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N° 3589

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 novembre 2020

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI
 

relative à la répartition des conseillers de l’Assemblée de Guyane
entre les sections électorales ( 3430)

PAR M. Lénaïck ADAM

Député

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Voir les numéros : 3430


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-Propos............................................. 5

Examen de l’article unique

Article unique (art. L. 5583 et L. 5584 du code électoral) Répartition des sièges de conseillers à l’assemblée de Guyane

Compte rendu des débats

Personnes entendues

Annexe – Carte des sections électorales


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Mesdames, Messieurs,

Les outre-mer occupent une place importante dans les travaux de la commission des Lois. Cela vaut pour la Guyane comme pour les autres territoires : une mission y a d’ailleurs été conduite par sa présidente, Mme Yaël Braun‑Pivet, et par M. Philippe Gosselin, vice‑président, du 13 au 18 octobre 2019. La restitution de leurs travaux, le 4 février 2020, a permis aux commissaires de mieux appréhender la complexité de ce département de presque 84 000 km2, recouvert à 97 % par la forêt amazonienne.

Au mois de mars de l’année prochaine, la population guyanaise sera invitée à renouveler les conseillers à l’assemblée de Guyane. La présente proposition de loi s’inscrit dans cette perspective.

Il n’est pas question, ici, de modifier le mode de scrutin des conseillers à l’assemblée de Guyane. La Guyane est une circonscription unique qui se divise en huit sections électorales. Les conseillers sont élus au scrutin proportionnel de liste à deux tours. Ce mode de scrutin permet la représentation des différents courants politiques, tandis que les risques de blocage institutionnel sont écartés grâce à l’octroi d’une prime majoritaire et à la fixation d’un seuil de prise en compte des listes pour la répartition des sièges (fixé à 5 % des suffrages exprimés dans la circonscription).

Toutefois, l’article L. 558-2 du code électoral fixe le nombre de sièges de conseillers à l’assemblée de Guyane en fonction de la population de la collectivité territoriale. Ce nombre passe de cinquante-et-un à cinquante-cinq dès lors que la population dépasse 249 999 habitants, puis de cinquante-cinq à soixante-et-un lorsqu’elle dépasse 299 999 habitants. Or, aujourd’hui, le premier seuil a été franchi puisque la population guyanaise est désormais estimée par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) à 290 691 habitants. En raison de l’augmentation du nombre total de conseillers, l’article L. 558-3 du code électoral précise qu’il doit être procédé à la révision du nombre de sièges attribué à chaque section.

La présente proposition de loi est rendue nécessaire par cette révision. Elle va cependant plus loin puisqu’elle tend à inscrire dans la loi les règles de calcul qui président à la répartition des sièges entre les sections et à déterminer le nombre de sièges résultant de la prime majoritaire.

S’agissant de la prime majoritaire, le droit en vigueur prévoit que onze sièges sont attribués à la liste arrivée en tête, quel que soit l’effectif total de l’assemblée. La proposition de loi substitue à ce chiffre une règle de calcul le fixant à 20 % du nombre total de sièges. Si cette évolution ne devrait pas avoir d’effet lors des prochaines élections, elle permettra de porter à treize le nombre de sièges octroyés au titre de la prime majoritaire lorsque le second seuil de population sera franchi.

La répartition de ces sièges par section est supprimée au profit, là aussi, d’une inscription dans le droit de la seule règle de calcul.

La répartition du nombre de sièges par section, le nombre de sièges octroyés au titre de la prime majoritaire et la répartition par section de ces derniers devront être déterminés, en application des règles énoncées par la loi, par un arrêté préfectoral pris au plus tard le 15 janvier de l’année du renouvellement de l’assemblée de Guyane.

Ce dispositif poursuit ainsi un double objectif : ne plus exiger une modification législative à chaque franchissement de seuil, compte tenu en particulier de la grande vitalité démographique de ce territoire, et permettre de réviser la répartition des sièges par section à chaque renouvellement de l’assemblée de Guyane, y compris lorsqu’aucun seuil global de population n’a été franchi, pour assurer une meilleure représentation.

De portée circonscrite, cette proposition de loi est soumise à un calendrier contraint. Inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale à l’initiative du groupe La République en Marche elle doit être promulguée, pour être effective lors des prochaines élections, avant le 1er janvier 2021. Votre rapporteur formule le vœu que le Parlement se montre favorable à ce texte qui a fait l’objet d’une large concertation.

