N° 3132

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 juin 2020

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances rectificative pour 2020
(n° 3074),

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN

Rapporteur général,
Député

——

 

 


  1  

SOMMAIRE

___

 Pages

FICHE  1 : LÉVOLUTION DES HYPOTHÈSES MACROÉCONOMIQUES

A. LA FRANCE CONFIRME SON ENTRÉE DANS UNE PROFONDE RÉCESSION (– 11 %)

1. Un scénario de croissance pré-crise devenu obsolète

2. Une rupture de tendance particulièrement sévère

3. Les nouvelles hypothèses de croissance du Gouvernement

a. Les motifs de la révision à la baisse de la conjoncture économique

b. La dégradation possible de la croissance potentielle

4. La situation de la France par rapport à ses principaux partenaires

B. LE COÛT ÉCONOMIQUE DU CONFINEMENT SE PRÉCISE

1. Les difficultés méthodologiques nuisent aux prévisions

2. Lévolution du PIB au deuxième trimestre montre lampleur du choc économique du confinement

C. LA SORTIE DE CRISE DEMEURE SUSPENDUE À DE NOMBREUSES INCERTITUDES

1. Les tensions déflationnistes

2. Lapparition deffets dhystérèse ?

3. Le désajustement de la relance économique au sein de lEurope et avec le reste du monde

FICHE  2 : LÉVOLUTION DU SOLDE PUBLIC ET DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE

I. UNE TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DES DÉFICITS PUBLICS STOPPÉE PAR LA CRISE

A. LE DÉFICIT PUBLIC DEVAIT SE RÉDUIRE EN 2020

B. UN DÉFICIT PUBLIC PROFONDÉMENT AFFECTÉ PAR LA CRISE (– 11,4 %)

1. Le déficit public atteint un niveau sans précédent

2. Le détail de la révision des LFR 1 et 2

II. LE NOUVEAU SOLDE PUBLIC

A. LE DÉFICIT CONJONCTUREL REFLÈTE LA CHUTE DE L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE

B. LABSENCE DE CONSÉQUENCE DE LA CRISE SUR LE SOLDE STRUCTUREL EST MAINTENUE, MALGRÉ DES INCERTITUDES

C. LAUGMENTATION DU COÛT DES MESURES EXCEPTIONNELLES ET TEMPORAIRES TRADUIT LA POURSUITE DE L’EFFORT BUDGÉTAIRE

III. LE DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE LÉTAT

A. LES MOUVEMENTS EN RECETTES ET EN DÉPENSES

B. LA FORMATION DU NOUVEAU SOLDE BUDGÉTAIRE

FICHE  3 : LES DISPOSITIFS GÉNÉRAUX DE SOUTIEN À LÉCONOMIE

I. LE DISPOSITIF DACTIVITÉ PARTIELLE

A. LE PRINCIPE DU DISPOSITIF DACTIVITÉ PARTIELLE

B. LE RENFORCEMENT ET LEXTENSION DU DISPOSITIF DACTIVITÉ PARTIELLE POUR LES MOIS DE MARS À MAI

1. Le renforcement du dispositif par le décret du 25 mars 2020 relatif à lactivité partielle

a. Laugmentation de lallocation dactivité partielle

b. La simplification du recours au dispositif

2. Lextension à titre temporaire du champ du dispositif

3. Lextension du dispositif dactivité partielle aux salariés en isolement pour cause de vulnérabilité et aux salariés sans solution de garde denfants

C. LÉVOLUTION DU DISPOSITIF POUR LES HEURES CHÔMÉES À COMPTER DU 1er JUIN 2020

D. LIMPACT BUDGÉTAIRE

II. LE FONDS DE SOLIDARITÉ POUR LES ENTREPRISES

A. LE PRINCIPE DU FONDS DE SOLIDARITÉ

B. LE FONCTIONNEMENT DU FONDS

1. Le bénéfice du fonds au titre du mois de mars

a. Le champ des bénéficiaires

b. Le montant des aides versées

2. Le renforcement du fonds pour les aides versées au titre des mois davril et de mai

C. LA NÉCESSITÉ DE PRÉVOIR UN FINANCEMENT COMPLÉMENTAIRE DU FONDS POUR SA PROLONGATION SECTORIELLE AU-DELÀ DU MOIS DE MAI

III. LES MESURES DE SOUTIEN À LA TRÉSORERIE DES ENTREPRISES

A. LES REPORTS SANS PÉNALITÉ DÉCHÉANCES FISCALES ET SOCIALES

1. Les reports de charges fiscales

2. Les reports de charges sociales

3. Des reports de charges de l’ordre de 30 milliards deuros

B. LES REMBOURSEMENTS ACCÉLÉRÉS DE CERTAINES CRÉANCES FISCALES

C. LES REPORTS DE PAIEMENT DES FACTURES ET LOYERS AFFÉRENTS AUX LOCAUX PROFESSIONNELS

D. LES MESURES DE SOUTIEN PRISES PAR LE SECTEUR DES ASSURANCES

1. Lengagement des assurances à hauteur de 3,8 milliards deuros

a. Les mesures de solidarité extracontractuelles prévues par les assurances

b. Les investissements prévus par les entreprises dassurance

c. Les travaux sur un nouveau dispositif de couverture assurantielle

2. Des engagements ambitieux que le Parlement doit suivre avec attention

FICHE  4 : LES GARANTIES PUBLIQUES DE LÉTAT EN RÉPONSE À LA CRISE ÉCONOMIQUE

I. LE PGE : UNE GARANTIE MASSIVE DE 300 MILLIARDS DEUROS

A. L’ÉLIGIBILITÉ À LA GARANTIE

a. Champ des entreprises éligibles

b. Cahier des charges

B. LES CARACTÉRISTIQUES DE LA GARANTIE

C. LE PLAFOND DES PRÊTS GARANTIS

D. L’ÉTAT DES LIEUX AU 11 JUIN 2020

II. LA RÉASSURANCE PUBLIQUE DES RISQUES DASSURANCE-CRÉDIT

A. LASSURANCE-CRÉDIT EXPORT (CAP FRANCEXPORT)

a. Fonctionnement

b. Bilan au 5 juin 2020

B. LASSURANCE-CRÉDIT DOMESTIQUE (CAP FRANCE)

a. Fonctionnement

b. Bilan au 29 mai 2020

C. LA RÉASSURANCE PUBLIQUE DE PORTEFEUILLE (CAP RELAIS)

a. Constat

b. Dispositif prévu dans le présent PLFR

III. LA GARANTIE DES EMPRUNTS PUBLICS

A. LUNÉDIC

1. Laugmentation des besoins de financement de lUnédic

2. L’augmentation de la garantie de lÉtat

B. LES COLLECTIVITÉS ULTRAMARINES

1. La Nouvelle-Calédonie

2. La Polynésie française

IV. LE SOUTIEN AUX PROGRAMMES EUROPÉENS ET INTERNATIONAUX

A. LINSTRUMENT SURE

1. Le fonctionnement du SURE

2. La mise en œuvre de la garantie de lÉtat

B. LE FONDS PANEUROPÉEN DE GARANTIE

1. Le fonctionnement du fonds

2. La mise en œuvre de la garantie de lÉtat

C. LA FACILITÉ DE PRÊT DU FMI

1. Le fonctionnement de la facilité

2. La mise en œuvre de la garantie de lÉtat

FICHE N° 5 : LES PLANS SECTORIELS

I. UN SOUTIEN AU SECTEUR DU TOURISME, DE LÉVÈNEMENTIEL, DE LA CULTURE ET DU SPORT À HAUTEUR DE 18 MILLIARDS DEUROS

A. LEXTENSION ET LA PROROGATION DES MESURES GÉNÉRALES DURGENCE POUR CE SECTEUR

B. DES DISPOSITIONS DEXONÉRATIONS FISCALES INTRODUITES PAR LE PLFR 3

C. AUTRES MESURES

II. UN SOUTIEN DE PLUS DE 8 MILLIARDS DEUROS AU SECTEUR DE LAUTOMOBILE POUR UNE INDUSTRIE PLUS COMPÉTITIVE ET DÉCARBONÉE

A. PLUS DE 5 MILLIARDS D’EUROS CONSACRÉS À LA FILIÈRE DE L’AUTOMOBILE DANS LES MESURES GÉNÉRALES D’URGENCE

B. UN PLAN COMPLÉMENTAIRE DE 3 MILLIARDS D’EUROS CENTRÉ SUR LES VÉHICULES PROPRES

III. UN SOUTIEN À LAÉRONAUTIQUE À HAUTEUR DE 15 MILLIARDS DEUROS

IV. LE SOUTIEN AU SECTEUR DES ENTREPRISES TECHNOLOGIQUES ET START-UPS

V. UN SOUTIEN AU SECTEUR DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS QUI SERA ACCENTUÉ DANS LE CADRE DU PLAN DE RELANCE

VI. UN PLAN DAIDES À LA FILIÈRE DU LIVRE DE PLUS DE 230 MILLIONS DEUROS

FICHE N° 6 : PANORAMA DES PRINCIPALES MESURES ÉCONOMIQUES PRÉVUES PAR LUNION EUROPÉENNE ET LALLEMAGNE

A. LES MESURES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES PRÉVUES PAR LUNION EUROPÉENNE

1. Les mesures européennes prises pour faire face à la crise

a. Les mesures juridiques et budgétaires

b. Le programme dachat durgence pandémique de la BCE

2. Le plan de relance proposé par la Commission européenne : une initiative sans précédent

a. Un plan de relance aboutissant à un effort européen de 2 400 milliards deuros

b. Linstrument « Next Generation EU », fer de lance du plan

c. Le calendrier dadoption du plan de relance

3. La chronologie des mesures prises par lUnion européenne dans le cadre de la crise du coronavirus, témoignage dune réponse sans précédent

B. LES MESURES PRÉVUES PAR LALLEMAGNE

1. Le plan de soutien à léconomie : le « bouclier protecteur »

2. Les mesures prévues dans le cadre du plan de relance allemand

TRAVAUX DE LA COMMISSION

AUDITION DE M. PIERRE MOSCOVICI, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES, SUR LAVIS DU HAUT CONSEIL RELATIF AU TROISIÈME PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2020

AUDITION DE M. BRUNO LE MAIRE, MINISTRE DE LÉCONOMIE ET DES FINANCES ET DE M. GÉRALD DARMANIN, MINISTRE DE LACTION ET DES COMPTES PUBLICS

EXAMEN EN COMMISSION

EXAMEN DES ARTICLES

Article liminaire Prévision de solde structurel et de solde effectif de lensemble des administrations publiques pour lannée 2020

Après l’article liminaire

PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE LÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I.  IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS

A. Autorisation de perception des impôts et produits

Article 1er Annulation de redevances doccupation du domaine public de lÉtat et de ses établissements publics

Avant l’article 2

Article additionnel avant l’article 2 Exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales des primes exceptionnelles versées par les établissements privés de santé et les établissements sociaux et médico-sociaux à leurs salariés

Article additionnel avant l’article 2 Report au 31 décembre 2020 de la date limite de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat

Avant l’article 2

B. Mesures fiscales

Article 2 Remboursement anticipé des créances de report en arrière des déficits

Après l’article 2

Article additionnel après l’article 2 Relèvement temporaire à 2 millions d’euros du plafond de report en arrière de déficits

Après l’article 2

Article 3 Dégrèvement exceptionnel de la cotisation foncière des entreprises, au titre de 2020, au profit des entreprises de taille petite ou moyenne des secteurs relevant du tourisme, de lhôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture, du transport aérien et de lévénementiel particulièrement affectés par la crise sanitaire

Article 4 Déblocage exceptionnel de lépargne retraite des travailleurs non-salariés rencontrant des difficultés économiques liées à l’épidémie de Covid-19

Après l’article 4

Articles additionnels après l’article 4 Aménagement de l’abattement sur les droits de succession en cas de donation à un organisme sans but lucratif

Article additionnel après l’article 4 Simplification des démarches des organismes sans but lucratif bénéficiaires d’une assurance-vie

Après l’article 4

Article additionnel après l’article 4 Augmentation de 100 millions d’euros du plafond du produit de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises affecté au réseau des chambres de commerce et d’industrie

Après l’article 4

II.  RESSOURCES AFFECTÉES

Dispositions relatives aux collectivités territoriales

Article 5 Prélèvement sur recettes au profit des communes et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre confrontés à des pertes de recettes fiscales et domaniales du fait de la crise sanitaire

Article 6 Compensation des pertes fiscales des régions doutre-mer

Article additionnel après l’article 6 Bénéfice de l’attribution du FCTVA pour les dépenses exposées au titre des services d’infrastructure de l’informatique en nuage

Après l’article 6

Article 7 Avances remboursables des pertes de recettes des droits de mutation à titre onéreux des départements dues à la crise sanitaire

TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES À LÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article 8 et état A Équilibre général du budget, trésorerie et plafond dautorisation des emplois

Après l’article 8

SECONDE PARTIE : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE PREMIER AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2020.CRÉDITS DES MISSIONS

Article 9 et état B Budget général : ouvertures de crédits

Article 10 et état D Comptes spéciaux : ouvertures de crédits

TITRE II DISPOSITIONS PERMANENTES

I.  MESURES FISCALES ET BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES

Article 11 Relèvement du plafond dautorisation de prêt de la France au Fonds monétaire international

Article 12 Garantie de lÉtat à la Banque de France au titre dun prêt au Fonds monétaire international

Article 13 Garantie de l’État aux prêts de l’Union européenne au titre de l’instrument d’urgence pour atténuer les risques de chômage (SURE)

Article 14 Garantie de lÉtat à la Banque européenne dinvestissement au titre du fonds paneuropéen de garantie

Article 15 Mise en place du dispositif CAP Relais et élargissement du champ des entreprises éligibles à CAP et CAP+ France

Article 16 Octroi de la garantie de lÉtat à un prêt consenti par lAgence française de développement (AFD) à la Polynésie française

Après l’article 16

Article additionnel après l’article 16 Obligation de notification du refus d’instruction d’une demande de prêt garanti par l’État

Après l’article 16

Article 17 Exonération facultative des taxes de séjour en 2020

Après l’article 17

Article additionnel après l’article 17 Report du délai de transmission du rapport de la commission locale d’évaluation des charges transférées aux communes membres pour les transferts de compétences intervenus en 2020

Après l’article 17

Article additionnel après l’article 17 Souscription par les collectivités territoriales et groupements compétents en matière d’habitat de titres participatifs émis par les offices publics de l’habitat

Après l’article 17

Article additionnel après l’article 17 Abrogation à compter du 1er juillet 2020 de la taxe forfaitaire sur les contrats à durée déterminée dits d’usage (CDDU)

Après l’article 17

Article additionnel après l’article 17 Report de la date limite de vote des taux de fiscalité locale

Après l’article 17

Article additionnel après l’article 17 Rapport sur l’impact de la crise sur les ressources de l’Agence de financement des infrastructures de transports de France et ses conséquences sur l’exécution de la stratégie de mise en œuvre des orientations de la politique d’investissement de l’État en matière de transports et de mobilité

Article additionnel après l’article 17 Remise d’un rapport, par le Gouvernement, portant sur la refonte des aides à l’acquisition des véhicules propres

Après l’article 17

II.  AUTRES MESURES

Mission « Plan durgence face à la crise sanitaire »

Avant l’article 18

Article 18 Exonération de cotisations patronales, aide au paiement des cotisations, remises de dettes et plans dapurement pour les entreprises affectées par la crise sanitaire

Après l’article 18

Article additionnel après l’article 18 Report des délais de vote pour la répartition dérogatoire du prélèvement ou du reversement au titre du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales

Après l’article 18

Article additionnel après l’article 18 Report de l’obligation d’adopter un nouveau pacte financier et fiscal pour les établissements publics de coopération intercommunale signataires d’un contrat de ville

Après l’article 18


  1  

FICHE  1 :
LÉVOLUTION DES HYPOTHÈSES MACROÉCONOMIQUES

Comme lindiquait le rapporteur général dans lexposé de son rapport sur le premier projet de loi de finances rectificative pour 2020 ([1]), « les restrictions vitales et massives des échanges physiques et de la mobilité des personnes pour lutter contre lépidémie, précédées et doublées dinévitables effets de comportements notamment de panique, ont un impact macroéconomique considérable depuis janvier 2020 dans le monde et en France de façon croissante depuis quelques jours ». La prévision de croissance pour 2020 était alors fixée à – 1 % du produit intérieur brut (PIB). Elle est désormais estimée à – 11 %.

Le caractère massif, sans précédent, de l’impact macroéconomique de la crise sanitaire se confirme donc, alors que le confinement de la population s’achève et que l’activité économique reprend, à un rythme encore progressif et encore nettement plus faible qu’avant la crise. Le rattrapage complet du choc macroéconomique entraîné par la riposte sanitaire semble désormais inatteignable dans les seuls mois restants de 2020, contrairement aux hypothèses de la précédente loi de finances rectificative. Au total, la France connaît une récession sans précédent dans son intensité, qui ne pourra être effacée qu’au prix d’un effort public conséquent et soutenu.

A.   LA FRANCE CONFIRME SON ENTRÉE DANS UNE PROFONDE RÉCESSION (– 11 %)

Les perspectives économiques mondiales et nationales se sont fortement assombries dès lors que la pandémie a frappé l’Europe, faisant temporairement du continent européen le nouvel épicentre de l’épidémie à compter du mois de mars 2020.

La vitesse de cette propagation pandémique, cumulée à des mises à l’arrêt massives et soudaines de pans des économies nationales pour des raisons sanitaires, a rendu obsolète l’intégralité des prévisions économiques mondiales, régionales et nationales formulées jusqu’alors.

LOrganisation de coopération et de développement économique (OCDE), dans ses perspectives économiques intermédiaires du 2 mars 2020 ([2]), identifiait déjà la crise de la covid comme un facteur de risque majeur. Mais lOCDE estimait encore que léconomie mondiale croîtrait, en 2020, de 2,4 %, la zone euro de 0,8 % et la France de 0,9 %. La révision à la baisse par rapport aux prévisions de lautomne 2019 était déjà sensible (entre 0,2 et 0,5 point de PIB selon les pays), mais sans commune mesure avec les prévisions de récession massive qui allait progressivement être publiées au fil du mois de mars.

L’activité mondiale en 2020 : un repli inédit

Selon les projections du Gouvernement, l’activité mondiale reculerait en 2020 de – 3,6 %. L’activité serait particulièrement affectée en zone euro par la propagation de l’épidémie et les mesures d’endiguement associées, mais également par la dégradation de son environnement extérieur (moindre demande adressée, disruption des chaînes de valeur mondiales).

Hors zone euro, les grandes économies avancées verraient également leur activité se contracter fortement. L’activité chuterait en début d’année en Chine en raison d’un confinement très strict, dans une ampleur cohérente avec les premières observations disponibles, puis elle se redresserait malgré le ralentissement des économies avancées qui pèserait sur les exportations chinoises. Aux États-Unis, la récession serait sévère (– 7,3 % du PIB selon l’OCDE), mais contenue grâce à une combinaison de politiques monétaire et budgétaire très accommodantes.

Les autres principales économies émergentes seraient aussi affectées par le développement de l’épidémie à travers à la fois les conséquences directes des mesures de restrictions mais aussi les canaux commercial et financier, dans un contexte de resserrement des conditions de financement et de forte baisse du prix des matières premières.

En conséquence du repli de la demande et de l’arrêt partiel de l’activité, les échanges mondiaux reculeraient très fortement au premier semestre 2020 puis se redresseraient doucement sur le second semestre. Au total, les échanges mondiaux sont attendus en très fort recul en 2020 à hauteur de – 12,1 %.

Source : Gouvernement

En juin, à la moitié de lannée 2020, lincertitude de lévolution du contexte macroéconomique demeure prégnante, ce qui pèse sur la confiance et tire les perspectives de reprise à la baisse. En quatre mois, les trois révisions successives de la prévision de croissance par le Gouvernement se sont traduites par une aggravation continue.

1.   Un scénario de croissance pré-crise devenu obsolète

Selon le cadrage macroéconomique du projet de loi de finances pour 2020, trois principales causes d’un ralentissement modéré étaient identifiées en 2020 :

– le regain des tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis ;

– la perspective de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ;

– le choc d’incertitude lié à ces événements, facteur de risque supplémentaire.

Ces risques, quoique diffus, ne mettaient pas en cause la prévision d’une croissance française relativement robuste, entre 1,3 % et 1,4 %.

Les prévisions de croissance désormais disponibles pour 2020 marquent donc une rupture de tendance brutale, à la fois à court et long termes. Cette phase de rupture concerne au demeurant les économies du monde entier, frappées par un même choc exogène.

2.   Une rupture de tendance particulièrement sévère

Depuis 1974, la croissance annuelle n’a été négative qu’à quatre reprises. Cela signifie que le PIB diminue, quand le cours classique d’une économie amène à constater une expansion, même modeste, de ce produit. Selon l’Insee, la récession se caractérise par un repli du PIB sur au moins deux trimestres consécutifs.

La croissance en france depuis 1974

(en % du PIB en volume)

(en grisé, les années où la croissance a été inférieure à 1 %)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Croissance

4,3

– 1,0

4,4

3,5

4,0

3,6

1,6

1,1

2,5

1,2

1,5

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Croissance

1,6

2,3

2,6

4,7

4,3

2,9

1,0

1,6

– 0,6

2,4

2,1

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Croissance

1,4

2,3

3,6

3,4

3,9

2,0

1,1

0,8

2,8

1,7

2,4

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Croissance

2,4

0,3

– 2,9

1,9

2,2

0,3

0,6

1,0

1,1

1,2

2,4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2018

2019

2020

 

 

 

 

 

 

 

 

Croissance

1,7

1,5

– 11,0

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : INSEE, comptes nationaux jusqu’en 2019 ; présent PLFR, pour 2020.

Si l’on retient comme hypothèse de croissance celle avancée par le Gouvernement dans le présent PLFR, la récession de 2020 serait de très loin la plus importante observée depuis 1945. Une baisse du PIB, deux fois inférieure, a été observée sur le seul deuxième trimestre de 1968 : la baisse de 5 % avait été toutefois compensée, dès le troisième trimestre, par un rebond de l’activité de 8 %. Dans le cas de 2020, selon l’INSEE ([3]) , la baisse du 2e trimestre atteint 17 %, après 5,3 % au premier trimestre.


3.   Les nouvelles hypothèses de croissance du Gouvernement

Le scénario macroéconomique est présenté dans le rapport économique et budgétaire annexé au PLFR. La nouvelle hypothèse de croissance pour l’année 2020 est donc une contraction du PIB de 11 %.

Le cadrage macroéconomique du Gouvernement associé au présent PLFR indique désormais que la France connaîtra une croissance négative de – 11,0 % du PIB en 2020. Cette prévision est dans la fourchette moyenne des dernières prévisions publiées par les conjoncturistes, qui évaluent, à ce stade, la récession en France en 2020 entre 8,2 % et 12,5 %.

Ces niveaux sont cependant conditionnés à une hypothèse forte : l’absence de deuxième vague pandémique à l’automne 2020. L’OCDE s’est livrée à deux projections macroéconomiques par pays, avec ou sans deuxième vague. Dans cette dernière hypothèse, la France subirait un choc de – 14,1 %.

PrÉvisions de croissance en volume du PIB pour la France (mai-juin 2020)

(en % d’évolution annuelle)

Institutions

2020

2021

Gouvernement

(PLFR 3, 10 juin 2019)

 11,0

INSEE

(Point de conjoncture, 27 mai 2020)

– 8

Banque de France

(Projections macroéconomiques, 9 juin 2020)

– 10,3

6,9

OCDE

(Perspectives économiques, 10 juin 2020)

– 11,4

7,7

FMI

(Perspectives de l’économie mondiale, 24 juin 2020)

– 12,5

7,3

Commission européenne

(Prévisions économiques de printemps, 6 mai 2020)

– 8,2

7,4

Hypothèse centrale : pas de deuxième vague, la pandémie est endiguée à l’été 2020.

Source : commission des finances.

a.   Les motifs de la révision à la baisse de la conjoncture économique

La croissance a été revue en baisse de – 3 points de PIB par rapport au scénario de la 2e loi de finances rectificative du 25 avril 2020. Le Gouvernement mobilise trois raisons économiques :

– l’investissement en construction a été plus faible que prévu, à cause de difficultés rencontrées quant à la réouverture des chantiers ; par effet d’entraînement, l’investissement hors construction a été revu à la baisse ;

– la reprise est plus lente qu’anticipé chez nos principaux partenaires économiques, ce qui se traduit par une baisse de la demande mondiale adressée à la France ([4]) ;

– la prévision de consommation des ménages maintenue à son niveau de la LFR 2 (et ce malgré des données encourageantes de l’Insee) : les hypothèses de consommation de la surépargne accumulée pendant le confinement restent prudentes.

Source : Gouvernement.

Le Haut Conseil des finances publiques ([5]) « considère prudente la prévision du Gouvernement dun recul de lactivité de 11 % en 2020. Une poursuite de lévolution favorable du contexte sanitaire et une utilisation plus forte au second semestre que retenu dans les hypothèses du Gouvernement de lépargne contrainte accumulée par les ménages pourraient conduire à une récession moins marquée ».

b.   La dégradation possible de la croissance potentielle

L’hypothèse de croissance potentielle ([6]) utilisée dans le présent PLFR est maintenue identique à celle prévue par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour 2020, soit 1,25 % du PIB.

Le HCFP, dans son avis précité, exprime des réserves sur le maintien de cette hypothèse : « il est vraisemblable que la crise sanitaire aura des conséquences défavorables sur le PIB potentiel ». La capacité de la production industrielle à retrouver rapidement ses niveaux de début 2020 est menacée par un risque important d’augmentation des faillites En outre, l’apparition d’un chômage important pourrait se traduire par une dégradation durable du capital humain de la France. En d’autres termes, dans le cas où l’économie française ne parviendrait pas à être complètement résiliente, les séquelles de la crise pourraient se traduire par une perte de PIB potentiel dès 2020.

4.   La situation de la France par rapport à ses principaux partenaires

La France est un des pays les plus touchés par la crise économique. La crise épidémique y a été marquée, ce qui a justifié une réponse sanitaire appropriée et incontournable, mais lourde de conséquences en matière économique. La durée du confinement, par exemple, a été de huit semaines en France, contre quatre semaines en Allemagne. En outre, les avantages comparatifs de la France se situent dans certains secteurs structurellement plus exposés aux effets de la fermeture des économies mondiales : tourisme, gastronomie, industrie du luxe, aéronautique et automobile.

Ce constat se vérifie dès la comparaison des conjonctures nationales du premier trimestre 2020. Selon la Banque centrale européenne ([7]), le PIB de la zone euro s’est contracté de 3,8 %. La France figure parmi les cinq pays dont la contraction du premier trimestre dépasse cette moyenne, avec l’Italie, l’Espagne, le Portugal et la Belgique. Avec 5,3 % de contraction du PIB selon l’INSEE, la France serait le pays le plus touché de la zone euro, avec l’Italie.

Variation du PIB au premier trimestre 2020

(% du PIB)

Légende : les colonnes de gauche montrent les premières prévisions trimestrielles (mars-avril 2020) et les colonnes de droite, si disponibles, leur révision à l’issue du deuxième trimestre (mai-juin 2020).

Source : Institut des politiques publiques, à partir des données des comptabilités nationales.

