millions d’euros en CP. Ces montants étaient en progression sensible par rapport à la loi de finances pour 2018 (+ 26,2 % en AE et + 12,1 % en CP).

Ces crédits étaient organisés autour des programmes 104 Intégration et accès à la nationalité française et 303 Immigration et asile. Le programme 303 réunissait plus des trois quarts des CP ouverts (77,9 %). La mission ne comportait aucune dépense fiscale.

Après une présentation générale de lévolution de ces crédits en 2019, il sera procédé à une analyse détaillée de leur consommation.

I.   LEXÉCUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS EN 2019

A.   Les grandes lignes de l’EXÉCUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS

En 2019, le taux de consommation des crédits de la mission sest établi, hors fonds de concours, à 105 %.

En AE (hors fonds de concours), 1 947,8 millions deuros ont été dépensés, soit 96,9 millions deuros de plus que les 1 850,9 millions de crédits ouverts en LFI (+ 5,24 %). En CP (hors fonds de concours), 1 779,9 millions deuros ont été exécutés, soit 91,5 millions deuros de plus que les 1 688,4 millions deuros ouverts en LFI (+ 5,42 %). En incluant les fonds de concours, les dépenses se sont élevées à 2 004,5 millions d’euros en AE et à 1 839,4 millions d’euros en CP.

La consommation de ces crédits entre les programmes 104 et 303 a été la suivante :

L’exécution des crédits en 2019

(en millions d’euros)

 

Crédits ouverts par la LFI 2019

Crédits exécutés en 2019
(hors fonds de concours)

Écart en valeur absolue
(et en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 104

408,6

408,7

353,5

352,9

– 55,1

(– 13,5 %)

– 55,8

(– 3,7 %)

Programme 303

1 442,3

1 279,7

1 594,6

1 427,1

+ 152,3

(+ 10,6 %)

+ 147,4

(+ 11,6 %)

Total ensemble des crédits examinés

1 850,9

1 688,4

1 947,8

1 779,9

+ 96,9

(+ 5,24 %)

+ 91,5

(+ 5,42 %)

Source : rapport annuel de performances et Cour des comptes.

Si les dépenses de la mission Immigration, asile et intégration poursuivent leur croissance tendancielle, cette progression demeure déséquilibrée et a nécessité, en 2019, une importante régulation budgétaire.

1.   Les dépenses de la mission continuent de croître de manière importante mais déséquilibrée en raison d’une sous-estimation de certaines dépenses du programme 303.

Les dépenses de la mission poursuivent leur croissance afin de faire face à la progression continue du nombre de demandes dasile déposées ([1]) et, dans une moindre mesure, à la relance de la politique dintégration. En cinq ans, les dépenses de la mission se sont accrues de plus dun milliard deuros (677,5 millions deuros de CP exécutés en 2015, 1 779,9 millions deuros en 2019).

2015-2019, évolution des crédits de paiements exécutés de la mission Immigration, asile et intégration

(en millions d’euros)

Source : commission des finances.

Les rapporteurs saluent cette évolution et observent que les crédits de la mission Immigration, asile et intégration figurant dans la LFI pour 2019 étaient en forte hausse par rapport à 2018 (+ 384,7 millions d’euros en AE et + 181,8 millions d’euros en CP). L’élévation de ces moyens n’a cependant pas permis de répondre aux besoins de financement constatés en exécution.

La progression continue des dépenses de la mission Immigration, asile et intégration est déséquilibrée. Si les dépenses de cette mission croissent tendanciellement, cette augmentation est insuffisamment maîtrisée en raison dimportants aléas de gestion rendus nécessaires par une prévision erronée des flux migratoires. Lexercice 2019 est ainsi le onzième exercice consécutif de dépassement des crédits initiaux. Depuis la création de la mission Immigration, asile et intégration en 2008, le niveau des crédits inscrits en loi de finances initiale na couvert quune seule fois (en 2008) les besoins réels de financement.

2008-2019 - Écart entre les CP ouverts en LFI et les CP exécutés de la mission Immigration, asile et intégration

Source : commission des finances, d’après les notes d’analyse de l’exécution budgétaire, les lois de finances initiales et les lois de règlement du budget et d’approbation des comptes.

Le dépassement observé en 2019 écarte un peu plus cette mission de sa trajectoire d’évolution figurant dans la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire de cette mission, la Cour des comptes observe que « l’écart de la mission en LFI 2020 au montant plafond 2020 fixé par la LPFP est de plus de 25 %, il constitue de loin, en pourcentage, le plus important de l’ensemble des missions du budget général de l’État. » ([2]).

En 2019, le déséquilibre observé sexplique par la (nouvelle) sur-exécution du programme 303 Immigration et asile. Durant cet exercice, les dépenses de ce programme ont excédé de 150 millions (152,3 millions deuros en AE et 147,4 millions deuros en CP, hors fonds de concours) les crédits ouverts en loi de finances initiale tandis que les dépenses du programme 104 Intégration et accès à la nationalité française ont été inférieures de 55 millions deuros (55 millions deuros en AE et 55,7 millions deuros en CP, hors fonds de concours) aux crédits ouverts en loi de finances initiale.

Ce déséquilibre entre les programmes 303 et 104 (le programme 303 est sur-exécuté tandis que le programme 104 est sous-exécuté) se reproduit pour le cinquième exercice consécutif :

2015-2019, comparaison du solde des CP ouverts en LFI et des CP exécutés des programmes 104 et 303

Source : commission des finances.

2.   L’exercice 2019 a été marqué par une importante régulation budgétaire

En 2019, et comme les années précédentes, le traitement en cours dexercice du besoin de financement de la mission et du déséquilibre entre les programmes 104 et 303 a nécessité de « multiples mouvements de crédits » ([3]) destinés à abonder le programme 303. Cette régulation budgétaire a pris trois formes : une régulation interne à la mission, une régulation interne entre les différentes missions du ministère de l’intérieur et l’ouverture d’un complément de crédit en loi de finances rectificative :

– les mesures de régulation internes à la mission ont consisté à dégeler la mise en réserve du programme 303 puis à annuler des crédits du programme 104 à hauteur de 54,1 millions d’euros ([4]) ;

– les mesures de régulation internes aux différentes missions gérées par le ministère de l’intérieur ont consisté à annuler 20,67 millions d’euros de crédits des programmes 152 (Gendarmerie nationale), 216 (Conduite et pilotage des politiques de lintérieur) et 307 (Administration territoriale) au profit du programme 303 ;

– la loi de finances rectificative pour 2019 a ouvert 129,32 millions d’euros supplémentaires en AE et 126,23 millions d’euros en CP au profit du programme 303, soit un volume « considérable » selon la Cour des comptes ([5]).

Cette importante régulation budgétaire s’explique par la sous-estimation de l’évolution de la demande d’asile et par une programmation initiale des dépenses liées à l’asile jugée « insincère » par la Cour des comptes (cf. infra) ([6]).

B.   La maquette budgétaire et le dispositif de performance

1.   Une maquette budgétaire pouvant être améliorée en certains points

En 2019, la maquette budgétaire de la mission était organisée autour des programmes 104 et 303 qui étaient composés des neuf actions suivantes :

Programme 104

Programme 303

Action n° 11, accueil des étrangers primo arrivants

Action n° 1, circulation des étrangers et politique des visas

Action n° 12, accompagnement des étrangers en situation régulière

Action n° 2, garantie de l’exercice du droit d’asile

Action n° 14, accès à la nationalité française

Action n° 3, lutte contre l’immigration irrégulière

Action n° 15, accompagnement des réfugiés

Action n° 4, soutien 

Action n° 16, accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

 

Si lorganisation de la maquette nappelle pas de remarque particulière de la Cour des comptes, les rapporteurs émettent deux observations.

En premier lieu, ils rappellent que le rapport sur les mesures d’éloignement des étrangers en situation irrégulière présenté en 2019 ([7]) recommandait de transférer au programme 176 Police nationale (relevant de la mission Sécurités) les crédits de fonctionnement des centres de rétention administrative et dexécution des mesures déloignement relevant actuellement du programme 303. Cette mesure, portant sur un montant d’environ 100 millions d’euros, permettrait à la direction centrale de la police aux frontières de gérer l’ensemble des crédits relevant de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière alors que la gestion de ces crédits est actuellement partagée entre cette direction (relevant de la mission Sécurités) et la direction générale des étrangers en France (relevant de la mission Immigration, asile et intégration).

En second lieu, les rapporteurs sont favorables à la suppression de laction  1 Circulation des étrangers et politique des visas du programme 303 compte tenu de son montant très limité (0,52 million d’euros).

Ils relèvent qu’en 2019, cette action dédiée au financement des moyens informatiques du réseau diplomatique et consulaire n’a fait l’objet d’aucune consommation de crédit en raison du retard pris dans la conclusion d’une convention entre le ministère de l’intérieur et le ministère de l’Europe et des affaires étrangères. En l’absence de convention, les crédits correspondants ont servi au financement d’autres dépenses relevant de l’action 4 du programme 303.

2.   Des indicateurs de performance en voie d’enrichissement

Le dispositif de performance de la mission, qui reposait en 2019 sur 5 objectifs et 7 indicateurs, est en revanche globalement satisfaisant.

Objectifs

Indicateurs de performance

Programme 104

Améliorer les conditions d’accueil et d’intégration des étrangers

Efficience de la formation linguistique dans le cadre du CIR/CAI (taux d’atteinte du niveau A1)

Améliorer l’efficacité du traitement des dossiers de naturalisation

Efficacité de la procédure d’instruction d’un dossier de naturalisation (délai moyen d'instruction des décisions positives et délai moyen d'instruction des décisions négatives)

Programme 303

Optimiser la prise en charge des demandeurs d’asile

Part des demandeurs d’asile hébergés

Part des places occupées par les demandeurs d’asile et autres personnes autorisées

Réduire les délais de traitement de la demande d’asile

Délai de l’examen d’une demande d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA)

Améliorer l’efficacité de la lutte contre l’immigration irrégulière

Nombre de retours forcés exécutés

Nombre de retours aidés exécutés

Les rapporteurs soulignent que ce dispositif de performance a été enrichi dans les documents budgétaires joints au projet de loi de finances pour 2020. L’objectif du programme 104 d’améliorer des conditions d’accueil et d’intégration des étrangers a été complété par un indicateur permettent d’apprécier la part des personnes ayant bénéficié d’une orientation vers le service public de l’emploi pendant la durée du contrat d’intégration républicaine. L’objectif du programme 303 d’optimiser la prise en charge des demandeurs dasile a été enrichi d’un sous-indicateur dédié au nombre de décisions rendues dans l’année par l’OFPRA.

Comme le suggère la Cour des comptes, ces indicateurs mériteraient cependant dêtre complétés par un indicateur rendant compte de lactivité des centres provisoires dhébergement consacrés à l’accueil de réfugiés statutaires et financés, en 2019, à hauteur de 64 millions d’euros.

