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N° 3502

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 novembre 2020

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE

SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE,

EN NOUVELLE LECTURE
 

autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire ( 3495)

Par M. Jean-Pierre PONT

Député

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Voir les numéros :

Assemblée nationale :                                                                       1re lecture : 3464, 3472 et T.A. 489.

                              Commission mixte paritaire : 3498.

                 Nouvelle lecture : 3495.

 Sénat :1re lecture : 74, 78, 79 et T.A. 12 (2020-2021).

                Commission mixte paritaire : 99 et 100 (2020-2021).

 


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS............................................ 5

examen deS ARTICLES

Article 1er Prorogation de l’état d’urgence sanitaire

Article 2  (art. 1er et 2 de la loi n° 2020856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire) Prorogation du régime transitoire  institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire

Article 2 bis  (art. L. 313119 du code de la santé publique et 1er de la loi n° 2020856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire) Communication et publication des avis du Conseil scientifique

Article 2 ter (art. L. 3841­3 du code de la santé publique) Forfaitisation des contraventions en Polynésie-Française

Article 3 (art. 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions) Prorogation des systèmes d’information mis en œuvre aux fins de lutter contre l’épidémie de Covid-19

Article 3 bis A (art. L. 4311-15 du code de la santé publique) Habilitation des infirmiers à pratiquer des actes avancés

Article 3 bis à 4 Champ des habilitations du Gouvernement à prendre diverses mesures par voie d’ordonnances

Article 4 bis Extension du nombre de procurations autorisées pour les élections professionnelles

Article 4 ter Dérogation aux règles d’affectation et de transfert des personnes détenues

Article 6 Protection des petites entreprises affectées par la crise sanitaire

Article 7 bis Prorogation de la validité des titres d’identité et des passeports des Français résidant à l’étranger

Article 8 Possibilité de passer un acte notarié à distance

Article 9 Déplafonnement des durées d’activité des réservistes fonctionnaires pendant l’état d’urgence sanitaire

Article 10 Mesures relatives aux prochaines élections régionales et départementales

Article 10 bis Supports de communication des départements et des régions

Article 11 Mesures relatives aux prochaines élections consulaires

Article 12 Exonération de frais bancaires des personnes fragiles pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire

Article 13 Mesures relatives aux victimes de violences conjugales

COMPTE-RENDU DES DÉBATS


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Mesdames, Messieurs,

Depuis l’examen, en première lecture, par l’Assemblée nationale, du présent projet de loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire, la dégradation de la situation a conduit le Gouvernement, le 24 octobre 2020, à élargir à la moitié du pays le « couvre-feu » qui était déjà en vigueur dans certaines métropoles. Le Président de la République a ensuite pris, le 28 octobre, la mesure que la circulation active du virus imposait : un nouveau confinement national de la population.

Dans ce contexte grave et alors que les personnels soignants ont besoin d’un soutien total, l’heure n’est plus aux atermoiements. Prétendre vaincre définitivement cette épidémie serait péremptoire en l’absence de certitude sur la mise au point prochaine d’un vaccin. Tout doit néanmoins être mis en œuvre, dans les prochains mois, sous le contrôle du Parlement comme cela a été le cas jusqu’à présent, pour améliorer rapidement la situation sanitaire, limiter le nombre de décès et sortir au plus vite du confinement.

La commission mixte paritaire, qui s’est réunie au Sénat le vendredi 30 octobre, a permis de constater la convergence des deux assemblées sur la nécessité de donner au Gouvernement les marges de manœuvre indispensables pour faire face à une situation désormais critique. Des divergences se sont cependant manifestées quant à l’étendue des moyens pouvant être mobilisés pour y parvenir. La commission mixte paritaire n’a pas été en mesure, dès lors, de proposer un texte commun.

L’Assemblée nationale est donc saisie, en nouvelle lecture, des dispositions restant en discussion du présent projet de loi.

 


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   examen deS ARTICLES

Article 1er
Prorogation de l’état d’urgence sanitaire

Adopté par la Commission avec modifications

Le présent article proroge, dans sa version initiale, jusqu’au 16 février 2021, l’état d’urgence sanitaire déclaré par le décret n° 2020‑1257 du 14 octobre 2020.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Face à la recrudescence de l’épidémie sur le territoire national, le nouvel état d’urgence sanitaire, déclaré par décret du 14 octobre 2020 ([1]), a permis au Gouvernement de recourir à des mesures de protection plus contraignantes que celles qui étaient applicables dans le cadre du régime transitoire institué à la sortie du précédent, le 11 juillet 2020 ([2]).

Sur ce fondement, le Gouvernement a d’abord institué un couvre-feu de la population en Île-de-France et dans huit métropoles entre 21 heures et 6 heures du matin à compter du 17 octobre qui a été étendu à 54 départements le 24 octobre. Un nouveau confinement est entré en vigueur le 30 octobre sur l’ensemble du territoire métropolitain et en Martinique ([3]).

Saisie, en application de l’article L. 3131-13 du code de la santé publique, pour proroger l’état d’urgence sanitaire, au-delà de quatre semaines, l’Assemblée nationale a approuvé l’extension de ce dispositif pour une durée supplémentaire de trois mois, c’est-à-dire jusqu’au 16 février 2021 inclus.

2.   La position du Sénat en première lecture

À l’initiative de son rapporteur, la commission des Lois du Sénat a avancé l’échéance de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire au 31 janvier 2021. Elle a également apporté diverses modifications au régime juridique de l’état d’urgence sanitaire en ce qui concerne la limitation ou l’interdiction des rassemblements, les mesures temporaires de contrôle des prix et le régime des mesures de quarantaine et d’isolement.

À l’initiative du rapporteur, le Sénat a également adopté, en séance publique, deux amendements.

Le premier dispose que le Premier ministre ne pourra prescrire des mesures de confinement, au-delà de la période de quatre semaines prévue par le décret de déclaration de l’état d’urgence sanitaire, qu’en application d’une autorisation prévue dans la loi de prorogation. En conséquence, l’amendement prévoit que le confinement actuellement en vigueur ne pourra être appliqué au-delà du 8 décembre 2020 que par la loi, après avis du Conseil scientifique.

Le second autorise les préfets de départements, dans des conditions déterminées par décret, à permettre l’ouverture de commerces de vente au détail pendant la période de l’état d’urgence sanitaire lorsque la mise en œuvre des mesures de nature à prévenir les risques de propagation du virus est garantie.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a rétabli la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture prorogeant, jusqu’au 16 février 2021, l’état d’urgence sanitaire.

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Article 2 
(art. 1er et 2 de la loi n° 2020856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire)
Prorogation du régime transitoire
institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire

Rétabli par la Commission

Le présent article proroge, dans sa version initiale, jusqu’au 1er avril 2021, et adapte le régime transitoire institué, le 11 juillet 2020, à la sortie du premier état d’urgence sanitaire.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Compte-tenu du contexte sanitaire préoccupant et conformément aux préconisations du Conseil scientifique, la commission des Lois a approuvé, en première lecture, la prorogation du dispositif transitoire institué par l’article 1er de la loi  2020 856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er avril 2021 afin d’éviter une sortie « sèche » du dispositif en vigueur : la transition qui s’était opérée le 11 juillet dernier entre les deux régimes a fait la preuve de son efficacité.

Cette prorogation, de cinq mois au total, est apparue justifiée, aux yeux de votre Commission, par les perspectives défavorables d’évolution de l’épidémie et cohérente par rapport au terme fixé par l’article 7 de la loi du 23 mars 2020 pour la mise en place d’un cadre législatif propre à l’état d’urgence sanitaire. Avant la fin de l’année, en effet, le Parlement sera saisi d’un projet de loi qui aura pour but de pérenniser les dispositifs de gestion des urgences sanitaires. Une mission d’information sur le régime juridique de l’état d’urgence sanitaire a été créée, dans cette perspective, par la commission des Lois, le 14 octobre 2020.

2.   La position du Sénat en première lecture

La commission des Lois du Sénat a supprimé cet article.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a rétabli la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale.             

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Article 2 bis 
(art. L. 313119 du code de la santé publique et 1er de la loi n° 2020856 du 9 juillet 2020
organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire)
Communication et publication des avis du Conseil scientifique

Adopté par la Commission sans modification

Cet article, qui résulte de l’adoption par la commission des Lois du Sénat d’un amendement de son rapporteur et de Mme Marie-Pierre de La Gonterie, prévoit que les avis du Conseil scientifique sont communiqués simultanément au Premier ministre, au Président de l’Assemblée nationale et au Président du Sénat. Afin de pallier les retards récurrents dans la publication de ces avis, ceux-ci seront désormais rendus publics sans délai.

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 2 ter
(art. L. 3841­3 du code de la santé publique)
Forfaitisation des contraventions en Polynésie-Française

Adopté par la Commission sans modification

Adopté à l’initiative de Mmes Lana Tetuanui et Sophie Rohfritsch, le présent article prévoit l’application, en Polynésie-Française, de la forfaitisation des contraventions dressées pour non-respect des prescriptions de l’état d’urgence sanitaire.

L’article 529 du code de procédure pénale énumère les domaines dans lesquels il est possible de recourir à des amendes forfaitaires. Il a été adapté pour la Polynésie française par l’article 850 du même code sans inclure la santé publique. Le présent article permettra d’appliquer la procédure de l’amende forfaitaire aux réglementations applicables localement afin de prévenir et limiter les conséquences sur la santé de la population de menaces sanitaires graves appelant des mesures d’urgence ou permettant de faire face à des catastrophes sanitaires.

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 3
(art. 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020
prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions)
Prorogation des systèmes d’information mis en œuvre aux fins de lutter contre l’épidémie de Covid-19

Adopté par la Commission avec modifications

Le présent article proroge, jusqu’au 1er avril 2021, la mise en œuvre des systèmes d’information SI-DEP ([4]) et Contact Covid ([5]) prévus par l’article 11 de la loi n° 2020‑546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Il permet également de :

– préciser la nature des examens permettant d’identifier les personnes contaminées pour couvrir les dépistages virologiques ou sérologiques ;

– élargir le champ des professionnels chargés de renseigner les informations collectées dans les systèmes d’information aux personnels de santé mentionnés par un décret et habilités à réaliser les examens de dépistage ;

– ajouter une nouvelle finalité aux données collectées qui pourront être utilisées dans le cadre de l’accompagnement social des personnes infectées ou susceptibles de l’être, sous réserve de leur consentement.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Les dispositions prévues par l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 ont été décrites par nos collègues Marie Guévenoux dans son rapport sur le projet de loi organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire ([6]), devenu la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020, et Alice Thourot, rapporteure sur le projet de loi prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire ([7]), dont la discussion a été interrompue au profit du présent projet de loi.