Cette tendance se confirme en moyenne annuelle, à partir des projections réalisées par l’OCDE. Au sein des pays de l’OCDE, la France serait la plus fortement frappée par la crise économique, avec l’Italie et le Royaume‑Uni. La récession serait plus sévère qu’en moyenne dans la zone euro (– 9 % du PIB).

Variation du PIB annuel en 2020 (pays de l’ocde)

(% du PIB)

Lecture : le scénario du choc unique repose sur l’hypothèse d’absence de seconde vague. Le scénario de deux chocs successifs comporte une prévision de perte supplémentaire de PIB liée à cette deuxième vague.

Source : OCDE.

B.   LE COÛT ÉCONOMIQUE DU CONFINEMENT SE PRÉCISE

1.   Les difficultés méthodologiques nuisent aux prévisions

Le fort degré d’incertitude qui marque la période actuelle se traduit par la prudence des prévisions économiques. Plusieurs inconnues majeures, notamment les conditions de la poursuite du déconfinement de la population, ont un impact sur l’évolution de la croissance française, mais aussi sur sa mesure.

Les notices méthodologiques des points de conjoncture et études citées dans la présente fiche témoignent des difficultés rencontrées par les statisticiens et les conjoncturistes pour parvenir à des résultats fiables, encore maintenant. Ainsi, de nombreuses informations habituellement disponibles sont manquantes, ou alors certains modèles de prévision sont devenus caducs du fait du caractère inédit de la crise.

Dans un billet récent du blog de l’INSEE, son directeur général traduit les difficultés de la statistique publique à l’épreuve de la crise sanitaire ([8]) : les « méthodes classiques se sont révélées inopérantes ou insuffisamment réactives ». L’adaptation des statisticiens a porté sur la diversification de leurs sources : il a fallu « rassembler très rapidement de linformation transmise par des fédérations professionnelles et des entreprises, les corroborer avec des données instantanées de consommation délectricité, de transactions par carte bancaire, ou par les premières estimations du nombre de salariés ayant cessé de travailler. »

De même, des chercheurs de l’OFCE ont observé, en comparant les conditions de prévisions actuelles avec celles de la précédente récession, que la publication de données trimestrielles était un exercice particulièrement délicat : « ces résultats sont davantage susceptibles quà laccoutumée dêtre révisés. Lexpérience passée illustre à cet égard la difficulté de prendre la mesure de limpact des chocs majeurs sur lactivité économique. Lors de la grande récession de 2008/09, les révisions des comptes nationaux entre la première version publiée à lépoque et la version daujourdhui ont quasiment toujours été faites à la baisse, tant pour les trimestres de grande récession que pour lévaluation de la croissance en moyenne annuelle » ([9]).

2.   L’évolution du PIB au deuxième trimestre montre l’ampleur du choc économique du confinement

Selon l’INSEE ([10]) , le deuxième trimestre 2020, dont les deux tiers ont été passés sous confinement, serait marqué par une évolution du PIB trimestriel de – 17 %.

La dégradation de la conjoncture économique en France résulte d’un choc d’offre et d’un choc de demande, découlant principalement de la décision de confiner la population pour lutter contre la propagation de l’épidémie, pendant huit semaines :

– du côté de l’offre : la fermeture temporaire de nombreuses entreprises, l’immobilisation progressive de la main-d’œuvre, des périodes prolongées d’activité partielle, de nombreuses perturbations dans la chaîne d’approvisionnement et la chute des exportations dans de nombreux secteurs ;

– du côté de la demande, la chute de la consommation des ménages, liée aux mesures de confinement et au report des décisions d’achat (immobilier, automobile, électroménager, tourisme, loisirs) qui en découlent, et la réduction de l’investissement des entreprises.

Selon des prévisions stables depuis son premier point de conjoncture du 26 mars 2020, l’INSEE estime que la perte d’activité liée au confinement est proche du tiers par rapport à une situation normale ([11]).

La perte d’activité économique a été de 75 % dans la construction, reflétant la mise à l’arrêt de très nombreux chantiers. Dans l’industrie, l’activité moyenne a connu une baisse d’environ un tiers. Dans les services, cette baisse, d’abord estimée à 36 %, serait finalement légèrement inférieure à un tiers. Du côté de la consommation des ménages, la chute est constatée dans les mêmes proportions par rapport à la situation normale : – 32 % selon l’INSEE.

Sur un mois de confinement complet, celui d’avril 2020, l’INSEE relève qu’en moyenne, le revenu des ménages a baissé de 2,7 %. Cela s’explique par la baisse de l’emploi salarié et par celle des revenus des entrepreneurs individuels. Cette baisse aurait été beaucoup plus importante sans les dispositifs d’indemnisation rapidement mis en place (activité partielle, arrêts maladie pour garde d’enfants). Malgré la mise en place du fonds de solidarité et du régime d’activité partielle, le taux de marge des entreprises a chuté de 9 points en avril.

C.   LA SORTIE DE CRISE DEMEURE SUSPENDUE À DE NOMBREUSES INCERTITUDES

S’il semble acquis que le scénario macroéconomique ne suivra pas une courbe en V, synonyme de rattrapage rapide des pertes observées pendant le confinement, de nombreuses incertitudes nuisent à une prévision efficace de la reprise de l’économie dans les prochains mois.

1.   Les tensions déflationnistes

Le risque déflationniste est un risque majeur de la période récente, et n’a pas débuté avec la crise de la covid. En période déflationniste, c’est-à-dire de baisse continue et générale des prix, l’activité économique est durablement déprimée, et les leviers de l’action publique pour sortir de la morosité, en matière de politique monétaire ou budgétaire, sont réputés peu efficaces.

Selon le Gouvernement, l’indice des prix à la consommation serait de 0,4 % en 2020, après 1,1 % en 2019, sous l’effet de la crise sanitaire et de la faiblesse des prix de l’énergie. Cette baisse de l’inflation se constate alors que l’intervention de la Banque centrale européenne pour contenir les effets de la crise se traduit par un volume de création monétaire sans précédent ([12]). Les effets inflationnistes de cette politique monétaire très accommodante ne s’observent pas à court terme.

L’évolution de l’inflation ou, au contraire, le risque déflationniste, est une inconnue de la crise actuelle. Certains arguments conduisent à durablement envisager un contexte faiblement inflationniste :

– l’inflation connaît un affaiblissement structurel depuis plusieurs années dans les économies développées, du fait du vieillissement démographique (conduisant à davantage de comportements d’épargne), de la réduction du pouvoir de négociation des salariés ([13]) du fait de l’accroissement de l’injonction à la compétitivité et de la baisse de l’engagement syndical ;

– l’approche théorique classique, considérant que la croissance de la masse monétaire se traduit mécaniquement par de l’inflation, dès lors qu’elle est supérieure à la croissance économique, est infirmée par les faits, au moins depuis 2008 ;

– la crise actuelle favorise les comportements attentistes, donc déflationnistes ([14]) : les entreprises privilégient le désendettement à l’investissement productif, quand elles ne font pas faillite ; les mesures d’endiguement ont conduit à une surépargne forcée des ménages, qui anticipent le cas échéant des temps difficiles à venir et les conduiraient à maintenir cette épargne en précaution ; la montée du taux de chômage se traduit par une perte de revenus qui pèse sur la consommation.

Au contraire, plusieurs observations économiques, découlant de la particularité de la crise actuelle, peuvent avoir pour conséquence une remontée des prix :

– l’inflation par les coûts : les nombreuses perturbations des chaînes de production constituent des facteurs de hausse des prix. Ainsi, les fermetures d’abattoirs aux États-Unis ont ainsi fait augmenter le prix du porc ; en France, le prix des produits frais a augmenté de 18 % en avril 2020 ; les limitations des échanges internationaux augmentent les coûts d’approvisionnement et peuvent être répercutés sur les prix, dans un contexte de marges affaiblies des entreprises ;

– l’inflation par les salaires : les hausses de salaires annoncées ou prévues dans certains secteurs mis à contribution pendant la crise pourraient se propager à d’autres secteurs économiques ;

– le climat protectionniste américain, les réactions de la Chine et les appels à la relocalisation de nombreuses activités stratégiques affaiblissent la pression de la concurrence internationale et contribuent à des tensions sur les prix.

2.   L’apparition d’effets d’hystérèse ?

Un effet d’hystérèse, en économie, renvoie à l’incapacité des agents de s’adapter instantanément ou rapidement à une nouvelle situation économique potentiellement plus profitable du fait de leur maintien prolongé dans une situation négative antérieure. L’effet d’hystérèse classique est celui du chômage de longue durée : l’inactivité prolongée d’un travailleur nuit à son employabilité.

Dans le cas de la crise actuelle, les effets d’hystérèse du chômage peuvent être constatés, dans la mesure où les recherches d’emploi sont compromises par les règles de confinement et par l’arrêt de l’activité de nombreuses entreprises.

D’autres effets d’hystérèse peuvent apparaître :

– l’arrêt de la production industrielle de sous-traitants peut créer des ruptures de stocks en cascade tout au long de la chaîne de valeur, ce qui empêcherait, à tout le moins, la reprise d’une activité industrielle complète de façon rapide ;

– certaines habitudes de consommation des ménages, prises pendant le confinement, peuvent perdurer : commerce en ligne, cuisine à domicile, consommation de services de vidéos à la demande, au détriment de la reprise complète de l’activité de petits commerces physiques ;

– la perspective d’une réapparition du virus à l’automne prochain, évoquée par certains chercheurs du fait de la réouverture possible des frontières et d’une éventuelle activité saisonnière du virus au sein de populations non immunisées, peut engendrer des comportements attentistes, en matière d’investissement des ménages (repousser un projet d’achat immobilier ou des travaux d’envergure, qui risqueraient d’être interrompu de longs mois), des entreprises (qui préféreraient se désendetter) ou même du secteur financier (qui freinerait l’accès au crédit de long terme à des entreprises susceptibles d’être confrontées à de nouvelles difficultés économiques).

3.   Le désajustement de la relance économique au sein de l’Europe et avec le reste du monde

La crise sanitaire a frappé l’Asie, avant de se propager en Europe, puis de trouver un nouveau foyer majeur de contagion en Amérique du Nord et du Sud.

Par conséquent, si la crise frappe de façon homogène les économies mondiales, le tempo de leur relance économique ne sera pas le même, alors même que ces économies sont très interconnectées. Si le pic de l’épidémie est passé en France à la fin du printemps, il ne serait pas franchi avant l’été aux États-Unis : la Floride enregistre encore, le 18 juin 2020, le nombre de contaminations recensées à la covid en 24 heures le plus élevé depuis le début de la crise.

Cela peut avoir certains effets bénéfiques, par exemple la relocalisation d’activités économiques en Europe ou l’accroissement de nos relations commerciales européennes ; l’inverse est aussi vrai : les marchés asiatiques, remis sur pied avant la fin de la crise sanitaire européenne, pourraient se recentrer sur une activité plus régionale, au détriment de nos capacités d’exportation

Cette déconnexion des phases d’intensité de l’épidémie peut se traduire par une désynchronisation des séquences de relance budgétaire. L’Union européenne a ainsi tout intérêt à créer un choc de relance homogène au cours de l’été, l’interconnexion de ses économies étant particulièrement fort, comme le rappelle une étude récente de l’Institut des politiques publiques ([15]). La Commission européenne a annoncé un plan de relance européen de 540 milliards d’euros, Next GenerationEU. Les modalités d’intervention et de répartition de ces fonds sont encore en cours de discussion, ainsi que le volume qui pourrait être décaissé dès 2020, mais il s’agit d’une étape déterminante dans la réponse coordonnée à la crise économique.

 

 

 


  1  

FICHE  2 :
LÉVOLUTION DU SOLDE PUBLIC ET DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE

Le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020 s’accompagne d’une nouvelle révision substantielle de la prévision de solde public pour l’année 2020. La première loi de finances rectificative (LFR 1) prévoyait une dégradation du déficit public de 2020 de 1,7 point de PIB, pour un solde de – 3,9 points de PIB. La deuxième loi de finances rectificative (LFR 2) aggravait encore cette prévision de 5,2 points de PIB (solde de – 9,1 points de PIB). Le présent projet de loi de finances rectificative (PLFR 3) fixe finalement la prévision de solde effectif à – 11,4 points de PIB.

Pour l’heure, la crise économique que nous traversons contribuerait donc à dégrader de 9,2 points de PIB le solde public que nous aurions dû constater en labsence de pandémie.

La mesure du solde public permet d’adopter une vision intégrée de l’ensemble des finances publiques et donc de porter une appréciation sur le résultat en comptabilité nationale de l’ensemble des administrations publiques, c’est-à-dire non seulement de l’État mais également des administrations publiques locales (APUL), des administrations de sécurité sociale (ASSO) et des divers organismes d’administration centrale (ODAC).

évolution des Soldes publics pour l’année 2020

(en % du PIB)

Soldes

LFI 2020

LFR 1

LFR 2

PLFR 3

Solde structurel (1)

– 2,2

– 2,2

– 2,0*

– 2,2

Solde conjoncturel (2)

0,1

– 1,3

– 5,3

– 7,0

Mesures exceptionnelles et temporaires (3)

– 0,1

– 0,4

– 1,7

– 2,3

Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3)

 2,2

 3,9

 9,1**

 11,4**

* Effet de base du déficit structurel de 2019, dont les estimations ont varié entre 2,0 à 2,2 % au premier semestre 2020.

** Effet d’arrondis au dixième.

Source : articles liminaires de la loi de finances initiale pour 2020, de la première et deuxième loi de finances rectificative pour 2020 et du présent projet de loi de finances rectificative.

I.   UNE TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DES DÉFICITS PUBLICS STOPPÉE PAR LA CRISE

A.   LE DÉFICIT PUBLIC DEVAIT SE RÉDUIRE EN 2020

Le déficit public prévu par la loi de finances initiale pour 2020 s’établissait à 2,2 % du PIB, soit son plus faible niveau depuis 2001. L’année 2017 a marqué le retour du déficit public, hors mesures exceptionnelles et temporaires, sous la barre des 3 % du PIB, ce qui a permis à la France de sortir de la procédure de déficit excessif dont elle faisait l’objet depuis 2009.

DÉficit public depuis 2008

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

En

% du PIB

3,3

7,2

6,9

5,2

5,0

4,1

3,9

3,6

3,5

2,9

2,3

3,0*

11,4

*Hors mesure exceptionnelle relative à la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse de cotisations sociales, le déficit public de 2019 s’établit à 2,0 % du PIB.

Source : INSEE, comptes nationaux jusqu’en 2019, présent projet de loi de finances rectificative pour l’année 2020.

Depuis 2018, l’économie française était en haut de cycle. La loi de finances initiale pour 2020 avait pris comme hypothèse un écart de production légèrement positif en 2020, à hauteur de 0,2 point de PIB. Cela signifiait que le PIB effectif devait être légèrement supérieur au PIB potentiel de léconomie française, et que les facteurs de production seraient modérément en tension. Par conséquent, l’économie française devait dégager un léger excédent conjoncturel en 2020 : le solde conjoncturel était prévu à 0,1 % du PIB, par ailleurs compensé par un poids des mesures exceptionnelles et temporaires de – 0,1 % du PIB.

Par conséquent, la prévision de déficit public de la LFI 2020 faisait apparaître un déficit d’origine intégralement structurelle (– 2,2 % du PIB potentiel). Le déficit structurel isole les effets du cycle économique et reflète donc le niveau des recettes et des dépenses directement liées aux politiques publiques menées par le Gouvernement.

La situation actuelle est exactement contraire. Tandis que le déficit structurel doit rester inchangé en 2020 par rapport à 2019, l’intégralité de l’aggravation du déficit public résulterait de la chute du PIB effectif (déficit conjoncturel) et des importantes mesures budgétaires prises pour lutter contre la crise sanitaire et contre la récession économique (mesures exceptionnelles et temporaires).

B.   UN DÉFICIT PUBLIC PROFONDÉMENT AFFECTÉ PAR LA CRISE (– 11,4 %)

1.   Le déficit public atteint un niveau sans précédent

Le dernier excédent public constaté en France date de 1974. Cette année-là, alors que les effets du premier choc pétrolier commencent à se faire sentir, les comptes publics affichent un solde légèrement positif de 0,1 % du PIB. Depuis 1975, les comptes publics de la France sont donc en déficit, dans des proportions toutefois très variables.

Le dÉficit public depuis 1974

(en % du PIB)

(en grisé, les soldes supérieurs à 4 % du PIB)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Solde

+ 0,1

– 2,9

– 1,6

– 1,1

– 1,8

– 0,5

– 0,4

– 2,4

– 2,8

– 2,5

– 2,7

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Solde

– 3,0

– 3,2

– 2,0

– 2,6

– 1,8

– 2,4

– 2,9

– 4,6

– 6,4

– 5,4

– 5,1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Solde

– 3,9

– 3,7

– 2,4

– 1,6

– 1,3

– 1,4

– 3,2

– 4,0

– 3,6

– 3,4

– 2,4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde

– 2,6

– 3,3

– 7,2

– 6,9

– 5,2

– 5,0

– 4,1

– 3,9

– 3,6

– 3,5

– 2,9

 

 

 

 

 

 

Année

2018

2019

2020

 

 

 

 

 

 

 

 

Solde

– 2,3

– 3,0

– 11,4

 

 

Source : INSEE, base 2014, présent PLFR.

Jusqu’à la présentation du présent PFLR, le point le plus bas de solde public effectif a été atteint en 2009, année qui a suivi la crise financière de 2008, avec un déficit de 7,2 % du PIB. Une décennie plus tard, il avait été réduit de près de cinq points de PIB.

Comme le montre le tableau précédent, le déficit public prévu pour 2020 est significativement supérieur à celui que la France a connu lors de la précédente récession de 2008. Le caractère abrupt de l’évolution de la prévision caractérise l’intensité de la crise et des réponses qu’il est proposé d’y apporter. Par rapport à la prévision de déficit initialement prévue pour 2020, en date de décembre 2019 (2,2 %), la présente prévision d’avril 2020 augmente de plus de 400 %.

2.   Le détail de la révision des LFR 1 et 2

Le tableau suivant décompose le solde public effectif entre la prévision de la LFI pour 2020, celle des LFR 1 et LFR 2 et, enfin, la prévision du présent PLFR 3.

L’évolution des prévisions de Déficit public pour 2020

(en % du PIB)

Déficit public

Écart par rapport

au PLFR 3

Déficit effectif

PLFR 3

11,4

 

LFR 2

9,1

+ 2,3

LFR 1

3,9

+ 7,5

LFI 2020

2,2

+ 9,2

dont déficit conjoncturel

PLFR 3

7,0

 

LFR 2

5,3

+ 1,7

LFR 1

1,3

+ 5,7

LFI 2020

– 0,1

+ 7,1

dont déficit structurel

PLFR 3

2,2

 

LFR 2

2,0

+ 0,2*

LFR 1

2,2

0

LFI 2020

2,2

0

dont mesures exceptionnelles et temporaires

PLFR 3

2,3

 

LFR 2

1,7

+ 0,6

LFR 1

0,4

+ 1,9

LFI 2020

0,1

+ 2,2

* effet de base 2019 ; la révision du déficit structurel de 2019 de 2,0 % à 2,2 % par le présent PLFR traduit en réalité une stabilité du déficit structurel entre 2019 et 2020.

Source : présent projet de loi de finances rectificative, première et deuxième lois de finances rectificatives pour 2020 et loi de finances initiale pour 2020.

On observe que le présent PLFR ajuste à nouveau sensiblement les prévisions de la première LFR, publiée le 23 mars dernier seulement.

Le choc économique se traduirait par une aggravation de 1,7 point de PIB supplémentaire du solde conjoncturel par rapport à la LFR 2. Comme la fiche n° 1 le montre, la dégradation de la conjoncture économique – du fait en particulier de la reprise très progressive de l’activité – a été revue à la hausse en un mois. L’estimation de la croissance a été dégradée de 3 points de PIB supplémentaires par rapport à la LFR 2, ce qui a un effet direct sur le montant des recettes perçues.

En deuxième lieu, les mesures exceptionnelles et temporaires prises par le Gouvernement pour lutter contre la crise sanitaire et contre ses effets récessifs correspondent à 0,6 point de PIB supplémentaire, et atteignent désormais 58,5 milliards d’euros ([16]).

Cet accroissement du coût des mesures de soutien est détaillé dans le tableau ci-après, qui ne porte que sur les mesures budgétaires ayant un effet sur le solde public. L’essentiel de la hausse du soutien public à l’économie porte sur le coût du régime d’activité partielle et sur les mesures sectorielles nouvelles contenues dans le présent PLFR (cf. fiche 5).

montée en charge du plan de soutien budgétaire

Mesures ayant un impact sur le solde public

(en milliards d’euros)

Nature du soutien

Coût LFR 1

Coût LFR 2

Coût PLFR 3

Montée en charge/LFR 2

Activité partielle

8,5

24,0

31,0

+ 7,0

Dépenses de santé exceptionnelles

2,0

8,0

8,0

0

Fonds de solidarité pour les entreprises *

1,1

6,8

8

+ 1,2

Plans sectoriels

3

+ 3

Exonération de charges**

3

+ 3

Aide aux ménages les plus fragiles

1

+ 1

Prime pour les indépendants

1

+ 1

Crédits supplémentaires durgence

1,5

1,5

0

Décalage de la réforme de l’assurance chômage

0,5

0,5

0

Avances remboursables pour soutenir les PME

0,5

+ 0,5

Crédits pour masques non chirurgicaux

0,5

+ 0,5

Remboursement anticipé des créances de carry-back

0,5

+ 0,5

Total

11,5

40,8

58,5

+ 18,7

* Effort public uniquement.

** Compensée par l’État à la sécurité sociale

Source : commission des finances

Le coût des mesures de soutien à l’économie comptabilisées dans ce tableau se répartit en 38,5 milliards d’euros pour l’État, 19,5 milliards d’euros pour les administrations de sécurité sociale (dont plus de 10 milliards pour la prise en charge par l’Unédic d’une partie du coût de l’activité partielle) et 0,5 milliard d’euros de contribution des collectivités territoriales au fonds de solidarité ([17]) .

II.   LE NOUVEAU SOLDE PUBLIC

A.   LE DÉFICIT CONJONCTUREL REFLÈTE LA CHUTE DE L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE

L’impact direct de la propagation de l’épidémie de covid, couplé avec les mesures de protection sanitaire, se traduisent par des effets récessifs de grande envergure. La contraction du PIB, évaluée à 11 % en 2020 par le Gouvernement dans le présent PLFR, se traduit par une hausse massive du déficit conjoncturel ( 7,1 points de PIB) par rapport aux projections de la LFI (excédent conjoncturel de 0,1 point de PIB).

Rappelons que le solde conjoncturel est le solde reflétant les dépenses et les recettes publiques directement affectées par la conjoncture économique. Il se distingue du déficit structurel, qui isole les effets du cycle économique et reflète donc le niveau des recettes et des dépenses directement liées aux politiques publiques menées par le Gouvernement.

L’aggravation du déficit conjoncturel traduit la forte progression de lécart de production, qui est la différence entre le PIB effectif et le PIB potentiel. Ce dernier peut être défini « comme le niveau maximum de production que peut atteindre une économie sans quapparaissent de tensions sur les facteurs de production qui se traduisent par des poussées inflationnistes » ([18]).

Comme les facteurs de production sont actuellement fortement sous-employés, voire encore presque à l’arrêt dans certains secteurs économiques, le niveau du PIB effectif s’est fortement détaché du PIB potentiel. La contraction du PIB se traduit mécaniquement par des pertes de recettes des prélèvements obligatoires, donc par l’apparition d’un déficit de nature conjoncturelle ([19]).

B.   LABSENCE DE CONSÉQUENCE DE LA CRISE SUR LE SOLDE STRUCTUREL EST MAINTENUE, MALGRÉ DES INCERTITUDES

Les mesures de soutien budgétaire adoptées en LFR 1 et renforcées en LFR 2 se sont traduites par une hausse du déficit lié aux mesures exceptionnelles et temporaires (voir ci-dessous). Cette catégorie de solde permet d’isoler les mesures, en dépenses et en recettes, qui sont directement l’effet de choix de politiques budgétaires, mais qui, en raison de leur caractère non pérenne, ne doivent pas être rattachées au déficit structurel. Comme son nom l’indique, ce dernier doit refléter les effets des politiques structurelles, de moyen et de long terme, menées par le Gouvernement.

Le renforcement de ces mesures de soutien budgétaire par le présent PLFR naffecterait donc pas le déficit structurel prévu en 2020 : il est considéré qu’il se maintiendrait à 2,2 points de PIB, au niveau de 2019.

Toutefois, dans son avis n° HCFP 2020-4 du 8 juin 2020, le Haut Conseil des finances publiques a estimé que le déficit structurel pourrait « se révéler plus élevé que prévu dans ce 3e PLFR » dans la mesure où « certaines des dépenses liées à la crise sanitaire, considérées comme temporaires par le Gouvernement, pourraient être prolongées au-delà de 2020 ». Il a souligné que « lévaluation du PIB potentiel risque dêtre revue à la baisse en raison de possibles pertes de capital humain entraînées par la hausse du chômage et des conséquences de la hausse prévisible des faillites dentreprises et de la baisse des investissements sur les capacités de production ainsi que de limpact sur la productivité de la mise en œuvre durable des mesures de protection sanitaire ».

C.   LAUGMENTATION DU COÛT DES MESURES EXCEPTIONNELLES ET TEMPORAIRES TRADUIT LA POURSUITE DE L’EFFORT BUDGÉTAIRE

La LFI 2020 prévoyait des mesures exceptionnelles et temporaires de basse intensité, à hauteur de 0,1 point de PIB. Le caractère ponctuel de ces mesures, à l’impact positif ou négatif sur les finances publiques, explique qu’elles soient écartées du calcul du solde structurel et du solde conjoncturel.

Comme le plan budgétaire de lutte contre l’épidémie et contre ses effets récessifs n’a pas vocation à se prolonger – à ce stade – au-delà de l’exercice 2020, le Gouvernement a comptabilisé les dépenses des deux premières LFR et du présent PLFR parmi les mesures exceptionnelles et temporaires. Il s’ensuit une hausse substantielle du déficit issu des mesures exceptionnelles et temporaires en 2020, à 2,3 points de PIB.

Ce solde se décompose en réalité en 2,5 points de PIB de lutte contre la crise actuelle, en partie compensées par le produit d’une amende de 2 milliards d’euros infligée au groupe Airbus dans le cadre d’une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) perçue au mois de janvier 2020.

III.   LE DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE LÉTAT

A.   LES MOUVEMENTS EN RECETTES ET EN DÉPENSES

Le solde prévu pour 2020 se dégraderait de 128,9 milliards deuros par rapport à la LFI de 2020. Cette aggravation du déficit de l’État le porte à un niveau de 222,1 milliards d’euros, ce qui est un niveau historiquement élevé. Le déficit budgétaire le plus élevé connu dans le passé est celui afférent à l’année 2009. Il s’était établi à 138 milliards d’euros. En 2019, il a atteint 92,7 milliards d’euros.

Chronique des déficits budgétaires depuis 2009

(en milliards d’euros)

Année

2009

2010*

2011

2012

2013

2014*

2015

2016

2017

2018

2019

Déficit

138,0

113,8

90,7

87,2

74,9

73,6

70,5

69,1

67,7

76,0

92,7

* hors programmes d’investissements d’avenir

Par rapport à la LFR 2, le déficit de l’État se dégrade de 36,6 milliards deuros.