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*     *

 

   Examen de l’article unique

Article unique
(art. L. 5583 et L. 5584 du code électoral)
Répartition des sièges de conseillers à l’assemblée de Guyane

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article unique de la proposition de loi supprime du code électoral la répartition du nombre de sièges par section au sein de l’assemblée de Guyane, la mention des onze sièges octroyés au titre de la prime majoritaire et leur répartition par section.

Il substitue à ces références des règles de calcul applicables pour chacune de ces trois situations.

Il renvoie à un arrêté préfectoral le soin de préciser le nombre de sièges prévus au titre de la prime majoritaire et la répartition des sièges par section, en fonction de la population légale de chacune d’elles et en suivant les règles de calcul définies par la loi.

       Dernières modifications législatives intervenues

Aucune modification n’a été apportée aux dispositions du code électoral ainsi modifiées depuis qu’elles y ont été insérées par la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

  Modifications apportées par la Commission

Douze amendements de portée rédactionnelle, présentés par votre rapporteur, ont été adoptés par la Commission.

1.   L’état du droit

a.   Le statut de collectivité unique

La Guyane est un département français depuis 1946. L’article 1er de la loi du 19 mars 1946 ([1]) dispose en effet que « les colonies de la Guadeloupe (…) et de la Guyane française sont érigées en département français ». Elle a ensuite été soumise au principe de l’identité législative prévu par l’article 73 de la Constitution de 1946, puis de celle de 1958, qui prévoit que les lois et règlement nationaux sont applicables de plein droit aux départements et régions d’outre-mer.

L’organisation de la collectivité a été modifiée dans le prolongement de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 ([2]) qui a fait figurer à l’article 73 de la Constitution la règle selon laquelle : « La création par la loi d’une collectivité se substituant à un département et une région d’outremer ou l’institution d’une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu’ait été recueilli, selon les formes prévues au second alinéa de l’article 72-4, le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces collectivités ».

Les 10 et 24 janvier 2010, le Gouvernement organisa deux consultations des électeurs en Guyane. Le 10 janvier, les Guyanais se prononcèrent à 70,2 % contre la transformation de la Guyane en une collectivité d’outre-mer régie par l’article 74 de la Constitution. Le 24 janvier, ils furent 57,5 % à décider sa transformation en une collectivité unique de l’article 73.

Les lois organique et ordinaire du 27 juillet 2011 ont entériné cette évolution ([3]). Après les élections territoriales de décembre 2015, la collectivité territoriale unique de Guyane a été installée le 1er janvier 2016.

Ainsi, la Guyane constitue désormais une collectivité territoriale de la République qui exerce les compétences attribuées à un département d’outremer et à une région d’outremer et « toutes les compétences qui lui sont dévolues par la loi pour tenir compte de ses caractéristiques et contraintes particulières » ([4]). Elle succède au département et à la région de Guyane dans tous leurs droits et obligations ([5]).

b.   L’assemblée de Guyane

L’assemblée de Guyane se réunit à l’initiative de son président, au moins une fois par trimestre ([6]). Elle peut également se réunir à la demande de la commission permanente, ou du tiers de ses membres sur un ordre du jour déterminé ([7]). Elle est chargée de régler, par ses délibérations, les affaires de la collectivité territoriale ([8]). Elle dispose en particulier de plusieurs compétences ([9]) :

– la promotion de la coopération régionale ;

– la promotion du développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la Guyane et l’aménagement de son territoire ;

– la préservation de l’identité de la Guyane, dans le respect de l’intégrité, de l’autonomie et des attributions des communes.

Elle peut également engager des actions complémentaires de celles de l’État, des communes et de leurs groupements et des établissements publics situés dans la collectivité territoriale ([10]) et créer des établissements publics, dénommés agences, chargés d’assurer la réalisation des projets relatifs à la collectivité territoriale et au fonctionnement de ses services publics ([11]).

c.   Les conseillers à l’assemblée de Guyane 

i.   Les caractéristiques du mandat

Les conseillers à l’assemblée de Guyane sont élus pour six ans, en même temps que les conseillers régionaux, et sont rééligibles ([12]).