 

 

 

II.   L’EXÉCUTION DÉTAILLÉE DES CRÉDITS EN 2019

Les crédits exécutés en 2019 seront analysés selon leur ordre d’importance financière.

A.   L’exécution du programme 303 se caractérise par l’importante sur-exécution de l’action n° 2 Garantie de lexercice du droit dasile et par le niveau élevé des dépenses de lutte contre l’immigration irrégulière

Doté de 1 442,3 millions d’euros en AE et de 1 279,7 millions d’euros en CP en loi de finances initiale, le programme 303 a connu en 2019 une importante sur  exécution budgétaire : 1 594,6 millions d’euros ont été dépensés en AE (+ 152,3 millions d’euros, soit un dépassement de 10,6 %) et 1 427,1 millions d’euros en CP (+ 147,4 millions deuros, soit un dépassement de 11,6 %).

Cette sur-exécution s’est ainsi répartie entre les actions de ce programme :

 

LFI 2019

Exécution 2019

Écart LFI/Exécution

 

 

Écart en %

Écart en euros

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 1 - Circulation des étrangers et la politique des visas

0,5

0,5

0

0

– 100 %

– 100 %

– 0,5

– 0,5

Action n° 2 - Garantie de l’exercice du droit d’asile

1 258, 5

1 113,1

1 429,9

1 287,9

+ 13,62 %

+ 15,7 %

+ 171,4

+ 174,8

Action n° 3 - Lutte contre l’immigration irrégulière

153,3

136,1

136

109,3

– 11,3 %

– 19,7 %

– 17,3

– 26,8

Action n° 4 - Soutien

30

30

28,7

29,9

– 4,7 %

– 0,7 %

– 1,3

– 0,1

Total :

1 442,3

1 279,7

1 594,6

1 427,1

+ 10,6 %

+ 11,6 %

152,3

147,4

Source : commission des finances d’après le rapport annuel de performances et la Cour des comptes.

1.   L’importante sur-exécution de l’action n° 2 Garantie de lexercice du droit dasile

Parmi les quatre actions composant le programme 303, trois actions ont été exécutées conformément aux prévisions (action n° 4, Soutien, – 0,7 % en CP) en deçà de celles-ci (action n° 3 Lutte contre limmigration irrégulière, – 19,7 %) ou très en deçà de celles-ci (action n° 1 Circulation des étrangers et la politique des visas, – 100 %). Seule laction n° 2 Garantie de lexercice du droit dasile a été exécutée au-delà des prévisions (+ 15,7 % en CP) pour un montant proche de 175 millions d’euros (+ 174,8 millions d’euros).

Limportante sur-exécution du programme 303 tient donc uniquement à lévolution de laction n° 2 Garantie de lexercice du droit dasile dédiée au financement de l’OFPRA, de l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA) et des structures d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile.

Au sein de laction n° 2, la sur-exécution se concentre essentiellement sur le financement de lallocation pour demandeurs dasile.

L’action n° 2 comprend trois sous-actions dont l’exécution 2019 a été la suivante :

Exécution 2019 des composantes de l’action n° 2 Garantie de l’exercice du droit d’asile (CP, hors fonds de concours)

(en millions d’euros)

Si les dépenses de l’OFPRA sont proches des crédits ouverts en loi de finances initiale (– 0,57 million d’euros, soit – 0,8 %), et si les dépenses d’hébergement sont – à l’exception des dépenses en CADA – légèrement supérieures aux prévisions (+ 18,83 millions d’euros, soit un dépassement de 2,7 %) ([8]), les dépenses servant au financement de lADA sont très supérieures à celles initialement prévues (+ 156,67 millions deuros, soit un dépassement de 46,7 %).

Le surcroît de dépenses dADA sinscrit dans le prolongement des exercices antérieurs et confirme lécart persistant existant entre les dépenses dADA ouvertes en loi de finances initiale et les dépenses dADA exécutées :

2016-2019, l’ADA, un écart persistant entre les dépenses projetées et les dépenses exécutées

Source : commission des finances (d’après les données de la Cour des comptes).

Si l’écart entre la dépense inscrite en loi de finances initiale et la dépense exécutée d’ADA s’était réduit en 2018 (106,1 millions d’euros), il s’est creusé en 2019 (161,7 millions d’euros) en raison d’une programmation initiale des crédits reposant sur une sous-estimation de lévolution de la demande dasile.

Une (nouvelle) sous-estimation de lévolution de la demande dasile.

La loi de finances pour 2019 reposait sur une hypothèse d’une stabilisation du nombre de demandes dasile enregistrées et dune baisse de 10 % des demandeurs placés sous procédure Dublin. Cette hypothèse ne sest pas vérifiée puisque le nombre de demandes d’asile enregistrées à l’OFPRA a crû de 7,3 % en 2019 (et de 11 % dans les guichets uniques de la demande d’asile) et le nombre de demandeurs d’asile placés en procédure Dublin s’est élevé de 4,5 %.

La Cour des comptes juge sévèrement cette distorsion entre l’hypothèse d’évolution de la demande d’asile figurant dans la loi de finances initiale et celle effectivement constatée.

Elle considère ainsi que la programmation initiale des dépenses liées à lasile est « insincère » et fait peser « un risque dinsoutenabilité » sur la mission Immigration, asile et intégration. Elle observe également que « quels que soient les éléments sur lesquels avait été construite la budgétisation initiale 2019 au printemps 2018, il appartenait au Gouvernement de constater qu’ils n’étaient plus opérants au deuxième semestre et d’en tirer les conséquences, y compris pendant l’examen parlementaire du PLF 2019, pour proposer une nouvelle budgétisation plus réaliste et fondée sur les éléments d’information et d’analyse les plus récents » ([9]).

Les rapporteurs rappellent avoir fait part de leurs doutes au moment de lexamen du projet de loi de finances pour 2019 sur la pertinence de l’hypothèse d’évolution de la demande d’asile retenue. Ils avaient ainsi indiqué être « circonspects sur une possible stabilisation de la demande dasile en France » en 2019 et avaient regretté que le montant des CP inscrits au projet de loi de finances au titre de lADA (335,9 millions deuros) soit « inférieur de 3,75 % au montant versé en 2017 (349 millions deuros) » ([10]). Une adaptation de lhypothèse dévolution de la demande dasile durant lexamen du projet de loi de finances aurait été bienvenue.

La fragilité de lhypothèse dévolution de la demande dasile constitue une faiblesse récurrente de la mission Immigration, asile et intégration. Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, les rapporteurs avaient souligné les erreurs régulières d’anticipation observées depuis cinq ans et noté que s’ils « conviennent de la difficulté d’établir une hypothèse d’évolution de la demande d’asile, ils regrettent que le ministère de l’intérieur n’ait pu leur présenter en détail la méthodologie retenue pour élaborer cette hypothèse. Une forme d’empirisme semble dominer ».

2015-2019 - Comparaison de l’hypothÈse d’Évolution de la demande d’asile retenue dans le PLF et de l’augmentation de la demande d’asile enregistrÉe à l’OFPRA

Année

Hypothèse d’évolution retenue dans le PLF

Nombre et évolution du nombre de demandes d’asile (OFPRA ([11]))

Écart entre la prévision budgétaire et les flux constatés

2015

+ 7,5 %

80 075

+ 23,5 %

– 16 points par rapport aux flux constatés

2016

+ 10 %

85 726

+ 7 %

+ 3 points par rapport aux flux constatés

2017

+ 10 %

100 755

+ 17,5 %

 7,5 points par rapport aux flux constatés

2018

+ 10 %

123 625

+ 22,7 %

 12,7 points par rapport aux flux constatés

2019

+ 0 %

132 614

+ 7,3 %

 7,3 points par rapport aux flux constatés

Sources : Cour des comptes.

 

L’anticipation de l’évolution de la demande d’asile est un exercice difficile. Les flux migratoires ne sont pas, loin s’en faut, une science exacte et des prévisions peuvent ne pas être confirmées par les faits. La succession de prévisions inexactes interroge cependant et devrait inviter le ministère de l’intérieur à retenir une approche prudente reposant sur une méthodologie fine.

À ce titre, les rapporteurs soutiennent la recommandation de la Cour des comptes visant à programmer les crédits en loi de finances initiale « sur la base d’une évaluation plus réaliste des dépenses liées à l’accueil des demandeurs d’asile ». Ils invitent notamment le Gouvernement à présenter dans le prochain projet de loi de finances une hypothèse dévolution de la demande dasile plus robuste que celle observée lors des précédents exercices, cest-à-dire une hypothèse reposant sur un objectif de sincérité budgétaire (prévoir la dépense telle quelle sera) et non sur un objectif de politique publique (prévoir la dépense telle quon voudrait quelle soit). À ce titre, la proposition de la Cour des comptes détablir cette prévision sur la base de la « croissance annuelle moyenne des exercices précédents » ([12]) mérite dêtre étudiée mais semble, à première vue, peu pertinente au vu des simulations effectuées par les rapporteurs ([13]).

Lors du prochain projet de loi de finances, les rapporteurs solliciteront du ministère de l’intérieur la communication du détail de la méthodologie utilisée pour établir l’hypothèse d’évolution de la demande d’asile.

Quelle évolution de la demande d’asile en 2020 ?

Dans la loi de finances pour 2020, les crédits de la mission Immigration, asile et intégration reposent (comme en 2019) sur une hypothèse de stabilisation de la demande d’asile et d’une baisse de 10 % des demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin.

Début 2020, cette hypothèse pouvait sembler optimiste puisque, selon l’OFPRA, le nombre de demandes d’asile enregistrées fin février était en croissance de 4,5 % par rapport à la même période de 2019 (premières demandes d’asile, mineurs inclus, 20 130 demandes enregistrées). La crise sanitaire a cependant eu pour effet de renverser cette tendance puisque, toujours selon l’OFPRA, de janvier à avril 2020, 28 051 premières demandes, mineurs inclus, ont été introduites auprès de cet établissement (soit 30 717 demandes d’asile, toutes demandes confondues), ce qui représente une diminution de 31 % par rapport à la même période de 2019.

L’anticipation de l’évolution de la demande d’asile d’ici la fin de l’année est délicate puisque celle-ci dépendra à la fois du flux normal des demandes d’asile, du rattrapage des demandes d’asile n’ayant pu être déposées depuis le mois de mars et de la capacité des autorités à organiser progressivement la reprise de l’enregistrement de ces différentes demandes d’asile (cf. infra).

