N° 3399

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2020.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2021 (n° 3360),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 33
 

 

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR :

 

RECHERCHE

 

 

Rapporteur spécial : M. Francis CHOUAT

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES ANALYSES DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. Un choc budgétaire massif en faveur de la recherche en 2021

A. Un budget 2021 en cohérence AVEC les engagements pris dans le cadre de la loi de programmation de la recherche

1. La loi de programmation de la recherche : un projet sur le point d’être adopté

2. Une mise en œuvre des engagements votés par l’Assemblée nationale le 23 septembre dernier dans le projet de loi de programmation de la recherche

a. Un effort budgétaire sans précédent des moyens alloués à la recherche publique

b. Accroissement des financements compétitifs de l’Agence nationale de la recherche

c. Montée en puissance des dispositifs de valorisation de la recherche

d. Revalorisation des carrières et soutien à l’emploi scientifique

B. La recherche bénéficie de financements conséquents en dehors du strict cadre de la mires

1. La mission Plan de relance : un soutien essentiel aux politiques de recherche et d’enseignement supérieur en période de crise

2. Les PIA 3 et 4 : des investissements à long terme dans les politiques de recherche

a. Le PIA 3

b. Le PIA 4

3. Des financements européens à travers le programme Horizon Europe

II. En conformité avec les engagements contenus dans le projet de loi de programmation, un budget 2021 de la mission recherche qui engage un effort sans précédent

A. malgré les mesures prévues dans le projet de lpr, les grands opérateurs de la recherche publique redoutent les effets financiers de la crise

1. L’Agence nationale de la recherche : une puissante montée en charge

a. Une augmentation des crédits d’engagement permettant d’améliorer les taux de sélection et de préciput

b. Une accélération de la montée en charge des engagements à travers le plan de relance

2. Une vive augmentation de la subvention au Centre national de la recherche scientifique lui permettant de faire face à ses difficultés à financer son GVT

a. Une forte mobilisation du CNRS dans le cadre de la recherche pour faire face à l’épidémie de Covid-19

b. Une subvention conséquente pour financer le GVT

3. Des moyens légèrement renforcés pour l’Institut national de la santé et de la recherche médicale

a. La création d’une nouvelle agence pour la recherche sur le VIH, les hépatites et les maladies infectieuses émergentes

b. Des difficultés liées à la prise en charge des coûts indirects

c. Une forte implication dans la structuration de la recherche française et de sa valorisation à travers les PIA

4. L’Institut national du cancer : une double tutelle, un financement public dual

a. La mise en œuvre de la stratégie décennale de lutte contre les cancers

b. La recherche contre les cancers pédiatriques

5. La politique spatiale : un effort significatif grâce au plan de relance

a. Un budget en retrait par rapport à 2020 du fait de l’apurement de la dette de financement envers l’Agence spatiale européenne

b. Un complément substantiel apporté au secteur spatial à travers le plan de relance

c. Un contrat d’objectifs et de performance en préparation

B. L’inquiétude des opérateurs de la recherche dans l’énergie, le développement et la mobilité durables malgré les crédits alloués en 2021

1. La dotation tripartite du Commissariat à l’énergie atomique

2. L’inquiétude de l’Institut français du pétrole-Énergies nouvelles sur l’érosion de ses ressources propres

C. les trois autres programmes de la mires : des évolutions contrastées

1. Un budget en progression pour la recherche et l’enseignement supérieur agricoles

2. Un changement de périmètre d’importance sur le programme 192

3. Une érosion des crédits affectés à la recherche duale

III. Des dépenses fiscales nécessaires en période de crise

A. Le crédit d’impôt recherche : un soutien nécessaire mais perfectible

1. Le CIR, un soutien nécessaire en période de crise

2. Une réflexion à poursuivre sur son efficience

B. Le crédit d’impôt en faveur de l’innovation

C. Le dispositif « Jeunes entreprises innovantes » : un véritable succès

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES  PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la date limite pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires était fixée au 10 octobre 2020.

À cette date, 71 % des réponses étaient parvenues au rapporteur spécial.


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   PRINCIPALES ANALYSES DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

UN ENGAGEMENT SANS PRÉCÉDENT
EN FAVEUR DE LA RECHERCHE

Le projet de loi de finances pour 2021 porte un choc budgétaire massif en faveur de la recherche qui répond aux exigences du projet de loi de programmation de la recherche. Le budget permet d’organiser la montée en puissance de la recherche française et de fixer des priorités stratégiques.

Sur les désormais six programmes couverts par le présent rapport spécial, les crédits progressent de façon notable à périmètre constant : 383 millions d’euros en autorisations d’engagement (+ 3,3 %) et 151 millions d’euros de crédits de paiement (+ 1,3 %). Hors universités, l’enveloppe globale s’élève à 12 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de crédits de paiement.

En 2021, le financement de la recherche sera en outre accompagné par quatre autres vecteurs que sont le plan de relance, les programmes d’investissements d’avenir, les contrats de plan État-région et le programme européen Horizon Europe.

L’Agence nationale de la recherche verra ses moyens s’accroître de manière considérable. D’une part, les crédits du programme 172 progresseront de 158,3 millions d’euros en autorisations d’engagement. D’autre part, le plan de relance consacrera 428 millions d’euros supplémentaires en autorisations d’engagement.

Dans l’ensemble, les grands opérateurs de recherche devraient voir leur subvention pour charges de service public augmenter. Ainsi, la subvention du CNRS connaîtra un ressaut de l’ordre de 68 millions d’euros afin de compenser son « glissement vieillesse travail » (GVT).

Comme les années précédentes, les crédits en faveur de la recherche sur la cancérologie pédiatrique, 5 millions d’euros, seront versés par l’ANR. En revanche, les acteurs de la recherche duale, le CEA et le CNES, émettent des inquiétudes quant à son financement, qui a été transféré au sein de la mission Plan de relance.

Le budget de recherche spatiale connaît une contraction mécanique qui s’explique par la fin du remboursement de la dette à l’Agence spatiale européenne et une modification dans le circuit du financement du CNES, neutre budgétairement.

Enfin, les dépenses fiscales en matière d’innovation, soutien primordial en période de crise, seront maintenues à des niveaux très satisfaisants, à l’instar du crédit d’impôt en faveur de la recherche ou du dispositif « Jeunes entreprises innovantes » dont le succès est largement reconnu.

 


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   DONNÉES CLÉS

Structure de la MIRES en crédits de paiement

 

Évolution des autorisations d’engagement par programme

 

 


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   INTRODUCTION

Le présent rapport examine six des huit programmes de la mission Recherche et enseignement supérieur. Cette mission, placée sous la responsabilité du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI), atteint un montant global de 28,5 milliards d’euros de crédits de paiement en 2021.

Le rapporteur spécial est donc amené à se prononcer sur un champ plus restreint que la mission budgétaire. Ce champ recouvre, pour l’essentiel, les subventions allouées aux grands opérateurs nationaux de recherche mais ne comprend pas les crédits alloués à la recherche au sein des universités.

Néanmoins, afin d’adopter une vision la plus réaliste possible, le présent rapport s’attache, autant que possible, à préciser les crédits des missions Investissements d’avenir et Plan de relance qui concourent aux politiques de recherche et d’enseignement supérieur.

En 2021, un effort sans précédent sera mis en œuvre pour les politiques de recherche à trois égards. Tout d’abord, 2021 sera la première année de mise en œuvre de la loi de programmation de la recherche (LPR), actuellement en cours d’examen au Sénat, qui fixe la trajectoire budgétaire pour les dépenses en faveur de la recherche. Ensuite, le plan de relance devrait concourir aux politiques de recherche et d’enseignement supérieur pour près de 4,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Enfin, la mission Investissements d’avenir prévoit 16,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Cumulé, cela représente près de 50 milliards d’euros en autorisation d’engagement dans le domaine de la recherche, de l’innovation et de l’enseignement supérieur.

Pour autant, il convient de ne pas perdre de vue les financements de niveau infra et supra-étatiques. En 2020, l’Europe de la recherche est au cœur des discussions budgétaires. Un accord historique a été trouvé lors du Conseil européen qui s’est tenu du 17 au 21 juillet 2020 sur le prochain cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2021 à 2027. Les propositions sont là encore ambitieuses : l’enveloppe financière destinée à la mise en œuvre du programme Horizon Europe pour la période 2021-2027 devrait être de 91 milliards d’euros, dont 85,5 milliards d’euros provenant du CFP et 5,4 milliards du plan de relance européen, Next Generation EU. Au niveau territorial, une nouvelle génération de contrats de plan État-régions pour la période 2021-2027 est actuellement en cours de préparation.

Ce projet de loi de finances tient dès lors ses promesses en concrétisant l’impulsion historique donnée par le projet de loi de programmation de la recherche.


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I.   Un choc budgétaire massif en faveur de la recherche en 2021

L’année 2021 sera une année singulière à plusieurs égards. Ce sera, d’une part, la première année de mise en œuvre de la loi de programmation de la recherche et, d’autre part, une année où les sources de financement en faveur de la recherche seront multipliées.

A.   Un budget 2021 en cohérence AVEC les engagements pris dans le cadre de la loi de programmation de la recherche

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 répond aux engagements forts portés par le projet de loi de programmation de la recherche (LPR).

1.   La loi de programmation de la recherche : un projet sur le point d’être adopté

Dès le 20 juin 2018, l’Assemblée nationale a adopté, à l’initiative de notre alors collègue Amélie de Montchalin, la résolution n° 1037 pour le renforcement des outils et des moyens de pilotage de la recherche publique qui fixait trois objectifs :

– la nécessité de développer des outils pluriannuels de pilotage budgétaire de la recherche fondamentale ;

– l’importance du développement de systèmes d’informations interopérables ;

– l’impératif de clarification des moyens dont le secteur spatial dispose pour l’avenir.

Depuis le lancement par le Premier ministre, le 1er janvier 2019, de l’élaboration de la LPR, trois groupes de travail se sont consacrés à l’étude du financement de la recherche, à l’attractivité des emplois et des carrières scientifiques et à la recherche partenariale et à l’innovation. À cet égard, le rapporteur spécial a contribué à la rédaction de l’un des trois rapports préparatoires à la LPR dans le cadre du groupe de travail sur la recherche partenariale.

Ces travaux ont été restitués au Premier ministre, en présence de la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, le 23 septembre 2019 ([1]). Le projet de LPR, présenté en Conseil des ministres le 22 juillet 2020, a fait l’objet d’une première lecture à l’Assemblée nationale et est actuellement examiné par le Sénat.

Une grande partie des recommandations des trois groupes de travail réunis en 2019 ont été effectivement reprises. Tel est notamment le cas de l’accent mis sur la rémunération des personnels scientifiques et l’amélioration de l’attractivité des carrières, sur la création de chaires de professeur junior ou encore sur la hausse des moyens de l’ANR afin d’augmenter le taux de succès des appels à projets et le taux de préciput.

