N° 4195

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 mai 2021

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (n° 4090),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 19
 

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT et MOBILITÉ durables :

 

INFRASTRUCTURES ET SERVICES DE TRANSPORTS

 

CHARGE DE LA DETTE DE SNCF RÉSEAU REPRISE PAR L’ÉTAT

 

SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉS DE VOYAGEURS

 

CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS

 

 

Rapporteurs spéciaux : Mmes Marie Lebec et Zivka Park

 

Députées

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SOMMAIRE

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Page

SYNTHÈSE ET ChiffreS-clÉs

INTRODUCTION

PREMIÈRE PARTIE : REVUE DES DÉPENSES DE L’ANNÉE 2020

I. Le Programme 203 Infrastructures et services de transports : malgrÉ la crise, des crÉdits en augmentation

A. L’exÉcution du budget de l’AFITF portÉ par des mesures de compensation budgÉtaire

1. Des baisses de recettes compensées en loi de finances rectificative

2. Des dépenses en léger retrait par rapport à la prévision

3. Des restes à payer en diminution

4. La signature d’un contrat d’objectifs et de performance attendu depuis 2019

B. Les dÉpenses relatives aux infrastructures Ferroviaires

1. Les redevances d’accès au réseau ferroviaire portées par le plan de soutien aux opérateurs de fret ferroviaire

2. L’augmentation record des crédits dédiés à la régénération du réseau ferroviaire

3. La hausse des dépenses en faveur des infrastructures ferroviaires dans le cadre du plan de relance

4. Les crédits de la sécurité ferroviaire en sous-exécution

C. Les dÉpenses relatives aux infrastructures Routières

1. L’action 01 Routes-Développement

2. L’action 04 Routes-Entretien

D. Les dÉpenses consacrÉes aux transports collectifs

1. Le développement des infrastructures de transports collectifs en ÎledeFrance

2. Le budget de la Société du Grand Paris en hausse

E. Les dÉpenses destinÉes aux Voies navigables

F. Les dÉpenses en faveur des Infrastructures aÉroportuaires

II. Le Programme 355 Charge de la dette de SNCF RÉseau reprise par l’État

III. Le compte d’affectation spÉciale Services nationaux de transport conventionnÉs de voyageurs

A. des recettes en baisse en raison de la diminution des circulations

B. Des dÉpenses infÉrieures aux prÉvisions et en baisse

C. La clôture du compte d’affectation spÉciale

D. L’impact de la crise sanitaire sur le financement des trains d’Équilibre du territoire

IV. Le budget annexe Contrôle et exploitation aÉriens

A. Des baisses De recettes massives compensÉes par l’emprunt

1. Les redevances aériennes

2. Les taxes aériennes

3. Une hausse sans précédent de l’endettement

B. Des dÉpenses relativement proches de la prÉvision

1. Les dépenses de personnel

2. Les dépenses de fonctionnement

3. Les dépenses d’investissement

4. Les restes à payer

SECONDE PARTIE  THÈME D’ÉVALUATION : LES MOYENS AFFECTÉS AU VOLET « MOBILITÉ MULTIMODALE » DES CONTRATS DE PLAN ÉTAT-RÉGION 2015-2020

I. Les moyens prÉvus pour les infrastructures de transport dans les contrats de plan État-rÉgion sont en hausse

A. Une prÉvision de 23 milliards d’euros, dont 6,8 milliards d’euros pour l’État

B. un rÉajustement à hauteur de 24 milliards d’euros, dont 7,2 milliards d’euros pour l’État

C. La contractualisation en outre-mer dans les contrats de convergence et de transformation 20192022

D. Les engagements de l’État au titre des CPER sont en hausse

E. Des orientations stratÉgiques dÉcidÉes par les rÉgions en concertation avec l’État

II. L’État d’avancement du volet « mobilitÉ multimodale » des cper : des retards d’exÉcution progressivement rattrapÉs

A. Des retards importants en dÉbut de programmation

1. Un démarrage difficile dans le contexte de la fusion des régions

2. Une accélération des engagements portée par la loi d’orientation des mobilités

3. La prolongation des CPER jusqu’en 2022

4. Le rechargement des CPER via le plan de relance 2020-2022

B. Le taux d’avancement des CPER fin 2020

1. Le taux d’exécution fin 2020

2. Le cas particulier des CPER outre-mer

3. L’exécution des CPER par les autres cofinanceurs : un manque de données qui empêche toute comparaison

a. Le taux d’engagement des régions

b. L’exécution des crédits de VNF

c. L’exécution des crédits du volet routier

C. Un taux d’exÉcution comparable aux gÉnÉrations prÉcÉdentes grÂce aux crÉdits du plan de relance

D. Il est difficile d’estimer l’avancement rÉel des cper

1. Il n’existe pas d’indicateurs de performance spécifiques aux CPER

2. Des limites méthodologiques qui freinent toute évaluation

III. L’Évaluation des CPER : Un dÉcalage entre la contrainte budgÉtaire et les ambitions portÉes dans les CPER

A. Une contrainte budgÉtaire forte en dÉbut de pÉriode mais dessERrÉe par la loi d’orientation des mobilitÉs

1. Le manque de ressources structurel de l’AFITF

2. Des « découpages » malvenus

3. Les avancées importantes permises par la loi d’orientation des mobilités

4. Des responsabilités financières insuffisamment définies

5. La question de la participation de SNCF Réseau aux CPER

B. Le manque de maturitÉ de certains projets face aux alÉas d’exÉcution

1. Certains projets inscrits dans les CPER manquaient de maturité

2. Les aléas survenus en cours d’exécution entraînent une redéfinition des priorités

3. Le cas particulier des transports collectifs en Île-de-France

4. Des outils de suivi et de pilotage insuffisants

IV. Les CPER demeurent pertinents À condition de mieux articuler les moyens avec les besoins

A. La contractualisation des investissements demeure un outil indispensable

B. La nÉcessitÉ de RÉconcilier les besoins et les moyens

1. Renforcer la cohérence entre les moyens et les besoins

2. Mieux sélectionner les projets inscrits dans les CPER

3. Renforcer les outils de suivi

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES  PAR LES RAPPORTEURES SPÉCIALES


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SYNTHÈSE ET ChiffreS-clÉs

 La mission Écologie, développement et mobilité durables

L’exécution du programme 203 s’élève à 6,6 milliards d’euros en AE et 5,9 milliards d’euros en CP. Elle excède les prévisions de la loi de finances initiale (+ 20 % en AE et + 3 % en CP) en raison d’importantes ouvertures de crédits dans les lois de finances rectificatives. Les fonds de concours représentent 73 % des CP exécutés en 2020, dont 1,58 milliard d’euros pour l’AFITF.

ExÉcution des programmes de la mission
Écologie, dÉveloppement et mobilitÉ durables en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI

Exécution

Écart

LFI

Exécution

Écart

P203 Infrastructures et services de transports

5 481,04

6 569,20

+ 1 088,16

5 716,38

5 909,05

+ 192,67

P355 Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État

408

400

– 8

408

400

– 8

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance de la mission pour 2020.

Les pertes de recettes de l’AFITF, notamment liées à la taxe de solidarité sur les billets d’avion, ont été compensées en LFR 3 (+ 250 millions d’euros) et en LFR 4. L’agence a maintenu un niveau de paiement de 2,8 milliards d’euros.

Les dépenses de l’État au profit du réseau ferroviaire augmentent avec notamment 762 millions d’euros pour le dividende de SNCF reversé par l’État à SNCF Réseau et un plan de soutien au fret de 65 millions d’euros.

Sur le programme 355, le coût de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État atteint 400 millions d’euros, en retrait par rapport à la prévision.

 Le CAS Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

Pour la dernière année du CAS, les recettes (313 millions d’euros) sont conformes mais les dépenses (276 millions d’euros) sont inférieures à la prévision en raison de la baisse des circulations des trains d’équilibre du territoire.

 Le budget annexe Contrôle et exploitation aériens

En 2020, le BACEA a été confronté à des pertes de recettes massives
(– 1,24 milliard d’euros) dues à l’effondrement du trafic aérien et aux mesures de soutien mises en place au profit des compagnies aériennes (report du paiement des taxes et redevances aériennes). Les baisses de recettes ont été compensées par une augmentation des emprunts (+ 1,2 milliard d’euros) et par des économies de dépense. L’endettement du budget annexe s’établit à 1,8 milliard d’euros.

 

ExÉcution du budget annexe Contrôle et exploitation aÉriens en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI

Crédits ouverts

Exécution

Écart

LFI

Crédits ouverts

Exécution

Écart

P613 – Soutien aux prestations de l’aviation civile

1 501,06

  484,9

1 474,49

– 1,8 %

1 501,06

1 483,5

1 473,72

– 1,8 %

P612 – Navigation aérienne

595,42

636,9

580,33

– 2,5 %

595,42

630,4

575,66

– 3,3 %

P614 – Transports aériens, surveillance et certification

44,49

48,7

44,54

+ 0,1 %

44,49

47,3

39,44

– 11,4 %

Total

2 140,97

2 170,50

2 099,35

 1,9 %

2 140,97

2 161,20

2 088,82

 2,4 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du budget annexe pour 2020.

Malgré la crise, le niveau des dépenses est proche des plafonds de paiement. Les crédits exécutés atteignent 2,1 milliards d’euros en AE et en CP. Les crédits de personnel représentent 56 % de la dépense mais sont en baisse par rapport à 2019 (– 1 %). La DGAC entend poursuivre ses investissements dans la modernisation de la navigation aérienne afin de préparer la reprise.

 Les moyens affectés au volet « Mobilité » des CPER 2015-2020

Les CPER sont un outil indispensable pour le développement des infrastructures de transport et l’aménagement du territoire. Sur la période 2015‑2020, l’État a prévu de mobiliser 7,2 milliards d’euros, plus que dans les CPER 2007‑2014 ou dans les CPER 2000-2006.

En début d’exécution, les CPER ont fait l’objet de retards en raison de la faiblesse des ressources de l’AFITF. Néanmoins, l’augmentation du budget dédié aux transports voté dans la loi d’orientation des mobilités a permis d’accroître les moyens engagés par l’État dans les CPER. En outre, le plan de relance voté en 2020 contribue également à l’accélération des engagements.

Fin 2020, l’État a engagé près de 5 milliards d’euros pour les CPER, soit un taux d’engagement de 70 %. Avec le plan de relance, le taux d’avancement atteindra 90 % fin 2022 et sera supérieur à celui des CPER précédents.

Les retards des CPER résultent aussi d’une programmation parfois trop ambitieuse, avec des projets incompatibles avec les moyens disponibles ou des projets manquant de maturité. Les rapporteures recommandent d’aligner la programmation des CPER avec la programmation pluriannuelle des investissements en matière d’infrastructures de transports et de définir les projets prioritaires de manière cohérente avec les moyens disponibles sur la période retenue.

La durée des CPER est trop courte. Les CPER 2015-2020 ont dû être prolongés jusqu’en 2022, comme les CPER 2007‑2013 l’avaient été en 2014. Les rapporteures recommandent d’allonger la durée des contrats à sept ans minimum.

Enfin, il convient de renforcer les outils de suivi et d’évaluation. Les seules données disponibles concernent les crédits de l’État, mais il est difficile de suivre les moyens engagés par les régions et les autres cofinanceurs.


—  1  —

   INTRODUCTION

Le présent rapport analyse les crédits de l’État consacrés aux infrastructures et services de transports dans le cadre du Printemps de l’évaluation 2021. Il analyse les moyens de l’État consacrés au transport routier, ferroviaire et fluvial ainsi qu’au transport aérien, ce qui inclut :

– les investissements de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFTIF), dont la trajectoire budgétaire est prévue dans la loi d’orientation des mobilités ([1]) ;

– le programme 203 Infrastructures et services de transports ([2]) et le programme 355 Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État de la mission Écologie, développement et mobilité durables, dont la gestion est assurée par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) ;

– le compte d’affectation spéciale Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs, supprimé à compter du 1er janvier 2021 ;

– le budget annexe Contrôle et exploitation aériens, géré par la direction générale de l’aviation civile (DGAC).

La rÉpartition des crÉdits de paiement
destinÉs aux infrastructures et services de transport en 2020

Source : commission des finances.

La seconde partie du rapport contient par ailleurs une analyse du thème d’évaluation choisi par les rapporteures spéciales : les moyens affectés au volet « Mobilité multimodale » des contrats de plan État-région 2015-2020.


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   PREMIÈRE PARTIE : REVUE DES DÉPENSES DE L’ANNÉE 2020

Le financement des infrastructures et services de transports terrestres repose principalement sur les crédits de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et sur ceux du programme 203 Infrastructures et services de transports de la mission Écologie, développement et mobilité durables.

Le financement des infrastructures et services de transport aérien est, pour une large part, financé par le budget annexe Contrôle et exploitation aériens, dont l’exécution a été fortement affectée par l’effondrement du trafic aérien.

L’année 2020 constitue le premier exercice du nouveau programme 355 Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État de la mission Écologie et le dernier exercice du compte d’affectation spéciale (CAS) Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs, supprimé à compter du 1er janvier 2021.

I.   Le Programme 203 Infrastructures et services de transports : malgrÉ la crise, des crÉdits en augmentation

En 2020, l’exécution du programme 203 s’élève à 6,57 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 5,91 milliards d’euros en crédits de paiement (CP). Elle est supérieure aux crédits votés en loi de finances initiale ([3]) (+ 19,9 % en AE et + 3,4 %).

 Un niveau de consommation des crédits élevé

L’exercice 2020 a été marqué par des ouvertures de crédits largement supérieures aux crédits prévus en raison des mesures prises pour amortir les effets de la crise liée à l’épidémie de la covid-19. Les lois de finances rectificatives ont ouvert 270 millions d’euros de crédits supplémentaires, dont 250 millions d’euros pour compenser la baisse des recettes de l’Agence de financement des infrastructures de France (AFITF). En outre, 4,05 milliards d’euros ont été rattachés au programme 203 consécutivement à la recapitalisation du groupe SNCF décidée dans le cadre du plan de relance (les crédits n’ont pas été utilisés en 2020 et sont intégralement reportés en 2021).

Le niveau de consommation des crédits s’établit à 58 % des crédits ouverts. Toutefois, en neutralisant l’opération de recapitalisation du groupe SNCF, le taux d’exécution des crédits atteint 98 % en AE et 91 % en CP (contre, respectivement, 99,1 % et 98,9 % en 2019). La sous-exécution en CP résulte d’un ralentissement de l’activité et des investissements, notamment sur les opérations routières, dû à la crise sanitaire (les moindres dépenses résultant du confinement sont évaluées à 310 millions d’euros).