Évolution du dÉficit de lÉtat en 2020

(en milliards d’euros)

 

LFI 2020

LFR 1

LFR 2

PLFR 3

Total

Montant

93,1

109,0

185,5

222, 1

222,1

Variation

+ 15,9

+ 76,4

+ 36,6

+ 128,9

Source : présent projet de loi de finances rectificative, première et deuxième lois de finances rectificatives pour 2020 et loi de finances initiale pour 2020.

Cette nouvelle aggravation du déficit de l’État se répartit de la façon suivante :

– 10,2 milliards d’euros de dépenses supplémentaires sur le champ du budget général de l’État et 2,4 milliards d’euros de dépenses des comptes spéciaux ;

– 23,2 milliards d’euros de pertes de recettes fiscales supplémentaires et 0,3 milliard d’euros de recettes non fiscales, du fait de l’aggravation de la conjoncture économique et de la perte d’impôt sur les sociétés (IS) entraînée par la mesure de remboursement anticipé des créances de report en arrière de déficit (« carry-back ») ;

– 0,6 milliard d’euros de prélèvements sur les recettes, à destination des collectivités territoriales (cf. le commentaire des articles 5 et 6 du présent PLFR) ;

S’agissant des recettes, le commentaire de l’article d’équilibre et de l’état A annexé au présent PLFR fournit une analyse détaillée de la perte de recettes supplémentaire prévue. La baisse totale des recettes fiscales, depuis les prévisions de la LFI 2020, s’établit désormais à 65,9 milliards deuros, répartis comme suit :

– 10,7 milliards d’euros enregistrés dès la LFR 1 ;

– 32 milliards d’euros au titre de la LFR 2 ;

– et 23,2 milliards au titre du présent PLFR.

S’agissant des dépenses de l’État, l’ouverture de crédits représente 10,2 milliards deuros sur le champ du budget général de l’État, hors mission Remboursements et dégrèvements.

La première LFR avait augmenté les crédits du budget général de 6,25 milliards d’euros, augmentant d’autant la norme de dépenses pilotables de l’État ([20]). La LFR 2 a encore augmenté ces crédits de 38 milliards d’euros supplémentaires, mais les 36 milliards d’euros des crédits de la mission Plan durgence face à la crise sanitaire ont été exclus de la norme de dépenses pilotables de l’État, compte tenu de leur caractère exceptionnel et temporaire ([21]).

L’analyse des ouvertures de crédits est proposée au commentaire de l’article d’équilibre et de l’état B annexé au présent PLFR. On peut distinguer les dépenses sous normes de celles qui en sont exclues :

– 2,6 milliards d’euros de dépenses sous normes sont prévus au bénéfice des différents budgets ministériels pour la lutte contre les effets de la crise sanitaire ;

– 7,5 milliards d’euros de crédits sont ouverts au titre de la mission Plan durgence face à la crise sanitaire : 3,3 milliards d’euros au titre de l’activité partielle ; 1,2 milliard d’euros au titre du fonds de solidarité à destination des petites entreprises en difficulté ; et 3 milliards d’euros pour compenser les exonérations de cotisations sociales supportées par les administrations de sécurité sociale.

Parallèlement, ce PLFR ne propose pas d’annulation supplémentaire de crédits. Ce choix a été effectué, selon l’exposé général des motifs, par souci de prudence budgétaire, malgré certaines prévisions de sous-consommations de crédits.

B.   LA FORMATION DU NOUVEAU SOLDE BUDGÉTAIRE

Les informations présentées ci-dessus conduisent à une évolution du solde budgétaire de l’État qui prend la forme suivante.

passage du solde LFR 2 au solde PLFR 3

(en milliards d’euros)

 

LFR 2

Variation

PLFR 3

 

LFR 2

Variation

PLFR 3

Dépenses

du budget général (I)

446,5

+ 10,9

457,4

Recettes

du budget général (II)

266,0

– 23,4

242,6

Dépenses nettes du budget général (hors PSR)

381,9

+ 10,2

392,1

Recettes fiscales nettes

250,3

– 23,2

227,1

Prélèvement sur recettes au profit de lUnion européenne

23,4

0

23,4

Recettes non fiscales

15,7

– 0,3

15,4

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

41,2

+ 0,6

41,8

Soldes des budgets annexes et des comptes spéciaux (III)

 4,9

– 2,4

 7,3

Déficit à financer

(I − II  III)

185,5

+ 36,6

222,1

Source : deuxième loi de finances rectificative pour 2020 présent projet de loi de finances rectificative pour 2020.

*

*     *


  1  

   FICHE  3 :
LES DISPOSITIFS GÉNÉRAUX DE SOUTIEN À LÉCONOMIE

Face aux conséquences économiques de la crise de la Covid-19 et des mesures prises pour endiguer la pandémie, le Gouvernement et le Parlement ont décidé de mesures générales et massives de soutien à l’économie. Elles ont principalement pris les formes suivantes :

– le renforcement du dispositif d’activité partielle ;

– le soutien aux très petites entreprises particulièrement touchées par la crise par un fonds de solidarité ;

– le report de charges fiscales et sociales.

I.   LE DISPOSITIF DACTIVITÉ PARTIELLE

Budgétairement, la principale mesure d’urgence de soutien à l’économie a pris la forme d’un renforcement considérable du dispositif dactivité partielle – également appelé dispositif de « chômage partiel ». Au total, le présent PLFR estime à 30,8 milliards deuros son coût pour les finances publiques, soit environ 1,4 % du PIB ([22]).

Le dispositif d’activité partielle a été renforcé pour les heures chômées à compter du 1er mars. Il évoluera pour les heures chômées à compter du 1er juin 2020 dans les secteurs pour lesquels l’activité reprend progressivement.

A.   LE PRINCIPE DU DISPOSITIF DACTIVITÉ PARTIELLE

● L’objectif de l’activité partielle est de permettre aux entreprises subissant les conséquences de circonstances exceptionnelles de réduire l’activité de leurs salariés pour diminuer leurs charges, afin de préserver l’emploi et de favoriser la reprise de leur activité dans des conditions normales une fois ces circonstances passées.

● Le principe du dispositif est double. Il permet d’une part une compensation par lemployeur de la perte de revenu occasionnée pour les salariés du fait de la réduction de leur temps de travail sous la durée légale, conventionnelle ou contractuelle. Elle s’opère par le versement d’une indemnité horaire correspondant à un pourcentage de leur rémunération antérieure (article L. 5122-1 du code de la sécurité sociale). Les indemnités d’activité partielle ne sont assujetties ni à la taxe sur les salaires ni aux cotisations sociales patronales et salariales, en vertu de l’article L. 5422-10 du code du travail. Elles sont en revanche, dans le cas général, assujetties à la contribution sociale généralisée (CSG) au taux de 6,2 % et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) au taux de 0,5 %.

Il consiste d’autre part à aider les employeurs à financer cette compensation par le versement d’une allocation dactivité partielle (article L. 5122‑1), dans la limite d’un contingent annuel d’heures par an et par salarié fixé par arrêté (article R. 5122-6). Cette allocation est financée conjointement par l’État et par l’Unédic, selon des modalités fixées par une convention (article L. 5122-1). Le versement de l’allocation est réalisé par l’Agence de services et de paiement (article R. 5122-14).

Le bénéfice du dispositif est soumis à l’autorisation du ministère en charge du travail (article L. 5122-1).

● Les principes du dispositif relèvent de la loi, mais plusieurs paramètres fondamentaux relèvent du pouvoir réglementaire, comme le montant de l’indemnité versée par l’employeur aux salariés en activité partielle, le montant de l’allocation d’activité partielle versée à l’employeur ou encore les modalités de la demande d’activité partielle.

B.   LE RENFORCEMENT ET LEXTENSION DU DISPOSITIF DACTIVITÉ PARTIELLE POUR LES MOIS DE MARS À MAI

1.   Le renforcement du dispositif par le décret du 25 mars 2020 relatif à l’activité partielle

Dans le cadre des règles législatives déjà en vigueur avant la crise, le Gouvernement a modifié plusieurs paramètres du dispositif pour intensifier son soutien et faciliter son recours, par le décret du 25 mars 2020 relatif à lactivité partielle ([23]).

a.   L’augmentation de l’allocation d’activité partielle

● Le Gouvernement n’a pas modifié le montant de l’indemnité d’activité partielle – c’est-à-dire de l’indemnité versée par l’entreprise aux salariés aux titres des heures chômées – par rapport au dispositif existant avant la crise. Ce montant est demeuré fixé à 70 % de la rémunération brute ([24]) (article R. 5122–18 du code du travail), soit environ 84 % de la rémunération nette et 100 % de la rémunération nette pendant les actions de formation mises en œuvre durant les heures chômées.

Après versement de l’indemnité d’activité partielle, si la rémunération d’un salarié est inférieure au SMIC net, alors l’employeur doit lui verser une indemnité complémentaire pour quelle atteigne le niveau du SMIC net (article L. 3232-5 du code du travail). Ainsi, les salariés dont la rémunération est comprise entre 1 et 1,13 SMIC perçoivent une indemnité horaire égale au SMIC net.

● Le décret du 25 mars 2020 a augmenté le soutien public aux employeurs en modifiant les paramètres de lallocation dactivité partielle dont ils bénéficient. Son montant était auparavant forfaitaire et égal à 7,74 euros par heure pour les entreprises de 250 salariés et moins, et à 7,23 euros par heure pour les entreprises de plus de 250 salariés. Ainsi, pour les salariés percevant lindemnité horaire minimale, qui est égale au SMIC net, c’est-à-dire à 8,03 euros par heure chômée, lallocation couvrait 96 % de lindemnité minimale pour les entreprises de moins de 250 salariés et 90 % pour les autres, le reste étant à la charge de l’employeur. Puisque le montant de l’allocation était forfaitaire, le taux de couverture était une fonction décroissante du salaire brut. Plus le salaire était élevé, plus l’entreprise prenait à sa charge une part importante de l’indemnité.

Pour les demandes d’allocation au titre des placements des salariés en activité partielle à compter du 1er mars 2020 et jusqu’au 1er juin, le montant horaire de lallocation est égal au montant de lindemnisation que verse lemployeur au salarié, dans la limite du montant de lindemnité à verser à des salariés percevant une rémunération brute de 4,5 SMIC. Autrement dit, le coût du dispositif d’activité partielle est totalement pris en charge par l’État et l’Unédic jusqu’à des salaires de 4,5 SMIC. Pour les salaires supérieurs à 4,5 SMIC, il est pris en charge dans la limite de l’allocation applicable pour un salaire de 4,5 SMIC, soit 4 849 euros pour un nombre d’heures chômées égal à la durée mensuelle légale du travail.

● Parallèlement, le Gouvernement a augmenté le contingent annuel dheures indemnisables au titre de lactivité partielle. Un arrêté du 26 août 2013 ([25]) fixe à 1 000 heures par an cette limite. Par dérogation, jusqu’au 31 décembre 2020, elle est relevée à 1 607 heures par an, soit la durée annuelle légale ([26]).

b.   La simplification du recours au dispositif

Le décret du 25 mars 2020 a en outre simplifié la procédure de recours à lactivité partielle pour lentreprise sous plusieurs aspects.

En premier lieu, il a assoupli la condition que le comité social et économique (pour les entreprises de plus de cinquante salariés) doive rendre un avis avant que l’entreprise formule la demande d’activité partielle auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte), en permettant que cet avis soit recueilli postérieurement à cette demande en cas de circonstances exceptionnelles.

En deuxième lieu, il a assoupli la condition du caractère préalable de la demande adressée à la Direccte au placement des salariés en activité partielle en cas de circonstances exceptionnelles. Désormais, dans de telles circonstances, l’employeur dispose d’un délai de trente jours à compter du placement des salariés en activité partielle pour adresser sa demande par tout moyen. Une application rétroactive du dispositif a ainsi été permise à compter du 1er mars 2020. En outre, le décret a élevé de six à douze mois la durée maximale d’activité partielle pour laquelle une demande peut être accordée.

En troisième et dernier lieu, il a ramené de quinze à deux jours le délai au terme duquel l’absence de réponse de l’administration à la demande d’activité partielle vaut acceptation implicite de la demande, et ce jusqu’au 31 décembre 2020.

Enfin, le décret a supprimé l’exclusion du bénéfice du dispositif des salariés au forfait en heures ou en jours. Les règles de calcul de l’indemnité et de l’allocation pour ces salariés ont été précisées par un décret du 16 avril 2020 ([27]).

2.   L’extension à titre temporaire du champ du dispositif

Sur habilitation de l’article 11 de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid‑19 ([28]), le Gouvernement a pris, par l’ordonnance du 27 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle ([29]) modifiée pour certaines de ses dispositions par l’ordonnance du 15 avril 2020 portant diverses dispositions sociales pour faire face à l’épidémie de Covid‑19 ([30]), des mesures législatives pour étendre le dispositif d’activité partielle à d’autres bénéficiaires et l’adapter aux circonstances de la crise actuelle.

● L’ordonnance a d’abord ouvert le dispositif d’activité partielle de droit commun aux salariés employés à domicile et aux assistants maternels en l’adaptant aux spécificités de ces emplois. Ainsi, l’indemnité due par l’employeur est égale à 80 % de la rémunération nette, mais elle ne peut être inférieure à la rémunération minimale applicable à chacune de ces deux professions.

LÉtat rembourse à 100 % lindemnité par l’intermédiaire d’un versement effectué par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) pour son compte. Ces dernières peuvent opérer une compensation entre le remboursement de l’allocation et le montant des cotisations et contributions sociales restant dues par le particulier employeur au titre des périodes antérieures au 12 mars 2020. L’Unédic ne finance pas cette allocation, à la différence du schéma de financement applicable à l’allocation d’activité partielle de droit commun. Un arrêté devra fixer les modalités de compensation de l’État aux URSSAF.

● L’ordonnance comporte également des dispositions relatives au régime fiscal de l’indemnité d’activité partielle. Elle exonère d’office de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) l’indemnité d’activité partielle perçue par les salariés employés à domicile et les assistants maternels.

Pour les autres salariés, elle prévoit l’application du taux de CSG de 6,2 % et du taux de CRDS de 0,5 %. Il existe néanmoins un mécanisme d’écrêtement qui a pour effet de diminuer le montant dû au titre de la CSG et de la CRDS si l’application de ces deux impositions a pour effet de rendre la rémunération du salarié, au titre de son activité et de l’indemnité perçue, inférieure au montant du SMIC brut.

● Elle adapte le dispositif pour les salariés des secteurs soumis aux régimes d’équivalence ([31]) en prévoyant l’indemnisation des heures d’équivalence compte tenu de l’impact important sur les secteurs en question.

● Elle étend le dispositif aux salariés des entreprises contrôlées par lÉtat (dont La Poste, la SNCF, EDF) et des entreprises des industries électriques et gazières soumis au statut national du personnel de ces industries (ENGIE notamment).

● Elle améliore la situation des salariés à temps partiel en permettant l’application de la rémunération mensuelle minimale. Autrement dit, elle permet que l’indemnité d’activité partielle ne puisse pas être inférieure au SMIC net, cette disposition ne leur étant pas applicable auparavant.

● Elle ouvre le dispositif aux salariés des régies dotées de la seule autonomie financière qui gèrent un service public à caractère industriel et commercial de remontées ou de pistes de ski.

3.   L’extension du dispositif d’activité partielle aux salariés en isolement pour cause de vulnérabilité et aux salariés sans solution de garde d’enfants

La LFR 2 a prévu l’application à compter du 1er mai 2020 du dispositif dactivité partielle aux salariés dans limpossibilité de continuer à travailler :

– parce qu’ils présentent un risque de développer une forme grave d’infection liée à la Covid-19 ;

– ou parce qu’ils sont parents d’un enfant de moins de seize ans ou d’une personne en situation de handicap faisant lui-même l’objet d’une telle mesure.

Ces salariés bénéficiaient à titre exceptionnel d’indemnités journalières sans avoir à remplir les conditions de droit commun ([32]). Ils bénéficiaient également de l’extension du dispositif de l’indemnité complémentaire versée par l’employeur en cas d’absence au travail justifié par l’incapacité résultant d’une maladie ou d’un accident ([33]) aux salariés de plus d’une année d’ancienneté.

Versée par l’employeur à l’issue d’un délai de carence de sept jours, le montant de cette allocation est fixé de sorte qu’ajouté aux indemnités journalières, l’ensemble atteigne 90 % de la rémunération brute du salarié les trente premiers jours, puis les deux tiers de cette rémunération les trente jours suivants, ces durées d’indemnisation pouvant être majorées en fonction de l’ancienneté dans l’entreprise. Les salariés d’une ancienneté inférieure à six ans ne perçoivent donc plus cette indemnité à l’issue du 60e jour d’arrêt dans le droit commun.

Pour ces personnes qui bénéficiaient des indemnités journalières et de l’indemnité complémentaire, le dispositif dactivité partielle sest substitué au dispositif de lindemnité journalière ([34]).

Le passage d’un régime à l’autre a permis aux salariés vulnérables et aux salariés en arrêt maladie pour garde d’enfants d’éviter une perte de rémunération. En effet, l’indemnité complémentaire due par l’employeur est diminuée au bout de trente jours de sorte que le revenu de remplacement est abaissé de 90 % du salaire brut aux deux tiers du salaire brut, puis à 50 % au bout de soixante jours. Le niveau de l’indemnité d’activité partielle atteint 70 % du salaire brut, sans qu’il puisse être inférieur au SMIC net.

C.   LÉVOLUTION DU DISPOSITIF POUR LES HEURES CHÔMÉES À COMPTER DU 1er JUIN 2020

● Le Gouvernement a annoncé souhaiter une évolution du dispositif d’activité partielle qui accompagnerait la reprise progressive d’activité, pour les heures chômées à compter du 1er juin. Il a engagé une discussion avec les partenaires sociaux sur le sujet ([35]).

L’article 1er de la loi relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures d’urgence ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne ([36]) habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour adapter le dispositif d’activité partielle à la reprise d’activité.

Sur ce fondement, l’ordonnance du 24 juin 2020 relative à l’adaptation du taux horaire de l’allocation d’activité partielle ([37]) a prévu que « le taux horaire de l’allocation d’activité partielle peut être modulé en fonction des secteurs d’activité et des caractéristiques des entreprises compte tenu de l’impact économique de la crise sanitaire, à compter du 1er juin 2020 et jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard le 31 décembre 2020 ». Selon le projet de décret soumis le 12 juin 2020 à la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP) ([38]), ces nouvelles règles seraient applicables pour les placements en activité partielle effectués jusqu’au 30 septembre 2020.

● Dans le cas général, et selon le projet de décret précité, le taux horaire de l’allocation d’activité partielle devrait être fixé à 60 % au lieu de 70 % de la rémunération brute horaire, dans la limite des rémunérations atteignant 4,5 SMIC. L’indemnité d’activité partielle versée aux salariés resterait fixée à 70 % de la rémunération horaire brute. La différence sera donc à la charge de l’employeur. Le niveau de prise en charge par les finances publiques sera donc abaissé de 100 % à 85 % de l’indemnité.

● Toutefois, comme annoncé par le Gouvernement, l’ordonnance prévoit un taux horaire majoré pour les employeurs exerçant leur activité principale dans certains secteurs :

– les secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture, du transport aérien et de l’évènementiel, particulièrement affectés par les conséquences économiques et financières de la propagation de l’épidémie de covid–19 au regard de la réduction de leur activité en raison notamment de leur dépendance à l’accueil du public ;

– les secteurs d’activité qui dépendent de ceux mentionnés au paragraphe précédent et qui ont subi une très forte baisse de chiffre d'affaires, dont les modalités d’appréciation seront fixées par décret. Le projet de décret précité fixerait le seuil minimal de baisse de chiffre d’affaires à 80 % durant la période comprise entre le 15 mars et le 15 mai ([39]), cette diminution étant appréciée soit par rapport au chiffre d’affaires constaté au cours de la même période de l’année précédente, soit par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen de l’année 2019 ramené sur deux mois :

– d’autres secteurs d’activité que ceux mentionnés ci-dessus et qui exercent une activité qui implique l’accueil du public et qui est interrompue du fait de la propagation de l’épidémie de Covid-19, à l'exclusion des fermetures volontaires.

La liste des secteurs concernés sera fixée par décret.

Selon le projet de décret précité ([40]), ces secteurs continueraient à bénéficier du dispositif d’activité partielle renforcé, prévoyant une indemnité d’activité partielle à 70 % de la rémunération brute, intégralement prise en charge par l’État et par l’Unédic.

D.   LIMPACT BUDGÉTAIRE

● Le présent PLFR prévoit une ouverture de crédits à hauteur de 3,3 milliards deuros en autorisations d’engagements et en crédits de paiement sur le programme « Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire » de la mission Plan durgence face à la crise sanitaire, correspondant à une augmentation prévisionnelle de 4,95 milliards deuros de son coût pour les finances publiques, en tenant compte de la part prise en charge par l’Unédic. Le Gouvernement a en effet indiqué que l’Unédic prendrait à sa charge un tiers du coût total du dispositif selon les modalités fixées par une convention qui n’a pas encore été signée ([41]).

Au total, le dispositif coûterait ainsi 30,75 milliards deuros. À ce montant s’ajouteront les pertes de recettes s’expliquant par l’exonération de cotisations sociales salariales et patronales et de taxe sur les salaires des indemnités de chômage partiel.

Estimation du coût direct pour les finances publiques du dispositif d’activité partielle

(en millions d’euros)

 

Ouverture de crédits sur le budget général de lÉtat

Part correspondante à la charge par lUnédic

Total

LFR 1

5 500

2 750

8 250

LFR 2

11 700

5 850

17 550

PLFR 3

3 300

1 650

4 950

Total

20 500

10 250

30 750

Note : il est supposé que l’Unédic prenne en charge un tiers du coût total du dispositif pour les finances publiques.

Source : commission des finances, d’après la LFR 1, la LFR 2 et le présent PLFR.

● Il existe une incertitude quant au coût total du dispositif pour l’année 2020 en raison de l’évolution du dispositif et du taux de recours. Le taux de recours au titre des mois de mars et avril n’était d’ailleurs pas connu avec précision à la date du 5 juin.

En effet, les demandes d’autorisation préalable faites par les entreprises auprès des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) ne se traduisent pas dans leur totalité par des mises en activité partielle. Ce n’est qu’au moment de la réception par l’Agence de services et de paiement des demandes d’indemnisation que l’on connaît avec précision le taux de « transformation » des demandes d’autorisation en demandes d’indemnisation. Or, les employeurs disposent d’un délai d’un an pour adresser à l’ASP une demande d’indemnisation à compter du terme de la période couverte par l’autorisation de recours à l’activité partielle.

Selon une note de l’Unédic ([42]), à la date du 5 juin 2020, les demandes d’indemnisation ont été faites pour 6,1 millions de salariés pour 281 millions d’heures, au titre du mois de mars, soit 52 % du volume total d’heures ayant fait l’objet d’une demande, pour un coût total exécuté de 2,8 milliards deuros (hors particuliers employeurs). L’Unédic estime qu’en définitive, en incluant les demandes d’indemnisation qui n’ont pas encore été transmises, 7,2 millions de salariés seraient concernés par l’activité partielle au mois de mars, pour un coût global de 3,3 milliards deuros (hors particuliers employeurs), dont 1,1 milliard d’euros pour l’Unédic.

Le dispositif est monté en charge en avril. En effet, au titre du mois d’avril, les demandes d’indemnisation ont concerné 6,2 millions de salariés pour 620 millions d’heures. Les dépenses indemnisées atteignaient 6,3 milliards d’euros (hors particuliers employeurs). 9 millions de salariés pourraient finalement être concernés par l’activité partielle au mois d’avril pour un coût total autour de 8,6 milliards deuros (hors particuliers employeurs).

Données disponibles sur le chômage partiel pour les mois de mars et avril

 

Mars

Avril

Nombre d’établissements ayant fait une demande d’autorisation d’activité partielle

1,075 million

1,249 million

Part d’établissements qui ont fait une demande d’indemnisation parmi les établissements ayant demandé une autorisation d’activité partielle

90 %

81 %

Effectifs salariés concernés par les demandes d’autorisation d’activité partielle

10,7 millions

12,2 millions

Salariés effectivement au chômage partiel (demandes d’indemnisation effectuées)

6,1 millions

6,2 millions

Volume d’heures de chômage partiel demandées dans les demandes d’autorisation d’activité partielle

539 millions

1 535 millions

Heures effectivement consommées (demandes d’indemnisation effectuées)

281 millions

619 millions

Montant dindemnisation demandé au 5 juin par les établissements (demande dindemnisation) pour le mois (dépenses État + Unédic)

2,8 Mds€

6,3 Mds€

Estimation du nombre total de salariés concernés pour le mois

7,2 millions

9,0 millions

Estimation du montant total dindemnisation pour le mois (État + Unédic)

3,3 Mds€

8,6 Mds€

Source : Unédic, « Point de situation sur l’utilisation de l’activité partielle », données au 5 juin 2020, 9 juin 2020.

L’Unédic estime donc qu’au total, le dispositif aurait un coût direct de 11,9 milliards deuros pour l’État et l’Unédic au titre des heures chômées en mars et en avril.

Pour le mois de mai, les données disponibles n’étaient pas suffisamment robustes au 5 juin pour être significatives d’une tendance quant au recours au dispositif pour ce mois. Le nombre d’établissements ayant déposé une demande d’autorisation d’activité partielle au mois de mai est stable par rapport au mois d’avril (1,2 million), tout comme le nombre de salariés concernés par une demande d’activité partielle (12,2 millions pour le mois de mai après 12,0 millions pour le mois d’avril). En revanche, le nombre d’heures d’activité partielle demandées est en recul de 19 % (1 245 millions d’heures demandées au titre du mois de mai après 1 535 millions pour le mois d’avril) en raison du déconfinement progressif intervenu à compter du 11 mai. On peut donc estimer que le coût du dispositif au titre du mois de mai sera inférieur au coût estimé au titre du mois d’avril, soit 8,6 milliards d’euros.

Au total, au titre des mois de mars, avril et mai, le dispositif d’activité partielle aurait un coût direct inférieur à 20,5 milliards deuros.

II.   LE FONDS DE SOLIDARITÉ POUR LES ENTREPRISES

Afin de soutenir les petites entreprises durement frappées par la crise, le Gouvernement a créé, sur habilitation parlementaire, un fonds de solidarité dont l’objet est de leur verser des aides directes, par l’ordonnance du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation ([43]). Les modalités d’attribution des aides et les conditions d’éligibilité ont été fixées par le pouvoir réglementaire ([44]).

Financé à la fois par l’État, par les régions et collectivités d’outre-mer et par des personnes morales de droit privé, l’abondement du fonds était initialement estimé par le Gouvernement à 1 milliard deuros. Son montant a progressivement été réévalué à la hausse pour permettre sa prolongation au‑delà du seul mois de mars, l’élargissement des critères d’éligibilité à ses aides et l’augmentation du montant de ces dernières.

Le présent PLFR propose d’ouvrir 1,2 milliard deuros de crédits budgétaires sur le programme « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise » qui s’ajoutent aux 6,25 milliards d’euros ouverts en cumulé par la LFR 1 et la LFR 2 et aux quelque 700 millions d’euros qui ont abondé ce programme par voie de fonds de concours. Au total, compte tenu des ouvertures constatées et des engagements pris, le montant des crédits disponibles au titre du fonds atteindrait 8,35 milliards deuros.