Le 12 octobre 2020, avant même l’adoption définitive du projet de loi, le premier accord national majoritaire en matière de recherche et d’enseignement supérieur a été signé entre les syndicats (SNPTES, SGEN-CFDT et UNSA) et les grands organismes de recherche (CNRS, INSERM, INRAE, INRIA et CPU) en présence du Premier ministre et de la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Cet accord détermine les modalités du plan de revalorisation des carrières des chercheurs, enseignants-chercheurs et personnels de la recherche en conformité avec le projet de LPR.

2.   Une mise en œuvre des engagements votés par l’Assemblée nationale le 23 septembre dernier dans le projet de loi de programmation de la recherche

À partir du texte adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, il est possible de vérifier que les engagements votés en première lecture sont effectivement retranscrits dans le projet de loi de finances.

a.   Un effort budgétaire sans précédent des moyens alloués à la recherche publique

Les trajectoires budgétaires fixées à l’article 2 du projet de LPR traduisent une augmentation sans précédent des dépenses budgétaires de l’État en faveur de la recherche, de l’innovation et de l’enseignement supérieur.

À cet égard, le programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires, premier bénéficiaire de l’augmentation des moyens, connaîtra un ressaut de 224 millions d’euros en crédits de paiement par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2020, ce qui traduit bien la trajectoire déterminée dans le projet de LPR.

Pour le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire, l’augmentation prévue doit exprimer les incidences budgétaires des mesures du projet de LPR. Cela concerne les crédits qui financeront les revalorisations indemnitaires destinées aux personnels des établissements d’enseignement supérieurs financés par le programme. Il s’agit également de divers dispositifs relatifs à la valorisation ou au recrutement d’enseignants-chercheurs (revalorisation de la rémunération des maîtres de conférence nouvellement recrutés, revalorisation du montant et accroissement du nombre des contrats doctoraux, environnement des « chaires de professeur junior », etc.), ainsi que de l’attribution de moyens aux établissements d’enseignement supérieur dans le cadre du dialogue contractuel et du dialogue stratégique et de gestion.

Ainsi, les crédits de paiement du programme 150 augmentent de 164,2 millions d’euros pour la mise en œuvre du projet de LPR, auxquels il convient d’ajouter la création de quinze emplois sur les opérateurs du titre 2, pour un montant de 900 000 euros.

Enfin, le projet prévoit un écart de – 32 millions d’euros par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2020 sur le programme 193 Recherche spatiale. Cette baisse pour l’année 2021 s’explique ainsi par :

– une augmentation des moyens dévolus à la recherche spatiale (11 millions d’euros) ;

– une diminution des besoins tendanciels du fait du rythme de décaissement des programmes engagés avant le projet de LPR (43 millions d’euros) ;

– une hausse tendancielle du budget du CNES (10 millions d’euros) ;

– une hausse tendancielle du budget d’EUMETSAT, qui se matérialisera par une augmentation de la cotisation française (19 millions d’euros) ;

– une baisse de la cotisation française à l’Agence spatiale européenne du fait du rythme de décaissement des programmes (72 millions d’euros).

En l’occurrence, hors mesure de transfert relative au financement du CNES et compte tenu de la fin du remboursement par la France de sa dette de financement envers l’Agence spatiale européenne, les crédits du programme 193 Recherche spatiale diminuent effectivement de 31,7 millions d’euros.

b.   Accroissement des financements compétitifs de l’Agence nationale de la recherche

L’article 2 du projet de LPR fixe également la trajectoire budgétaire des moyens d’intervention de l’Agence nationale de la recherche (ANR). Le périmètre de cette programmation des autorisations d’engagement de l’ANR recouvre le champ de ses interventions en soutien à des projets de recherche : appels à projets, programmes spécifiques (chaires industrielles, Labcom), financement des chaires de professeur junior.

Pour l’année 2021, le projet de LPR prévoit une augmentation des moyens de l’ANR de 149 millions d’euros en autorisations d’engagement par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2020. En 2021, les crédits alloués à l’ANR dans le cadre du programme 172 augmentent ainsi de 158 millions d’euros en autorisations d’engagement. À cela s’ajoutent les 428 millions d’euros en autorisations d’engagement affectés à l’ANR dans le cadre du plan de relance.


c.   Montée en puissance des dispositifs de valorisation de la recherche

Le projet de LPR prévoit notamment :

– le doublement des conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE) d’ici à 2027 ;

– le doublement des chaires industrielles financées par l’ANR pour soutenir l’investissement en R&D ;

– le doublement des Labcom, programme financé par l’ANR permettant de soutenir la création de laboratoires communs entre un laboratoire public et une PME ou une ETI ;

– le renforcement du dispositif des instituts Carnot, qui distingue des laboratoires publics pour le haut niveau et le professionnalisme de leurs travaux de recherche, afin d’atteindre un retour progressif à un taux d’abondement de 30 % ;

– la mise en place d’une convention industrielle de mobilité en entreprises des chercheurs (CIMEC) pour favoriser la mobilité des chercheurs et enseignants-chercheurs désireux de travailler à temps partiel en entreprise dans le cadre d’un partenariat avec un laboratoire public.

En l’occurrence, le PLF pour 2021 propose une augmentation de 100 CIFRE par rapport au PLF pour 2020, ainsi qu’une enveloppe spécifique de l’ordre de 9 millions d’euros supplémentaires pour permettre à l’ANR de financer les chaires industrielles, les Labcom et les instituts Carnot. La création d’une CIMEC sera financée à hauteur de 900 000 euros à partir des moyens d’intervention de l’administration centrale de la recherche.

Les conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE)

Le dispositif CIFRE a vocation à favoriser les échanges entre les laboratoires de recherche publique et les milieux socio-économiques et à contribuer à l’emploi des docteurs dans les entreprises.

Les CIFRE associent trois partenaires :

– un doctorant, titulaire d’un diplôme conférant le grade de master ;

– une structure bénéficiaire, entreprise, association ou collectivité territoriale, qui confie à un doctorant un travail de recherche objet de sa thèse ;

– un laboratoire, extérieur à la structure bénéficiaire, qui assure l’encadrement scientifique du doctorant.

L’entreprise recrute le doctorant en contrat de travail à durée indéterminée ou déterminée de 36 mois, en application des articles D. 1242-3 et D. 1242-6 du code de travail. Elle reçoit de l’Association nationale de la recherche et de la technologie (ANRT), qui gère ce dispositif pour le compte du MESRI, une subvention forfaitaire d’un montant de 14 000 euros par an pendant trois ans. Un contrat de collaboration est établi entre l’entreprise et le laboratoire de recherche.

Depuis le lancement du dispositif en 1981, les demandes de CIFRE ont connu une croissance continue et un doublement en une décennie jusqu’à atteindre 1 750 conventions en 2011. Le dispositif CIFRE concerne treize secteurs d’activité : aéronautique et spatial, électronique communication et information, énergie production et distribution, équipement production et distribution, équipement et produits, transports terrestres et navals, chimie et matériaux pharmaceutique et médical, agroalimentaire, services R&D et ingénierie, finance et juridique, services tertiaires, édition, BTP. Le graphique ci-dessous indique les trois secteurs principaux bénéficiaires, à savoir le secteur électronique, communication et informatique (18 % des CIFRE), les services R&D et ingénierie (19 %) et les services tertiaires (15 %).

Les docteurs CIFRE accèdent rapidement à l’emploi : 91 % ont un emploi au cours de la première année avec la fin de la convention et 97 % dans les 5 ans. Le dispositif contribue particulièrement à l'emploi des docteurs dans des services de R&D des entreprises. Selon l’enquête publiée en 2019 par l’ANRT sur les sorties de CIFRE en 2016 et 2012, plus de 70 % des docteurs CIFRE intègrent le secteur privé et 69 % des anciens docteurs CIFRE sortis en 2012 conservent en 2018 une mission de R&D au sein de l’entreprise.

Le budget du dispositif inscrit en loi de finances 2021 sur le programme 172 est de 63,6 millions d’euros. Cette enveloppe intègre une augmentation de 3,4 millions d’euros conformément à une mesure issue du projet de LPR. Le projet de LPR a en effet pour ambition de porter le montant total de CIFRE à 1 550 au PLF 2021 contre 1 450 inscrits au PLF 2020, soit 100 CIFRE supplémentaires.

 

d.   Revalorisation des carrières et soutien à l’emploi scientifique

Les mesures de revalorisation des enseignants-chercheurs et des chercheurs sont d’ordre indemnitaire et statutaire.

Sur le plan indemnitaire, 92 millions d’euros supplémentaires devraient être consacrés chaque année, entre 2021 et 2027, à la revalorisation des rémunérations des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche, pour un total de 644 millions d’euros de crédits supplémentaire par rapport à 2020 sur la période 2021-2027. Un accord relatif à l’amélioration des rémunérations et des carrières a été signé en ce sens le 12 octobre dernier par les organisations syndicales du CNRS, de l’INSERM, de l’INRAE, de l’INRIA et de la CPU.

S’agissant des mesures de revalorisation des carrières, il est prévu d’augmenter de 30 % de la rémunération des doctorants bénéficiant d’un contrat doctoral et de 20 % le nombre de ces contrats. À l’entrée dans les corps de maîtres de conférences et de chargés de recherche, les règles de classement seront révisées afin que chaque fonctionnaire de l’enseignement supérieur et de la recherche débute sa carrière rémunérée au minimum à deux SMIC.

Le rapport annexé au projet de LPR prévoit en outre que les effectifs sous plafond des établissements publics sous tutelle du MESRI progressent de 700 équivalents temps plein travaillés (ETPT) par rapport à 2020.

Ainsi, en exécution, le nombre d’emplois sous plafond du programme 172 augmentera de 315 ETPT et une hausse de 385 ETP est prévue sur le programme 150. Ces augmentations seront rendues possible par les mesures du projet de LPR porteuses de créations d’emplois scientifiques, notamment l’augmentation du nombre des contrats doctoraux et des conventions CIFRE, ainsi que l’augmentation du budget d’intervention de l’ANR puisqu’une part importante des financements attribués pour les projets de recherche a vocation à être utilisée pour recruter des personnels (doctorants, post-doctorants, ingénieurs, etc.).

B.   La recherche bénéficie de financements conséquents en dehors du strict cadre de la mires

Hors MIRES, trois autres sources de financement permettent d’allouer des moyens supplémentaires à la recherche.

1.   La mission Plan de relance : un soutien essentiel aux politiques de recherche et d’enseignement supérieur en période de crise

La mission Plan de relance devrait concourir au financement des politiques portées par la MIRES au moins à hauteur de 4,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 1,4 milliard d’euros en crédits de paiement. Pour ce qui est de la partie recherche, cinq actions issues de trois programmes permettront de financer directement les politiques de recherche.

Dans le cadre du programme 362 Écologie, l’action 5 Transition agricole comporte deux mesures en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche agricoles. D’une part, le volet recherche du Plan Protéines, destiné à encourager les actions de recherche fondamentale et appliquée, permettra de combler le déficit de recherche sur les espèces légumineuses et de définir des procédés innovants de transformation de ces protéines et de leur valorisation dans les systèmes alimentaires. L’enveloppe consacrée à la recherche devrait être de 22 millions d’euros selon le ministère de l’agriculture et de l’alimentation. D’autre part, un plan de communication en faveur de l’enseignement agricole public et privé et des métiers auxquels il prépare est prévu pour un montant de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement.

