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N° 4086

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 avril 2021

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
 

instaurant une procédure de parrainages citoyens pour la candidature à l’élection présidentielle ( 3478)

PAR M. Jean-Luc MÉLENCHON

Député

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Voir les numéros : 3478

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS.................................................... 5

I. pourquoi instaurer un nouveau mode de pARRAINAGE des candidats à l’Élection prÉsidentielle ?

A. Permettre une plus grande intervention populaire dans l’élection présidentielle

B. Remédier aux défauts du dispositif actuel de présentation des candidats

1. L’incertitude, pour certains candidats populaires ou issus de courants significatifs de la vie politique, de pouvoir participer à l’élection présidentielle

2. Le risque d’instrumentalisation de la procédure

C. S’inspirer d’autres pays où les parrainages citoyens existent

II. Comment fonctionnerait le parrainage par les citoyens ?

A. Un seuil fixé à 150 000 présentations citoyennes

B. Le Conseil constitutionnel, gardien des règles de parrainage

C. Un dispositif complémentaire du parrainage par les élus

III. Une rÉforme applicable dÈs l’Élection prÉsidentielle de 2022

A. Une procédure d’adoption simple

B. Une application possible dès l’élection présidentielle de 2022

EXAMEN de l’article unique

Article unique (art. 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du président de la République au suffrage universel) Présentation citoyenne des candidats à la présidence de la République

Compte rendu des dÉbats


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Mesdames, Messieurs,

Dans un an, la France connaîtra une nouvelle élection présidentielle. Sous la Ve République, cette élection est la plus importante pour l’avenir du pays. Cela justifie une attention particulière aux règles qui encadrent son organisation. En particulier, la progression de l’abstention lors des derniers rendez-vous électoraux doit être un sujet de préoccupation. Vivre une chute brutale de la participation à l’occasion de la prochaine élection présidentielle serait un grave problème démocratique.

Les candidatures à l’élection à la Présidence de la République sont encadrées par la loi du 6 novembre 1962. Comme pour toutes les élections, elles sont soumises notamment à des conditions d’âge et de nationalité. Mais, par ailleurs, les candidatures doivent aussi être « présentées » par des élus. Ce mécanisme de filtrage est communément appelé parrainage. Il est l’héritier des règles d’élection du Président de la République en vigueur entre 1958 et 1962, où au suffrage indirect répondait un système de parrainage par des élus appartenant à un collège électoral. Le dispositif de présentation repose sur l’envoi au Conseil constitutionnel d’un formulaire de présentation par au moins 500 élus figurant sur une liste de 42 000 détenteurs d’un mandat électif. Ces derniers doivent être issus d’au moins trente départements ou collectivités d’outre-mer, sans que plus d’un dixième d’entre eux puissent être les élus d’un même département ou d’une même collectivité.

Cette procédure est justifiée par la volonté de prévenir les candidatures fantaisistes tout en permettant à tous les candidats représentant les grands courants de la vie politique française d’être présents au premier tour du scrutin. Le parrainage n’est pas contestable dans son principe. Il l’est davantage dans ses modalités. Le recours à 500 élus n’assure pas à certains candidats populaires ou issus de courants significatifs de la vie politique de pouvoir participer à l’élection présidentielle. Il ouvre en revanche la voie à des instrumentalisations par les partis politiques les plus installés, qui disposent de nombreux élus locaux. Surtout, il apparaît en décalage avec l’aspiration des citoyens à davantage participer à la vie publique.

Ces constats ont justifié la proposition faite en 2012 par la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique présidée par M. Lionel Jospin. Cette commission était composée de personnalités politiques comme son président, ancien Premier ministre, ou Roselyne Bachelot, ministre dans plusieurs gouvernements. Elle comprenait aussi des praticiens et professeurs de droit constitutionnel ([1]).

Le rapport élaboré par cette commission a proposé de confier aux citoyens eux-mêmes le soin d’habiliter les candidats à concourir à l’élection présidentielle. Il imagine un système dans lequel 150 000 citoyens inscrits sur les listes électorales pourraient parrainer un candidat à l’élection présidentielle.

L’objet de la présente proposition de loi organique est de traduire dans la loi du 6 novembre 1962 les préconisations de la commission présidée par M. Lionel Jospin. Elle créé donc le parrainage par les citoyens, non pour remplacer celui par les élus, mais comme une alternative possible. Adoptée, elle permettrait une appropriation citoyenne et populaire de la prochaine élection présidentielle.

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I.   pourquoi instaurer un nouveau mode de pARRAINAGE des candidats à l’Élection prÉsidentielle ?

A.   Permettre une plus grande intervention populaire dans l’élection présidentielle

Le niveau très élevé de l’abstention aux différentes élections est le signe d’une « grève civique ». Il faut l’interpréter comme une forme de protestation contre la divergence entre le principe de souveraineté populaire et la réalité des institutions. Cette abstention se situe en effet en moyenne autour de 50 % ([2]). Même lors de la dernière élection présidentielle, un électeur sur quatre n’a pas participé au scrutin.

Le parrainage par les citoyens est un moyen d’associer davantage les électeurs à la campagne. Il prolonge l’esprit du suffrage universel direct. Il ramènera le peuple au cœur de l’élection. Le dispositif de présentation par les élus trouvait une justification forte dans l’élection du président de la République par un collège de notables telle qu’instaurée en 1958. Ce n’est plus le cas depuis 1962.

La Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, présidée par M. Lionel Jospin faisait cette même remarque : « ce système avait certes sa cohérence en 1958, lorsque le chef de l’État était élu au suffrage indirect par un collège de grands électeurs : il y avait alors coïncidence entre les membres de ce collège électoral et les élus habilités à parrainer les candidats. Cette logique originelle s’est toutefois en grande partie dissoute en 1962 avec l’élection du Président de la République au suffrage universel direct » avant de conclure que « la « course aux signatures » à laquelle se livrent, auprès de maires de communes peu peuplées, les candidats aspirant à participer au scrutin présidentiel apparaît ainsi obsolète dans sa justification et insatisfaisante dans son principe » ([3]).

Les revendications démocratiques sont de plus en plus présentes dans le débat public et les mouvements sociaux. Ainsi, le mouvement des « gilets jaunes » a, par exemple, mis en avant la demande d’un référendum d’initiative citoyenne. La satisfaction de cette aspiration au contrôle démocratique, d’après l’avis de votre rapporteur, passera nécessairement par un changement de régime constitutionnel. C’est pourquoi il est défenseur de la convocation d’une Assemblée constituante. Cependant, une sortie par le haut de la crise démocratique ne sera pas trouvée sans le peuple. Il faut donc trouver les voies et moyens d’accroître l’implication populaire dans la prochaine élection présidentielle.

B.   Remédier aux défauts du dispositif actuel de présentation des candidats

1.   L’incertitude, pour certains candidats populaires ou issus de courants significatifs de la vie politique, de pouvoir participer à l’élection présidentielle

Le système de filtrage actuel est une source d’incertitude pour certains candidats. Même lorsqu’ils sont populaires, la collecte des parrainages peut s’avérer être une rude épreuve s’ils ne sont pas issus de formations disposant de nombreux élus locaux. Cet écueil peut empêcher des courants significatifs de participer à l’élection présidentielle. Le Conseil constitutionnel l’a reconnu dans ses observations sur l’élection présidentielle de 2012. Il a noté que ce dispositif « laisse subsister une incertitude sur la possibilité de participer au premier tour du scrutin de représentants de certaines formations politiques, présentes lors de scrutins précédents, qui ont obtenu en définitive un très grand nombre de voix » ([4]).

Or, « il est (…) indispensable que tout courant réel d’opinion puisse susciter une candidature », ainsi que l’a relevé le Conseil constitutionnel dès 1974 ([5]).

Par ailleurs, les spéculations sur l’éventuelle impossibilité, pour un courant politique significatif, de se présenter à l’élection présidentielle nuisent à la sérénité du débat électoral.

2.   Le risque d’instrumentalisation de la procédure

Le dispositif de parrainage peut également donner lieu à des tentatives de manipulation. Il accorde une place très importante aux maires, en particulier à ceux des communes de moins de 1 000 habitants. Les maires représentent en effet 75 % du collège qui peut parrainer une candidature. Les maires de communes de moins de 1 000 habitants 55 %. Ces élus n’ont d’ailleurs jamais demandé à être les seuls à pouvoir sélectionner les candidats à l’élection présidentielle.

Bien qu’ils soient nombreux à être élus « sans étiquette », ils dépendent souvent, pour l’obtention de moyens financiers ou techniques ou de mesures réglementaires, d’élus ou d’assemblées dominés par des partis politiques installés. Cet état de fait conduit à des pressions, souvent contradictoires. Elles sont exercées soit par des candidats déclarés eux-mêmes ou par des partis qui souhaitent favoriser la démarche de tel ou tel candidat ou, au contraire, y faire obstacle.

C.   S’inspirer d’autres pays où les parrainages citoyens existent

Le parrainage citoyen trouve déjà à s’appliquer dans plusieurs États européens.

Ainsi, l’article 124 de la Constitution portugaise de 1976 dispose que les candidats à la présidence sont proposés par au moins 7 500 et au plus 15 000 électeurs. En Pologne, la candidature à l’élection présidentielle est subordonnée au soutien d’au moins 100 000 citoyens. Ce seuil s’établit à 20 000 en Lituanie et à 200 000 en Roumanie.

Dans d’autres États européens, les soutiens peuvent provenir des électeurs ou d’élus. Ainsi, en Autriche, un candidat est présenté par cinq membres du Conseil national ou par 6 000 citoyens. Il en va de même en Slovaquie, où un candidat est proposé par 15 députés du Conseil national de la République ou par 15 000 citoyens. En Finlande, un candidat doit bénéficier du soutien d’au moins un parti politique enregistré disposant d’au moins un député ou de 20 000 électeurs.

II.   Comment fonctionnerait le parrainage par les citoyens ?

Comme l’a souligné la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique « un système de qualification préalable à l’élection présidentielle doit remplir deux grandes fonctions. Il doit éviter l’inflation des candidatures, source à la fois de confusion du débat démocratique, de moindre lisibilité du choix politique pour les électeurs et d’éparpillement des voix au premier tour. Il doit par ailleurs empêcher les candidatures fantaisistes ou dépourvues de représentativité, sans pour autant faire obstacle à ce que tous les courants significatifs de la vie politique française soient représentés au premier tour du scrutin » ([6]).

Tels sont les objectifs assignés au dispositif proposé qui s’inspire directement des propositions formulées par la commission présidée par M. Lionel Jospin.

A.   Un seuil fixé à 150 000 présentations citoyennes

Les conditions du parrainage par les citoyens ont pour objet de mettre en place un dispositif de filtrage comparable à celui du parrainage par les élus. Le parrainage citoyen ne doit en effet ni restreindre à l’excès le nombre de candidats, ni ouvrir trop largement la possibilité de présenter une candidature.

Afin de parvenir à cet équilibre, deux paramètres sont définis : le nombre de présentations nécessaires et une clause de représentativité nationale. Il est ainsi proposé de fixer à 150 000 le nombre minimum de signatures requis pour pouvoir être candidat à l’élection présidentielle.

Ce seuil, qui correspond à 0,33 % des électeurs, « serait conforme à la moyenne observée dans les États membres de l’Union européenne qui ont institué un mécanisme de parrainage citoyen pour l’élection présidentielle, soit à titre exclusif (Portugal, Pologne et Lituanie), soit parallèlement à un autre système de qualification préalable (Autriche, Finlande et Slovaquie) », comme l’a relevé la commission présidée par M. Lionel Jospin ([7]).

Il apparaît en outre suffisamment élevé pour limiter les risques de candidatures fantaisistes ou de témoignage. Mais il évite en même temps l’élimination d’un candidat se réclamant d’un courant politique représentatif. Ainsi, plusieurs candidats représentant des courants qui ne peuvent être tenus pour négligeables obtiennent à chaque scrutin présidentiel entre 200 000 et 600 000 suffrages au premier tour du scrutin.