L’assemblée de Guyane est aujourd’hui composée de cinquante et un membres. Avant sa mise en place, le conseil régional comptait trente et un membres et le conseil général dix-neuf ([13]). L’article L. 558-2 du code électoral précise que le nombre de conseillers est porté à cinquante-cinq si la population de la collectivité territoriale dépasse 249 999 habitants, et à soixante et un si la population dépasse le seuil de 299 999 habitants.

ii.   Un scrutin proportionnel de liste avec prime majoritaire

Les modalités d’élection des conseillers à l’assemblée de Guyane sont précisées aux articles L. 558-3 et suivants du code électoral.

Section

Nombre de sièges de la section

Section de Cayenne

12

Section de la petite Couronne

10

Section de la grande Couronne

3

Section de l’Oyapock

3

Section des Savanes

7

Section du Haut-Maroni

5

Section de Saint-Laurent-du-Maroni

8

Section de la Basse-Mana

3

Total

51

La Guyane constitue une circonscription électorale unique : la volonté du Gouvernement était en effet, en 2011, de « maintenir une unité territoriale » ([14]). Cette circonscription unique est divisée en huit sections. À chacune d’elle correspond un nombre de sièges au sein de l’assemblée de Guyane. Cette répartition est actuellement fixée par l’article L. 558‑3 du code électoral.

Le mode de scrutin est le scrutin de liste à deux tours. Pour permettre la constitution d’une majorité stable, une prime majoritaire de onze sièges est attribuée à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, ou, si aucune liste n’est dans cette situation, à celle qui a obtenu le plus de voix au second tour. Ces onze sièges représentent aujourd’hui 21,6 % de l’assemblée de Guyane ([15]). Ils sont répartis entre chaque section conformément au tableau suivant, figurant à l’article L. 558-4 du code électoral.

Section

Nombre de sièges pour chaque section

Section de Cayenne

2

Section de la petite Couronne

2

Section de la grande Couronne

1

Section de l’Oyapock

1

Section des Savanes

1

Section du Haut-Maroni

1

Section de Saint-Laurent-du-Maroni

2

Section de la Basse-Mana

1

Total

11

Une fois cette répartition opérée, les autres sièges sont distribués au sein de chaque section au prorata des voix obtenues par chaque liste dans la section, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne. Seules les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés sur l’ensemble de la circonscription sont retenues pour ce partage.

Les sièges sont attribués aux candidats dans l’ordre de présentation sur chaque section ([16]).

2.    Des modalités de répartition des sièges à moderniser

a.   Une évolution imposée par la loi

La population municipale de la Guyane au 1er janvier 2017 a été authentifiée par décret à 268 700 habitants ([17]). Au 1er janvier 2020, elle était estimée à 290 691 habitants ([18]).

Il ressort des dispositions de l’article L. 558-2 du code électoral que le nombre de conseillers à l’assemblée de Guyane est en conséquence porté de cinquante et un à cinquante-cinq. Cette évolution, d’ores-et-déjà inscrite dans le droit, ne nécessite pas l’adoption d’une nouvelle disposition législative. Néanmoins, le nombre de sièges attribués à chaque section aux termes de l’article L. 558-3 doit être révisé par la loi.

Cette loi doit en outre être promulguée avant le 1er janvier 2021, dans la mesure où les prochaines élections régionales, et par conséquent celles des conseillers à l’assemblée de Guyane, auront lieu en mars 2021 ([19]).

b.   Une inscription dans la loi des seules règles de calcul et une fixation du nombre de sièges par section par arrêté préfectoral

i.   Une vitalité démographique qui rendra nécessaire de réviser de nouveau prochainement la répartition des sièges de l’assemblée de Guyane

La Guyane connait une forte vitalité démographique. En dix ans, la population a augmenté de 10 % ([20]). Le taux de natalité est de 26,4 % en 2018, contre 11,1 % dans les départements régis par le droit commun. L’indicateur conjoncturel de fécondité s’élève à 3,56, et à 1,84 au niveau national. En outre, la moitié des habitants a moins de 25 ans.

Il découle de ce constat que la répartition des sièges attribués à chaque section au sein de l’assemblée de Guyane devra être révisée de nouveau prochainement, car le seuil de 299 999 habitants fixé par l’article L. 558-2 pourrait être rapidement franchi.