L’action 8 Énergies et technologies vertes du programme 362 comprend trois mesures. Premièrement, un projet important d’intérêt européen commun (IPCEI) devrait être mis en place sur l’hydrogène vert afin de soutenir la R&D et l’industrialisation d’électrolyseurs pour produire de l’hydrogène décarboné et déployer ces solutions dans l’industrie (1,3 milliard d’euros en autorisations d’engagement). Ensuite, le plan de relance prévoit un soutien spécifique à la R&D dans la filière nucléaire (100 millions d’euros en autorisations d’engagement), qui se décompose en quatre axes : soutien au développement du multirecyclage du combustible dans des réacteurs à eau pressurisé, création et rénovation de deux installations d’expérimentation du CEA, soutien aux projets d’« usines du futur » et aide à la R&D sur des solutions innovantes de gestion des déchets radioactifs. Enfin, le plan de soutien à l’aéronautique civil comporte un volet R&D dans le cadre de la programmation du Conseil pour la recherche aéronautique civile, qui cofinance notamment la recherche pour les aéronefs verts (600 millions d’euros en autorisations d’engagement).

L’action 2 Souveraineté technologique et résiliente du programme 363 Compétitivité comporte deux mesures en faveur de la recherche. La première mesure finance le soutien au secteur spatial et la recherche duale afin de soutenir les entreprises du secteur spatial en trésorerie et en fonds propres, de stimuler la recherche et l’innovation des entreprises du spatial dont la capacité d’autofinancement a été réduite par la crise sanitaire et de financer les opérateurs de la recherche duale, le CEA et le CNES (515 millions d’euros en autorisations d’engagement). La seconde mesure concerne la préservation de l’emploi en R&D, notamment en permettant une mise à disposition temporaire dans des laboratoires publics avec une prise en charge par l’État à hauteur de 80 % et en finançant 500 post-doctorats à hauteur de 80 % (300 millions d’euros en autorisations d’engagement).

L’action 5 Recherche du programme 364 permet d’accélérer la montée en puissance de la recherche compétitive en France en allouant 428 millions d’euros en autorisations d’engagement de moyens supplémentaires à l’ANR.

Enfin, les opérateurs de recherche et les établissements d’enseignement supérieur bénéficieront de crédits dans le cadre de l’action Rénovation énergétique. En effet, une enveloppe globale de 3,7 milliards d’euros en autorisations d’engagement est dédiée à la rénovation thermique des bâtiments publics. Au sein de cette enveloppe, le MESRI espère pouvoir bénéficier de 1 milliard d’euros dans le cadre de l’appel à projet lancé pour les établissements d’enseignement supérieur et de recherche. À la clôture de l’appel, les projets proposés par ces établissements s’élevaient à plus de 3,7 milliards d’euros.

2.   Les PIA 3 et 4 : des investissements à long terme dans les politiques de recherche

Le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI), qui a succédé depuis début 2018 au Commissariat général à l’investissement, met en œuvre les programmes d’investissements d’avenir (PIA) sous l’autorité du Premier ministre. Le PIA contribue à accélérer les efforts de structuration du système français de recherche publique pour répondre aux défis de société.

a.   Le PIA 3

Le PIA 3 comprend plusieurs actions en faveur de la recherche.

Les programmes prioritaires de recherche (PPR) permettent à l’état de mettre en œuvre un ensemble d’actions de recherche et d’innovation concrétisant des priorités stratégiques, grâce à un pilotage et des outils adaptés à chaque PPR. Les actions sont décidées par le Premier ministre, puis instruites par le MESRI et le SGPI, financées par le SGPI et mises en œuvre par l’ANR. Le pilotage revient à un organisme national de recherche missionné qui assure la coordination entre les acteurs scientifiques et l’articulation entre cette action et les orientations scientifiques des opérateurs. Par exemple, le PPR « Intelligence artificielle » a été coordonné par l’Inria, le PPR « Antibiorésistance » par l’INSERM. En 2021, 20 millions d’euros y seront consacrés.

Les Écoles universitaires de recherche (EUR) réunissent des laboratoires, masters et doctorats, dans une logique d’excellence et de renforcement de l’attractivité. L’enveloppe consacrée s’élèvera à 30 millions d’euros en 2021.

L’action Démonstrateurs et territoires d’innovation de grande ambition comporte un volet « Nucléaire de demain ». Il finance l’achèvement de la construction du réacteur Jules Horowitz (RJH) implanté sur le site du CEA à Cadarache, ainsi que des études de réacteurs innovants et le développement de plateformes expérimentales associées (295 millions d’euros pour 2021).

Les Équipements structurants de recherche (Equipex +) ont pour objet de répondre à des défis transversaux tel le stockage et le traitement des données de masse à l’échelle nationale et soutenir des équipements en lien avec la transition numérique, 120 millions d’euros y seront consacrés en 2021.

L’action Intégration des sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT), incubateurs et accélérateurs doit notamment permettre de financer des initiatives destinées à promouvoir et accompagner la création de start‑up à forte intensité technologique ou deep tech à hauteur de 20 millions d’euros en 2021.

Les sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT)

En vue de renforcer la mutualisation des moyens et des compétences en valorisation et d’accélérer le transfert, les SATT ont été mises en place dans le cadre du Fonds national de valorisation du premier programme d’investissements d’avenir (PIA 1).

Ce sont des sociétés de droit privé (sociétés par actions simplifiées) dont l’actionnariat, strictement public, est financé par les fonds du PIA. Les SATT mutualisent les moyens des établissements (notamment les universités) au niveau d’un territoire pour professionnaliser la mission de valorisation de ces résultats. Elles jouent ainsi un rôle clé pour optimiser les conditions de transférabilité vers les entreprises des résultats issus de la recherche publique par le financement de la « maturation », étape souvent manquante entre la recherche et le marché.

Elles ont pour objectifs :

– d’augmenter l’efficacité du couplage recherche publique et innovation pour créer de la valeur économique ;

– d’investir massivement dans la maturation de technologies issues des laboratoires publics pour accélérer leur accès au marché ;

– de mutualiser les moyens de transfert des structures publiques pour augmenter leur efficacité (masse critique, professionnalisme).

L’action Intégration des SATT, incubateurs et accélérateurs vise à tirer parti des connaissances et savoir-faire développés dans les laboratoires publics en les associant à une culture entrepreneuriale renforcée, afin de susciter des projets de création d’entreprises susceptible de devenir des champions technologiques. Cette dynamique implique une approche de formations à l’entrepreneuriat des chercheurs publics et une approche d’innovation favorisant le rapprochement des différents acteurs de l’écosystème.

Piloté par Bpifrance, cet appel à projets s’inscrit dans une logique d’amorçage d’accompagnement novateurs. Les projets sélectionnés bénéficient d’un financement sous forme de subventions dont le montant ne peut dépasser 50 % du coût total du projet, compris entre 0,5 et 3 millions d’euros.

La première vague de l’appel à projet « Intégration des SATT, incubateur et accélérateur » (SIA) a permis la sélection en janvier 2020, de 9 lauréats parmi 41 candidatures pour un montant de financement de 15,6 millions d’euros. Une seconde vague de l’appel à projets s’est clôturée en juillet 2020. Quatre vagues de cet appel à projets sont prévus jusqu’en décembre 2021.

 

b.   Le PIA 4

Le PIA 4, qui figure dans la mission Investissements d’avenir, contribue au plan de relance à hauteur de 11 milliards d’euros pour les années 2021 à 2022, puis au-delà de 2022 pour atteindre une taille cible de 20 milliards d’euros sur cinq ans. Ce PIA se décompose en deux logiques d’intervention, qui se traduiront par la création de deux nouveaux programmes.

Le programme 424 devra permettre de financer des investissements exceptionnels sur quelques secteurs stratégiques ou technologies émergentes, prioritaires pour la compétitivité de notre économie, la transition écologique et la souveraineté de nos modèles d’organisation. Il s’agit du volet dit « dirigé », doté de 1 500 millions d’euros pour 2021. Ce volet comporte plusieurs stratégies actuellement en cours d’élaboration, notamment dans les secteurs suivants : hydrogène décarboné, alimentation favorable à la santé, cybersécurité, numérique et innovation pédagogique, technologies du quantique.

Ces stratégies d'accélération seront mises en œuvre dans le cadre d'une gouvernance renouvelée, sous l’autorité d’un Conseil interministériel de l’innovation présidé par le Premier ministre, qui décide des orientations et des priorités de la politique de l’innovation. Elles se déclineront au moyen d'un nombre limité d'outils de financement créés dans le programme 424. Ils seront opérés, pour chaque dispositif, par l’opérateur du PIA le plus indiqué parmi l’ANR, Bpifrance, la Caisse des dépôts (Banque des territoires) ou l’Ademe. Les conventions à conclure entre l'État et les opérateurs sont en cours de préparation afin d'assurer la mise en œuvre opérationnelle de ces outils au service des stratégies d'accélération dès le premier semestre 2021.

Le volet structurel du PIA 4 devrait permettre de garantir un financement pérenne et prévisible aux écosystèmes d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation. Il bénéficie d’un financement de 562,5 millions d’euros pour 2021. Ce volet structurel a pour objectif de développer le soutien à l’enseignement scolaire, aux universités, aux grandes écoles, aux organismes de recherche et de transfert de technologie, afin de renforcer leur rayonnement scientifique à l’international, développer des campus de démonstration des grandes transitions sociétales et accompagner les innovations jusqu’au marché. Il devrait également servir à financer des projets de R&D risqués et favoriser les synergies entre le monde de la recherche et des entreprises.

 

 

 

3.   Des financements européens à travers le programme Horizon Europe

En 2021, le programme Horizon Europe, 8e programme cadre européen pour la recherche et l’innovation, succédera à Horizon 2020. Pour la période 2021-2027, il devrait être doté de 91 milliards d’euros, soit une hausse de 40 % par rapport à la période 2014-2020.

Le programme Horizon Europe comprend désormais quatre piliers :

– « Science ouverte », qui comprend le Conseil européen de la recherche, les actions Marie Sklodowska-Curie et infrastructures ;

– « Problématiques mondiales et compétitivité industrielle », qui comprend cinq clusters (santé, société inclusive et sûre, numérique et industrie, climat, énergie et mobilité, et alimentation et ressources naturelles) et le centre commun de recherche ;

– « Innovation ouverte », qui comprend le Conseil européen d’innovation, les écosystèmes européens d’innovation et l’Institut européen d’innovation et de technologie ;

– « Renforcement de l’espace européen de la recherche », afin de promouvoir le partage de l’excellence et soutenir les réformes des systèmes de recherche et d’innovation.