Le seuil de 150 000 présentations est, en outre, assorti d’une clause de représentativité nationale. La question du nombre de départements et de collectivités d’outre-mer est en effet essentielle pour assurer l’assise nationale des candidats.

Ainsi, les présentations devraient provenir d’au moins cinquante départements ou collectivités d’outre-mer, sans qu’un département ou une collectivité ne puisse fournir plus de 5 % des parrainages, soit 7 500 signatures. Ces conditions sont renforcées par rapport à celles relatives au dispositif actuel de parrainage, qui retient un seuil de trente départements.

B.   Le Conseil constitutionnel, gardien des règles de parrainage

Les présentations seraient rédigées sur des formulaires et revêtues de la signature de leur auteur, et une copie de la pièce d’identité du présentateur leur serait jointe. Les présentations devraient parvenir au Conseil constitutionnel au plus tard le sixième vendredi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures ([8]).

L’envoi des présentations au Conseil pourrait être réalisé selon deux modalités.

La première modalité de transmission serait, comme c’est déjà le cas aujourd’hui, la voie postale. Les formulaires et les enveloppes seraient imprimés par l’administration conformément aux modèles arrêtés par le Conseil constitutionnel. Ils seraient envoyés par voie postale à tous les citoyens inscrits sur les listes électorales, sur le modèle de ce qui existe pour la diffusion des professions de foi des candidats. L’anonymat du parrainage serait assuré par la séparation, au sein de deux sous-enveloppes distinctes, des données relatives à l’identité du citoyen et du choix du candidat.

La seconde modalité de transmission se ferait par la voie électronique, « grâce à un site officiel dédié, chaque électeur ayant reçu au préalable des codes d’accès personnalisés, sur le modèle de ce qui est pratiqué aujourd’hui par l’administration fiscale pour la déclaration de revenus en ligne » ([9]).

Il reviendrait au Conseil constitutionnel, gardien des règles de parrainage, de vérifier la conformité des présentations.

C.   Un dispositif complémentaire du parrainage par les élus

Le parrainage citoyen ne se substituerait, ni ne se cumulerait au parrainage par les élus. Il constitue en effet un dispositif complémentaire et alternatif au mécanisme de filtrage actuel.

III.   Une rÉforme applicable dÈs l’Élection prÉsidentielle de 2022

A.   Une procédure d’adoption simple

La réforme proposée passe par une proposition de loi organique. Elle ne nécessite pas, comme une proposition de loi constitutionnelle, l’adoption par l’Assemblée nationale et le Sénat d’un texte identique.

Faute d’accord entre les deux assemblées, le texte ne peut être adopté par l’Assemblée nationale en dernière lecture qu’à la majorité absolue de ses membres.

B.   Une application possible dès l’élection présidentielle de 2022

Une modification de la loi du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel moins d’un an avant le scrutin ne serait pas inédite. Deux exemples récents peuvent être mentionnés : la loi organique du 25 avril 2016 de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle et la loi organique du 28 février 2012 relative au remboursement des dépenses de campagne de l’élection présidentielle.

L’article L. 567-1 A du code électoral dispose : « Il ne peut être procédé à une modification du régime électoral ou du périmètre des circonscriptions dans l’année qui précède le premier tour d’un scrutin ». Cependant, il ne s’applique par à l’élection présidentielle. En effet les dispositions organiques de la loi du 6 novembre 1962 n’y font pas renvoi.

Au demeurant, comme l’a souligné le ministère de l’Intérieur en réponse à une question du sénateur M. Jean-Louis Masson, « Cette disposition législative, d’initiative parlementaire, s’inscrit (…) dans un objectif de clarification et de stabilité du droit applicable en matière électorale, sans pour autant remettre en question la possibilité pour le législateur d’y déroger au cas par cas. Le législateur ne peut en effet pas limiter ses propres compétences. En ce sens, l’objet de cet article se limite à répondre à l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, sans ériger cette tradition républicaine à un niveau supra-législatif » ([10]).

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   EXAMEN de l’article unique

Article unique
(art. 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du président de la République au suffrage universel)
Présentation citoyenne des candidats à la présidence de la République

Rejeté par la Commission

      Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article a pour objet de créer une procédure alternative de présentation pour les candidats à l’élection présidentielle qui repose sur un seuil de 150 000 citoyens assorti d’une clause de représentativité nationale.

      Dernières modifications législatives intervenues

L’article 3 de la loi n° 62-192 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du président de la République au suffrage universel a été modifié pour la dernière fois par la loi organique n° 2021-335 du 29 mars 2021 portant diverses mesures relatives à l’élection du Président de la République qui a, notamment, actualisé la liste des élus habilités à présenter un candidat à l’élection présidentielle, en tenant compte des récentes réformes territoriales (ajout des présidents des conseils exécutifs de Corse et de Martinique et clarification des règles applicables à la Collectivité européenne d’Alsace et à la métropole de Lyon) et en incluant les présidents des conseils consulaires des Français de l’étranger, et reporté la possibilité de transmission au Conseil constitutionnel, par voie électronique, des présentations au 1er janvier 2027 au plus tard.

       Position de la Commission

La Commission a rejeté cet article.

I.   Les rÈgles actuelles de prÉsentation des candidats À la prÉsidence de la RÉpublique

Outre les conditions de fond qui résultent de l’article 6 de la Constitution (interdiction de l’exercice de plus de deux mandats consécutifs) et des dispositions du code électoral (nationalité française, majorité d’éligibilité fixée à 18 ans, jouissance des droits civiques, conformité au regard des obligations du service national et absence d’incapacité ou d’inéligibilité prévue par la loi), les candidats à l’élection présidentielle doivent respecter des conditions de forme qui répondent à une triple exigence, posée par l’article 3 de la loi du 6 novembre 1962 et requise à peine de nullité :

– le dépôt d’une déclaration de situation patrimoniale ;

– l’établissement d’un compte de campagne ;

– la présentation des candidats.

Le principe même du recours à la présentation des candidats est antérieur à l’élection du président de la République au suffrage universel. En effet, l’exigence d’une présentation des candidats a été posée dès l’origine de la Ve République. Ainsi, alors que dans la rédaction initiale de l’article 6 de la Constitution, le président de la République était élu par un collège électoral composé des membres du Parlement, des conseils généraux et des assemblées des territoires d’outre-mer ainsi que des représentants élus des conseils municipaux (soit, au total, un peu plus de 80 000 membres), l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1064 du 7 novembre 1958 portant loi organique relative à l’élection du président de la République disposait que la liste des candidats est établie par le Conseil constitutionnel « au vu des présentations qui lui sont adressées, douze jours au moins avant le scrutin, à titre individuel ou collectif par des membres du collège électoral (…) Aucun nom ne peut être retenu s’il n’est proposé par au moins cinquante membres dudit collège » ([11]).

L’élection du président de la République au suffrage universel, prévue par l’article 1er de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962, n’a pas fondamentalement remis en cause ce dispositif de présentation ([12]). Aux termes du I de son article 3, la liste des personnes habilitées à présenter un candidat a été réduite aux membres du Parlement et du Conseil économique et social, aux conseillers généraux et aux seuls maires élus et le seuil du nombre de présentations requises a été relevé à 100, ces dernières devant émaner d’au moins dix départements ou territoires d’outre-mer différents.

Destinée à éviter les candidatures fantaisistes ou favorisant les détournements de procédure, la procédure de présentation a pour objet de prévenir un éparpillement des voix et de permettre une meilleure lisibilité du scrutin. Elle a été régulièrement aménagée depuis 1962.

A.   Le droit de présentation des candidats à la présidence de la République

Afin d’éviter des candidatures trop nombreuses et d’écarter celles ayant pour seul objectif de faire connaître une personnalité, le dispositif de filtrage retenu repose sur la nécessité d’obtenir le parrainage d’un certain nombre d’élus.

1.   La qualité des présentateurs

En application du deuxième alinéa du I de l’article 3 de la loi du 6 novembre 1962, la présentation des candidats appartient aux seuls citoyens investis d’un mandat électif, à l’exclusion du chef de l’État et des conseillers municipaux et adjoints au maire.

Limitée en 1962 aux parlementaires, aux membres du Conseil économique et social – ces derniers y ont figuré jusqu’en 1976 –, aux conseillers généraux et aux maires, la liste des personnes habilitées s’est enrichie au fur et à mesure de la création de nouvelles catégories d’élus.

Personnes habilitées à présenter un candidat à l’élection présidentielle

– députés et sénateurs ;

– membres du Parlement européen élus en France ;

– maires (maires, maires délégués des communes déléguées et des communes associées et maires des arrondissements de Paris, de Lyon et de Marseille) ;

– présidents des organes délibérants des métropoles, des communautés urbaines, des communautés d’agglomération et présidents des communautés de communes ;

– conseillers de Paris et de la métropole de Lyon ;

– conseillers régionaux et départementaux ;

– conseillers territoriaux de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

– membres des Assemblées de Corse, de Guyane, de Martinique et de la Polynésie française, des Assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie et de l’Assemblée territoriale des îles de Wallis-et-Futuna ;

– présidents des conseils exécutifs de Corse et de Martinique, président de la Polynésie française et président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;

 conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger et présidents des conseils consulaires.

N.B. : Aux termes du deuxième alinéa du I de l’article 3, les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France, les conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger et les présidents des conseils consulaires sont réputés être les élus d’un même département. Les députés et les sénateurs élus en Nouvelle-Calédonie et les membres des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie sont réputés être élus d’un même département d’outre-mer ou d’une même collectivité d’outre-mer. Les ressortissants français membres du Parlement européen élus en France sont réputés être les élus d’un même département. Les présidents des organes délibérants des métropoles, des communautés urbaines, des communautés d’agglomération ou des communautés de communes sont réputés être les élus du département auquel appartient la commune dont ils sont délégués. Les conseillers régionaux sont réputés être les élus des départements correspondant aux sections départementales ; toutefois, les conseillers régionaux du Grand Est qui ont été élus sur la section départementale d’une liste de candidats correspondant à la Collectivité européenne d’Alsace sont réputés être les élus des départements entre lesquels ils sont répartis. Les conseillers à l’Assemblée de Corse sont réputés être les élus des départements entre lesquels ils sont répartis. Les conseillers d’Alsace sont réputés être les élus du département où est situé leur canton d’élection. Les conseillers régionaux élus sur la section départementale d’une liste de candidats correspondant à la métropole de Lyon et les conseillers métropolitains de Lyon sont réputés être les élus du département du Rhône.

42 000 personnes environ, parmi lesquelles une très grande majorité de maires, sont ainsi habilitées à présenter un candidat à l’élection présidentielle.

Toutefois, le nombre effectif de présentateurs ne suit pas celui du nombre de présentateurs potentiels. Ainsi, en 2017, 14 586 formulaires de parrainages ont été reçus par le Conseil constitutionnel, parmi lesquels 14 296 ont été validés (2 % seulement ont été écartés comme non conformes). 34 % des présentateurs ont effectivement parrainé un ou une candidate. Dans près de trois quarts des cas, il s’est agi d’élus communaux et intercommunaux.

2.   La représentativité des présentations

En application du deuxième alinéa du I de l’article 3 ([13]), le seuil des parrainages est fixé à 500, soit un peu plus de 1 % de l’effectif.

Une clause de représentativité nationale est en outre prévue : les présentations doivent émaner d’élus d’au moins trente départements ou collectivités d’outre-mer différents, sans dépasser un dixième, soit cinquante, pour un même département ou une même collectivité. Il s’agit ainsi d’éviter les candidatures liées à la défense d’intérêts purement locaux et de conférer à la candidature une assise large.

Enfin, chaque élu ne peut parrainer qu’un seul candidat ([14]). Son choix est irrévocable : si, par exemple, le candidat parrainé renonce à se présenter, l’élu ne peut pas parrainer un autre candidat. En effet, une fois envoyée ou déposée, la présentation ne peut être retirée ([15]).