A.   LE PRINCIPE DU FONDS DE SOLIDARITÉ

L’ordonnance du 25 mars 2020 qui a créé ce fonds a été prise sur le fondement d’une habilitation de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid‑19 ([45]), autorisant le Gouvernement à prendre toute mesure « daide directe ou indirecte à des personnes dont la viabilité est mise en cause, notamment par la mise en place de mesures de soutien à la trésorerie de ces personnes ainsi que dun fonds ».

Initialement institué pour une durée de trois mois, prolongeable pour une durée d’au plus trois mois supplémentaires par le pouvoir réglementaire, sa durée a finalement été allongée jusqu’au 31 décembre 2020 par une ordonnance du 10 juin 2020 ([46]). Le pouvoir réglementaire peut encore prolonger sa durée pour une durée de trois mois supplémentaires au maximum.

Le fonds a pour objet le versement daides financières aux entreprises particulièrement touchées par la crise, étant précisé que les entreprises en question sont « les personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique », aux termes de l’article 1er de l’ordonnance du 25 mars 2020 précitée. Il n’existe donc pas de critère restrictif touchant au statut des entreprises.

La loi prévoit qu’il est financé par l’État et, sur une base volontaire, par les régions et toute autre collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI). Tant le montant que les modalités de cette contribution sont définis par une convention conclue entre l’État et chaque collectivité territoriale.

Le fonctionnement du fonds relève du pouvoir réglementaire, l’ordonnance du 25 mars 2020 renvoyant à un décret le soin de fixer :

– le champ d’application du dispositif ;

– les conditions d’éligibilité et d’attribution des aides ;

– le montant de ces aides ;

– les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds.

Le versement de l’aide du fonds, opéré par la direction générale des finances publiques (DGFiP), se fait sur une base déclarative, les bénéficiaires du fonds étant dans l’obligation de conserver les documents attestant du respect des conditions d’éligibilité au fonds et du correct calcul du montant de l’aide pendant cinq ans, afin de permettre un contrôle a posteriori de la régularité des versements.

B.   LE FONCTIONNEMENT DU FONDS

Les règles relatives aux versements du fonds de solidarité ont été précisées par le décret du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation ([47]), qui a lui-même été modifié par un décret du 12 mai 2020 ([48]).

1.   Le bénéfice du fonds au titre du mois de mars

Le fonds de solidarité s’adresse aux très petites entreprises (TPE), aux travailleurs indépendants, aux micro-entrepreneurs et aux professions libérales.

a.   Le champ des bénéficiaires

● Étaient éligibles au fonds de solidarité au titre du mois de mars les entreprises, définies comme des personnes physiques ou morales de droit privé résidentes fiscales françaises et exerçant une activité économique, satisfaisant aux conditions cumulatives suivantes :

– l’effectif de l’entreprise est inférieur ou égal à dix salariés ;

– le chiffre d’affaires du dernier exercice clos est inférieur à 1 million d’euros ou, pour les entreprises n’ayant pas encore clos d’exercice, le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020 est inférieur à 83 333 euros, montant correspondant à un douzième d’un million d’euros ;

– le bénéfice imposable du dernier exercice clos, majoré le cas échéant des sommes versées au dirigeant, est inférieur à 60 000 euros – ou, pour les entreprises n’ayant pas encore clos d’exercice, le bénéfice imposable à la date du 29 février, sur leur durée d’exploitation et ramené à douze mois est inférieur à 60 000 euros.

● Le décret prévoyait l’exclusion du bénéfice du fonds de plusieurs catégories d’entreprises :

– les entreprises ayant débuté leur activité à compter du 1er février 2020 ;

– les entreprises en situation de cessation de paiement au 1er mars 2020 ;

– les entreprises contrôlées par une société commerciale au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce ;

– les personnes physiques titulaires au 1er mars 2020 d’un contrat de travail à temps complet ou d’une pension de vieillesse ou qui ont bénéficié au cours de la période comprise entre le 1er et le 31 mars 2020 d’indemnités journalières de sécurité sociale supérieures à 800 euros, ainsi que les personnes morales qui ont un dirigeant majoritaire dans une de ces situations ;

– les entreprises en difficulté au sens du droit de l’Union européenne ([49]) à la date du 31 décembre 2019, notamment les entreprises qui étaient en procédure collective dinsolvabilité ou qui remplissaient les conditions pour être en procédure collective à cette date ou dont les capitaux propres étaient inférieurs à la moitié du capital social.

b.   Le montant des aides versées

● Le fonds verse des aides se décomposant en deux volets :

– un premier volet correspondant à une aide pour les entreprises subissant une baisse importante de leur chiffre d’affaires ;

– un second volet correspondant à une aide complémentaire forfaitaire, dont l’instruction des demandes est confiée aux régions.

● Pour les versements effectués au titre du mois de mars, étaient éligibles au premier volet du dispositif :

– d’une part, les entreprises qui ont fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public intervenue entre le 1er mars et le 31 mars 2020 ;

– d’autre part, les entreprises dont le chiffre d’affaires a subi une baisse importante au mois de mars 2020. Il s’agit des entreprises qui ont subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % entre le 1er mars et le 31 mars 2020 par rapport à la même période de l’année précédente. Pour les entreprises créées après le 1er mars 2019, le chiffre d’affaires de référence est le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020.

L’aide versée s’est élevée à 1 500 euros pour les entreprises qui ont subi une baisse de chiffre d’affaires supérieure ou égale à 1 500 euros. Pour les entreprises dont la baisse du chiffre d’affaires a été inférieure à 1 500 euros, le montant de l’aide est égal à leur perte de chiffre d’affaires.

● Les entreprises pouvaient bénéficier d’une aide forfaitaire de 2 000 euros en complément de la première aide dès lors qu’elles satisfaisaient aux conditions suivantes :

– elles ont bénéficié de l’aide du premier volet du dispositif ;

– elles emploient au moins un salarié en contrat à durée indéterminée ou en contrat à durée déterminée ;

– elles sont dans l’impossibilité de régler leurs dettes exigibles dans les trente jours ;

– leur demande d’un prêt de trésorerie d’un montant « raisonnable » faite à compter du 1er mars 2020 auprès de leur banque a été refusée ou est restée sans réponse dans un délai de dix jours.

2.   Le renforcement du fonds pour les aides versées au titre des mois d’avril et de mai

● Par un décret du 16 avril 2020 ([50]), le Gouvernement a :

– prolongé le dispositif pour les pertes subies par les entreprises au mois d’avril ;

– ouvert le dispositif aux entreprises en difficulté à l’exception de celles se trouvant en liquidation judiciaire au 1er mars 2020 ;

– assoupli le critère de chiffre d’affaires en permettant que soit pris en compte le chiffre d’affaires mensuel moyen de l’année 2019 pour le critère de baisse du chiffre d’affaires de 50 % en avril 2020 ;

– doublé le seuil de 60 000 euros du résultat imposable pour les entreprises en nom propre si le conjoint du chef d’entreprise exerce sous statut de conjoint collaborateur ;

– augmenté le montant de l’aide perçue au titre du second volet en la modulant en fonction du chiffre d’affaires et en prévoyant qu’elle puisse atteindre 5 000 euros.

● Après l’adoption de la LFR 2 et conformément à des engagements du Gouvernement pris devant la représentation nationale, le fonds de solidarité a été de nouveau renforcé à compter des pertes enregistrées au titre du mois d’avril et certains de ses critères d’éligibilité ont été assouplis par un décret du 12 mai 2020 ([51]).

Ainsi, pour les versements du fonds à compter des pertes d’avril, le Gouvernement a, par voie réglementaire :

– étendu le bénéfice du fonds aux entreprises créées en février 2020 ;

– étendu le bénéfice du fonds aux entreprises dont le dirigeant a perçu moins de 1 500 euros de pension de retraite ou d’indemnités journalières durant le mois considéré ;

– ouvert le bénéfice du second volet du fonds aux entreprises ayant fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public qui n’ont pas de salarié et ont un chiffre d’affaires annuel supérieur à 8 000 euros.

C.   LA NÉCESSITÉ DE PRÉVOIR UN FINANCEMENT COMPLÉMENTAIRE DU FONDS POUR SA PROLONGATION SECTORIELLE AU-DELÀ DU MOIS DE MAI

● À la date du 16 juin 2020, le fonds de solidarité avait versé 3,5 millions daides pour un montant total de 4,65 milliards deuros. Les secteurs qui ont le plus bénéficié de ces aides sont les suivants :

– le commerce, pour 762 millions d’euros (16 % des aides versées) ;

– l’hébergement et restauration, pour 579 millions d’euros (12 %) ;

– la construction, pour 548 millions d’euros (12 %) ;

– les activités spécialisées scientifiques et techniques, pour 444 millions d’euros (10 %) ;

– la santé humaine et l’action sociale, pour 408 millions d’euros (10 %) ([52]).

Le montant total des crédits ouverts sur le programme budgétaire « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire » s’élève à 6,94 milliards deuros ([53]). Aux crédits ouverts en LFR 1 et en LFR 2 (6,25 milliards d’euros), se sont en effet ajoutées des contributions volontaires par la voie de fonds de concours (694 millions d’euros).

Les régions ont ainsi pris un engagement de contribuer au fonds à hauteur de 500 millions d’euros. À la date du 16 juin 2020, selon les éléments transmis au rapporteur général, le montant de leur contribution était de l’ordre de 400 millions d’euros.

De même, la Fédération française de lassurance (FFA) a annoncé que ses membres s’engageaient à contribuer à hauteur de 400 millions deuros au fonds ([54]). Un premier versement de 200 millions d’euros a été enregistré. Selon la FFA, la seconde tranche de la contribution des assureurs est en cours de levée par le réseau. Enfin, des entreprises privées d’autres secteurs ont également annoncé souhaiter contribuer au fonds de solidarité ([55]).

Ouvertures de crédits sur le programme « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire » à la date du 16 JUIN 2020

Nature des ouvertures

Fondement juridique

Montant
(en millions deuros)

Dotation initiale

LFR 2020-1

750,0

Fonds de concours

Arrêté du 9 avril 2020

103,1

Fonds de concours

Arrêté du 15 avril 2020

85,0

Dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI)

Décret n° 2020-443 du 17 avril 2020

100,0

Virement (12 LOLF) depuis le
P156 "Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local"

Décret n° 2020-444 du 17 avril 2020

15,0

Abondement LFR 2

LFR 2020-2

5 500,0

Fonds de concours

Arrêté du 20 avril 2020

20,0

Fonds de concours

Arrêté du 27 avril 2020

200,4

Fonds de concours

Arrêté du 5 mai 2020

120,7

Fonds de concours

Arrêté du 12 mai 2020

21,4

Fonds de concours

Arrêté du 19 mai 2020

7,1

Fonds de concours

Arrêté du 27 mai 2020

20,6

Fonds de concours

Arrêté du 3 juin 2020

1,0

Sous-total (1)

6 944,3

Source : Chorus, lois de finances rectificatives et site legifrance.fr

Le montant des crédits disponibles au 16 juin, correspondant à la différence entre le montant total des crédits ouverts et le montant des crédits consommés, s’est établi à 2,29 milliards deuros.

● Conformément à ses engagements et en cohérence avec les plans sectoriels qu’il a présentés, le Gouvernement a prolongé le fonds de solidarité pour certaines entreprises et a modifié ses caractéristiques. Ainsi, un décret du 20 juin 2020 ([56]) a ouvert le dispositif au titre des pertes du mois de mai 2020 aux entreprises de plus de vingt salariés ayant enregistré un chiffre daffaires inférieur à 2 millions deuros dès lors qu’elles appartiennent aux secteurs particulièrement touchés par la crise – hôtels, cafés, restaurants, tourisme, évènementiel, sport, culture.

Il a également ouvert le fonds au titre des pertes du mois de mai aux entreprises remplissant les mêmes conditions de seuil que les précédentes, appartenant à des secteurs dépendant des secteurs mentionnés ci–dessus ([57]) et qui ont subi une perte de chiffre d’affaires de plus de 80 % entre le 15 mars 2020 et le 15 mai 2020.

Pour les entreprises ayant au moins un salarié appartenant à ces secteurs, le plafond de l’aide accordée au titre du second volet du fonds est porté à 10 000 euros et la condition de refus de prêt est supprimée.

Les entreprises créées entre le 1er et le 10 mars 2020 sont rendues éligibles au fonds au titre des pertes du mois de mai 2020 et les conditions de cumul de l’aide avec des indemnités journalières et des pensions de retraite sont assouplies.

Le décret fixe au 31 juillet 2020 le délai de dépôt des demandes au titre du premier volet et au 15 août 2020 celui des demandes au titre du second volet.

Pour les artistes auteurs dont l’activité n’est pas domiciliée dans leur local d’habitation, les conditions d’emploi d’un salarié et de refus de prêt pour accéder au second volet du fonds sont supprimées.

Enfin, le décret offre la possibilité aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de financer une aide complémentaire destinée aux entreprises bénéficiaires du second volet situées sur leur territoire. Les modalités de ce financement sont définies par des conventions conclues entre le préfet et l’exécutif de la collectivité ou de l’EPCI en question.

En outre, le Gouvernement a annoncé que le fonds serait ouvert pour les entreprises des secteurs particulièrement touchés jusquà la fin de lannée 2020.

Pour les autres entreprises, le bénéfice du fonds sarrête au 31 mai 2020.

Pour permettre cette prolongation, le Gouvernement propose donc d’ouvrir 1,2 milliard d’euros supplémentaires sur le programme, portant à 7,95 milliards deuros la contribution des finances publiques au fonds.

III.   LES MESURES DE SOUTIEN À LA TRÉSORERIE DES ENTREPRISES

Pour soutenir au maximum les entreprises dans le contexte de crise actuelle, et parallèlement aux autres dispositifs prévus tels que le renforcement de l’activité partielle, les aides du fonds de solidarité ou encore les prêts garantis par l’État, le Gouvernement a mis en place différentes mesures de trésorerie, consistant essentiellement en :

– des reports de charges fiscales et sociales ;

– des remboursements accélérés de certaines créances fiscales ;

– des reports de certaines charges liées à l’activité de l’entreprise, telles que les factures et les loyers professionnels ;

Il est renvoyé au rapport du Rapporteur général sur le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2020 pour tout complément sur les thèmes faisant l’objet des présents développements ([58]).

Par ailleurs, il a semblé utile dans le cadre de la présente fiche d’étudier plus en détail les mesures prévues par les entreprises d’assurance dans le contexte de la pandémie de Covid-19.

A.   LES REPORTS SANS PÉNALITÉ DÉCHÉANCES FISCALES ET SOCIALES

Dès le mois de mars 2020, le Gouvernement a offert la possibilité aux entreprises le jugeant utile de reporter certaines échéances relatives aux charges fiscales et sociales.

1.   Les reports de charges fiscales

● S’agissant des charges fiscales, le report concerne les impôts directs, et plus précisément :

– l’impôt sur les sociétés, au titre duquel sont prévus :

● le report jusqu’au 15 juin 2020 de l’acompte dû au plus tard au 15 mars 2020 ;

● le report jusqu’au 30 juin 2020 de la déclaration de résultat et du solde des exercices clos entre le 31 décembre 2019 et le 29 février 2020 ;

● le report jusqu’au 31 juillet 2020 de la déclaration de résultat et du solde des exercices clos au 31 mars 2020 ;

– la taxe sur les salaires, dont les versements dus en mars, avril et mai font chacun l’objet d’un report de trois mois ;

– la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), pour laquelle sont prévus :

● le report jusqu’au 30 juin 2020 de la déclaration de valeur ajoutée et des effectifs prévue en principe début mai ;

● le report au 30 juin 2020 du paiement du solde de CVAE en principe dû début mai, s’agissant des entreprises débitrices – pour les entreprises créancières, la régularisation intervient aux dates normalement prévues ;

– la cotisation foncière des entreprises (CFE) ([59]), au titre de laquelle sont prévus :

● le report au 15 décembre 2020 de l’acompte dû le 15 juin 2020 pour les entreprises des secteurs de l’hôtellerie, de la restauration, du tourisme et de l’événementiel ;

● la suspension des versements mensuels – pour les entreprises mensualisées – aboutissant à reporter entièrement les sommes dues lors du solde, le 15 décembre 2020.

● En outre, des assouplissements supplémentaires ont été prévus en matière dIS ([60]) s’agissant des acomptes dus à compter de juin 2020 – c’est-à-dire, pour une entreprise dont l’exercice coïncide avec l’année civile, les deuxième à quatrième acomptes dus au plus tard les 15 juin, 15 septembre et 15 décembre 2020.

Chacun de ces trois acomptes peut être modulé en retenant une marge d’erreur, de la façon suivante :

– s’agissant du deuxième acompte, la somme de ce dernier et du premier acompte doit correspondre à au moins la moitié de l’IS prévisionnel dû au titre de l’exercice en cours, avec une marge d’erreur de 30 % ;

– s’agissant du troisième acompte, la somme de ce dernier et des deux précédents doit correspondre à au moins 75 % de l’impôt prévisionnel dû, avec une marge d’erreur de 20 % :

– enfin, s’agissant du dernier acompte, la somme des quatre acomptes doit correspondre au moins à l’IS prévisionnel dû, avec une marge d’erreur de 10 %.

Par ailleurs, toujours en matière d’IS, les entreprises ayant reporté leur acompte de mars 2020 – alors dû en juin – voient leur acompte de juin suspendu, afin d’éviter une double charge ce mois-ci – cet acompte suspendu sera alors dû en septembre, les facultés de modulations précédemment décrites étant applicables.

● Pour les grandes entreprises ([61]), ces assouplissements sont subordonnés au respect de leur engagement de responsabilité s’agissant du versement de dividendes et du rachat d’actions.

Les allégements fiscaux prévus par le droit commun

Au-delà des reports d’impôts directs, il est rappelé que le droit commun permet déjà aux entreprises qui en éprouvent le besoin de bénéficier de certaines facilités de paiement, voire d’allégements.

D’une part, les acomptes de certains impôts calculés à partir des résultats de l’exercice précédent peuvent être modulés pour tenir compte de l’activité de l’exercice en cours. Tel est le cas, à titre d’exemple, de l’IS ou des acomptes d’impôt sur le revenu dans le cadre du prélèvement à la source.

D’autre part, les entreprises faisant face à des difficultés de paiement de leurs charges fiscales et sociales peuvent obtenir des facilités et délais de paiement ;

Enfin, et en application de l’article L. 247 du livre des procédures fiscales, les entreprises qui se trouvent dans l’impossibilité de payer les impôts directs dus en raison de leur situation de gêne ou d’indigence peuvent obtenir des remises totales ou partielles des montants dus.

2.   Les reports de charges sociales

Les cotisations dont le versement incombe à lemployeur peuvent faire lobjet dun report de trois mois, là aussi sans que cela nentraîne de pénalité. Sont concernées aussi bien les cotisations patronales que les cotisations salariales, prélevées par l’employeur sur le salaire brut des salariés et versés ensuite aux organismes de recouvrement.

● Pour mémoire, les cotisations sociales patronales sont versées au cours du mois suivant la période d’emploi rémunérée au titre de laquelle elles sont dues :

– au plus tard le 5 du mois pour les entreprises d’au moins 50 salariés dont la paye est versée au cours du même mois que la période d’emploi ;

– au plus tard le 15 du mois pour les entreprises de moins de 50 salariés et les entreprises d’au moins 50 salariés en décalage de paye.

Par ailleurs, les cotisations dues par les travailleurs indépendants sont versées le 5 ou le 20 de chaque mois en cas de paiement mensuel ou, en cas d’option pour le paiement trimestriel, les 5 février, 5 mai, 5 août et 5 novembre.

● Les premières échéances éligibles aux reports étaient celles dues entre le 15 mars et le 5 avril 2020. Le dispositif de report a fait l’objet d’une première prolongation pour les échéances restantes davril ([62]), puis d’une nouvelle prolongation pour les échéances du mois de mai 2020 ([63]). Les reports étaient de droit – sous réserve, pour les grandes entreprises, de respecter leurs engagements précédemment mentionnés.

Le dispositif a été prolongé à nouveau pour le mois de juin, les reports des échéances dues les 5 et 15 juin 2020 devant désormais faire l’objet d’une demande de la part des entreprises souhaitant en bénéficier – une acceptation tacite étant prévue en l’absence de réponse dans les deux jours qui suivent la demande. Le report demeure automatique pour les échéances dues en juin par les indépendants mensualisés ([64]).

● Enfin, il est rappelé à toutes fins utiles que les indemnités versées aux salariés placés en activité partielle sont exonérées de cotisations sociales et de taxe sur les salaires en application de l’article L. 5428-1 du code du travail.

Les exonérations, réductions et aménagements
en matière de cotisations sociales prévues à l’article 18 du présent projet de loi

Le présent projet de loi de finances rectificative prévoit, à son article 18, différents mécanismes de soutien en matière de cotisations sociales à travers :

– des exonérations de cotisations sociales pour quatre mois au bénéfice des entreprises de moins de 250 salariés des secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture, du transport aérien et de l’événementiel, ainsi que de celles relevant de secteurs dont l’activité est étroitement liée à ces derniers et qui ont subi une importante baisse de leur chiffre d’affaires ;

– des exonérations de cotisations sociales pour trois mois au bénéfice des entreprises de moins de 10 salariés ayant fait l’objet d’une fermeture administrative ;

– un crédit de cotisations sociales au bénéfice des entreprises éligibles aux exonérations précédemment mentionnées et égal à 20 % des salaires versés au titre des périodes couvertes par ces exonérations ;

– des réductions forfaitaires de cotisations sociales dues par les indépendants, les exploitants agricoles et les artistes auteurs ;

– des remises partielles de cotisations sociales pour les entreprises de moins de 50 salariés ayant subi une baisse de chiffre d’affaires d’au moins 50 % ;

– pour l’ensemble des entreprises et indépendants, des plans d’apurement permettant d’étaler sur une période pouvant aller jusqu’à 36 mois le paiement des cotisations sociales demeurant dues au 30 juin 2020.

Il est renvoyé au commentaire de cet article 18 pour tout complément.

3.   Des reports de charges de l’ordre de 30 milliards d’euros

Les entreprises se sont largement approprié les mécanismes de reports prévus par le Gouvernement, ainsi qu’en attestent les montants correspondant. Cela traduit l’utilité de ces mesures et leur importance pour soutenir les entreprises face à la crise et à ses conséquences.

● Au 4 juin 2020, près de 70 000 reports déchéances fiscales ont été réalisés, représentant un montant de près de 2,5 milliards deuros. Environ 40 % des montants reportés concernent les secteurs du commerce et de l’industrie manufacturière ([65]).

● S’agissant des charges sociales, le montant total des cotisations et contributions ayant fait lobjet dun report s’élève, au 12 juin 2020, à près de 25,5 milliards deuros ([66]).

● En tout, les reports de charges fiscales et sociales ont ainsi porté, à l’aune des données disponibles à la mi-juin 2020, sur 28 milliards deuros, allégeant dautant la trésorerie des entreprises.

B.   LES REMBOURSEMENTS ACCÉLÉRÉS DE CERTAINES CRÉANCES FISCALES

Parallèlement aux mécanismes de reports de charges fiscales et sociales, le Gouvernement a prévu d’accélérer le remboursement aux entreprises de certaines de leurs créances fiscales.

Cette mesure, qui s’ajoute aux autres dispositifs mis en œuvre, participe à l’allégement global de la trésorerie des entreprises en leur permettant de disposer plus rapidement de sommes auxquelles elles ont droit. Le gain de trésorerie global induit par ce dispositif est estimé à 23 milliards deuros d’après les données figurant dans le programme de stabilité pour 2020 ([67]).

Concrètement, sont concernés par ces remboursements accélérés :

– tous les crédits dimpôts restituables en 2020, incluant notamment le crédit d’impôt recherche (CIR), le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) ou encore les crédits d’impôts propres à un secteur, tels que ceux concernant certaines activités culturelles (cinéma, musique, spectacles vivants, jeux vidéo, etc.) ;

– les excédents dIS, lorsque les acomptes versés se révèlent supérieurs au montant d’IS effectivement dû ;

– les crédits de TVA, lorsque la TVA déductibles au titre des achats de l’entreprise excède la TVA collectée au titre des ventes.

C.   LES REPORTS DE PAIEMENT DES FACTURES ET LOYERS AFFÉRENTS AUX LOCAUX PROFESSIONNELS

● En complément de la batterie de mesures précédemment présentées, et en vertu du principe « zéro recette, zéro charge » et en application de l’ordonnance du 25 mars 2020 précisée par le décret du 31 mars 2020 ([68]), les indépendants et les très petites entreprises (TPE) éligibles au fonds de solidarité peuvent bénéficier du report de leurs factures deau, délectricité et de gaz ainsi que de leurs loyers afférents à leurs locaux professionnels.

Ces dispositions empêchent les fournisseurs d’eau, de gaz et d’électricité d’interrompre ou réduire leur fourniture pour défaut de paiement.

Elles permettent également de reporter les échéances dues entre le 12 mars 2020 et la fin de l’état d’urgence sanitaire – fixée au 10 juillet 2020. Le paiement de ces échéances est réparti sur celles postérieures au dernier jour du mois suivant la date de fin de l’état d’urgence sanitaire, pour une durée minimale de six mois.

Par ailleurs, les pénalités, intérêts de retard, dommages et intérêts, astreintes et clauses résolutoires, pénales ou de déchéance sont exclus en cas de défaut de paiement des loyers dont l’échéance intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire.

● Toujours en matière de loyers, le Gouvernement a obtenu des principales fédérations de bailleurs, de la Fédération française de l’assurance (FFA) et de la Caisse des dépôts et consignations l’annulation de trois mois de loyers pour les TPE et indépendants contraints de cesser leurs activités en raison des mesures de fermeture administrative ([69]).

Le dispositif fiscal d’incitation aux abandons de créances locatives
prévu par la deuxième loi de finances rectificative pour 2020

L’article 3 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2020 (1) a prévu, pour renforcer le soutien aux entreprises locataires à travers une incitation de leurs bailleurs, une modification temporaire des règles encadrant les abandons de créances.

En principe, les abandons de créances, c’est-à-dire la renonciation d’un créancier à exercer les droits que lui confère la créance qu’il détient à l’égard d’un débiteur, ne sont admis en déduction du résultat du créancier que s’ils sont consentis dans l’intérêt de son exploitation. Dans une telle hypothèse, le montant abandonné est déduit du résultat imposable de l’entreprise créancière, tandis qu’il constitue pour le débiteur un produit inclus dans le résultat de l’exercice durant lequel la dette est éteinte.

Par ailleurs, les entreprises débitrices auxquelles sont consentis des abandons de créances bénéficient de modalités particulières en matière de report en avant de déficit.

Les modalités prévues par la deuxième loi de finances rectificative pour 2020 prévoient que tout abandon de créances locatives afférentes à des immeubles donnés en location à une entreprise sans lien de dépendance avec le créancier, est déductible du résultat de ce dernier, dès lors que l’abandon est consenti entre le 15 avril et le 31 décembre 2020.

Ces modalités prévoient également la prise en compte de ces abandons de créances locatives pour la détermination du déficit reportable en avant selon les modalités prévues à l’article 209 du CGI.

(1) Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

● Il est enfin rappelé que les échéances de remboursement des crédits bancaires contractés par les entreprises peuvent faire l’objet d’un report de six mois, sans pénalité. Cette souplesse résulte d’un engagement du secteur bancaire français sous l’égide de la Fédération bancaire française (FBF) ([70]).

D.   LES MESURES DE SOUTIEN PRISES PAR LE SECTEUR DES ASSURANCES

L’implication du secteur des assurances dans la crise actuelle a suscité des débats nourris – et parfaitement légitimes – s’agissant du soutien apporté aux entreprises.