2.   Bien qu’inférieures aux prévisions, les dépenses de lutte contre l’immigration irrégulière se situent à un niveau élevé

Dotées de 151,49 millions deuros en CP, les dépenses de laction  3 Lutte contre limmigration irrégulière ont été exécutées à hauteur de 113,59 millions deuros en raison de retards pris dans lexécution des dépenses dinvestissements dans les centres de rétention administrative (les projets de réhabilitation ou de création des CRA de Lyon, Lille et Coquelles ont par exemple été décalés) et de moindres dépenses de fonctionnement courant. En revanche, les dépenses déloignement des étrangers en situation irrégulière ont été très supérieures aux prévisions initiales (+ 34,2 %) Sur ce dernier point, les dépenses se sont élevées à 41,58 millions deuros en CP au lieu de 30,98 millions deuros initialement prévus. Si une part de ce surcroît de dépenses tient à un report de crédits, cette évolution sexplique avant tout par la « dynamique soutenue des éloignements (+ 19 % entre 2018 et 2019 dont + 20,6 % déloignements forcés) » ([14]).

Exécution 2019 des composantes de l’action n° 3 Lutte contre l’immigration irrégulière (CP, hors fonds de concours)

(en millions d’euros)

Les rapporteurs soulignent que les crédits exécutés en 2019 au titre de laction n° 3 Lutte contre limmigration irrégulière se situent à leur plus haut niveau depuis dix ans et que laccroissement des moyens dédiés à cette tâche est particulièrement prononcé depuis 2017.

Exécution 2019 des composantes de l’action n° 3 Lutte contre l’immigration irrégulière (CP, hors fonds de concours)

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances (d’après les rapports annuels de performances).

B.   Le programme 104 a été sous-exécuté mais ses dépenses demeurent en forte croissance

Doté de 408,6 millions d’euros en AE et 408,7 millions d’euros en CP en loi de finances initiale, le programme 104 Intégration et accès à la nationalité française a connu en 2019 une importante sous-exécution budgétaire : 353,5 millions d’euros ont été dépensés en AE et 352,9 millions d’euros en CP soit une sous-consommation d’environ 55 millions d’euros représentant 13,5 % des crédits de la mission. Bien que sous-exécuté, ce programme se situe cependant à un niveau de dépenses nettement supérieur à celui observé ces dernières années, ce qui témoigne, en dépit de ces aléas de gestion, de lattachement du Gouvernement à la relance de cette politique.


1.   Un programme sous-exécuté

La sous-exécution des crédits s’est ainsi répartie entre les actions du programme 104 :

(en millions deuros)

 

LFI 2019

Exécution 2019

Écart LFI/Exécution

 

 

Écart en %

Écart en euros

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 11 - Accueil des étrangers primo arrivants

252

252

206,3

206,3

– 18,1 %

– 18,1 %

– 45,7

– 45,7

Action n° 12 - Actions daccompagnement des étrangers en situation régulière

49,1

49,1

43,9

43,4

– 10,6 %

– 11,6 %

– 5,2

– 5,7

Action n° 14 - Accès à la nationalité française

1

1,1

1

1

0 %

– 9 %

0

0,1

Action n° 15 - Accompagnement des réfugiés

97,9

97,9

94,2

94,1

– 3,8 %

– 3,9 %

– 3,7

– 3,8

Action n° 16 - Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

8,6

8,6

8,1

8,1

– 5,8 %

– 5,8 %

– 0,5

– 0,4

Total :

408,6

408,7

353,5

352,9

– 13,5 %

– 13,7 %

–  55,1

– 55,8

Source : commission des finances daprès le rapport annuel de performance et la note dexécution budgétaire de la Cour des comptes.

Ce tableau appelle les observations suivantes :

La sous-consommation des crédits affecte les actions du programme dans des proportions variables. Si, en CP, toutes les actions connaissent une exécution inférieure aux prévisions, celle-ci concerne peu les actions 14 Accès à la nationalité française (– 0,1 million deuros), 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants ( 0,4 million deuros) et 15 Accompagnement des réfugiés (– 3,8 millions deuros). La sous-exécution des crédits se concentre ainsi très largement sur les actions 11 (Accueil des étrangers primo arrivants, – 45,7 millions deuros) et, dans une moindre mesure, 12 (Accompagnement des étrangers en situation régulière, – 5,7 millions deuros).

L’action n° 11, qui assure le financement de lOffice français de limmigration et de lintégration (OFII), a été sous-consommée à hauteur de 45,7 millions d’euros en raison d’économies réalisées sur les marchés de formations civique et linguistique du contrat d’intégration républicaine, d’une sous-exécution des aides au retour volontaire, de reports de dépenses et de la participation de l’OFII au schéma de fin de gestion du programme 303.

La contribution de lOFII à la gestion des aléas de la mission est telle que la Cour des comptes qualifie cet opérateur « damortisseur budgétaire » et considère que « cette situation, associée à un solde du fond de roulement devenu négatif, pourrait amener l’OFII à une certaine prudence dans l’engagement des dépenses associés aux objectifs ambitieux qui lui ont été fixés sur l’intégration » ([15]). L’OFII a cependant indiqué aux rapporteurs qu’il « n’a pas dû renoncer en 2019 à des actions en réponse à la révision des recettes opérées par la tutelle » ([16]).

Les rapporteurs prennent acte de ces éléments et rappellent le rôle essentiel joué par l’OFII dans la conduite des politiques d’intégration. Les actions en faveur de l’intégration des étrangers doivent, compte tenu de leur importance, être préservées. Si, ponctuellement, une sous-consommation de crédits peut être légitime (par exemple si elle résulte d’économies enregistrées sur des marchés publics), celle-ci deviendrait problématique si elle était motivée par des seuls impératifs de gestion.

L’action n° 12, qui finance des formations déconcentrées dapprentissage de la langue française, d’accès aux droits et d’insertion professionnelle des étrangers primo-arrivants, a été sous-exécutée à hauteur de 5,7 millions d’euros en raison, d’une part, du nombre réduit de programmes financés conjointement avec des collectivités territoriales en matière d’intégration et, d’autre part, d’une participation aux efforts de financement de l’ADA.

Dans sa note d’exécution budgétaire, la Cour des comptes déplore à ce titre « les effets déviction engendrés par la sur-exécution du programme 303. Le financement des dépenses dADA conduit à mobiliser des ressources du programme 104, au-delà des crédits gelés, et impacte latteinte des objectifs de ce programme. En 2019, des crédits destinés au financement du parc de centres provisoires d’hébergement (CPH) et de dispositifs d’intégration des réfugiés et des étrangers en situation régulière ont ainsi été annulés et redéployés au bénéfice du programme 303 par décret de virement. » Les annulations de crédit ont ainsi concerné « 22,1 M€ de réserve et 32,5 M€ de crédits utilisables » ([17]).

Les rapporteurs partagent l’appréciation de la Cour des comptes et soulignent que, si les crédits du programme 104 se situent à un niveau élevé, ce programme na pas vocation à devenir une variable dajustement pérenne du programme 303, ce que sa sous-exécution répétée (cf. infra) laisse néanmoins craindre.


2.   Des dépenses se situant à un niveau élevé

La loi de finances initiale pour 2019 témoigne d’un véritable « changement d’échelle » de la politique d’intégration concrétisant les engagements pris lors du Comité interministériel à l’intégration du 5 juin 2018 ([18]) ainsi que les engagements de création de places supplémentaires dans les centres provisoires d’hébergement accueillant des réfugiés.

Les crédits ouverts (408,7 millions d’euros en CP) sur le programme 104 en 2019 étaient en progression de 94,3 millions d’euros par rapport à 2018 et si la consommation de ces crédits a été inférieure aux prévisions, les dépenses exécutées se situent néanmoins à un niveau élevé :

2009-2019, évolution des CP exécutés du programme 104

Si, depuis 2009, le programme 104 a connu certaines modifications de son périmètre et de ses modalités de financement ([19]), lévolution observée ces dernières années témoigne néanmoins de leffort budgétaire inédit consenti en faveur de la politique dintégration des étrangers et notamment des primo-arrivants.

C.   DEUX NOUVEAUX POINTS DE VIGILANCE : LA GESTION DES FONDS DE CONCOURS ET LES SUITES DE LA RÉFORME DE LA TAXE EMPLOYEUR

L’exécution des crédits de mission en 2019 appelle deux autres observations portant sur la gestion des fonds de concours et les suites de la réforme de la taxe employeur.

1.   Les fonds de concours : une contribution élevée tempérée par d’importantes difficultés de gestion

Les fonds de concours contribuent de manière importante au financement de la mission mais leur gestion a rencontré certains écueils en 2019.

En 2019, la mission Immigration, asile et intégration a exécuté 57,5 millions deuros de fonds de concours d’origine européenne (43 millions d’euros) et britannique (14,5 millions d’euros) répartis entre les programmes 104 (33,4 millions d’euros) et 303 (24,1 millions d’euros dont 14,5 millions d’euros de fonds britanniques).

Sur le programme 104, ces fonds ont par exemple financé des dépenses d’intervention en faveur de l’accueil des étrangers primo arrivants et d’accompagnement ou de réinstallation des réfugiés. Sur le programme 303, ces fonds ont financé des dépenses au titre de l’asile (accueil, orientation, accompagnement des demandeurs d’asile), de la lutte contre l’immigration irrégulière (achat d’équipements dans le Calaisis) et de mise en place de systèmes d’information.

D’autres opérations relatives aux fonds de concours (rattachement, report et annulation) sont intervenues en 2019. Les rapporteurs relèvent notamment lannulation de 3,8 millions deuros de fonds de concours correspondant, selon la DGEF à des « notes de débit faisant suite à des audits ex-post réalisés par la Commission européenne sur les fonds européens issus de la programmation 2007-2013 ». Les montants annulés sont supérieurs à ceux observés lors des exercices antérieurs (1,3 million d’euros en 2016, 0,03 million d’euros en 2017 et 0,005 million d’euro en 2018. Le principe et le montant de ces annulations ne sont pas satisfaisants compte tenu des contraintes financières pesant sur lexercice de la mission.

opérations sur les fonds de concours intervenues en 2019

(en CP et en millions d’euros)

 

Rattachement de fonds de concours

Fonds de concours exécutés

Report de fonds de concours antérieurs

Annulation de fonds de concours

Programme 104

15,2

33,4

20,8

2,3

Programme 303

33,8

24,1

16,9

1,5

Total :

49

57,5

37,7

3,8

Source : commission des finances (d’après le rapport annuel de performances).

Le montant des fonds de concours exécutés en 2019 (57,5 millions d’euros) est très supérieur à celui observé en 2015 (36,2 millions d’euros), en 2016 (26,47 millions d’euros) et en 2017 (38,9 millions d’euros) mais est inférieur à celui constaté en 2018 (87,9 millions d’euros) en raison de difficultés de gestion des fonds européens relevées par la Cour des comptes.