B.   L’acte de présentation des candidats à la présidence de la République

« La présentation d’un candidat à l’élection du Président de la République est un acte politique grave. Il importe donc de l’entourer de toute la solennité nécessaire. À cette fin, il y aurait lieu, d’une part, d’exiger que les présentations fussent établies sur des formulaires officiels tenus à la disposition des citoyens et, d’autre part, de rendre publique, pour chaque candidat, la liste des auteurs de présentation » a déclaré le Conseil constitutionnel à l’issue de l’élection présidentielle de 1974 ([16]). Aussi, la présentation des candidats répond-elle à plusieurs conditions de forme.

1.   Les formes de la présentation

En application du quatrième alinéa du I de l’article 3, les présentations des candidats sont rédigées sur des formulaires, revêtues de la signature de leur auteur et adressées au Conseil constitutionnel par leur auteur par voie postale, dans une enveloppe prévue à cet effet. Les formulaires et les enveloppes sont imprimés par l’administration conformément aux modèles arrêtés par le Conseil constitutionnel.

Afin d’assurer la sérénité des opérations et d’éviter toute pression sur les personnes habilitées à présenter un candidat, la loi organique n° 2016-528 du 25 avril 2016 a en effet mis fin à la pratique antérieure, qui permettait aux candidats de recueillir eux-mêmes les parrainages et de les déposer pour leur compte auprès du Conseil constitutionnel. Cette même loi organique avait également prévu que les présentations pourraient être transmises au Conseil constitutionnel par voie électronique. Toutefois, l’entrée en vigueur de cette disposition, prévue au plus tard au 1er janvier 2020, a été reportée au 1er janvier 2027 par la loi organique n° 2021-335 du 29 mars 2021 ([17]).

Les formulaires de présentation des candidats sont adressés aux élus concernés à compter de la publication du décret convoquant les électeurs ou, le cas échéant, dès la publication de la déclaration du Conseil constitutionnel constatant la vacance de la présidence de la République ou le caractère définitif de l’empêchement du Président.

Les présentations, rédigées en lettres majuscules et revêtues de la signature manuscrite de leur auteur, sont transmises par voie postale au Conseil constitutionnel, auquel elles doivent parvenir au plus tard le sixième vendredi précédant le premier tour de scrutin, à dix-huit heures ou, en cas d’élection anticipée, au plus tard le troisième mardi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures, en vertu du deuxième alinéa du I de l’article 3. Les parrains doivent donc tenir compte des délais d’acheminement postal.

Par dérogation, en vertu des cinquième à huitième alinéas du I de l’article 3, les présentations peuvent être déposées, en outre-mer, auprès du représentant de l’État, et lorsqu’elles émanent de conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger ou de présidents des conseils consulaires, auprès de l’ambassadeur ou du chef de poste consulaire. Le représentant de l’État, l’ambassadeur ou le chef de poste consulaire assure, par la voie la plus rapide, après en avoir délivré récépissé, la notification de la présentation au Conseil constitutionnel.

2.   La publicité de la présentation

La publicité du nom et de la qualité de l’auteur du parrainage a été, depuis 1962, l’objet de multiples critiques – elle a notamment donné l’occasion au Conseil constitutionnel d’indiquer que « la présentation de candidats par les citoyens élus habilités ne saurait être assimilée à l’expression d’un suffrage » ([18]) – et de plusieurs évolutions.

De l’absence totale de publicité, le dispositif est en effet passé, avec la loi organique n° 76-528 du 18 juin 1976, à une diffusion publique des présentations dans la limite du nombre requis pour la candidature, soit 500 ([19]). Cependant, au-delà de l’obligation qui découlait des textes, le Conseil constitutionnel a mis en place, entre 1988 et 2002, un affichage intégral des signatures valides dans les locaux mêmes du Palais-Royal, avant de revenir sur cette pratique à partir de 2007 ([20]). La loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016 a finalement instauré la publication intégrale de l’identité des auteurs de parrainages, répondant ainsi à une préconisation faite dès 1974 par le Conseil constitutionnel. Il s’agit ainsi de préserver le principe d’égalité entre les présentateurs et d’assurer une plus grande transparence politique.

Par conséquent, en application du dernier alinéa du I de l’article 3, le Conseil constitutionnel rend publics, au fur et à mesure de la réception des présentations et au moins deux fois par semaine, le nom et la qualité des citoyens qui ont valablement présenté des candidats à l’élection présidentielle. En outre, huit jours au moins avant le premier tour de scrutin, le Conseil constitutionnel rend publics le nom et la qualité des citoyens qui ont valablement proposé les candidats.

Ainsi, en 2017, la liste actualisée en temps réel des parrainages a été publiée sur le site Internet du Conseil constitutionnel le mardi et le vendredi pendant la période de recueil des parrainages. Le Conseil a rendu public, entre le 1er et le 18 mars 2017, six listes de citoyens habilités ayant présenté des candidats à l’élection du Président de la République. La liste définitive des parrainages à la fin de la période de recueil a été publiée au Journal officiel le 7 avril 2017.

II.   un nouveau dispositif de prÉsentation des candidats À l’Élection prÉsidentielle par les citoyens

S’inspirant de la proposition n° 1 de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique présidée par M. Lionel Jospin, l’article unique propose d’instaurer un dispositif alternatif de parrainage reposant sur les citoyens, afin de les associer davantage à la désignation du Président de la République et, ainsi, de renforcer la légitimité de l’élection et la confiance du peuple dans l’institution présidentielle.

A.   Les conditions de fond

L’article unique propose de compléter le I de l’article 3 de la loi n° 62-1292 en prévoyant que la liste des candidats à l’élection présidentielle est également établie, par le Conseil constitutionnel, au vu des présentations qui lui sont adressées par au moins 150 000 citoyens français inscrits sur les listes électorales, issus d’au moins trente départements ou collectivités d’outre-mer, sans que plus de 5 % d’entre eux puissent provenir d’un même département ou d’une même collectivité d’outre-mer.

1.   Le seuil de 150 000 signatures de citoyens

Proposée par la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, la fixation du nombre de signatures nécessaires pour concourir à 150 000 au moins apparaît équilibrée.

En effet, ce seuil, qui représente environ 0,33 % des électeurs inscrits, est suffisamment élevé pour limiter le risque de candidatures qui n’auraient manifestement pas leur place dans une élection présidentielle tout en n’étant pas susceptible de conduire à l’exclusion d’un candidat se réclamant d’un courant politique représentatif. Sur ce dernier point, la commission a d’ailleurs noté que « plusieurs candidats représentant des courants qui ne peuvent être tenus pour négligeables obtiennent à chaque scrutin présidentiel entre 200 000 et 600 000 suffrages au premier tour » ([21]).

Il apparaît en outre que le nombre de 150 000 signatures est conforme à la moyenne observée dans les États membres de l’Union européenne qui ont institué un mécanisme de parrainage citoyen pour l’élection présidentielle que ce soit à titre exclusif, comme au Portugal et en Pologne, ou à titre complémentaire, comme en Autriche ou en Finlande.

2.   La clause de représentativité

Comme dans le dispositif existant, l’article unique ajoute une clause de représentativité afin d’éviter les candidatures dépourvues de dimension nationale.

La question du nombre de départements et de collectivités d’outre-mer retenu est en effet essentielle pour assurer l’assise nationale des candidats. Si la proposition de loi organique initiale prévoit un seuil de trente départements ou collectivités, un amendement sera déposé afin de le porter à cinquante, conformément à la proposition de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique.

Ainsi, une candidature ne pourra être retenue que si elle est présentée par 150 000 citoyens inscrits sur les listes électorales d’au moins cinquante départements ou collectivités d’outre-mer, sans que plus de 5 % d’entre eux, soit 7 500, proviennent d’un même département ou d’une même collectivité. Les citoyens inscrits sur les listes électorales des Français établis hors de France et des Français de l’étranger seront réputés être issus d’un même département.

L’aire géographique retenue sera donc étendue par rapport à celle prévalant dans le dispositif actuel. En revanche, le plafond de présentations autorisé par département ou collectivité d’outre-mer sera abaissé de 10 à 5 %, soit 7 500 parrainages.

Il est enfin prévu, comme dans le dispositif actuel, que chaque citoyen inscrit sur les listes électorales ne pourra parrainer qu’un seul candidat à l’élection présidentielle. Toutefois, en l’espèce, la disposition est élevée du niveau réglementaire à celui de la loi organique.

B.   L’acte de présentation

Comme l’a relevé la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, « les réticences que suscite la perspective d’un parrainage citoyen s’expliquent, le plus souvent, par le scepticisme sur sa faisabilité pratique davantage que par une opposition de principe. Il n’existe toutefois, selon la Commission, aucun obstacle technique dirimant » ([22]).

Aussi, le présent article s’inspire-t-il des propositions faites par la commission pour recueillir les présentations citoyennes.

1.   Les formes de l’acte

L’article unique prévoit que les présentations des candidats seront rédigées sur des formulaires et revêtues de la signature de leur auteur, comme c’est le cas actuellement, avant d’ajouter qu’une copie de la pièce d’identité du présentateur leur sera jointe.

Les formulaires et les enveloppes seront imprimés par les soins de l’administration conformément aux modèles arrêtés par le Conseil constitutionnel et envoyés par voie postale à tous les citoyens inscrits sur les listes électorales, sur le modèle de ce qui est fait pour les professions de foi des candidats aux élections.

Les présentations pourront être envoyées au Conseil constitutionnel par voie postale ou électronique.

2.   Les délais de présentation

Comme dans le mécanisme de parrainage existant, les présentations devront parvenir au Conseil constitutionnel au plus tard le sixième vendredi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures ou, en cas d’élection anticipée, au plus tard le troisième mardi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures.

De même, par dérogation, les présentations pourront être déposées :

– dans les départements et collectivités d’outre-mer ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie, auprès du représentant de l’État ;

– auprès de l’ambassadeur ou du chef de poste chargé de la circonscription consulaire dans laquelle réside l’auteur de la présentation.

3.   L’absence de publicité de la présentation

Aucune des dispositions de l’article unique ne prévoit la publicité des présentations issues des citoyens car la question de la transparence du dispositif de parrainage ne se pose pas dans les mêmes termes que dans le cas du parrainage par les élus.

En effet, la présentation d’un candidat à l’élection présidentielle par un élu est un acte de responsabilité politique qui doit, à ce titre, pouvoir être connu des électeurs. Il n’en va pas de même pour la présentation faite par un citoyen qui, se rapprochant davantage de l’expression d’un suffrage, ne doit pas faire l’objet d’une publicité.

III.   la position de la commission des Lois

L’article unique a été rejeté à la suite de son examen par la Commission.

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   Compte rendu des dÉbats

Lors de sa réunion du mercredi 14 avril 2021, la Commission examine la proposition de loi organique instaurant une procédure de parrainages citoyens pour la candidature à l’élection présidentielle (n° 3478) (M. Jean-Luc Mélenchon, rapporteur).

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http://assnat.fr/y2eVbn

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous allons examiner ce matin deux textes inscrits à l’ordre du jour par le groupe la France insoumise dans le cadre de sa journée réservée le 6 mai prochain. Notre collègue Alexis Corbière, auquel je souhaite la bienvenue dans la Commission, supplée Jean-Luc Mélenchon, qui en est le rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur suppléant. La présente proposition de loi organique vise à instaurer, en plus du dispositif actuel de parrainage des candidats à l’élection présidentielle par des élus, un système de parrainage reposant sur les citoyens.

« Le système actuel des parrainages a vécu », comme l’a mis en évidence, dès 2008, le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République présidé par Édouard Balladur. Ce constat a ensuite été partagé par la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique présidée par Lionel Jospin qui a affirmé, à nouveau, en 2012 : « Le système actuel de parrainage des candidats par des élus ne correspond plus aux exigences d’une démocratie moderne ».