1.   L’engagement des assurances à hauteur de 3,8 milliards d’euros

Après de (trop) timides débuts, et une pression utile de la part du Gouvernement et de parlementaires de tout bord, le secteur des assurances a substantiellement accru les mesures prises pour aider les entreprises et plus généralement lensemble des assurés, aboutissant à un effort sélevant pour lheure à 3,8 milliards deuros  contre 3,2 milliards deuros initialement annoncés – dans le contexte de la crise liée au Covid-19.

a.   Les mesures de solidarité extracontractuelles prévues par les assurances

D’après les données à la disposition du Rapporteur général, au 9 juin 2020, le secteur assurantiel a fourni de manière extracontractuelle un effort de solidarité à hauteur de 2,3 milliards deuros – soit près d’un demi-milliard d’euros de plus que les engagements initiaux pris auprès du Gouvernement, fixés à 1,75 milliard d’euros – ayant bénéficié à plus d’un million d’entreprises et à 640 000 particuliers.

Ces engagements solidaires incluent :

– un abondement du fonds de solidarité à hauteur de 400 millions deuros, une première tranche de 200 millions d’euros ayant déjà été versée et la seconde étant en cours de levée au 9 juin 2020 ;

– des mesures collectives à hauteur de 230 millions deuros, comprenant notamment :

● le maintien de la garantie des contrats souscrits par les TPE ayant été administrativement fermées, y compris en cas de défaut de paiement des primes ;

● la suppression de trois mois de loyers pour les TPE en difficulté ;

● des extensions d’assurances, sans surprimes, notamment pour les personnes mobilisées par la pandémie (essentiellement du personnel médical), pour les chantiers arrêtés en raison de la crise, pour le matériel informatique des personnes en télétravail ;

– des mesures individuelles prises en faveur des assurés, pour un total de près de 1,7 milliard deuros, incluant notamment :

● le versement aux entreprises d’aides financières extracontractuelles destinées à compenser l’exclusion de la pandémie dans la garantie souscrite au titre des pertes d’exploitation ;

● des réductions de primes, des remboursements de primes déjà acquittées ou encore, pour les personnes en recherche d’emploi, des remises de cotisations ;

● le maintien de garanties sur les contrats santé et prévoyance pendant la mise en activité partielle et la prise en charge d’indemnités journalières au titre d’arrêts de travail pour garde d’enfant ;

● des dons pour soutenir la recherche et pour aider des associations ou encore des établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes (EHPAD).

b.   Les investissements prévus par les entreprises d’assurance

En plus de ces mesures extracontractuelles, les assurances se sont engagées à investir dans la relance de léconomie, à hauteur de 1,5 milliard deuros, dont 600 millions d’euros dédiés au secteur de la santé et 150 millions d’euros pour celui du tourisme.

Ces investissements reposent sur trois volets :

– 300 millions d’euros dédiés aux fonds « NOV » pour les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;

– 600 millions d’euros dédiés à de nouveaux fonds, en priorité pour les PME et les ETI ;

– 600 millions d’euros destinés à trois fonds investissant dans le secteur de la santé, notamment en matière de recherche, d’infrastructures et de logistique de santé.

c.   Les travaux sur un nouveau dispositif de couverture assurantielle

Parallèlement à ces mesures financières, les entreprises d’assurance participent aux travaux lancés par le Gouvernement sur le développement dune couverture assurantielle des événements exceptionnels, parmi lesquels les pandémies du type de celle qui frappe actuellement la planète ([71]).

Ces travaux se réalisent dans le cadre d’un groupe de travail associant la direction générale du Trésor, des organisations représentant les entreprises, des acteurs du secteur assurantiel (dont la FFA et la Caisse centrale de réassurance – CCR) ainsi que quatre parlementaires, deux députés et deux sénateurs.

Le 12 juin, la FFA a présenté la contribution des assurances sous la forme du dispositif « CATEX », pour « catastrophes exceptionnelles », régime inspiré de celui existant en matière de catastrophes naturelles. La FFA indique que les entreprises d’assurance et de réassurance privées sont prêtes à engager dans le cadre de ce dispositif 2 milliards d’euros de capacité annuelle d’indemnisation, montant au-delà duquel interviendrait la CCR ([72]).

2.   Des engagements ambitieux que le Parlement doit suivre avec attention

L’ensemble des engagements pris par le secteur de l’assurance, qu’il s’agisse de mesures financières ou de la préparation d’un nouveau régime assurantiel ambitieux, sont opportuns et bienvenus et témoignent des efforts consentis par le secteur assurantiel. Ils sont préférables, aux yeux du Rapporteur général et tant qu’ils se révèlent effectifs et adéquats, à des mesures plus coercitives tels que des hausses de fiscalité – dont le produit ne serait au demeurant pas nécessairement affecté au soutien des entreprises touchées par la crise.

Ces engagements ne doivent cependant pas conduire à donner un blanc-seing, mais faire l’objet d’un suivi permanent, en particulier de la part du Parlement, afin que ce dernier puisse vérifier que les mesures prises par les entreprises d’assurance sont à la hauteur des enjeux et, le cas échéant, identifier les lacunes et les marges de manœuvre.

Tel était la philosophie ayant conduit l’Assemblée nationale, notamment à l’initiative du Rapporteur général, à consacrer dans la deuxième loi de finances rectificative pour 2020 différents outils de suivi et de veille, dont celui prévu à l’article 25 de cette loi prévoyant la remise d’un rapport sur les engagements pris par les assurances et l’évolution de la sinistralité.

L’impact de la crise sur le secteur assurantiel :
des pertes estimées à plusieurs milliards d’euros en France

Les effets sur le secteur assurantiel de la crise actuelle, en particulier les mesures sanitaires prises telles que le confinement, ont nourri de vifs et importants débats, et parfois des spéculations. Certains ont mis en avant une probable baisse de la sinistralité, notamment en raison de la réduction significative du trafic routier et donc des accidents et dommages automobiles, d’autres ont appelé à plus de prudence, craignant une possible hausse de la sinistralité globale.

Dès le début du mois d’avril 2020, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a invité les assureurs à une gestion prudente de leurs fonds propres pour pouvoir faire face aux conséquences de la crise tant s’agissant des marchés financiers que des exigences d’indemnisation – l’ACPR anticipant dans certains secteurs « une forte dérive prévisible de la sinistralité » (1).

Le 14 mai suivant, le marché de l’assurance britannique Lloyd’s of London a estimé les pertes que le secteur assurantiel devrait subir en 2020 en raison de la pandémie à 203 milliards de dollars américains, soit 188 milliards d’euros (2) dont :

– 107 milliards de dollars (99 milliards d’euros) au titre des indemnisations (résultant notamment d’annulations d’événements ou encore de remboursements de déplacements et voyages) ;

– 96 milliards de dollars (89 milliards d’euros) au titre de moins-values sur les portefeuilles d’investissement, compte tenu de l’impact de la crise sur les marchés financiers mondiaux.

La FFA estime que l’impact de la crise pourrait, s’agissant de la France, être négatif à hauteur de 9 à 10 milliards d’euros (3).

Ces chiffres globaux peuvent être rapprochés de ceux communiqués le 3 juin 2020 par l’assureur français Axa, qui a indiqué que la pandémie de Covid‑19 aurait en 2020 pour l’entreprise un impact négatif de 1,2 milliard d’euros au titre de l’assurance dommage, principalement au titre des lignes d’assurance pour perte d’exploitation et pour annulation d’événements (4).

(1) ACPR, Communiqué de presse, 3 avril 2020.

(2) LArgus de lassurance, Coronavirus : une facture de 203 Md$ pour les assureurs en 2020, 15 mai 2020.

(3) LArgus de lassurance, Covid-19 : « Limpact de la crise pourrait sélever à 9 Md€ », selon la présidente de lassurance, interview de Mme Florence Lustman, présidente de la FFA, 10 juin 2020.

(4) Axa, Décision du Conseil dAdministration relative au versement du dividende pour lexercice 2019, communiqué de presse, 3 juin 2020.

 

 

 

 

 


  1  

FICHE  4 :
LES GARANTIES PUBLIQUES DE LÉTAT EN RÉPONSE À LA CRISE ÉCONOMIQUE

Dès le début de la crise sanitaire, l’urgence économique a consisté à éviter que des entreprises rentables, pérennes, créatrices d’emploi, ne soient détruites par l’ampleur du choc économique à absorber.

La crise économique actuelle se caractérise, du fait de la mise à l’arrêt forcée d’une économie par ailleurs fonctionnelle et d’un redémarrage progressif, par une crise de trésorerie pour les entreprises. C’est pourquoi l’État a mis en œuvre le prêt garanti par lÉtat (PGE), pour un volume maximal de garanties inédit : 300 milliards deuros.

La crise a également tendu les relations commerciales et financières des entreprises, sur le territoire domestique comme à l’export, car le risque de défaillance des entreprises augmente drastiquement. Le marché de l’assurance-crédit, qui permet de sécuriser les entreprises contre les risques d’impayés ou de défaut de leurs clients, se rétracte : l’État apporte sa garantie, à hauteur de 15 milliards deuros, à la réassurance publique des opérations des assureurs-crédit.

L’appui de l’État en garanties permet en outre de sécuriser les emprunts de personnes publiques rendus nécessaires par la lutte contre la crise.

L’Unédic disposait antérieurement à la crise de la garantie de l’État pour 2020, à hauteur de 2 milliards d’euros, pour permettre son refinancement. Devant l’ampleur de ses nouveaux engagements financiers au titre notamment du régime d’activité partielle, l’État a accordé une garantie supplémentaire de 8 milliards deuros à lUnédic.

L’État soutient également les collectivités ultramarines contre la crise : l’Agence française de développement bénéficie de la garantie publique pour deux prêts de 240 millions deuros chacun au bénéfice de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie.

Enfin, le présent PLFR prévoit de nouvelles garanties publiques au titre des contributions de la France à l’action internationale et communautaire contre la crise. L’État octroie sa garantie :

– jusquà 4,4 milliards deuros pour linstrument SURE, qui fournit des prêts aux États-membres de l’Union européenne pour financer leurs dépenses d’activité partielle.

– jusquà 4,7 milliards deuros pour le fonds paneuropéen de garantie de la Banque européenne d’investissement (BEI), qui soutiendra les entreprises européennes ;

– à hauteur de 2,5 milliards pour la Banque de France, qui double son volume de prêts au FMI au titre de son action contre la pauvreté et pour la croissance.

Au final, au titre des textes financiers adoptés et en discussion depuis le début de la crise sanitaire, l’engagement de l’État au titre des garanties qu’il accorde pour lutter contre la crise s’élèverait à 332,1 milliards deuros.

Garanties de l’État autorisées du fait de la crise du Covid‑19

(en milliards d’euros)

 

LFR 1

LFR 2

PLFR 3

Total

Prêts bancaires aux entreprises (PGE)

300

300

Emprunts de lUnédic

8

8

Réassurance des opérations dassurance-crédit export (CAP/CAP + Francexport)

2

3

5

Réassurance des opérations dassurance-crédit domestiques (CAP/CAP + France)

10

8

8

Réassurance de portefeuille (CAP Relais)

2

2

Instrument SURE (Commission européenne)

4,4

4,4

Fonds paneuropéen de garantie (Banque européenne dinvestissement)

4,7

4,7

Emprunts du FMI (Banque de France)

2,5

2,5

Emprunts des régions ultramarines

0,24

0,24

0,48

Total général

335,08

Source : commission des finances

I.   LE PGE : UNE GARANTIE MASSIVE DE 300 MILLIARDS DEUROS

Le fondement juridique de la garantie des prêts par l’État est l’article 6 de la loi  2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 (LFR 1). Les paramètres de cet article ont été modifiés, à la marge, par larticle 16 de la loi  2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 (LFR 2).

Le mécanisme de la garantie permet à l’État de prendre à sa charge une partie du risque pris par l’établissement de crédit qui prête à une entreprise, entre 70 et 90 % de lencours du prêt. Si l’État est la personne morale qui octroie la garantie, Bpifrance Financement SA, filiale de Bpifrance, est l’organisme désigné pour assurer le suivi opérationnel de ce mécanisme de garantie.

Enfin, les établissements prêteurs ont un rôle central dans la distribution des prêts garantis par l’État (PGE). Les banques conservent leur liberté de décision : ce sont elles qui, in fine, acceptent ou refusent les demandes de prêt des entreprises. Depuis l’entrée en vigueur de la LFR 2, tout refus de consentement d’un prêt éligible à la garantie, de moins de 50 000 euros, doit être notifié par écrit à l’entreprise à l’origine de la demande de prêt.

A.   L’ÉLIGIBILITÉ À LA GARANTIE

a.   Champ des entreprises éligibles

Toutes les entreprises, dès lors qu’elles sont immatriculées en France, peuvent bénéficier de la garantie de l’État pour les prêts qui y sont éligibles, à l’exception des établissements de crédit, des sociétés de financement (qui commercialisent le PGE), de certaines sociétés civiles immobilières ([73]) et des entreprises faisant l’objet de procédures collectives à la date du 31 décembre 2019 ([74]) .

Parmi les entreprises éligibles, le bénéfice de la garantie suit des modalités qui varient selon leur taille.

Les entreprises qui emploient, lors du dernier exercice clos, moins de 5 000 salariés, ou ont un chiffre d’affaires inférieur à 1,5 milliard d’euros, bénéficient automatiquement de la garantie de lÉtat dès notification du prêt à Bpifrance Financement SA par l’établissement qui le leur consent, sous réserve que les conditions d’octroi de la garantie sont remplies – une vérification à la charge de l’établissement prêteur. Il n’y a donc pas de contrôle ex ante, par Bpifrance ou par l’État, de l’éligibilité effective du prêt à la garantie. Celle-ci n’est vérifiée qu’en cas de défaut du prêteur, entraînant l’appel de la garantie.

Les entreprises qui emploient, lors du dernier exercice clos, au moins 5 000 salariés et qui ont un chiffre d’affaires supérieur à 1,5 milliard d’euros, obtiennent la garantie par arrêté du ministre de léconomie, au cas par cas.

b.   Cahier des charges

Le bénéfice de la garantie dépend d’une série de conditions, destinées à protéger les emprunteurs comme les prêteurs, à s’assurer du bon emploi des fonds publics et à éviter tout risque d’abus. Ces conditions sont fixées par un cahier des charges réglementaire.

Ce cahier des charges comprend trois conditions protectrices des intérêts de l’emprunteur :

(1) la garantie couvre des prêts bénéficiant d’un différé d’amortissement minimal de douze mois au moins (le capital n’est remboursé qu’à compter d’un an) ;

(2) une clause du prêt donne la faculté à l’emprunteur, à l’issue de la première année, de pouvoir l’amortir sur une période additionnelle de cinq ans ;

(3) les créances détenues par l’établissement prêteur sur l’entreprise ne doivent pas avoir diminué, au moment de l’octroi de la garantie, par rapport à leur niveau du 16 mars 2020, afin d’éviter tout comportement d’aubaine.

B.   LES CARACTÉRISTIQUES DE LA GARANTIE

Selon la Banque de France, l’encours total aux sociétés non financières atteignait en janvier 2020 le montant de 1 063 milliards d’euros, dont 240 milliards d’euros de prêts de trésorerie. La garantie de l’État de 300 milliards d’euros, créée par la LFR 1, est donc exceptionnelle dans son montant. Elle demeure classique dans ses modalités :

– elle est accordée pour les prêts contractés entre le 16 mars 2020 et le 31 décembre 2020, inclus ;

– elle porte sur le principal du prêt (le capital à rembourser), sur les intérêts du prêt ainsi que sur les frais accessoires (par exemple occasionnés par un remboursement anticipé de l’emprunt) ;

– la garantie est rémunérée par l’emprunteur ([75]), elle ne peut porter sur l’intégralité du prêt et s’applique après un délai de carence qui court à compter de la conclusion du prêt ; cette prime de garantie est fixée selon un barème qui dépend de la taille de l’entreprise et de la maturité du prêt qu’elle couvre (entre 0,25 et 2 % par an – voir tableau ci-après).

Ces diverses conditions ont pour objet de protéger les intérêts financiers de l’État et du prêteur, ainsi que de rapprocher les caractéristiques de la garantie des bonnes pratiques de marché.

C.   LE PLAFOND DES PRÊTS GARANTIS

La somme des prêts garantis consentis à une même entreprise ne peut excéder un plafond réglementaire, qui varie selon les caractéristiques de l’entreprise.

Il est de 25 % du chiffre d’affaires 2019 s’il est connu, ou de la dernière année disponible dans le cas contraire, pour les entreprises créées avant le 1er janvier 2019.

Il est d’une fois la masse salariale française, estimée sur les deux premières années d’exercice, pour les entreprises créées à compter du 1er janvier 2019 et qui ne disposent peut-être pas encore de suffisamment de chiffre d’affaires pour ne pas être lésées par l’application du premier plafond.

Enfin, parmi les entreprises créées avant le 1er janvier 2019, les entreprises dites innovantes ([76]) peuvent bénéficier d’un autre plafond s’il leur est plus favorable : deux fois la masse salariale de l’année 2019 ou de la dernière année disponible.

Déclinaison des caractéristiques de la garantie selon la taille de l’entreprise

 

 

Quotité garantie

Plafond des PGE

Prime de garantie

(année 1)

Prime de garantie (années 2 à 6)

Entreprise créée à compter du 1er janvier 2019

de moins de 250 salariés et moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires

90 %

Masse salariale France estimée sur les deux premières années d’activité

0,25 %

0,5 % (années 2 et 3)

1 % (années 4 à 6)

de moins de 5 000 salariés et moins de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires

0,5 %

1 % (années 2 et 3)

2 % (années 4 à 6)

 

de plus de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires

80 %

de plus de 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires

70 %

Entreprise créée avant le 1er janvier 2019*

de moins de 250 salariés et moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires

90 %

25 % du chiffre d’affaires 2019

0,25 %

0,5 % (années 2 et 3)

1 % (années 4 à 6)

de moins de 5 000 salariés et moins de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires

0,5 %

1 % (années 2 et 3)

2 % (années 4 à 6)

 

 

 

de plus de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires

80 %

de plus de 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires

70 %

* Les entreprises innovantes peuvent bénéficier d’un plafond alternatif de PGE s’il leur est favorable : deux fois la masse salariale France 2019 constatée ou, le cas échéant, deux fois la masse salariale France de la dernière année disponible.

Source : commission des finances.

D.   L’ÉTAT DES LIEUX AU 11 JUIN 2020

Le comité de suivi chargé de veiller au suivi de la mise en œuvre et à l’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de Covid-19, mis en place par l’article 6 de la LFR 1, a communiqué à la commission des finances un état des lieux du recours au PGE par les entreprises.

Hors grandes entreprises, au 11 juin 2020, les montants de prêts validés étaient de 79,96 milliards d’euros, en faveur de 461 402 entreprises. Les montants préaccordés atteignaient 87,36 milliards d’euros en faveur de 507 189 entreprises. Le montant moyen par entreprise du PGE validé est de 173 300 euros.

Au 5 juin 2020, en outre, dix grandes entreprises ont bénéficié du dispositif grâce à un arrêté du ministre de l’économie, pour un montant total de 11,9 milliards d’euros.

Le niveau total de consommation des crédits disponibles est donc de l’ordre de 33,1 %.

II.   LA RÉASSURANCE PUBLIQUE DES RISQUES DASSURANCE-CRÉDIT

En période de crise, les assureurs-crédit privés éprouvent des difficultés à supporter l’augmentation rapide du risque de sinistralité de leurs entreprises assurées et réduisent, sinon annulent, les garanties qu’ils commercialisent.

Dans ce contexte, lÉtat a apporté sa garantie à deux organismes publics chargés d’effectuer des opérations de réassurance des risques d’assurance-crédit, d’abord individuels – auprès de chaque entreprise connaissant des difficultés d’assurance-crédit –, et désormais au niveau global des portefeuilles des assureurs-crédit, ce que prévoit l’article 15 du présent PLFR. La Caisse centrale de réassurance (CCR) intervient pour la réassurance des risques individuels domestiques et pour la réassurance de portefeuille, tandis que Bpifrance Assurance Export intervient pour la réassurance des risques individuels à l’export.

Bpifrance Assurance Export bénéficie de la garantie de l’État à hauteur de 5 milliards deuros dencours réassurés. Le dispositif garanti est CAP Francexport.

La CCR bénéficie de la garantie de l’État à hauteur de 10 milliards d’euros. L’article 15 du présent PLFR prévoit de segmenter cette garantie en 8 milliards deuros de risques individuels domestiques réassurés (CAP France) et 2 milliards deuros portant sur les encours de portefeuille des assureurs-crédit (CAP Relais).

Les dispositifs CAP France et Francexport se déclinent en deux volets :

– le CAP est une garantie complémentaire à la garantie commercialisée par l’assureur-crédit (utilisable en cas de réduction du volume de la garantie), allant jusqu’à 50 % du risque total ;

– le CAP+ est une garantie quasi-intégrale, qui se substitue à l’annulation ou au refus d’assurer de l’assureur-crédit, qui conserve toutefois une part de risque de 5 %.

A.   LASSURANCE-CRÉDIT EXPORT (CAP FRANCEXPORT)

a.   Fonctionnement

Les entreprises françaises qui exportent s’exposent à de nombreux risques commerciaux, contre lesquels elles s’assurent. L’assurance des crédits contractés pour exporter l’activité économique, aussi dénommée assurance-crédit export, permet de se prémunir contre l’interruption ou le non-paiement d’un contrat lié avec une entreprise étrangère, en raison de risques politiques ou commerciaux ([77]).

Les assureurs-crédit se protègent également du risque de défaut des prêts de leurs assurés, via des opérations de réassurance. CAP Francexport, géré par Bpifrance Assurance Export, est un dispositif public de réassurance des opérations d’assurance-crédit export ([78]), portant sur des crédits assurés de moins dun an. L’objet de cette activité de réassurance publique est de protéger les entreprises françaises exportatrices contre les éventuelles défaillances du marché de l’assurance-crédit, qui pourraient limiter leur développement international.

L’offre publique était limitée aux activités d’exportation dans certains pays dont la stabilité économique est dégradée – l’augmentation du risque de défaut de paiement des débiteurs situés dans ces pays est, en effet, susceptible de freiner l’offre privée de réassurance. L’article 5 de la LFR 1 a étendu la réassurance aux opérations d’exportation vers tous les pays étrangers. En outre, la garantie de l’État sur les encours réassurés a été portée de 1 milliard à 2 milliards d’euros. L’article 15 de la LFR 2 a porté cette garantie à 5 milliards deuros, face au constat de l’ampleur de la crise économique.

b.   Bilan au 5 juin 2020

Selon les données communiquées par le comité de suivi, les encours réassurés au 5 juin 2020 par Bpifrance Assurance Export représentent 43,1 millions d’euros. Cet encours était de 21 millions d’euros le 15 mai 2020, ce qui traduit une montée en charge progressive, et modeste, du dispositif.

MONTANT DES ENCOURS RELATIFS AUX DISPOSITIFS D’ASSURANCE-CRÉDIT FRANCEXPORT AU 5 JUIN 2020 PAR ASSUREUR CRÉDIT

(en millions d’euros)

 

CAP Export

CAP + Export

Euler Hermes

11,5

7,5

Atradius

2,8

0,4

Coface

6,1

4,7

AXA Assurcrédit

0,3

0,2

Groupama Assurance-crédit

6,4

3,2

Total

27,1

16,0

Source : Direction générale du Trésor d’après les remontées des assureurs-crédit dans le cadre des traités de réassurance conclus avec la caisse centrale de réassurance (CCR)

B.   LASSURANCE-CRÉDIT DOMESTIQUE (CAP FRANCE)

a.   Fonctionnement

Le dispositif de réassurance publique des risques d’assurance-crédit domestiques, CAP France, fonctionne comme CAP Francexport. Les risques assurés sont principalement des risques dimpayés dans le cadre des relations commerciales interentreprises. L’accès à l’assurance-crédit est un facteur essentiel de protection de la solvabilité des entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises dont la trésorerie doit être sécurisée.

Hors période de crise, l’offre d’assurance-crédit est apportée, sans défaillance de marché, par des assureurs privés. L’article 7 de la LFR 1 a réactivé la mission de réassurance publique de l’assurance-crédit qu’avait poursuivie la Caisse centrale de réassurance ([79]) lors de la crise de 2008/2009.

La garantie de lÉtat octroyée par ce même article 7 sélevait à 10 milliards deuros, sous deux conditions :

– les opérations réassurées doivent intervenir avant le 31 décembre 2020 ;

– elles ne pouvaient porter que sur des petites et moyennes entreprises et sur des entreprises de taille intermédiaire situées en France.

Le dispositif n’a pas été modifié en LFR 2. L’article 15 du présent PLFR 3 prévoit que CAP France s’étend à toutes les entreprises, y compris les plus grandes, elles-mêmes confrontées à la contraction du marché de l’assurance-crédit sur le territoire domestique.

b.   Bilan au 29 mai 2020

Selon le comité de suivi, au 29 mai 2020, les encours réassurés par la CCR s’élèvent à 114 millions d’euros, après 41 millions d’euros le 15 mai. Le démarrage est donc assez rapide, même si les données disponibles ne permettent pas encore de fonder une estimation de l’ordre de grandeur final des encours ainsi réassurés.

MONTANT DES ENCOURS RELATIFS AUX DISPOSITIFS D’ASSURANCE-CRÉDIT
au 29 mai 2020 PAR ASSUREUR- CRÉDIT

(en millions d’euros)

 

CAP Export

CAP +

Euler Hermes

49

11

Atradius

7

5

Coface

9

19

AXA Assurcrédit

2

4

Groupama Assurance-crédit

7

1

Total

74

40

Source : Direction générale du Trésor d’après les remontées des assureurs-crédit dans le cadre des traités de réassurance conclus avec la caisse centrale de réassurance (CCR)

C.   LA RÉASSURANCE PUBLIQUE DE PORTEFEUILLE (CAP RELAIS)

a.   Constat

Comme le précise l’évaluation préalable de l’article 15, les services de l’État ont observé la « poursuite des résiliations ou réductions de lignes assurées malgré la mise en place des dispositifs de réassurance ligne par ligne Cap et Cap Francexport ».

La solution proposée est la mise en place d’une réassurance globale des risques pris par les assureurs-crédit, à la fois sur le volet domestique et sur le volet export.

Le lancement de ce nouveau dispositif, CAP Relais, a été annoncé le 12 juin 2020.

b.   Dispositif prévu dans le présent PLFR

Tandis que CAP France et CAP Francexport peuvent être sollicités pour réassurer des risques individuels, entreprise par entreprise, avec une montée en charge progressive, la valeur ajoutée de CAP Relais est de couvrir globalement un portefeuille de risques assurés par un assureur-crédit. Il s’agit donc de réassurer un « stock » de risques, là où les dispositifs existants ne couvrent que le « flux » des demandes des entreprises à bénéficier des CAP. Ce dispositif est à même de faciliter d’emblée la conclusion du contrat d’assurance puisque la question de sa réassurance se pose le cas échéant plus tard, dans le cadre d’un stock d’affaires. Les assureurs-crédit, partagent ex ante leur risque avec l’État ([80]).

Cette réassurance globale couvre les risques couverts du 16 mars 2020 au 31 décembre 2020, à l’exception des risques déjà couverts dans le cadre des dispositifs CAP France et CAP Francexport : il s’agit donc d’une couverture subsidiaire. En outre, elle ne couvre que les risques non réalisés au moment de la signature du traité de réassurance entre la CCR et l’assureur-crédit, afin d’éviter tout effet d’aubaine.