2015-2019, évolution des montants des fonds de concours exécutés de la mission Immigration, asile et intégration

(en millions d’euros)

Source : commission des finances (d’après les rapports annuels de performance)

Dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire, la Cour observe ainsi qu’à la suite d’erreurs supposées (relevées par la Commission interministérielle de coordination des contrôles), la Commission européenne a interrompu ses versements en juin 2019 ce qui a privé la DGEF « de 117 M€ attendus en 2019 au titre des comptes 2018, entraînant des difficultés importantes de trésorerie pour les opérateurs publics et privés ». Dans un premier temps, le ministère de lintérieur a dû élaborer un plan de trésorerie pour payer en priorité les opérateurs les plus fragiles. Dans un second temps, et afin de permettre la reprise (début 2020) des versements européens, il a soldé ce litige en renonçant à 48,4 millions deuros de versements contestés et a établi un plan d’action destiné à améliorer le système de gestion des fonds européens ( [20]).

Si les modalités de traitement de cette situation ne sont pas encore déterminées, les rapporteurs sont préoccupés par les difficultés rencontrées en 2019. Ils soulignent que le montant des fonds européens auxquels le ministère de lintérieur a dû renoncer (48,4 millions deuros) représente les deux tiers du budget de lOFPRA exécuté en 2019 (70 millions deuros). Ils observent également que la gestion des fonds européens par la DGEF suscitait déjà les récriminations récurrentes des associations en raison de la lourdeur des procédures d’attribution et de contrôle et que cette difficulté supplémentaire risque de tendre les relations entre l’État et ces opérateurs.

Les rapporteurs soutiennent donc pleinement la recommandation de la Cour des comptes visant à intégrer dans le rapport annuel de performance 2020 et le projet annuel de performance 2021 une présentation détaillée des modalités de prise en charge de la correction de 48,4 millions deuros acceptée par l’État ainsi que des mesures adoptées pour prévenir la répétition de cette situation fâcheuse.

La résolution de ces difficultés est nécessaire dans un contexte marqué par les perspectives daccroissement des fonds européens dédiés aux questions migratoires dans le prochain cadre financier pluriannuel européen pour la période 2021-2027.

2.   L’absence regrettable d’information sur les pertes financières nées de la réforme mal maîtrisée de la taxe employeur

Les articles L. 311-15 et D. 311-18-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) définissent la nature, le montant et les conditions de recouvrement de la « taxe employeur », une taxe due par les employeurs de main-d’œuvre étrangère permanente, temporaire ou saisonnière.

L’article L. 311-15 dispose que « tout employeur qui embauche un travailleur étranger ou qui accueille un salarié détaché temporairement par une entreprise non établie en France […] acquitte, lors de la première entrée en France de cet étranger ou lors de sa première admission au séjour en qualité de salarié, une taxe ». Le montant de cette taxe, fixé par l’article D. 311-18-2, varie selon la durée du contrat ([21]) entre 50 € par mois d’activité et 55 % du salaire versé dans la limite de 2,5 fois le salaire minimum de croissance. Des cas d’exonération sont prévus au bénéfice de certains étrangers (par exemple les citoyens de l’Union européenne) et employeurs (par exemple les organismes de recherche publique). Le produit de cette taxe s’établit entre 25 et 35 millions d’euros par année.

Entre 2017 et 2018, cette taxe a fait lobjet dune réforme mal maîtrisée dont les conséquences financières exactes ne sont toujours pas connues.

L’article 36 de la loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 a affecté le produit de cette contribution au budget de l’État (et non plus à celui de l’OFII) mais a laissé à cet opérateur le soin de constater, de liquider et de recouvrer cette taxe. Cependant, ce texte a omis d’habiliter l’OFII à percevoir cette contribution pour le compte de l’État. Ce point a été corrigé par l’article 89 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017. Cependant, en raison de cette erreur, la taxe employeur na pas été collectée de janvier 2017 à juin 2018.

 

Dans un rapport (non rendu public) sur la gestion de l’OFII (exercices 2011-2018), la Cour des comptes déplore ainsi l’absence de collecte de cette taxe sur cette période « faute de base juridique et de dispositif de gestion. De fait, alors que les comptes 2016 comportaient 32 876 727 € de taxe employeur (titres de paiement pris en charge et effectivement recouvrés […]), aucun des titres de paiement émis manuellement entre le 1er janvier 2017 et le mois de juin 2018 (avec la publication de la convention de mandat) n’a pu être pris en charge, donc rendu exécutoire et donner lieu aux démarches de recouvrement » ([22]). Depuis, l’OFII a mis en place une équipe dédiée au recouvrement de la taxe employeur qui aurait dû être collectée de janvier 2017 à juin 2018. « Ce sont ainsi 40 159 titres qui ont été mis en attente pour un montant de 37,54 M€, dont 17 241 ont pu faire l’objet d’une saisie manuelle et d’une prise en charge comptable au 1er juin 2019 pour un montant recouvré estimé à 19,41 M€ ». Cependant, la Cour considère qu’il est « improbable que le produit non recouvré en 2017 le soit totalement en 2018, ne serait-ce qu’à cause des défaillances d’entreprises intervenues dans l’intervalle ».

De manière inhabituelle, la Cour note que « les parlementaires ont été induits en erreur quant à la portée de cette décision présentée comme anodine et contribuant à une « simplification », alors que la situation ainsi créée apparaît à l’opposé plus complexe, plus coûteuse et risque de se traduire par un manque à gagner substantiel pour l’État »

Dans ce même rapport délibéré en juin 2019, la Cour des comptes recommande que le rapport annuel de performance du programme 104 comporte un « bilan complet de la budgétisation des taxes prévues par le CESEDA. Ce bilan ne figure toutefois pas dans le rapport annuel de performance mais le ministre de l’intérieur a fait savoir, dans une correspondance du 19 mai 2020, que « le bilan souhaité devrait être finalisé en 2020 ».

Les rapporteurs reviendront sur ce sujet dans leur rapport sur le prochain projet de loi de finances afin de rendre compte du bilan de cette réforme mal maîtrisée. Dans le prolongement du rapport de Mme Stella Dupont sur la taxation des titres de séjour, ils s’interrogent également sur « l’intérêt de conserver l’intervention de l’OFII dans le processus de perception d’une taxe dont cet opérateur ne perçoit plus le produit » ([23]).


   SECONDE PARTIE : LINCIDENCE ATTENDUE DE LA CRISE SANITAIRE SUR LA MOBILISATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES ET LE DÉPLOIEMENT DES POLITIQUES PUBLIQUES RELEVANT DE LA MISSION IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

Le taux de consommation des crédits au 31 mars 2020 et l’analyse prospective des dépenses donnent une première idée de l’incidence attendue de la crise sanitaire sur la mobilisation des crédits budgétaires et le déploiement des politiques publiques relevant de la mission Immigration, asile et intégration pour l’année 2020.

I.   Le taux de consommation des crédits au 31 mars 2020

L’établissement de la consommation des crédits au 31 mars 2020 permet de disposer d’une photographie financière au début de la crise sanitaire. La détermination de ce « point de départ » est utile pour apprécier l’incidence de cette crise sur l’exécution budgétaire.

Au 31 mars 2020, le taux de consommation des crédits de paiement de la mission Immigration, asile et intégration s’établit à 19,31 %, en progression de deux points par rapport à 2019 (17,17 %). La dépense observée (355,69 millions d’euros) est supérieure d’environ 50 millions d’euros à celle relevée le 31 mars 2019.

TAUX DE CONSOMMATION DES CRÉDITS de la mission au 31 MARS 2020

 

LF 2019

LF 2020

En millions d’euros

En % des crédits LFI

En millions d’euros

En % des crédits LFI

Programme 104 - Intégration et accès à la nationalité française

79

18,29 %

76,66

17,73 %

Programme 303 - Immigration et asile

221,34

16,80 %

279,03

19,8 %

Total

300,34

17,17 %

355,69

19,31 %

Source : commission des finances (d’après Chorus).

Le taux de consommation observé ne résulte pas de la crise sanitaire mais tient notamment aux dépenses intervenues plus tôt que l’an passé en faveur des structures d’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile (29,7 millions d’euros au 31 mars 2020 contre 3,66 millions d’euros au 31 mars 2019). Cette situation concerne notamment les régions Centre-Val-de-Loire et Grand-Est engagées dans une démarche de conventionnement pluriannuel des structures d’hébergement d’urgence. Les dépenses d’éloignement et de travaux dans les CRA ont également été importantes durant le premier trimestre.

II.   L’impact de la crise sanitaire sur le déploiement des politiques publiques et la mobilisation des crédits budgétaires

La crise sanitaire est susceptible de conduire à une hausse des dépenses de la mission Immigration, asile et intégration estimée à 168 millions deuros par le ministère de lintérieur, soit un accroissement de 9,27 % par rapport aux crédits de paiement ouverts par la loi de finances pour 2020. Ce surcroît de dépense serait partagé entre les programmes 104 (11 millions d’euros) et 303 (157 millions d’euros) et s’inscrit dans un contexte marqué par le nombre élevé de dispositions intéressant les politiques migratoires prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.

A.   Les mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire intéressant les politiques migratoires

L’état d’urgence sanitaire a été déclaré le 24 mars 2020 pour une durée de deux mois par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 puis prolongé jusqu’au 10 juillet 2020 inclus par l’article 1er de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Depuis la déclaration de létat durgence sanitaire, de nombreuses dispositions ayant une incidence sur la mission Immigration, asile et intégration ont été prises. Ces mesures intéressent la circulation des étrangers, la durée des titres de séjour, les demandes d’asile et les possibilités de travail ouvertes aux étrangers non communautaires.

1.   La circulation des étrangers

La circulation des étrangers a été fortement restreinte au niveau européen et national dans le but de réduire les risques de propagation de lépidémie.

Au niveau communautaire, la Commission européenne a adopté le 16 mars 2020 une communication au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil préconisant une restriction temporaire des déplacements non essentiels vers l’Union européenne (UE). Sur cette base, le 17 mars 2020, le Conseil européen a décidé de limiter les déplacements non essentiels à destination de l’Union pour une période de 30 jours. Ces mesures ont été prolongées depuis jusqu’au 15 juin 2020 ([24]).

 

Au niveau national, les contrôles aux frontières extérieures et intérieures ont été renforcés par l’instruction n° 6149/SG du Premier ministre du 18 mars 2020. Dans le cadre de cette instruction, des refus d’entrée sur le territoire sont prononcés à l’encontre de « tous les ressortissants étrangers de pays non-membres de l’Union européenne, de l’espace Schengen ou du Royaume-Uni, qui n’ont pas de raison impérative de se rendre en Europe et en France ». En revanche, les citoyens européens, les ressortissants britanniques, islandais, liechtensteinois, norvégiens, andorrans, monégasques, suisses, du Saint Siège et de San Marin qui résident en France ou qui transitent par la France sont admis à entrer sur le territoire « dans la mesure où cela reste compatible avec la protection de la santé publique » et sur présentation d’une attestation dérogatoire de déplacement international ([25]).