ExÉcution des crÉdits du programme 203 en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2020

Exécution 2020

Écart

LFI 2020

Exécution 2020

Écart

Action 01 – Routes – Développement

608

867,97

+ 43 %

671,18

625,15

– 7 %

Action 04 – Routes – Entretien

853,13

866,75

+ 1,6 %

869,91

802,12

– 8 %

Action 41 – Ferroviaire

3 263,40

3 604,57

+ 10,5 %

3 294,00

3 460,18

+ 5 %

Action 42 – Voies navigables

251,87

251,45

– 0,2 %

252,27

251,85

– 0,2 %

Action 43 – Ports

132,41

190,15

+ 44 %

143,63

137,77

– 4 %

Action 44 – Transports collectifs

211,65

410,99

+ 94 %

333,38

245,80

– 26 %

Action 45 – Transports combinés

48,11

34,92

– 27 %

38,11

34,51

– 9,5 %

Action 47 – Fonctions support

31,25

30,51

– 2,4 %

31,25

29,99

– 4 %

Action 50 – Transport routier

5,64

5,69

+ 0,8 %

5,64

5,76

+ 2 %

Action 51 – Sécurité ferroviaire

40,00

31,75

– 20,6 %

40,18

35,30

– 12 %

Action 52 – Transport aérien

35,59

24,44

– 31 %

36,85

30,63

– 17 %

Action 53 – Dotation exceptionnelle à l’AFITF

0,0

250,0

– 

0,0

250,0

– 

Total

5 481,04

6 569,20

+ 20 %

5 716,38

5 909,05

+ 3,4 %

Source : commission des finances d’après le rapport annuel de performance du programme 203 pour l’année 2020.

L’exécution du programme 203 est conforme à la prévision en raison de l’absence d’annulation de crédits, de la libération de la réserve de précaution et de crédits supplémentaire ouverts dans les lois de finances rectificatives.

 Une progression des dépenses par rapport aux années précédentes

Les CP exécutés augmentent de 13 % par rapport à 2019. Outre les 250 millions d’euros supplémentaires dont a pu bénéficier l’AFITF, les fonds de concours sont en forte augmentation (+ 22 %) en raison d’une augmentation du dividende du groupe SNCF reversée par l’État à SNCF Réseau pour la régénération du réseau ferroviaire (762 millions d’euros contre une prévision de 662 millions d’euros).

Évolution des crÉdits de paiement exÉcutÉs du programme 203

(en millions d’euros)

 

Exécution
2018

Exécution
2019

Exécution
2020

Évolution
2019-2020

Crédits budgétaires

3 085

3 196

3 426

+ 230

+ 7 %

Fonds de concours

1 988 ([4])

2 026

2 483

+ 457

+ 23 %

 dont FDC AFITF

1 364

1 305

1 576

+ 271

+ 21 %

 dont FDC SNCF

274

537

762

+ 225

+ 42 %

 dont FDC CT

350

184

145

 39

 21 %

Total

5 073

5 222

5 909

+ 687

+ 13 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du programme 203.

 Les fonds de concours représentent 72,5 % des crédits en 2020

La part des fonds de concours augmente fortement, puisqu’ils représentent 72,5 % des CP exécutés en 2020 (contre 62,4 % en 2019). Les fonds de concours de l’AFITF au bénéfice du programme 203 atteignent 1,58 milliard d’euros, soit 64 % du total des fonds de concours (hors opération de recapitalisation du groupe SNCF).

Il convient de souligner que, conformément aux recommandations émises dans les précédents rapports spéciaux, le suivi des fonds de concours s’est amélioré grâce à un usage des tranches fonctionnelles prévues dans Chorus. La Cour des comptes n’a pas reconduit sa recommandation récurrente en la matière.

 Près de 60 % des dépenses ont bénéficié au transport ferroviaire

RÉpartition des paiements du programme 203 en 2020

Source : commission des finances d’après le rapport annuel de performance du programme 203 pour 2020.

 Des restes à payer et charges à payer à surveiller

Les charges à payer du programme 203 s’élèvent à 102,9 millions d’euros en 2020, en forte augmentation par rapport à 2019 (+ 64 %). Ce sont les charges à payer automatiques qui progressent le plus (+ 46 millions d’euros). Elles correspondent aux services faits certifiés mais non payés au 31 décembre de l’année. La Cour des comptes n’y voit pas d’alerte majeure. L’évolution constatée est principalement liée à l’activité en fin d’année (demandes faites après la date de fin de gestion, pièces de dossier manquantes, échéances de paiement début janvier).

Les restes à payer du programme 203 s’élèvent à 4,57 milliards d’euros en 2020. Ils augmentent nettement par rapport à 2019 (3,91 milliards d’euros, soit une augmentation de + 17 %) et sont supérieurs à leur pic de 2017 (4,19 milliards d’euros). Leur montant est supérieur au niveau des CP ouverts en loi de finances initiale atteint 144 % (contre 116 % en 2019).

 Des dépenses fiscales en hausse

Les dépenses fiscales du programme 203 atteignent 2,30 milliards d’euros. Elles augmentent de 322 millions d’euros par rapport à 2019. La majorité de cette hausse se concentre sur le remboursement d’une fraction de la taxe intérieure de consommation sur le gazole utilisé pour le transport routier de marchandises supérieur à 7,5 tonnes (+ 292 millions d’euros).

À ce titre, les rapporteures spéciales soulignent l’orientation ambitieuse donnée dans le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique ([5]) visant à aligner la tarification du gazole routier sur le tarif normal de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable au gazole d’ici le 1er janvier 2030.

Elles rappellent qu’il est indispensable de continuer à soutenir le transport routier de marchandises – dont la part modale est de 89 % et devrait rester très largement majoritaire (75 à 80 %) dans la prochaine décennie – pour accélérer la transition vers des camions plus propres répondant aux nouvelles normes « euro 6 » et « euro 6 + » et, à moyen terme, vers des camions électriques ou à hydrogène.

 


A.   L’exÉcution du budget de l’AFITF portÉ par des mesures de compensation budgÉtaire

Le financement des infrastructures de transports par l’État repose en grande partie sur l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). L’ouverture de 250 millions d’euros supplémentaires a permis de compenser les pertes de recettes liées notamment à la taxe de solidarité sur les billets d’avion.

1.   Des baisses de recettes compensées en loi de finances rectificative

L’année 2020 était la première année d’application de la loi d’orientation des mobilités, qui prévoyait une hausse des dépenses de l’AFITF à hauteur de 13,4 milliards d’euros entre 2019 et 2023, soit 2,7 milliards d’euros par an, puis 14,3 milliards d’euros entre 2023-2027, soit 2,9 milliards d’euros par an.

Évolution des dÉpenses de l’AFITF
prÉvue dans la loi d’orientation des mobilitÉs

(en millions d’euros)

 

2019

2020

2021

2022

2023

Dépenses totales

2 683

2 982

2 687

2 580

2 780

Source : article 2 de la loi d’orientation des mobilités.

En conséquence, la loi de finances pour 2020 ([6]) avait prévu pour l’AFITF des recettes à hauteur de 2,982 milliards d’euros, en hausse de 500 millions d’euros par rapport à 2019. Cette augmentation résultait de l’affectation à l’agence de recettes de TICPE supplémentaires (pour un total de 1,59 milliard d’euros) et d’un surplus de taxe de solidarité sur les billets d’avion (230 millions d’euros).

Néanmoins, la crise sanitaire est venue fragiliser les recettes de l’agence. En raison de l’effondrement du trafic aérien, les recettes de la taxe de solidarité sur les billets d’avion n’ont pu être perçues (– 230 millions d’euros) ([7]). La baisse du trafic routier et autoroutier a également entraîné une diminution des recettes attendues de la taxe d’aménagement du territoire (finalement limitée à – 93 millions d’euros) et des amendes radars.

La baisse des recettes de l’AFITF a nécessité des mesures de compensation budgétaire. Ainsi, la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([8]) a prévu une dotation exceptionnelle de 250 millions d’euros inscrite sur l’action 53 du programme 203. La quatrième loi de finances rectificative ([9]) a également limité la baisse du produit tiré des amendes radars en rééquilibrant la ventilation des recettes entre bénéficiaires du CAS Contrôle de la circulation et du stationnement routiers.

ExÉcution des Recettes de l’AFITF en 2020

(en millions d’euros)

 

Prévision

Exécution

Écart

TICPE

1 586,7

1 586,7

– 

TAT

551,7

458,9

– 17 %

Redevance domaniale

360,0

365,2

+ 1,4 %

Taxe de solidarité sur les billets d’avion

230,0

0,0

– 100 %

Amendes radars

192,9

167,0

– 13 %

Contribution exceptionnelle SCA

60,3

57,6

– 4 %

Dotation budgétaire exceptionnelle (P203)

0,0

250,0

– 

Produits divers

0,0

3,0

– 

Total

2 981,6

2 888,4

 3 %

Source : commission des finances d’après le rapport d’activité de l’AFITF pour 2020.

Les rapporteures spéciales tiennent à saluer la réactivité du Gouvernement et les mesures de compensation, qu’elles avaient appelées de leurs vœux, qui ont permis à l’AFITF de maintenir la trajectoire d’investissement prévue dans la loi d’orientation des mobilités. Sur l’ensemble de l’année, les recettes de l’AFITF atteignent 2,89 milliards d’euros, en recul de seulement 3 % par rapport à la prévision et en augmentation de 17 % par rapport à 2019.

Évolution des Recettes de l’AFITF

(en millions d’euros)

 

Exécution 
2018

Exécution
 2019

Exécution 
2020

Évolution 2019-2020

TICPE

1 028

1 206

1 587

+ 32 %

TAT

472

523

459

– 12 %

Redevance domaniale

347

357

365

+ 2 %

Amendes radars

248

228

167

– 27 %

Contribution exceptionnelle SCA

100

60

58

– 4 %

Taxe de solidarité sur les billets d’avion

0

Recettes diverses

35

89

3

Dotation budgétaire exceptionnelle

250

Total

2 230

2 463

2 888

+ 17 %

Source : commission des finances d’après le rapport d’activité de l’AFITF pour 2020.

La TICPE demeure la principale recette de l’AFITF, avec un produit de 1,59 milliard d’euros, en hausse de 32 % par rapport à 2019. En plus de représenter 55 % des recettes de l’agence, il s’agit surtout de la ressource la plus fiable. Auparavant versée en fin d’année, elle a été, en 2020, versée à intervalles réguliers tout au long de l’année. Cela a grandement facilité la gestion par l’AFITF de sa trésorerie, sans pour autant coûter plus cher à l’État. Ce mode de fonctionnement n’ayant été renouvelé pour 2021 qu’à titre exceptionnel, les rapporteures appellent à ce qu’il soit pérennisé.

2.   Des dépenses en léger retrait par rapport à la prévision

La crise sanitaire a conduit l’AFITF à adopter six budgets rectificatifs en cours d’année. Grâce aux mesures de compensation budgétaire, l’agence a pu assurer des engagements à hauteur de 2,59 milliards d’euros, en hausse de 27 % par rapport à la prévision. Elle est également parvenue à maintenir un niveau de paiements de 2,82 milliards d’euros inférieur de seulement 5 % à la prévision.

ExÉcution des DÉpenses de l’AFITF en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

Prévision

Exécution

Écart

Prévision

Exécution

Écart

Routes

1 020

1 208

+ 18 %

1 102

1 080

– 2 %

Ferroviaire

417

550

+ 32 %

1 340

1 275

– 5 %

Fluvial

137

137

– 

130

128

– 1,5 %

Maritime

38

68

+ 79 %

46

50

+ 9 %

Transports collectifs en d’agglomération

338

551

+ 63 %

303

272

– 10 %

Mobilités cyclables

47

45

– 4 %

24

4

– 83 %

Divers

42

35

– 17 %

37

14

– 62 %

Total

2 039

2 594

+ 27 %

2 982

2 823

 5 %

Source : commission des finances d’après le rapport d’activité de l’AFITF pour 2020.

Le niveau élevé des AE résulte de la mise en œuvre du plan de relance, dès la fin de gestion 2020, à hauteur de 430 millions d’euros (85 millions d’euros pour le routier, 85 millions pour le ferroviaire, 30 millions d’euros pour les ports et 230 millions d’euros pour les transports collectifs en Île-de-France). Leur diminution par rapport à l’exercice précédent (– 26 %) résulte de l’engagement exceptionnel de 1,18 milliard réalisé en 2019 au titre du canal Seine Nord Europe.

ExÉcution des dÉpenses de l’AFITF en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2018

2019

2020

Évolution 
2019-2020

2018

2019

2020

Évolution 
2019-2020

Routes

774

836

1 208

+ 45 %

942

946

1 080

+ 14 %

Ferroviaire

1 291

1 066

550

– 48 %

902

1 081

1 275

+ 18 %

Fluvial

81

1 179

137

– 88 %

87

103

128

+ 24 %

Maritime

37

42

68

+ 62 %

49

39

50

+ 28 %

Transports collectifs en d’agglomération

274

332

551

+ 66 %

246

279

272

– 2,5 %

Mobilités cyclables

0

29

45

+ 55 %

0

1

4

+ 300 %

Divers

20

23

35

+ 52 %

2 346

17

14

– 18 %

Total

2 477

3 507

2 594

 26 %

4 572

2 466

2 823

+ 15 %

Source : commission des finances d’après le rapport d’activité de l’AFITF pour 2020.

Les CP sont en hausse de 15 % par rapport à 2019. Ils sont concentrés sur le volet ferroviaire (45 %) et sur le volet routier (38 %). L’exécution des CP est conforme à la prévision pour les routes, le ferroviaire et le fluvial. Toutefois, on observe une sous-exécution pour les transports collectifs et les mobilités cyclables en raison du ralentissement des chantiers et des reports de dépense dus à la crise sanitaire.

RÉpartition des crÉdits de paiement de l’AFITF en 2020

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après le rapport d’activité de l’AFITF pour 2020.

Les fonds de concours de l’AFITF ont atteint 2,31 milliards d’euros en AE et 1,60 milliard d’euros en CP. Comme les années précédentes, ils demeurent prédominants (89 % des AE et 57 % des CP). Ils se concentrent sur le programme 203 Infrastructures et services de transports de la mission Écologie, développement et mobilité durables (1,58 milliard d’euros).