L’adoption de deux lois successives, pour ce qui n’est rien de plus qu’un ajustement technique, ne se justifie pas.

évolution démographique de la Guyane depuis 1994

Source : INSEE, statistiques de l’état civil

ii.   Préciser les règles de calcul dans la loi et renvoyer à un arrêté du préfet la fixation du nombre de sièges attribué à chaque section

La présente proposition de loi inscrit dans le code électoral les règles de répartition du nombre de sièges attribués à chaque section de la manière suivante : les sièges seront répartis entre les sections proportionnellement à leur population, suivant la règle de la plus forte moyenne. En cas d’égalité de moyenne, le dernier siège sera attribué à la section dont la population est la plus importante ; en cas de nouvelle égalité, il sera attribué à la section dont la population a le plus augmenté depuis le recensement précédent. Chaque section devra avoir au moins trois sièges. Si nécessaire, les derniers sièges répartis seront réattribués de sorte que chaque section dispose de cette représentation minimale.

L’application de cette règle de calcul sera opérée par arrêté préfectoral. Au plus tard le 15 janvier de l’année du renouvellement de l’assemblée de Guyane, le préfet de Guyane répartira les sièges en suivant cette clef de répartition et en tenant compte de la population légale de chaque section au 1er janvier de l’année.

c.   Étendre cette évolution à la prime majoritaire

En l’état du droit, le nombre de sièges octroyés au titre de la prime majoritaire est fixé à onze. Aucune disposition ne prévoit que ce chiffre soit révisé lorsque l’un des seuils de population définis à l’article L. 558-2 du code électoral est franchi.

La proposition de loi propose une double évolution :

– elle inscrit dans la loi le principe selon lequel la liste arrivée en tête se voit attribuer un nombre de sièges égal à 20 % du nombre total de sièges à pourvoir, arrondi à l’entier supérieur ;

– elle précise que ces sièges sont ensuite répartis entre les sections selon les modalités précisées précédemment.

Ainsi, si le nombre de sièges restera fixé à onze lors des prochaines élections, il pourra passer à treize à l’occasion du prochain franchissement de seuil. Là encore, la fixation du nombre de sièges et leur répartition sont précisées par arrêté préfectoral pris au plus tard le 15 janvier de l’année du renouvellement de l’assemblée de Guyane.

3.   Un souci de pragmatisme, de meilleure représentativité et de respect du domaine de la loi

Ces évolutions permettront, à l’avenir, d’éviter le recours à la loi pour ce qui n’est, en définitive, qu’un ajustement technique. Elles assurent également une meilleure représentation de chacune des sections au sein de l’assemblée de Guyane, puisque le préfet devra désormais, à chaque renouvellement, répartir les sièges en fonction de la population de chaque section – là où, en l’état du droit, la révision de cette répartition n’était prévue qu’en cas de nouveau franchissement de seuil.

Le dispositif proposé dans le cadre de cette proposition de loi est respectueux du domaine de la loi. En effet, le Conseil constitutionnel a précisé, dans sa décision n° 99-187 L du 6 décembre 1999 ([21]), portant en l’espèce sur le Conseil supérieur des Français de l’étranger, que relèvent du domaine de la loi « la délimitation des circonscriptions électorales, le nombre de sièges attribué à chacune d’elles, le mode de scrutin ». La présente proposition de loi inscrit dans la loi les règles de calcul et renvoie à un arrêté du préfet de la Guyane le seul soin de préciser le nombre de sièges attribué à chaque section en application de la règle posée dans la loi et en fonction de la population légale de chaque section. Le préfet ne disposera ainsi d’aucun pouvoir discrétionnaire.

4.   Des dispositions approuvées par la Commission

Dans sa rédaction modifiée par onze amendements de portée rédactionnelle présentés par votre rapporteur, la commission des Lois a adopté l’article unique de la proposition de loi. La Commission a également adopté un amendement du rapporteur apportant une modification d’ordre rédactionnel à l’intitulé de la proposition de loi.


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   Compte rendu des débats

Lors de sa réunion du lundi 23 novembre 2020, la Commission examine la proposition de loi relative à la répartition des conseillers de l’Assemblée de Guyane entre les sections électorales (n° 3430) (M. Lénaïck Adam, rapporteur).