Outre des modifications rédactionnelles, l’Assemblée nationale a complété le présent article de manière à préciser que le rapport remis par le Gouvernement au Parlement, tous les trois mois, sur les systèmes d’information SI-DEP et Contact Covid doit comporter des indicateurs d’activité, de performance et de résultats.

Il s’agit, en effet, de permettre au Parlement, mais également à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) et au comité de contrôle et de liaison ([8]), de mieux apprécier l’efficacité de ces outils.

2.   La position du Sénat en première lecture

Le Sénat a adopté plusieurs amendements modifiant les dispositions du présent article. À l’initiative de son rapporteur et par cohérence avec la limitation de la durée de l’état d’urgence sanitaire au 31 janvier 2021, il n’a prorogé les systèmes d’information que jusqu’à cette même date.

Le Sénat a par ailleurs souhaité que le décret de mise en œuvre de ces fichiers ([9]) établisse une liste limitative de données pouvant être collectées en vue du suivi épidémiologique et de la recherche sur le virus.

Enfin, à l’initiative du Gouvernement, la liste des personnes pouvant avoir accès aux données de santé collectées dans ces systèmes d’information a été étendue :

– aux professionnels de santé et personnels spécialement habilités des services de santé des établissements d’enseignement scolaire ou des établissements d’enseignement supérieur ;

– aux professionnels de santé ou aux étudiants inscrits dans une formation donnant accès aux professions de santé.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a rétabli la prolongation de la mise en œuvre des systèmes d’information au 1er avril 2021 par cohérence avec sa position en première lecture du présent projet de loi et au regard de l’importance de ces outils dans la lutte contre l’épidémie.

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Article 3 bis A
(art. L. 4311-15 du code de la santé publique)
Habilitation des infirmiers à pratiquer des actes avancés

Supprimé par la Commission

Introduit en séance publique à l’initiative de M. Savary avec l’avis favorable du rapporteur du Sénat, cet article a pour objet, pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, de permettre aux infirmiers exerçant dans un pôle de santé, dans une maison de santé ou dans un centre de santé d’être habilités à pratiquer des « actes avancés » définis par un arrêté du ministre chargé de la santé.

Le Gouvernement a toutefois donné un avis défavorable à cette disposition au motif qu’elle est déjà prévue par les protocoles de coopération entre professionnels de santé depuis mars 2020.

En nouvelle lecture, la Commission a, en conséquence, supprimé cet article déjà satisfait par le droit en vigueur.

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Article 3 bis à 4
Champ des habilitations du Gouvernement à prendre diverses mesures
par voie d’ordonnances

Adoptés par la Commission avec modifications

Le présent projet de loi habilite, à son article 4, le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures permettant de prolonger, rétablir ou adapter certaines dispositions prises également par ordonnances au cours du printemps et de l’été 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19 et pour la plupart arrivées à échéance ([10]). Ces mesures pourraient entrer en vigueur de manière rétroactive si la continuité des droits qu’elles prolongent est nécessaire au regard des conséquences de l’épidémie.

Le Gouvernement est, en outre, habilité, à prendre par ordonnances des dispositions relatives aux compétences de l’Autorité de régulation des transports.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Le champ des habilitations prévues par l’article 4 comprend des dispositions :

– économiques et financières, visant principalement à préserver l’emploi et soutenir les acteurs économiques ;

– sociales, visant en particulier à protéger les publics les plus vulnérables face à la crise et à adapter le fonctionnement des organismes de santé ;

– administratives, pour assurer la continuité du fonctionnement des services publics et des établissements publics, ainsi que des collectivités territoriales et de leurs groupements.

Par ailleurs, les projets d’ordonnances pris sur le fondement de ces habilitations seraient dispensés de toute consultation obligatoire prévue par une disposition législative ou règlementaire.

Ces mesures ont été présentées en détail dans les rapports de votre rapporteur ([11]) et du rapporteur du Sénat ([12]) relatifs à la première lecture du présent projet de loi.

En première lecture, l’Assemblée nationale a adopté les modifications suivantes :

– à l’initiative de M. Antoine Savignat, le délai d’habilitation du Gouvernement a été ramené du 1er avril au 16 février 2021, soit au terme prévu de l’état d’urgence sanitaire ;

– à l’initiative de votre rapporteur, le délai de dépôt des projets de loi de ratification devant le Parlement a été réduit de trois à un mois à compter de la publication des ordonnances ;

– à l’initiative du Gouvernement, la suppression des consultations préalables obligatoires a été circonscrite aux ordonnances signées jusqu’au 31 décembre 2020. Par ailleurs, une nouvelle habilitation a été introduite de manière à permettre d’adapter la gouvernance et certaines règles applicables aux établissements de santé pour que ces derniers puissent consacrer tous leurs efforts à la lutte contre l’épidémie.

2.   La position du Sénat en première lecture

Le Sénat a fortement restreint le champ des habilitations du Gouvernement, en inscrivant « en clair » certaines des dispositions concernées ([13]), voire en les supprimant. Par ailleurs, la durée de l’habilitation serait, sauf exception, limitée à la celle de l’état d’urgence sanitaire, soit jusqu’au 31 janvier 2021 dans la rédaction du Sénat ([14]). Au total, le Gouvernement serait habilité à prendre une trentaine d’ordonnances contre près de soixante-dix dans le texte adopté par l’Assemblée nationale.

Le Sénat a également souhaité préciser que la modification éventuelle des mesures prises par ordonnances au printemps et à l’été dernier pour répondre à la situation présente ne serait possible qu’en cas de stricte nécessité ([15]).

dispositions directement inscrites dans la loi par le Sénat

Dispositions

Articles additionnels introduits

Adapter les règles de transfert de compétences, de publicité
des audiences, de recours à la visioconférence et aux procédures sans audience (uniquement pour le « DALO injonction »)
devant les juridictions judiciaires et administratives

Article 3 bis

(amendement COM-48 du rapporteur du Sénat)

Adapter l’organisation matérielle des cours d’assises ([16])

Article 3 ter

(amendement COM-66 du rapporteur du Sénat)

Pallier aux difficultés de recrutement dans les armées
et au sein des forces de sécurité intérieure ([17])

Article 3 quater

(amendement COM-49 du rapporteur du Sénat)

Adapter l’organisation et le fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux et maintenir les prestations attribuées aux personnes en situation de handicap

Article 3 quinquies et 3 sexies

(amendements COM-3 rect. ter et COM-4 rect. ter de M. Mouillier)

Assouplir les conditions de délibération
des collectivités territoriales

Article 3 septies

(amendement COM-64 du rapporteur du Sénat)

Report de divers transferts de compétence
entre les collectivités territoriales ([18]) et délai supplémentaire pour finaliser les lignes directrices de gestion de la fonction publique territoriale

Article 3 octies

(amendements COM-40 et 81 rect. bis de Mme Gatel)

Compenser la perte de revenus subie par les salariés placés
en position d’activité partielle et maintenir la couverture complémentaire des salariés

Article 3 nonies

(amendements COM-19 rect. de Mme Puissat et 57 rect. ter de Mme Havet)

Recourir à la visioconférence pour la consultation
des instances représentatives du personnel

Article 3 decies

(amendement COM-20 rect. de Mme Puissat)

Adapter les conditions de réunion et de délibération
des assemblées et organes dirigeants des personnes morales
et autres entités de droit privé

Article 3 undecies

(amendement COM-67 du rapporteur du Sénat)

Adapter le droit applicable aux entreprises en difficulté

Article 3 duodecies

(amendement COM-68 du rapporteur du Sénat)

Permettre de nouveau aux entreprises des secteurs du voyage, du spectacle ou du sport de proposer un avoir en lieu et place du remboursement des prestations annulées

Article 3 terdecies

(amendements COM-69 et 87 du rapporteur du Sénat)

Adapter les compétences de l’Autorité de régulation
des transports aériens (ART), en conséquence
de la réduction du nombre de voyageurs

Article 3 quaterdecies

(amendements COM-1 de M. Perrot et 88 du rapporteur du Sénat)

Vacations au sein de la réserve civile de la police nationale

Article 3 quindecies

(amendement 29 du Gouvernement)

Suspension du délai de carence pour l’affiliation à l’assurance maladie des Français de l’étranger

Article 7

(amendement COM-56 du rapporteur du Sénat)

Plusieurs mesures de coordination ont été prises à l’article 4 pour tirer les conséquences de l’introduction de ces quinze nouveaux articles au présent projet de loi. Ont ainsi été supprimées :

– les habilitations portant sur des mesures inscrites « en clair » par le Sénat ;

– les habilitations portant sur des dispositions obsolètes ou sans objet (portant, par exemple, sur les jours de congés payés pendant le confinement du printemps dernier) ;

– les habilitations considérées comme « trop précoces » ou devant « faire l’objet d’un débat ultérieur » (comme la prolongation de la trêve hivernale alors que cette dernière s’applique d’ores et déjà jusqu’au 31 mars 2021) ([19]) ;

– les habilitations pour lesquelles le Sénat considère ne pas disposer d’une information suffisante. À ce titre, sont concernées l’habilitation portant sur la procédure pénale, le rapporteur du Sénat ne souhaitant pas que « ces enjeux essentiels en matière de droits et libertés soient réglés par ordonnances » ([20]) et celle permettant la prolongation par ordonnance de la durée de validité de certains titres de séjour. De même, l’habilitation portant sur les modalités d’organisation des concours et autres dispositifs de sélection pour l’accès à l’enseignement militaire est supprimée au motif qu’« aucune ordonnance n’ayant été publiée sur ce fondement, cette habilitation est inopérante sur le plan juridique. » ([21]) Enfin, le Sénat a supprimé l’habilitation du Gouvernement à rétablir les dispositions étendant le recours à la réserve civique « faute de précisions sur leur application et sur la nécessité d’y recourir à nouveau alors même que les entreprises concernées ont désormais repris un fonctionnement normal. » ([22])

D’autres habilitations ont été davantage encadrées, à l’instar de celles relatives :

– à la commande publique, de manière à limiter son champ d’application aux seuls contrats de la commande publique et contrats publics emportant occupation du domaine public ([23]) ;

– à l’aide aux entreprises, pour laquelle des dispositions ont été inscrites « en clair ». L’habilitation du Gouvernement ne porte ainsi plus que sur les délais au-delà desquels les créances salariales des salariés d’une entreprise en liquidation ne sont plus couvertes par l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) ([24]) ;

– les contrats de recherche, les examens de l’enseignement supérieur et les concours de la fonction publique ainsi que les contrats doctoraux dans les universités, pour lesquels les dispositions prises par ordonnances ne pourraient être que prolongées. ([25])

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a rétabli l’article 4 dans sa version adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale. Elle a, par conséquent, supprimé les articles 3 bis à 3 sexies et 3 decies à 3 quaterdecies. Par ailleurs, une exception à la suppression des consultations préalables obligatoires sur les projets d’ordonnance a été introduite au bénéfice des autorités administratives et publiques indépendantes.