RÉpartition des fonds de concours de l’AFITF en 2020

(en millions d’euros)

Mission bénéficiaire

Programme bénéficiaire

AE

CP

Écologie, développement et mobilité durables

P203 Infrastructures et services de transports

2 277

1 580

P113 Paysages, eau et biodiversité

5

5

Administration générale et territoriale de l’État

P162 Interventions territoriales de l’État

28

11

Total

2 310

1 596

Source : commission des finances d’après le rapport d’activité de l’AFITF pour 2020.

Les paiements directs aux maîtres d’ouvrage ont atteint 284 millions d’euros en AE et 1,23 milliard d’euros en CP. Ils concernent principalement les paiements aux régions et à SNCF Voyageurs au titre des trains d’équilibre du territoire (431 millions d’euros), les paiements à SNCF Réseau pour les lignes à grande vitesse (324 millions d’euros) et la régénération du réseau fluvial (114 millions d’euros).

3.   Des restes à payer en diminution

Le ralentissement des appels de fonds a permis à l’AFITF d’honorer l’intégralité des demandes de paiement qui lui étaient adressées tout en dégageant un solde positif de 66 millions d’euros. La situation financière de l’AFITF s’en trouve largement assainie, puisque les charges à payer ne représentent plus que 2,1 millions d’euros (contre 123 millions d’euros en 2019).

Les restes à payer s’établissent à 12,17 milliards d’euros fin 2020. Bien qu’ils soient en recul de 370 millions d’euros par rapport à 2019, ils demeurent à un niveau élevé. En conséquence, la nécessité de doter l’AFITF de ressources plus fiables et résilientes demeure d’actualité.

4.   La signature d’un contrat d’objectifs et de performance attendu depuis 2019

Les rapporteures tiennent à saluer la signature, le 14 avril 2021, d’un contrat d’objectifs et de performance entre l’AFITF et ses deux ministères de tutelle, le ministère de la transition écologique et le ministère de l’économie et des finances. Annoncé depuis 2019, ce contrat constitue une réelle avancée et vient confirmer l’autonomie croissante de l’agence.

Le contrat est signé pour 2019-2023, soit la période couverte par la loi d’orientation des mobilités. Il s’agit pour l’AFITF de mettre en œuvre la trajectoire financière prévue par la loi et la partie du plan de relance qui la concerne en s’appuyant sur quatre axes stratégiques : veiller à la soutenabilité budgétaire des dépenses ; assurer l’efficacité des paiements ; rendre compte de l’origine et de la destination des financements de l’agence et mettre en œuvre une gestion responsable.

 


B.   Les dÉpenses relatives aux infrastructures Ferroviaires

Les financements versés par l’État à SNCF Réseau sur l’action 41 Ferroviaire augmentent de 16 % par rapport à 2019, avec 225 millions d’euros supplémentaires pour la régénération du réseau ferroviaire, conformément aux priorités fixées dans la loi d’orientation des mobilités.

Évolution des crÉdits destinÉs au financement du rÉseau ferroviaire

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Exécution
2018

Exécution
2019

Exécution
2020

Évolution
2019-2020

Exécution
2018

Exécution
2019

Exécution
2020

Évolution
2019-2020

Action 41 – Ferroviaire

2 828,3

3 093,5

3 604,6

+ 16,5 %

2 800,4

3 095,3

3 460,2

+ 12 %

Action 51 – Sécurité ferroviaire

24,3

40,5

31,8

– 21,5 %

34,3

32,1

35,3

+ 10 %

Total

2 852,7

3 134,0

3 636,3

+ 16 %

2 834,7

3 127,4

3 495,5

+ 12 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du programme 203.

1.   Les redevances d’accès au réseau ferroviaire portées par le plan de soutien aux opérateurs de fret ferroviaire

Les redevances d’accès au réseau ferroviaire versés par l’État à SNCF Réseau sont en hausse, avec un total de 2,44 milliards d’euros en 2020, dont 2,03 milliards d’euros pour les trains express régionaux (TER), 253 millions d’euros pour les trains d’équilibre du territoire (TET) et 149 millions d’euros pour le financement de la compensation fret. Le concours fret, qui servait de variable d’ajustement budgétaire et n’avait pas été versé en 2019, a été supprimé en 2020.

Les concours de l’État À SNCF RÉseau

(en millions d’euros)

 

Exécution
2018

Exécution
2019

Exécution
 2020

Évolution
2019-2020

Redevance d’accès TER

1 668,4

1 697,5

2 034,9

+ 20 %

Redevance d’accès TET

527,7

536,9

253,1

– 53 %

Compensation fret ferroviaire

76,7

97,9

149,0

+ 52 %

Subvention SNCF Réseau (fret)

10,0

0

0

– 

Total

2 282,7

2 332,3

2 437,0

+ 4,5 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du programme 203.

Bien qu’il s’agisse de dépenses obligatoires, les concours de l’État à SNCF Réseau n’ont pas été exonérés de réserve de précaution (4 % pour le hors titre 2 en 2020). Toutefois, la réserve a été en partie déportée vers le programme 198 Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres de la mission Régimes sociaux et de retraite (52 millions d’euros) et vers le CAS Services nationaux de transport conventionné de voyageurs (16 millions d’euros).

Le montant de la compensation fret est supérieur à la prévision (+ 39 millions d’euros) en raison du plan de soutien aux opérateurs de fret ferroviaire. L’État a pris en charge les péages dus par les opérateurs pour l’utilisation du réseau ferroviaire entre juillet et décembre 2020, pour un coût de 65 millions d’euros. La mesure a nécessité un dégel de la réserve de précaution du programme 203 (52,5 millions d’euros) ainsi que l’ouverture de 21,8 millions d’euros d’AE et de 20,4 millions d’euros de CP supplémentaires dans la quatrième loi de finances rectificative pour 2020.

2.   L’augmentation record des crédits dédiés à la régénération du réseau ferroviaire

Depuis 2017 ([10]), les dividendes de la SNCF sont reversés par l’État à SNCF Réseau, par le biais d’un fonds de concours transitant par l’action 41, pour financer la régénération du réseau ferroviaire. Évaluée à 662 millions d’euros dans la loi de finances pour 2020, cette subvention a finalement été réévaluée à 762 millions d’euros (+ 15 %). Elle augmente de 42 % par rapport à 2019 et atteint ainsi un niveau inédit depuis la mise en place du dispositif.

Évolution de la subvention versÉe par l’État À SNCF RÉseau
pour la rÉgÉnÉration du rÉseau ferroviaire

(en millions d’euros)

Exécution 2017

Exécution 2018

Exécution 2019

Exécution 2020

LFI 2021

295,7

274

537

762

192

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du programme 203.

Toutefois, compte tenu des effets de la crise sanitaire sur l’activité du groupe SNCF en 2020, il faut s’attendre à une diminution importante de ces crédits en 2021 (192 millions d’euros sont prévus en loi de finances pour 2021).

Par ailleurs, 4,05 milliards d’euros ont été versés à ce même fonds de concours par la SNCF pour être reversés à SNCF Réseau. Ce versement est consécutif à la recapitalisation du groupe décidée dans le cadre du plan de relance et portée par le CAS Participations financières de l’État. Les crédits n’ont pas été utilisés en 2020 et sont intégralement reportés en 2021.

3.   La hausse des dépenses en faveur des infrastructures ferroviaires dans le cadre du plan de relance

Les crédits dédiés aux infrastructures ferroviaires s’établissent à 405,6 millions d’euros en AE et 261,2 millions d’euros en CP. Ils correspondent aux financements issus de l’AFITF et destinés aux contrats de plan État-région (171 millions d’euros) ainsi qu’à de petites opérations contractualisées au niveau local. Toutefois, ils n’incluent pas les financements dédiés aux travaux des grands projets ferroviaires (notamment les lignes à grande vitesse), qui sont versés par l’AFITF directement à SNCF Réseau.

Les AE sont supérieures à la prévision et à leur niveau de 2019 en raison de l’augmentation du budget consacré aux contrats de plan État-région dans le cadre du plan de relance (85 millions d’euros engagés en fin de gestion). Les CP augmentent également par rapport à leur niveau de 2019 (+ 15 %).

4.   Les crédits de la sécurité ferroviaire en sous-exécution

Les dépenses de l’action 51 Sécurité ferroviaire s’élèvent à 32 millions d’euros en AE et 35 millions d’euros en CP. Près de 10 millions d’euros ont été consacrés à la sécurisation des passages à niveau sur le réseau routier national tandis que 16 millions d’euros ont financé des projets de sécurisation ou de suppression de passages à niveau hors réseau routier national. En outre, 5 millions d’euros d’AE ont permis le financement du surcoût des travaux du tunnel ferroviaire de Meudon.

Les dépenses sont toutefois inférieures à la prévision initiale (40 millions d’euros) en raison de décalages d’opérations reportées en 2021. L’enveloppe consacrée aux aménagements et à l’automatisation des passages à niveau n’a pas été intégralement consommée.

C.   Les dÉpenses relatives aux infrastructures Routières

L’entretien et la modernisation du réseau routier sont une des priorités fixées dans la loi d’orientation des mobilités. Les actions 01 et 04 contiennent les dépenses liées aux infrastructures routières, soit au titre de l’entretien lourd, soit au titre du développement de nouvelles infrastructures. Une grande partie de ces investissements est financée par des fonds de concours en provenance de l’AFITF. Ces opérations concentrent la majeure partie de l’augmentation des AE du programme 203 en 2020.

Évolution des crÉdits destinÉs au financement du rÉseau routier

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Exécution
 2018

Exécution 
2019

Exécution 
2020

Évolution 
2019-2020

Exécution
2018

Exécution
2019

Exécution
2020

Évolution
2019-2020

Développement routier

546

604,2

868,0

+ 44 %

688,4

559,6

625,2

+ 12 %

Entretien et régénération

812

869,3

866,8

– 0,3 %

814,4

838,7

802,1

– 4 %

Total

1 358

1 473,5

1 734,7

+ 18 %

1 502,8

1 398,3

1 427,3

+ 2 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du programme 203.

1.   L’action 01 Routes-Développement

Les crédits de l’action 01 du programme 203 pour le développement et la modernisation du réseau routier national concédé et non concédé s’établissent à 868 millions d’euros en AE et 625 millions d’euros en CP. L’intégralité des dépenses a été financée par voie de fonds de concours versés par l’AFITF ainsi que par les collectivités territoriales dans le cadre des CPER.

En AE, les dépenses exécutées sont largement supérieures aux prévisions de la loi de finances initiale (+ 43 %) et augmentent tout autant par rapport à leur niveau de 2019 (+ 44 %). Cette sur-exécution résulte des crédits supplémentaires mis en place dans le cadre du plan de relance.

Les CP sont sensiblement inférieurs aux crédits votés en loi de finances (– 7 %). La crise sanitaire a perturbé la programmation initiale, entraînant des retards dans l’avancée ou le démarrage de certains chantiers. Les CP progressent toutefois de 12 % par rapport à leur niveau de 2019.

Les dépenses de l’action 01 ont notamment permis la mise en service de sept opérations contractualisées dans les CPER. Pour six d’entre elles, le rapport annuel de performance du programme 203 indique que le coût final est inférieur au coût estimé en phase initiale :

 

Opérations

Estimation de l’avant-projet détaillé ou de la déclaration d’utilité publique (en M€, valeur fév. 2014)

Coût final réel ou prévisionnel (en M€, valeur fév. 2014)

Évolution

Mise à 2x2 voies de la RN17 sur la section Vimy-Avion

26,1

23,8

– 8,85 %

RN141 La Vigerie-Villesèche

41,5

33,4

– 19,45 %

Mise à 2x2 voies de la RN4 sur la section Saint-Geriges-Héming

34,0

33,4

– 1,76 %

Rocade sud de Strasbourg, seconde phase

80,6

67,6

– 16,12 %

RN7 Déviation de Villeneuve sur Allier

65,0

59,8

– 8,02 %

Échangeur A14/A86, bretelle B5

64,0

51,2

– 20,05 %

RN19 Déviation de Boissy-Saint-Léger

266,5

278,7

– 4,55 %

Source : rapport annuel de performance du programme 203 pour 2020.

2.   L’action 04 Routes-Entretien

La priorité donnée à l’entretien et à la régénération du réseau routier national non concédé, conformément aux orientations de la loi d’orientation des mobilités, s’est poursuivie en 2021 sans toutefois s’amplifier.

Les crédits exécutés sur l’action 04 s’élèvent à 867 millions d’euros en AE et 802 millions d’euros en CP. Ils sont principalement issus de fonds de concours de l’AFITF (563 millions d’euros en AE et 533 millions d’euros en CP) et des collectivités territoriales.

Les AE sont proches de la prévision (+ 1,6 %) et de leur niveau de 2019 (– 0,3 %). Les CP font l’objet d’une sous‑exécution de près de 68 millions d’euros (– 8 %) et diminuent par rapport à leur niveau de 2019 (– 4 %), en raison de l’arrêt des chantiers routiers durant le premier confinement.

 

RÉpartition des DÉpenses de l’action 04 Routes-Entretien

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Régénération routière

555,6

64 %

495,8

62 %

Entretien routier

311,2

36 %

306,3

38 %

Total

866,7

100 %

802,1

100 %

Source : commission des finances d’après le rapport annuel de performance du programme 203 pour 2020.

Les crédits consacrés à la régénération routière représentent plus de 60 % des dépenses de l’action 04, avec 555,6 millions d’euros en AE et 495,8 millions en CP. Plus de la moitié d’entre eux ont servi à l’entretien des chaussées.

Toutefois, les dépenses consacrées à l’entretien du réseau routier national ne produisent toujours pas de résultat visible. Le sous-indicateur 2.2 du programme 203 relatif à l’état des structures de chaussées sur le réseau routier non concédé n’est pas renseigné pour 2020 (la prévision actualisée était de 15,9, soit un niveau inférieur à 2019 et 2018). Comme l’indique la Cour des comptes, « l’absence d’évolution positive de cet indicateur doit interroger à la fois sur le niveau suffisant des crédits consacrés et leur bonne utilisation » ([11]). Toutefois, les rapporteures soulignent que les crédits du plan de relance constituent une opportunité pour poursuivre les efforts entrepris depuis 2017.