Afin de protéger les intérêts financiers de l’État, un plafond de pertes sera fixé avec chaque assureur-crédit participant. Si un assureur-crédit subit des pertes au-delà de ce plafond, il en assumera seul la charge. Jusqu’à ce plafond, les pertes seront portées par l’État et par l’assureur-crédit en proportion de leur quote-part du risque détenu, qui ne peut excéder 75 % pour l’État.

Les pertes finales de l’État ne pourront dépasser 2 milliards deuros : il s’agit en effet du montant de la garantie de l’État à la CCR au titre de ces opérations de réassurance globale, prévu par l’article 15 du PLFR 3.

III.   LA GARANTIE DES EMPRUNTS PUBLICS

A.   LUNÉDIC

L’Unédic est une association chargée par délégation de service public de la gestion de l’assurance chômage en France. Pour couvrir ses besoins de financement, l’Unédic a recours à des financements bancaires classiques, mais également à des émissions de titres de créances et d’emprunts obligataires de moyen terme, lesquels doivent faire l’objet d’une garantie de l’État.

1.   L’augmentation des besoins de financement de l’Unédic

Initialement, pour 2020, l’article 199 de la loi de finances pour 2020 a autorisé l’État à accorder sa garantie aux emprunts contractés par l’Unédic, en principal et en intérêts, dans la limite d’un plafond global de 2 milliards d’euros. La réforme de l’assurance-chômage devait conduire à une amélioration progressive de la situation financière de l’Unédic : son solde devait s’améliorer de 480 millions d’euros en 2020, de 1,8 milliard d’euros en 2021 et de 2,1 milliards d’euros en 2022.

La situation financière de l’Unédic a été très fortement dégradée par la crise actuelle, à la fois sous l’effet de la conjoncture économique (baisse des recettes de cotisations employeur et augmentation des dépenses d’indemnisation du chômage) et sous l’effet de mesures nouvelles aux impacts budgétaires massifs pour soutenir les entreprises et les salariés. À titre principal, le dispositif dactivité partielle est financé à hauteur du tiers par l’Unédic, soit environ 10,3 milliards d’euros selon les estimations du présent PLFR.

2.   L’augmentation de la garantie de l’État

Pour couvrir ces besoins de financements supplémentaires, l’Unédic peut recourir aux instruments de financement de court terme (émission de titres de créance), soit, selon ses estimations ([81]), un maximum de 9 milliards d’euros de liquidités. Ces instruments ne nécessitent pas une augmentation du plafond de la garantie de l’État.

En revanche, pour assurer son programme d’émissions obligataires, l’Unédic a eu besoin d’une augmentation du plafond de la garantie de l’État pour 2020, à hauteur de 8 milliards deuros supplémentaires. En effet, en avril 2020, l’Unédic avait déjà émis des emprunts pour un montant atteignant le plafond de 2 milliards d’euros prévu en loi de finances initiale pour 2020.

La garantie de l’État, d’un total de 10 milliards deuros, a été accordée par l’article 17 de la LFR 2.

B.   LES COLLECTIVITÉS ULTRAMARINES

L’Agence française de développement (AFD) intervient pour le compte de l’État dans le cadre de missions fixées par le code monétaire et financier (articles R 515-5 et R 515-15), qui l’autorise notamment à pratiquer des opérations de banque.

L’AFD a renforcé depuis plusieurs années son intervention financière auprès des collectivités territoriales d’outre-mer, devenant ainsi leur partenaire financier le plus important. En 2018, les engagements financiers nouveaux de l’AFD en outre-mer ont ainsi atteint 1,4 milliard d’euros, soit 12 % de l’activité totale du groupe.

La crise de la covid a aggravé la situation financière des collectivités ultramarines. Deux d’entre-ales ont vocation à bénéficier de prêts supplémentaires de l’AFD, garantis par l’État, à hauteur de 240 millions d’euros.

1.   La Nouvelle-Calédonie

La collectivité de Nouvelle-Calédonie (CNC) est une collectivité d’outre-mer à statut particulier disposant de son propre système fiscal et budgétaire. Elle assure la perception de l’ensemble des impôts sur son territoire, y compris ceux destinés aux provinces, aux communes et aux établissements publics.

La situation financière de la CNC sest fortement dégradée au cours des dernières années du fait de difficultés économiques persistances (notamment un taux de croissance du PIB inférieur à 1 %). Dans une situation de trésorerie très contrainte et d’endettement public important, la CNC a dû mettre en place un plan de sauvegarde de léconomie calédonienne. Celui-ci prévoit un renforcement du dispositif du chômage partiel avec la création d’une allocation spécifique Covid-19 (100 % du salaire pour les personnes au salaire minimum garanti et 70 % du dernier salaire brut dans la limite de 4,5 fois le salaire minimum garanti), ainsi qu’un report des cotisations sociales et fiscales pour les entreprises calédoniennes en difficulté.

Dans ce contexte, le prêt de 240 millions d’euros consenti par l’AFD, garanti par l’État, doit permettre le financement des reports de paiement d’impositions et de cotisations sociales, des pertes de recettes subies et des hausses de dépenses exposées au titre des régimes d’aides aux particuliers et aux entreprises mis en place du fait de la crise sanitaire liée à la propagation de l’épidémie de Covid‑19.

La garantie a été accordée par l’article 18 de la LFR 2. Elle porte sur le principal et les intérêts dans la limite d’un plafond de 240 millions d’euros en principal (soit le montant anticipé des pertes de cotisations sociales et fiscales subies par la CNC du fait de la crise économique et sanitaire). Le prêt ne peut avoir une maturité supérieure à 25 ans ni un différé de remboursement supérieur à 2 ans.

L’octroi de la garantie est subordonné à la conclusion dune convention entre lÉtat, lAFD et la CNC qui a eu lieu fin mai 2020. Elle prévoit, d’une part, la mise en place d’un calendrier de réformes afin de rétablir la situation financière de la collectivité et, d’autre part, le principe et les modalités d’un dispositif spécifique de remboursement du prêt garanti par l’affectation d’une fraction des recettes de la CNC correspondant aux annuités d’emprunt en principal et intérêts.

2.   La Polynésie française

L’article 16 du présent PLFR prévoit d’accorder la garantie de l’État à un prêt de l’AFD à la Polynésie française, également à hauteur de 240 millions d’euros.

La Polynésie française est une collectivité d’outre-mer à statut particulier dont l’autonomie est garantie par l’article 74 de la Constitution. En application de ce principe, la Polynésie française est compétente dans toutes les matières, à l’exception de celles expressément attribuées à l’État, et dispose de son propre système fiscal et budgétaire.

La situation économique et budgétaire de la Polynésie française semblait favorable avant l’émergence de la crise sanitaire relative à l’épidémie de Covid-19. Toutefois, la Polynésie française a pris, sur le modèle métropolitain, des mesures drastiques de réduction des déplacements puis de confinement de la population, qui touchent fortement l’économie locale ainsi que les recettes fiscales. La fermeture des frontières et l’arrêt de la desserte aérienne locale et internationale touchent particulièrement le secteur touristique, le plus important de l’économie polynésienne.

Dans ce contexte, le Gouvernement polynésien et l’État ont déployé des dispositifs de soutien financier massif à destination des entreprises et des ménages polynésiens afin de réduire les effets de la crise économique et sociale. Ces dispositifs conduisent à accroître significativement les dépenses de la Polynésie française, en plus des pertes fiscales supportées du fait du ralentissement de l’économie. Le plan de sauvegarde de léconomie, dont le montant est évalué à près de 250 millions deuros, prévoit notamment un ensemble de mesures en faveur de la trésorerie des entreprises telles qu’un report de trois mois des échéances des principaux impôts économiques (impôts sur les sociétés, impôts sur les transactions, patente) et des cotisations sociales et un report de deux mois des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée. Le plan prévoit également la création d’un revenu exceptionnel de solidarité de 100 000 francs CFP (837 euros) accordé à tous les salariés en suspension de contrat de travail du fait du confinement pour une durée maximum de trois mois.

Dans ce contexte, le prêt garanti de l’AFD pourrait permettre le financement des reports de paiement d’impositions et de cotisations sociales, des pertes de recettes subies et des hausses de dépenses exposées au titre des régimes d’aides aux particuliers et aux entreprises mis en place du fait de la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19.

Comme pour le prêt au bénéfice de la Nouvelle-Calédonie, la garantie peut être accordée jusqu’au 31 décembre 2020. Elle porte sur le principal et les intérêts dans la limite d’un plafond de 240 millions d’euros en principal. Le prêt ne peut avoir une maturité supérieure à 25 ans ni un différé de remboursement supérieur à 2 ans.

Enfin, l’octroi de la garantie est subordonné à la conclusion d’une convention entre l’État, l’AFD et le gouvernement de Polynésie française prévoyant, d’une part, la mise en place d’un calendrier de réformes afin de garantir la situation financière de la collectivité et, d’autre part, le principe et les modalités d’un dispositif spécifique de remboursement du prêt garanti par l’affectation d’une fraction des recettes de la Polynésie française correspondant aux annuités d’emprunt en principal et intérêts.

IV.   LE SOUTIEN AUX PROGRAMMES EUROPÉENS ET INTERNATIONAUX

A.   LINSTRUMENT SURE

1.   Le fonctionnement du SURE

Dans le cadre de la lutte contre les effets économiques de la pandémie, la Commission européenne a proposé la mise en place d’un instrument d’urgence, temporaire, ayant pour objet de concourir au financement des dépenses de chômage et de santé/sécurité au travail supportées par les États-membres de l’Union européenne.

L’instrument, nommé SURE (Support to mitigate Unemployment Risks in a Emergency – soutien d’urgence à l’atténuation des risques de chômage), a vocation à délivrer des prêts de l’Union européenne aux États membres, pour un volume maximum de 100 milliards deuros, jusqu’au 31 décembre 2022. La Commission emprunte sur les marchés les sommes ensuite prêtées aux États dans les mêmes conditions de taux et de maturité qu’obtenues par elle. Ce mécanisme de « prêts miroirs » leur permet de bénéficier des bonnes conditions de financement de l’UE.

L’instrument permet de couvrir des dépenses en forte hausse, intervenues à compter du 1er février 2020, dès lors qu’elles sont directement liées à la création ou à l’extension de dispositifs de chômage partiel ou liées aux mesures d’amélioration de la santé/sécurité au travail. Aucune autre conditionnalité n’est requise.

2.   La mise en œuvre de la garantie de l’État

Les États-membres apportent leur garantie à l’instrument, au prorata de leur part relative dans le revenu national brut (RNB) de l’UE. Un minimum de 25 % du volume d’intervention du SURE, soit 25 milliards d’euros, doit être apporté en garantie pour que l’instrument devienne disponible. La garantie des États-membres expire au 31 décembre 2053.

L’article 13 du présent PLFR autorise l’octroi de la garantie de l’État aux prêts accordés par l’Union européenne aux États membres dans le cadre de l’instrument SURE. Cette garantie est accordée dans la limite de 4,407 milliards deuros, soit 17,6 % du montant total des 25 milliards d’euros de garanties apportées à l’instrument. Ce pourcentage représente la quote-part de la France dans le revenu national brut (RNB) de l’Union européenne à 27.

L’octroi de la garantie est conditionné à la signature d’un accord bilatéral entre la France et la Commission européenne, précisant les modalités de fonctionnement du SURE, notamment les conditions d’ouverture de l’instrument, les règles prudentielles de gestion du portefeuille des prêts bénéficiant de l’instrument et la date à laquelle celui-ci prend fin.

B.   LE FONDS PANEUROPÉEN DE GARANTIE

1.   Le fonctionnement du fonds

Le fonds paneuropéen de garantie résulte d’une proposition de la Banque européenne d’investissement (BEI) dont le principe a été accepté par le Conseil européen du 23 avril. Ce fonds temporaire, doté de 25 milliards deuros de garanties publiques, pourra lever jusquà 200 milliards deuros pour faciliter le financement des entreprises.

Le fonds paneuropéen interviendra en complément des dispositifs nationaux de soutien économique, en particulier des politiques mises en œuvres par les banques publiques nationales (Bpifrance, en France). Les entreprises, en particulier les PME, sont les principales cibles de lintervention : il s’agit d’améliorer leurs conditions de liquidité, dans un contexte de marché contraint des capitaux. Adapté à la crise, il dérogera aux règles d’intervention habituelles de la BEI pour autoriser une prise de risque plus importante dans les choix de financement, notamment en matière de risque de crédit.

2.   La mise en œuvre de la garantie de l’État

L’avantage de la création d’un fonds ad hoc est de permettre un volume dintervention de la BEI déconnecté de ses contraintes de capital : la Banque ne peut investir massivement au-delà de son rythme de croisière sans que les États actionnaires n’augmentent leur quote-part dans son capital.

L’article 14 du présent PLFR autorise le ministre de l’économie à octroyer la garantie de l’État au groupe BEI, dans la limite d’un plafond de 4,7 milliards deuros.

Ce montant correspond à la quote-part de la France dans le fonds paneuropéen de garantie, miroir de la quote-part française au capital de la BEI, soit 18,8 % du total des garanties qui permettront à la BEI de lever les ressources financières du fonds.

Le montant de 4,7 milliards d’euros est un plafond : ce montant serait autorisé dans la perspective où l’ensemble des États membres octroieraient cette garantie. Dans le cas contraire, le montant garanti correspondra à 18,8 % des garanties octroyées par les États membres participants.

C.   LA FACILITÉ DE PRÊT DU FMI

1.   Le fonctionnement de la facilité

Le FMI mobilise une facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC), guichet qui accorde des prêts concessionnels aux États les plus pauvres, traversant d’importantes difficultés financières. Ces difficultés ont été renforcées par la crise actuelle, et les demandes de prêts accrues. Face à l’urgence, le FMI a sollicité un renforcement des moyens d’action de la FRPC. L’objectif fixé par le FMI est une augmentation de la ressource de la facilité de 12,5 milliards de DTS ([82]), soit 15,4 milliards d’euros, devant permettre de couvrir les besoins de financement des États en difficulté jusqu’en 2024.

La Banque de France est l’institution qui prête, au nom de la France, à la FRPC pour financer les opérations de prêts du FMI à destination des pays les plus pauvres. Ce prêt s’élève actuellement à 2,5 milliards deuros. L’objectif fixé par la France en avril 2020 est de doubler ce montant.

2.   La mise en œuvre de la garantie de l’État

Ce doublement de la contribution française exige en contrepartie l’accroissement du plafond de garantie de lÉtat à la Banque de France, permis par l’article 12 du présent PLFR. Il est, en effet, logique que ce soit l’État qui supporte le risque financier des opérations de prêts du FMI et non la Banque de France, qui agit uniquement pour le compte de l’État.

La garantie nouvelle de l’État s’élève à 2 milliards de DTS, soit 2,5 milliards d’euros, et porte sur le principal – le capital à rembourser – et sur les intérêts dus. Elle vient ainsi doubler le montant de la garantie en vigueur.

La garantie peut être activée dès lors que le FMI n’honore pas un remboursement à la Banque de France. Cette situation advient lorsqu’un État bénéficiaire d’un prêt de la FRPC fait défaut, et que le FMI ne peut absorber l’intégralité de la perte sur le compte de réserve qu’il détient à cet effet.

 

 


  1  

   FICHE N° 5 :
LES PLANS SECTORIELS

Si l’ensemble de l’économie française a été affecté par l’épidémie de Covid‑19, certains secteurs ont été plus particulièrement touchés, ce qui justifie un soutien accru de la puissance publique à leur égard. C’est notamment le cas des secteurs de l’aéronautique, de l’automobile, du tourisme au sens large (y compris l’hôtellerie-restauration, l’évènementiel, la culture et le sport), des entreprises technologiques et du bâtiment et des travaux publics (BTP). Ce soutien accru est notamment traduit dans le présent texte, par le biais de mesures budgétaires (nouvelles ouvertures de crédits) et fiscales.

Le présent PLFR comporte également les mesures nécessaires à la mise en œuvre d’un plan massif de soutien aux collectivités territoriales, confrontées à la baisse significative de leurs recettes. Ce plan s’élève à un montant de 4,5 milliards d’euros sur l’année 2020. Le lecteur est invité à se référer aux commentaires des articles 5, 6, 7, 9 et 16 du présent rapport pour de plus amples informations.

Un plan de soutien en faveur des collectivités territoriales à hauteur de 4,5 milliards d’euros

Le présent PLFR crée, pour les communes et les intercommunalités, un nouveau prélèvement sur recettes afin de compenser les pertes de recettes fiscales constatées en 2020 (article 5). Il prévoit, en complément, l’ouverture d’un milliard d’euros en autorisations d’engagement, au titre de 2020 et 2021, pour relancer l’investissement local (état B ­ article 9).

Un autre prélèvement sur recette, d’un montant de 60 millions d’euros, est créé pour compenser les pertes de recettes d’octroi de mer et de taxe spéciale de consommation constatées en 2020 pour les collectivités d’outre-mer (article 6).

De plus, le PLFR 3 institue un mécanisme d’avances remboursables pour les départements confrontés à une perte de recettes de droits de mutation à titre onéreux (DTMO) (article 7).

Enfin, à l’instar du dispositif adopté pour la Nouvelle-Calédonie dans la LFR II, le présent PLFR prévoit que la garantie de l’État sera octroyée à un prêt de l’Agence française de développement en faveur de la Polynésie française, dans la limite de 240 millions d’euros (article 16).

Enfin, il convient de relever la présence, dans le présent PLFR, de mesures visant à favoriser lapprentissage qui bénéficieront, de manière transversale, à lensemble des secteurs de léconomie française. 500 millions d’euros de crédits, financés par des ouvertures (400 millions d’euros en autorisations d’engagement et 200 millions d’euros en crédits de paiement) et des redéploiements de crédits, sont ainsi prévus sur le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi » afin de financer la nouvelle prime exceptionnelle à l’embauche d’un apprenti. Cette prime, d’un montant de 8 000 euros par apprenti majeur et de 5 000 euros par apprenti mineur, sera versée aux entreprises de moins de 250 salariés et aux entreprises de plus de 250 salariés recrutant au moins 5 % d’apprentis dans leurs effectifs à l’échéance de la mesure, pour la conclusion de la première année d’un contrat d’apprentissage entre le 1er juillet 2020 et le 28 février 2021. Alors que l’aide unique actuelle à l’embauche, d’un montant de 4 125 euros la première année de conclusion du contrat, est limitée aux apprentis préparant un diplôme ou un titre professionnel de niveau inférieur ou égal au baccalauréat, le champ des apprentis éligibles est élargi dans le nouveau dispositif jusqu’à ceux préparant une licence professionnelle.

I.   UN SOUTIEN AU SECTEUR DU TOURISME, DE LÉVÈNEMENTIEL, DE LA CULTURE ET DU SPORT À HAUTEUR DE 18 MILLIARDS DEUROS

Le secteur du tourisme, qui comprend celui des « hôtels, cafés et restaurants » (HCR), a été confronté à une chute générale de l’activité marquée par l’arrêt des flux touristiques internationaux, l’annulation de la plupart des manifestations culturelles et la fermeture administrative des cafés et restaurants. La perte d’activité sur l’année est évaluée à ce stade à environ 40 %, ce qui représente une perte de recettes pouvant atteindre 50 milliards d’euros ([83]). Les voyagistes et le secteur HCR sont les plus touchés : le barème de la plateforme Orchestra ([84]) a évalué la perte d’activité pendant le confinement, pour les premiers, à 97 %, et l’INSEE ([85]), pour les seconds, à 90 %, par rapport à une situation normale.

 

SYNTHÈSE DU PLAN DE SOUTIEN AU SECTEUR DU TOURISME

Mesure

Montant estimé

Véhicule de financement

Prolongation du dispositif d’activité partielle dans les conditions applicables pendant le confinement

 

Ouverture de 3,3 milliards d’euros sur le programme 356 pour la prolongation de l’ensemble du dispositif et cofinancement de l’Unédic à hauteur de 1,7 milliard d’euros

Ouverture prolongée du fonds de solidarité

 

1,2 milliard d’euros ouverts dans le PLFR 3 sur le programme 357

Mise en place d’un PGE « saison »

 

 

Exonérations de cotisations sociales, aides au paiement des cotisations et plans d’apurement

2,1 milliards d’euros de moindres recettes pour la sécurité sociale

Article 18 du présent PLFR et ouverture de 3 milliards d’euros sur le programme 360 pour compenser à la sécurité sociale le coût de ces mesures par l’État.

Dégrèvement possible des 2/3 de CFE

350 millions d’euros au maximum de pertes de recettes pour les collectivités territoriales

Article 3 du présent PLFR

Exonération possible de taxe de séjour

285 millions d’euros au maximum de pertes de recettes pour les collectivités territoriales

Article 17 du présent PLFR

Annulation des redevances et des produits de l’occupation du domaine public de l’État

6 millions d’euros de moindres recettes pour l’État

Article 1er du présent PLFR

Guichet unique numérique

 

 

Relèvement du plafond des tickets-restaurants à 38 euros dans les restaurants

 

 

Report, par les banques, des échéances de crédits de 6 à 12 mois

 

 

Plan d’investissement de Bpifrance et de la Banque des Territoires

3 milliards d’euros

 

Total

Environ 18 milliards deuros

 

Source : commission des finances

A.   LEXTENSION ET LA PROROGATION DES MESURES GÉNÉRALES DURGENCE POUR CE SECTEUR

Les entreprises du tourisme ont utilisé de façon massive les mesures d’urgence (chômage partiel, prêts garantis par l’État, fonds de solidarité) mises en place par le Gouvernement : fin mai, elles représentaient par exemple plus de 10 % des prêts garantis par l’État (PGE), pour un montant total de 6,2 milliards d’euros, alors que ces entreprises représentent environ moitié moins que cette proportion dans l’activité.

Le Gouvernement s’est engagé à maintenir ces mesures, pour les entreprises du secteur du tourisme (dont le secteur HCR), de l’évènementiel, de la culture et du sport, jusqu’à la fin de l’année 2020 :

– les entreprises concernées pourront continuer à bénéficier jusqu’à la fin du mois de septembre 2020 du dispositif dactivité partielle dans les conditions applicables pendant le confinement (indemnité versée par l’employeur au salarié égale à 70 % du salaire brut sans que la rémunération du salarié puisse être inférieure au SMIC net et prise en charge à 100 % par l’État de l’indemnité pour des niveaux de salaires allant jusqu’à 4,5 SMIC). Au-delà, l’activité partielle leur restera ouverte si leur activité ne reprend que progressivement, dans des conditions qui resteront à déterminer ([86]) ;

– le fonds de solidarité restera ouvert pour les entreprises de ces secteurs jusquà la fin de lannée 2020 ([87]) et ses conditions daccès seront élargies aux entreprises employant jusqu’à 20 salariés et réalisant jusqu’à 2 millions d’euros de chiffre d’affaires (contre 10 salariés et 1 million d’euros de chiffre d’affaires en droit commun). Le plafond de l’aide complémentaire pouvant être allouée par les régions dans le cadre du second volet du fonds sera porté de 5 000 à 10 000 euros. Le présent PLFR prévoit ainsi une ouverture de 1,2 milliard deuros en autorisations dengagement (AE) et en crédits de paiement (CP) sur le programme 357 « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire » au titre de cette extension après le 1er juin ;

– un PGE « saison » va être mis en place avec des conditions d’accès plus favorables que le PGE « classique » : le prêt sera plafonné à 25 % du chiffre d’affaires réalisé pendant les trois meilleurs mois de l’année 2019 et non plus à 25 % du chiffre d’affaires réalisé pendant l’ensemble de l’année 2019.

B.   DES DISPOSITIONS DEXONÉRATIONS FISCALES INTRODUITES PAR LE PLFR 3

Plusieurs mesures d’exonérations fiscales sont prévues dans le PLFR 3 et concernent particulièrement les secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture et de l’événementiel. Ainsi, ces secteurs pourront bénéficier :

– d’une exonération des cotisations et contributions patronales prévue pour les entreprises de moins de 250 salariés des secteurs particulièrement touchés par les conséquences économiques et financières de la propagation de l’épidémie et de secteurs leur étant liés, pour des périodes d’emploi du 1er février au 31 mai 2020. Des aides au paiement des cotisations salariales dues au titre de la période susmentionnée et des plans d’apurement de cotisations sont également prévus pour ces entreprises (article 18 du PLFR, voir commentaire d’article). D’après les évaluations préalables annexées au PLFR 3, ces mesures sectorielles (y compris le transport aérien) représentent 2,1 milliards deuros de moindres recettes ;

– du dégrèvement, sur décision des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), des deux tiers du montant de la cotisation foncière des entreprises (CFE) due au titre de l’année 2020, pour les entreprises dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 150 millions d’euros (article 3, voir commentaire d’article). Selon l’étude d’impact, dans l’hypothèse où la totalité des collectivités instaureraient ce dégrèvement exceptionnel, le coût total pour les finances publiques s’élèverait à 350 millions d’euros, dont 175 millions d’euros seraient pris en charge par l’État ;

– de lexonération temporaire, sur décision des communes et des EPCI, de la taxe de séjour pour les hébergeurs et touristes due au titre de l’année 2020 (article 17, voir commentaire d’article). L’évaluation préalable de l’article annexée au PLFR chiffre à 285 millions d’euros, au maximum, la perte de recettes pour les collectivités territoriales ;

– de lannulation des redevances et des produits de loccupation du domaine public de lÉtat et de ses établissements publics pour une période de trois mois à compter du 12 mars (article 1er, voir commentaire d’article). Le manque à gagner en termes de recettes est estimé à 6 millions d’euros pour les biens du domaine public géré par l’État.

C.   AUTRES MESURES

Diverses mesures viennent compléter ce plan sectoriel :

– la mise en place d’un guichet unique numérique pour faciliter les démarches des entreprises pour accéder aux dispositifs de soutien ;

– le relèvement du plafond journalier des tickets-restaurants de 19 à 38 euros et la possibilité de les utiliser, uniquement dans les restaurants, les dimanches et jours fériés ­ mesures effectives depuis le 11 juin 2020 ([88]) ;

– le report, par les banques, des échéances de crédits de 6 à 12 mois pour les entreprises du secteur ;

– enfin, Bpifrance et la Banque des territoires ont acté un plan dinvestissement dans le secteur du tourisme à hauteur de 3 milliards deuros sur la période 2020-2023, dont 1,3 milliard d’euros en fonds propres permettant d’atteindre un volume total de 6,7 milliards d’euros en fonds propres grâce à la contribution du secteur privé. La capacité totale du prêt Tourisme de Bpifrance sera notamment portée à 1 milliard d’euros et ses conditions d’accès seront assouplies. La Banque des territoires mobilisera une enveloppe de dette à très long terme d’au moins 500 millions d’euros. Elle mobilisera également 93 millions d’euros dans les fonds d’urgence (fonds de solidarité national et fonds d’urgence régionaux) permettant l’octroi d’avances remboursables aux entreprises en difficulté.