Deux évolutions principales sont à noter. D’une part, un pilier « Innovation ouverte », centré sur l’innovation créatrice de marchés, a été mis en place. Il doit permettre de favoriser le transfert des connaissances de la science à l’innovation, de faciliter la transformation industrielle, d’améliorer les conditions d’accès au capital, et de faciliter l’accès au programme. Le cœur de ce pilier est le Conseil européen de l’innovation, avec deux volets : Pathfinder, centré sur le financement des entreprises à forte intensité technologique dans la phase la plus amont, et l’« Accélérateur » visant à faciliter le passage à l’échelle des start-up via un soutien public combinant subventions, avances remboursables, prêts et participation au capital.

D’autre part, la présentation se fait désormais par mission, confirmant la disparition d’une approche thématique des activités de recherche, développement et innovation au profit d’une approche plus systémique et transversale au travers de missions. Le raisonnement en termes de missions supposera dès lors, non plus une analyse de projets isolés, mais une analyse d’un ensemble de projets intégrés à une même mission.

Le nouveau règlement sur le programme spatial de l’UE

Le nouveau règlement sur le programme spatial de l’Union européenne pour la période 2021-2027 est actuellement en cours de négociation à Bruxelles. Il rassemble pour la première fois, sous un règlement unique, l’ensemble des composantes actuelles du programme spatial européen (Galileo, Egnos et Copernicus) et prévoit de nouvelles composantes dans le domaine des communications sécurisées (Govsatcom) et de la surveillance de l’espace (SST), ainsi que des dispositions plus générales en matière de gouvernance spatiale.

Il établit en particulier l’agence pour les programmes spatiaux européens à Prague, en lieu et place de l’actuelle agence en charge du système de positionnement par satellites européens (EGNOS et Galileo).

En ce qui concerne les relations avec l’Agence spatiale européenne (ESA), il prévoit un accord-cadre financier global, le FFPA (Financial framework partnership agreement) qui devra définir les principales modalités de la coopération (rémunération, autorité contractuelle, budget, règles de l’UE à appliquer) entre l’UE et l’ESA. Le nouveau règlement et le FFPA entreront en vigueur au 1er janvier 2021.

Le nouveau règlement soutient l’innovation et la compétitivité de l’industrie européenne dans le secteur spatial. Il consacre en particulier le soutien à la recherche dans le domaine des lanceurs, et plus généralement de l’accès à l’espace.

La nouvelle stratégie industrielle de la Commission, publiée en mars 2020, souligne le rôle essentiel des technologies, données et services spatiaux pour renforcer la base industrielle spatiale de l’Europe via le développement de produits et de services innovants, y compris l’émergence de technologies innovantes de pointe. La stratégie souligne le besoin de synergies entre les industries de la défense et de l’espace, qui font face à une concurrence mondiale sans précédent, dans un contexte géopolitique en mutation.


II.   En conformité avec les engagements contenus dans le projet de loi de programmation, un budget 2021 de la mission recherche qui engage un effort sans précédent

Afin de retracer l’évolution réelle des crédits de la mission entre 2020 et 2021, les chiffres indiqués dans le présent rapport ont été retraités de manière à tenir compte de trois évolutions budgétaires significatives.

Premièrement, l’année 2020 marquant la dernière année du remboursement de la dette française à l’Agence spatiale européenne (ESA), le budget 2021 pour la recherche spatiale se trouve mécaniquement diminué de 254 millions d’euros. En outre, la modification du circuit de financement du CNES conduit à un transfert de 100 millions d’euros vers le programme 146 Équipement des forces du ministère des armées.

Ensuite, le programme 192 dédié à la recherche voit son périmètre réduit du fait du transfert du programme « Aides à l’innovation » porté par Bpifrance vers le programme 425 Financement structurel des écosystèmes d’innovation de la mission Investissements d’avenir. Cette mesure représente 113 millions d'euros pour l’année 2021.

Enfin, les crédits affectés à la recherche duale ne sont plus portés par le programme 191 de la MIRES mais par le plan de relance au titre du programme 363 Compétitivité, ce qui représentera 150 millions d’euros en 2021.

Ainsi, le projet de budget 2021 traduit un effort budgétaire historique en faveur de la recherche. Sur les désormais six programmes couverts par le présent rapport spécial, qui en couvrait auparavant sept, les crédits progressent de façon notable : 383 millions d’euros en autorisations d’engagement (+ 3,3 %) et 151 millions d’euros de crédits de paiement (+ 1,3 %).

Ces crédits atteignent un total de 12 milliards d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Le rapporteur spécial se félicite du choc budgétaire massif en faveur de la recherche qui concrétise ainsi l’impulsion envoyée dans le projet de LPR.

Évolution des crédits des programmes couverts par le rapport spécial

(en millions d’euros)

Programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

2020

2021

Évolution

2020

2021

Évolution

P172 Recherche pluridisciplinaire

6 960

7 315

5,10 %

6 941

7 163

3,20 %

P193 Recherche spatiale

1 768 ([2])

1 736 ([3])

– 1,81 %

1 768

1 736

– 1,81 %

P190 Recherche dans l’énergie, le développement et la mobilité durables

1 786

1 917

7,33 %

1 786

1 758

– 1,57 %

P192 Recherche et enseignement supérieur économiques et industriels

760

686 ([4])

– 9,74 %

760

767

– 1,92 %

P191 Recherche duale

154

150 ([5])

– 2,60 %

154

150

– 2,60 %

P142 Enseignement supérieur et recherche agricoles

356

363

1,97 %

356

364

2,25 %

Total

11 784

12 167

+ 3,3 %

11 787

11 938

+ 1,3 %

Source : Commission des finances à partir du PAP 2021.

A.   malgré les mesures prévues dans le projet de lpr, les grands opérateurs de la recherche publique redoutent les effets financiers de la crise

Le programme 172 concentre la plus grande partie des crédits alloués à la recherche. Pour l’essentiel, il est destiné à verser la subvention pour charge de service public aux grands instituts nationaux de recherche : CNRS, ANR, INSERM, INRAE, etc.

Le budget 2021 prévoit d’affecter 7,32 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et 7,16 milliards de crédits de paiement au programme 172, soit une augmentation de 355 millions d’euros en AE (+5,1 %) et de 222 millions d’euros en CP par rapport à 2020 (+ 3,2 %).

 

1.   L’Agence nationale de la recherche : une puissante montée en charge

L’Agence nationale de la recherche (ANR) est l’opérateur principal de financement de la recherche sur projets en France. Depuis 2007, l’Agence a contribué à acclimater le principe du financement sur projet de la recherche, en complément des versements récurrents aux organismes de recherche.

Par la croissance des financements qu’il prévoit, le projet de LPR aura un impact significatif sur l’activité de l’ANR, qui voit ses missions confortées et ses moyens d’intervention renforcés. Conformément à sa mission première, l’ANR maintiendra une part substantielle des financements octroyés sur une logique « investigator-driven », c’est-à-dire par appels à projets non ciblés. Cette démarche doit s’accompagner d’une meilleure prise en compte de la diversité des besoins des disciplines et des projets.

a.   Une augmentation des crédits d’engagement permettant d’améliorer les taux de sélection et de préciput

Les dépenses françaises pour la recherche par appel à projets sont en-deçà des dépenses de nos voisins européens en la matière. En 2018, l’ANR a consacré 518 millions d’euros aux appels à projets de recherche, soit un peu plus de 0,022 % du PIB alors que le taux des agences européennes équivalentes est proche de trois à quatre fois ce chiffre. Il est de 0,08 % du PIB pour les agences allemande et suisse et de 0,07 % du PIB pour l’agence néerlandaise.

Ce défaut de financement a des conséquences sur les taux de succès aux appels à projets, qui conduit l’Agence à refuser d’excellents projets et a un effet dissuasif sur les porteurs de projets. Si le taux de succès a progressé de 5 points entre 2014 et 2018 pour atteindre un niveau de 16 %, cela ne suffit pas encore à rétablir la confiance, ni à financer tous les projets qui le mériteraient. En effet, le taux de succès cible se situe à 30 %, ce qui nécessite une augmentation substantielle des moyens de l’ANR.

En ce sens, le projet de LPR prévoit un triplement des moyens d’engagement de l’ANR d’ici à 2027 afin de passer d’environ 500 millions d’euros à 1,5 milliard d’euros. En 2021, les moyens alloués à l’ANR dans le cadre du programme 172 progresseront de 158,3 millions d’euros en autorisations d’engagement.

Ces moyens supplémentaires doivent permettre d’atteindre un taux de succès de 23 % en 2021, notamment sur l’appel à projets générique, d’augmenter les montants moyens financés par projet et d'augmenter le taux de préciput ([6]). De 19 %, le taux de préciput passerait à 25 % en 2021 pour couvrir les charges générales liées aux activités de recherche.

L’ANR estime que la progression prévue des crédits d’intervention dans le cadre de la LPR devrait faire passer le montant global du préciput à près de 450 millions d’euros pour la part revenant aux établissements.

Par ailleurs, l’ANR doit devenir un outil central pour contribuer au dialogue entre science et société avec au moins 1 % de son budget d’intervention qui sera dédié à des actions de soutien à la diffusion de la culture scientifique.

Le transfert du financement de la recherche culturelle et de la culture scientifique
vers la mission Culture

Le programme 186 Recherche culturelle et culture scientifique ne fait plus partie de la MIRES. Son objet est désormais financé par l’action 4 du programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture de la mission Culture.

En effet, afin de permettre un meilleur pilotage de cette politique, une délégation ministérielle est en cours de création. Elle doit permettre de renforcer la lisibilité de l’action du ministère chargé de la culture dans ses actions relatives à l’accès à la vie culturelle, à la coordination de l’enseignement supérieur culturel et aux échanges avec les territoires.

Cette nouvelle délégation travaillera en étroite collaboration avec les services du secrétariat général du ministère de la culture ainsi que les différentes directions sectorielles et les services déconcentrés.

Pour l’année 2021, l’action 4 du programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture sera dotée de 112 millions d’euros en crédits de paiement, permettant de financer :

- la recherche culturelle (recherche en faveur des patrimoines, de la création artistique et transversale) ;

- la culture scientifique et technique, à travers la subvention pour charges de service public versée à Universcience (100 millions d’euros), le centre le plus important de diffusion de la culture scientifique et technique au niveau national, dont la situation financière a subi de plein fouet la crise du fait du confinement.

b.   Une accélération de la montée en charge des engagements à travers le plan de relance

L’article 2 du projet de LPR fixe une augmentation de 149 millions d’euros en 2021, de 293 millions d’euros en 2022 et de 435 millions d’euros en 2023 par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2020.

Afin d’accélérer cette montée en charge des engagements de l’ANR, le plan de relance prévoit d’atteindre, dès 2021, le niveau prévu pour 2023. Cette accélération permettra une augmentation plus rapide des taux de succès des projets soumis et des montants de préciput accordés afin de mieux rémunérer l’effort des chercheurs et des laboratoires qui répondent aux appels d’offres.

En l’occurrence, 428 millions d’euros en autorisations d’engagement et 286 millions d’euros en crédits de paiement sont inscrits sur l’action 5 du programme 364 Cohésion de la mission Plan de relance.