D.   Les dÉpenses consacrÉes aux transports collectifs

Les dépenses en faveur des transports collectifs concernent en majorité la région Île-de-France pour la réalisation du CPER et du Grand Paris express.

1.   Le développement des infrastructures de transports collectifs en Île‑de‑France

Les crédits de l’action 44 Transports collectifs ont été exécutés à hauteur de 411 millions d’euros en AE et 246 millions d’euros en CP.

En AE, la dépense est nettement supérieure aux prévisions de la loi de finances initiale (+ 94 %) en raison du plan de relance qui a permis d’attribuer 140 millions d’euros supplémentaires au CPER Île-de-France en fin d’exercice. La trajectoire budgétaire est en nette hausse depuis trois ans (+ 9 % par rapport à 2019 et + 68 % par rapport à 2018).

Les CP sont inférieurs de 26 % à la prévision en raison du ralentissement de certains chantiers liés à la crise sanitaire. Compte tenu du contexte, la sous‑exécution demeure toutefois limitée. Les CP augmentent de 14 % par rapport à 2019 et retrouvent un niveau supérieur à celui de 2018 (243 millions d’euros).

Les dépenses ont principalement été consacrées au développement des infrastructures de transports collectifs en Île-de-France, avec 382 millions d’euros en AE et 226 millions d’euros en CP issus de fonds de concours de l’AFITF. Les opérations les plus importantes ont été cofinancées par l’État dans le cadre des CPER, notamment pour le tramway T9 Paris Orly (33,5 millions d’euros de CP), le prolongement du RER E à l’ouest (29,5 millions d’euros de CP) et le prolongement de la ligne de métro 12 à Mairie d’Aubervilliers (28,2 millions d’euros de CP).

2.   Le budget de la Société du Grand Paris en hausse

Comme les années précédentes, le programme 203 n’a pas contribué au financement de la Société du Grand Paris (SGP) en 2020. Le financement de l’établissement public repose en effet sur des taxes affectées et sur le recours à l’emprunt.

Recettes fiscales affectÉes à la SociÉtÉ du grand Paris

(en millions euros)

 

Exécution
2018

Exécution
2019

Exécution
2020

Évolution
2019-2020

Taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage

382

470

534

+ 14 %

Taxe sur les surfaces de stationnement en Île-de-France

– 

3

10

+ 233 %

Taxe spéciale d’équipement

117

117

117

– 

Imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) sur le matériel roulant des lignes de transport en commun

67

73

73

– 

Taxe additionnelle à la taxe de séjour

– 

1,5

12

+ 700 %

Total

564

661,5

746

+ 13 %

Source : commission des finances d’après les données transmises par la SGP.

Les recettes fiscales ont atteint 746 millions d’euros en 2020. Elles augmentent de 13 % par rapport à 2019 mais sont légèrement inférieures aux prévisions de la loi de finances pour 2020, notamment pour la taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage sur les surfaces de stationnement ([12]) (– 10 millions d’euros) et pour la taxe additionnelle à la taxe de séjour ([13]) (– 18 millions d’euros).

Au total, les ressources de la SGP s’élèvent à 837 millions d’euros en 2020, contre 702 millions en 2019 (+ 19 %). Outre les recettes fiscales, la SGP a également perçu 79 millions d’euros versés par Île-de-France Mobilités pour le remboursement du matériel roulant et 11 millions d’euros de subventions et recettes locatives.

Pour faire face à son besoin de financement, la SGP a contracté 11,1 milliards d’euros d’emprunts nouveaux en 2020 (contre 3,3 milliards en 2019 et 2,4 milliards en 2018). L’encours de la dette de l’opérateur est conforme à la trajectoire d’endettement qui doit aboutir à un niveau maximal de 35 milliards d’euros en 2031.

Les dépenses de la SGP se sont élevées à 3,55 milliards d’euros, soit une augmentation de 19 % par rapport à 2019. Cette hausse des dépenses correspond à la montée en charge des investissements, qui atteignent 2,61 milliards d’euros soit 73 % du total en 2020. Ils comprennent principalement les dépenses liées à la ligne 15 Sud (1,04 milliard d’euros), à la ligne 16 (662 millions d’euros) et au prolongement de la ligne 14 Sud (447 millions d’euros).

La SGP a également financé à hauteur de 509 millions d’euros des projets qui ne sont pas placés sous sa maîtrise d’ouvrage, notamment pour le prolongement du RER E à l’ouest (projet « EOLE »), les schémas directeurs de lignes RER ou ferroviaires et le prolongement des lignes 11 et 14. La dépense est légèrement inférieure à la prévision (– 14 millions d’euros) en raison de retards de paiement pour les lignes 11 et 14.

Les dépenses de personnel ont atteint 67 millions d’euros, en retrait par rapport à la prévision (– 3 millions d’euros) mais en forte hausse par rapport à 2019 (+ 28 millions d’euros). Cela traduit l’augmentation des effectifs de la SGP (+ 296 ETP entre 2019 et 2020) destinée à accompagner la mise en œuvre du Grand Paris express.

E.   Les dÉpenses destinÉes aux Voies navigables

Les crédits de l’action 42 Voies navigables s’élèvent à 251,5 millions d’euros en AE et 251,8 millions d’euros en CP. L’exécution est très proche des prévisions de la loi de finances initiale (– 0,2 %).

La subvention pour charges de service public versée à Voies navigables de France (VNF) correspond à environ 98 % des crédits (246,4 millions d’euros). Elle diminue de 1,9 million d’euros par rapport à ses niveaux de 2018 et 2019.

L’action 42 a également permis de financer, pour 5,1 millions d’euros en AE et 5,5 millions d’euros en CP, les opérations CPER et hors CPER relatives à l’entretien et au développement des infrastructures de transports fluviales, financées par voie de fonds de concours de l’AFITF et des collectivités territoriales. Les principaux investissements ont concerné le grand port maritime de Marseille (3,8 millions d’euros de CP) et les fleuves en Guyane (0,5 million d’euros).

L’exécution du budget de VNF a été marquée par les conséquences de la crise sanitaire. Les recettes propres de l’établissement public sont inférieures à la prévision, notamment pour les péages et les redevances domaniales (– 10,6 millions d’euros), en raison de la baisse de l’activité et des mesures de soutien au secteur fluvial adoptées par VNF. Le produit de la redevance hydraulique ([14]) s’élève à 126,2 millions d’euros (– 1,3 million d’euros).

Le budget de Voies navigables de France

(en millions d’euros)

 

Exécution
2018

Exécution
2019

Exécution
2019

Évolution
2019-2020

Ressources :

525,8

600,9

587,9

 2 %

- Subvention pour charges de service public

248,2

248,2

246,4

– 0,7 %

- Taxe hydraulique

112,9

127,5

– 

– 

- Redevance hydraulique

– 

– 

126,2

– 

- AFITF

80,0

96,0

120,9

+ 26 %

- Ressources propres

59,7

64,6

54,4

– 16 %

- Autre

25,0

64,5

40,0

– 38 %

Charges :

560,7

550,2

597,1

+ 8,5 %

- Dépenses de personnel

254,1

252,1

248,5

– 1,4 %

- Dépenses d’investissement

164,3

173,8

223,1

+ 28 %

- Dépenses de fonctionnement

142,3

124,3

125,5

+ 0,9 %

Solde

-34,9

50,7

-9,2

 118 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performances.

Toutefois, conformément aux orientations fixées dans la loi d’orientation des mobilités et à la priorité donnée à la régénération des réseaux existants, la subvention de régénération de l’AFITF a une nouvelle fois été augmentée pour atteindre 114 millions d’euros (contre 96 millions d’euros en 2019). S’y ajoutent 6,88 millions d’euros de CP versés par l’AFITF pour la modernisation des méthodes d’exploitation du réseau fluvial.

La crise sanitaire a également entraîné un ralentissement de certaines dépenses du fait des contraintes qui pèsent sur l’activité économique. Compte tenu du contexte, les taux d’exécution de 96 % pour les dépenses de fonctionnement et de 93 % pour les dépenses d’investissement (en CP) apparaissent satisfaisants. Il convient en particulier de noter l’augmentation du budget d’investissement de 49 millions d’euros par rapport à 2019 due aux financements de l’AFITF ainsi qu’aux fonds européens dédiés au projet de canal Seine Nord Europe.

Enfin, les rapporteures soulignent que, conformément à l’article 148 de la loi d’orientation des mobilités, VNF a signé avec l’État, fin avril 2021, un contrat d’objectifs et de performance pour la période 2020-2029 qui prévoit une programmation pluriannuelle des investissements sur le réseau fluvial. La signature de ce contrat est une avancée importante pour le développement du fret fluvial, qui constitue un élément important dans la stratégie de « décarbonation » des transports.

 

 

F.   Les dÉpenses en faveur des Infrastructures aÉroportuaires

Les crédits de l’action 52 Transport aérien s’établissent à 24,4 millions d’euros en AE et 30,6 millions d’euros en CP. Ils font l’objet d’une sous-exécution, respectivement, de 11 millions d’euros et 6 millions d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale.

Les dépenses consacrées aux infrastructures aéroportuaires représentent 12,6 millions d’euros en AE et 8,3 millions d’euros en CP. Les crédits ont été sous‑consommés en raison du décalage de certaines opérations en 2021 (réfection de la piste de l’aéroport de Wallis-Hihifo, travaux sur l’aérodrome de Futuna).

Les lignes d’aménagement du territoire (LAT) ont bénéficié de 16,7 millions d’euros en AE ([15]) et 21,4 millions d’euros en CP. Dans le cadre de la crise sanitaire, une dérogation aux règles habituelles de financement des LAT a été établie afin que la contribution de l’État se maintienne aux niveaux prévisionnels, évitant ainsi aux collectivités territoriales concernées de subir les conséquences de l’affaiblissement du trafic aérien ([16]).

Au plus fort de la crise sanitaire, l’action 52 a également financé la continuité territoriale sur les liaisons Paris‑Papeete, La Réunion‑Mayotte, Nouméa‑Wallis et entre la Guadeloupe et les Îles‑du‑Nord ainsi que le retour d’étudiants ultramarins depuis la Métropole vers Saint-Pierre-et-Miquelon. Elle a également compensé le sur-déficit de la desserte entre Saint-Pierre-et-Miquelon et le Canada lié à la fermeture des frontières canadiennes. Ces dépenses ont fait l’objet d’un transfert de 3,8 millions d’euros du programme 123 Conditions de vies outremer de la mission Outre-mer vers le programme 203.

 

 


II.   Le Programme 355 Charge de la dette de SNCF RÉseau reprise par l’État

Dans le cadre de la réforme du système ferroviaire, actée dans la loi pour un nouveau pacte ferroviaire ([17]), l’État s’était engagé à reprendre 35 milliards d’euros de la dette de SNCF Réseau (évaluée à 48,2 milliards d’euros fin 2018), dont 25 milliards d’euros en 2020 et 10 milliards d’euros en 2022. La première étape de reprise de 25 milliards d’euros au 1er janvier 2020 a eu lieu comme prévu à l’article 299 de la loi de finances pour 2020.

En 2020, le coût total pour l’État de la reprise de la dette de SNCF Réseau s’est élevé à 2,1 milliards d’euros. Le remboursement du principal de la dette reprise a été de 1,7 milliard d’euros. Il est toutefois considéré, d’un point de vue budgétaire, comme une opération de trésorerie qui ne requiert pas de crédits.

Le paiement des intérêts, porté par le programme 355, s’est élevé à 400 millions d’euros en 2020. Ce montant est légèrement inférieur aux prévisions de la loi de finances initiale (408 millions d’euros).

Ventilation du principal de la dette de SNCF RÉseau reprise par l’État

Source : rapport annuel de performance du programme 355 pour 2020, page 541.

La quatrième loi de finances rectificative a annulé 9,8 millions d’euros sur le programme 355. Le montant exécuté étant légèrement supérieur au montant des crédits restés ouverts, le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 procède à une réouverture d’un peu plus de 967 000 euros.

Il convient de noter que les crédits du programme 355 sont évaluatifs. Le montant final des intérêts dépend des taux définitifs. Si 91 % des emprunts sont à taux fixe, 5 % des engagements sont à taux variables et 4 % sont indexés sur l’inflation. En 2020, le taux d’intérêt moyen de la dette a été de 3,20 % pour les emprunts à taux fixe et de 1,95 % pour les emprunts indexés sur l’inflation.

III.   Le compte d’affectation spÉciale Services nationaux de transport conventionnÉs de voyageurs

Le compte d’affectation spéciale (CAS) Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs (SNTCV) a pour objet de financer les charges d’exploitation des trains d’équilibre du territoire (TET), dont l’État est l’autorité organisatrice depuis 2011.

L’exécution du CAS s’inscrit dans le cadre de la convention relative à l’exploitation des TET 2016-2020 signée entre l’État et SNCF Mobilités (désormais SNCF Voyageurs) en février 2017 et ayant fait l’objet de quatre avenants en août 2018, février 2019, février et juin 2020.

Les recettes du CAS reposent principalement sur des recettes acquittées par SNCF Voyageurs au titre de son activité de trains à grande vitesse. Le CAS constitue ainsi un système de péréquation entre les lignes ferroviaires à grande vitesse et les lignes TET, les premières étant plus rentables que les secondes.

Les dépenses du CAS sont réparties entre deux programmes : le programme 785 Exploitation des services nationaux de transport conventionnés, qui finance les compensations versées par l’État à SNCF Voyageurs et aux régions au titre des TET, et le programme 786 Matériel roulant des services nationaux conventionnés de voyageurs, qui finance une partie de la maintenance et de la régénération du matériel roulant des TET.

La loi de finances pour 2021 a acté la clôture du CAS à compter du 1er janvier 2021.

A.   des recettes en baisse en raison de la diminution des circulations

Les recettes du CAS ont atteint 312,8 millions d’euros en 2020, réparties entre :

– 226 millions d’euros issus de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF), prévue à l’article 235 ter ZF du code général des impôts, dont sont redevables les entreprises de transport ferroviaire de voyageurs dont le chiffre d’affaires est supérieur à 300 millions d’euros ;

– 16,1 millions d’euros de la contribution de solidarité territoriale (CST), prévue à l’article 302 bis ZC du code général des impôts, due par les entreprises de transport ferroviaire non conventionné de voyageurs ;

– 70,7 millions d’euros correspondant à la part du produit de la fraction de la taxe d’aménagement du territoire (TAT), prévue à l’article 302 bis ZB du code général des impôts, acquittée par les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA).