EFFORT D’INVESTISSEMENT BPIFRANCE ET BANQUE DES TERRITOIRES
EN FAVEUR DU TOURISME

(en millions d’euros)

 

Banque des Territoires

Bpifrance

Total

Fonds d’urgence

93

 

93

Prêt tourisme

 

1 000

1 000

Prêts de long terme

500

 

500

Total des actions en trésorerie et financement

1 593

Capacité d’engagement pour le soutien des ETI

150

150

300

Consolidation de la filière thermalisme, montagne et port de plaisance

300

 

300

Renforcement du fonds Tourisme social Investissement

150

 

150

Création d’un Fonds Rebond Tourisme

100

300

400

Déploiement d’une offre de petits tickets en quasi fonds propres

100

100

200

Total des actions en fonds propre

1 350

Pour information : volume envisagé des actions en fonds propre avec leffet multiplicateur

6 750

Total des actions

2 943

Pour information : volume envisagé du plan avec leffet multiplicateur

8 343

Source : dossier de presse, comité interministériel du tourisme, 14 mai 2020, p. 19

II.   UN SOUTIEN DE PLUS DE 8 MILLIARDS DEUROS AU SECTEUR DE LAUTOMOBILE POUR UNE INDUSTRIE PLUS COMPÉTITIVE ET DÉCARBONÉE

Face aux difficultés du secteur automobile français – la filière a connu une baisse d’activité de plus de 80 % en avril 2020 par rapport à avril 2019 –, le Président de la République a présenté le 26 mai un plan de soutien au secteur, qui prévoit plus de 8 milliards d’euros d’aides, d’investissements et de prêts ([89]). Afin de prendre en compte les enjeux d’avenir liés à l’environnement et au maintien de la compétitivité du pays en matière automobile, ce plan a été orienté vers la production des véhicules propres.

 

La filière automobile française en chiffres

4 000 entreprises

400 000 emplois directs et indirects

155 milliards d’euros de chiffre d’affaires, soit 18 % du chiffre d’affaires de l’industrie manufacturière

2,2 millions de véhicules produits en 2019

51 milliards d’euros d’exportations

30 % de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre (GES) en France

Source : dossier de presse du plan de soutien à l’automobile, 26 mai 2020.

SYNTHÈSE DU PLAN DE SOUTIEN AU SECTEUR DE L’AUTOMOBILE

Mesure

Montant estimé

Véhicule de financement

PGE accordé à Renault

5 milliards d’euros

Article 6 de la LFR du 23 mars 2020 (encours de 300 milliards d’euros)

Autres PGE (non comptabilisé dans le plan)

295 millions deuros

Article 6 de la LFR du 23 mars 2020 (encours de 300 milliards deuros)

Bonus écologique (dont partie majorée)

535 millions d’euros

Ouverture de 228 millions d’euros sur le programme 174 dans le présent PLFR

Prime à la conversion (dont prime majorée pour les 200 000 premières primes)

800 millions d’euros

Ouverture de 395 millions d’euros sur le programme 174 dans le présent PLFR

Fonds d’avenir pour l’automobile

950 millions d’euros

– dont 600 millions d’investissements en fonds propres de plusieurs partenaires dont 100 millions d’euros de l’État

– dont 200 millions d’investissements de l’État pour la décarbonation du secteur

– dont 150 millions d’euros pour l’innovation

– La part État serait financée par le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État »

– ouverture de 200 millions d’euros sur le programme 134 dans le présent PLFR

– PIA

Participation de l’État au projet européen de batteries

700 millions d’euros

PIA

Total

Environ 8 milliards d’euros

 

Source : commission des finances

A.   PLUS DE 5 MILLIARDS D’EUROS CONSACRÉS À LA FILIÈRE DE L’AUTOMOBILE DANS LES MESURES GÉNÉRALES D’URGENCE

La filière automobile a bénéficié des mesures générales durgence mises en place par le Gouvernement :

– le groupe Renault a obtenu un prêt garanti par l’État de 5 milliards d’euros ;

– à la fin du mois de mai, 295 millions d’euros de PGE avaient été accordés aux entreprises du secteur en plus du PGE accordé à Renault ;

– les entreprises du secteur ont bénéficié massivement du chômage partiel : à la fin du mois de mai, 1 475 sites industriels avaient demandé la mise en activité partielle de 248 500 salariés du secteur automobile, ce qui représente un soutien de plusieurs centaines de millions d’euros.

Le Gouvernement a prévu de poursuivre le soutien du secteur par ces différents biais pendant la période de reprise progressive de l’activité.

B.   UN PLAN COMPLÉMENTAIRE DE 3 MILLIARDS D’EUROS CENTRÉ SUR LES VÉHICULES PROPRES

Le Gouvernement a annoncé la mise en œuvre de mesures spécifiques à la filière automobile.

● La première série de ces mesures consiste en un soutien substantiel à la demande avec la hausse du bonus écologique, à partir du 1er juin et jusqu’à la fin de l’année 2020, pour les véhicules électriques. En vertu du décret n° 2020-656 du 30 mai 2020 ([90]), à compter du 1er juin et jusqu’au 31 décembre 2020, le bonus pour les véhicules électriques de moins de 45 000 euros est passé de 6 000 à 7 000 euros pour les particuliers et de 3 000 à 5 000 euros pour les entreprises et les collectivités, et une prime de 2 000 euros est instituée pour l’achat d’un véhicule hybride rechargeable.

Le soutien à l’achat de véhicules automobiles neufs ou d’occasion passe également par un dispositif de primes à la conversion plus favorable pour les 200 000 premières primes versées à partir du 1er juin. Ainsi, pour ces primes plus favorables :

– le critère de revenu est élargi, le plafond de revenu fiscal de référence par part étant relevé de 13 500 à 18 000 euros ;

– le critère d’éligibilité pour la mise au rebut du véhicule est assoupli (inclusion des véhicules Crit’air 3) ;

– le montant de la prime est augmenté de 1 500 euros à 3 000 euros pour l’achat d’un véhicule thermique et de 2 500 euros à 5 000 euros pour l’achat d’un véhicule électrique ou hybride rechargeable. Pour les personnes morales, la prime actuelle est également doublée pour les véhicules utilitaires électriques légers et hybrides rechargeables ;

– une surprime d’un maximum de 2 000 euros, financée pour moitié par l’État et pour l’autre moitié par les collectivités, pourra être versée lorsque le bénéficiaire habite ou travaille dans une zone à faibles émissions et que le véhicule est électrique ou hybride rechargeable ;

– enfin, la transformation d’un moteur thermique en un moteur électrique, dite « rétrofit électrique », devient éligible à la prime à la conversion, au même titre que l’achat d’un véhicule électrique d’occasion.

Le renforcement de ceux deux dispositifs est financé par louverture de 623 millions deuros (AE/CP) de nouveaux crédits dans le présent PLFR sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », dont 228 millions d’euros au titre du renforcement du bonus écologique et 395 millions d’euros au titre de celui de la prime à la conversion.

Une accélération de la commande publique et l’accélération du développement des bornes électriques pour atteindre 100 000 points de recharge à la fin de l’année 2021 et non plus 2022 – le financement étant assuré par les recettes associées aux certificats d’énergie– viennent compléter ce volet de soutien à la consommation des ménages.

● La deuxième série de mesures consiste en un soutien à loffre avec la mise en place d’un fonds davenir pour lautomobile, doté de 950 millions d’euros et destiné à la modernisation des chaînes de production, à l’investissement et l’innovation. Ce fonds est divisé en trois volets :

– le premier, doté de 600 millions deuros dinvestissements en fonds propres, alimenté par l’État, Bpifrance, Renault et PSA à hauteur de 100 millions d’euros chacun et complété par des partenaires institutionnels et des gestionnaires de fonds, sera dédié au soutien des sous-traitants automobiles afin de consolider la filière. Interrogé par le rapporteur général, le Gouvernement a indiqué que la part de l’État serait financée par le compte d’affectation spéciale Participations financières de lÉtat ;

– le deuxième, doté de 200 millions deuros par lÉtat dès 2020, aura vocation à financer des projets d’investissement pour moderniser et décarboner le secteur. Une ouverture de 200 millions deuros en AE et 100 millions deuros en CP est prévue à ce titre par le présent PLFR sur le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » ;

– enfin, le troisième viendra soutenir linnovation et la recherche en cohérence avec les axes prioritaires de la feuille de route technologique liés au véhicule du futur. Il bénéficiera d’un financement de 150 millions d’euros dès 2020 issu des crédits du troisième programme d’investissements d’avenir (PIA). Pour les années 2021 à 2025, il sera financé dans le cadre du quatrième PIA, ce qui suppose une ouverture de crédits dans le cadre de la prochaine loi de finances.

En contrepartie de ce plan de soutien, la filière automobile s’est engagée à concentrer ses efforts dans la production de véhicules propres et à poursuivre sa stratégie de localisation en France des activités de recherche et de production à haute valeur ajoutée.

● Enfin, ce plan sectoriel comprend les subventions allouées dans le cadre du soutien à lusine pilote de fabrication de batteries électriques, un projet franco-allemand porté par les entreprises SAFT et PSA. Ce projet doit bénéficier d’un financement public français pouvant aller jusqu’à 850 millions d’euros, dont 700 millions d’euros de l’État, en provenance du PIA et du Fonds d’innovation et de l’industrie pour 690 millions d’euros. Le présent PLFR prévoit l’ouverture de 10 millions d’euros de crédits en AE pour permettre le financement de l’intégralité de la contribution de l’État à ce projet.

III.   UN SOUTIEN À LAÉRONAUTIQUE À HAUTEUR DE 15 MILLIARDS DEUROS

Le secteur de l’aéronautique a été durement frappé par les fermetures de frontières et le ralentissement des flux de personnes dans le monde, entraînés par l’épidémie de coronavirus : au niveau mondial, les compagnies aériennes anticipent des pertes nettes de plus de 84 milliards de dollars en 2020 et 16 milliards de dollars en 2021, ainsi qu’une chute de 50 % de leurs revenus en 2020 ([91]). Plusieurs compagnies se sont déclarées en faillite ([92]), des suppressions de postes ont été annoncées chez Air Canada, Lufthansa ou British Airways par exemple ([93]) mais aussi dans l’industrie aéronautique ([94]).

Annoncé le 9 juin 2020, le plan de soutien à l’aéronautique rassemble les mesures exceptionnelles communes à toutes les entreprises mises en place dans le cadre de l’épidémie (chômage partiel, prêts garantis par l’État) et des mesures spécifiques à la filière aéronautique.

Le secteur aéronautique français en chiffres

1 300 entreprises industrielles

300 000 emplois directs et indirects

58 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2018

une balance commerciale positive vis-à-vis du reste du monde de 34 milliards d’euros

58 000 recrutements sur les 5 dernières années

Source : dossier de presse du plan de soutien à l’aéronautique, 9 juin 2020.

SYNTHÈSE DU PLAN DE SOUTIEN AU SECTEUR DE L’AÉRONAUTIQUE

Mesure

Montant estimé

Véhicule de financement

Prêts Air France

7 milliards d’euros

Article 6 de la LFR du 23 mars 2020 (encours de 300 milliards d’euros) pour le PGE de 4 milliards d’euros + prêt actionnaire de 3 milliards d’euros (retracé sur le compte d’affectation spéciale Participations financières de lÉtat)

Autres PGE

1,5 milliard d’euros

Article 6 de la LFR du 23 mars 2020 (encours de 300 milliards d’euros)

Renforcement des garanties publiques à l’exportation via Bpifrance Assurance export

 

Ouverture de 182 millions d’euros sur le programme 114 dans le présent PLFR

Moratoire de douze mois sur les remboursements en principal des crédits à l’exportation

 

 

Assouplissement temporaire des modalités de remboursement des achats de nouveaux avions Airbus par les compagnies aériennes, dans le cadre de l’accord aéronautique de l’arrangement OCDE

 

 

Commandes militaires, de sécurité civile et de gendarmerie anticipées

832 millions d’euros

Redéploiements de crédits au sein des missions Défense

Fonds d’investissement aéronautique

1 milliard dont 500 millions d’euros mobilisés dès l’été 2020

200 millions d’euros BpiFrance, 200 millions d’euros par les industriels français (Airbus, Safran, Dassault, Thalès), 100 millions d’euros par le gestionnaire du fonds

Fonds d’accompagnement public à la diversification, à la modernisation et à la transformation environnementale des procédés

300 millions d’euros sur 3 ans

Ouverture de 100 millions d’euros en AE et 50 millions d’euros en CP sur le programme 134 dans le présent PLFR

Financement de la recherche et développement par l’État

1,5 milliard d’euros sur trois ans

Ouverture de 165 millions d’euros en AE et 85 millions d’euros en CP sur le programme 190.

+135 millions d’euros de PIA

Exonérations de cotisations sociales et étalement des passifs

2,1 milliards d’euros avec le secteur du tourisme (pas de chiffrage pour la seule partie transport aérien)

Article 18 du présent PLFR

Possibilité de dégrèvement des 2/3 de CFE

350 millions d’euros au maximum de pertes de recettes pour les collectivités territoriales avec le secteur du tourisme (pas de chiffrage pour la seule partie transport aérien)

Article 3 du présent PLFR

Total

Environ 15 milliards deuros

 

Source : commission des finances.

A.   L’UTILISATION DES PRÊTS GARANTIS PAR L’ÉTAT ET DU DISPOSITIF D’ACTIVITÉ PARTIELLE

Les salariés du secteur de laéronautique ont massivement bénéficié de la mesure dactivité partielle financée par lÉtat et lUnédic. Ces deux secteurs feront partie des secteurs bénéficiaires du dispositif d’activité partielle de longue durée, en cours d’élaboration par le ministère du Travail, dont la mise en œuvre est prévue à partir du 1er juillet. Au sein du secteur de la fabrication de matériel de transport hors industries automobiles, qui inclut la filière aéronautique, 651 sites industriels ont demandé l’autorisation de mettre en place l’activité partielle depuis le 1er mars, pour quelque 110 000 salariés.

En outre, plusieurs prêts garantis par lÉtat ont été accordés à la filière aéronautique :

– Air France a bénéficié de deux prêts dun montant global de 7 milliards deuros : 4 milliards d’euros sous la forme d’un prêt garanti par l’État ([95]) et 3 milliards d’euros sous la forme d’un prêt actionnaire ([96]). En contrepartie, Air France s’est engagé à présenter un plan de redressement de la compétitivité du groupe, prévoyant des réformes structurelles sur la maîtrise des coûts, des efforts de productivité, une réduction des vols régionaux, une réduction de 50 % des émissions de CO2 des vols métropolitains et la modernisation de sa flotte moyen et long-courrier pour réduire son impact écologique ;

– 1,5 milliard deuros de prêts garantis par lÉtat avaient été accordés aux entreprises de la filière de la construction aéronautique et spatiale à la mi–mai.

B.   Un plan sectoriel doté d’un volet « offre » et d’un volet « demande »

Les mesures spécifiques à la filière aéronautique peuvent être décomposées en un volet soutien de la demande et un volet soutien de l’offre. Elles visent à la fois à maintenir l’activité dans le secteur et à l’orienter vers une décarbonation avec le développement d’une flotte plus écologique.

● Le volet soutien de la demande s’articule autour de quatre mesures :

– le renforcement des garanties publiques à lexportation via Bpifrance Assurance export. Ce dispositif consiste en l’octroi de la garantie de l’État aux entreprises exportatrices – y compris du secteur aéronautique – les assurant pour les risques politiques et commerciaux. Les garanties à l’export de l’État sont rémunérées. Les opérations en recettes et en dépenses sont retracées dans un compte de commerce dédié (compte de commerce 915 « Soutien financier au commerce extérieur »). Dans le cas où le montant des appels en garantie est supérieur à celui de leur rémunération, le programme 114 « Appels en garantie de l’État » du budget général compense le déficit. On constate que le présent PLFR augmente de 182 millions d’euros les crédits du programme 114 pour les porter à 296,1 millions d’euros. Cette réévaluation est notamment expliquée par un relèvement du taux de sinistralité, ce qui aura un impact sur l’ensemble des dispositifs de garantie ;

– la mise en place dun moratoire de douze mois sur les remboursements en principal des crédits à lexportation accordés aux compagnies aériennes et figurant dans l’encours de Bpifrance exportation, ce qui représente un gain de trésorerie de 1,5 milliard d’euros pour les entreprises. En contrepartie, les compagnies bénéficiaires de l’obtention du moratoire doivent s’engager à ne pas verser de dividendes ou d’autres montants à leurs actionnaires, et à ne pas mettre en œuvre de programmes de rachat d’actions ;

– l’assouplissement temporaire des modalités de remboursement des achats de nouveaux avions Airbus par les compagnies aériennes, dans le cadre de l’accord aéronautique de l’arrangement OCDE ([97]). En cas de consensus entre l’ensemble des signataires de cet accord aéronautique, cette proposition pourrait être mise en œuvre à partir de juillet 2020 et de façon rétroactive pour juin 2020. Le moratoire présenté ci-avant et cet assouplissement ont pour objectif d’éviter les reports ou difficultés de remboursement par les compagnies aériennes sur les échéances des prêts garantis par Bpifrance export, ce qui doit permettre à l’État de ne pas avoir à activer sa garantie ;

– des commandes militaires, de sécurité civile et de gendarmerie anticipées à hauteur de 832 millions deuros.

● Le volet soutien de l’offre repose sur trois axes :

– la création dun fonds dinvestissement aéronautique, doté de 500 millions deuros, pour abonder en fonds propres les PME et les ETI et éviter leur rachat par des entreprises étrangères. Bpifrance apportera 200 millions d’euros, les industriels français (Airbus, Safran, Dassault, Thalès ([98])) 200 millions d’euros également et le gestionnaire de fond choisi par appel d’offres versera 100 millions d’euros. L’objectif est d’amplifier cette collaboration pour déployer à terme un montant total d’un milliard d’euros ;

– la création dun fonds daccompagnement public à la diversification, à la modernisation et à la transformation environnementale des procédés, financé par lÉtat à hauteur de 300 millions deuros sur trois ans. Le présent PLFR prévoit, à ce titre, l’ouverture, sur le programme 134 « Développement des entreprises et régulations », de 100 millions d’euros en AE et de 50 millions d’euros en CP en 2020.

– Un financement de la recherche et développement par lÉtat à hauteur de 1,5 milliard deuros sur trois ans (300 millions d’euros en 2020, 600 millions d’euros en 2021 et 600 millions d’euros en 2022) afin de parvenir à la fabrication de l’avion « vert », neutre en carbone, en 2035. Le PLFR 3 prévoit ainsi louverture de 165 millions deuros en AE et 85 millions deuros en CP sur le programme 190 « Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat ». En complément, les aides à la filière aéronautique sont augmentées par le PIA, à hauteur de 135 millions deuros ([99]).

C.   L’OUVERTURE DES DISPOSITIFS D’EXONÉRATIONS FISCALES AU SECTEUR DU TRANSPORT AÉRIEN

Le présent PLFR comporte deux dispositifs d’exonérations fiscales pour lesquels le secteur du transport aérien est explicitement mentionné parmi les secteurs concernés :

– le dégrèvement exceptionnel de CFE due au titre de 2020 pour les entreprises réalisant moins de 150 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel sur décision des intercommunalités, prévu par l’article 3 du PLFR (voir supra) ;

– les dispositifs transversaux dexonérations de cotisations sociales et d’étalement des passifs prévu par l’article 18 du PLFR (voir supra).

Quelques plans de soutien aux secteurs aéronautiques dans le monde

Plusieurs plans, composés de mesures diverses, ont été mis en place par les États pour soutenir leur filière aéronautique.

Ainsi, les États-Unis ont, dès la fin du mois de mars, apporté une aide de près de 60 milliards de dollars à leur secteur aérien, dont la moitié sous forme de subvention directe et l’autre sous forme de prêts, par le biais du plan de soutien massif à l’économie américaine de 2 200 milliards de dollars, prévu par le Coronavirus Aid, Relief, and Economic Security Act (« CARES Act »). L’octroi de ces aides est conditionné à l’engagement des compagnies à ne pas mettre en œuvre des plans de licenciement ni baisser les salaires d’ici la fin du mois de septembre 2020, et à ne pas verser de dividendes, procéder à des rachats d’actions ou augmenter les plus hauts salaires jusqu’en septembre 2021. Les compagnies doivent également s’engager à maintenir pendant deux ans les destinations intérieures desservies en mars.

À la fin du mois de mai, un accord entre l’Allemagne et la Commission européenne a été trouvé autour du plan de sauvetage de la compagnie aérienne Lufthansa qui prévoit une entrée au capital de l’État allemand pour 300 millions d’euros, accompagnée d’un apport de 5,7 milliards d’euros de fonds propres et d’un prêt de 3 milliards d’euros de la banque publique KfW, soit un total de 9 milliards d’euros. En contrepartie, la compagnie s’est engagée à céder à des concurrents jusqu’à 24 créneaux horaires de décollage et d’atterrissage dans les aéroports de Francfort et Munich.

Dernier exemple, le Gouvernement italien nationalisera, au mois de juin, la compagnie Alitalia en apportant 3 milliards d’euros de capitaux.

IV.   LE SOUTIEN AU SECTEUR DES ENTREPRISES TECHNOLOGIQUES ET START-UPS

En raison de leur modèle de développement spécifique, les entreprises technologiques, notamment les start-ups innovantes, ont été fragilisées par la crise : 80 % anticipent une baisse de leur activité en avril, supérieure à 50 % pour la majorité d’entre elles ([100]). Les levées de fonds ont chuté depuis mars (– 32 % en nombre d’opérations et – 24 % en montant par rapport à l’année précédente ([101])).

Le secteur des entreprises technologiques en chiffres

10 000 à 20 000 start-ups en France

des projections de créations de 25 000 emplois nets avant la crise, soit entre 10 % et 20 % du total d’emplois créés

100 000 emplois

Source : dossier de presse du Gouvernement pour le plan de soutien aux entreprises technologiques, 5 juin 2020.

 

SYNTHÈSE DU PLAN DE SOUTIEN AU SECTEUR DES ENTREPRISES TECHNOLOGIQUES ET START-UPS

Mesure

Montant estimé

Véhicule de financement

PGE

3 milliards d’euros

Article 6 de la LFR du 23 mars 2020 (encours de 300 milliards d’euros)

Fonds d’investissement « French Tech souveraineté »

150 millions d’euros (voire 500 millions d’euros en 2021)

PIA

Soutien et financement des entreprises technologiques

475 millions d’euros dont :
- 160 millions d’euros pour le French Tech Bridge
- 100 millions d’euros de prêts Bpifrance
- 120 millions d’euros fonds PSIM
- 80 millions pour le concours d’innovation
- 15 millions d’euros pour la nouvelle vague de Challenges IA

PIA
30 millions d’euros (AE/CP) sur le programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » dans le présent PLFR pour accroître l’enveloppe des aides à l’innovation de Bpifrance Financement

Soutien à l’émergence d’un vivier de start-up

180 millions d’euros dont :
- 65 millions d’euros pour les SATT
- 15 millions d’euros pour une deuxième vague d’appel à projet sur les programmes « deep tech »
- 100 millions d’euros pour le Fonds d’investissement French Tech n° 2 de Bpifrance

PIA

Total

Environ 3,8 milliards deuros

 

Source : commission des finances.

● Ces entreprises ont bénéficié des mesures générales d’urgence mises en place par le Gouvernement. D’après les chiffres du Gouvernement ([102]) :

– près de 5 000 start-ups ont obtenu un PGE pour un total de 3 milliards d’euros ;

– entre 40 % et 60 % des start-up ont eu recours au dispositif d’activité partielle ;

– des financements en obligations convertibles du fonds French Tech Bridge, lancé fin mars avec une enveloppe initiale de 80 millions d’euros, ont été accordés à une vingtaine d’entreprises pour un total de près de 50 millions d’euros ;

– fin mai, près de 2,5 milliards d’euros de crédit impôt recherche (CIR) ont été versés aux PME innovantes de façon anticipée.

● En complément, le Gouvernement a acté la mise en place d’un plan de soutien sectoriel, essentiellement financé par le PIA.

En premier lieu, il prévoit la création du fonds dinvestissement en fonds propres « French Tech Souveraineté », géré par Bpifrance, afin de soutenir les entreprises technologiques développant des technologies d’avenir souveraines et d’aider les start-up à se financer. 150 millions d’euros provenant des crédits PIA seront redéployés pour financer ce fonds. Celui-ci pourrait être complété en 2021 pour atteindre plus de 500 millions d’euros.

En deuxième lieu, le Gouvernement a décidé de mettre en place des mesures de soutien au financement des entreprises technologiques pour passer la crise et continuer à innover, pour un montant total de 500 millions deuros :

– l’enveloppe du fonds French Tech Bridge est doublée (80 millions d’euros supplémentaires) pour atteindre 160 millions d’euros, et 320 millions d’euros en prenant compte l’effet de levier sur les investisseurs privés, pour financer l’activité des start-up entre deux levées de fonds sous forme d’obligations convertibles ;

– 100 millions deuros de prêts seront distribués par Bpifrance pour soutenir la trésorerie des start-up viables innovantes mais ne pouvant pas obtenir un PGE en raison de leur statut conjoncturel d’entreprise en difficulté au sens de la réglementation européenne. À ce titre, le présent PLFR prévoit l’ouverture de 30 millions d’euros (AE/CP) sur le programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » ;

– le fonds dinvestissement PSIM (Programme de soutien à l’innovation majeure) est rechargé de 120 millions deuros afin d’accompagner de nouvelles start-ups lauréates du Concours mondial d’innovation ;

– les dispositifs daides à linnovation sont renforcés : le Concours d’innovation (i-Nov) bénéficiera d’une dotation supplémentaire de 20 millions d’euros (pour une enveloppe totale de 80 millions d’euros) et une nouvelle vague de Challenges IA sera lancée pour 15 millions d’euros.

En troisième lieu, le Gouvernement a accentué les mesures de soutien à lémergence dun vivier de start-up pour près de 200 millions deuros. Ainsi, une troisième tranche de financement de 65 millions d’euros en faveur de quatre sociétés d’accélération du transfert de technologies (SATT) sera débloquée, une deuxième vague d’appel à projet dotée de 15 millions d’euros du PIA à destination de programme spécialisés sur l’entreprenariat « deep tech » sera lancée, et le Fonds d’investissement French Tech n° 2, doté de 100 millions d’euros et géré par Bpifrance, sera créé afin d’accélérer l’essor de start-up à forte dimension technologique.

En quatrième lieu, le plan prévoit le lancement d’une consultation auprès du grand public et des entreprises sur les usages numériques, ouverte jusqu’au 31 juillet 2020.

Enfin, afin de soutenir le recrutement dans les start-up, deux actions d’information sont prévues : le lancement d’une plateforme de contenus en ligne présentant les métiers de la Tech et le lancement d’une compagne de communication sur les opportunités d’emploi dans la French Tech. Par ailleurs, la moitié de l’enveloppe du French Tech Community Fund (1 million d’euros), sera dédiée à la promotion d’initiatives locales des emplois dans la French Tech.

V.   UN SOUTIEN AU SECTEUR DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS QUI SERA ACCENTUÉ DANS LE CADRE DU PLAN DE RELANCE

Malgré l’absence de fermetures administratives, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) a connu une baisse de son activité de 88 % au début du mois d’avril 2020 par rapport à une situation normale ([103]), une perte d’activité comparable à celle du secteur de l’hôtellerie-restauration. Des initiatives spécifiques pour assurer la sécurité sanitaire sur les chantiers ont été mises en œuvre (publication d’un guide professionnel), et les préfets ont été particulièrement mobilisés pour accompagner la reprise des chantiers. Ces mesures, ainsi que la levée du confinement, ont permis une reprise de l’activité depuis mi-mai : seul 1 % des chantiers de travaux publics et moins de 15 % des chantiers du bâtiment étant encore à l’arrêt aujourd’hui.