Compte tenu de l’ampleur de l’augmentation des crédits pour l’année 2021, le rapporteur spécial s’est interrogé sur le risque de sous-exécution budgétaire. Afin de s’en prémunir, le MESRI et l’ANR envisagent de modifier le règlement financier de l’ANR au prochain conseil d’administration afin de mettre en œuvre l’augmentation du taux de préciput pour les projets sélectionnés en 2020.

2.   Une vive augmentation de la subvention au Centre national de la recherche scientifique lui permettant de faire face à ses difficultés à financer son GVT

Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), établissement public scientifique et technologique placé sous la tutelle du ministre chargé de la recherche, est un organisme de recherche à vocation multidisciplinaire. Son activité recouvre la quasi-totalité des domaines scientifiques et toutes les actions « Recherche » du programme 172.

Il a notamment pour missions d'identifier les recherches présentant un intérêt pour l'avancement de la science ainsi que pour le progrès économique, social et culturel du pays, de contribuer à l'application et à la valorisation des résultats de ces recherches, de développer l'information scientifique et l'accès aux travaux et données de la recherche.

En 2021, la dotation versée au CNRS progresse de 75 millions d’euros en crédits de paiement en cohérence avec les mesures prévues par le projet de LPR. Si, en raison d’un rebasage au niveau de sa masse salariale, son plafond d’emplois baisse, le nombre d’emplois sous plafond devrait augmenter en application des mesures contenues dans le projet de LPR.

a.   Une forte mobilisation du CNRS dans le cadre de la recherche pour faire face à l’épidémie de Covid-19

L’ensemble des instituts du CNRS, les laboratoires qui leur sont rattachés et les personnels se sont mobilisés dans des actions en lien avec la crise sanitaire Covid-19 : actions de recherche, de solidarité ou de communication.

Sur le plan scientifique et technologique, les laboratoires du CNRS et de ses partenaires se sont fortement engagés pour tenter de trouver au plus vite des réponses et contribuer à ralentir la pandémie. Des centaines de projets ont été développés et le CNRS a mobilisé des ressources financières pour répondre aux besoins les plus urgents.

 

Un certain nombre de ces recherches devraient déboucher sur des produits industriels, à l’instar du test EasyCov, test salivaire colorimétrique de dépistage du SARS-COV-2, non invasif, réalisé sans aucun appareil analytique, dont le résultat est restitué en 30 minutes environ. Une étude clinique est en cours au CHU de Montpellier pour valider les performances du test sur le terrain.

b.   Une subvention conséquente pour financer le GVT

Depuis plusieurs années, le CNRS éprouve des difficultés financières liées à son « Glissement Vieillesse Technicité » (GVT), qui désigne le phénomène d’augmentation de la masse salariale du fait de la progression des agents dans leurs grilles indiciaires. Le rapporteur spécial a été sensibilisé, à plusieurs reprises, à ce phénomène récurrent au sein des organismes de recherche.

En effet, selon le CNRS, le GVT se traduirait par une érosion de 1 % des effectifs par an, soit une baisse de 3 000 emplois sur dix ans.

Depuis 2018, le CNRS a recours à un prélèvement sur son fonds de roulement pour financer son GVT et ses campagnes d’emplois. En 2020, un prélèvement sur le fonds de roulement de 74,2 millions d’euros est de nouveau prévu. Le CNRS indique toutefois que la partie disponible du fonds de roulement ne sera pas suffisante en 2021. C’est pourquoi, la subvention pour charges de service public du CNRS augmentera de 68 millions d’euros en 2021.

3.   Des moyens légèrement renforcés pour l’Institut national de la santé et de la recherche médicale

L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) se consacre à la recherche biologique, médicale et à la santé humaine. Il assure la coordination entre la recherche fondamentale, la recherche clinique, la recherche thérapeutique ou diagnostique et la recherche en santé publique.

La subvention pour charges de service public prévue dans le PLF 2021 augmente de 2,2 millions d’euros par rapport à 2020 en cohérence avec les mesures prévues par le projet de loi de programmation de la recherche. En outre, 3 millions d’euros supplémentaires seront alloués à l’INSERM à partir du programme 172 en raison de la reprise par l’Institut de certaines missions de l'Institut national de la transfusion sanguine (INTS).

À ce stade des informations échangées avec le MESRI, l’INSERM confirme que des mesures complémentaires devraient venir abonder son budget en 2021 afin d’accompagner le soutien aux laboratoires, les mesures d’emplois annoncées dans la LPR, le soutien annuel aux Infrastructures de recherche HIDDEN et MEMENTO et aux plans santé (GIS Autisme, France Médecine génomique …).

a.   La création d’une nouvelle agence pour la recherche sur le VIH, les hépatites et les maladies infectieuses émergentes

La ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation a souhaité la mise en place d'une nouvelle agence au sein de l'INSERM. Cette entité regrouperait l'actuelle Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS) et la cellule REACTing, consortium multidisciplinaire rassemblant des équipes et laboratoires, afin de préparer et coordonner la recherche pour faire face aux crises sanitaires liées aux maladies infectieuses émergentes.

L’objectif poursuivi est d’instituer un interlocuteur unique chargé de coordonner toute la recherche sur le VIH, les hépatites et maladies infectieuses émergentes et, en cas de crise épidémique en France comme dans le monde, d’agir en urgence. Cette nouvelle agence suivrait l'ensemble des problématiques et approches pour l'appréhension de ces maladies (moyens et stratégies préventives, vaccins...).

Ce projet d’ampleur conduit l’INSERM à solliciter le doublement du budget actuel de l’ANRS, soit 42,5 millions d’euros, afin de couvrir les besoins sur le nouveau périmètre des maladies épidémiques émergentes. Outre la masse salariale et le fonctionnement de la nouvelle agence, cette enveloppe doit permettre de financer des appels à projets thématisés, du soutien structurant des réseaux de recherche et des actions dédiées à la recherche vaccinale.

b.   Des difficultés liées à la prise en charge des coûts indirects

L’INSERM a fait part au rapporteur spécial de sa difficulté à supporter les coûts indirects, qui écrasent ses capacités à faire de la recherche hors financement de projet. En effet, ces coûts doivent être pris en charge à hauteur de 26 %, ce qui a un effet ciseau. Toute capacité d’initiative de l’INSERM est dès lors réduite à peau de chagrin. En 2020, sur un budget de 966,2 millions d’euros, il ne restait que 6 millions d’euros à allouer aux politiques de recherche portées directement par l’établissement.

L’augmentation du taux de préciput de l’ANR à hauteur de 40 % constitue malgré tout un signal positif envoyé aux établissements et aux laboratoires.

c.   Une forte implication dans la structuration de la recherche française et de sa valorisation à travers les PIA

L’INSERM et ses laboratoires participent à plus de 150 actions dans le cadre des PIA : laboratoires d’excellence (LabEx), équipements d'excellence (EquipEx), des instituts de recherche technologique (IRT), sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT) dont l’INSERM est actionnaire, Parmi ces dispositifs, l'INSERM peut être coordinateur, partenaire, fondateur ou actionnaire. Au 30 septembre 2020, les PIA représentaient environ 14 % en montant du stock de contrats de recherche gérés par l’Institut.

Le PIA 4 prévoit 2,55 milliards d’euros dédiés au financement de l’écosystème de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et valorisation de la recherche. Ce volet permettra de soutenir les partenaires universitaires à travers des outils comme les Idex et les I-Site auxquels l’INSERM est associé.

Toutefois, le PIA 4 ne semble pas totalement adapté au secteur de la santé, qui en est, pour l’instant, absent. L’Institut plaide notamment pour le développement de la filière de bioproduction. De même, il serait favorable à ce que ce PIA 4 finance des programmes prioritaires de recherche sur les maladies psychiatriques, ou encore sur le microbiote en lien avec l’INRAE.

4.   L’Institut national du cancer : une double tutelle, un financement public dual

L’Institut national du cancer (INCa), placé sous la double tutelle du ministère chargé de la santé et du ministère chargé de la recherche, bénéficie d’une subvention versée depuis le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins de la mission Santé ainsi que d’une subvention à partir du programme 172 Recherche scientifiques et technologiques pluridisciplinaires, qui n’apparaît pas dans les documents budgétaires, dans la mesure où elle est versée directement par l’ANR.

Pour 2021, la subvention pour charges de service public de l’INCa s’élèvera à 40,5 millions d’euros. Le montant de la dotation versée depuis l’ANR dans le cadre du programme 172 n’a pas encore été confirmé. Cette dotation s’élevait à 38 millions d’euros en 2020. Dans le cadre de la stratégie décennale, une dotation complémentaire de l’ANR a également été annoncée mais son montant reste à ce jour à confirmer.

a.   La mise en œuvre de la stratégie décennale de lutte contre les cancers

À compter de 2021, l’INCa mettra en œuvre la stratégie décennale de lutte contre le cancer. Après une phase de co-construction, pendant laquelle l’INCa s’est rapproché de l’ensemble des acteurs (organismes et agences partenaires, agences régionales de santé et structures territoriales, collège de médecine générale et sociétés savantes, associations), la stratégie décennale de lutte contre les cancers est entrée en phase de consultation.

D’une part, une consultation citoyenne a été lancée le 22 septembre 2020 pour une durée d’un mois afin de recueillir l’avis des citoyens sur la proposition de stratégie élaborée par l’Institut. Deux semaines après le lancement, l’INCa avait déjà recueilli plus de 2000 contributions. Ces propositions retiennent toute son attention, à l’instar de celles relatives à l’intégration de la socioesthétique au panier de soins de support ou de la création d’un label caractérisant le niveau du risque cancéreux dans l’agroalimentaire. Une nouvelle version de la stratégie, prenant en compte les résultats de cette consultation, sera proposée au ministère chargé de la santé et au ministère chargé de la recherche à la fin du mois d’octobre.

D’autre part, l’Institut consultera son conseil scientifique et son conseil d’administration, qui rendront un avis sur la proposition de stratégie, respectivement les 20 octobre et 27 novembre prochains. Une dernière version de la stratégie sera ainsi proposée aux ministères au début du mois de décembre afin que le décret portant la stratégie décennale de lutte contre les cancers puisse être publié d’ici la fin de l’année 2020 pour une mise en œuvre début 2021.

b.   La recherche contre les cancers pédiatriques

Depuis 2019, l’INCa bénéficie d’une subvention supplémentaire de 5 millions d’euros au titre de la recherche sur les cancers pédiatriques. Ce sont dès lors 25 millions d’euros supplémentaires qui y seront consacrés entre 2019 et 2023. Depuis lors, un groupe de travail, ou « task force », sur les cancers pédiatriques animé par l’Institut a été mis en place pour définir l’utilisation de ce nouveau financement.