Considérant qu’il devait désormais revenir aux citoyens eux-mêmes d’habiliter ceux qui pourront concourir à l’élection présidentielle, car il y avait là « un enjeu important pour la rénovation de notre vie publique », cette Commission a proposé de confier la responsabilité de présenter un candidat à l’élection présidentielle à au moins 150 000 citoyens inscrits sur les listes électorales.

L’objet de la proposition de loi organique est d’inscrire cette préconisation dans la loi du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel. En l’état actuel du droit, la sélection des candidats est un privilège des élus, chaque candidat à la présidentielle devant recueillir auprès d’eux 500 signatures pour se présenter, ce qui n’est pas sans soulever de lourdes difficultés.

Le principe du parrainage citoyen que nous défendons entend remédier aux failles du dispositif actuel. Pour certains candidats populaires, ou issus de courants significatifs de la vie politique, la quête de ces signatures s’apparente en effet le plus souvent à un parcours du combattant, fondé sur l’incertitude permanente de pouvoir participer ou non à l’élection présidentielle. La toile de fond de ce système de filtrage est entachée de risques de pressions auprès des maires, notamment ceux de petites communes, souvent tributaires d’élus ou d’assemblées dominés par des partis politiques installés.

La procédure n’est donc pas neutre et se trouve sujette à une instrumentalisation qui dessert l’égalité entre candidats et entrave, en conséquence, une juste représentation des opinions politiques à l’élection présidentielle. Le système du parrainage citoyen entend surtout créer les conditions d’une plus grande intervention populaire dans sa préparation : ce serait un droit démocratique supplémentaire conquis pour les citoyens, dans un contexte où nul ne peut contester la progression massive de l’abstention.

Nous partageons tous ce constat : la grande masse du peuple français est dans une forme de « grève civique ». Le niveau de l’abstention se situe en moyenne autour de 50 %, sauf lors de l’élection présidentielle, où elle concerne tout de même un électeur sur quatre. C’est une tendance fondamentale que nulle conscience républicaine ne peut ignorer. Aussi nous faut-il y apporter les réponses adéquates. En effet, cette sorte d’insurrection froide contre les institutions de la Ve République ne doit rien au hasard : elle est pour nous symptomatique d’un système de mise à l’écart des citoyens de la décision publique.

De grands changements sont donc nécessaires. Vous le savez, au-delà de ce texte, nous sommes favorables au passage à une VIe République. En l’occurrence, notre proposition de parrainage citoyen apparaît comme l’un des moyens d’associer davantage les citoyens à la préparation de l’élection du Président – ou de la Présidente – de la République et de renouer avec l’esprit du recours au suffrage universel direct.

Aussi l’article unique de la proposition de loi organique prévoit-il d’ajouter au dispositif actuel de parrainage un dispositif alternatif qui reposerait sur au moins 150 000 citoyens. Ce seuil, qui correspond à 0,33 % des électeurs, est conforme à la moyenne observée dans les États européens ayant institué un mécanisme de parrainage citoyen pour l’élection présidentielle, soit à titre exclusif, comme au Portugal ou en Pologne, soit parallèlement à un autre système de qualification préalable, comme en Autriche ou en Finlande.

Ce nombre ne doit rien au hasard. Il n’est ni trop élevé, ni trop faible : il suffit à limiter les risques de candidatures non représentatives et garantit à chaque candidat se réclamant d’un courant politique représentatif de pouvoir se présenter devant les électeurs.

Notons également que plusieurs candidats représentant des courants ne pouvant être tenus pour négligeables obtiennent à chaque scrutin présidentiel entre 200 000 et 600 000 suffrages au premier tour.

En complément de ce seuil de 150 000 présentations, notre proposition reprend la préconisation du rapport de 2012 en intégrant une clause de représentativité nationale. L’objectif poursuivi est de permettre une assise nationale des candidats par la représentation d’un certain nombre de départements et de collectivités d’outre-mer. Je tiens à préciser que si notre proposition de loi organique initiale prévoit un seuil de trente départements ou collectivités, nous avons déposé un amendement visant à le porter à cinquante, conformément à la proposition de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique.

Ainsi les présentations devront-elles provenir d’au moins cinquante départements ou collectivités d’outre-mer, sans que l’un d’entre eux ne puisse fournir plus de 5 % des parrainages, soit 7 500 signatures. Ces conditions sont renforcées par rapport à celles relatives au dispositif actuel de parrainage qui a retenu un seuil de trente départements.

Enfin, un électeur ne pourra parrainer qu’un candidat et cette présentation ne fera l’objet d’aucune publicité. Pourquoi avoir opté pour un tel anonymat ? Tout simplement pour traduire le secret, fondement de l’expression d’un suffrage qui se rapproche d’un parrainage citoyen. Tel n’est pas le cas de la présentation d’un candidat à l’élection présidentielle par un élu, qui est un acte de responsabilité politique devant être connu des électeurs même s’il participe, selon nous, à une forme de pression que connaissent certains élus.

J’en viens aux aspects plus pratiques : les présentations, rédigées sur des formulaires, revêtues de la signature de leur auteur et accompagnées d’une copie de sa pièce d’identité, devront parvenir au Conseil constitutionnel dans les mêmes délais que les parrainages des élus.

L’envoi des présentations au Conseil pourra être réalisé selon deux modalités : par voie postale, comme c’est déjà le cas aujourd’hui, ou par voie électronique, par l’intermédiaire, par exemple, d’un site officiel spécifique, chaque électeur ayant reçu au préalable des codes d’accès personnalisés, sur le modèle de ce qui est pratiqué aujourd’hui par l’administration fiscale pour la déclaration des revenus en ligne. Il reviendra au Conseil constitutionnel, gardien des règles de parrainage, de vérifier la conformité des présentations.

Mes chers collègues, je tiens à le redire avec force : nous devons tirer des enseignements significatifs de cette « grève civique » massive qui s’aggrave chaque année un peu plus dans notre pays. Cette colère froide a pris la forme de plusieurs élans populaires, du mouvement des Gilets jaunes jusqu’à la mobilisation citoyenne pour le climat. Aussi nous faut-il redonner au peuple une pleine capacité d’intervention dans une élection qui, même si je le déplore, conditionne pour les cinq années suivantes la vie politique de notre pays.

Cette proposition de loi permettra, selon nous, une première réappropriation citoyenne de l’élection présidentielle, même s’il reste à s’interroger sur le rôle et les pouvoirs du Président de la République. Je vous invite donc à l’adopter afin qu’elle soit applicable dès l’élection de 2022.

M. Pacôme Rupin. On peut partager une partie de votre constat s’agissant de la défiance actuelle d’une partie de la population à l’égard de notre système démocratique. Nous devons donc étudier avec sérieux toute proposition visant à apporter une solution, ce qui est le cas de votre texte. Celui-ci tend à introduire un changement majeur à la procédure permettant de se porter candidat à l’élection présidentielle, en instituant un système de parrainage par au moins 150 000 citoyens.

La première de mes réserves porte, non pas sur le fond, mais sur la temporalité. Alors que ces derniers mois, de nombreux textes concernant les élections, notamment présidentielles, nous ont été soumis, notre majorité n’a pas varié sur un principe : ne pas remettre en question les fondamentaux du droit électoral et ne pas introduire de bouleversements politiques à un an de l’élection présidentielle

S’agissant des parrainages, l’échéance est encore plus proche, puisque la date limite pour leur réception est fixée au sixième vendredi précédant le premier tour.

D’ailleurs, le groupe La France insoumise partage, d’une certaine manière, cette position puisque notre collègue Bastien Lachaud s’était joint à nous pour s’opposer, à ce titre, dans le cadre de l’examen du projet de loi organique portant diverses mesures relatives à l’élection du Président de la République, à un amendement déposé en dernière minute au Sénat par le Gouvernement sur le vote par anticipation. Il s’agissait, là aussi, d’éviter des modifications substantielles pouvant être perçues comme des manœuvres politiques.

En ces temps troublés, notre vie démocratique a besoin de stabilité, mais cela n’empêche pas de réfléchir à des transformations dans les prochaines années.

En l’occurrence, donc, cette proposition de loi arrive un peu tard pour remettre en question l’organisation de l’élection présidentielle de 2022, d’autant que nous avons examiné il y a peu un texte sur le sujet.

Ma deuxième réserve porte sur les grandes difficultés opérationnelles de cette proposition, dans un délai si court. Le principe du parrainage par au moins 500 élus est unique et réservé à l’élection présidentielle. La procédure de vérification est dense et implique de nombreuses ressources humaines et temporelles. Plusieurs étapes sont prévues pour s’assurer de la validité d’un parrainage. En cas de doute, les équipes prennent souvent contact avec les élus concernés par téléphone pour récupérer une pièce ou une signature manquante. Si le doute persiste, ce sont les sages du Conseil constitutionnel qui tranchent. Rappelons que même s’il ne s’agit que d’une proportion infime de cas, il leur est arrivé d’invalider des parrainages d’élus, souvent dans le cas de totaux légèrement supérieurs à 500 qui laissaient planer un doute. Vérifier l’authenticité des 150 000 parrainages de citoyens poserait problème.

Ce sujet est à mettre en lien avec celui de l’identité citoyenne numérique, procédure qui permettrait d’accélérer et d’améliorer l’authentification des parrainages ou des participations à des votations en ligne. Ce serait une première étape. Si le système n’était pas totalement opérationnel, certains candidats pourraient en effet se prévaloir de parrainages citoyens qui ne seraient pas authentiques ou authentifiables, ce qui poserait un problème de sincérité de l’élection présidentielle.

Cela dit, cette proposition de loi est intéressante sur le fond. Reprenant une des préconisations de la commission présidée par Lionel Jospin, elle permettrait peut-être de mieux intégrer les citoyens au processus de l’élection présidentielle, même si, in fine, ils sont souverains au moment du vote. Elle pourrait cependant conduire à l’émergence d’un grand nombre de candidats, alors que nos concitoyens sont attachés à la lisibilité du scrutin et à la clarté de l’offre politique.

C’est pourquoi le groupe La République en Marche votera contre ce matin.

M. Raphaël Schellenberger. Je voudrais faire tout d’abord une remarque liminaire sur nos niches parlementaires qui s’engagent progressivement dans une démarche populiste. On y examine en effet de plus en plus des textes dont on sait pertinemment qu’ils n’aboutiront pas, au lieu de s’intéresser, en période de crise, au quotidien des Français et de démontrer que les groupes minoritaires ou d’opposition sont capables de formuler des propositions concrètes. Nous pourrions profiter de cette occasion pour exposer des idées qui, si elles n’émanent pas de la majorité, ont vocation à régler des problèmes et à trouver du consensus plutôt que de chercher à cliver inutilement, en l’occurrence en matière de réforme de nos institutions, et en particulier d’élection présidentielle.

Sur la forme, le calendrier n’est pas le bon : nous sommes bien trop proches de l’échéance électorale pour que, dans le respect de la navette parlementaire et de nos institutions, cette proposition de loi organique puisse être adoptée. En modifier les règles aujourd’hui aurait pour conséquence de flouer l’élection et de l’éloigner des principes devant conduire une démocratie.

Sur le fond, le groupe Les Républicains sera évidemment contre la proposition de loi. Tout d’abord, nous ne partageons pas le constat relatif à la supposée difficulté d’accès à l’élection présidentielle en raison de la supposée pression exercée sur les maires, qui n’est pas démontrée dans les faits. Depuis 2002, le nombre de candidats à l’élection présidentielle est d’ailleurs devenu très important, puisqu’il dépasse parfois la quinzaine. On ne peut donc pas dire qu’il y aurait un problème d’obtention des parrainages, et en conséquence d’accès à l’élection, ou de capacité à représenter des courants de pensée politique différents.

Je vois derrière ce discours une mise en scène voire une victimisation de certains candidats qui n’ont en réalité jamais rencontré de difficultés à obtenir les signatures et ont toujours pu se présenter. Cela relève de l’argument politique, et en aucun cas d’une contrainte technique inhérente aux institutions de la Ve République, à laquelle le groupe Les Républicains est particulièrement attaché.