Le secteur du BTP en chiffres

 2 millions d’emplois

 11 % du PIB

 chiffre d’affaires total de 150 milliards d’euros

 plus de 620 000 entreprises

 280 000 embauches en 2018

Source : communiqué de presse du Gouvernement sur le soutien au secteur du BTP, 10 juin 2020, observatoire des métiers du BTP.

 

SYNTHÈSE DU PLAN DE SOUTIEN AU SECTEUR DU BTP

Mesure

Montant estimé

Véhicule de financement

PGE

8,2 milliards d’euros

Article 6 de la LFR du 23 mars 2020 (encours de 300 milliards d’euros)

Fonds de solidarité

510 millions d’euros

Ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation

Remises de charges sociales

nc

Article 18 du présent PLFR

Renforcement du dispositif de garantie de l’État à l’assurance-crédit

nc

Article 15 du présent PLFR

Remboursement des stocks de créances de report en arrière des déficits et des créances qui viendraient à être constatées en 2020

nc

Article 2 du présent PLFR

Instructions pour inciter au partage des surcoûts

 

 

Plan apprentissage

130 millions d’euros pour le secteur

400 millions d’euros en AE et 200 millions d’euros en CP ouverts sur le programme 103 dans le présent PLFR pour financer l’ensemble du plan apprentissage. 100 millions d’euros (AE/CP) en redéploiements internes sont aussi prévus

Hausse de la dotation pour les investissements locaux

1 milliard d’euros à 4,8 milliards d’euros avec l’effet de levier attendu qui financeront notamment des projets en lien avec la rénovation thermique des bâtiments publics

Ouverture de 1 milliard d’euros (AE) sur le programme 119

Source : commission des finances.

● Le secteur du BTP a bénéficié des dispositifs de soutien publics instaurés dès le mois de mars :

– 360 000 entreprises ont bénéficié du fonds de solidarité pour un montant de 510 millions d’euros ;

– 60 000 PGE ont été accordés pour un montant total de 8,2 milliards d’euros ;

– au moins 1,4 million de salariés ont été placés en activité partielle et 1,3 milliard d’euros d’indemnités ont été versés à ce titre pour les mois de mars et avril.

● Le Gouvernement a pris de nouvelles mesures pour accompagner les entreprises du secteur.

Premièrement, plusieurs mesures de soutien à la trésorerie des entreprises ont été actées.

Ainsi, l’article 18 du PLFR 3 prévoit que les entreprises de moins de 50 salariés dont l’activité a été réduite d’au moins 50 % entre le 1er février et le 31 mai 2020 par rapport à la même période l’année précédente peuvent bénéficier de remises de charges sociales jusquà 50 % de leurs échéances. Cet article prévoit également que toutes les entreprises du secteur pourront bénéficier de plans d’apurement de leurs charges sociales (voir commentaire d’article infra).

Deux autres mesures prévues par le présent PLFR bénéficieront aux entreprises du secteur du BTP : le renforcement du dispositif de garantie de lÉtat à lassurance-crédit (article 15, voir commentaire d’article) et l’ouverture de la possibilité, pour les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés, de demander le remboursement immédiat de leur stock de créances de report en arrière de leurs déficits ainsi que des créances qui viendraient à être constatées en 2020 du fait des pertes liées à cette crise sanitaire (article 2, voir commentaire d’article).

Deuxièmement, des mesures spécifiques ont été prises pour permettre le partage des surcoûts directs liés à l’arrêt des chantiers et à la mise en œuvre des mesures sanitaires (instruction du Premier ministre du 9 juin aux maîtres d’ouvrage de l’État, circulaire du 20 mai 2020 demandant aux préfets de promouvoir des chartes définissant une approche solidaire des surcoûts et leur permettant d’accorder une dotation dérogatoire aux collectivités territoriales pour leur permettre de prendre en charge une partie des surcoûts). Un nouveau comité de suivi, piloté par le Commissariat général au développement durable, sera chargé d’objectiver les surcoûts liés à la situation sanitaire et le Gouvernement encourage les maîtres d’ouvrage publics à augmenter les avances aux entreprises titulaires de marchés publics.

Enfin, deux mesures présentes dans le PLFR 3 vont permettre de soutenir l’emploi et l’activité du secteur.

En effet, avec plus de 150 000 apprentis en 2018, le secteur du BTP sera largement concerné par le plan spécifique en faveur de lapprentissage inscrit dans le PLFR 3 (voir supra) : l’aide à l’apprentissage devrait représenter 130 millions d’euros pour le secteur.

De plus, le présent PLFR prévoit l’ouverture dun milliard deuros en AE sur le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » afin d’accroître, grâce à l’effet de levier attendu, les investissements locaux de 4,8 milliards d’euros sur la période 2020-2021. Ces crédits financeront prioritairement des projets portant sur la santé, la transition écologique, notamment la rénovation thermique de bâtiments publics, et la rénovation du patrimoine.

● Des mesures complémentaires sont attendues dans le cadre du plan de relance qui sera présenté au mois de septembre 2020.

VI.   UN PLAN DAIDES À LA FILIÈRE DU LIVRE DE PLUS DE 230 MILLIONS DEUROS

● L’épidémie de Covid‑19 a eu des conséquences importantes sur la filière du livre : la fermeture des librairies a entraîné un effondrement des ventes (– 66% pendant les quatre premières semaines de confinement d’après une étude de GFK pour Livres Hebdo) et l’obligation, pour les éditeurs, de revoir en profondeur le calendrier de publication des nouveautés. Selon un sondage du Syndicat national de l’édition, près de la moitié des éditeurs s’attendent à une perte de chiffre d’affaires comprise entre 20 et 40 % sur l’année 2020, et à plus de 40 % pour un quart d’entre eux. L’ensemble de la filière du livre évalue à 500 millions d’euros le manque à gagner subi en 2020. Le plan d’aides de l’État se décompose en plusieurs volets :

– des mesures d’urgence mises en place dès le mois de mars (150 millions d’euros) ;

– des mesures nouvelles inscrites dans le présent PLFR (80 millions d’euros d’aides directes notamment) ;

– des mesures de relance à hauteur de 70 millions d’euros pourraient venir compléter le dispositif, afin d’atteindre un montant total de 300 millions d’euros.

 

SYNTHÈSE DU PLAN DE SOUTIEN AU SECTEUR DU LIVRE

Mesure

Montant estimé

Véhicule de financement

PGE

115 millions d’euros

Article 6 de la LFR du 23 mars 2020 (encours de 300 milliards d’euros)

Chômage partiel

17 millions d’euros

Décret n° 2020-325 du 25 mars 2020 relatif à l’activité partielle

Fonds de solidarité

6 millions d’euros

Ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation

Enveloppe d’urgence du Centre national du livre

5 millions d’euros + 1,3 million d’euros de financements des partenaires

 

Exonérations de cotisations sociales

nc

Article 18 du présent PLFR

Fonds de soutien pour les librairies indépendantes

25 millions d’euros

Ouvertures de crédits prévues par amendement

Fonds de soutien pour les maisons d’édition

5 millions d’euros

Ouvertures de crédits prévues par amendement

Fonds de modernisation des librairies

12 millions d’euros sur 2020 et 2021

Ouvertures de crédits prévues par amendement

Prêts de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFIC)

40 millions d’euros

Ouverture des 40 millions d’euros sur le programme 334 dans le présent PLFR

Total

Environ 230 millions deuros

 

Source : commission des finances.

● La filière du livre a bénéficié des mesures générales pour les entreprises mises en œuvre pour répondre à la crise, à hauteur de 150 millions deuros : les éditeurs et les librairies ont bénéficié de prêts garantis par l’État, pour un encours d’environ 115 millions d’euros. Les acteurs les plus fragilisés qui ne peuvent pas obtenir de PGE ont accès aux mécanismes d’avances remboursables et de prêts participatifs.

Les maisons d’édition et les librairies ont utilisé le dispositif du chômage partiel (17 millions d’euros d’indemnités ont été versés à ce titre pour les mois de mars et d’avril). Les maisons d’édition devraient faire partie des entreprises concernées par les mesures de chômage partiel de longue durée en cours de négociation et les plus fragilisées (perte d’au moins 80 % du chiffre d’affaires en 2020) qui bénéficieraient d’une prise en charge à 100 % de ces heures non travaillées.

Mi-mai, 2 845 librairies et 1 535 maisons d’édition avaient bénéficié du fonds de solidarité pour plus de 6 millions d’euros, et celui-ci restera accessible jusqu’à la fin de l’année 2020 aux maisons d’édition dont le chiffre d’affaires a chuté de plus de 80 %. Les artistes-auteurs ont également eu accès au fonds de solidarité et bénéficieront d’une exonération de cotisations sociales entre mars et juin 2020.

Enfin, le Centre national du livre (CNL) a débloqué une enveloppe de 5 millions d’euros à destination des auteurs, des librairies et des maisons d’édition, à laquelle se sont ajoutés 1,3 million d’euros versés par des partenaires.

● Le PLFR 3 prévoit plusieurs mesures nouvelles en faveur du livre.

Le secteur bénéficie des exonérations automatiques de cotisations sociales prévues par l’article 18 du présent PLFR (voir commentaire de l’article 18). Sont ainsi concernés ([104]) :

– les maisons d’édition de moins de 250 salariés particulièrement touchées par la crise (baisse du chiffre d’affaires supérieure à 80 %) pour les mois de février à mai ;

– les librairies de moins de 10 salariés concernées par les fermetures administratives pour les mois de février à avril ;

– les artistes-auteurs qui bénéficieront d’une exonération forfaitaire de leurs cotisations et contributions en fonction de leur niveau de revenu (pour un coût estimé de 100 millions d’euros).

La filière du livre bénéficie également daides directes nouvelles, financées par l’État, les collectivités territoriales et des partenaires professionnels, à hauteur de 80 millions deuros.

En premier lieu, un fonds de soutien financé par lÉtat à hauteur de 25 millions deuros à destination des librairies indépendantes sera mis en place au niveau du CNL.

En deuxième lieu, un autre fonds de soutien aux maisons dédition réalisant un chiffre d’affaires compris entre 100 000 euros et 10 millions d’euros, financé par l’État à hauteur de 5 millions deuros, sera mis en place au niveau du CNL.

Les collectivités territoriales et les associations professionnelles pourront abonder le fonds par voie de fonds de concours.

En troisième lieu, un fonds géré par le CNL, dédié à la modernisation des librairies, sera financé par l’État à hauteur de 12 millions d’euros sur 2020 et 2021.

Le Gouvernement a indiqué au rapporteur général que le financement de ces trois fonds ferait l’objet d’un amendement.

Enfin, sur les 85 millions d’euros de crédits supplémentaires ouverts par le présent PLFR à destination de lInstitut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFIC), 40 millions deuros sont destinés au financement de prêts aux acteurs de la filière du livre.

 

 


  1  

   FICHE N° 6 :
PANORAMA DES PRINCIPALES MESURES ÉCONOMIQUES PRÉVUES PAR L’UNION EUROPÉENNE ET L’ALLEMAGNE

La dimension mondiale de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques a conduit la plupart des pays, ainsi que les institutions internationales et européennes, à adopter des mesures destinées à faire face aux difficultés sans précédent survenues.

L’examen des deux précédents projets de loi de finances rectificative pour 2020 a été l’occasion pour le Rapporteur d’étudier ces différentes mesures, en ciblant l’analyse sur les outils mis en place par l’Union européenne, l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, le Royaume-Uni et les États-Unis d’Amérique.

Il est renvoyé aux rapports faits sur ces deux projets de loi pour une présentation détaillée de ces mesures (dont la teneur en langue originale ou en anglais, selon les cas, est accessible à partir de liens) ([105]). Les développements qui suivent n’ayant pas vocation à constituer une simple répétition des précédents, ils se concentreront sur les nouveaux outils prévus par l’Union européenne et l’Allemagne.

Les lecteurs intéressés par une description complète des mesures prises par chacun des États membres de l’Union européenne pourront utilement se référer au document élaboré à cet effet par la Commission européenne, qui recense les outils mis en œuvre et présente, lorsqu’il est connu, le montant associé à chacun d’eux. La dernière mise à jour de cette liste, à la date de rédaction du présent rapport, remonte au 15 juin 2020 ([106]).

A.   LES MESURES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES PRÉVUES PAR LUNION EUROPÉENNE

1.   Les mesures européennes prises pour faire face à la crise

La réponse économique de l’Union européenne aux défis posés par la crise actuelle est sans précédent, à la hauteur des enjeux soulevés. Cette ambition est résumée par le mot d’ordre du Conseil européen du 17 mars 2020, annonçant que l’Union et ses membres feront tout pour faire face à la crise, quoi qu’il en coûte ([107]).

a.   Les mesures juridiques et budgétaires

Dès les jours qui ont suivi cet engagement, les institutions ont agi, notamment à travers le déclenchement inédit de la clause dérogatoire générale prévue dans le Pacte de stabilité et de croissance, permettant aux États de déroger à leurs obligations budgétaires, mais aussi à travers l’assouplissement des règles en matière daides dÉtat décidé par la Commission sur le fondement de l’article 107 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) ([108]) .

Ces ajustements se sont révélés particulièrement opportuns, offrant la possibilité aux États membres dadopter les mesures jugées requises pour faire face aux conséquences de la crise. La France, à titre d’exemple, a pleinement fait usage des souplesses offertes par les institutions européennes, notamment avec le fonds de solidarité pour les entreprises (cf. infra, fiche n° 3) et l’exonération fiscale et sociale des aides versées par ce fonds.

L’action de l’Union européenne ne s’est toutefois pas cantonnée à des aménagements juridiques, même si ces derniers étaient nécessaires. L’Union a en effet mis en œuvre plusieurs mesures de soutien dans le cadre de la crise sanitaire et économique, en particulier un paquet de 540 milliards deuros décliné en trois volets :

 240 milliards deuros dans le cadre du Mécanisme européen de stabilité (MES), au titre de prêts aux États membres, le déblocage des fonds se faisant sans conditionnalité sils sont utilisés pour le financement des coûts directs et indirects des soins de santé, de guérison et de prévention face à la pandémie ;

 100 milliards deuros dans le cadre du programme SURE Support to mitigate Unemployment Risks in an Emergency ») au titre du soutien des mesures prises en matière dactivité partielle ;

 200 milliards deuros mobilisés par effet de levier à partir du fonds paneuropéen de garantie de 25 milliards deuros créé par la Banque européenne dinvestissement (BEI).

Il est renvoyé au rapport du Rapporteur général sur le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2020 pour une présentation détaillée de ce paquet et des autres mesures budgétaires prises par l’Union européenne – telles que le plan de la BEI pour mobiliser 40 milliards d’euros pour les PME ou encore la CRII (« Coronavirus response investment initiative », soit « initiative d’investissement en réponse au coronavirus) mettant à disposition 37 milliards d’euros ([109]).

D’une manière générale, l’Union et ses États membres ont mobilisé des ressources pour un total de lordre de 3 900 milliards deuros, ainsi qu’il ressort des données publiées par la Commission européenne présentées dans le tableau et le graphique suivants.

Synthèse de la réponse économique européenne
à la crise liée au Covid‑19

Mesure

Montant
(en milliards deuros)

Mesures nationales de liquidités
(incluant celles prises dans le cadre de lassouplissement des règles daide dÉtat)

2 885

Mesures prises dans le cadre de l’assouplissement des règles budgétaires

420

Mécanisme européen de stabilité

240

Financement d’investissements par la BEI

200

Programme SURE

100

Soutien budgétaire européen direct

70

Total

3 915

Source : Commission européenne.

 

b.   Le programme d’achat d’urgence pandémique de la BCE

La Banque centrale européenne (BCE) a, elle aussi, mis en œuvre une réponse massive aux besoins nés de la crise.

Dès le 18 mars 2020, la BCE a ainsi lancé le programme dachat durgence pandémique, ou PEPP (pour « Pandemic Emergency Purchase Programme ») lui permettant d’acheter des actifs à hauteur de 750 milliards deuros.

Le 4 juin 2020, le Conseil des gouverneurs de la BCE a décidé une extension significative du PEPP, notamment à travers une augmentation de 600 milliards deuros de lenveloppe du programme ([110]).

Cette décision a pour effet de porter le PEPP à un total de 1 350 milliards deuros.

La décision de la Cour constitutionnelle allemande du 5 mai 2020
sur les programmes d’achat de titres de la BCE

Les mesures prises par la BCE, en particulier le PEPP, ont reçu au début du mois de mai dernier une attention particulière à la suite d’une décision rendue par la Cour constitutionnelle allemande (« Bundesverfassungsgericht », ou BVerfG) considérant que le programme d’achat de dettes publiques (« Public Sector Purchase Programme », ou PSPP) était disproportionné par rapport à ses effets et excédait ainsi les compétences dévolues à l’institution (1).

La BVerfG, dans un communiqué de presse en anglais paru le 5 mai 2020 (2), a pris soin d’indiquer que sa décision ne concernait pas les mesures d’assistance prises par l’Union européenne ou la BCE dans le cadre de la crise liée au coronavirus.

La BCE, le jour même, a indiqué dans un communiqué avoir pris note de la décision de la cour allemande, ajoutant qu’elle continuerait à prendre toutes les mesures nécessaires à l’exercice de son mandat (3). Elle a également rappelé que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait déjà jugé, en 2018, que l’action de la BCE dans le cadre du PSPP relevait bien de son mandat en matière de stabilité des prix (4).

La CJUE, quant à elle, a rappelé le 8 mai 2020 qu’elle était seule compétence pour constater qu’un acte d’une institution de l’Union européenne était contraire au droit de l’Union – ce, afin de garantir l’application uniforme de ce dernier –, et que ses décisions rendues à titre préjudiciel lient le juge national quant à la solution à donner au litige (5).

(1) BVerfG, jugement du second sénat, 5 mai 2020, affaires 2 BvR 859/15, 2 BvR 1651/15, 2 BvR 2006/15 et 2 BvR 980/16 (lien en allemand ; lien en anglais).

(2) BVerfG, La décision de la BCE sur le programme dachat de dettes publiques excède les compétences de lUnion européenne, communiqué de presse du 5 mai 2020 (lien en allemand ; lien en anglais).

(3) BCE, communiqué de presse, 5 mai 2020.

(4) CJUE, grande chambre, 11 décembre 2018, Henrich Weiss e.a., Bernd Lucke e.a., Peter Gauweiler e.a., Johann Heinrich von Stein e.a., C-493/17.

(5) CJUE, Communiqué de presse à la suite de larrêt de la Cour constitutionnelle allemande du 5 mai 2020,  58-20, 8 mai 2020.

2.   Le plan de relance proposé par la Commission européenne : une initiative sans précédent

Parallèlement aux mesures prises, qui viennent dêtre présentées, la Commission européenne a présenté le 27 mai 2020 un plan de relance pour appuyer la reprise et préparer lavenir dans les meilleures conditions possibles ([111]).

a.   Un plan de relance aboutissant à un effort européen de 2 400 milliards d’euros

Le plan de relance est composé de deux volets :

 750 milliards deuros au titre de linitiative « Next Generation EU » ;

 1 100 milliards deuros au titre du cadre financier pluriannuel 2021-2027, à travers des renforcements ciblés.

En tout, la proposition de la Commission aboutit à doter le budget européen dune force de frappe de 1 850 milliards deuros entre 2020 et 2027, avec une concentration de laction les premières années, cruciales.

Si lon y ajoute les 540 milliards deuros mobilisés dans le cadre du paquet de soutien précédemment présenté, leffort global atteint un montant de lordre de 2 400 milliards deuros, soit un niveau voisin de celui du PIB de la France en 2019 dont 1 290 milliards deuros de mesures exceptionnelles  cest-à-dire au titre du paquet de soutien et de linitiative « Next Generation EU » ([112]).

b.   L’instrument « Next Generation EU », fer de lance du plan

Linstrument « Next Generation EU » consiste à permettre à la Commission demprunter 750 milliards deuros sur les marchés financiers en utilisant sa note de crédit solide, au moyen dun relèvement temporaire du plafond des ressources propres à 2 % du revenu national brut de lUnion européenne. Les fonds ainsi mobilisés seront ensuite utilisés par lintermédiaire des programmes européens et feront lobjet dun remboursement de long terme dans le cadre des futurs budgets de lUnion européenne, au plus tôt à compter de 2028 et sans dépasser 2058.

Il sagit ainsi dune mutualisation des dettes futures au niveau européen, qui trouve son origine dans linitiative historique portée par la France et lAllemagne quont présentée conjointement le Président de la République Emmanuel Macron et la chancelière Angela Merkel le 18 mai dernier ([113]) . Ladoption définitive de ce plan sans précédent suppose une validation par le Conseil, et la France, avec dautres, sest engagée dans un effort de conviction de ses partenaires les plus sceptiques.

Linvestissement des fonds ouverts par linstrument « Next Generation EU » concilie un soutien élevé aux territoires et aux acteurs économiques et des efforts pour accélérer la transition écologique et la transformation numérique de léconomie européenne. Il devrait reposer sur trois piliers ([114]) .

 Le premier pilier vise à soutenir les États membres en matière dinvestissements et de réformes, à travers :

 560 milliards deuros au titre de la nouvelle facilité pour la reprise et la résilience ouverte à lensemble des États membres. Elle concernera en particulier les plus touchés par la crise, et comprendra :

 55 milliards deuros de fonds supplémentaires au titre de la politique de cohésion entre 2020 et 2022, destinés en priorité aux États et aux régions dans lesquels les conséquences économiques et sociales de la crise sont les plus sévères ;

 une hausse de la dotation du Fonds pour une transition juste jusquà un maximum de 40 milliards deuros pour atténuer les conséquences économiques et sociales de la transition dans les territoires les plus durement affectés ;

 un renforcement de 15 milliards deuros du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) pour accompagner les zones rurales dans les changements structurels dont elles ont besoin ;

 Le deuxième pilier a pour ambition de relancer léconomie de lUnion en attirant les investissements privés :

 31 milliards deuros pour le nouvel instrument de soutien à la solvabilité des entreprises à travers le provisionnement dune garantie du budget de lUnion pour la BEI afin de mobiliser jusquà 300 milliards deuros de capitaux privés ; lobjectif est daider les entreprises à faire face aux difficultés de solvabilité dues à la crise et de les accompagner dans leur transformation écologique et numérique ;

 le renforcement du programme InvestEU pour investir dans les infrastructures durables, la recherche et linnovation, la numérisation, les investissements sociaux et les compétentes, à travers :

 Enfin, le troisième pilier de linstrument est destiné à tirer les enseignements de la crise et relever les défis stratégiques de lEurope, et prévoyant à cet effet :

 9,4 milliards deuros au titre du nouveau programme « LUE pour la santé », consistant en des subventions directes afin de financer des investissements dans les systèmes de santé européens, en particulier la sécurité sanitaire, la prévention et laccès aux soins ;

 le renforcement du mécanisme de protection civile de lUnion européenne, RescEU, pour atteindre au total de 3,1 milliards deuros finançant les infrastructures de réaction aux situations durgence sanitaire ;

 le renforcement des moyens alloués à dautres programmes européens pour accroître la résilience de lUnion, et concernant notamment :

c.   Le calendrier d’adoption du plan de relance

Le plan de relance constitue une proposition dune rare ambition quil appartiendra aux institutions européennes compétentes de concrétiser selon un calendrier prévisionnel établi par la Commission européenne et qui couvre la période courant de juillet 2020 à janvier 2021 ([115]).

Dici juillet 2020, est attendu un accord politique au sein du Conseil européen sur le cadre financier pluriannuel et la décision relative aux ressources propres de lUnion. Devrait ensuite venir la consultation du Parlement européen et, au début de lautomne 2020, ladoption du cadre financier pluriannuel révisé pour la période 2014-2020.

En décembre 2020, devrait intervenir ladoption du cadre financier pluriannuel 2021-2027 en cas dapprobation du Parlement européen, et ladoption de la décision relative aux ressources propres si lensemble des États membres la ratifie.

Si ce calendrier est respecté, le nouveau cadre financier pluriannuel 2021-2027 et les conséquences quil emporte en termes de moyens daction de lUnion pourront être mis en œuvre dès janvier 2021.

3.   La chronologie des mesures prises par l’Union européenne dans le cadre de la crise du coronavirus, témoignage d’une réponse sans précédent

 Afin dillustrer le plus lisiblement possible limportance et la variété des actions entreprises par lUnion européenne depuis le début de la crise, il est apparu utile den dresser la chronologie, présentée dans les tableaux qui suivent.

Actions de l’Union européenne face à la crise du coronavirus
(janvier-février 2020)

Date

Action

Janvier 2020

9 janvier

Activation du système d’alerte précoce et de réaction (SAPR)

17 janvier

Réunion du Comité de sécurité sanitaire sur le nouveau coronavirus

28 janvier

Activation du mécanisme de protection civile de l’UE pour rapatrier des citoyens européens

31 janvier

Mobilisation des premiers fonds pour la recherche sur la nouvelle pandémie

Février 2020

1er février

Fourniture à la Chine d’une aide d’urgence

1er et 2 février

Premiers rapatriements de citoyens de l’UE

23 février

Fourniture à la Chine d’une aide supplémentaire

24 février

Paquet d’aides pour renforcer la préparation, la prévention et le confinement du virus au niveau mondial

28 février

Première acquisition groupée (associant l’Union et les États) d’équipements de protection individuelle (EPI)

Source : Commission européenne.

Actions de l’Union européenne face à la crise du coronavirus (mars 2020)

Date

Action

2 mars

Création d’une équipe de réaction face au coronavirus pour coordonner les moyens d’action

6 mars

Intensification de la R&D pour faire face au coronavirus (augmentation des fonds prévus et des projets de recherche soutenus)

10 mars

Initiative d’investissement en réaction au coronavirus (notamment dans la santé)

Propositions de mesures visant à atténuer l’impact de la pandémie sur l’industrie aéronautique et l’environnement

13 mars

Réponse coordonnée pour lutter contre l’impact économique du coronavirus et outils de flexibilité (notamment pour les aides d’État et le cadre budgétaire européen)

15 mars

Garantie de l’approvisionnement en EPI dans l’Union européenne

16 mars

Soutien financier d’un laboratoire pour intensifier le développement et la production de vaccins contre le coronavirus

Lignes directrices sur la gestion des frontières en matière de santé

17 mars

Constitution d’un groupe européen d’experts scientifiques sur le Covid-19

18 mars

Lignes directrices sur la protection des droits des passagers

19 mars

Encadrement temporaire en matière d’aides d’État pour renforcer le soutien à l’économie

Première réserve stratégique RescEU de matériel médical

20 mars

Mise à disposition de normes européennes sur les fournitures médicales

Activation de la clause dérogatoire générale en matière budgétaire

23 mars

Orientations pratiques sur les lignes directrices précédemment publiées

25 mars

Orientations sur la protection des technologies et actifs européens critiques

26 mars

Réaffirmation du soutien européen à la coopération internationale

Recommandations pour assurer la continuité des transports essentiels, notamment de fournitures médicales et de personnels

27 mars

Accroissement du budget destiné aux rapatriements de citoyens européens et à la réserve RescEU de matériel médical

30 mars

Orientations pratiques pour garantir la libre circulation des travailleurs exerçant des professions critiques dans la lutte contre la pandémie

Accroissement de l’aide financière aux Balkans et aux pays du voisinage oriental de l’Union

31 mars

Accroissement de l’aide financière pour renforcer le soutien aux réfugiés de Syrie et aux personnes vulnérables

Source : Commission européenne.

Actions de l’Union européenne face à la crise du coronavirus
(avril 2020)