La Commission a ainsi considéré qu’il convient d’autoriser le Gouvernement à prendre, sous le contrôle du Parlement, les mesures les plus adaptées en fonction de l’évolution de l’épidémie.

Des précisions ont également été apportées :

­– à l’article 3 septies pour permettre de sécuriser juridiquement les délibérations prises par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales réunies en téléconférence entre le 31 octobre 2020, date du terme des dispositions de l’ordonnance n° 2020‑391 du 1er avril 2020 prévoyant cette possibilité, et l’entrée en vigueur du présent projet de loi ;

– à l’article 3 octies pour supprimer le délai supplémentaire de trois mois accordé aux collectivités territoriales pour arrêter les lignes directrices de gestion de leurs ressources humaines. En effet, le Gouvernement rappelle que ces dernières pourront, « dans un premier temps, privilégier des lignes directrices de gestion généralistes dans l’objectif de respecter les délais impartis par la loi. Dans un second temps, il [leur] sera tout à fait possible de reprendre les lignes directrices de gestion adoptées, qu’il s’agisse d’un simple ajustement ou d’un approfondissement de certaines questions. » ([26])

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Article 4 bis
Extension du nombre de procurations autorisées
pour les élections professionnelles

Adopté par la Commission avec modifications

Prise par le Gouvernement au cours de la première vague épidémique de covid‑19, l’ordonnance n° 2020-388 du 1er avril 2020 a reporté au premier semestre 2021 le scrutin de mesure de l’audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés. Cette disposition, alors de bon sens, se heurte néanmoins, aujourd’hui, à la résurgence des contaminations qui vient directement menacer la tenue des opérations électorales.

Les assemblées électives procèdent à l’élection des chefs de juridiction, puis des présidents et vice-présidents de section et de chambre. Elles fournissent la garantie de la légitimité des formations de jugement des conseils de prud’hommes. Le vote par mandat est possible, aux termes de l’article L. 1423‑5 du code du travail, dans la limite d’un mandat par conseiller. 

Issu de deux amendements identiques du Gouvernement et de Mme Céline Boulay-Espéronnier adoptés par le Sénat en séance publique avec l’avis favorable de la Commission, l’article 4 bis porte à deux mandats par conseiller la limite légale afin de diminuer les risques de contamination occasionnés par le scrutin. Cette mesure préserve l’équilibre entre les deux collèges employeurs et salariés dans le sens souhaité par certaines juridictions et organisations syndicales du conseil supérieur de la prud’homie.

En nouvelle lecture, la Commission a adopté cet article. Elle a également adopté un amendement du rapporteur cantonnant ses effets à l’état d’urgence sanitaire actuel, considérant peu probable que d’éventuelles déclarations ultérieures entrent en conflit avec les élections professionnelles.

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Article 4 ter
Dérogation aux règles d’affectation et de transfert des personnes détenues

Adopté par la Commission avec modifications

Issu d’un amendement du Gouvernement adopté par le Sénat en séance publique avec l’avis favorable de la Commission, l’article 4 ter permet de déroger aux règles d’affectation et de transfert des personnes détenues prévues aux articles 714 et 717 du code de procédure pénale afin de limiter les risques de contamination et de tenir compte des places disponibles dans les différentes structures – maisons d’arrêt et établissements pour peine.

Les directions interrégionales des services pénitentiaires, en concertation avec les agences régionales de santé, pourront ainsi décider de regrouper des personnes détenues malades issues de différents établissements en fonction des possibilités d’accueil.

En nouvelle lecture, la Commission a adopté cet article ainsi qu’un amendement du rapporteur corrigeant une erreur de référence.

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Article 6
Protection des petites entreprises affectées par la crise sanitaire

Adopté par la Commission avec modifications

L’article 6 vise à protéger les petites entreprises affectées par la crise contre toute sanction liée à un retard de paiement ou au non-paiement de leurs loyers.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Cet article est issu d’un amendement du Gouvernement adopté par l’Assemblée nationale en première lecture avec l’avis favorable du rapporteur. Il remet en vigueur certaines dispositions de l’ordonnance n° 2020‑316 du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie de covid-19.

Les dispositions prévues bénéficient aux entreprises dont l’activité est affectée par une mesure de police prise en application du régime de l’état d’urgence sanitaire ou du régime transitoire issu de la loi n° 2020‑856 du 9 juillet 2020. Le périmètre d’éligibilité est défini par décret.

Il est prévu que, jusqu’à deux mois suivant la date à laquelle leur activité cesse d’être affectée, les entreprises concernées « ne peuvent encourir d’intérêts, de pénalités ou toute mesure financière ou encourir toute action, sanction ou voie d’exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est ou était ainsi affectée ». Sans remettre en question le principe des versements dus, la loi vient protéger les opérateurs contre toute pénalité ou sanction en cas de manquement à leurs obligations contractuelles.

Les procédures d’exécution engagées sont suspendues pour la même période et aucune sûreté garantissant le paiement des loyers et charges locatives ne peut être sollicitée ([27]).

2.   La position du Sénat en première lecture

Le Sénat a adopté plusieurs amendements du rapporteur en commission des Lois :

– rétablissant la possibilité pour les bailleurs de mettre en œuvre une mesure conservatoire pour garantir le paiement de leurs créances, considérant qu’ils se trouvent excessivement exposés au risque d’insolvabilité du locataire. Cette faculté est toutefois conditionnée à la saisine préalable d’un juge ;

– fixant rétroactivement l’entrée en vigueur du dispositif au 17 octobre 2020, date de déclaration de l’état d’urgence sanitaire, et le rendant applicable à Wallis-et-Futuna ;

– précisant le périmètre des mesures de police entraînant le déclenchement du dispositif, en cohérence avec la suppression de l’article 2 du projet de loi ;

– remettant temporairement en vigueur en vigueur, au bénéfice des mêmes entreprises, l’interdiction pour les fournisseurs d’électricité, de gaz et d’eau de suspendre leur service en raison du non-paiement des factures, et obligeant ces mêmes fournisseurs à consentir des délais de paiement.

Cette disposition n’a fait l’objet d’aucun amendement en séance publique.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a retenu les améliorations apportées par le Sénat au dispositif. Elle a également procédé à diverses modifications en cohérence avec le rétablissement de l’article 2 du projet de loi.

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Article 7 bis
Prorogation de la validité des titres d’identité et des passeports
des Français résidant à l’étranger

Supprimé par la Commission

Issu d’un amendement de Mme Jacky Deromedi adopté par le Sénat en séance publique en dépit d’un avis défavorable du Gouvernement, l’article 7 bis prévoit la prorogation, pour une durée de six mois après la cessation de l’état d’urgence sanitaire, des titres d’identité et des passeports des ressortissants français résidant à l’étranger dont la fin de validité est postérieure à la publication du décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l’état d’urgence sanitaire.

Cette disposition est motivée par les difficultés rencontrées par certains Français pour obtenir un visa de séjour à l’étranger une fois leur passeport périmé, alors même que l’état d’urgence sanitaire pourrait avoir pour conséquence un allongement des délais de renouvellement.

Considérant, toutefois, que, contrairement à la situation qui avait prévalu au printemps, l’ensemble des services publics continuent à fonctionner tout au long de l’état d’urgence sanitaire, la commission des Lois a adopté un amendement du rapporteur portant suppression de l’article 7 bis.

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Article 8
Possibilité de passer un acte notarié à distance

Adopté par la Commission sans modification

Le décret n° 2020‑395 du 3 avril 2020 autorisant l’acte notarié à distance pendant la période d’urgence sanitaire avait pris en compte le fait que la situation découlant du confinement des populations était suffisamment exceptionnelle pour justifier la remise en cause des conditions de forme des actes authentiques. Ce décret ne s’appliquait que jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire proclamé par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, soit le 10 août 2020 à minuit.

L’article 8, issu d’un amendement de Mme Jacky Deromedi adopté par la commission des Lois du Sénat, reconduit cette possibilité pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020.

Cette disposition n’a fait l’objet d’aucun amendement en séance publique au Sénat.

En nouvelle lecture, la commission des Lois a adopté cet article sans modification.

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Article 9
Déplafonnement des durées d’activité des réservistes fonctionnaires
pendant l’état d’urgence sanitaire

Adopté par la Commission sans modification

L’article 9 est issu d’un amendement de M. Roger Karoutchi et de plusieurs de ses collègues adoptés par la commission des Lois du Sénat avec un sous-amendement du rapporteur. Il permet un déplafonnement des durées d’activité des réservistes fonctionnaires, pendant la durée d’application de l’état d’urgence sanitaire prorogé par le présent projet de loi, afin de pouvoir assurer leur disponibilité pour des missions de réserve sanitaire, militaire, de police ou de sécurité civile, dans un contexte de forte tension opérationnelle pour l’ensemble de ces services.

Cette disposition s’inspire directement de l’article 19 de la loi n° 2016-987 du 21 juillet 2016 prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence et portant mesures de renforcement de la lutte antiterroriste, qui a édicté une mesure similaire en cas de proclamation de l’état d’urgence ([28]).

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement de Mme Marta de Cidrac bénéficiant d’un avis favorable de la Commission et du Gouvernement. Celui étend le bénéfice du déplafonnement aux contractuels de la fonction publique.

En nouvelle lecture, la commission des Lois a adopté cet article sans modification.