Ce cadre a été prolongé une première fois par une instruction du 15 avril 2020 ([26]) puis prolongé une deuxième fois et adapté par une instruction du 12 mai 2020 ([27]) avant qu’une troisième instruction ne précise les règles applicables aux travailleurs saisonniers agricoles et aux travailleurs détachés étrangers ([28]). L’instruction du 12 mai 2020 indique qu’en application de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 précitée, et dès que le cadre réglementaire d’application de cette loi sera en vigueur, des personnes admises sur le territoire national après avoir séjourné dans une région pouvant être considérée comme une zone de circulation de l’infection pourront faire l’objet d’une mesure de quatorzaine dans les conditions prévues aux articles L.3131-15 et L. 3131-17 du code de la santé publique.

Les étrangers, et notamment les demandeurs d’asile, sont concernés au premier chef par ces dispositions. Par ailleurs, pour les personnes en provenance de pays de l’espace européen, « il n’y aura pas d’exigence de quatorzaine pour accéder au territoire français. Toutefois, pour les voyageurs en provenance de pays européens dont les autorités auraient décidé, de façon non-coordonnée, d’appliquer une mesure de quatorzaine aux voyageurs entrant sur leur territoire depuis des pays européens, une quatorzaine volontaire sera demandée, par réciprocité. » Ces cas de figure sont susceptibles de concerner l’Espagne et le Royaume-Uni ([29]).

 

 

Le 28 mai 2020, le Premier ministre a indiqué que la France était favorable à une prochaine levée des restrictions intéressant les déplacements internes à l’Union. Cependant, « nous appliquerons la réciprocité si jamais certains pays imposaient des quatorzaines aux Français ». Concernant les frontières extérieures de l’Union, « la décision sera prise collectivement avec l’ensemble des pays européens, à l’horizon du 15 juin »

2.   La durée de validité des titres de séjour

La durée de validité de différents documents autorisant le séjour des étrangers non communautaires en France a été prolongée à plusieurs reprises sur la base d’ordonnances prises sur le fondement de la loi précitée du 23 mars 2020.

S’agissant des documents expirant entre le 16 mars et le 15 mai 2020, lordonnance n° 2020-328 du 25 mars 2020 a prolongé de 90 jours la durée de validité des visas de long séjour, des titres de séjour (à l’exception de ceux délivrés au personnel diplomatique et consulaire étranger), des autorisations provisoires de séjour, des récépissés de demande de titre de séjour et des attestations de demande d’asile.

Lordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de covid-19 a porté cette durée à 180 jours pour les visas de long séjour, les titres de séjour (à l’exception de ceux délivrés au personnel diplomatique et consulaire étranger), les autorisations provisoires de séjour et les récépissés de demandes de titres de séjour. En revanche, la durée de prolongation de la validité des attestations de demande d’asile est restée fixée à 90 jours. Le rapport au Président de le République présentant cette ordonnance justifie cette différence de traitement par le fait que « la réouverture des guichets uniques de demande d’asile [sera] pleinement effective dès le mois de mai » ([30]). L’argument avancé pour justifier cette différence de traitement suscite la circonspection des rapporteurs au regard notamment des flux importants d’usagers attendus par les préfectures.

S’agissant des documents expirant entre le 16 mai et le 15 juin 2020, l’article 1er quater B du projet de loi relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne (adopté par l’Assemblée nationale le 15 mai 2020, adopté avec modifications par le Sénat le 28 mai 2020 et dont la fin de l’examen parlementaire est proche) prévoit de prolonger de 180 jours la durée de validité des visas de long séjour, des titres de séjour (à l’exception de ceux délivrés au personnel diplomatique et consulaire étranger), des autorisations provisoires de séjour, des récépissés de demande de titre de séjour et de 90 jours celle des attestations de demande d’asile. Initialement, le projet de loi prévoyait que cette prolongation soit décidée par ordonnance et que sa durée se fasse « dans la limite de 180 jours ».

L’Assemblée nationale a cependant adopté des amendements identiques des rapporteurs supprimant le recours à cette ordonnance et a voté un amendement du Gouvernement retenant les durées précitées ([31]).

Sur ce sujet, les rapporteurs notent avec satisfaction que « pour rattraper le retard accumulé pendant la période de confinement [...] les services des étrangers des préfectures devraient bénéficier d'un renfort humain de 200 équivalents temps plein (ETP), soit 2 400 « mois vacataires » ([32]).

3.   Les délais administratifs et les procédures juridictionnelles

Plusieurs ordonnances prises sur la base d’habilitations figurant dans la loi du 23 mars 2020 précitée ont modifié les délais administratifs et les procédures juridictionnelles intéressant les étrangers.

a.   Les délais administratifs

Lordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période a prorogé différents « délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire ». Tout acte concerné « sera réputé avoir été fait à temps s’il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois ». Cette mesure concerne la plupart des délais applicables aux étrangers et figurant, pour l’essentiel, dans le CESEDA. L’ensemble des délais applicables aux étrangers ne sont cependant pas concernés. Le 2° du II de l’article 1er de l’ordonnance exclut ainsi les « délais concernant l’édiction et la mise en œuvre de mesures privatives de liberté » (décision de placement et de prolongation de placement en rétention) du périmètre de cette disposition.

L’ordonnance  2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d’urgence sanitaire a arrêté au 23 juin 2020 la date d’achèvement de la « période juridiquement protégée » ouverte par l’ordonnance n° 2020-306 et qui courait initialement jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. L’état d’urgence sanitaire ayant été prolongé jusqu’au 10 juillet 2020, et l’activité reprenant progressivement depuis le début du déconfinement intervenu le 11 mai 2020, il était nécessaire de décorréler la fin de cette « période juridiquement protégée » de la fin de l’état d’urgence sanitaire.

b.   Les procédures juridictionnelles

Lordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif prévoit que, par dérogation à l’ordonnance n° 2020-306 précitée, les délais de recours contre les obligations de quitter le territoire français (OQTF) font l’objet d’une prorogation réduite et que les délais de recours existant, notamment, en matière de rétention, de refus d’entrée et de transfert vers l’État responsable de la demande d’asile ne font l’objet d’aucun allongement. Saisi sur ce dernier point, le Conseil d’État a rejeté, en référé, une demande de suspension de ces dispositions, en considérant qu’aucune atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales n’était établie ([33]).

Lordonnance 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19 a précisé et complété certains aspects de l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 concernant le régime contentieux des actes associés aux OQTF et au placement en rétention des personnes concernées par un arrêté de transfert Dublin ([34]).

L’ordonnance n° 2020-558 du 13 mai 2020 modifiant l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 a apporté deux compléments intéressant, d’une part, certains délais de recours et, d’autre part, les modalités de jugement au sein de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). S’agissant des délais de recours, ce texte fixe au 24 mai 2020, et non plus au lendemain de la fin de l’état d’urgence sanitaire, le point de départ de différents délais de recours. Comme cela a été le cas en matière de délais administratifs, la fin de la période de transition est décorrélée de la fin de l’état d’urgence sanitaire. S’agissant des règles applicables à la tenue des audiences au sein de la CNDA, cette ordonnance élargit le recours au juge unique ([35]). Ces différentes dispositions seront applicables jusqu’à la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Sur ce point, les rapporteurs sont attachés à ce que le recours accru au juge unique se fasse sur la période la plus brève possible afin de permettre aux requérants de disposer de nouveau dans les meilleurs délais des garanties offertes par la procédure collégiale.

4.   L’allocation pour demandeurs d’asile

L’article 1er quater C du projet de loi, en cours de discussion, relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne prévoit de prolonger le versement de l’allocation pour demandeurs d’asile pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire au bénéfice des demandeurs d’asile qui auraient dû cesser de la percevoir à compter du mois de mars 2020.

L’interruption du bénéfice de cette allocation interviendrait le 31 mai 2020 pour les demandeurs d’asile déboutés et le 30 juin 2020 pour les personnes qui se sont vues reconnaître la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire. Durant cette période, l’OFII conserverait cependant la possibilité de mettre fin à ce versement dans les conditions prévues aux articles L. 744-7 et L 744-8 du CESEDA, par exemple en cas de refus d’un lieu d’hébergement proposé ou de comportement violent dans un centre d’hébergement. Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, le nombre de ménages allocataires concernés par cette mesure devrait être inférieur à 8 000.

Initialement, le projet de loi prévoyait que cette disposition fasse l’objet d’une ordonnance. Cependant, l’Assemblée nationale a adopté un amendement d’un des deux rapporteurs supprimant le recours à cette ordonnance et un amendement du Gouvernement insérant ces dispositions dans le texte en discussion ([36]).

Les rapporteurs approuvent la prolongation de lADA en cours de discussion mais observent que cette mesure est moins favorable que celle relative à la prolongation du versement des minima sociaux prévue par l’article 11 de la loi du 23 mars 2020 précitée. Ainsi, si les minima sociaux ont été prolongés jusqu’au mois suivant la fin de l’état d’urgence sanitaire (soit, en l’état actuel, jusqu’en août 2020), l’allocation pour demandeurs d’asile devrait s’interrompre (si le projet de loi est adopté en l’état) le 31 mai 2020 ou le 30 juin 2020, soit avant le terme de l’état d’urgence sanitaire actuellement fixé au 10 juillet 2020 inclus.

5.   Les possibilités de travail saisonnier ouvertes aux étrangers

Le contexte sanitaire a perturbé la venue en France de nombreux travailleurs saisonniers étrangers (communautaires et non communautaires), notamment dans le secteur agricole, ce qui a été (et demeure) préjudiciable en cette période de récolte. Pour répondre à cette situation, le Gouvernement a présenté le 24 mars 2020 des mesures permettant de « renforcer la force de travail de la chaîne agricole et agroalimentaire » ([37]). En complément, deux modifications visant à assouplir les conditions demploi des saisonniers et des étudiants étrangers font lobjet des articles 1er bis et 1er ter du projet de loi précité relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Dans sa rédaction adoptée par lAssemblée nationale le 15 mai 2020, larticle 1er bis prévoit que « jusquà la date de reprise effective des cours dans les universités et les établissements denseignement supérieur, létranger présent en France à la date du 16 mars 2020 et titulaire de la carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant » prévue à larticle L. 313-7 du code de lentrée et du séjour des étrangers et du droit dasile est autorisé, de manière dérogatoire, à exercer une activité professionnelle salariée dans la limite de 80 % de la durée de travail annuelle. » En lespèce, cette mesure  consécutive à ladoption de deux amendements identiques déposés par les rapporteurs ([38]) vise à relever de 60 à 80 % de la durée de travail annuelle le contingent dheures de travail quun étudiant étranger répondant aux conditions précitées peut effectuer. Cette disposition doit permettre aux intéressés de disposer dun revenu dappoint et de répondre à la pénurie de main-dœuvre observée dans le secteur agricole.