Au cours de la réunion du groupe de travail du 9 janvier 2020, et à la suite des travaux résultant du séminaire du 28 novembre 2019, deux types d’action à mettre en place avaient fait consensus : l’appel à consortium et le soutien de projets « hauts risques, hauts gains » (high risk, high gain). Lors de la réunion du 27 février 2020, le groupe de travail a acté la mise en œuvre de ces actions dès 2020 en précisant leur périmètre et leur modalité de mise en place. Ce type d’actions présente un caractère novateur dans la mesure où elles n’ont encore jamais été mises en place dans d’autres domaines par l’INCa. Il s’agit, d’une part, du consortium « origines et causes des cancers pédiatriques » (environ 3,7 millions d’euros) et, d’autre part, de l’appel à projets « hauts risques, hauts gains » (environ 0,9 million d’euros).

Au-delà de ce travail initié dans le cadre des 5 millions d’euros supplémentaires versés depuis le programme 172, l’INCa soutient la recherche contre les cancers des enfants à travers ses appels à projet. Les appels à projets et à candidatures coordonnés par l’INCa et financés avec la direction générale de l’offre de soins du ministère chargé de la santé et par l’INSERM pour l’institut thématiques multi-organismes cancer d’Aviesan soutiennent des projets de recherche sur les cancers pédiatriques.

En 2019, 25 des 249 projets soumis aux appels à projets de recherche fondamentale et sciences du cancer, translationnelle, clinique, en sciences humaines et sociales, épidémiologie et en santé publique de l’INCa concernaient les cancers de l’enfant, représentant 10,47 millions d’euros.

 

 

 

5.   La politique spatiale : un effort significatif grâce au plan de relance

Le programme 193 sert principalement de support au versement de la subvention au Centre national d’études spatiales (CNES), l’agence spatiale française. En 2021, la subvention versée au CNES à partir du programme 193 s’élèvera à 491,6 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 1,6 milliard d’euros de transferts destinés au financement de la contribution française à l’Agence spatiale européenne et une subvention de 100 millions d’euros versée par le ministère des armées.

a.   Un budget en retrait par rapport à 2020 du fait de l’apurement de la dette de financement envers l’Agence spatiale européenne

La baisse de 19 %, soit 385,7 millions d’euros, du budget en faveur de la recherche spatiale affichée dans les documents budgétaires s’explique par trois facteurs.

Tout d’abord, 2021 sera la première année où la France n’aura plus à rembourser sa dette de financement envers l’Agence spatiale européenne, qui représentait 254 millions d’euros en 2020. La contribution française 2020 a ainsi permis de solder cette dette afin que la France soit en conformité avec le règlement financier de l’Agence.

Ensuite, le circuit budgétaire de financement du CNES est modifié. Cette modification, neutre pour l’opérateur, modifie les niveaux de crédits prévus sur les programmes 193 Recherche spatiale et 146 Équipement des forces du ministère des armées. En 2021, 100 millions d’euros seront versés depuis ce second programme.

Enfin, la baisse de 31,7 millions d’euros, soit une baisse de l’ordre de 1,6 %, est en cohérence avec la trajectoire prévue dans la LPR. Elle s’explique notamment par une baisse des besoins tendanciels du fait du rythme de décaissement des programmes déjà engagés.

b.   Un complément substantiel apporté au secteur spatial à travers le plan de relance

La politique spatiale est également soutenue par le plan de relance à travers le volet « Soutien au secteur spatial et financement de la recherche duale » du programme 363 Compétitivité.

Concernant spécifiquement le soutien à la filière spatiale, il sera ouvert un montant de 365 millions d’euros en autorisations d’engagement et 200 millions d’euros en crédits de paiement en 2021. Cette enveloppe permettra de soutenir les entreprises du secteur spatial en trésorerie et en fonds propres et de stimuler la recherche et l’innovation des entreprises du spatial dont la capacité d’autofinancement a été réduite par la crise sanitaire. En effet, des retards dans les programmes de certains donneurs d'ordre, notamment le programme Ariane, ont fragilisé la filière et réduit son niveau d'activité.

Un soutien sera ainsi apporté, dans le cadre du plan de relance, à des projets industriels en France, visant à améliorer la compétitivité des entreprises du secteur, à maintenir leurs compétences critiques et à les accompagner dans leur transition numérique et environnementale.

c.   Un contrat d’objectifs et de performance en préparation

Le CNES a transmis le 24 août 2020 à ses tutelles, le ministère de l’économie, des finances et de la relance, le MESRI et le ministère des armées, une première proposition de contrat d’objectifs et de performance. Ce texte s’appuie sur la Stratégie 2025 présentée au conseil d’administration du CNES de décembre 2019. Elle est construite autour de deux axes majeurs que sont la préparation de l’avenir et le maintien du rang de la France.

En effet, le CNES a vocation à préparer l’avenir de notre société en contribuant activement aux systèmes spatiaux de demain, en faisant émerger leurs futurs usages dans les différents domaines (exploration, sciences, défense, services), en orientant et en aidant le développement de l’écosystème spatial (capacité et compétitivité industrielle, nouveaux venus) et en formant les futurs utilisateurs à ces nouvelles technologies et à leurs utilisations. Le CNES est par ailleurs un acteur indispensable pour maintenir la France en tête des acteurs mondiaux du spatial, en poursuivant et en développant les coopérations internationales.

Le contrat d’objectifs et de performance devrait également prendre en compte les conclusions du séminaire de prospective scientifique qui s’est tenu au Havre en octobre 2019, ainsi que les engagements pris lors de la conférence de Séville de novembre 2019.

Pour servir d’appui à l’élaboration du prochain COP, un rapport d’évaluation du CNES fait par le HCERES doit être publié à l’automne. Une maquette consolidée devrait être présentée devant le conseil d’administration du CNES en décembre 2020.

La conférence de Séville de novembre 2019

La réunion au niveau ministériel du conseil de l’agence spatiale européenne (ESA), qui s’est tenue à Séville les 27 et 28 novembre 2019, avait vocation à préparer l’avenir du spatial européen.

Elle intervenait dans un contexte marqué par une concurrence forte sur les marchés commerciaux globaux, mais aussi par des opportunités de coopération internationale importantes, notamment dans le domaine de l’exploration humaine et robotique.

Elle s’est conclue par un engagement des États membres sur trois à cinq ans d’un montant supérieur à 14 milliards d’euros de nouveaux programmes, un record absolu pour une telle Conférence. L’Europe réaffirme ainsi avec force sa place de deuxième puissance mondiale en concrétisant ses politiques ambitieuses d’accès à l’espace, d’exploration du système solaire et de maintien de la compétitivité de l’industrie européenne.

La souscription française permet à la France de rester le premier contributeur au budget de l’ESA en 2020. Au total, la France a souscrit 2,7 milliards d’euros, soit 19 % du montant total des souscriptions.

B.   L’inquiétude des opérateurs de la recherche dans l’énergie, le développement et la mobilité durables malgré les crédits alloués en 2021

Évolution par action des crédits du programme

(en millions d’euros)

Action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

2020

2021

Évolution

2020

2021

Évolution

11 Recherche en matière de risques

176

177

0,57 %

176

177

0,57 %

12 Recherche en matière de  transports

103

103

0,00 %

103

103

0,00 %

13 Recherche en matière de développement durable

1,5

1,5

0,00 %

1,9

1,5

– 21,05 %

14 Recherche en matière d’aéronautique civile

135

270

100,00 %

110

111

0,91 %

15 Charges nucléaires du CEA

740

740

0,00 %

740

740

0,00 %

16 Recherche en matière d’énergie nucléaire

456

451

– 1,10 %

457

451

– 1,31 %

17 Recherche sur les nouvelles technologies de l’énergie

173

174

0,58 %

173

174

0,58 %

Total

1 784,5

1 916,5

7,40 %

1 760,9

1 757,5

– 0,19 %

Évolution du total par rapport à N-1

 

132

 

 

-3,4

 

Sur le total du programme 190 Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables, un effort de 132 millions d’euros en autorisations d’engagement est prévu en 2021, soit une hausse de 7,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2020. En revanche, les crédits de paiement connaissent une très légère érosion de l’ordre de 0,19 %, soit 3,4 millions d’euros.

La hausse des crédits est essentiellement portée par la recherche en matière d’aéronautique civile pour laquelle les autorisations d’engagements doublent en 2021. Cette hausse s’explique par le regroupement des autorisations d’engagements de l’action Soutien à la filière aéronautique du plan de relance avec l’action 14 Aéronautique du programme 190 compte tenu de la proximité des programmes soutenus.

Le plan de soutien à l’aéronautique prévu dans le plan de relance alloue 254 millions d’euros en crédits de paiement au financement de subventions à la R&D dans le domaine de l’aéronautique civile, dans le cadre de la programmation du Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC).

À l’inverse, les crédits de paiement de la recherche en matière de développement durable, qui avaient déjà baissé de 1,6 million d’euros entre 2019 et 2020 chutent de 21 % en 2021. Les crédits alloués à la recherche nucléaires régressent de 1,3 %, soit 6 millions d’euros.

1.   La dotation tripartite du Commissariat à l’énergie atomique

Rattaché au programme 172, le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) bénéficie de plusieurs sources de financement.

Concernant le programme 190, le CEA civil percevra une subvention pour charges de service public de 1,2 milliard d’euros, dont une part substantielle sera consacrée aux activités de démantèlement des installations nucléaires (740 millions d’euros). Dans le cadre de l’action 17, le CEA perçoit 173,75 millions d’euros afin de mettre en œuvre des recherches sur les nouvelles technologies de l’énergie (NTE) dont les axes principaux portent notamment sur les sources de production renouvelables (photovoltaïque à haut rendement), le stockage énergétique sur batteries et le vecteur hydrogène dans toute sa chaîne de valeur, la substitution des hydrocarbures et la gestion du CO2.

Sur le programme 172, les montants prévus au titre des très grandes infrastructures de recherche (TGIR) – 112,2 millions d’euros – et du projet de réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER) – 152 millions d’euros – sont en ligne avec la feuille de route nationale co-construite entre le ministère, le CEA et le CNRS. Hors ITER et TGIR, le montant de la subvention s’établit à 435,1 millions d’euros. Elle intègre une contribution additionnelle de 2 millions d’euros au titre du financement du réacteur Jules Horowitz ainsi qu’une mesure de soutien au fonctionnement des laboratoires à hauteur de 1,3 million d’euros.

En cohérence avec les mesures portées par le projet de LPR, le CEA espère pouvoir bénéficier d’une partie des moyens alloués aux établissements. Toutefois, ces moyens ne sont pas encore répartis entre les organismes à ce stade.

Enfin, le budget de recherche duale alloué au CEA, qui sera évoqué plus loin, prévoit une réduction de sa subvention de 2 millions d’euros. Cette réduction devrait se poursuivre en 2022 (1 million d’euros), ce qui représente une baisse de 5 millions d’euros la période 2020-2022. Le CEA fait part de son inquiétude sur une telle baisse qui peut fragiliser sa capacité à se mobiliser sur des thématiques de sécurité globale.