Or la mesure proposée dénaturerait précisément la Ve République en renforçant davantage encore la présidentialisation du régime. Je ne suis pas sûr que nous en ayons besoin aujourd’hui. Elle est, en outre, en contradiction avec la proposition de loi suivante, au travers de laquelle vous revendiquez une proportionnelle intégrale. À un moment donné, il faudra que vous choisissiez entre régime parlementaire et régime présidentiel. Dans la même niche parlementaire, vous ne pouvez pas, en effet, nous dire que vous voulez l’un et l’autre, sauf à vouloir appliquer le « en même temps » aux institutions.

Voilà les raisons qui nous conduisent à nous opposer à cette proposition de loi organique qui, in fine, rend plus difficile encore l’accès à une candidature à l’élection présidentielle, contrairement aux objectifs affichés de faciliter l’expression d’idées, de courants et de partis politiques supposés ne pas pouvoir y prendre part.

Mme Blandine Brocard. La procédure des parrainages constituant une étape décisive dans la détermination des candidats à l’élection présidentielle, votre texte nous a interpellés, monsieur Corbière.

Si nous partageons pleinement avec vous l’ambition et la volonté de donner aux Français tous les moyens de participer à la vie démocratique de notre pays, nous ne pensons pas que l’instauration d’un parrainage citoyen aurait des conséquences significatives ni sur la participation de nos compatriotes à cette vie ni sur l’offre politique proposée à l’occasion de cette élection.

Si l’on ne peut pas nier que la procédure actuelle de parrainage par des élus comporte certaines imperfections, rappelons-nous les conditions de sa mise en place pour bien comprendre le mécanisme à l’œuvre aujourd’hui.

En 1962, au moment où a été instaurée l’élection du Président de la République au suffrage universel direct, un système de filtre avait été établi afin d’empêcher que des candidats fantaisistes puissent se présenter, ce qui aurait immanquablement eu pour effet de discréditer l’élection présidentielle, ses résultats et l’autorité du président élu. Le général de Gaulle disait : « Il faut bien éviter l’énergumène qui jettera le trouble ». Il tenait cependant à ce « qu’une personnalité libre de toute attache partisane, ne disposant d’aucun appareil de soutien, eût une chance de briguer les suffrages ».

Si la procédure actuelle le permet, elle comporte en effet certaines imperfections, dont la principale est de pouvoir placer des candidats dans une position inégale, entre ceux disposant grâce à leur parti politique d’un réseau d’élus et ceux devant aller chercher les parrainages un par un. C’est pourquoi plusieurs évolutions ont été apportées aux mécanismes de parrainage, avec toujours en ligne de mire l’objectif d’améliorer la lisibilité du scrutin et d’éviter un éparpillement des voix.

Cette procédure a également des mérites fondamentaux : en confiant la responsabilité des parrainages à des citoyens occupant des fonctions électives, elle permet de mettre en place un filtre efficace, sans remettre en cause le principe du suffrage universel direct. Elle permet donc de concilier clarté du scrutin et diversité de l’offre politique.

Les élus qui donnent le plus leur parrainage sont les maires. Or leurs choix ressemblent à certains égards à ceux des citoyens. Une étude de 2017 montre en effet qu’ils choisissent leur candidat sur la base des mêmes critères que ceux qu’utilisent leurs électeurs pour déterminer leur vote, cela étant particulièrement vrai pour les maires de communes rurales.

Ces maires ruraux, qui n’ont pas d’étiquette politique, sont les principaux responsables de l’existence d’un grand nombre de candidatures. La même étude démontre ainsi que, sans eux, seuls quatre candidats se seraient présentés lors de l’élection présidentielle de 2017 : Emmanuel Macron, François Fillon, Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon. Il apparaît enfin que les candidats devant leur présence à l’élection présidentielle aux maires ruraux obtiennent au premier tour les faveurs de près d’un tiers de l’électorat.

De plus, l’absence d’une procédure de parrainage citoyen serait compensée par le nombre très important de communes rurales dans notre pays. Aujourd’hui, les fusions de communes et le développement des intercommunalités ne réduisent pas le nombre d’élus : bien au contraire, cela conforte le système de parrainage qui prévaut aujourd’hui.

Ce système conserve donc selon nous toute sa légitimité.

Monsieur le rapporteur, votre procédure de parrainage citoyen a en effet déjà été envisagée par le passé – vous avez évoqué le rapport de M. Jospin – sans jamais aboutir, tout simplement parce qu’elle n’apporte pas d’amélioration. Le système actuel permet aux Français d’avoir un vrai débat, pluraliste et de qualité, ne limite pas de manière disproportionnée le nombre de candidats mais évite les candidats uniquement guidés par des fins de promotion personnelle. Ce filtre efficace et équilibré élimine les candidatures sans fondement. Le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés ne voit donc pas la plus-value du système de parrainage citoyen : nous croyons dans le dispositif actuel, même s’il reste perfectible.

C’est la raison pour laquelle nous voterons contre la proposition de loi.

Mme Marietta Karamanli. Il existe un fort enjeu politique autour de cette proposition déposée par nos collègues du groupe La France insoumise visant à instaurer le parrainage d’un candidat à l’élection présidentielle par 150 000 citoyens.

Comme le disait Jean-Claude Colliard, ancien membre du Conseil constitutionnel, « […] que la désignation du Président de la République, depuis la révision de 1962, dépende directement du vote des électeurs, est un dogme bien établi dans notre vie politique, mais le dire ainsi sans nuances, c’est oublier un peu vite que ce vote est nécessairement déterminé par l’offre politique, autrement dit la liste des candidats admis à concourir ».

Dans ce cadre, la question du nombre, celle de la qualité des parrains et celle, enfin, de la publicité, sont posées. Si le seuil des parrainages citoyens retenu est celui proposé par la commission présidée par Lionel Jospin en 2012, d’autres propositions ont envisagé celui de 500 000. On est encore très loin du seuil – qualifié par Jean-Claude Colliard d’irréaliste – retenu pour le référendum d’initiative populaire au moment de la réforme de 2008.

Il existe plusieurs arguments en faveur de la proposition de loi. En effet, nous sommes le seul pays où l’élection du Président de la République au suffrage universel se pratique avec un système de parrainage d’élus, héritage du temps où le chef de l’État était élu par un collège. Alors que, jusqu’en 1976, 100 parrainages étaient exigés, l’augmentation de ce nombre n’a pas empêché la multiplication des candidatures. Ce système a également fait la preuve de son incapacité à faire une place à des candidats populaires mais hors système ou liés à des formations disposant de peu d’élus.

Mais les arguments contre la proposition de loi sont également forts : elle arrive ainsi à contretemps des primaires organisées à droite et à gauche. Autrement dit, elle va à l’encontre de la recherche d’une candidature de rassemblement dans chaque camp qui se définit comme tel. Le système nord-américain présente bien des inconvénients, mais il comprend des élections primaires. Or, aux dernières élections, celles de 2020, le taux de participation y a été le plus fort depuis 1900.

Un tel engouement pour les primaires, ailleurs et ici, montre que les citoyens sont prêts à s’investir dans des pratiques participatives. Cela suppose que les candidats et les candidates respectent leurs propres engagements. On doit donc considérer qu’un système de primaires est bien de nature à assurer une participation forte.

Le parrainage tel qu’il nous est présenté a été critiqué par les petits partis car le seuil reste élevé, en comparaison avec d’autres pays. Au Portugal par exemple, il a été fixé à moins de 10 000 parrainages pour 10 millions d’habitants.

Cette proposition pose enfin, et fortement, la question du contrôle des parrainages par le Conseil constitutionnel et de l’effectivité du choix des citoyens. Si l’État et le gouvernement « mettaient le paquet » sur l’identité numérique, nous aurions une perspective nouvelle de développement.

Les élus transmettent eux-mêmes leur parrainage, ce qui renvoie à la question de la publicité des parrainages, effective depuis 2016. Je suis personnellement favorable à la proposition qui va dans le sens d’une plus grande responsabilisation des citoyens ayant la qualité juridique d’électeur. Nous trouvons cependant étonnant que les parrains ne soient pas connus. Si je comprends la réticence des élus qui parrainent, je ne vois pas pourquoi cette démarche des citoyens devrait rester secrète. Être citoyen, c’est s’engager dans la vie publique. Quoi de plus naturel alors que de dire publiquement que l’on soutient tel ou tel candidat ? L’anonymat n’est donc pas une nécessité : il pourrait même être à l’origine d’une inconstitutionnalité rappelée par Jean Gicquel en 2012, à l’époque de la commission présidée par Lionel Jospin.

Notre groupe s’abstiendra donc en commission sur ce texte, et observera l’évolution de la discussion sur les questions contradictoires qu’il pose, comme celui que nous examinerons ensuite.

M. Christophe Euzet. Je suis de ceux qui ont considéré avec un peu de dédain, voire de l’irritation, la révision constitutionnelle de 2008, qui a instauré les niches parlementaires de façon un peu démagogique à mes yeux. Je dois reconnaître que j’ai beaucoup évolué sur ce point depuis lors. Certes, l’adoption de textes, dans ce cadre, reste relativement rare mais cela permet d’ouvrir au cœur de notre assemblée des débats majeurs.

Deux vrais sujets institutionnels sont ainsi portés à notre attention, ce matin. La crise que nous traversons ne date pas d’aujourd’hui : elle est au moins trentenaire. Si je me réjouis de la présence d’Alexis Corbière, je regrette l’absence de Jean-Luc Mélenchon, à qui j’aurais dit : « Collègue, vous étiez sénateur lorsque, jeune étudiant, je m’abreuvais de Jean Baudrillard, de Michel Crozier ou d’Hannah Arendt. Collègue, vous étiez ministre lorsque je commençais à enseigner et que je faisais passer les messages véhiculés par Orwell et Huxley. Collègue, et vous étiez à nouveau sénateur lorsque j’ai critiqué la réforme de 2008. »

Nous avons donc traversé cette crise en lui portant un regard différent, dans des postures différentes, tout simplement parce qu’elle dépasse nos mots et même nos sensations immédiates, qui dépendent de nos situations matérielles.

Aujourd’hui, nous pourrions bien être les témoins et les acteurs involontaires de ce qui pourrait être, si nous n’y prenons pas garde, une période historique de « refermeture » de l’expérience démocratique.

Les peuples ne marquent plus d’intérêt pour nos principes – démocratie, droits de l’homme, laïcité, pluralisme – ni pour nos concepts – démocratie libérale, régime autoritaire, dictature – ou pour notre système institutionnel ou pour notre démocratie. Il faut en convenir : nous ne parvenons pas à éradiquer le phénomène parce qu’il est complexe, que nous vivons une période d’individualisme exacerbé et de déterritorialisation de l’humain, mais également parce que nous sommes prisonniers de nos postures politiques comme de nos formes et de nos procédures juridiques. Il faut impérativement prendre garde à tout cela et embrasser ces problématiques avec sérieux.

La présente proposition de loi a le grand mérite d’ouvrir le débat sur une thématique importante. Je crois cependant que vous vous trompez à la fois sur le fond et sur la forme. Le groupe Agir ensemble ne partage pas votre point de vue.

Vous êtes dans l’erreur, du point de vue constitutionnel, lorsque vous évoquez la VIe République qui serait précédée par la réunion d’une assemblée constituante dont on ne peut anticiper les travaux : c’est un non-sens historique et constitutionnel.

S’agissant du parrainage citoyen à proprement parler, je trouve votre proposition très intéressante et alléchante. Je vais vous dire la vérité : si vous l’aviez formulée il y a quinze ans, ou à l’issue des travaux de la commission présidée par Lionel Jospin, j’y aurais adhéré. La question de la candidature à la magistrature suprême est essentielle, tout comme celle des parrainages : 500 élus, c’est insatisfaisant car cela agit comme une sorte de filtre, de suffrage universel indirect à l’occasion d’une élection au suffrage direct. Certains candidats, bien qu’apparaissant comme légitimes, ont du mal à les réunir. Cela assure, à l’inverse, de la fausse publicité à d’autres qui en disposaient et qui faisaient semblant de ne pas pouvoir les obtenir. En outre, le système est mal compris par les élus.