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.9936544_5fbbb5cb48f0b.commission-des-lois--repartition-des-conseillers-de-l-assemblee-de-guyane-entre-les-sections-electo-23-novembre-2020

M. Lénaïck Adam, rapporteur. La proposition de loi soumise à notre examen porte sur un sujet circonscrit, mais néanmoins essentiel à la vie démocratique guyanaise. Essentiel à double titre : à court terme d’abord, son adoption est une condition indispensable à la bonne tenue des prochaines élections des conseillers à l’assemblée de Guyane, prévue en mars prochain ; à moyen terme ensuite, la proposition de loi poursuit un objectif de pragmatisme et de meilleure représentation de la population guyanaise, sur lequel je reviendrai.

Depuis le 1er janvier 2016, la Guyane est une collectivité territoriale unique qui exerce les compétences attribuées à un département et à une région. Elle est dotée d’une assemblée chargée de régler, par ses délibérations, les affaires de la collectivité en matière de promotion de la coopération régionale, de développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique, etc.

Les conseillers à l’assemblée de Guyane sont élus au scrutin proportionnel de liste à deux tours. Pour assurer la stabilité de cet organe, la liste ayant obtenu la majorité absolue au premier tour, ou arrivée en tête en second tour, se voit attribuer une prime majoritaire de onze sièges.

L’assemblée de Guyane est actuellement composée de cinquante et un conseillers. Le code électoral précise que ce nombre doit être porté à cinquante-cinq si la population de la collectivité territoriale dépasse les 249 999 habitants, et à soixante et un si elle dépasse le seuil de 299 999 habitants. La population guyanaise authentifiée par décret en 2019, avec référence statistique en 2017, comptabilise 268 700 habitants. Les estimations au 1er janvier 2020 font état de plus de 290 000 habitants. Le premier seuil a donc été franchi.

Cette augmentation du nombre de conseillers, qui est automatique, n’est pas sans conséquence. En effet, la Guyane forme une circonscription unique divisée en huit sections électorales. L’article L. 558‑3 du code électoral répartit les actuels cinquante et un sièges de conseillers par section. Cette répartition doit donc être révisée pour tenir compte du passage à cinquante-cinq conseillers.

Plutôt que de se borner à effectuer cet ajustement technique, je souhaite que nous allions plus loin en inscrivant la règle de calcul permettant la répartition des sièges dans la loi. Un arrêté du représentant de l’État en Guyane en ferait ensuite l’application.

La règle de calcul fixée dans la loi préciserait que les sièges sont répartis entre sections proportionnellement à leur population, en suivant la règle de la plus forte moyenne. Chaque section pourvoirait au moins trois sièges. Je suggère également, par souci de cohérence, d’étendre cette évolution à la prime majoritaire. En l’état du droit, aucune évolution de cette prime n’est prévue pour accompagner l’augmentation du nombre de sièges de conseillers. Je propose de remplacer le « onze » inscrit dans le code électoral par une fraction constante de 20 % des sièges. Ainsi, le nombre de sièges octroyés au titre de la prime majoritaire passerait automatiquement de onze à treize si le nombre de conseillers atteint soixante et un à la suite du prochain franchissement de seuil. La répartition de ces onze, puis treize sièges, suivrait la même règle de calcul que celle que j’ai évoquée.

L’année du renouvellement de l’assemblée de Guyane, le représentant de l’État en Guyane répartirait par arrêté les sièges de l’assemblée dans son ensemble et ceux octroyés au titre de la prime majoritaire, par section, en suivant cette clef de répartition et en tenant compte de la population de chaque section au 1er janvier de l’année. Cette évolution présente un double intérêt : ne plus exiger une intervention du législateur à chaque franchissement de seuil démographique ; permettre au préfet d’actualiser la répartition par section à chaque renouvellement de l’assemblée, y compris lorsqu’aucun seuil de population n’a été franchi, pour assurer une meilleure représentation.