2.   L’inquiétude de l’Institut français du pétrole-Énergies nouvelles sur l’érosion de ses ressources propres

L’Institut français du pétrole-Énergies nouvelles (IFPEN), acteur majeur de la recherche dans les domaines de l’énergie, du transport et de l’environnement, concentre de plus en plus d’effort vers le secteur des énergies nouvelles, notamment sur trois domaines que sont : la transformation de la biomasse non alimentaire en biocarburants et bioproduits, la production d’énergie en milieu marin et les autres thématiques relatives à la transition énergétique et à la lutte contre le changement climatique. En 2020, la part d’activité de l’IFPEN a dépassé les 50 % d’activité dans les énergies nouvelles.

Sa dotation a fortement baissé entre 2010 et 2020, de l'ordre de 25 %. Le budget pour 2021 prévoit un gel de sa dotation, qui s’établira à 122,7 millions d’euros en 2021. Ce gel inquiète l’Institut qui connaît, comme d’autres opérateurs nationaux de recherche, une forte chute de ses ressources propres liées à la crise économique. Cette érosion risque de mettre en péril sa situation financière.

En effet, le budget de l’Institut est très dépendant de ses ressources propres (dividendes, redevances de ses filiales, …), qui représentent environ 55 % de son budget. Dès lors, la stabilité de la subvention publique au niveau de 2020 conduit l’Institut à mettre en œuvre, dès 2021, un plan salarial destiné à dégager 5 millions d’euros d’économies. En pratique, ce plan se traduit par un gel des embauches et donc à une perte d’environ 150 emplois.

L’IFPEN s’est fortement impliqué dans les PIA, notamment à travers la participation à des projets de démonstration dans les domaines de la mobilité durable et des énergies renouvelables. Il projette de poursuivre ses actions dans les années à venir à travers les PIA 3 et 4. Dans le cadre du plan de relance, l’Institut a pris part au processus de sélection des projets de recherche et d’innovation en matière de mobilité électrique, recyclage des plastiques, biocarburants, éolien offshore. Enfin, il se prépare à bénéficier du plan de relance européen via l’appel à proposition relatif au pacte vert pour l’Europe financé par le programme Horizon 2020.

C.   les trois autres programmes de la mires : des évolutions contrastées

1.   Un budget en progression pour la recherche et l’enseignement supérieur agricoles

Évolution des crédits du programme

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

2020

2021

Évolution

2020

2021

Évolution

01 Enseignement supérieur

317

324

2,21 %

318

325

2,20 %

02 Recherche, développement et transfert de technologie

39

39

0,00 %

39

39

0,00 %

Total

356

363

1,97 %

357

364

1,96 %

Source : PAP 2021.

Près de 90 % des crédits du programme 142 Enseignement supérieur et recherche agricoles sont consacrés au financement de l’enseignement supérieur agricole. Les 39 millions d’euros restants sont affectés à la recherche, au développement et au transfert de technologie, ce qui consiste, pour l’essentiel, au versement d’une subvention pour charges de service public à l’Institut nationale pour la recherche en agriculture, alimentation et environnement (INRAE).

En effet, bien que désormais rattaché au programme 172, l’INRAE bénéficie d’une subvention de 27 millions d’euros au titre du programme 142, à laquelle s’ajoute la subvention de 777 millions d’euros du programme 172 ainsi que quatre autres subventions. L’INRAE bénéficie ainsi d’un financement global de l’état d’un montant de 807,6 millions d’euros.

La fusion entre l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA) est effective depuis le 1er janvier 2020. L’INRAE, fruit de cette fusion, devrait ainsi pouvoir dégager des marges de manœuvre lui permettant de conforter le modèle économique de ses unités de recherche. En termes de ressources humaines, le maintien du niveau de la masse salariale a conduit à conserver le niveau de campagne de recrutements qui existait auparavant dans les deux établissements.

2.   Un changement de périmètre d’importance sur le programme 192

Évolution des crédits du programme

(en millions d’euros)

Action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

2020

2021

Évolution

2020

2021

Évolution

01 Organismes de formation supérieure et de recherche

319

327

2,51 %

319

327

2,51 %

02 Soutien et diffusion de l’innovation technologique

321

340

5,92 %

323

340

5,26 %

03 Soutien de la recherche industrielle stratégique

120

18

– 85,00 %

140

100

– 28,57 %

Total

760

686

– 9,74 %

782

767

– 1,92 %

Source : PAP 2021.

À périmètre constant, le budget 2021 du programme 192 Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle connaît une évolution globale de ses crédits de – 9,74 % en autorisations d’engagement et de -1,92 % en crédits de paiement. Le périmètre du programme a sensiblement évolué entre 2020 et 2021 dans la mesure où la dotation du programme « Aides à l’innovation » porté par Bpifrance a été transférée au programme 425 Financement structurel des écosystèmes d’innovation, volet structurel du PIA4. Le regroupement des dispositifs d’aides et interventions consacrées à l'innovation permettra une meilleure visibilité de son financement.

L’évolution des crédits s’explique principalement par l’avancement en 2020 des autorisations budgétaires nécessaires pour le plan « Nano 2022 » et d’une diminution des restes à payer des dispositifs mis en extinction sur le programme 192, à savoir le Fonds unique interministériel (FUI), destiné à soutenir la recherche appliquée, et le Fonds de compétitivité des entreprises (FCE), qui soutient, par des subventions, la recherche et le développement réalisés au sein de projets partenariaux publics-privés.

En 2021, le plafond d’emplois des opérateurs du programme est en hausse de 914 ETPT par rapport à 2020 : il passe de 2 411 à 3 325 ETPT. Cette augmentation est principalement liée au transfert des emplois du Groupe Mines Télécom (GMT) du titre 2 sur le titre 3. En revanche, le schéma d’emplois du programme régresse de 10 ETP, dont 7 ETP pour le GMT et 3 ETP pour le Groupe des écoles nationales d’économie et statistique (GENES).

L’augmentation des crédits de l’action 2 tient notamment à la dotation de 203,2 millions d’euros en AE et CP, en hausse de 2,9 % par rapport à 2020, qui financera le renforcement de l’exonération de cotisations sociales patronales pour les jeunes entreprises innovantes (JEI). Ce dispositif, qui sera évoqué un peu plus loin, s’adresse aux PME qui consacrent au moins 15 % de leurs charges annuelles à des projets de R&D.

3.   Une érosion des crédits affectés à la recherche duale

Le programme 191 a pour objet le financement de la recherche duale, civile et militaire, qui peut être définie comme la recherche dont les applications sont à la fois civiles et militaires. Dans les années précédentes, ce programme était le support de deux subventions : celle du CNES et celle du CEA.

Évolution des crédits du programme

(en millions d’euros)

Opérateurs

AE=CP

 

2018

2019

2020

2021

Évolution

CEA (subvention)

29

29

24

22

 24,14 %

CNES (subvention et dotation en fonds propre)

146

150

130

128

 12,33 %

Total

175

180

154

150

 14,29 %

Source : PAP 2021.

Toutefois, en 2021, le programme 191 ne comportera aucun crédit. La recherche duale sera financée par l’action 2 Souveraineté technologique et résilience du programme 363 Compétitivité du plan de relance. Compte tenu du caractère temporaire du plan de relance, des inquiétudes émergent sur la pérennité du budget alloué à la recherche duale.

Pour 2021, les crédits en faveur de la recherche duale diminuent de 4 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit
– 2,6 %. Cette baisse porte tant sur la subvention versée au CNES que sur celle versée au CEA, représentant chacune une perte de 2 millions d’euros. Ainsi, entre 2018 et 2021, les crédits affectés à la recherche duale enregistrent une baisse de 14 %.

Les opérateurs et le responsable de programme renouvellent cette année encore leur mise en garde quant à la contraction continue du budget affecté à la recherche duale alors même qu’on observe par ailleurs un intérêt manifeste pour le spatial et que les recherches du CEA portent sur des enjeux stratégiques (cybersécurité, hydrogène, technologies quantiques, …)

Pour le CEA, cette baisse de crédits, 24 % depuis 2018, devrait pouvoir être compensée à partir du programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense.

Le rapporteur spécial veillera dans les années à venir à ce que cette modification de la maquette budgétaire ne porte pas atteinte à la pérennité du financement de la recherche duale.

III.   Des dépenses fiscales nécessaires en période de crise

La France a mis en place un environnement fiscal très compétitif au plan mondial pour les activités de recherche et d’innovation. Le crédit d’impôt en faveur de la recherche (CIR), rattaché au programme 172 de la MIRES, constitue la première dépense fiscale et un axe essentiel de la politique française de soutien à l’innovation.

D’autres dépenses fiscales, à l’instar du crédit d’impôt innovation ou du dispositif d’exonération des bénéfices réalisés par les jeunes entreprises innovantes, assurent un soutien à l’effort de recherche et développement des entreprises. Ce soutien est d’autant plus nécessaire que ces dépenses sont les premières dépenses à être rognées voire supprimées en période de crise.

A.   Le crédit d’impôt recherche : un soutien nécessaire mais perfectible

Le crédit d’impôt en faveur de la recherche connaît quelques évolutions notables dans le projet de loi de finances pour 2021. Ces évolutions ont principalement pour objectif, non d’affaiblir le dispositif, mais de le renforcer en assurant sa parfaite conformité au droit de l’Union européenne. L’article 8 du projet de loi de finances pour 2021 prévoit dès lors la suppression du dispositif de doublement de l’assiette dans le cadre de la sous-traitance publique ainsi que la suppression du taux majoré de 50 % en Corse.

1.   Le CIR, un soutien nécessaire en période de crise

Le crédit d’impôt recherche (CIR), créé en 1983 et profondément réformé de 2004 à 2008, est le dispositif le plus important dont dispose l’État pour inciter les entreprises à accroître leur effort de R&D. Avec la mise en place d’un dispositif uniquement en volume et sans plafond avec un taux de 30 % pour la fraction de dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d’euros, la réforme de 2008 a rendu le CIR beaucoup plus simple et attractif.

Entre 2008 et 2017, le nombre d’entreprises déclarant des dépenses de R&D (ou de collection) a augmenté de 37 %, pour atteindre plus de 19 000 entreprises en 2017, avec un montant de dépenses éligibles de 23 milliards d’euros, correspondant à une créance de 6,4 milliards d’euros.

Comme l’indique le rapport de France Stratégie de mars 2019([7]), ce dispositif constitue un outil d’attractivité et de compétitivité pour la France. La période de crise actuelle peut, sur certains aspects, rappeler la crise économique de 2008.

En l’occurrence, les travaux de France Stratégie ont démontré que cet outil avait substantiellement contribué à la résistance et à la résilience des entreprises françaises en matière de R&D, ainsi qu’au redressement de l’effort de recherche après la crise. Le CIR, dont le chiffrage est évalué à 6,4 milliards d’euros pour 2021, devrait donc être un outil incontournable de la relance dans les années à venir.