Évolution des recettes du compte d’affectation spÉciale

(en millions d’euros)

 

Exécution
2018

Exécution
2019

LFI
2020

Exécution
2020

Part de la taxe d’aménagement du territoire

141,2

117,2

70,7

70,7

Contribution de solidarité territoriale (CST)

56

16,1

16

16,1

Taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF)

452

226

226

226

Total recettes

649,2

359,3

312,7

312,8

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performances.

Les recettes ont donc été exécutées conformément aux prévisions de la loi de finances initiale, avec un faible excédent de 100 000 euros. Elles sont inférieures de 46,5 millions d’euros par rapport à 2019, l’intégralité de cette baisse résultant de l’abaissement du plafond de la fraction de la taxe d’aménagement du territoire affectée au CAS prévue dans la loi de finances pour 2020.

Les recettes du CAS ont en outre été complétées par un report de crédits de 0,2 million d’euros en AE et de 5,2 millions d’euros en CP, correspondant au solde du CAS constaté à la fin de l’exercice 2019.

Compte tenu des dépenses exécutées, le solde du CAS s’élève à 36,6 millions d’euros pour 2020. Le solde cumulé est de 41,8 millions d’euros au 31 décembre 2020.

B.   Des dÉpenses infÉrieures aux prÉvisions et en baisse

En 2020, les dépenses du CAS ont atteint 296,7 millions d’euros en AE et 276,2 millions d’euros en CP, soit un taux d’exécution, respectivement, de 94,9 % et de 88,3 %.

Les dÉpenses du compte d’affectation spÉciale en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI

Exécution

Écart à la prévision

LFI

Exécution

Écart à la prévision

Programme 785 – Exploitation des services nationaux de transport conventionnés

246,10

230,09

– 6,5 %

246,10

209,63

– 14,8 %

Programme 786 – Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés

66,60

66,60

– 

66,60

66,60

– 

Total

312,70

296,69

 5,1 %

312,70

276,24

 11,7 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performances.

L’exécution du programme 786 est conforme à la prévision. Les dépenses correspondant au paiement d’une partie de l’acompte de 90 % dû par l’État à l’opérateur SNCF Voyageurs au titre de la compensation d’exploitation des lignes TET pour 2020, à hauteur de 66,6 millions d’euros.

L’exécution du programme 785 s’élève à 230,1 millions d’euros en AE et 209,6 millions d’euros en CP, en retrait, respectivement, de 6,5 % et de 14,8 % par rapport aux prévisions de la loi de finances. Les crédits consommés correspondent :

– pour 76,7 millions d’euros, à des contributions versées par l’État à certaines régions au titre des frais d’exploitation des lignes TET leur ayant été transférées (39,2 millions d’euros pour le Centre Val de Loire, 15 millions d’euros pour les Hauts-de-France, 13 millions d’euros pour la région Grand Est, 5 millions d’euros pour la Nouvelle Aquitaine et 4,5 millions d’euros pour l’Occitanie) ;

– pour 153,6 millions d’euros en AE et 131,58 millions d’euros en CP, au paiement d’une partie de l’acompte de 90 % dû par l’État à SNCF Voyageurs au titre de la compensation d’exploitation des lignes TET pour 2020 ;

– pour 0,7 million d’euros en AE et 1,3 million d’euros en CP, à des dépenses d’études réalisées par l’État en tant qu’autorité organisatrice.

Le solde de la compensation d’exploitation des lignes TET dû par l’État à SNCF Voyageurs pour l’année 2019, qui s’élève à 3 millions d’euros ([18]), n’a pas été versé en 2020. L’opérateur ayant demandé une prise en charge financière des effets du mouvement social de décembre 2019, le montant définitif est en négociation. Les 3 millions d’euros de CP reportés de 2019 en 2020 le seront à nouveau en 2021.

Les crédits exécutés sont inférieurs de 18,5 % à leur niveau de 2019. Les dépenses du programme 785 supportent une baisse plus importante (– 21 %) que celles du programme 786 (– 8,8 %). Ils sont en net recul par rapport à 2018 (– 60 %), qui avait permis de régulariser le décalage préexistant.

L’Évolution des crÉdits de paiement du compte d’affectation spÉciale

(en millions d’euros)

 

Exécution 2018

Exécution 2019

Exécution 2020

Évolution 2019-2020

Programme 785 – Exploitation des services nationaux de transport conventionnés

545,4

265,8

209,6

– 21,1 %

Programme 786 – Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés

162,6

73,0

66,6

– 8,8 %

Total

708,0

338,8

276,2

 18,5 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performances.

 

 

C.   La clôture du compte d’affectation spÉciale

L’article 88 de la loi de finances pour 2021 a clôturé le CAS – peu adapté à l’ouverture à la concurrence des lignes TET – à compter du 1er janvier 2021. Les crédits correspondants sont réintégrés au budget général, au sein de l’action 44 Transports collectifs du programme 203 Infrastructures et services de transports de la mission Écologie, développement et mobilité durables. Cette clôture répond aux recommandations formulées dans le rapport spécial de mai 2020 ainsi qu’aux demandes répétées de la Cour des comptes.

S’agissant des recettes du CAS, le produit de la TAT est affecté à l’AFITF. La CST et la TREF ont quant à elles été maintenues pour 2021 et affectées au budget général. Toutefois, elles demeurent acquittées uniquement par SNCF Voyageurs au titre de son activité de trains à grande vitesse. Or, leur maintien pose un réel problème dans un contexte d’ouverture à la concurrence, puisqu’il entraîne un désavantage compétitif certain pour SNCF Voyageurs par rapport à ses concurrents. En conséquence, les rapporteures réitèrent leur recommandation de supprimer la CST et la TREF dès 2022. Elles soulignent que la Cour des comptes s’est elle‑même prononcée en ce sens ([19]).

D.   L’impact de la crise sanitaire sur le financement des trains d’Équilibre du territoire

L’offre et la fréquentation des TET ont été fortement touchées par la crise liée à l’épidémie de la covid-19, en particulier durant le premier confinement. La fréquentation moyenne a baissé de 35 % sur l’ensemble de l’année 2020.

En application de la convention relative à l’exploitation des TET 20162020, la SNCF a demandé une compensation additionnelle au titre de l’impact de la crise sanitaire sur les lignes TET. Elle estime le montant de cette compensation additionnelle à 48 millions d’euros, correspondant au montant des pertes de recettes (106 millions d’euros au total) qui n’ont pas pu être compensées par des économies de dépense (58 millions d’euros).

Le montant de cette compensation additionnelle et ses modalités ne sont pas encore arrêtés. Comme l’indique la Cour des comptes : « cette compensation additionnelle est attachée à la période conventionnelle 2016-2020 maintenant échue. Il existe un projet de prolonger cette convention pour l’année 2021 (dans ce cas, la nouvelle convention débuterait en 2022). Or, pour mémoire, les reports de crédits de 2020 à 2021 ne permettent pas de couvrir le montant de la compensation additionnelle demandée » ([20]).

 


IV.   Le budget annexe Contrôle et exploitation aÉriens

Le budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA) finance les activités de régulation menées par la direction générale de l’aviation civile (DGAC), dans le cadre fixé au niveau européen et international, notamment la navigation aérienne, le contrôle aérien, la sûreté et la sécurité des vols, la formation des pilotes ainsi que la lutte contre les nuisances sonores et les émissions polluantes.

Les dépenses du BACEA sont réparties entre trois programmes :

– le programme 613 Soutien aux prestations de l’aviation civile finance les fonctions support des services de la DGAC et permet une gestion mutualisée des ressources humaines ainsi que des moyens matériels, notamment immobiliers et informatiques. Il regroupe l’ensemble des dépenses de personnel du BACEA ;

– le programme 612 Navigation aérienne finance les activités de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) pour ses prestations d’opérateur de la navigation aérienne ;

– le programme 614 Transports aériens, surveillance et certification finance les actions menées en faveur de la sécurité du transport aérien, les activités de régulation économique du secteur ainsi que les actions visant à réduire les nuisances sonores et les émissions polluantes.

L’exécution du BACEA a été marquée par les effets de la crise liée à l’épidémie de la covid-19, qui a entraîné une baisse du trafic aérien, en France, de 61 % en nombre de mouvements d’avion et de 70 % en nombre de passagers transportés sur l’ensemble de l’année 2020.

A.   Des baisses De recettes massives compensÉes par l’emprunt

En 2020, les recettes du BACEA ont été lourdement affectées par l’effondrement du trafic aérien ainsi que par les mesures de soutien aux compagnies aériennes portant sur le report de paiement des taxes et redevances aériennes.

Tandis que la loi de finances pour 2020 prévoyait un montant de recettes hors emprunt et produits de cession d’actifs immobiliers de 2,07 milliards d’euros, le montant finalement encaissé s’élève à 821,37 millions d’euros, soit un écart à la prévision de 1,25 milliard d’euros (– 60 %). Cet écart a été compensé par une hausse de l’endettement sans précédent (+ 1,25 milliard d’euros).

Au total, les recettes du budget annexe ont atteint 2,08 milliards d’euros, en léger retrait par rapport aux prévisions de la loi de finances pour 2020, pour un taux d’exécution de 98,3 %. Elles sont inférieures de 149,7 millions d’euros à leur niveau de 2019 (– 7 %).

Évolution des recettes du bacea

(en millions euros)

 

Exécution 2019

LFI
2020

Exécution 2020

Écart à la prévision

Taux de réalisation

Redevances de route

1 326,82

1 293,00

539,11

– 753,89

41,7 %

Redevance océanique

15,14

13,00

5,10

– 7,90

39,2 %

Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA) pour la métropole

214,86

214,00

92,71

– 121,29

43,3 %

Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA) pour
l’outre-mer

33,34

31,00

8,99

– 22,01

29,0 %

Redevances de surveillance et de certification

30,62

30,35

23,76

– 6,59

78,3 %

Taxe de l’aviation civile

487,21

472,00

124,18

– 347,82

26,3 %

dont contribution Bâle-Mulhouse

4,80

6,00

5,60

 0,40

93,3 %

Taxe de solidarité sur billets d’avion
(hors plafond)

57,65

0,00

0,00

– 

– 

Frais de gestion des taxes

7,01

6,54

2,09

– 4,45

32,0 %

Recettes diverses

21,94

5,65

25,42

+ 19,77

449,9 %

Sous-total taxes et redevances

2 194,59

2 065,54

821,37

 1 244,17

39,8 %

Produit brut des emprunts

0,00

50,00

1 250,00

+ 1 200,00

2 500,0 %

Cessions d’actifs immobiliers

0,00

2,00

0,00

– 2,00

0,0 %

Autres recettes en capital

37,01

0,00

10,56

+ 10,56

– 

Total

2 231,59

2 117,54

2 081,93

 35,61

98,3 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performances.

1.   Les redevances aériennes

Le BACEA tire ses principales recettes de redevances perçues sur les compagnies aériennes, qui rémunèrent les prestations de la DGAC en matière de navigation aérienne, de surveillance des acteurs de l’aviation civile et de délivrance d’agréments et autorisations. En 2020, le produit des redevances aériennes ne représente que 32 % des recettes, contre 75 % prévus en loi de finances initiale.

● Le produit des redevances de navigation aérienne, prévues aux articles R. 134‑1 à R. 134‑9 du code de l’aviation civile, s’établit à 645,9 millions d’euros, en recul de 905,1 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2020, soit un taux de réalisation de 41,6 %, dont :

– un écart de 753,89 millions d’euros pour les redevances de route, qui rémunèrent l’usage des installations et services en route de navigation aérienne mis en œuvre par l’État dans l’espace aérien relevant de sa responsabilité ;

 

– un écart de 121,29 millions d’euros pour les redevances pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA) pour la métropole, qui rémunèrent l’usage des installations et services terminaux de navigation aérienne mis en œuvre par l’État à l’arrivée et au départ des aérodromes métropolitains ;

– un écart de 22,01 millions d’euros pour la RSTCA pour l’outre-mer, qui rémunère l’usage des installations et services terminaux de navigation aérienne mis en œuvre par l’État à l’arrivée et au départ des aérodromes d’outre-mer ;

– un écart de 7,90 millions d’euros pour la redevance océanique, qui rémunère l’usage des installations et services en route de navigation aérienne mis en œuvre par l’État dans l’espace aérien outre-mer confié à la France par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) ou pour lequel les services de la navigation aérienne ont été délégués à la France par un État tiers.

Au total, le produit des redevances de navigation aérienne est en baisse de 944,24 millions d’euros par rapport à 2019. Cet écart de – 58 % résulte de l’effondrement du trafic aérien mais aussi des mesures de soutien aux compagnies aériennes consistant en un report de paiement des redevances aériennes.

● Le produit des redevances de surveillance et de certification, perçues en contrepartie des prestations de surveillance et de certification dans les domaines de la sécurité et de la sûreté livrées par la DGAC, s’élève à 23,76 millions d’euros, en recul de 6,59 millions d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances pour 2020, soit un taux de réalisation de 78,3 %. Aucun report n’ayant été accordé, les montants encaissés résultent uniquement du contexte économique lié à la crise sanitaire.

2.   Les taxes aériennes

Le BACEA bénéficie également du produit de taxes destinées à financer des activités ne pouvant donner lieu à redevance. Il s’agit principalement de la taxe de l’aviation civile ([21]), qui lui est intégralement reversée depuis 2016, et de la taxe de solidarité sur les billets d’avion ([22]), depuis 2017. En 2020, le produit de ces taxes ne représente que 5,96 % des recettes, contre 22,3 % prévus en loi de finances initiale.

Le produit de la taxe de l’aviation civile s’établit à 124,2 millions d’euros, dont 5,6 millions d’euros au titre de la contribution de l’aéroport Bâle Mulhouse, en retrait de 347,8 millions d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances pour 2020. Cet écart de – 74 % résulte de la baisse du trafic aérien, mais aussi des mesures d’aide aux compagnies aériennes et du report de paiement de la taxe sur la période allant du 1er mars au 31 décembre 2020. Les sommes dues seront payées, sans intérêts de retard, entre les mois de janvier 2021 et de décembre 2022.