J’informe la Commission de mes nombreux et fructueux échanges avec la sénatrice Catherine Belrhiti, rapporteure du Sénat. Comme l’adoption de la loi avant la fin de l’année est essentielle au bon déroulement de l’élection du printemps prochain, il est crucial que les deux assemblées partagent la même vision. Nous nous y sommes employés. Mme Belrhiti a validé la proposition de loi et l’ensemble des amendements que je m’apprête à vous soumettre. Elle est également à l’initiative de deux amendements précieux qui apporteront au dispositif des améliorations substantielles, par exemple en précisant le champ de la population prise en compte pour calculer la répartition des sièges. Je tiens à la remercier pour cette convergence de vues.

Mes chers collègues, je me réjouis que les outre-mer soient de nouveau au centre des travaux de la Commission. Cette proposition de loi a fait l’objet d’une large concertation en amont, auprès des élus locaux guyanais et auprès des parlementaires de Guyane. J’espère qu’elle bénéficiera aussi de votre soutien.

M. Pacôme Rupin. J’associe M. Guillaume Vuilletet à cette prise de parole, puisqu’il a travaillé sur le texte. La proposition de loi de notre collègue Lénaïck Adam tire les conséquences de l’évolution de la démographie guyanaise, laquelle appelle une augmentation du nombre de conseillers siégeant au sein de l’assemblée de Guyane.

Le code électoral fixe le nombre de sièges en fonction de la population. Il passe de cinquante et un à cinquante-cinq dès lors que la population dépasse 249 999 habitants. Ce premier seuil a été franchi, la population guyanaise étant désormais estimée provisoirement par l’INSEE à 290 691 habitants au 1er janvier 2020.

Compte tenu de cette évolution, la proposition de loi propose d’inscrire dans la loi les règles de calcul qui président à la répartition des sièges entre les sections et à la détermination du nombre de sièges résultant de la prime majoritaire. La fixation du nombre de sièges et leur répartition sont précisées par un arrêté préfectoral pris au plus tard le 15 janvier de l’année du renouvellement.

Ces évolutions permettront de ne plus exiger une modification législative, lourde, à chaque franchissement de seuil, eu égard à la grande vitalité démographique du territoire guyanais. Elles assureront également une meilleure représentation de chacune des sections au sein de l’assemblée de Guyane. Le préfet devra désormais, à chaque renouvellement, répartir les sièges en fonction de la population de chaque section – là où, en l’état du droit, la révision de cette répartition n’était prévue qu’en cas de nouveau franchissement de seuil.

Cette proposition de loi est soumise à un calendrier contraint. Pour être effective lors des prochaines élections, elle doit être promulguée avant le 1er janvier 2021. L’accord doit être trouvé le plus rapidement possible. Il est en bonne voie avec le Sénat. Aussi, le groupe La République en Marche soutiendra ce texte.

M. Xavier Breton. Je serai bref pour cette proposition de loi, bienvenue puisque nécessaire. Il y a quelques années, nous avions inscrit dans la loi la répartition numérique précise des conseillers à l’assemblée de Guyane entre les différentes sections territoriales. Nous avions également prévu qu’au-delà d’un certain seuil de population, le nombre de conseillers augmenterait. Le seuil semble avoir été franchi lors des dernières élections territoriales. Dès lors, le nombre de conseillers doit augmenter, mais la loi n’indique pas comment ces nouveaux conseillers doivent être répartis entre les sections.

Cela explique la présentation de la proposition de loi. La solution que cette dernière retient nous semble tout à fait acceptable et justifiée : elle consiste à laisser le soin au préfet, avant chaque élection, d’établir la répartition sur la base d’une règle légale. En outre, cette proposition permet d’adapter la composition par section entre chaque élection en cas d’évolution des équilibres démographiques internes à la Guyane, sans avoir à recourir à la loi.

Dès lors qu’une telle modification est nécessaire et que les règles proposées répondent aux standards que le législateur avait défendu par le passé, le groupe Les Républicains votera en faveur de la proposition de loi.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. La proposition de loi semble de bon sens et s’inscrit dans une démarche de simplification et de meilleure représentativité de l’assemblée de Guyane.

Depuis 2011, aucune modification n’avait été apportée aux dispositions du code électoral relatives aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique. Celui-ci prévoit notamment que les conseillers à l’assemblée de Guyane sont élus au scrutin proportionnel de liste à deux tours. Le nombre de sièges est lié à la population de la collectivité. Or, cette dernière a augmenté, ce qui nécessite une augmentation du nombre de conseillers.