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Article 10
Mesures relatives aux prochaines élections régionales et départementales

Supprimé par la Commission

Introduit à l’initiative du rapporteur du Sénat, le présent article propose trois mesures pour tenir compte des éventuels effets de l’épidémie de Covid-19 sur le déroulement des élections régionales et départementales de mars 2021 :

– encourager le vote par procuration en autorisant chaque électeur à disposer de deux procurations, y compris confiées par des mandants inscrits sur la liste électorale d’une autre commune (contre une seule selon le droit en vigueur) et en permettant aux électeurs d’établir leur procuration depuis leur domicile ;

– augmenter le nombre de bureaux de vote pour éviter une trop forte concentration des électeurs (alors qu’actuellement, un bureau peut compter entre 800 et 1 000 électeurs inscrits) ;

– autoriser le vote par correspondance « papier », tout en prévoyant des dispositions spécifiques pour éviter les fraudes : contrôle de l’identité des votants, conservation des plis dans un lieu sécurisé du tribunal d’instance, acheminement des plis par des officiers de police judiciaire (OPJ), etc.

Pour mémoire, conformément au souhait exprimé par le Président de la République que soit menée une large concertation au sujet d’un éventuel report des élections, le Premier ministre a confié à M. Jean-Louis Debré, ancien Président de l’Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel, le 21 octobre dernier, la mission de « conduire une analyse juridique et pratique de la situation et de faire des propositions après avoir consulté largement l’ensemble des parties prenantes ».

La décision finale devrait être prise avant le début de la campagne officielle, soit à la fin de l’année 2020 ou au début de l’année 2021 au plus tard.

En nouvelle lecture, la Commission a supprimé cet article. Elle a, en effet, considéré qu’il convient d’attendre les conclusions de la mission en cours pour que le législateur puisse se prononcer sur les mesures les plus adaptées à mettre en œuvre.

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 Article 10 bis
Supports de communication des départements et des régions

Supprimé par la Commission

L’article 10 bis est issu d’un amendement de M. Philippe Mouiller et de plusieurs de ses collègues adoptés par le Sénat en séance publique avec le soutien de la Commission et un avis défavorable du Gouvernement. Il permet de déroger aux dispositions de l’article L52-1 du code électoral aux termes duquel « pendant les six mois précédant le premier jour du mois d’une élection et jusqu’à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l’utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite ».

Or, la date des élections départementales et régionales est fixée par la loi à mars 2021 ([29]). Bien qu’une mission ait été confiée à M. Jean-Louis Debré, ancien Président de l’Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel, afin d’évaluer l’opportunité d’un éventuel report, les restrictions imposées à la communication des collectivités départementales et régionales s’appliquent dans l’attente d’une décision ferme. Cette situation est jugée par les sénateurs préjudiciable à l’intérêt général dans la mesure où l’information des populations sur les dispositifs d’aide d’urgence en souffrirait.

En nouvelle lecture, la commission des Lois a supprimé cet article. L’information des populations sur les dispositifs de soutien auxquels chacun peut prétendre ne saurait, en effet, être assimilée à un « procédé de publicité commerciale » au sens du code électoral.

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Article 11
Mesures relatives aux prochaines élections consulaires

Supprimé par la Commission

Introduit à l’initiative de M. Leconte et des membres du groupe Socialiste, écologiste et Républicain avec l’avis favorable du rapporteur du Sénat, le présent article a pour objet de permettre le vote par correspondance « papier » pour les prochaines élections consulaires, reportées de mai 2020 à mai 2021 par la loi du 22 juin 2020 ([30]).

Cette modalité de vote, complémentaire du vote à l’urne et du vote par internet auxquels peuvent recourir les Français établis hors de France lors de ces élections, serait destinée à prendre en compte les difficultés qui pourraient affecter le déroulement du scrutin du fait des incertitudes entourant l’évolution de l’épidémie de Covid-19.

En nouvelle lecture, la Commission a supprimé cet article. En effet, comme pour l’article 10, elle a considéré qu’il était nécessaire de prendre connaissance des conclusions de la mission confiée à M. Jean-Louis Debré sur les conditions du déroulement des prochaines échéances électorales dans le contexte épidémiologique actuel avant que le législateur ne se prononce sur les éventuelles mesures à mettre en œuvre.

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Article 12
Exonération de frais bancaires des personnes fragiles
pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire

Supprimé par la Commission

L’article 12 est issu d’un amendement de Mme Laurence Rossignol et des membres du groupe Socialiste, écologiste et Républicain, adopté par le Sénat en séance publique en dépit d’un avis défavorable du Gouvernement, qui prévoit que les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et les personnes en situation de fragilité financière sont exonérées de frais bancaires et de commissions perçues par un établissement de crédit pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire.

Un sous-amendement du rapporteur a permis de limiter la portée l’article à l’interdiction des commissions d’intervention en cas d’irrégularité de fonctionnement des comptes, de préciser le champ des bénéficiaires du dispositif et de le rendre applicable jusqu’au terme de l’état d’urgence sanitaire, y compris en cas de prolongation ultérieure.

Conformément à la position de l’Assemblée nationale exprimée lors de l’examen du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions en mai dernier, la Commission a supprimé cet article.

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Article 13
Mesures relatives aux victimes de violences conjugales

Adopté par la Commission avec modifications

Introduit à l’initiative de Mme Rossignol et des membres du groupe Socialiste, écologiste et Républicain avec l’avis favorable du rapporteur du Sénat et du Gouvernement, le présent article prévoit que les victimes des violences conjugales mentionnées à l’article 132-80 du code pénal ne peuvent être soumises au couvre-feu, ou maintenues en confinement dans le même domicile que l’auteur des violences, y compris si les violences sont présumées. Le dispositif prévoit également que lorsque l’éviction du conjoint violent ne peut être exécutée, un lieu d’hébergement permettant le respect de leur vie privée et familiale est attribué aux victimes.

En nouvelle lecture, la commission des Lois a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

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1

COMPTE-RENDU DES DÉBATS

Lors de sa réunion du lundi 2 novembre 2020, la Commission examine, en nouvelle lecture, le projet de loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire (n° 3495) (M. Jean-Pierre Pont, rapporteur).

Lien vidéo :               

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.9792372_5fa007fc1fe69.commission-des-lois--m-gerald-darmanin-ministre-de-l-interieur-2-novembre-2020

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous abordons l’examen en nouvelle lecture du projet de loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire. La commission mixte paritaire, qui s’est réunie vendredi après-midi au Sénat, a en effet échoué. Il a été convenu entre tous les groupes politiques présents dans la salle que nous aborderions immédiatement l’examen des articles et des amendements.

Article 1er : Prorogation de l’état d’urgence sanitaire

La Commission est saisie de l’amendement CL34 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. L’amendement tend à rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.

M. Antoine Savignat. Le Sénat n’a pas modifié cet article par esprit de défiance ou pour nier la réalité des conditions sanitaires auxquelles notre pays est confronté, mais pour rétablir le rôle du Parlement, qui est de légiférer et de contrôler. Il a estimé, à juste titre, qu’il ne fallait pas donner un blanc-seing au Gouvernement pour gérer cette crise. Les Français partagent en grande partie cet avis – il suffit de les écouter, depuis quelques jours. Nous prouvons d’ailleurs, aujourd’hui même, que nous sommes capables de légiférer rapidement puisque nous en arrivons, en moins d’une semaine, à la nouvelle lecture de ce texte qui sera examiné demain dans l’hémicycle. Rien ne s’oppose à limiter dans le temps, comme le propose le Sénat, la durée de l’état d’urgence et des mesures restrictives de liberté que le Gouvernement pourrait être amené à prendre.

M. Paul Molac. Si je comprends bien, l’adoption de cet amendement, qui rédige l’article, ferait tomber mon amendement CL12, qui tendait à appeler votre attention sur un point important. Le confinement allégé, tel que nous l’impose le Gouvernement aujourd’hui, a contraint les petits commerçants à fermer. J’ai passé mon week-end à discuter avec un certain nombre d’entre eux qui ne comprennent pas cette mesure parce que, dans le même temps, les écoles restent ouvertes alors que des classes de trente-cinq élèves peuvent accélérer les contaminations, et que les transports en commun continuent à fonctionner à plein durant les heures de pointe même si le télétravail a pu quelque peu améliorer la situation.

Ces petits commerçants ne comprennent pas la décision du Gouvernement alors qu’il leur aurait suffi de faire appliquer quelques gestes supplémentaires. Qu’on ne me dise pas que la présence de deux personnes dans un petit commerce peut faire exploser le taux de contamination ! Personne ne comprend cette décision. Tout le week-end, mes concitoyens m’ont fait part de leur perplexité car, si le virus circule dangereusement dans certains territoires, ce n’est pas le cas en milieu rural, où je suis élu.

Enfin, il ne me paraît pas raisonnable de laisser la main au Gouvernement pendant six mois, jusqu’au 1er avril. Nous restons donc opposés à ce projet de loi.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. En effet, l’adoption de l’amendement CL34 ferait tomber les suivants, aussi donnerai-je la parole à ceux qui les portent.

Mme George Pau-Langevin. Le groupe Socialistes et apparentés est conscient de la gravité de la crise sanitaire mais il lui semble disproportionné d’empêcher le Parlement, jusqu’en février voire jusqu’en avril, de donner son avis sur une prolongation éventuelle de l’état d’urgence et donc du confinement pendant les fêtes. Si les commerces restent fermés en décembre, avant les fêtes de Noël, le coup serait très grave pour eux.

M. Pacôme Rupin. Le groupe La République en Marche votera cet amendement car la rédaction telle qu’elle est issue des travaux du Sénat ne saurait nous convenir, en particulier celle de l’alinéa 2 dont l’adoption aurait pour conséquence d’empêcher le Gouvernement de recourir au confinement au-delà du 8 décembre. Or, je me demande bien comment les sénateurs peuvent savoir où en sera l’épidémie le 8 décembre. Nous l’avons constaté, le confinement est un outil extrêmement utile qui nous a permis de réduire le nombre de contaminations lors de la première vague et nous espérons qu’il nous permettra de combattre la deuxième vague. Dans ces conditions, il faut laisser le Gouvernement recourir à cette mesure durant l’hiver.