Si la solution proposée est intéressante, elle ne me paraît cependant pas adaptée. Laissant de côté la temporalité, mes remarques sont de deux types. Techniquement, tout d’abord, la collecte et la vérification des signatures me semblent difficiles, et leur anonymisation contre-productive. Par ailleurs, dans le monde dans lequel nous vivons, la place accordée aux médias et aux réseaux sociaux pourrait faire germer des candidatures complètement fantaisistes : un Jérôme Rodrigues, un Didier Raoult ou un Cyril Hanouna pourrait ainsi très bien devenir, en quelques semaines, candidat à l’élection présidentielle et fausser complètement le scrutin.

Or le sérieux et la solennité de la consultation présidentielle méritent un peu mieux. Cette idée intéressante doit être affinée et repensée. Nous y serons opposés en l’état, pas sur le principe.

M. Pascal Brindeau. En 1962, le législateur – les propos du général de Gaulle ont été rappelés – s’est demandé comment concilier le droit de chacun à être candidat, y compris à l’élection présidentielle, et l’exigence de lisibilité du scrutin, vierge de toute candidature en décalage avec les courants politiques traditionnels. Le choix a été fait d’imposer un filtre, celui des élus locaux.

Ce qui nous gêne dans cette proposition de loi, par ailleurs intéressante, c’est que vous semblez y opposer le parrainage citoyen et celui des élus locaux, comme si ceux-ci étaient « déconnectés » de la légitimité populaire. Au contraire, les élus locaux détiennent cette légitimité de leur élection et, à travers leur signature, c’est bien le peuple français qui s’exprime. À titre personnel, j’aurais préféré examiner un système mixte.

Vous avez indiqué que le seuil des 150 000 signatures correspond à celui ordinairement imposé pour la présidentielle dans d’autres régimes démocratiques. Toutefois, il ne me semble pas suffisamment élevé pour permettre d’exclure toutes les « candidatures exotiques », dont certaines passent parfois le filtre des 500 parrainages d’élus. Elles peuvent être le fait de personnes, ou d’organisations, dont les intérêts ne sont en rien politiques mais qui escomptent présenter dans la foulée de la présidentielle une centaine de candidatures aux législatives et profiter ainsi des financements publics.

La clause de représentativité territoriale me semble souhaitable ; c’est une bonne chose que de l’élargir encore, ainsi que vous le proposez dans un amendement.

Je ne partage pas votre analyse concernant la publicité des parrainages, qu’il s’agisse de celui des citoyens ou des élus locaux. En effet, parrainer un candidat ne signifie pas forcément que l’on soutient ses idées ; des élus peuvent décident de donner leur signature à un « petit » candidat afin qu’il puisse concourir au premier tour de l’élection présidentielle et que l’offre politique s’en trouve ainsi élargie.

Au-delà de ces remarques, notre groupe ne s’opposera pas à ce texte.

M. Paul Molac. Cette proposition reprend une des propositions de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique présidée par Lionel Jospin : un parrainage citoyen qui aurait un effet de filtre et permettrait d’exclure les candidatures fantaisistes.

Alors que l’abstention est en augmentation, cette procédure est-elle à même d’impliquer davantage les citoyens ? On peut le penser, puisque les citoyens seraient amenés à prendre connaissance du programme du candidat à qui ils donneraient leur signature ; ce serait une façon, sinon de réenchanter la politique, du moins de faire en sorte qu’on s’y intéresse un peu plus !

Il n’est pas toujours évident, pour une personnalité politique un peu en dehors des partis, de se présenter à la présidentielle. Je pense à Jean Lassalle, représentant du milieu rural et défenseur de son cadre de vie : sa candidature dit quelque chose de notre pays, mais il lui est difficile de rassembler les 500 parrainages d’élus locaux. Le risque existe aussi que les citoyens accordent spontanément leur confiance à une personne – un présentateur par exemple –particulièrement bien installée dans le petit microcosme médiatique. Il y avait quelque chose de cet ordre dans l’élection de Donald Trump.

Je ne vous ferai pas le reproche de présenter ce texte aujourd’hui, même si l’usage veut que l’on ne change pas les modalités d’un scrutin un an avant une élection. Je ne sais que trop qu’il n’est pas évident de faire passer une loi, de présenter des idées nouvelles quand les niches parlementaires sont réduites à la portion congrue – certains y parviennent parfois, on se demande comment !

Votre proposition a le mérite d’exister et de nous forcer à nous renouveler – la vie démocratique nous demande de nous adapter aux exigences de notre époque. Aussi mon groupe ne s’y opposera-t-il pas. Mais je terminerai par une boutade : s’agissant de la présidentielle, la question n’est-elle pas plutôt celle du scrutin au suffrage universel ?

M. Adrien Quatennens. Élection après élection, l’abstention progresse. On pourra trouver toutes sortes d’explications à ce phénomène, mais il s’agit avant tout d’un message politique. Aux dernières élections municipales, celles qui mobilisent le plus les citoyens après la présidentielle, elle a atteint des records ; dans certains bureaux de vote, le candidat qui se trouvait en tête avait recueilli un nombre de voix qui ne lui aurait même pas permis d’être délégué de classe ! L’épidémie est un facteur qui ne retire rien au caractère profond et très politique de cette abstention.

Celle-ci pourrait se résumer à : « si c’est ainsi, faites sans moi ! ». Cela ne peut satisfaire celles et ceux attachés à la démocratie et à la souveraineté du peuple en république, quand bien même ce « si c’est ainsi, faites sans moi ! » arrange les calculs électoraux de certains. L’abstention est en effet plus élevée chez les jeunes, les ouvriers et les employés, pour des tas de raisons politiques incluant les promesses non tenues, les trahisons, les renoncements et le caractère obsolète de notre fonctionnement démocratique.

Pour notre part, nous en avons assez des élections sans le peuple : le peuple doit s’en mêler et nous devons réunir les conditions de sa participation. Nous pensons qu’il est temps pour le peuple français de se refonder en redéfinissant les règles d’un jeu démocratique auquel, de toute évidence, il ne consent plus. Nous voulons qu’une assemblée constituante soit convoquée avec pour mission d’élaborer un projet de nouvelle constitution. Après l’adoption par référendum de ce projet, la France passerait à la VIe République.

L’article 28 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de la Constitution du 24 juin 1793 dispose qu’« un peuple a toujours le droit de revoir, de réformer et de changer sa Constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures. » C’est pourtant le cas depuis de trop nombreuses années – la Constitution de la Ve République, que nous qualifions de monarchie présidentielle, a d’ailleurs été revue plus d’une vingtaine de fois sans que le peuple donne son avis.

Mais le présent texte n’a pas vocation à modifier la Constitution, vous l’aurez compris. Une proposition de loi organique suffit pour instaurer un système de parrainage citoyen. Précision utile si j’en crois les interventions de certains orateurs, ce filtre ne viendrait pas remplacer celui du parrainage des élus locaux, qui continuerait de s’exercer en parallèle.

Cette proposition est issue du rapport de la commission présidée par Lionel Jospin, où siégeaient Roselyne Bachelot, un président de section au Conseil d’État, un préfet, plusieurs magistrats et professeurs de droit, dont Dominique Rousseau. Dans ce rapport, intitulé « Pour un renouveau démocratique », les membres constataient que le système de parrainage des élus s’essoufflait, qu’il créait « une incertitude sur la possibilité, pour certains courants significatifs de la vie politique du pays, d’être représentés au premier tour » et qu’il était source d’inégalité entre candidats : « Les candidats soutenus par des partis ne disposant pas d’un réseau étendu d’élus susceptibles de les parrainer doivent consentir des efforts très importants pour recueillir les signatures requises. L’énergie ainsi déployée les prive d’un temps utile pour mener campagne auprès des électeurs. » De fait, on passe plus de temps à essayer d’être candidat qu’à défendre son projet devant les citoyens.

Le seuil de 150 000 signatures est suffisamment élevé pour dissuader les candidatures purement fantaisistes, strictement régionalistes ou communautaires, le Président de la République ayant vocation à représenter la Nation tout entière, mais il est fixé à un niveau qui permet de ne pas exclure le candidat d’un courant politique représentatif.

Le rapport de la commission présidée par Lionel Jospin propose que tout candidat à la présidentielle devra avoir été parrainé par 150 000 citoyens inscrits sur les listes électorales et issus de 30 départements différents, un même département ne pouvant excéder 5 % du total des parrainages.

Voilà une proposition qui ne devrait pas déplaire à une majorité qui se prétendait l’incarnation du « Nouveau Monde ». Collègues, vous venez d’abandonner l’instauration de la proportionnelle pour les élections législatives, une promesse majeure du candidat Macron ; avec le parrainage citoyen, nous ferons œuvre utile, entamant ainsi le nécessaire renouveau démocratique.

Mme Marie-George Buffet. Je me félicite que nos collègues de La France insoumise nous permettent de débattre aujourd’hui en commission, prochainement dans l’hémicycle, de notre système institutionnel. Je ne peux que partager le constat selon lequel nos compatriotes se trouvent exclus du fonctionnement de nos institutions. Celles-ci ont été fragilisées, affaiblies par cette Ve République qui renforce au fil du temps le pouvoir présidentiel au détriment de l’intervention populaire.

L’abstention ne signifie pas le rejet de la vie publique. C’est, de la part de nos compatriotes, un message politique : ils ne se reconnaissent pas dans nos institutions, ils doutent de l’offre politique qui leur est présentée, ils s’interrogent sur l’efficacité de leur vote et sur la façon dont il se traduit dans l’action du candidat, une fois élu.

Contrairement à d’autres orateurs, je ne pense pas que nos compatriotes se désintéressent du système institutionnel mais je crois qu’ils adhéreront à la proposition d’une assemblée constituante, associant les citoyens et les citoyennes à l’élaboration d’une nouvelle République, la sixième, qui permettra de sortir de cette monarchie présidentielle.

Je me félicite donc de cette proposition de loi sur le parrainage citoyen et je plaide pour un amendement qui prévoie la publicité de ce parrainage – il n’y a pas à se cacher de défendre telle ou telle candidature. Prenons garde, toutefois, à ce que cette démarche citoyenne n’ait pas pour effet d’exercer une pression sur les élus locaux : ceux-ci doivent rester libres de soutenir le candidat de leur choix.

Faisons attention aussi à la sélection des candidats. Il y a eu la loi organique du 18 juin 1976, qui visait, disait-on à l’époque, à limiter le nombre de candidats, puis la commission présidée par Lionel Jospin en 2012. Bien évidemment, il convient d’éviter les candidats communautaires, les candidats que certains appellent « fantaisistes » – je préfère parler des candidats dont les objectifs sont contraires à l’intérêt général, aux notions même de Nation et de République. Mais ne cherchons pas, avec cette proposition de loi, à censurer des candidats. L’offre politique étant ce qu’elle est – je le dis et j’appartiens pourtant à un parti –, on peut voir émerger une candidature hors des partis, qui serait à même de les fédérer ensuite.

Le groupe GDR votera pour cette proposition de loi, tout comme il soutiendra celle visant à instaurer la proportionnelle intégrale au scrutin législatif.

Mme Emmanuelle Ménard. Les candidats à l’élection présidentielle doivent recevoir le parrainage de 500 élus, un filtre choisi pour « gager » le sérieux d’une candidature. La procédure, bien que contraignante, n’est pas insurmontable, si j’en crois le nombre de candidats aux élections passées – 11 en 2017, 10 en 2012 et 12 en 2007. Il me semble important que les candidats à la présidentielle soient soutenus par ces acteurs de terrain que sont les maires, fins connaisseurs des problématiques locales dont ils traitent au quotidien. On a cependant constaté que la publicité des parrainages, obligatoire depuis 2016 pour répondre à un souci de transparence, rend plus difficile l’obtention des signatures. Que pèse le maire d’une petite commune rurale face au chantage à la subvention d’un exécutif départemental ou régional ? Dire cela ne relève ni du fantasme ni de la mise en scène. Pour ceux qui en doutent, je tiens à leur disposition des témoignages qui font état de la pression qui peut s’exercer sur ces élus.