2.   Une réflexion à poursuivre sur son efficience

D’année en année, les débats sur le CIR et son efficience se réitèrent à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances. Pour mémoire, à l’automne 2019, l’Assemblée nationale a adopté deux amendements proposés par Joël Giraud, alors Rapporteur général du budget, aux fins de commande de deux rapports (encore non publiés) au Gouvernement sur différents aspects controversés du CIR. Il s’agissait notamment d’obtenir des informations sur le niveau de prise en compte (actuellement à hauteur de 200 %) des rémunérations versées aux jeunes docteurs, sur le seuil de 100 millions d’euros de dépenses au-delà duquel le taux du CIR est ramené à 5 %, dans le cadre des groupes fiscalement intégrés, qui peuvent être sujets à abus.

France Stratégie poursuit également de son côté ses études sur le CIR. La commission nationale d'évaluation des politiques d'innovation (CNEPI) a ainsi engagé en 2019 une seconde étape d’évaluation. Deux projets ont été retenus dans ce cadre et sont en cours de développement. Le premier, porté par une équipe de recherche de NEOMA-Business, vise à analyser le comportement des multinationales face à la politique fiscale de la France en matière de R&D, en distinguant les groupes français des groupes étrangers. Le second, mené par une équipe de recherche de IPP-PSE, doit permettre d’évaluer les effets du CIR sur la performance des entreprises au-delà des seules activités de R&D, d’estimer l’impact de la réforme sur la marge extensive et appréhender les externalités du CIR entre entreprises et au niveau de la création d’entreprises.

Les informations qui figureront dans ces rapports constitueront un outil précieux d’aide à la décision pour le Parlement. Dans l’attente de ces rapports, le rapporteur spécial, conscient que ce thème appelle un travail parlementaire approfondi, souhaite s’y atteler pendant le premier semestre 2021. En effet, au cours de son cycle d’auditions, le rapporteur a déjà pu échanger avec des économistes sur des pistes d’amélioration éventuelles, comme celle d’un meilleur ciblage du CIR vers les PME grâce à une modulation du taux en fonction de la taille des entreprises.

 

 

B.   Le crédit d’impôt en faveur de l’innovation

Depuis 2013, certaines dépenses d’innovation sont éligibles au CIR. Le crédit d’impôt en faveur de l’innovation (CII) est une mesure fiscale réservée aux PME. Le CII élargit les dépenses éligibles au titre du CIR à la conception de prototypes et installations pilotes de produits nouveaux produits. L’assiette est plafonnée à 400 000 euros par an et par entreprise. La déclaration s’effectue avec le même formulaire et selon les mêmes modalités que le crédit d’impôt recherche. Cette dépense fiscale est estimée à 184 millions d’euros pour l’année 2021.

Ce crédit d’impôt a pour objectif de favoriser tout type d’innovation, même incrémentale, d’inciter les entreprises à la conception de produits aux performances supérieures, en combinant des technologies existantes, de faciliter le financement d’opérations permettant de donner aux PME françaises des avantages concurrentiels distinctifs.

D’après les informations transmises par le ministère, les éléments disponibles confirment une appropriation globalement positive du CII par les PME. Les services en sont les premiers bénéficiaires, avec 73 % du montant total du CII contre 26 % pour l’industrie. Les premiers secteurs bénéficiaires du CII sont le conseil et assistance en informatique (42 % de la créance) et les services d’architecture et d’ingénierie (8,9 % de la créance).

C.   Le dispositif « Jeunes entreprises innovantes » : un véritable succès

Le dispositif « Jeunes entreprises innovantes » (JEI), mis en place en 2004, soutient les jeunes PME à fort potentiel d’innovation, de croissance et de création de richesse. En combinant des avantages fiscaux (exonération d’impôt sur les sociétés, exonération de cotisation foncière des entreprises) et sociaux (exonérations de cotisations sociales patronales), il favorise et accélère leur développement et soutient l’innovation.

Depuis sa mise en place par la loi de finances pour 2004, le dispositif JEI connaît un véritable succès : le nombre d’entreprises bénéficiaires du dispositif est passé de 1 300 à sa création à plus de 4 200 en 2019, soit une augmentation de 13 % en moyenne par an. En 2020, le volet fiscal du régime du dispositif JEI a été prorogé pour une nouvelle période de trois ans jusqu’au 31 décembre 2022 dans le cadre de la loi de finances pour 2020

La crise sanitaire devrait affecter le niveau des dépenses de R&D engagées par les jeunes entreprises innovantes en 2020, dans une proportion toutefois limitée. Selon les premières estimations, le montant des exonérations se réduirait légèrement en 2020 (198 millions d’euros contre 205,4 millions pour l’année 2019) avant de retrouver un niveau proche de la tendance historique en 2021

Conformément à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les exonérations de cotisations sociales du régime de la JEI sont compensées par une dotation budgétaire de l’État à l’ACOSS inscrite au programme 192. Cette dotation est en forte hausse depuis plusieurs années, 7 % par an en moyenne. Les prévisions pour le montant de la dotation fournies par l’ACOSS sont quasi systématiquement inférieures à l’exécution. Ce décalage s’explique principalement par la croissance des JEI et, en 2018, par la mise en place de la déclaration sociale nominative, qui a accéléré les déclarations des entreprises. En 2016 et en 2017, l’écart en loi de règlement était de l’ordre de 20 millions d’euros et a atteint 51 millions d’euros en 2018. Jusqu’en 2016, ces écarts ont pu être couverts par le dégel de la réserve de précaution. Entre 2017 et 2019, il a été nécessaire, en plus du dégel, de recourir au redéploiement d’autres lignes d’intervention du programme, elles-mêmes fortement contraintes.

Écart entre la dotation en LFI et l’exécution

(en millions d’euros)

 

2016

2017

2018

2019

2020 (prév. juillet 2020)

Exécution sur le P192

167,1

185,6

223,9

210,6

198*

LFI

147,8

163,9

172,7

196,4

197,4

Écart à financer

19,3

21,7

51,2

14,2

0,6

* En raison de la crise sanitaire, l’ACOSS a revu à la baisse ses prévisions de dépenses pour l’année 2020 de 224,3 millions d’euros à 198 millions d’euros. Sans cela, l’écart à financer aurait atteint 26,9 millions d’euros.

Source : ACOSS.

Afin de préserver le volume de crédits des autres actions du programme 192, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a institué un plafonnement de la compensation budgétaire des exonérations de cotisation sociales à hauteur de 197,4 millions d’euros pour l’année 2020. Les sommes excédant ce plafond seront, le cas échéant, prises en charge de manière exclusive par l’ACOSS.

 


—  1  —

   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 21 octobre 2020, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Recherche et Enseignement supérieur.

Suivant les recommandations des rapporteurs, la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission.

Le compte rendu de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Cabinet de Mme la ministre de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation :

– M. Florian Cahagne, conseiller budgétaire

– Mme Blanche Leridon, conseillère parlementaire

Institut français de pétrole – Énergies nouvelles (IFPEN) :

– M. Pierre-Franck Chevet, président

– M. Éric Lafargue, directeur général adjoint

Centre national d’études spatiales (CNES) :

– M. Jean-Yves Le Gall, président

– M. Pierre-Yves Trefouret, directeur de cabinet

Collège de France

– Pr. Philippe Aghion, professeur au Collège de France

Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) :

– M. Bruno Sportisse, président-directeur général

Caisse des dépôts et consignations :

– M. Nicolas Chung, directeur de la mission PIA, Banque des Territoires

– M. Adil Taoufik, conseiller relations institutionnelles

EDHEC :

– M. Pierre Courtioux PhD, directeur de recherche à l’EDHEC et responsable de l’Observatoire de la recherche et développement des entreprises

Commissariat général au développement durable :

– M. Thomas Lesueur, Commissaire général au développement durable

– M. Philippe Geiger, adjoint à la directrice de l'énergie (DGEC)

– M. Thierry Courtine, chef du service de la recherche et de l'’innovation

– M. Pierre Moschetti, sous-directeur de la construction aéronautique (DGAC)

– M. Aurélien Louis, sous-directeur de l'industrie nucléaire (DGEC)

Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) :

– Dr Gilles Bloch, président-directeur général

– Mme Anne-Sophie Etzol, chargée des relations institutionnelles

Institut national du cancer (INCa) :

– Pr. Norbert Ifrah, président

– M. Thierry Breton, directeur général

Centre national de la recherche scientifique (CNRS) :

– Pr. Antoine Petit, président-directeur général

– M. Thomas Borel, chargé des relations avec le Parlement

Ministère de la culture :

– M. Noël Corbin, inspecteur général des affaires culturelles

France Stratégie :

– M. Gilles de Margerie, commissaire général

– M. Mohamed Harfi, économiste

– M. Rémi Lallement, économiste

Direction de la législation fiscale :

– M. Bruno Mauchauffée, adjoint au directeur de la législation fiscale

Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) :

– M. Guillaume Boudy, secrétaire général pour l’investissement

– Mme Naomi Peres, secrétaire générale adjointe

– M. Laurent Buisson, directeur du programme « Centres d’excellence »

– M. Claude Girard, directeur du programme « Valorisation de la recherche »

Direction générale des entreprises (DGE) :

– M. Benjamin Delozier, chef du service de la compétitivité, de l’innovation, et du développement des entreprises

– M. Arnaud Delaunay, sous-directeur de l’innovation

Direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER) :

– Mme Isabelle Chmitelin, directrice générale de l’enseignement et de la recherche

Bpifrance :

– M. Paul-François Fournier, directeur exécutif de l’innovation

– Mme Sarah Madani, chargée de relations institutionnelles

INRAE :

– M. Philippe Mauguin, président-directeur général

– M. Fabrice Marty, directeur général délégué à l’appui à la recherche

– M. Louis-Augustin Julien, directeur du financement et des achats

– M. Marc Gauchée, conseiller pour les relations parlementaires

Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) :

– M. François Jacq, administrateur général

– Mme Marie-Astrid Ravon-Berenguer, directrice financière

Direction générale de la recherche et de l’innovation (MESRI) :

– M. Bernard Larrouturou, directeur général

Direction générale de l’armement (DGA) :

– M. Joël Barre, délégué général pour l’armement

Agence nationale de la recherche (ANR) :

– M. Thierry Damerval, président-directeur général

 


([1]) Les rapports sont consultables à l’adresse suivante : http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid145221/restitution-des-travaux-des-groupes-de-travail-pour-un-projet-de-loi-de-programmation-pluriannuelle-de-la-recherche.html.

([2]) Retranché du montant du remboursement de la dette à l'ESA en 2020 (254 millions d'euros), même chose en CP.

([3]) Ajout de la mesure de transfert vers le P146 relative au financement du CNES (100 millions d’euros), même chose en CP.

([4]) Ajout de la mesure de périmètre relative au soutien à l'innovation (113 millions d'euros) qui était financée par le P192 en 2020, même chose en CP.

([5]) Ajout des crédits pour la recherche duale inscrits, en 2020, dans le programme 363 de la mission Plan de relance (150 millions d’euros), même chose en CP.

([6]) Le préciput, part du financement qui revient non pas au porteur du projet mais aux établissements qui y participent, représente un complément de financement important pour ces établissements, permettant notamment de couvrir les coûts indirects induits par le projet.

([7]) L’impact du crédit d’impôt recherche, avis de la Commission nationale des politiques de l’innovation, France Stratégie, mars 2019.