J’évoque l’hiver parce que l’on débat de la date à laquelle l’état d’urgence sanitaire prendra fin. Le Sénat propose celle du 31 janvier 2021 alors que le texte initial du Gouvernement la fixait au 16 février 2021. L’écart n’est que de quinze jours mais on sait que l’hiver, comme en témoigne cette deuxième vague, saison en général difficile pour notre système de santé, le sera encore plus si nous laissons se succéder différentes vagues épidémiques. Le Gouvernement doit donc pouvoir prendre des mesures pour protéger la santé des Français, d’où la nécessité de prolonger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 16 février 2021 et de rejeter les modifications apportées par le Sénat qui, une nouvelle fois, hélas, ne visent qu’à empêcher le Gouvernement de prendre des mesures nécessaires pour la santé des Français.

M. Raphaël Schellenberger. La Haute assemblée, dans sa grande sagesse, a trouvé une rédaction équilibrée. Les Français sont désormais familiers avec les mesures dont il est question, même si le flou qui entoure leur mise en place reste une source de tensions et d’incompréhensions. Il demeure que jamais une démocratie n’a dû prendre de telles mesures de privation de liberté. Leur acceptation suppose un débat politique, en particulier un débat parlementaire. En ce sens, le Sénat propose des dates cohérentes.

Tout d’abord, il prévoit de ne proroger l’état d’urgence que jusqu’au 31 janvier, au plus tard, quitte à nous réunir ensuite pour une nouvelle prorogation si nécessaire – nous avons montré que nous pouvions nous mobiliser très rapidement.

Par ailleurs, il propose, après le 8 décembre, non pas de mettre fin au confinement ou au couvre-feu, mais d’organiser un débat parlementaire suivi d’un vote pour entourer ces mesures de toutes les garanties démocratiques possibles – une prise de parole du Premier ministre ne saurait suffire.

Quant aux commerces, on ne peut pas, depuis trois ans, vanter les mérites de la déconcentration et de la décentralisation pour imposer aujourd’hui une mesure incohérente. La quasi-totalité des petits commerces ont montré qu’ils étaient capables d’ouvrir en respectant les règles de sécurité sanitaire. La décision de les fermer doit relever des autorités locales. Le Sénat a fait ce travail, que vous voulez balayer d’un revers de la main.

Mme Emmanuelle Ménard. Les délais proposés par le texte initial sont beaucoup trop longs : cela reviendrait, une nouvelle fois, à évincer le Parlement. Ceux figurant dans le texte du Sénat me paraissent nettement plus raisonnables, quoique l’échéance soit toujours un peu lointaine. Je propose, pour ma part, la date du 21 décembre, qui est peut-être encore un peu éloignée mais qui nous permettrait de nous revoir avant les vacances de Noël.

Comme nous l’avons constaté le week-end dernier, la colère des petits commerçants gronde. La solution annoncée par le Premier ministre hier soir ne les satisfait absolument pas. Ils ont l’impression que le Gouvernement fait un cadeau de Noël aux géants d’e-commerce. Comme ils l’ont démontré, les petits commerçants sont tout à fait responsables et capables de prendre les mesures sanitaires, de mettre en œuvre les mesures barrières qui s’imposent. Ils ne comprennent pas pourquoi la présence de deux ou trois personnes dans un commerce – dès lors que l’usage du gel hydroalcoolique, le port du masque et le respect de la distanciation sont assurés – serait plus dangereuse que la concentration de plusieurs centaines de personnes poussant leur caddie dans un supermarché.

Il me semble indispensable de permettre au Gouvernement et au Parlement de refaire un point de situation avant les vacances de Noël pour que nous décidions ensemble des mesures à prendre. Noël et ses fêtes familiales sont, pour les croyants comme pour les non-croyants, des moments essentiels. Il faut tout mettre en œuvre pour permettre aux Français de se retrouver en cette circonstance. Il convient aussi, évidemment, de sauver notre économie. On ne peut pas confier les rênes au Gouvernement pour une période aussi longue. L’Assemblée nationale comme le Sénat sont capables de se réunir en urgence, comme nous l’avons montré à chaque fois que cela était nécessaire, y compris le week-end ou la nuit. Il faut, à tout le moins, conserver la date proposée par le Sénat et, pourquoi pas, lui substituer une échéance plus proche.

Mme Isabelle Florennes. Au nom du groupe du Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés, je voudrais exprimer notre soutien à l’amendement du rapporteur. On ne va pas refaire le débat. Nous maintenons notre position sur le texte initial, que nous avions soutenu en première lecture. Nous regrettons que les discussions, parfois intéressantes, qui ont eu lieu au Sénat, aient débouché sur des manœuvres politiciennes – comme cela a été le cas lors de la commission mixte paritaire, qui s’est soldée par un échec.

Nous avions interrogé dès vendredi le Premier ministre au sujet des commerces et lui avions demandé de prendre des mesures d’équité, notamment entre les grandes et les moyennes surfaces, d’une part, et les commerces de proximité, d’autre part. Il a entendu cette demande et a pris des décisions en ce sens hier soir. La politique, c’est faire des choix, en l’occurrence, les moins mauvais choix possibles, ce qui n’est pas simple actuellement. Beaucoup de collectivités locales se mobilisent pour accompagner les commerces de proximité, notamment en leur accordant des aides à la numérisation. Nous apprécions que le Premier ministre ait prévu une clause de revoyure d’ici quinze jours. Il existe en effet une urgence sanitaire, comme vous le réaffirmez par votre amendement, monsieur le rapporteur. Nous approuvons les dates qui ont été proposées initialement.

M. Pascal Brindeau. Le reconfinement, dont nous avons débattu des modalités jeudi dernier, était devenu inéluctable. Cela étant, nous faisons face à un double problème de méthode.

D’une part, la discussion parlementaire est encadrée par des délais très courts : on aurait pu prévoir quelques jours supplémentaires pour organiser le débat, tant en commission qu’en séance. Cela nous aurait permis d’avoir une discussion générale sur le texte et de disposer de délais de dépôt moins resserrés – je pense aux collaborateurs des groupes, qui travaillent en ce moment jour et nuit.

D’autre part, le Gouvernement a fait le choix d’une relative souplesse en laissant la vie économique se poursuivre, dans une certaine mesure, et en gardant les écoles ouvertes pendant le reconfinement. Il a donc conscience que, dans un certain nombre de cas, les protocoles sanitaires renforcés et les gestes barrières sont de nature à briser les chaînes de contamination. Pourtant, ce qu’on fait pour les écoles, pour une partie de la vie économique, on l’exclut pour les commerces de proximité, sous ce même prétexte sanitaire. Quand j’entends le ministre de l’économie dire que les maires qui ont pris des arrêtés autorisant l’ouverture de petits commerces « non essentiels » sont des irresponsables, car ils attentent à la santé de leurs concitoyens, je suis scandalisé. Ce sont les maires et, accessoirement, les parlementaires, qui reçoivent les commerçants en pleurs, convaincus que, cette fois, ils ne pourront pas tenir, que les aides ne suffiront pas. Ils ne comprennent pas cette fermeture alors qu’ils ont, comme on le leur avait demandé, mis en œuvre des protocoles sanitaires extrêmement stricts. À titre d’exemple, je ne crois pas que l’activité des coiffeurs, qui ont appliqué les protocoles sanitaires, ait été source de difficultés.

Nous avons les moyens de renforcer ces protocoles, en régulant le nombre de personnes présentes dans un commerce. Cela se fait dans les commerces alimentaires de proximité, mais absolument pas dans la grande distribution, où la règle des quatre mètres carrés n’est pas respectée – les rayons alimentaires sont bondés en permanence, et il n’y a aucun contrôle. Cette situation est révélatrice d’un problème de méthode, d’un manque de clarté. Nos concitoyens ne comprennent pas ce vers quoi le Gouvernement veut les emmener, ils ne saisissent pas le sens et l’utilité du reconfinement. Ils constatent que des pans de l’activité économique vont tomber, et qu’ils risquent de devoir rester confinés plus longtemps qu’annoncé.

M. Ian Boucard. L’alinéa 12, introduit par le Sénat, vise à autoriser le préfet à rouvrir les commerces de vente au détail dans nos villes et nos villages. J’ai entendu dire à deux reprises, au cours de la discussion, qu’il ne fallait pas refaire le débat de la première lecture. Or, depuis vendredi, la société s’en est emparée, car elle ne comprend pas la décision du Gouvernement. Pour qu’une mesure soit acceptée, il faut qu’elle soit compréhensible. La fermeture des commerces dits « non essentiels » – expression particulièrement mal choisie, sur laquelle on peut s’interroger – ne passe ni auprès des commerçants ni auprès de la population. La réponse apportée hier soir par le Premier ministre – la fermeture des rayons « non essentiels » des grandes surfaces – n’est évidemment pas satisfaisante. Alors que les artisans et les commerçants demandent à pouvoir travailler, le Premier ministre leur répond qu’on va interdire aux autres aussi d’exercer leur activité.

Nous proposons, par les amendements d’Aurélien Pradié, de faire confiance aux commerçants – qui se sont engagés dès le mois de juillet dans la voie du respect des règles sanitaires les plus strictes –, aux citoyens – qui sont toutes et tous engagés pour leur santé et celles de leurs proches –, ainsi qu’aux représentants de l’État dans les départements, autrement dit, aux préfets – qui sont à même, en faisant preuve de bon sens, d’accepter ou non la réouverture des commerces en fonction du respect des règles sanitaires édictées par le Gouvernement.

M. Aurélien Pradié. Le sujet dont nous débattons, qui a fait l’objet d’une disposition introduite par le Sénat, n’est pas mince. Il ne dissimule nulle manœuvre politique, contrairement à ce qui a été dit : c’est une question beaucoup plus profonde que cela, qui a partie liée à la justice – principe pour lequel notre pays est capable de s’enflammer. Toutes les décisions qui ont été prises, depuis quelques jours, sur la fermeture des commerces, sont injustes. Il est légitime et plutôt rassurant que nos concitoyens soient capables de réagir à des décisions proprement injustes. Il s’agit d’une question de cohérence. Chacun mesure le degré d’absurdité des décisions prises. Quelqu’un y comprend-il quelque chose, depuis quarante-huit heures ? Nous n’y entendons rien, car il n’y a rien à comprendre. Je serais extrêmement curieux de savoir qui est le haut fonctionnaire qui, dans son bureau, depuis deux jours, choisit, ligne par ligne, un Stabilo à la main, quels rayons devraient rester ouverts ou fermés. Il n’y a pas de pilotage politique.