Bien évidemment, cette évolution est prévue par la loi et n’implique pas d’adopter une nouvelle disposition législative. Néanmoins, le nombre de sièges attribué à chacune des huit sections doit, lui, être révisé par la loi. La vitalité démographique de la Guyane nous impose d’anticiper car l’évolution continue de la population guyanaise implique des modifications législatives récurrentes afin de réviser la répartition des conseillers à l’assemblée de Guyane, ce qui représente une contrainte.

L’échéance approche car les prochaines élections sont prévues en mars 2021. Il faut donc que la loi soit promulguée au plus tard le 1er janvier 2021. Aussi mon groupe adhère-t-il à la volonté du rapporteur de saisir l’occasion pour faire évoluer le code électoral au regard de la vitalité démographique guyanaise.

La proposition de loi surmonte la contrainte des passages récurrents devant le législateur. Elle est adaptée, conforme à la souplesse qui doit être de mise en l’espèce et plu respectueuse de la représentation de chacune des sections au sein de l’assemblée de Guyane que des révisions récurrentes. C’est pourquoi le groupe MoDem et Démocrates apparentés votera en faveur de la proposition de loi.

La Commission en vient à l’examen des amendements.

Article unique

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’article unique de la proposition de loi fait l’objet d’amendements du rapporteur, tous rédactionnels comme il l’a précisé dans la discussion générale.

La Commission adopte successivement les amendements CL2, CL10, CL3, CL11, CL7, CL8, CL4, CL5, CL9, CL6 et CL12 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article unique modifié à l’unanimité.

Titre

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1 du rapporteur.

Puis elle adopte la proposition de loi modifiée.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La proposition de loi sera examinée en séance publique le mercredi 2 décembre prochain, selon la procédure d’examen simplifiée s’il n’y a pas d’opposition d’ici là.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi relative à la répartition des conseillers de l’Assemblée de Guyane entre les sections électorales (n° 3430), dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 


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   Personnes entendues

 

   M. François Pesneau, adjoint au directeur de la modernisation et de l’administration territoriale

   M. Simon Hetch, adjoint à la cheffe du bureau des élections et des études politiques

    M. David Carmier, conseiller affaires régaliennes

   Mme Léa Roussarie, conseillère parlementaire et affaires politiques

   M. Jean-Pierre Balcou, sous-directeur des affaires juridiques et institutionnelles à la direction générale des outre-mer

   M. Gérald Contrepois, adjoint au sous-directeur des affaires juridiques et institutionnelles à la direction générale des outre-mer

 


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   sections_global_sanslogo-59a5348d4b59b.jpgAnnexe – Carte des sections électorales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : site internet http://www.drom-com.fr

 

 


([1]) Loi n° 46-451 du 19 mars 1946 tendant au classement comme départements français de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Réunion et de la Guyane française.

([2]) Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République.

([3]) Loi organique n° 2011-883 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et loi n° 2011-887 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique .

([4]) Article L. 7111-1 du code général des collectivités territoriales. 

([5]) Article L. 7111-2 du même code. 

([6]) Article L. 7122-9 du même code. 

([7]) Article L. 7122-10 du même code.

([8]) Article L. 7151-1 du même code.

([9]) Ibid.

([10]) Ibid.

([11]) Article L. 7151-2 du code général des collectivités territoriales.

([12]) Article L. 558-1 du code électoral.

([13]) Étude d’impact du projet de loi relatif aux collectivités de Guyane et de Martinique, 2011.

([14]) Ibid.

([15]) Onze sièges sur cinquante et un au total.

([16]) Article L. 558-4 du code électoral.

([17]) Décret n° 2019-1546 du 30 décembre 2019 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d’outre-mer de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion, et des collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

([18]) Estimation de la population au 1er janvier 2020, données provisoires, INSEE.

([19]) Aux termes de l’article L. 558-1 du code électoral, les conseillers à l’assemblée de Guyane sont élus en même temps que les conseillers régionaux.

([20]) Une croissance démographique toujours soutenue, Bilan démographique de Guyane, INSEE, 2018. 

([21])  Décision n° 99-187 L du 6 octobre 1999 sur la nature juridique des dispositions de l’article 3 de la loi n° 82‑471 du 7 juin 1982 modifiée relative au Conseil supérieur des Français à l’étranger.