La taxe de solidarité sur les billets d’avion n’a rapporté aucune recette au BACEA. Son produit total s’est élevé à 95 millions d’euros en 2020, en recul de 172 millions d’euros par rapport à 2019. Or, il est reversé en priorité au fonds de solidarité pour le développement, dans la limite d’un plafond de 210 millions d’euros, puis à l’AFITF, dans la limite d’un plafond de 230 millions d’euros, et au BACEA uniquement pour la partie des recettes excédant 440 millions d’euros. Cela s’explique par la baisse du trafic aérien, mais aussi par le report de paiement de la taxe dans les mêmes conditions que pour la taxe de l’aviation civile.

3.   Une hausse sans précédent de l’endettement

L’effondrement des recettes des taxes et redevances aériennes lié à la crise sanitaire a contraint le BACEA à recourir massivement à l’emprunt, qui représente 60 % des recettes contre 2,4 % prévus en loi de finances initiale.

La loi de finances pour 2020 prévoyait un droit de recours à l’emprunt de 50 millions d’euros ([23]), en recul par rapport à 2019 (87,2 millions d’euros), année au cours de laquelle il n’avait pas été nécessaire de recourir à l’emprunt. Pour tenir compte de la baisse des recettes engendrée par la crise sanitaire, les deux premières lois de finances rectificatives pour 2020 ([24]) ont augmenté le droit de recours, respectivement, de 500 et 700 millions d’euros. Cette autorisation d’emprunt de 1,25 milliard d’euros a donné lieu à quatre tirages auprès de l’Agence France Trésor : 400 millions d’euros en avril, 400 millions d’euros en juillet et 450 millions d’euros en octobre 2020. Le BACEA a ainsi pu conserver un niveau de trésorerie élevé durant l’année 2020 et pour début 2021.

Le recours massif à l’emprunt a remis en cause la dynamique de désendettement dans laquelle la DGAC s’était engagée depuis 2015. Tandis que l’encours de la dette du BACEA avait diminué de 1,28 milliard d’euros au 1er janvier 2015 à 667,4 millions d’euros au 31 décembre 2019, l’endettement du budget annexe s’établit à 1,81 milliard d’euros au 31 décembre 2020.

Les rapporteures spéciales tiennent à souligner la mobilisation de la DGAC, qui a veillé tout au long de l’exercice 2020 à maîtriser le recours à l’emprunt. Toutefois, l’endettement du BACEA a atteint un niveau jamais atteint auparavant. En outre, la situation financière du budget annexe est d’autant plus fragilisée que les perspectives de reprise du trafic aérien sont incertaines – pas de retour au niveau de 2019 avant 2024-2026 –, sans parler des préoccupations environnementales accrues qui pourraient à terme se traduire par un moindre recours à l’avion.

En conséquence, il conviendra dans les années à venir de poursuivre les efforts de maîtrise de la dépense et, dès que le retour à une situation normale le permettra, de mettre en place des mesures de désendettement ambitieuses.

B.   Des dÉpenses relativement proches de la prÉvision

La loi de finances pour 2020 a fixé le plafond de dépense du BACEA à 2,14 milliards d’euros en AE et en CP. En outre, le budget annexe a pu bénéficier de reports de crédits et de reports de crédits issus de fonds de concours ou d’attributions de produit, pour 44,2 millions d’euros en AE et 50,9 millions d’euros en CP, ce qui a élevé le niveau des crédits disponibles à 2,17 milliards d’euros en AE et 2,16 milliards d’euros en CP.

Malgré la crise, le montant des crédits exécuté est proche des plafonds de dépense. En 2020, le montant des dépenses du BACEA a atteint 2,10 milliards d’euros en AE et 2,09 milliards d’euros en CP. Le taux d’exécution par rapport aux crédits votés dans la loi de finances initiale atteint respectivement 98,1 % et 97,6 %.

S’agissant des CP, le taux d’exécution des crédits du programme 613, qui concentre 70 % des crédits exécutés, atteint 98,2 %. Il est toutefois plus faible pour le programme 612 (96,7 %) en raison d’une sous-consommation des crédits d’investissement et pour le programme 614 (88,6 %).

ExÉcution des crÉdits du BACEA en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI

Crédits ouverts

Exécution

Écart

LFI

Crédits ouverts

Exécution

Écart

Programme 613 – Soutien aux prestations de l’aviation civile

1 501,06

1 484,9

1 474,49

– 1,8 %

1 501,06

1 483,5

1 473,72

– 1,8 %

Programme 612 – Navigation aérienne

595,42

636,9

580,33

– 2,5 %

595,42

630,4

575,66

– 3,3 %

Programme 614 – Transports aériens, surveillance et certification

44,49

48,7

44,54

+ 0,1 %

44,49

47,3

39,44

– 11,4 %

Total

2 140,97

2 170,50

2 099,35

 1,9 %

2 140,97

2 161,20

2 088,82

 2,4 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du BACEA.

Les crédits annulés dans la quatrième loi de finances rectificative ont atteint 36,9 millions d’euros en AE et 55,9 millions d’euros en CP, ce qui montre les efforts réalisés par la DGAC en matière de maîtrise de la dépense.

 

Les crédits exécutés en 2020 sont en recul par rapport à 2019. La baisse est plus importante en AE (– 3,4 %) qu’en CP (– 1,7 %). Le programme 614 est proportionnellement le plus touché (– 9,5 % en AE et – 18,9 % en CP). Toutefois, en volume, c’est le programme 613 qui subit la baisse la plus importante (– 24,4 millions d’euros en AE et – 18,5 millions d’euros en CP).

Évolution des dÉpenses du BACEA

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2018

2019

2020

Évolution
2019-2020

2018

2019

2020

Évolution
2019-2020

Programme 613 – Soutien aux prestations de l’aviation civile

1 521,72

1 498,91

1 474,49

– 1,6 %

1 517,37

1 498,86

1 473,72

– 1,7 %

Programme 612 – Navigation aérienne

607,64

624,97

580,33

– 7,1 %

606,83

578,35

575,66

– 0,5 %

Programme 614 – Transports aériens, surveillance et certification

49,45

49,21

44,54

– 9,5 %

50,02

48,63

39,44

– 18,9 %

Total

2 178,81

2 173,09

2 099,35

 3,4 %

2 174,22

2 125,85

2 088,81

 1,7 %

Source : commission des finances d’après les rapports annuels de performance du BACEA.

1.   Les dépenses de personnel

Les dépenses de personnel du BACEA, intégralement regroupées sur le programme 613, constituent le premier poste de dépense puisqu’elles représentent plus de la moitié des crédits exécutés (56,9 % en 2020 contre 56,2 % en 2019).

Le montant des crédits de personnel exécutés en 2020 s’est élevé à 1,19 milliard d’euros, contre 1,22 milliard d’euros prévus en loi de finances initiale, soit un taux d’exécution de 97,6 %.

Cette sousexécution de 28,9 millions d’euros résulte principalement de la suspension des négociations sur le protocole social 2020-2024, qui s’est traduit par la non-consommation de l’enveloppe correspondante (10 millions d’euros). Elle s’explique également par un décalage de certaines entrées en poste, le début de la scolarité des dernières promotions d’ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) ayant été reporté à la fin de l’année 2020. En outre, le solde du glissement vieillesse technicité (GVT) s’est avéré inférieur à la programmation en raison d’un nombre d’entrées et de sorties plus important qu’anticipé.

Hors contribution au CAS Pensions et au fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, les crédits de titre 2 s’élèvent à 913,5 millions d’euros, contre 921,7 millions d’euros en 2019. Les dépenses de personnel sont donc en baisse de 0,9 %, ce qui met fin à la hausse observée depuis plusieurs exercices.

Comme les années précédentes, le plafond d’emplois du BACEA, fixé à 10 544 ETPT en loi de finances initiale, a été très largement sous-exécuté, à 10 421 ETPT, soit un écart de – 123 ETPT. Il demeure donc de facto non contraignant. Comme l’indique la Cour des comptes dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020, le plafond d’emplois « devrait être à nouveau revu à la baisse pour lui donner un caractère contraignant » ([25]).

Le schéma d’emploi, fixé à 0 ETP comme prévu par le protocole social 20162019, a été exécuté conformément à la prévision. Toutefois, les niveaux d’entrées et de sorties sont une nouvelle fois très supérieurs aux prévisions en programmation, avec un écart de 42 ETP. Comme l’indique la Cour des comptes, les écarts réguliers sur les derniers exercices, même s’ils se réduisent, « montrent qu’il existe des marges d’amélioration quant à la qualité et la sincérité de la programmation du schéma d’emploi » ([26]).

2.   Les dépenses de fonctionnement

Les dépenses de fonctionnement du BACEA représentent 28 % des crédits exécutés. En 2020, elles ont atteint 587 millions d’euros, contre 477,8 millions d’euros prévus dans la loi de finances initiale, soit une surexécution de 109,2 millions d’euros (+ 23 %). Cette dernière est similaire à la sur‑exécution constatée en 2019 (+ 113 millions d’euros, soit + 24 %).

La sur-exécution des dépenses de fonctionnement est récurrente en raison d’une pratique de la DGAC consistant à catégoriser en titre 5 dans la loi de finances initiale certaines dépenses qui sont ensuite exécutées en titre 3. Cela nuit à la transparence et à la lisibilité de l’exécution budgétaire. Comme le recommande la Cour des comptes ([27]), il est donc nécessaire de distinguer, dans les projets annuels de performance, les crédits de titre 5 qui seront exécutés en titre 3 et, dans les rapports annuels de performance, les crédits de titre 3 qui ont été imputés en titre 5.

Les dépenses de fonctionnement s’établissent à un niveau similaire à 2019 (586,6 millions d’euros). Elles comprennent les dépenses de fonctionnement des services centraux et locaux de la DGAC, les dépenses informatiques, les dépenses de formation, les dépenses liées à l’action sociale ainsi que les prestations versées aux organismes extérieurs (notamment Eurocontrol, Météo France, Aéroports de Paris).

La subvention pour charges de service public versée à l’École nationale de l’aviation civile (ENAC) a atteint 107 millions d’euros en 2020, contre une prévision de 95 millions d’euros en loi de finances initiale (91 millions d’euros de subvention et 4 millions d’euros de dotation en fonds propres pour investissement). Cette sur-exécution de 12 millions d’euros était destinée à compenser la forte baisse des ressources propres de l’école, due aux moindres besoins de formation et d’expertise des compagnies aériennes, exploitants aéroportuaires ou constructeurs aéronautiques touchés par la crise sanitaire. Le nombre d’emplois rémunérés par l’opérateur a quant à lui augmenté de 902 ETPT en 2019 à 915 ETPT en 2020.

3.   Les dépenses d’investissement

Les dépenses d’investissement, qui représentent 14,5 % des dépenses du BACEA, ont atteint 304,6 millions d’euros en 2020, contre 437,6 millions prévus en loi de finances initiale, soit une sous-exécution de 133 millions d’euros.

La sous-exécution se concentre sur les dépenses d’investissement au sens strict, liées aux acquisitions d’immobilisations, hors remboursements d’emprunt. Elles s’établissent à 198,3 millions d’euros, contre 315,6 millions d’euros en loi de finances pour 2020, soit un taux d’exécution de seulement 62,4 %. Comme l’indique la Cour des comptes, en tenant compte de la totalité des 365,6 millions d’euros de crédits ouverts, le taux de consommation tombe à 54,2 %, pour une sous‑exécution de 167,4 millions d’euros ([28]). Les dépenses d’investissement augmentent toutefois par rapport à 2019 (+ 3,5 millions d’euros).

La majeure partie de cette sous‑exécution résulte du glissement en exécution d’une partie des dépenses de titre 5 vers le titre 3 (estimée à environ 100 millions d’euros par la DGAC), qui nuit à la transparence et à la lisibilité de l’exécution budgétaire. L’autre partie est quant à elle liée aux retards ou décalages dans la réalisation des investissements en matière de modernisation de la navigation aérienne, portés par le programme 612, induits par la crise sanitaire et notamment par les périodes de confinement.

Le montant des remboursements d’emprunt est quant à lui proche de la prévision (106,3 millions d’euros exécutés contre 122 millions d’euros prévus).

4.   Les restes à payer

Les restes à payer du BACEA s’élèvent à 343,1 millions d’euros au 31 décembre 2020, un niveau similaire à 2019, qui correspond à 109 % des investissements prévus en loi de finances pour 2020.

Les programmes d’investissement en matière de modernisation de la navigation aérienne entraînent des engagements pluriannuels conséquents et des paiements nécessairement étalés sur plusieurs années. Malgré la crise qui touche le secteur aérien, la DGAC estime nécessaire, en 2020 comme en 2021, de maintenir ses investissements en matière de modernisation de la navigation aérienne, afin de préparer la reprise à moyen terme du trafic aérien. Les rapporteures valident ce choix courageux mais recommandent un suivi étroit des restes à payer.

Les charges à payer du BACEA s’élèvent quant à elles à 6,64 millions d’euros au 31 décembre 2020 et sont en baisse par rapport à 2019. Elles demeurent toutefois largement supérieures à leur niveau de 2018.

Évolution des charges à payer du BACEA

(en millions d’euros)

 

2018

2019

2020

Évolution
2019-2020

Programme 613 – Soutien aux prestations de l’aviation civile

0,14

2,28

1,40

– 0,88

Programme 612 – Navigation aérienne

1,05

4,91

3,94

– 0,97

Programme 614 – Transports aériens, surveillance et certification

0,15

1,34

1,30

– 0,04

Total

1,34

8,53

6,64

 1,89

Source : commission des finances d’après la note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020 de la Cour des comptes.

Les rapporteures tiennent à saluer la réserve de précaution pour aléas de gestion constituée par la DGAC à hauteur de 30 millions d’euros en 2020, une réserve qui n’est pas obligatoire et qui n’avait pas été constituée en 2018 et 2019.

 


—  1  —

   SECONDE PARTIE  THÈME D’ÉVALUATION :
LES MOYENS AFFECTÉS AU VOLET « MOBILITÉ MULTIMODALE »
DES CONTRATS DE PLAN ÉTAT-RÉGION 2015-2020

Dans le cadre du Printemps de l’évaluation 2021, les rapporteures spéciales ont choisi d’évaluer les moyens affectés au volet « Mobilité multimodale » des contrats de plan État-région (CPER) 2015-2020.

Les contrats de plan État-région (CPER) ont été créés par la loi du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification, qui prévoit que le contrat de plan conclu entre l’État et une région définit les actions que l’État et la région s’engagent à mener conjointement par voie contractuelle pendant une certaine durée ([29]). À l’origine, cet outil devait permettre d’articuler le plan national avec les plans définis par les régions. Avec la disparition du plan, les CPER sont devenus un cadre pour coordonner les orientations stratégiques de l’État et des régions en termes d’aménagement du territoire.