Il aurait été préférable de concevoir un système mixte – 200 parrainages d’élus locaux et 150 000 signatures de citoyens par exemple. Par ailleurs, ce texte arrive trop tard. Si l’on devait modifier les règles si peu de temps avant l’élection, les accusations de tripatouillage prendraient vite le dessus sur les discussions de fond et cela serait très préjudiciable à la confiance, déjà fortement écornée, que les Français accordent au monde politique. Votre texte mérite débat, mais je n’y serai pas favorable en l’état.

M. Éric Diard. Je considère aussi que ce texte mérite d’être débattu mais j’y suis défavorable. D’abord, je ne pense pas que le parrainage fasse partie de nos institutions car l’avis du peuple s’exprime, par essence, dans l’élection. Ensuite, j’estime que cette proposition de loi arrive un peu trop tard par rapport au calendrier électoral.

Surtout, je suis très attaché au parrainage des élus locaux et je crains que le mettre en concurrence avec celui de 150 000 citoyens ne soit un signal de défiance, à un moment où les maires ont l’impression de peser de moins en moins sur les événements, d’être aspirés par la technocratie et la centralisation.

J’ai connu un maire de droite qui parrainait à chaque élection Arlette Laguiller car il estimait que ce courant politique devait être représenté à la présidentielle. Nous avons la chance en France que bien des élus locaux soient sans étiquette et qu’ils ne craignent pas de soutenir des candidats aux opinions opposées.

Enfin, ce texte ne nous prémunit en rien de l’émergence d’un candidat communautaire, ou régionaliste, qui viendrait polluer le débat démocratique. Une telle éventualité m’inquiète beaucoup et je souhaiterais que le rapporteur nous éclaire sur ce point.

M. Alexis Corbière, rapporteur suppléant. Merci à tous pour cet échange d’arguments. Les différents courants d’opinion s’expriment de façon chimiquement pure dans chacune de vos interventions, et c’est tant mieux.

Ce texte n’est qu’une pièce dans une réflexion plus générale, critique à l’égard des institutions de la Ve République. La tâche que nous nous sommes assignée est de réformer les institutions, et ce n’est pas avec cette proposition de loi que nous pourrons le faire : il nous faut d’abord remporter la présidentielle ! Ne voyez donc pas dans cette proposition de loi la marque d’un présidentialisme, mais plutôt une première étape. La concentration extrême du pouvoir dans un personnage, le Président de la République, étouffe la démocratie et surplombe toute réflexion, à commencer par les deux textes que nous vous soumettons ce matin.

La question majeure, c’est celle de la souveraineté populaire. Qu’est-ce que la République, sinon le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple ? Elle doit demeurer le fil conducteur de toutes nos réflexions ; pourtant, peu d’entre vous ont évoqué le grand danger que représente l’abstention de masse. Nul système démocratique, a fortiori une république, ne peut laisser dans l’angle mort le fait que la majorité de ses citoyens ne veuillent plus voter, que ses élus locaux, dont je respecte le travail, ne représentent que 20 % du corps électoral. Moi-même qui vous parle et qui ai été élu avec 60 % des voix au second tour, je ne représente que 20 % des électeurs inscrits – 80 % des électeurs n’ont pas voté pour moi –, et comme beaucoup d’habitants n’ont pas le droit de vote dans ma circonscription, lorsque je marche dans la rue, je sais que neuf personnes sur dix que je croise ne m’ont pas donné leur suffrage. Et pourtant, je les représente. Chacun d’entre vous peut faire ce calcul, c’est un problème de fond qui nous concerne tous : huit personnes sur dix ne sont pas venues voter ou n’ont pas donné leur voix à celui ou celle qui les représente à l’Assemblée nationale. Cela ébranle toute notre vie démocratique, au point que nous devrions en être obsédés et ne cesser de nous demander comment fonder nos décisions, et nos institutions, sur une assise démocratique.

Certains ont parlé de candidatures « fantaisistes ». Qui sommes-nous pour décider qu’un candidat est fantaisiste ? J’ai entendu les noms de Jérôme Rodriguez, de Didier Raoult, de Cyril Hanouna : des études d’opinion montrent qu’ils obtiendraient beaucoup de voix, peut-être même plus que vous, qui les qualifiez de « fantaisistes ». Comment sortir de ça ? Non pas en usant de qualificatifs qui ne mènent à rien mais en s’attachant à ce que pense le peuple, aux raisons qui font que des gens se sentent représentés par telle ou telle personne. Cela ne nous empêche pas de trouver choquant qu’un candidat recueille autant de suffrages, de critiquer ses propositions, de penser qu’elles sont mauvaises pour le pays.

Sauf le respect que j’ai pour vous, nombre de propositions que j’entends ici me semblent parfois fantaisistes, tout comme je trouve fantaisistes les conditions dans lesquelles le chef de l’État a été élu ! Je rappelle que six mois ou un an avant le scrutin, il était quasiment inconnu. On peut s’interroger sur une telle trajectoire, sur la façon dont une personne apparaît ainsi dans le paysage politique. N’employons donc pas ce vocabulaire antirépublicain. Seul le peuple décide de ce qui est sérieux ou pas. À nous de faire en sorte que les débats concernent bien l’intérêt général.

Adrien Quatennens a eu raison de citer l’article 28 de la Constitution de 1793 : une génération ne peut obliger les générations suivantes à avoir la même Constitution, cela doit faire l’objet d’un débat permanent. Rien ne peut avoir lieu sans le peuple, seul lui doit décider : ce principe guidera les réponses que je vais vous faire.

Si, par malheur, vous ne reteniez pas ce texte, il constituera au moins un pas supplémentaire sur le long chemin du changement. Qu’on le veuille ou non, celui-ci aura lieu. Peut-être même se produira-t-il dans un esprit moins républicain que nous le souhaiterions. Le système électoral est en train de craquer, nos institutions sont de moins en moins représentatives. Les refonder, avec l’adhésion du peuple, est un enjeu majeur.

J’ai trouvé assez piquant que, par la voix de Pacôme Rupin, le groupe majoritaire critique le fait que cette proposition de loi arrive trop tard, alors qu’il aurait pu, s’il avait estimé ce sujet important, suggérer suffisamment tôt au Gouvernement un texte de même nature. De grâce, évitons de tels arguments ! Vous savez que nous faisons ce que nous pouvons, dans les limites imposées aux groupes de l’opposition.

J’ai noté la « gentillesse » avec laquelle notre camarade républicain a expliqué qu’il considérait ce texte inutilement clivant et détaché de la vie quotidienne des Français. Peut-être celui qui ne s’interroge pas sur le taux d’abstention et reste focalisé sur la minorité des concitoyens qui se déplacent dans les bureaux de vote est-il lui-même déconnecté du quotidien de nos concitoyens ? Quant au qualificatif de « populiste », je comprends bien l’aspect flétrissant qu’il peut revêtir, mais je m’enorgueillis par moments de me le voir attribuer car il a pour racine le mot « peuple » : s’il s’agit de faire entendre une volonté populaire, alors j’accepte de me faire traiter de « populiste » !

Monsieur Schellenberger, vous avez suggéré que les difficultés rencontrées lors du recueil des signatures ne sont que supposées et qu’elles sont surtout mises en scène. N’y voyez pas une astuce, c’est pourtant la réalité. Il m’est arrivé de travailler à réunir ces parrainages pour Jean-Luc Mélenchon ; notre collègue Emmanuelle Ménard, qui l’a sans doute fait pour madame Le Pen, peut aussi en témoigner : c’est une tâche très difficile, qui monopolise des forces militantes durant des mois et des mois. De ce point de vue, il est injuste que certains partis n’aient pas à se préoccuper de cette question, réglée immédiatement, quand d’autres doivent mobiliser durablement leurs militants.

J’ai pris ma voiture, j’ai rencontré des maires ruraux : comme l’a dit Éric Diard, il y a là des démocrates qui m’ont dit : « je ne suis pas d’accord avec vous, mais je veux que votre candidat puisse se présenter ». Heureusement, ils existent, mais pour combien de temps encore ? Les grands élus, les présidents des communautés d’agglomération aujourd’hui, font pression. Bien naïf celui qui pense que son soutien à un candidat ne risque pas de coûter à sa ville un conservatoire ou un gymnase ! Les mêmes élus qui permettent cette respiration démocratique vivent au quotidien la pression financière sur leurs faibles budgets. Alors j’ai aussi entendu des maires s’excuser, évoquer les problèmes qu’ils rencontreraient s’ils donnaient leur signature. Leur cœur leur dit de nous soutenir, mais ils ont peur des conséquences. Pour parler vulgairement, ça leur prend la tête !

Le respect que nous leur devons ne consisterait-il pas plutôt à les soulager de cette pression ? D’autant qu’ils n’ont pas été élus pour cela : personne ne s’est présenté devant les habitants de sa ville en annonçant à l’avance à qui il donnerait sa signature !

Je reviens à l’argument de Pacôme Rupin selon lequel ce texte arrive trop tard. À deux reprises déjà, la loi a été modifiée peu de temps avant le scrutin : je pense à la loi organique du 25 avril 2016, qui organisait la publicité des parrainages des élus locaux, et à la loi organique du 28 février 2012, relative au remboursement des dépenses de campagne – rien moins que secondaire.

Blandine Brocard a expliqué que jusqu’en 1976, les candidats devaient réunir seulement 100 parrainages d’élus. Le système a donc été changé et la barre relevée, ce qui a renforcé selon moi les difficultés. Les collègues qui s’indignent de ce que, grâce au système que nous proposons, certains candidats puissent désormais se présenter, devraient prendre l’affaire avec plus de sérieux.

Je veux répondre ici à Christophe Euzet qui, dans un style haut en couleurs, a tenu à adresser quelques gentillesses à Jean-Luc Mélenchon. Je ne doute pas qu’en retour, il vous salue avec la même chaleur, cher collègue… Vous avez souligné sa longévité, je le prends comme un hommage à son endroit car c’est une qualité en politique – ne vaut-il pas mieux faire confiance à des gens qui mènent des combats depuis des années plutôt qu’à des personnages tout juste apparus sur la scène politique ?

Si vous connaissiez bien le parcours de Jean-Luc Mélenchon, vous sauriez qu’alors que vous étiez encore étudiant, il avait déjà déposé un texte pour en finir avec la Ve République. Sans doute étiez-vous encore inattentif à son combat, vous pouvez aujourd’hui le rejoindre. Nous ne sommes pas dans des postures politiques, nous continuons de creuser un sillon. Ce texte est une pièce supplémentaire à la critique que nous dressons de ce système ultra-présidentiel.

Pascal Brindeau m’a peut-être mal compris et je m’excuse de ne pas avoir été suffisamment clair : le parrainage citoyen ne vient pas concurrencer le filtre des 500 signatures, lesquelles ont leur valeur, leur représentativité. Il s’agit d’un droit nouveau, qui permettrait aux citoyens de soutenir ceux qui ne se reconnaissent pas dans les partis traditionnels et dont ils considèrent qu’ils sont davantage en harmonie avec leurs convictions politiques. Les deux systèmes peuvent parfaitement coexister.

Comme Paul Molac, je trouve souhaitable qu’un homme tel que Jean Lassalle puisse continuer de représenter une certaine sensibilité politique et qu’à l’instar du patrimoine, des fromages ou des vins qu’il convient de préserver, il puisse encore figurer à la grande table démocratique qu’est la présidentielle, en y apportant la saveur particulière qui est la sienne.