Dans sa rédaction adoptée par l’Assemblée nationale le 15 mai 2020, l’article 1er ter prévoit que durant la période détat durgence sanitaire, et dans les six mois à compter de son terme, létranger présent en France à la date du 16 mars 2020 et titulaire de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention « travailleur saisonnier », est autorisé, de manière dérogatoire, à séjourner et à travailler en France pendant une durée cumulée de neuf mois par an, soit une durée supérieure à la durée de six mois posée par larticle L. 313-23 du CESEDA. Là encore, il sagit de favoriser lemploi des étrangers répondant aux conditions précitées et de répondre à la pénurie de main-dœuvre observée dans le secteur agricole. Cette disposition devait initialement faire lobjet dune ordonnance mais, à linitiative des rapporteurs, cette mesure a été intégrée au projet de loi ([39]).

Les rapporteurs se félicitent de ces aménagements et notent que le Sénat en a approuvé le principe. En revanche, ils regrettent que leurs amendements visant à favoriser lemploi des demandeurs dasile (en raccourcissant le délai de deux mois laissé à l’autorité administrative pour se prononcer sur une demande d'autorisation de travail) naient pas été adoptés par lAssemblée nationale ([40]).

En définitive, de nombreuses mesures prises durant la période détat durgence sanitaire ont adapté le droit applicable aux étrangers. Les rapporteurs approuvent les différentes mesures prises qui ont su adapter utilement la situation des intéressés au contexte sanitaire. Ils soulignent cependant que le public auquel elles s’adressent est un public souvent fragile et peu au fait des évolutions juridiques. La fermeture temporaire puis la reprise d’activité progressive des administrations, la suspension ou le ralentissement des activités de nombreuses associations, les difficultés d’accès aux technologies numériques et l’interruption des activités dans des secteurs employant de nombreux travailleurs étrangers, ont pénalisé ces populations. La mise en œuvre des dispositions récemment adoptées devra se faire avec discernement.

B.   L’évolution attendue des politiques publiques et des dépenses relevant du programme 104 Intégration et accès à la nationalité française

La crise sanitaire a pesé et pèsera sur l’exécution des politiques publiques relevant des programmes 104 et 303.

1.   Des politiques publiques à l’arrêt ou très ralenties puis reprises progressivement

Les crédits ouverts en 2020 au titre du programme 104 s’établissent à 431,35 millions d’euros en CP et 431,41 millions d’euros en AE et se répartissent comme suit :

Ventilation des crédits du programme 104 par actions

(en millions d’euros)

 

LFI pour 2020

AE

CP

104 Intégration et accès à la nationalité française

 

 

11 Accueil des étrangers primo-arrivants

255,44

255,44

12 Accompagnement des étrangers en situation régulière

52,22

52,22

14 Accès à la nationalité française

0,99

1,04

15 Accompagnement des réfugiés

113,58

113,58

16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

8,13

8,13

Les politiques correspondantes ont été à l’arrêt ou très ralenties durant la période de confinement (17 mars – 10 mai 2020) et reprennent progressivement depuis le début du déconfinement.

                 Durant la période de confinement, les actions de lOFII relevant du programme 104 ont été suspendues ou se sont poursuivies sur un rythme ralenti en dépit des adaptations mises en œuvre par cet établissement. Les visites médicales, les rendez-vous relevant de la procédure « étrangers malades » et les retours volontaires ont été suspendus. Les demandes de regroupement familial ont continué à être reçues mais n’ont connu qu’un traitement partiel en raison de l’arrêt des enquêtes et des visites sociales associées. Les formations linguistiques et civiques liées au contrat d’intégration républicaine (CIR) ont été arrêtées dès lors qu’elles nécessitaient la présence des participants. En revanche, des auditeurs de l’OFII ont réalisé les bilans de fin de CIR par téléphone et des prestataires ont déployé un enseignement linguistique à distance en proposant des supports pédagogiques numériques. Le Mooc « Vivre et accéder à l’emploi en France », produit par la direction de l’accueil, de l’accompagnement des étrangers et de la nationalité du ministère de l’intérieur, a été promu par l’OFII et diffusé par France université numérique ([41]).

Une reprise progressive de ces activités intervient depuis le début du déconfinement (les retours volontaires ont par exemple repris le 2 juin 2020 en direction de l’Arménie).

Les rapporteurs soulignent par ailleurs que le personnel médical de lOFII a été concerné au premier plan par la crise sanitaire. Le directeur général de cet opérateur a indiqué que ce personnel a été réquisitionné et mis à disposition des établissements hospitaliers. L’OFII s’est également attaché à promouvoir le respect des gestes barrières dans les lieux d’hébergement et a relayé sur ses réseaux sociaux des animations en une quinzaine de langues présentant les précautions sanitaires à respecter.

                      La plupart des autres actions relevant du programme 104 ont été également arrêtées durant la période de confinement. L’opération « Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants » (menée conjointement avec l’Éducation nationale) a ainsi été suspendue tout comme les actions d’intégration professionnelle conduites à destination des réfugiés ou les chantiers de rénovation des foyers de travailleurs migrants. Le fonctionnement des CPH (financé à hauteur d’un peu plus de 80 millions d’euros) a été également impacté par la crise sanitaire. Le flux d’entrées et de sorties dans ces structures s’est quasiment tari et plusieurs actions d’accompagnement – notamment professionnelles – conduites par ces structures ont été suspendues. Le groupe SOS a ainsi souligné que « jusqu’à 80 % des résidents de certains centres qui étaient en activité ne travaillent plus à cause du COVID 19. Tous ceux en projet (de ou en formation, en recherche d’emploi) sont en stand by, faute d’interlocuteur ». Si la fonction première des Centres provisoires d’hébergement (l’hébergement de réfugiés présentant des vulnérabilités particulières) a pu se poursuivre dans ses grandes lignes, leurs autres activités ont subi le contrecoup de la crise sanitaire.

En ce domaine également, une reprise très progressive des activités est observée depuis le début du déconfinement.

2.   Un surcroît de dépenses estimé à 11 millions d’euros

D’un point de vue budgétaire, les dépenses relevant du programme 104 devraient être légèrement supérieures aux prévisions pour un montant estimé à 11 millions deuros par le ministère de lintérieur, ce qui porterait le montant des CP de ce programme de 431,41 millions d’euros à 442,41 millions d’euros.

Cette surconsommation peut surprendre dans la mesure où les activités de ce programme ont été à l’arrêt ou très ralenties durant plusieurs semaines et que certaines dépenses seront en retrait par rapport aux prévisions initiales. Dans les territoires, des prestations relatives à l’intégration financées par les préfectures ne seront pas réalisées. L’OFII versera moins d’aides au retour volontaire que prévu et ses dépenses d’interprétariat seront réduites.

 

Néanmoins, d’autres dépenses supplémentaires ont été engagées. L’OFII a dû acquérir des consommables (gantes, gel hydro-alcoolique, etc.) et du matériel (cloisonnement en plexiglas) pour la protection des agents et du public. Faute de train, les demandeurs d’asile orientés vers des lieux d’hébergement ont été conduits par des moyens de transport alternatifs (minibus, etc.). Les dépenses supplémentaires ainsi engagées compenseront les économies réalisées et le budget prévisionnel de l’OFII en 2020 (258,93 millions d’euros) ne devrait pas être modifié.

Le programme 104 sera par ailleurs sollicité - avec le programme 303 - pour participer au financement des places dhébergement créées durant létat durgence sanitaire dans le cadre des mises à labri effectuées en faveur des populations les plus fragiles, dont les demandeurs dasile ne disposant pas dune solution dhébergement. Dans un premier temps, le coût de ces places a été entièrement supporté par le programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables de la mission Cohésion des territoires. Les programmes 104 et 303 prendront prochainement en charge une partie de ce coût.

Si aucune disposition en ce sens a figuré dans les deux premières lois de finances rectificatives promulguées en mars et avril 2020 ([42]), il est probable qu’un prochain mouvement budgétaire soit organisé en ce sens.


C.   L’évolution attendue des politiques publiques et des dépenses relevant du programme 303 Immigration et asile

1.   Des politiques publiques diversement touchées par la crise sanitaire

Les crédits ouverts en 2020 au titre du programme 303 s’établissent à 1 380,93 millions d’euros en CP et à 1 496,46 millions d’euros en AE et se répartissent comme suit :

Ventilation des crÉdits du programme 303 par actions

(en millions d’euros)

 

PLF pour 2020

AE

CP

303 Immigration et asile

 

 

1 Circulation des étrangers et politique des visas

0,52

0,52

2 Garantie de l’exercice du droit d’asile

1 377,09

1 251,82

3 Lutte contre l’immigration irrégulière

113,14

122,88

4 Soutien

5,70

5,70

La crise sanitaire a fortement affecté la mise en œuvre des différentes actions relevant du programme 303 à lexception du versement de lallocation pour demandeurs dasile dont le versement sest poursuivi normalement (en mars, près de 43 millions d’euros ont été distribués au titre de cette allocation pour un montant moyen de 360 euros par bénéficiaire). L’ADA fait cependant figure d’exception puisque, durant la crise sanitaire, la chaîne de lasile a été interrompue avant de reprendre progressivement, le dispositif national daccueil a poursuivi son activité de manière adaptée et le fonctionnement des CRA et les procédures déloignement ont été restreints.

a.   La chaîne de l’asile a été quasiment à l’arrêt de la mi-mars au mois de mai puis a repris progressivement

Les différentes étapes de l’asile (enregistrement, instruction, contentieux) ont été affectées par la crise sanitaire.

                 Lenregistrement classique des demandes dasile a cessé progressivement à la mi-mars 2020 avant de reprendre progressivement début mai sur injonction de la justice administrative en île de France et dans le cadre de la reprise générale de lactivité dans les autres territoires.

Dans un premier temps, la fermeture des structures associatives de pré-accueil, des guichets uniques pour demandeurs d’asile (GUDA) et, en île de France, de la plateforme téléphonique de l’OFII organisant les rendez-vous ont conduit à l’interruption de l’enregistrement de la demande d’asile.

Le Conseil d’État a rejeté le 9 avril 2020 une demande de mise en œuvre d’une procédure dématérialisée d’enregistrement des demandes d’asile au motif que les autorités assuraient toujours l’enregistrement des demandes « relevant d’une urgence particulière » ([43]). Interrogé par les rapporteurs, le ministère de l’intérieur a indiqué que, du 16 mars au 30 avril 2020, 1 244 demandes d’asile ont été enregistrées en GUDA.

La situation a évolué en île de France à la suite d’autres contentieux. Le 22 avril 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a « enjoint au préfet de police et aux préfets des départements de la région Île-de-France de rétablir dans un délai de cinq jours le dispositif d’enregistrement des demandes d’asile » ([44]). Cette décision a été confirmée par le Conseil d’État le 30 avril 2020 ([45]) en faveur, prioritairement, des « personnes présentant une vulnérabilité particulière ». Depuis, l’enregistrement des demandes d’asile en île de France a repris sur la base de cinquante à cent rendez-vous octroyés chaque jour par l’OFII, soit un volume très inférieur aux volumes habituels ([46]). Dans les autres régions métropolitaines, l’enregistrement des demandes d’asile a repris de manière progressive et partielle depuis le 11 mai 2020 mais ne retrouvera pas son cours normal à brève échéance. Dans ce cadre, le respect de l’article L. 741-1 du CESEDA imposant à l’administration un délai maximal de dix jours pour procéder à l’enregistrement d’une demande d’asile est très hypothétique.