Les CPER 2015-2020 en sont la sixième génération, qui succède aux contrats de projet État-région 2007-2014 et aux CPER 2000-2006. Vingt-sept CPER ont été signés en 2015 avec chacune des vingt-deux régions que comptait alors la France métropolitaine et cinq collectivités d’outre-mer (la Guadeloupe, la Guyane, La Réunion, la Martinique et Mayotte). S’y ajoutent en outre deux contrats de plan interrégional État-régions (CPIER) pour le Rhône et la Vallée de la Seine.

Les CPER contiennent un important volet « transport » destiné aux investissements liés à la modernisation et au développement des infrastructures de transport. Désigné volet « Mobilité multimodale » dans les CPER 2015-2020, ce volet définit les ressources que l’État, les régions et les autres cofinanceurs (départements, établissements publics de coopération intercommunale, gestionnaires d’infrastructures) envisagent de mobiliser sur les opérations routières, ferroviaires, fluviales, portuaires, les transports collectifs ou encore les mobilités dites « douces ». Le volet « Mobilité multimodale » représente près de 60 % des engagements de l’État dans les CPER 2015-2020 tous volets confondus.

Les rapporteures ont pu constater au cours de leurs travaux que les CPER sont considérés par l’ensemble des acteurs – de la DGITM aux régions en passant par les gestionnaires d’infrastructures et les entreprises de travaux publics – comme un outil incontournable de modernisation et de développement des réseaux de transport routier, ferroviaire, fluvial et de transports en commun, avec pas moins de 24 milliards d’euros prévus sur six ans, dont 7 milliards d’euros pour l’État.

En termes d’aménagement, les CPER sont un outil de cohésion des territoires, aussi bien urbains que ruraux, répondant aux enjeux de désenclavement et de sécurité. Dans le domaine routier, ils favorisent le désenclavement des villes moyennes et des régions rurales. Dans le domaine ferroviaire, ils constituent une enveloppe complémentaire des 2,9 milliards d’euros consacrés annuellement par SNCF Réseau au réseau structurant qui s’avère essentielle pour l’entretien des petites lignes ferroviaires. En cela, les CPER sont un dispositif essentiel dans la réalisation des priorités fixées dans la loi d’orientation des mobilités.

Les CPER sont aussi un outil de développement économique. Ils irriguent l’activité des entreprises de travaux publics sur l’ensemble du territoire et constituent un outil de planification donnant à ces entreprises une visibilité suffisante pour mieux calibrer leurs besoins en recrutement, en formation et en investissements.

Enfin, les CPER sont un instrument important en matière de transition écologique. En développant les infrastructures routières, ils permettent de lutter contre la congestion du trafic. En finançant les infrastructures ferroviaires et fluviales et les modes de déplacement doux, ils contribuent à la « décarbonation » des transports.

Néanmoins, les CPER sont un outil affaibli en raison de certains retards et d’une réalisation parfois lente des projets qui empêche d’atteindre les objectifs fixés. Dès lors, il semble indispensable d’analyser les raisons qui peuvent expliquer les retards constatés dans la réalisation des CPER et d’envisager les solutions susceptibles d’y remédier.

 

 


I.   Les moyens prÉvus pour les infrastructures de transport dans les contrats de plan État-rÉgion sont en hausse

Le volet « Mobilité multimodale » des CPER représente 24 milliards d’euros d’investissement sur la période 2015-2020. La part de l’État, qui représente 29 % des engagements, est en légère hausse par rapport aux périodes précédentes.

A.   Une prÉvision de 23 milliards d’euros, dont 6,8 milliards d’euros pour l’État

Les opérations et montants initialement inscrits dans le volet « Mobilité multimodale » des CPER 2015-2020 – tous cofinanceurs confondus – s’élèvent à 23,36 milliards d’euros, dont 22,7 milliards d’euros pour les CPER et 666,8 millions d’euros pour les CPIER.

Montants inscrits dans le volet « mobilitÉ multimodale » des CPER 2015-2020
tous cofinanceurs confondus

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Transports collectifs (IDF)

Circulations douces et mobilités actives

CPER

22 691

7 681,6

5 430,2

1 513,6

486,3

7 483

96,3

CPIER

666,8

124,6

0

421

121,2

0

0

Total

23 358

7 806,2

5 430,2

1 934,6

607,5

7 483

96,3

Source : commission des finances d’après les réponses aux questionnaires budgétaires prévus à l’article 49 de la LOLF.

Le CPER de la région Île-de-France concentre 8,3 milliards d’euros. Il se distingue des autres CPER car il intègre un important volet « transports collectifs » lié au projet du Grand Paris, initialement évalué à 7,5 milliards d’euros, soit 32 % du montant total du volet « Mobilité multimodale » des CPER. Les engagements hors Île-de-France représentent 15 milliards d’euros.

La participation de l’État au volet « Mobilité multimodale » s’élève à 6,84 milliards d’euros, soit 29,3 % des engagements du volet. Les crédits correspondants proviennent de fonds de concours versés par l’AFITF au programme 203 Infrastructures et services de transports. En outre, il faut y ajouter les 193 millions d’euros financés par VNF, opérateur de l’État, pour la gestion des infrastructures fluviales.

Contribution de l’État au volet « mobilitÉ multimodale » des CPER 2015-2020

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Transports collectifs (IDF)

Circulations douces et mobilités actives

CPER

6 685,4

1 962,3

3 075,2

255,3

2,4

1 382

8,2

CPIER

155,9

51,4

0

104,5

0

0

0

Total

6 841,2

2 013,7

3 075,2

359,8

2,4

1 382

8,2

Source : commission des finances d’après les réponses aux questionnaires budgétaires prévus à l’article 49 de la LOLF.

Sur les 23,4 milliards d’euros destinés aux transports, les engagements des régions s’élèvent initialement à 7,7 milliards d’euros, soit 33 % du total.

La part des autres cofinanceurs s’élève à 8,6 milliards d’euros, soit 37 % du montant total. Les cofinancements sont apportés par :

– d’autres collectivités territoriales, principalement les départements et certains établissements publics de coopération intercommunale ;

– les gestionnaires d’infrastructures : outre VNF pour le réseau fluvial, SNCF Réseau pour le réseau ferroviaire ainsi que les grands ports maritimes ;

– enfin, une partie des opérations inscrites dans les CPER a vocation à être cofinancée via les fonds structurels de l’Union européenne (environ 233 millions d’euros) ; les CPER constituent alors les contreparties nationales indispensables à l’engagement des financements européens.

RÉpartition par cofinanceur des montants inscrits
dans le volet « mobilitÉ multimodale » des CPER 2015-2020

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM et Régions de France.

Sauf exception, les cofinanceurs ne sont pas signataires des contrats de plan. En conséquence, une partie des montants inscrits dans les CPER est uniquement estimative, voire n’est pas affectée à un cofinanceur identifié. Dans la plupart des cas, ces financements doivent être précisés ultérieurement, une fois les études préliminaires réalisées, dans les conventions de financement préalables au début des travaux, qui engagent alors l’État et les régions mais aussi, le cas échéant, le maître d’ouvrage et les sociétés de travaux publics.

 


B.   un rÉajustement à hauteur de 24 milliards d’euros, dont 7,2 milliards d’euros pour l’État

En 2016-2017, les CPER ont été révisés pour s’adapter au format des nouvelles « grandes régions » résultant de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions ([30]). Le processus de révision a été finalisé par des avenants aux contrats signés pour l’essentiel avec les régions métropolitaines entre la fin 2016 et l’automne 2017.

Des ajustements par rapport aux montants et opérations initialement inscrits dans les contrats ont été définis en concertation avec les nouveaux exécutifs régionaux. Le montant total des financements prévus a ainsi été porté à 24,23 milliards d’euros, en hausse de près de 877 millions d’euros (+ 3,75 %).

CrÉdits inscrits dans le volet « mobilitÉ multimodale » des CPER 2015-2020
tous cofinanceurs confondus

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Transports collectifs (IDF)

Circulations douces et mobilités actives

CPER

23 531,9

7 875,8

5 834,6

1 508,3

527,6

7 660,3

149,3

CPIER

702,7

124,6

0,0

420,9

157,2

0,0

0,0

Total

24 234,6

8 000,4

5 834,6

1 929,3

684,8

7 660,3

149,3

Source : commission des finances d’après les réponses aux questionnaires budgétaires prévus à l’article 49 de la LOLF.

La part de l’État a progressé de 6,841 à 7,219 milliards d’euros. Le processus de revoyure s’est traduit par une hausse de 378,3 millions d’euros (+ 5,5 %). La part de l’État a ainsi augmenté à hauteur de 29,8 % des engagements (contre 29,3 % auparavant).

Contribution de l’État au volet « mobilitÉ multimodale »
des CPER 2015-2020

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Transports collectifs (IDF)

Circulations douces et mobilités actives

CPER

7 063,9

2 047,3

3 332,3

255,3

2,4

1 412,1

14,6

CPIER

155,8

51,4

0,0

104,5

0,0

0,0

0,0

Total

7 219,7

2 098,6

3 332,3

359,8

2,4

1 412,1

14,6

Source : commission des finances d’après les réponses aux questionnaires budgétaires prévus à l’article 49 de la LOLF.

La contribution de VNF a augmenté de 84,9 millions d’euros (+ 44 %) pour atteindre 277,9 millions d’euros.

À compter de 2017, il devient difficile d’obtenir des données consolidées pour l’ensemble des financements prévus dans les CPER. Les données les plus récentes dont dispose Régions de France remontent au 31 décembre 2018, qui estime à 8,2 milliards d’euros les engagements des régions.

C.   La contractualisation en outre-mer dans les contrats de convergence et de transformation 2019‑2022

Les CPER signés avec des collectivités d’outre-mer n’ont pas été modifiés par la revoyure de 2016-2017, à l’exception de celui de la Guyane qui a bénéficié de 100 millions d’euros supplémentaires (pour le doublement du pont du Larivot) dans le cadre du plan d’urgence décidé par le Gouvernement en avril 2017.

Toutefois, à compter de 2019, les cinq CPER signés avec la Guadeloupe, la Guyane, La Réunion, la Martinique et Mayotte ont été remplacés par des contrats de convergence et de transformation (CCT) pour la période 20192022. Un contrat supplémentaire a également été signé avec Saint Pierre et Miquelon.

Les contrats de convergence et de transformation reprennent une partie des engagements et des opérations non réalisés des CPER initiaux mais contiennent aussi des ajustements définis en concertation avec les exécutifs locaux. La part de l’État augmente d’environ 24 millions d’euros pour atteindre 227,7 millions d’euros.

Contribution de l’État au volet « transport »
des Contrats de convergence et de transformation 2019-2022

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Transports collectifs (IDF)

Circulations douces et mobilités actives

Total CCT

227,7

0,0

181,6

44,3

1,4

0,3

0,1

Pourcentage

100,00 %

0 %

79,77 %

19,47 %

0,59 %

0,13 %

0,04 %

Source : commission des finances d’après les réponses aux questionnaires budgétaires prévus à l’article 49 de la LOLF.

En 2020, certaines opérations liées aux infrastructures de transports ont été contractualisées en dehors du programme 203. C’est le cas de certains des financements destinés à la Guyane, dont 106,4 millions d’euros transitent désormais via le programme 162 Interventions territoriales de l’État de la mission Cohésion des territoires (dont 103,6 millions d’euros pour le routier, 2,5 millions d’euros pour les ports et 0,33 million d’euros pour les voies navigables).

D’après les données les plus récentes transmises par la DGITM, les montants qui demeurent inscrits dans les contrats de convergence et de transformation sont de 85,6 millions d’euros tous cofinanceurs confondus et 78,5 millions pour l’État.

CrÉdits inscrits dans le volet « transport »
des Contrats de convergence et de transformation 2019-2022

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Aérien

Circulations douces et mobilités actives

Total

85,6

– 

44,2

40,1

0,6

0,8

– 

État

78,5

– 

38,9

38,8

0,6

0,3

– 

Régions

1,3

– 

– 

1,3

– 

– 

– 

Autres

5,8

– 

5,3

– 

– 

0,5

– 

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.

Les montants du volet « Mobilité multimodale » des CPER 2015-2020 ont été révisés en conséquence. Ils comprennent encore les montants et opérations des CPER outre-mer exécutés jusqu’à la fin de l’année 2018 mais excluent les montants et opérations non réalisés à cette même date.

En tenant compte des nouvelles modalités de contractualisation outre-mer, les engagements de l’État dans les CPER sont réduits de 7,219 milliards d’euros à 7,017 milliards d’euros. Toutefois, en additionnant ces engagements restants aux 227,7 millions inscrits dans les contrats de convergence et de transformation, les engagements de l’État sont toutefois bien en hausse à 7,245 milliards d’euros.

Contribution de l’État au volet « mobilitÉ multimodale »
des CPER 2015-2020

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Transports collectifs (IDF)

Circulations douces et mobilités actives

Total

7 017,6

2 098,6

3 166,9

323,4

2,1

1 412,1

14,6

Pourcentage

100,00 %

29,90 %

45,13 %

4,61 %

0,03 %

20,12 %

0,21 %

Source : commission des finances d’après les réponses aux questionnaires budgétaires prévus à l’article 49 de la LOLF.

Tous cofinanceurs confondus, le montant total inscrit dans le volet « Mobilité multimodale » des CPER diminue de 24,23 milliards d’euros à 23,90 milliards d’euros. La part de l’État représente 29,4 % contre 33,7 % pour les régions et 36,9 % pour les autres cofinanceurs.

CrÉdits inscrits dans le volet « mobilitÉ multimodale » des CPER 2015-2020
tous cofinanceurs confondus

(en millions d’euros)

 

Total

Ferroviaire

Routes

Ports

Fluvial

Transports collectifs (IDF)

Circulations douces et mobilités actives

Tous cofinanceurs

23 901,9

7 717,6

5 830,8

1 775,2

752,5

7 660,3

165,5

État (P203 / AFITF)

7 017,3

2 120,6

3 143,2

323,4

2,1

1 412,1

16,0

Régions

8 072,1

3 116,9

1 198,8

424,7

194,8

3 047,0

89,8

VNF

282,2

0,0

0,0

0,0

282,2

0,0

0,0

Autres financeurs

8 530,3

2 480,1

1 488,8

1 027,1

273,4

3 201,2

59,7

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.