C’est un droit nouveau que nous voulons donner au peuple. Il ne permettra pas de régler l’ensemble des problèmes, j’en suis bien conscient. Mais grâce au parrainage citoyen, des millions de concitoyens qui, à tort ou à raison – ce n’est pas à nous d’en juger –, ne se sentent pas représentés par les forces politiques dont nous émanons, estimeront que leur sensibilité est présente dans le débat démocratique. Cela invitera le peuple souverain à s’exprimer, plus nombreux, lors d’une élection aux incidences majeures sur son quotidien.

La Commission en vient à l’examen de l’article unique de la proposition de loi organique.

Article unique (art. 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du président de la République au suffrage universel) : Présentation citoyenne des candidats à la présidence de la République

La commission examine l’amendement de suppression CL2 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Il est difficile de résister à l’envie de voir l’un de mes amendements adoptés par la majorité, mais étant favorable au débat, je préfère le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission rejette l’amendement CL10 du rapporteur, visant à corriger une erreur matérielle, puis l’amendement rédactionnel CL5 du rapporteur.

Elle en vient aux amendements CL3 et CL4 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. L’amendement CL3 propose un système mixte, associant aux parrainages citoyens ceux de 200 élus. Cela ne ferait pas reposer l’entière responsabilité du parrainage sur les élus, mais permettrait de continuer à bénéficier de leur expérience. L’amendement CL4 a pour objet d’étendre les délais de présentation des candidatures. En effet, il paraît difficile d’officialiser une candidature, en se prévalant de 150 000 signatures de citoyens, seulement six semaines avant le premier tour de l’élection. Ce délai est trop tardif, notamment pour les candidats qui auraient déjà engagé des dépenses de campagne et qui se verraient finalement dans l’incapacité de déposer les 150 000 signatures nécessaires.

M. Alexis Corbière, rapporteur suppléant. Notre dispositif n’oppose pas les 500 signatures d’élus à la voie du parrainage citoyen. Je ne suis donc pas favorable à l’amendement CL3.

L’amendement CL4 vise à ce que les présentations des citoyens soient transmises au Conseil constitutionnel six mois avant le premier tour, alors que nous proposons de nous en tenir au délai existant de six semaines. Votre proposition risquerait de créer une inégalité. J’y suis donc défavorable.

M. Pascal Brindeau. À titre personnel, je soutiens l’amendement CL3, qui mêle le parrainage des élus à celui des citoyens. Vous dites que votre proposition laissait le choix entre l’un et l’autre, ce qui revient à mettre en concurrence, de facto, la légitimité des élus et celle du peuple. Fait-on le choix d’une démocratie représentative ou d’une démocratie directe et populaire ? C’est la question fondamentale. Vous êtes partisans d’une démocratie populaire totale. Pour ma part, je ne partage pas cette orientation philosophique. Le système mixte me semble de nature à répondre à votre objectif, qui vise à replacer le peuple au centre de la décision politique, à renouveler l’intérêt de nos concitoyens pour la politique et à accroître la participation.

M. Pacôme Rupin. Je suis défavorable au système mixte, car il introduirait une forme d’iniquité entre les candidats, les uns recueillant exclusivement des parrainages d’élus, les autres uniquement des parrainages de citoyens. Il faut appliquer la même règle à tous, ce qui n’empêche pas de prévoir qu’ils devront présenter des parrainages émanant tant des élus que des citoyens. À défaut, certains candidats se singulariseraient par leur étiquette.

Mme Emmanuelle Ménard. Le système que je propose est véritablement mixte : il n’oppose pas les parrainages, ni ne les fait cohabiter. Il me semble intéressant de faire une place à la démarche citoyenne tout en laissant aux élus la possibilité d’accorder un parrainage.

Par ailleurs, le contrôle de 150 000 parrainages de citoyens prendrait beaucoup plus de temps que celui des 500 parrainages d’élus. C’est pourquoi je propose d’allonger les délais de présentation.

M. Erwan Balanant. Le système que vous proposez, monsieur Corbière, a un défaut principal : il mettrait en présence, d’un côté, les candidats des citoyens, et, de l’autre, ceux des élus. La proposition de madame Ménard, en introduisant deux conditions cumulatives – un candidat devrait atteindre un certain nombre de parrainages d’élus et de parrainages de citoyens – constitue une piste de réflexion intéressante sur la réforme globale du dispositif actuel. Cette évolution permettrait l’expression de citoyens non élus, éventuellement non politisés, tout en garantissant le rôle des élus, conformément à la volonté du constituant. On n’adoptera pas ce texte car les délais sont trop courts, mais, dans le cadre de la réflexion que nous devons avoir sur le sujet, la proposition de madame Ménard est intéressante.

M. Alexis Corbière, rapporteur suppléant. Je ne mets pas en cause le fait qu’un candidat ayant réuni 500 signatures d’élus soit représentatif, mais ce système ne permet pas la représentation de certains courants de pensée. C’est pourquoi nous proposons une voie supplémentaire. Votre proposition est intéressante, mais elle exige 200 signatures d’élus : le soutien de 150 000 citoyens à une candidature ne suffirait pas. Je ne peux donc pas l’approuver complètement. Le dispositif des parrainages d’élus s’apparente aux listes de confiance sous le Consulat : on a le droit d’être élu à condition de faire partie d’un réservoir représentatif. Il ne s’agit pas d’opposer les deux systèmes mais il faut faire confiance au peuple : lorsqu’il se prononce par la voix de 150 000 de ses membres, il exprime quelque chose. Votre proposition constitue certes une petite avancée, dans la mesure où elle abaisse le nombre de parrainages d’élus requis, mais le dispositif que nous proposons est de nature à assurer une meilleure représentation des sensibilités politiques de notre pays.

M. Christophe Euzet. Chacun convient que les élus souffrent d’un manque de légitimité et qu’il faut prendre ce problème à bras-le-corps. Cela étant, vous dites que des courants de pensée doivent pouvoir s’exprimer à travers le suffrage. Or un courant de pensée n’a pas nécessairement un caractère politique. Le courant de pensée politique vise à rassembler un certain nombre d’idées pour construire un programme porteur pour tout le groupe social. Tous les courants de pensée n’ont pas vocation à être incarnés par l’élection de représentants. C’est pour cette raison que je suis en désaccord avec vous. Certes, ma prise de parole n’est pas moins fantaisiste que celle d’un autre mais elle a un objectif globalisant. Il s’agit de représenter le corps politique tout entier, et pas seulement un courant d’idées sur un sujet particulier.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine l’amendement CL6 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur suppléant. Cet amendement a pour objet de relever le seuil de représentativité nationale de trente à cinquante départements. C’est une manière de répondre à Éric Diard, qui se demandait comment éviter des candidatures qu’il nomme « communautaires » – terme qui pourrait d’ailleurs être discuté. En outre, monsieur Euzet, si un candidat est soutenu par des citoyens dans au moins cinquante départements, cela démontre qu’il a un projet politique global.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux amendements CL7 du rapporteur et CL1 de Mme Marie-France Lorho, en discussion commune.

Mme Marie-France Lorho. Cet amendement a pour objet de corriger ce qui me semble être une petite erreur formelle. En effet, le texte a pour objet de compléter le parrainage des élus prévu par l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 par un parrainage citoyen. La règle des 5 % prévue à l’alinéa 2 de la proposition de loi a vocation à s’appliquer au parrainage citoyen et non au parrainage des élus. Il convient donc de supprimer la référence aux élus, ces derniers n’étant pas concernés par le texte, et de la remplacer par une référence aux citoyens inscrits sur les listes électorales, ce qui correspond à l’esprit de la proposition de loi.

M. Alexis Corbière, rapporteur suppléant. C’est tout à fait juste, mais nous proposons de reformuler cette disposition par notre amendement CL7. Je vous demande de retirer votre amendement au profit de cette rédaction.

L’amendement CL1 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CL7.

La Commission rejette l’amendement rédactionnel CL8 du rapporteur.

Puis elle rejette l’amendement de clarification CL11 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL9 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur suppléant. Il vise à corriger une erreur matérielle.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle rejette l’article unique.

En conséquence, l’ensemble de la proposition de loi organique est rejeté.

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En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande de rejeter la proposition de loi organique instaurant une procédure de parrainages citoyens pour la candidature à l’élection présidentielle (n° 3478).

 


([1]) La commission, présidée par M. Lionel Jospin, était composée de Mmes Chantal Arens, Roselyne Bachelot-Narquin, Julie Benetti, Marie-Christine Lepetit, Wanda Mastor, Agnès Roblot-Troizier et Hélène Ruiz-Fabri et de MM. Jean-Claude Casanova, Jean-Pierre Duport, Jean-Louis Gallet, Ferdinand Mélin-Soucramanien et Dominique Rousseau.

([2]) Le taux d’abstention s’est élevé à 49,88 % aux élections européennes de 2019, aux niveaux records de 51,30 % et de 57,36 % respectivement aux premier et second tours des élections législatives de 2017, à 50,09 % et à 41,59 % aux premier et second tours des élections régionales de 2015, à 49,83 % et à 50,02 % aux premier et second tours des élections départementales de 2015 et à 55,25 % et à 58,60 % aux premier et second tours des élections municipales de 2020.

([3]) Pour un renouveau de la vie démocratique, Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, La Documentation française, novembre 2012.

([4]) Décision n° 2012-155 PDR du 21 juin 2012, Observations du Conseil constitutionnel sur l’élection présidentielle des 22 avril et 6 mai 2012.

([5]) Décision n° 74-33 PDR du 24 mai 1974, Déclaration du Conseil constitutionnel (à l’occasion de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle de 1974).

([6]) Op. cit. rapport Pour un renouveau démocratique.

([7]) Ibid.

([8]) Ou, en cas d’élection anticipée, au plus tard le troisième mardi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures.

([9]) Ibid.

([10]) Réponse du Ministère de l’intérieur à la question écrite n° 13417 de M. Jean Louis Masson, JO Sénat, 12 mars 2020.

([11]) Article 1er de l’ordonnance n° 58-1064 du 7 novembre 1958 portant loi organique relative à l’élection du président de la République.

([12]) Compte tenu de ses conditions d’adoption par la voie d’un référendum organisé sur le fondement de l’article 11 de la Constitution, cette loi présente la particularité de contenir à la fois des dispositions de valeur constitutionnelle (articles 1er et 2 modifiant les articles 6 et 7 de la Constitution de 1958) et des dispositions ayant valeur organique (articles 3 et 4).

([13]) Tel que modifié par la loi organique n° 76-528 du 18 juin 1976 modifiant la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel, qui a relevé le seuil des présentations de 100 à 500 après que 12 candidats se sont présentés en 1974.

([14]) Article 6 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001.

([15]) Dernier alinéa du I de l’article 3 de la loi n° 62-1292.

([16]) Op. cit. décision n° 74-33 PDR du 24 mai 1974.

([17]) Dans ses observations sur l’élection présidentielle de 2017, le Conseil constitutionnel avait émis des réserves sur ce dispositif, soulignant « la nécessité de n’envisager qu’avec les plus grandes précautions » la mise en œuvre de la transmission électronique des présentations, qui « devra[it], en tout état de cause, être entourée des garanties nécessaires ». Dans l’étude d’impact associée à la loi organique n° 2016-528 du 25 avril 2016, le Gouvernement a indiqué que « le retard pris dans le développement de l’identité numérique de niveau élevé rend impossible la sécurisation de la transmission des parrainages à une date compatible avec la prochaine échéance électorale ».

([18]) Décision n° 2012-233 QPC du 21 février 2012, Mme Marine Le Pen [Publication du nom et de la qualité des citoyens élus habilités à présenter un candidat à l’élection présidentielle].

([19]) Dans le cas où le nombre de présentations excédaient le seuil requis, il était procédé à un tirage au sort.

([20]) Le Conseil a renoncé à cette pratique à la suite des débats parlementaires au cours desquels des amendements prévoyant la publication de l’intégralité des présentateurs avaient été rejetés (AN, 21 mars 2006 et Sénat, 29 mars 2006).

([21]Op. cit. rapport Pour un renouveau démocratique.

([22]) Ibid.