Enfin, il est inacceptable qu’on nous oppose le principe de responsabilité sanitaire. Les petits commerces ont accompli des efforts considérables pour assurer la sécurité sanitaire de leurs clients. Parmi les solutions complémentaires envisageables, les amendements que j’ai déposés proposent la réduction des créneaux horaires d’ouverture des commerces de proximité et la limitation du nombre de passages en leur sein. Par ce type de précautions, nous serions en mesure de concilier l’ouverture de ces petits commerces et la sécurité sanitaire. C’est de cela qu’il s’agit. Considérez que, si cette question explose aujourd’hui, c’est qu’au-delà de la dimension économique, elle révèle des symboles, des carences, des incohérences et des injustices qui ne sont aujourd’hui plus supportables.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Je rappellerai la gravité de l’épidémie : ce mois-ci, on devrait déplorer 6 000 morts. Par ailleurs, les petits commerces peuvent appliquer les règles sanitaires mais, plus on multipliera les ouvertures, plus on intensifiera les déplacements et moins on respectera le confinement. Or, d’après le peu que l’on sait, les déplacements favorisent la circulation du virus.

La Commission adopte l’amendement CL34.

En conséquence, l’article 1er est ainsi rédigé et les amendements CL3, CL4, CL5 de Mme Emmanuelle Ménard, CL12 de M. Paul Molac, CL15 de Mme Nathalie Porte, CL2 de M. Pascal Brindeau, CL9 de Mme Emmanuelle Ménard, CL18 et CL19 de M. Aurélien Pradié tombent.

Article 2 : Régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire

La Commission examine l’amendement CL35 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. L’amendement vise à rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 2 est ainsi rétabli.

Article 2 bis

La Commission adopte l’article 2 bis sans modification.

Article 2 ter

La Commission adopte l’article 2 ter sans modification.

Article 3 : Prorogation des systèmes d’information mis en œuvre aux fins de lutter contre l’épidémie de Covid-19

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL14 de Mme Martine Wonner.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL6 de Mme Emmanuelle Ménard et CL43 du rapporteur.

Mme Emmanuelle Ménard. En cohérence avec l’amendement que j’avais déposé à l’article 1er, je propose de substituer la date du 21 décembre 2020, soit juste avant les vacances de Noël, à la date du 31 janvier 2021. La période précédant Noël est très importante pour nos commerçants de proximité.

À ce titre, je veux revenir sur les propos du rapporteur selon lesquels l’objectif est de limiter au maximum les échanges. Si tel est le cas, fermons les écoles, les collèges et les lycées…

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Non, la fermeture des commerces de proximité doit permettre de limiter les déplacements !

Mme Emmanuelle Ménard. Mais les élèves se déplacent aussi pour gagner les écoles, les collèges et les lycées ! Alors, peut-être devrions-nous demander aux livreurs d’Amazon d’arrêter de livrer leurs colis, puisqu’ils participent, eux aussi, aux échanges.

Puisque le principe est l’interdiction, interdisons au maximum. Et si on interdit aux commerces de proximité d’ouvrir, et aux grandes surfaces de commercialiser des biens non essentiels, il faut aussi interdire aux livreurs d’Amazon de livrer les commandes que les Français ne manqueront pas de passer.

Les commerçants de proximité craignent énormément une troisième vague, qui ne sera pas sanitaire mais découlera du fait que les Français, dans cet intervalle de temps, auront pris l’habitude de commander sur le net et ne reviendront plus dans les boutiques une fois le confinement terminé – c’est du moins ce que craignent les commerçants.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. L’amendement vise à substituer la date du 1er avril, qui avait été adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, à celle du 31 janvier.

M. Antoine Savignat. Monsieur le rapporteur, lors de la discussion sur l’article 1er, vous nous avez répondu que nous ne sommes pas en mesure de dire où nous en serons aux différentes dates que nous proposons, notamment en décembre. Cela est vrai, personne n’en est capable. Mais pourquoi choisir la date du 1er avril ? Savez-vous où nous en serons à ce moment ?

On nous prive de tout contrôle et de l’exercice des missions qui sont les nôtres en tant que parlementaires. Nous voulons bien tout entendre – la crise est grave, nous le savons – mais nous avons besoin d’un message rassurant. Or, la meilleure manière de rassurer les Français est de leur dire que la représentation nationale est présente, qu’elle veille et qu’elle votera les décisions qui auront vocation à s’appliquer dans le cadre de la gestion de cette crise.

Mme Cécile Untermaier. Notre groupe rejoint les observations d’Antoine Savignat.

La date du 1er avril est non pas une blague mais une triste décision eu égard à ce que l’on doit attendre d’un parlement. Nous discutons là d’un dispositif dérogatoire, qui porte une atteinte grave à nos libertés. Il ne me semble pas que le Gouvernement ait montré jusque-là une grande capacité à régler au mieux cette question. Il serait de son intérêt de se rapprocher des parlementaires pour garantir ces libertés et l’efficacité des dispositifs qu’il met en place. L’humilité serait de bon aloi. Dans le cadre de cet état d’urgence sanitaire, nous aurions pu nous retrouver tous ensemble autour d’une date. C’est une occasion manquée.

La Commission rejette l’amendement CL6.

Elle adopte l’amendement CL43.

Puis la Commission adopte l’article 3 modifié.

Article 3 bis A

La Commission est saisie de l’amendement CL44 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Cet article, introduit par le Sénat, permet aux infirmiers exerçant dans un pôle de santé, une maison de santé ou un centre de santé d’être habilités à pratiquer des « actes avancés », définis par un arrêté du ministre des solidarités et de la santé, pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire. Or cette possibilité est déjà prévue depuis mars 2020, lorsqu’elle est pertinente et encadrée par les protocoles de coopération entre professionnels de santé.

Par conséquent, le présent amendement vise à supprimer l’article 3 bis A, déjà satisfait par le droit en vigueur.

Mme George Pau-Langevin. À nous qui sommes le Parlement, M. le rapporteur propose de ne pas introduire une disposition dans la loi parce qu’un protocole la prévoit déjà. Cette hiérarchisation des textes de droit est bien curieuse. Si la disposition est utile, elle doit figurer dans la loi. Indiquer qu’elle figure dans un protocole ne suffit pas.

La situation dans laquelle nous sommes est tout de même grave. Nous pouvons être concernés par le fait d’autoriser des infirmiers à effectuer des actes au-delà de leurs attributions habituelles.

M. Olivier Marleix. J’aurais aimé que le rapporteur précise de quels « actes avancés » il peut s’agir. L’expression est mal définie. On sait que, pendant le premier confinement, le Gouvernement a autorisé le personnel médical des établissements à prescrire aux patients des sédatifs puissants qui, habituellement, ne sont pas autorisés dans les EHPAD. Le sujet mérite que l’Assemblée nationale soit mieux informée.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 3 bis A est supprimé.

L’amendement CL7 de Mme Emmanuelle Ménard tombe.

Article 3 bis

La Commission examine l’amendement CL33 du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Avec ce premier amendement du Gouvernement et les suivants, nous abordons la question du champ de l’habilitation à légiférer par ordonnances. Comme je l’ai indiqué en première lecture et en CMP, je suis favorable à ce que le Gouvernement ait la capacité d’agir dans cette période si particulière, sous réserve, bien entendu, de son contrôle par le Parlement et, le cas échéant, par le juge.

Ces habilitations, je le rappelle, ont pour objet de permettre au Gouvernement de prolonger, rétablir ou adapter, notamment en fonction des situations locales, des dispositions adoptées au printemps et à l’été dernier. Elles visent essentiellement à organiser la vie économique et sociale en fonction de l’évolution de la situation épidémiologique. Les objectifs sont simples : préserver l’emploi, faire face aux difficultés des acteurs économiques, accorder des délais supplémentaires pour certaines formalités, faciliter certaines démarches de la vie quotidienne. Ces dispositions sont aussi connues puisqu’elles ont déjà été appliquées en faveur de nombreux publics et que le Conseil d’État en a été systématiquement saisi.

Enfin, nos travaux en première lecture, à l’Assemblée comme au Sénat, ont permis de présenter de manière exhaustive les mesures concernées. Je vous invite à vous y reporter.

Il s’agit donc non pas d’un blanc-seing pour le Gouvernement, mais de mesures qui pourraient être utiles si la situation se dégradait brusquement. La rédaction de l’article 4 que le Gouvernement propose de rétablir semble adaptée : elle permet une réponse rapide des pouvoirs publics en fonction de l’évolution de la situation, qui est difficilement prévisible.

Par ailleurs, les consultations des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API) seraient intégralement préservées. Il me semble ainsi que nous avons trouvé un point d’équilibre acceptable, qui traduit l’engagement que j’avais pris en première lecture devant la commission.

Je suis donc favorable à l’ensemble des amendements déposés par le Gouvernement et défavorable aux autres amendements.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 3 bis est supprimé.

Article 3 ter

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL32 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 ter est supprimé.

Article 3 quater

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL31 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 quater est supprimé.

Article 3 quinquies

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL30 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 quinquies est supprimé.

Article 3 sexies

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL29 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 sexies est supprimé.

Article 3 septies

La Commission est saisie de l’amendement CL28 du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Cet amendement du Gouvernement complète une disposition introduite par le Sénat sur le recours à la visioconférence par les collectivités territoriales. Mme la présidente avait proposé des dispositions semblables dans le précédent projet de loi de prorogation du régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire auquel ce texte se substitue. Nous ne pouvons qu’être d’accord avec la proposition du Gouvernement, qui permet d’assurer la continuité de ce droit pour les collectivités concernées.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 3 septies modifié.

Article 3 octies

La Commission examine l’amendement CL27 du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. L’amendement supprime un article introduit par le Sénat en séance publique, qui donne un délai supplémentaire de trois mois aux collectivités territoriales pour arrêter les lignes directrices de gestion, dont l’objet est de définir la stratégie pluriannuelle de leurs ressources humaines. Cette stratégie est d’autant plus importante qu’à compter du 1er janvier 2021, les commissions administratives paritaires ne seront plus compétentes pour l’avancement de grade et la promotion interne des agents.

Je suis favorable à cet amendement et je rappelle que le Gouvernement apporte une réponse aux difficultés que pourraient rencontrer certaines collectivités, comme le mentionne l’exposé des motifs de l’amendement. Dans un premier temps, une collectivité territoriale pourra privilégier des lignes directrices de gestion généralistes, dans l’objectif de respecter les délais impartis par la loi. Dans un second temps, elle pourra reprendre les lignes directrices de gestion adoptées, qu’il s’agisse de réaliser un simple ajustement ou d’approfondir certaines questions.