Par ailleurs, si les opérations de réinstallation conduites en partenariat avec le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés et l’Organisation internationale pour les migrations ont été suspendues en mars et n’ont, semble-t-il, pas encore repris, les procédures européennes de relocalisation de migrants seront progressivement relancées. Le 26 mai 2020, la France a ainsi indiqué qu’elle accueillerait 400 demandeurs d'asile et 350 mineurs non accompagnés actuellement situés en Grèce. D’autres pays européens (Allemagne, Belgique, Bulgarie, Finlande, etc.) accueilleront d’autres mineurs non accompagnés dans le cadre de cette démarche européenne volontaire de relocalisation.

En définitive, pour l’heure, le nombre de demandes d’asile enregistrées à l’OFPRA au 30 avril 2020 s’établit à 28 051 premières demandes, mineurs inclus, (soit 30 717 demandes d’asile, toutes demandes confondues), en retrait de 31 % par rapport à la même période de 2019 (cf. supra).

 

                 L’instruction des demandes dasile par l’OFPRA a été et demeure perturbée. L’entrée en fonction de nouveaux personnels, recrutés en 2020 a été reportée. Les entretiens physiques ont été suspendus mi-mars et ne reprendront que fin mai. L’instruction des dossiers s’est poursuivie par voie postale mais un important retard a été pris dans la numérisation des demandes et la notification des décisions. Au final, le ministère de l’intérieur estime qu’en 2020, l’OFPRA devrait rendre 30 000 décisions de moins que prévu (soit 130 000 au lieu de 160 000).

                 La Cour nationale du droit dasile ([47]), chargée des recours formés contre les décisions de l’OFPRA, a suspendu ses audiences du 13 mars au 27 mai 2020 et a reporté l’entrée en fonction de nouveaux personnels. La Cour a cependant continué d’enregistrer les recours et les demandes d’aide juridictionnelle. Depuis le 11 mai 2020, certaines activités ont repris progressivement (les décisions de désignation à l’aide juridictionnelle sont par exemple de nouveau notifiées) et les modalités de jugement ont été adaptées par l’ordonnance n° 2020-558 du 13 mai 2020 (cf. infra). La crise sanitaire, ajoutée aux effets de la grève des avocats observée durant le premier trimestre 2020, réduira fortement le nombre de décisions rendues par la CNDA en 2020.

b.   Le dispositif national d’accueil a poursuivi et adapté son activité

En février 2020, le dispositif national d’accueil (DNA) des demandeurs d’asile comprenait entre 80 000 et 100 000 places selon les critères retenus et hébergeait la moitié des demandeurs d’asile (52 %). La crise sanitaire a eu plusieurs effets contraires sur le DNA :

En premier lieu, la fermeture des frontières et la très forte réduction du nombre de demandes d’asile enregistrées ont réduit le nombre de nouvelles demandes d’hébergement. En deuxième lieu, les structures d’hébergement relevant du DNA se sont organisées pour prévenir l’apparition de cas de Covid-19 dans leurs locaux et pour y répondre lorsque ces situations advenaient. Selon l’OFII, au 27 avril 2020, 598 cas avérés ou suspectés de COVID-19 ont été recensés dans le DNA au niveau national et 5 décès ont été recensés. En troisième lieu, plusieurs campements insalubres ont été évacués et les autorités se sont attachées à mettre à l’abri les populations les plus fragiles en les orientant vers le DNA ou vers le parc d’hébergement d’urgence de droit commun dont les capacités ont été accrues de 21 000 places ([48]). Enfin, les sorties du DNA ont été pénalisées par la suspension des dispositifs de captation de logements au profit des réfugiés ce qui compromet le respect de l’objectif de 16 000 logements mis à disposition des réfugiés en 2020.

 

Dans ce contexte tendu, le DNA a poursuivi sa mission. Selon l’OFII, le taux d’occupation des places s’est établi à 96,6 % en mars et à 97,8 % en avril 2020. Au plus fort de la crise sanitaire, entre le 16 et le 31 mars 2020, 1 114 demandeurs d’asile sont entrés dans un hébergement soit un volume représentant la moitié du rythme habituel.

c.   Les centres de rétention et les éloignements : une activité maintenue à un bas niveau suivie d’une reprise progressive

La crise sanitaire a ralenti très fortement, sans l’interrompre, l’activité des centres de rétention administrative (CRA) et les actions d’éloignement des étrangers en situation irrégulière.

Le parc actuel de rétention administrative comprend un peu plus de 1 800 places. Habituellement occupée à un niveau élevé, cette capacité a été utilisée aux environs de 10 % en raison des perspectives réduites d’éloignement, de moindres mesures de placement et de nombreuses décisions de libération prononcées par des juges de la liberté et de la détention. À la date 24 avril 2020, 120 personnes étaient retenues dont une part importante de sortants de prison ([49]).

La fermeture des CRA a été demandée par des associations, par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, par le Défenseur des droits et par le Président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme. Saisi en référé sur ce point, le Conseil d’État a rejeté cette requête le 27 mars 2020 ([50]). Le 8 mai 2020, un amendement en ce sens déposé par Mme Stella Dupont, co-rapporteure, n’a pas été adopté par l’Assemblée nationale ([51]). Cependant, le 15 avril 2020, après la découverte de plusieurs cas de Covid 19 au CRA de Vincennes, le tribunal administratif de Paris a enjoint aux autorités de ne plus placer en rétention des étrangers en situation irrégulière en ce lieu ([52]) mais cette ordonnance a été partiellement annulée le 7 mai 2020 par le Conseil d’État ([53]).

Depuis la mi-mars 2020, peu d’éloignements ont été réalisés. En réponse aux rapporteurs, le ministère de l’intérieur a indiqué que « 74 éloignements forcés ont été réalisés entre le 17 mars et le 22 avril 2020 ». Tous les types d’éloignements n’ont pas pu être exécutés. Les « transferts Dublin » (dédiés à l’éloignement de demandeurs d’asile dont la demande relève d’un autre État membre de l’Union) ont été suspendus et « aucun migrant n’est susceptible de faire l’objet d’une mesure d’éloignement dès lors qu’il déclare qu’il n’a pas été en mesure de déposer sa demande d’asile » ([54]). Enfin, les retours volontaires opérés par l’OFII ont été interrompus.

2.   Un surcroît de dépenses estimé à 157 millions d’euros

Le ministère de l’intérieur a indiqué aux rapporteurs que la crise sanitaire devrait avoir pour effet de majorer de 157 millions d’euros le montant des crédits du programme 303, ce qui porterait le montant de ces CP de 1 380,93 millions d’euros à 1 537,93 millions d’euros. Ce surcroît de dépenses résulterait de dépenses supplémentaires en matière dhébergement des demandeurs dasile (69 millions deuros) et de versement de lADA (88 millions deuros). En revanche, l’OFPRA a indiqué qu’aucune mesure de régulation budgétaire (en plus-value ou en moins-value) ne devrait le concerner directement.

La dépense supplémentaire en matière d’hébergement résulte de la conjonction de plusieurs facteurs. Le ralentissement de l’instruction des demandes d’asile et l’absence de décisions de la CNDA conduiront à prolonger la présence dans le DNA de personnes qui auraient dû en sortir après l’acceptation ou le rejet de leur demande d’asile. Le programme 303 devrait également participer au financement des places ouvertes sur les crédits du programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables de la mission Cohésion des territoires (cf. supra).

La dépense supplémentaire attendue au titre de l’ADA résulte de l’addition de plusieurs éléments parfois contradictoires. La suspension de l’enregistrement des demandes d’asile (hors demandes relevant d’une « urgence particulière ») a réduit le nombre de nouveaux allocataires mais le ralentissement de l’activité de l’OFPRA et de la CNDA a eu pour conséquence de prolonger le versement prolongé de ce revenu à des demandeurs d’asile en attente de décision. Par ailleurs, le projet de loi précité prévoit de prolonger le versement de l’ADA aux personnes qui auraient dû cesser d’en bénéficier en mars 2020 (cf. infra). Le surcroît attendu de dépenses de lADA porterait de 445 à 533 millions deuros le montant des crédits servant au financement de cette allocation, soit un montant supérieur à la dépense observée au titre de cette allocation en 2019 (492,5 millions d’euros).

Les rapporteurs soulignent que lestimation du surcroît de dépenses attendues (157 millions d’euros) nest pas définitive. Ce montant peut encore évoluer notamment si ce programme prend en charge tout ou partie des dépenses sanitaires exceptionnelles financées par les centres d’hébergement. Différentes économies sur le fonctionnement courant des CRA et les frais logistiques liés à l’éloignement des étrangers en situation irrégulière pourraient être constatées. En revanche, les rapporteurs précisent que la mission Immigration, asile et intégration ne devrait pas supporter pas le coût des mises en quarantaine des étrangers (notamment les demandeurs d’asile) appelés à être isolés dans le cadre de l’application de l’article 3 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions. Le ministère de l’intérieur a précisé que le financement de ces mesures sera assuré par l’assurance maladie, « conformément à la finalité sanitaire de ce dispositif ».

Pour l’heure, pour le programme 303 comme pour le programme 104, les deux premières lois de finances rectificatives promulguées en mars et avril 2020 ([55]) n’ont opéré aucun mouvement de crédit mais il est possible qu’un texte ultérieur procède à certaines adaptations.

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   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion de 15 heures, le mercredi 3 juin 2020, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu Mme Stella Dupont et M. Jean-Noël Barrot, rapporteurs spéciaux des crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

 

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de lAssemblée nationale. Le compte-rendu le sera très prochainement.

 

 


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QUESTIONNAIRES TRANSMIS PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

 

 

– Ministère de l’intérieur, direction générale des étrangers en France,

– Office français de l’immigration et de l’intégration,

– Office français de protection des réfugiés et apatrides.

 

 


   SOURCES UTILISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

 

– Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, rapport d’information n° 2041, La taxation des titres de séjour, M. Jean-François Parigi (président), Mme Stella Dupont (rapporteure) ;

– Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2019 de la mission Immigration, asile et intégration ;

– Rapport annuel de performance de la mission Immigration, asile et intégration ;

– Sénat, rapport n° 453 (2019-2020) de Mme Muriel Jourda, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne,

– Sénat, Covid-19 : deuxième rapport d’étape sur la mise en œuvre de l’état d’urgence sanitaire.

 

 

 


([1]) Si, en 2015, 80 075 demandes d’asile ont été enregistrées par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) (premières demandes et réexamens inclus), ce nombre s’est élevé à 85 725 en 2016, 100 755 en 2017, 123 625 en 2018 et 132 614 en 2019.