M. Pascal Brindeau. L’amendement adopté au Sénat me semblait être de bon sens et très opérationnel. Que vous le vouliez ou non, les collectivités territoriales qui font face à la crise sanitaire et à la crise économique qui suivra n’auront sûrement ni les moyens ni les techniques ni les matériels nécessaires pour appliquer ces lignes directrices de gestion qui, rappelons-le, doivent faire l’objet à la fois d’un dialogue avec les partenaires sociaux et d’une adoption ou du moins d’un débat plus formel dans les comités sociaux et économiques.

Dans le cadre du télétravail que nous sommes censés appliquer et avec un tel timing, je ne vois pas de quelle façon ce type de dialogue social pourra se dérouler dans de bonnes conditions.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 octies modifié.

Article 3 nonies

La Commission adopte l’article 3 nonies sans modification.

Article 3 decies

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL26 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 decies est supprimé.

Article 3 undecies

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL24 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 undecies est supprimé.

Article 3 duodecies

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL23 du Gouvernement.

L’article 3 duodecies est supprimé.

Article 3 terdecies

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL22 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 terdecies est supprimé.

Article 3 quaterdecies

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL21 du Gouvernement.

En conséquence, l’article 3 quaterdecies est supprimé.

Article 3 quindecies

La Commission adopte l’article 3 quindecies sans modification.

Article 4 : Habilitation du Gouvernement à prendre diverses mesures par voie d’ordonnances

La Commission examine l’amendement CL13 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. L’article 4 autorise le Gouvernement à prendre soixante-dix ordonnances… Outre que, sur le principe, nous ne sommes pas fanatiques de cette façon de légiférer – bien au contraire – je note que le Sénat avait proposé l’inclusion de certaines des mesures devant être pris par ordonnances dans la loi, ce qui me paraît légitime puisque le législateur est là pour l’écrire. Cet article donne trop de pouvoir au pouvoir exécutif. J’en demande donc la suppression.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Avis défavorable au profit de l’amendement CL20 du Gouvernement visant à rétablir l’article 4 tel qu’il a été précédemment voté par l’Assemblée.

M. Xavier Breton. On ne peut pas se satisfaire d’un simple avis défavorable sur un sujet aussi important que celui des ordonnances, voie qui doit rester exceptionnelle alors qu’elle est ici très largement empruntée, voire de manière quasi systématique.

Le Sénat nous a appelés à faire preuve d’un peu plus de sagesse et cela mérite une réponse un peu plus argumentée.

Mme George Pau-Langevin. Je le répète : ce texte est un inventaire à la Prévert de tout ce qu’il sera possible de faire par voie d’ordonnances, ce qui revient à dessaisir excessivement le Parlement de ses prérogatives. Je suis donc favorable à la suppression de cet article.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL20 du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. C’est l’amendement de rétablissement de l’article 4 du Gouvernement que j’ai déjà présenté.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il s’agit donc de rétablir l’article 4 en incluant la consultation obligatoire des autorités administratives et publiques indépendantes.

M. Antoine Savignat. Je veux bien que l’on aille vite mais il en va de la vie des Français, a priori jusqu’au 1er avril prochain.

Mon collègue Breton vous a posé des questions, monsieur le rapporteur, et nous n’avons pas de réponse. Dirons-nous aux Français en sortant de cette réunion que le Gouvernement et la majorité n’ont pas d’explications à leur donner ? C’est un peu ennuyeux… Nous avons accepté qu’il n’y ait pas de discussion générale afin de gagner du temps, aucun problème, mais en contrepartie, nous aurions souhaité avoir quelques explications : pourquoi la date du 1er avril, pourquoi procéder de la sorte, pourquoi ne pas prévoir de saisir à nouveau le Parlement, pourquoi, tout simplement, ne pas répondre à l’angoisse des Français qui, a minima, voudraient savoir ce qu’ils pourront faire ?

Des pans entiers de notre économie s’écrouleront dans les semaines à venir. On qualifie des activités de « non essentielles » alors qu’elles sont le support de chaînes économiques complètes dans le transport, la logistique, la fabrication, l’industrie ! Nous aimerions au moins pouvoir dire à leurs acteurs ce qu’ils pourront faire et comment.

Nous dire que c’est comme ça, c’est un peu léger : nous sommes aussi comptables du mandat que l’on nous a confiés.

M. Pacôme Rupin. Nous avons déjà débattu en première lecture du prolongement du régime transitoire de sortie de l’état d’urgence jusqu’au 1er avril et le rapporteur, comme le ministre et les groupes majoritaires qui soutiennent cette disposition, ont donné les explications nécessaires.

Nous considérons en effet que, jusqu’à cette date, et certainement même après – ce qui nous amènera à légiférer sur d’autres dates –, nous aurons besoin de prendre des mesures transitoires dès la sortie de cet état d’urgence sanitaire, comme ce fut le cas à l’issue du premier. Tant que nous n’avons ni traitement, ni vaccin, que ce virus présente encore beaucoup d’inconnues, qu’il déstabilise le monde entier, que tous nos voisins européens prennent des mesures semblables aux nôtres, nous pensons que le Gouvernement doit disposer de tous les moyens pour prendre ou ne pas prendre – au cas où la situation sanitaire s’améliorerait rapidement – des mesures exceptionnelles pour protéger la santé de nos concitoyens.

M. Xavier Breton. Si nous n’avons pas besoin de débattre à nouveau, quid des travaux du Sénat et de la navette parlementaire ? On peut être ou non d’accord avec les mesures proposées mais en appeler à la première lecture pour ne plus rien faire, c’est tout le contraire de notre travail de parlementaire, qui devrait consister à enrichir le texte au cours de la navette.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La nouvelle lecture ne consiste pas en effet à « refaire le match » de la première lecture, c’est la logique de la navette parlementaire.

De plus, comme je l’ai rappelé en CMP, il est faux d’affirmer que le Parlement ne contrôlerait plus rien jusqu’au 31 mars : il est informé sans délai de tous les actes pris par le Gouvernement en vertu de l’état d’urgence sanitaire, comme le prévoit expressément la loi de mars 2020 ; il peut requérir à, tout moment, toute information qu’il jugerait utile ; une commission d’enquête est en cours et j’ai déjà dit que je suis tout à fait disposée à auditionner à nouveau régulièrement les ministres de la Santé et de l’Intérieur, comme nous l’avons déjà fait dans cette commission.

Nous exerçons pleinement nos pouvoirs législatifs et de contrôle. Vous savez très bien que je suis ouverte à toutes les demandes allant dans ce sens, qu’elles émanent de la majorité ou de l’opposition.

M. Guillaume Vuilletet. Il est particulièrement injuste et, à la limite, malhonnête, de dire que des secteurs seraient abandonnés parce que « non essentiels ». Le Gouvernement a tout de même débloqué un nombre considérable d’aides, réactualisées en temps réel, afin que personne ne reste au bord du chemin et que les conséquences de la crise soient les plus faibles possibles.

J’entends que le débat perdure, et c’est précisément pourquoi la date du 1er avril a été fixée : semaine après semaine, la situation évolue tellement qu’elle exige une adaptation permanente. C’est pourquoi nous devons donner au Gouvernement les moyens d’agir.

Enfin, la discussion de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, me semble-t-il votée à l’unanimité en mars 2020, a bien montré que si des textes relatifs à des sorties transitoires d’un état d’urgence sanitaire se révélaient nécessaires, c’est précisément parce que notre droit ne prévoyait pas de système stable pour réagir face à de telles situations, et nous nous sommes engagés, à l’article 7 de cette loi, sur la date du 1er avril 2021. D’où la prise en compte de cette date par les textes suivants qui permettent de prendre des mesures adaptées à la situation, quelle qu’elle soit.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Protéger la santé des Français et soutenir l’économie de notre pays : ce sont les deux piliers sur lesquels repose l’action du Gouvernement.

Certes, comme l’a rappelé la présidente, nous encadrons cette action : le Gouvernement revient suffisamment devant nous pour nous informer des mesures prises et pour que nous puissions le contrôler. Je l’ai dit au Sénat : nous sommes derrière le Gouvernement pour le soutenir et pour regarder ce qu’il fait.

Encore une fois, la seule chose que l’on connaisse de ce virus, c’est son nom. Nous ne savons pas ce qu’il en sera dans quinze jours ou dans un mois, et encore moins dans deux ou trois mois. Nous laissons donc au Gouvernement la possibilité d’adapter des mesures nécessaires en fonction de l’évolution de la situation. C’est le moins que nous puissions faire.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 4 est ainsi rédigé et les amendements CL10 et CL11 de Mme Emmanuelle Ménard tombent.

Article 4 bis

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL38 du rapporteur.

Elle adopte l’article 4 bis modifié.

Article 4 ter

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL39 du rapporteur.

Elle adopte l’article 4 ter modifié.

Article 6

La Commission adopte successivement l’amendement de cohérence CL40 et l’amendement rédactionnel CL41 du rapporteur.

Elle adopte l’article 6 modifié.

Article 7 bis

La Commission examine l’amendement CL36 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont. La disposition prévue par cet article n’a pas lieu d’être puisque, comme l’a dit le Président de la République, les services publics continuent à fonctionner.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 7 bis est supprimé.

Article 8

La Commission adopte l’article 8 sans modification.

Article 9

La Commission adopte l’article 9 sans modification.

Article 10

La Commission examine l’amendement CL46 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Il convient de supprimer cet article visant à modifier les conditions de vote aux élections régionales et départementales de mars 2021 – je proposerai également la suppression de l’article 11 relatif aux élections consulaires de mai 2021.

En effet, le Sénat a souhaité introduire dès à présent trois mesures pour faire face aux conséquences que pourrait avoir l’épidémie de covid-19 sur le déroulement des prochaines échéances électorales. Il prévoit ainsi la possibilité de recourir à deux procurations au lieu d’une seule, comme pour le second tour des élections municipales, l’augmentation du nombre de bureaux de vote et l’instauration du vote par correspondance.

Or, conformément au souhait exprimé par le Président de la République que soit menée une large concertation au sujet de la tenue de ces élections, le Premier ministre a confié, le 21 octobre dernier, à M. Jean-Louis Debré, ancien président de l’Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel, la mission de « conduire une analyse juridique et pratique de la situation et de faire des propositions après avoir consulté largement l’ensemble des parties prenantes ». La décision finale devrait être prise avant le début de la campagne officielle, soit à la fin de l’année 2020 ou au début de l’année 2021 au plus tard. Il convient donc d’attendre les résultats de cette mission pour nous prononcer sur les mesures les plus adaptées à appliquer.

M. Xavier Breton. Le Sénat fait preuve de sagesse, en anticipant les difficultés d’organisation des prochains scrutins. Même si le décret n’est pas encore paru, les prochaines élections régionales et départementales devraient avoir lieu au mois de mars prochain. Nous allons nous retrouver à délibérer dans l’urgence, à quelques semaines des élections, alors que nous pouvons tout à fait anticiper. Il faut croire que nous n’avons pas retenu la leçon des élections municipales qui ont été un drame pour la démocratie locale. Nous ne pouvons plus nous prévaloir de l’urgence. Prenons‑nous des mesures d’anticipation ou nous laissons‑nous conduire par les événements sans nous donner les moyens de faire vivre notre démocratie locale ?

M. Sacha Houlié. La position des membres du groupe Les Républicains souffre de deux incohérences graves. Premièrement, ils voudraient sécuriser les élections en mars – ce qui revient à faire fi de la mission conduite par M. Jean-Louis Debré – alors qu’il me semble avoir lu dans un hebdomadaire que leur président souhaitait les décaler à juin. Deuxièmement, ils réclament des mesures d’aménagement de la démocratie pour faire face à l’épidémie, sans vouloir de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 16 février ni même des mesures de transition. Il faudrait des mesures spéciales pour les élections, mais pas pour répondre à la situation sanitaire.

M. Antoine Savignat. Pour dissiper ces deux incohérences, il suffit de lire l’article 10 qui ne comprend aucune date mais seulement des mesures d’aménagement du code électoral et du processus électoral, pour tenir compte des enseignements du mois de mars dernier. Il n’y pas de date ! Il n’y a pas d’incohérence ! Nous aménageons les modalités de vote, lequel interviendra quand il pourra, en fonction de la crise sanitaire. Puisque c’est la dernière fois que nous sommes saisis avant le 1er avril 2021, nous devrions nous réjouir de pouvoir adapter cet après‑midi les conditions du vote. Pourquoi nous dessaisir aveuglément une fois de plus de notre pouvoir législatif et ne pas graver dans le marbre de la loi les leçons tirées des élections municipales ?

M. Bruno Questel. Mes chers collègues Les Républicains, ne croyez‑vous pas que l’heure soit assez grave pour nous passer de ce type d’échanges et de diatribes ? (Exclamations.)

M. Antoine Savignat. Vous ne voulez pas de débat !

M. Bruno Questel. Le débat, ce n’est pas un monologue ! Étant donné qu’il nous faudra, le cas échéant, modifier la loi pour reculer la date des élections, nous aurons loisir dans ce cadre de prendre toutes les mesures adaptées. Vous êtes des oiseaux de mauvais augure à considérer que nous ne savons pas faire notre métier de législateur. Souffrez au moins que nous soyons autant responsables que vous quant à la situation sanitaire et à la sécurité des Françaises et des Français !

M. Rémy Rebeyrotte. Attendons le résultat de la mission avant de prendre des décisions, d’autant qu’elle a été confiée à M. Jean‑Louis Debré, qui se situe désormais au‑dessus de la mêlée de la politique et qui a été président de cette maison. Je crois que cela se respecte.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Si la date des élections est repoussée, il y aura nécessairement un texte de loi, la durée des mandats en cours devra être allongée. Nous pourrons alors modifier les règles de vote. M. Jean‑Louis Debré devrait rendre ses conclusions avant la fin de l’année.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 10 est supprimé.

Article 10 bis

La Commission examine l’amendement CL47 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. L’amendement vise à supprimer cet article, introduit par le Sénat, qui apporte plus de confusion que de clarté quant aux prérogatives des collectivités locales.

Mme George Pau-Langevin. On nous a toujours expliqué que la navette parlementaire avait comme intérêt d’enrichir les débats en prenant en compte ce que l’autre assemblée pouvait apporter. Et on a souvent considéré que le Sénat apportait des éléments de sagesse. Or notre nouvelle lecture consiste à supprimer systématiquement tout ce qu’il a ajouté.

M. Bruno Questel. Le Sénat n’est plus ce qu’il était !

Mme George Pau-Langevin. Et nous, nous sommes omniscients, peut‑être ? Avec les difficultés que nous avons à aborder certains sujets, il serait de bon aloi de nous dire que parfois nous sommes plus intelligents à plusieurs que seul.

M. Rémy Rebeyrotte. Fut un temps où le Sénat était inspiré…

M. Olivier Marleix. Cet apport du Sénat était fondé en droit, puisque les régions, qui vont verser des aides économiques, auront besoin de communiquer pour les faire connaître. Or elles s’exposent à une jurisprudence du Conseil d’État qui peut considérer qu’il s’agit de campagnes de communication anormales en année pré‑électorale si on ne retient pas cette disposition. Nos travaux préparatoires doivent dire que les circonstances justifient que les régions engagent des dépenses qui devront être considérées par le juge électoral comme des dépenses non de communication mais d’information.

M. Rémy Rebeyrotte. Enfin de vraies préoccupations sanitaires !

M. Sacha Houlié. C’est vrai qu’à lire les apports du Sénat on peut se demander s’ils sont utiles. Celui‑ci mérite d’être connu, puisqu’il est vrai que dans le communiqué de presse diffusé par la chambre haute, il n’en était pas fait mention. En tout cas, faire financer des dépenses de campagne sur le compte du covid sous couvert de la crise économique et sociale qui guette était particulièrement avisé de la part des sénateurs, qui doivent préserver leur clientèle électorale... C’est cohérent avec leur désir de maintenir les élections en mars, mais pas vraiment souhaitable pour notre démocratie.

M. Xavier Breton. Je comprends le désarroi de nos collègues à l’égard du Sénat, vu le résultat des élections sénatoriales. Je ne suis pas sûr qu’ils aient tenu les mêmes propos juste avant le scrutin…

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 10 bis est supprimé.

Article 11

La Commission examine l’amendement CL48 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. C’est également un amendement de suppression de l’article, pour les raisons précédemment évoquées.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 11 est supprimé.

Article 12

La Commission examine l’amendement CL37 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Conformément à la position adoptée par l’Assemblée lors de la discussion du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions en mai dernier, l’amendement vise à supprimer l’article 12.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 12 est supprimé.

Article 13

La Commission adopte l’amendement de précision CL42 du rapporteur.

Elle adopte l’article 13 modifié.

La Commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire (n° 3495) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.


([1])              Le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l’état d’urgence sanitaire a instauré l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire de la République à compter du samedi 17 octobre 2020 à 0 heure.

([2])              Voir notamment le point n° 15 de la décision n° 2020‑803 DC du 9 juillet 2020 du Conseil constitutionnel sur la loi du 9 juillet 2020 et le point n° 8 de l’avis n° 401419 du 20 octobre 2020 du Conseil d’État sur le présent projet de loi.

([3])              Décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.

([4])              Le système d’information national de dépistage (SI-DEP) permet d’informer le patient et le professionnel de santé prescripteur sur les résultats du test et de regrouper l’ensemble des résultats obtenus pour les mettre à la disposition des autorités et personnels participant à la lutte contre l’épidémie (données individuelles) ou chargées du suivi épidémiologique et de la recherche sur le virus (données agrégées).

([5])              Élaboré par l’Assurance Maladie, Contact Covid assure le suivi des patients et de leurs cas contacts.

([6])              http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_lois/l15b3092_rapport-fond

([7])              http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_lois/l15b3355_rapport-fond

([8])              Ce comité est notamment chargé de veiller au secret médical et à la protection des données personnelles.

([9])              Décret n° 2020-551 du 12 mai 2020 relatif aux systèmes d’information mentionnés à l’article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

([10])              Les ordonnances concernées sont issues de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne et de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative (LFR) pour 2020.

([11])              http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_lois/l15b3472_rapport-fond

([12])              http://www.senat.fr/rap/l20-078/l20-078.html

([13])              C’est-à-dire en les intégrant directement dans le présent projet de loi au lieu de les renvoyer à une ordonnance.

([14])              Amendement n° COM-50 du rapporteur du Sénat.

([15])              Amendement n° COM-51 du rapporteur du Sénat.

([16])              Par exception, ces dispositions pourraient s’appliquer toute l’année 2021 puisqu’elles sont facultatives et techniques : elles portent en effet sur le calendrier et sur la publicité des opérations qui permettent d’établir les listes de jurés d’assises, sur le nombre de personnes figurant sur ces listes et sur les modalités de désignation des cours d’assises statuant en appel.

([17])              Ces dispositions s’appliqueraient jusque six mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire.

([18])              Cet article prévoit un report de six mois des transferts de compétences concernés.

([19]) Amendement n° COM-53 du rapporteur du Sénat.

([20])              Idem.

([21])              Amendement n° COM-54 du rapporteur du Sénat.

([22])              Amendement n° COM-58 du rapporteur du Sénat.

([23]) Amendement n° COM-52 du rapporteur du Sénat.               

([24]) Amendement n° COM-55 du rapporteur du Sénat.

([25])              Amendements n° COM-58 et n° COM-57 du rapporteur du Sénat.

([26])              Amendement n° CL27 du Gouvernement.

([27])              Les sûretés sont des techniques juridiques destinées à assurer le règlement des créances pour le cas où le débiteur ne disposerait pas de liquidités ou de biens d’une valeur suffisante pour désintéresser l’ensemble de ses créanciers. Elles peuvent porter sur des biens meubles et sur des créances, comme sur des biens ou des droits immobiliers. Les sûretés comprennent, en particulier, le gage, le droit de rétention, le nantissement, le warrant, les privilèges et les hypothèques.

([28])              « Les durées maximales d’activité dans les réserves militaire, de sécurité civile, sanitaire ou de la police nationale prévues à l’article L. 4251-6 du code de la défense, au 11° de l’article 34 de la loi n° 8416 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, au 12° de l’article 57 de la loi n° 8453 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et au 12° de l’article 41 de la loi n° 8633 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière sont prolongées de la durée totale de l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, sous réserve de l’accord de l’employeur. »

([29])              Article 10 de la loi n° 2015‑29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

([30])              Loi n° 2020-760 du 22 juin 2020 tendant à sécuriser l’organisation du second tour des élections municipales et communautaires de juin 2020 et à reporter les élections consulaires.