([2]) Cour des comptes, mission Immigration, asile et intégration, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2019, p. 40.

([3]) Cour des comptes, op. cit, p. 6.

([4]) Le décret de virement n° 2019-1229 du 25 novembre 2019 a annulé 8,1 millions d’euros en AE et en CP du programme 104 puis la loi de finances rectificative pour 2019 a annulé 46 millions d’euros supplémentaires de ce même programme.

([5]) Cour des comptes, op. cit, p. 28.

([6]) Cour des comptes, op. cit, p. 6.

([7]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, rapport n° 1990 (annexe 28), MM. Jean-Noël-Barrot et Alexandre Holroyd.

([8]) Le rapport annuel de performance 2019 indique (pp. 44-46) que :

– Les dépenses en Centres d’accueil et d’évaluation des situations (CAES) ont été supérieures aux prévisions (27,5 millions d’euros ouverts, 30,96 millions d’euros exécutés),

– Les dépenses d’hébergement d’urgence (HUDA) ont été supérieures aux prévisions (367,47 millions d’euros ouverts, 390,11 millions d’euros exécutés),

– Les dépenses en Centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) ont été inférieures aux prévisions (309,16 millions d’euros ouverts et 301,48 millions d’euros exécutés) en raison de l’ouverture plus progressive que prévu des nouvelles places créées. Les crédits correspondants n’ont cependant pas été « perdus » puisqu’ils ont été redéployés vers le financement de l'hébergement d'urgence.

([9]) Cour des comptes, op. cit, pp. 6.et 7.

([10]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, rapport n° 1302 (annexe 14), MM. Jean-Noël-Barrot et Stanislas Guerini.

([11]) Premières demandes d’asile, mineurs accompagnants inclus, réexamens, réouverture dossiers clos.

([12]) Cour des comptes, op. cit, p. 4l.

([13]) Sur la période 2015 – 2019, les rapporteurs ont appliqué rétrospectivement une hypothèse d'évolution de la demande d'asile reposant sur la moyenne des trois derniers exercices constatés. Sur les 5 derniers exercices, l’emploi de cette « moyenne triennale constatée » est moins fiable (à 3 reprises) que l’hypothèse retenue en loi de finances initiale.

([14]) Rapport annuel de performances 2019 de la mission Immigration, asile et intégration, p. 48.

([15]) Cour des comptes, op. cit, p. 68.

([16]) Réponse de l’OFII à un questionnaire des rapporteurs.

([17]) Cour des comptes, op. cit, pp. 7 et 62.

([18]) Ce Comité a notamment profondément rénové le contenu du contrat d’intégration républicaine conclu entre l’État et tout étranger non européen admis au séjour en France et souhaitant s’y installer durablement. Il a ainsi été décidé de doubler la durée de la formation civique obligatoire (pour la porter à 24 heures réparties sur 4 jours), de relever le volume des formations linguistiques facultatives (pour les porter à 100, 200 et 400 heures ou 600 heures pour les étrangers ne sachant ni lire ni écrire) et d’introduire un volet à visée professionnelle.

([19]) Concernant le périmètre : en 2019, 19,1 millions d’euros ont par exemple été transférés du programme 177 vers le programme 104 au titre de la transformation de places de Centres d’hébergement d’urgence migrants en places de Centres provisoires d’hébergement.  Concernant les modalités de financement : en 2017, le produit des taxes affectées jusqu’alors perçu par l’OFII a été  reversé au budget général et la subvention pour charges de service public versée à cet opérateur a été accrue d’un peu plus de 100 millions d’euros.

([20]) La Cour des comptes décrit ainsi ce plan d’action : « ces mesures se traduisent par : - des actions touchant à l’organisation interne et aux procédures de gestion de ces fonds - La réalisation d’audits supplémentaires » (op. cit., p. 80).

([21]) Le recrutement d’un saisonnier conduit au paiement d’une taxe d’un montant de 50 euros par mois d’activité. Le recrutement d’un étranger sur un contrat à durée déterminée d’une durée supérieure à trois mois et inférieure à douze mois, conduit au paiement d’une taxe comprise entre 50 et 300 euros. Le recrutement d’un étranger pour une durée supérieure ou égale à douze mois, conduit au paiement d’une taxe représentant 55 % du salaire versé dans la limite de 2,5 fois le salaire minimum de croissance.

([22]) Pour cet extrait et les suivants : Cour des comptes, L’Office français de l’immigration et de l’intégration (exercices 2011-2018), observations définitives n° S2009-1676 (document non publié), pp. 33-34.

([23]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, rapport d’information n° 2041, La taxation des titres de séjour, M. Jean-François Parigi (Président), Mme Stella Dupont (rapporteure), p. 36.

([24]) Commission européenne, communication 2020 COM(2020) 222 final de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil concernant la deuxième évaluation de l’application de la restriction temporaire des déplacements non essentiels vers l’UE, p. 3.

([25]) Cette attestation n’est pas requise pour les ressortissants étrangers assurant le transport international de marchandises.

([26]) Instruction du Premier ministre n° 6156/SG du 15 avril 2020 portant prolongation des mesures prises pour lutter contre la diffusion du covid-19 en matière de contrôle aux frontières - métropole et collectivités d’outre-mer.

([27]) Instruction du Premier ministre n° 6167/SG du 12 mai 2020 portant prolongation et adaptation des mesures prises pour lutter contre la diffusion du covid-19 en matière de contrôle aux frontières - métropole et collectivités d’outre-mer. Cette instruction étend également le nombre de cas dans lesquels l’entrée sur le territoire est admise afin d’autoriser notamment la venue de travailleurs saisonniers agricoles d’un pays membre de l’Union munis d’un contrat de travail conclu avec une entreprise établie en France.

([28]) Instruction du Premier ministre n° 6171/SG du 20 mai 2020 relative au contrôle aux frontières et à la situation des travailleurs saisonniers et des travailleurs en détachement..

([29]) Extrait du communiqué de presse du 22 mai 2020 du ministère de l’intérieur.

([30]) Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de covid-19.

([31]) Amendements nos 95 (M. Jean-Noël Barrot) et 514 (Mme Stella Dupont) et amendement du Gouvernement n° 447.

([32]) Sénat, rapport n° 453 (2019-2020) de Mme Muriel Jourda, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, 20 mai 2020, p. 42.

([33]) Conseil d’État, 10 avril 2020, n° 439903, Syndicat des avocats de France et autres.

([34]) Deux points ont été précisés :

-          le régime contentieux des actes associés aux OQTF (délai de départ volontaire, décision fixant le pays de renvoi et interdiction de retour et interdiction de circulation sur le territoire français) a été aligné sur celui des OQTF, c’est-à-dire que le point de départ du délai de recours est fixé au lendemain de la fin de l’état d’urgence sanitaire et non plus un mois après la fin de celui-ci.

-          l’absence d’incidence de l’état d’urgence sanitaire sur les contentieux du placement en rétention des personnes concernées par un arrêté de transfert Dublin a été confirmée.

([35]) Cette modalité de jugement, qui représente habituellement 30 % des dossiers audiencés, deviendra – à titre temporaire - la procédure de droit commun en raison des difficultés de réunion des formations collégiales usuelles. Les affaires présentant une « difficulté sérieuse » pourront cependant toujours être renvoyées en formation collégiale.

([36]) Amendement no 280 de M. Jean-Noël Barrot et amendement n° 446 du Gouvernement.

([37]) Cf. communiqué de presse du 24 mars 2020 des ministres du travail, de l’agriculture et de l’économie et des finances.

([38]) Amendements nos 53 (M. Jean-Noël Barrot) et 517 (Mme Stella Dupont) sous-amendés par l’amendement n° 587 présenté par MM. Lainé, Fuchs et Millienne.

([39]) Adopté en commission, l’amendement n° 156 (Mme Stella Dupont) a supprimé le renvoi à une ordonnance. La rédaction de l’article 1er ter résulte de l’adoption en commission des amendements nos 164 (M. Jean-Noël Barrot) et 168 (Mme Stella Dupont) puis de l’adoption en séance des amendements nos 54 (M. Jean-Noël Barrot) et 518 (Mme Stella Dupont).

([40]) Amendements nos 55 (M. Jean-Noël Barrot) et 520 (Mme Stella Dupont).

([41]) Un Mooc (Massive open online course) est un enseignement à distance s’adressant à un large public.

Le Mooc « Vivre et accéder à l’emploi en France » (d’une durée d’une heure et 32 minutes) est consultable à l’adresse : https://www.fun-mooc.fr/courses/course-v1:dgef-interieur+134004+session01/about

([42]) Loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 et loi n°2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([43]) Conseil d’État, n° 439895, association Mouvement citoyen tous migrants et autres, 9 avril 2020. Considérant n° 19.

([44]) Tribunal administratif de Paris, 22 avril 2020, n° 2006359/9, la Ligue des droits de l’Homme, association « Action des chrétiens pour l’abolition de la torture », association Kali, association Utopia 56, association l’Ardhis, association « Droits d’urgence », Groupe d’information et de soutien des immigrés, M. A., M. B., Mme C., Mme D., M. E., M. F., M. G.

([45]) Conseil d’État, 30 avril 2020, n° 440250 et 440253, ministre de l’intérieur et Office français de l’immigration et de l’intégration.

([46]) En 2018, cette plateforme attribuait 281 rendez-vous en moyenne par jour (OFII, rapport d’activité 2018, p. 14).

([47]) La CNDA est une juridiction spécialisée compétente pour connaître les recours formés contre les décisions de l’OFPRA. Son budget relève du programme 165 Conseil d’État et autres juridictions administratives de la mission Conseil et contrôle de l’État.

([48]) Selon un communiqué de presse du 4 mai 2020 du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, « 178.500 places sont ouvertes ce soir pour héberger des personnes sans-domicile, dont plus de 21 000 places ouvertes depuis le début de la crise sanitaire ».

([49]) Sénat, covid-19 : deuxième rapport d’étape sur la mise en œuvre de l’état d’urgence sanitaire, p. 73.

([50]) Op. cit.

([51]) Amendement n° 557 sur le projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

([52]) Tribunal administratif de Paris, 15 avril 2020, n° 2006287/9- 2006288/9- 2006289/9 (association avocats pour la défense des droits des étrangers, syndicat des avocats de France, groupe d’information et de soutien des immigrés M. A. et 19 autres personnes retenues au CRA de Vincennes M. B. et 26 autres personnes retenues au CRA de Vincennes.

([53]) Conseil d’État, 7 mai 2020, n° 440255, ministre de l’intérieur c/ l’association « Avocats pour la défense des droits des étrangers » et autres.

([54]) Conseil d’État, 9 avril 2020, n° 439895, Association mouvement citoyen tous migrants et autres, considérant n° 19.

([55]) Loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 et loi n°2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.