Le périmètre du volet « Mobilité multimodale » des CPER a donc beaucoup évolué depuis la répartition initiale fixée en 2015 jusqu’à la signature des contrats de convergence et de transformation en passant par la revoyure de 2016‑2017. Cela complique le suivi des crédits prévus. Toutefois, le montant global (24 milliards d’euros tous cofinanceurs confondus) et la part de l’État (7 milliards d’euros) sont relativement constants.


D.   Les engagements de l’État au titre des CPER sont en hausse

Il est délicat de comparer les générations de CPER les unes avec les autres dans la mesure où leurs périmètres ne sont pas tout à fait identiques. Ainsi, contrairement aux générations précédentes, les transports en commun hors Île‑de‑France ne sont pas dans le champ des CPER 2015-2020. Surtout, les CPER 2007‑2014 ne contenaient pas de volet routier, celui faisant l’objet d’une contractualisation distincte dans le cadre des plans de modernisation des itinéraires routiers (PDMI).

Sous cette réserve, on peut souligner une progression des moyens consacrés par l’État aux infrastructures de transports dans les CPER 20152020 par rapport aux deux générations précédentes :

– dans les CPER 2000-2006, qui intégraient le volet routier, le montant de la participation de l’État prévue initialement s’élevait à 6,99 milliards d’euros ;

– dans les CPER 2007-2014, la part de l’État était de 3,01 milliards d’euros hors opérations routières et l’enveloppe étatique inscrite dans les PDMI était de 3,6 milliards d’euros, soit un total de 6,61 milliards d’euros ;

– les engagements de l’État au titre des CPER 2015-2020, initialement comparables à ceux des générations précédentes (6,841 milliards d’euros), sont donc en légère hausse après la revoyure de 2016-2017 (7,219 milliards d’euros) et après la conclusion des contrats de convergence et de transformation (7,017 milliards d’euros ou 7,245 milliards d’euros selon que l’on inclut ou non les 227,7 millions d’euros initialement inscrits dans les contrats outre-mer).

Évolution des CrÉdits de l’État inscrits dans les CPER

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.


E.   Des orientations stratÉgiques dÉcidÉes par les rÉgions en concertation avec l’État

Le choix des opérations inscrites dans les contrats a été négocié entre, d’une part, l’État via les préfets et les secrétariats généraux des affaires régionales (SGAR) et, d’autre part, chaque région. Le contenu des CPER dépend donc des orientations stratégiques de l’État et des priorités – communes ou spécifiques – des régions.

Tous cofinanceurs confondus, le volet ferroviaire représente 33 % des opérations et montants inscrits dans les CPER, auxquels il convient de rajouter 32 % pour le financement des transports collectifs – majoritairement ferroviaires – en Île‑de-France. Le volet routier représente 23,5 % des dépenses, contre 8 % pour les ports, 3 % pour le transport fluvial et 0,05 % pour les circulations douces et les mobilités actives.

Au total, les ressources affectées aux modes alternatifs à la route représentent plus de 75 % des crédits. Les CPER constituent donc une composante essentielle de la stratégie de « décarbonation » des transports et de « neutralité carbone » à l’horizon 2050.

RÉpartition des CrÉdits inscrits dans le volet « mobilitÉ multimodale »
des CPER 2015-2020 (tous cofinanceurs confondus)

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.

La répartition des dépenses entre l’État et les régions varie selon les modes de transport. Ainsi, sur le transport routier, l’État prend en charge une part plus importante des dépenses (environ 60 % pour l’État et 40 % pour les régions), tandis que la participation des régions est plus conséquente sur le volet ferroviaire. Ainsi, pour l’État, le premier poste de dépense est le routier (45 %), puis le ferroviaire (29 %) et les transports collectifs en Île-de-France (20 %).

Concernant les régions, 54 % des financements sont affectés au transport ferroviaire, 31 % au transport routier et environ 14 % aux ports ainsi qu’au transport fluvial. Seulement trois régions consacrent une part plus importante au mode routier plutôt qu’au mode ferroviaire (la région Grand Est, les Hauts-de-France et l’Occitanie).

Concernant le volet routier des CPER, les orientations stratégiques de l’État et des régions étaient de répondre aux enjeux de sécurité, de réduction de la congestion chronique, de désenclavement et d’amélioration de desserte des territoires ruraux comme des grands pôles économiques ainsi qu’aux enjeux d’amélioration de la qualité de vie des riverains. Ces orientations ont servi dans la détermination des priorités de programmation annuelle en fonction des ressources disponibles et de l’avancement des études et des procédures des opérations.

S’agissant du volet ferroviaire, les orientations portaient sur trois priorités : la modernisation du réseau structurant, la modernisation des nœuds ferroviaires d’importance nationale les plus contraints et la réalisation des projets régionaux de développement ayant un fort potentiel, soit en termes d’amélioration de la qualité de service aux voyageurs, soit en termes de report modal. Toutefois, les régions ont souhaité élargir le champ des priorités en vue d’y inclure, notamment, des besoins de régénération des lignes de desserte fine du territoire.

Si huit régions (sur les vingt-sept qui existaient jusqu’en 2015) ont souhaité inclure dans leur contrat de plan un sous-volet fret et plateformes multimodales, la priorité a souvent été donnée au transport de voyageurs et aux lignes de TER sur le fret ferroviaire.

 


II.   L’État d’avancement du volet « mobilitÉ multimodale » des cper : des retards d’exÉcution progressivement rattrapÉs

Depuis leur conclusion en 2015, les CPER accumulent des retards. Dès 2019, une prolongation des contrats jusqu’en 2022 est devenue inévitable, sans toutefois garantir que l’ensemble des projets inscrits dans les contrats seraient in fine financés et mis en œuvre.

Toutefois, la trajectoire budgétaire prévue dans la loi d’orientation des mobilités et, depuis quelques mois, le plan de relance mis en place pour lutter contre les effets de la crise sanitaire ont permis d’accélérer l’exécution des contrats.

A.   Des retards importants en dÉbut de programmation

L’exécution du volet « Mobilité multimodale » des CPER a connu un certain nombre de retards en début de la programmation, dans un contexte marqué par la réforme des régions et les contraintes budgétaires.

1.   Un démarrage difficile dans le contexte de la fusion des régions

Les trois premières années d’exécution des CPER 2015-2020 se sont inscrites dans le contexte particulier de la réforme des régions résultant de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions ([31]). En 2016-2017, les CPER ont été révisés pour s’adapter au format des nouvelles « grandes régions ». Le processus de révision a été finalisé par des avenants aux contrats signés pour l’essentiel avec les régions métropolitaines entre la fin 2016 et l’automne 2017.

La fusion des régions intervenue en plein démarrage de la programmation et la clause de revoyure qui en a découlé ont entrainé une inertie due à la réorganisation des services déconcentrés de l’État et des services des régions ainsi qu’un certain attentisme dans la réalisation des projets. En conséquence, « c’est avec près de deux années de retards que cette génération de contrats de plan a enfin vu le jour sous sa forme définitive » ([32]).

En outre, la fusion des régions a amené à une absence de réponse homogène des SGAR quant à la fongibilité des AE de l’État. Celle-ci a par exemple été refusée pour le CPER Nouvelle-Aquitaine issu des trois CPER Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes, entraînant un manque de souplesse dans la gestion des opérations. Régions de France indique que ce processus n’a été normalisé qu’en fin de mandat.

Toutefois, ces difficultés n’étaient que temporaires. En définitive, le taux d’avancement des CPER dans les régions qui ont fusionné n’est pas nécessairement en retrait par rapport à celui des régions qui sont restées à périmètre géographique identique.

2.   Une accélération des engagements portée par la loi d’orientation des mobilités

Les projets inscrits dans les CPER ont vocation a minima à être engagés pendant la durée de la programmation.

L’engagement des crédits de l’État prévus dans les CPER n’a été que très progressif. L’exécution des AE n’atteignait que 29 % fin 2017 et 39,5 % fin 2018, soit un rythme d’avancement de seulement 10 % par an.

Évolution du taux de rÉalisation des crÉdits de l’État
dans le cadre des CPER 2015-2020

Source : commission des finances d’après les réponses aux questionnaires budgétaires prévus à l’article 49 LOLF.

L’augmentation des moyens affectés aux infrastructures et services de transports prévue dans la loi d’orientation des mobilités a permis une accélération des engagements, avec un rythme d’avancement supérieur à 10 % en 2019 et 2020.

S’agissant des CP de l’État, leur niveau a atteint 16 % en 2018, 26 % en 2019 et 35 % en 2020. Néanmoins, une fois les AE engagées, l’exécution des CP a vocation à s’étaler au-delà de la période 2015-2020.

 


3.   La prolongation des CPER jusqu’en 2022

À mi-parcours, le faible taux d’exécution des AE et des CP de l’État ainsi que les rythmes de réalisation alors constatés, et malgré les avancées permises par la loi d’orientation des mobilités, rendaient impossible l’achèvement du volet « Mobilité multimodale » des CPER 2015-2020 en 2020. En conséquence, il est devenu de plus en plus évident que ce volet devrait être prolongé.

En outre-mer, la prolongation des contrats a été officialisée dès 2018 avec la substitution des CPER par les contrats de convergence et de transformation pour la période 2019‑2022.

Dans l’hexagone, la prolongation était pressentie mais n’a été officialisée qu’en 2020. Le Premier ministre a alors validé et confirmé la prolongation jusqu’au 31 décembre 2022 du volet « Mobilité multimodale » des actuels CPER. Des avenants ont été signés en conséquence avec les régions entre la fin 2019 et 2020.

Il convient de souligner qu’un tel prolongement n’est pas inédit. Les CPER 2007-2013 et les plans de modernisation des itinéraires routiers (PDMI) avaient aux aussi été prolongés jusqu’en 2014.

4.   Le rechargement des CPER via le plan de relance 2020-2022

Dans le contexte de crise sanitaire, le plan de relance adopté dans la loi de finances pour 2021 prévoit des crédits supplémentaires pour accélérer la réalisation des CPER et des contrats de convergence et de transformation sur la période 2020‑2022. Ils prévoient un investissement de l’État à hauteur de 1,39 milliard d’euros, dont 670 millions d’euros pour les transports collectifs en Île‑de‑France, 300 millions d’euros pour les petites lignes ferroviaires, 175 millions d’euros pour le verdissement des ports et 253 millions d’euros pour le volet routier.

CrÉdits du plan de relance destinÉs au volet « mobilitÉ » des CPER 2015-2020

Source : données transmises par la DGITM.

Des avenants ont été ou seront signés afin d’acter les modifications de programmation liées à ces financements.

Les crédits du plan ont, dès la fin de gestion 2020, permis de poursuivre l’accélération des CPER observée depuis l’adoption de la loi d’orientation des mobilités. Les rapporteures soulignent l’importance du plan de relance qui permet à l’État de tenir ses engagements.


B.   Le taux d’avancement des CPER fin 2020

Les données transmises par la DGITM indiquent le taux d’exécution des AE et des CP de l’État et de VNF à fin 2020. Toutefois, le suivi des crédits outre-mer est plus compliqué en raison des changements de périmètre. En outre, il est difficile de comparer l’État avec les autres cofinanceurs en raison du manque de données.

1.   Le taux d’exécution fin 2020

À la fin de l’exercice 2020, au terme théorique des CPER 2015-2020, le montant des crédits de l’État exécutés dans le cadre du volet « Mobilité multimodale » s’élève à 4,91 milliards d’euros en AE, soit un taux d’exécution de 70 %.

exÉcution des AE de l’État au 31/12/2020

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.

Le taux d’engagement varie grandement selon les régions et les modes de transport. Il est de 61 % sur le volet routier et de 78 % hors volet routier.

Il convient de souligner la bonne exécution du CPER Île-de-France, dont le taux s’élève à 90 % fin 2020 et avoisinera les 100 % en 2022.

Pour le volet routier, les disparités régionales s’expliquent par le poids de certaines opérations dans l’enveloppe de crédits. Ainsi, dans le Grand Est, le poids de l’opération A304 (prolongement de l’A34 vers la Belgique) dont les travaux sont achevés explique le taux d’avancement élevé. À l’inverse, en Normandie, les retards de travaux d’aménagement des accès au pont Flaubert à Rouen expliquent un taux sensiblement inférieur à la moyenne nationale.

Les différentiels de taux d’exécution entre régions sur le volet ferroviaire proviennent pour l’essentiel des écarts de maturité entre projets inscrits dans les différents CPER et des éventuelles difficultés techniques ou juridiques pouvant être rencontrées au cours des différents stades d’études et des procédures réglementaires (projets en surcoûts, projets contestés localement, projets abandonnés au profit de la régénération des lignes de desserte fine du territoire).

Au 31 décembre 2020, l’exécution des CP de l’État atteint 2,44 milliards d’euros, soit un taux d’exécution de 35 %.

exÉcution des CP de l’État au 31/12/2020

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.

2.   Le cas particulier des CPER outre-mer

S’agissant des cinq CPER outre-mer, la présentation de la DGITM prête à confusion. Les taux d’engagement transmis atteignent 100 % (voir page précédente). Toutefois, ils sont calculés uniquement à partir des crédits exécutés à la fin de l’année 2018 et non à partir des crédits initialement inscrits en 2015. En conséquence, ils ne tiennent pas compte des opérations non réalisées à fin 2018 qui ont été sorties des CPER et dont certaines ont été réinscrites dans les contrats de convergence et de transformation.

Si l’on considère le taux d’exécution des CPER outre-mer à la fin de l’année 2018, avant leur substitution par les contrats de convergence et de transformation, le taux d’exécution s’élève à 19 %.

exÉcution des AE de l’État au 31/12/2018

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les réponses au questionnaire budgétaire transmis lors du PLF 2019.

Par ailleurs, en tenant compte des 227,7 millions d’euros initialement inscrits au titre des transports dans les contrats de convergence et de transformation pour la période 2019-2022, le taux d’exécution est en moyenne de 8 % à fin 2020.

exÉcution des CCT de l’État au 31/12/2020

(en millions d’euros)

Contrat

Crédits inscrits

AE à fin 2020 prév.

(en euros)

AE à fin 2020

(en %)

Guadeloupe

6 860 000

0

– 

Guyane

157 100 00

16 099 007

10 %

Martinique

13 010 000

90 000

1 %

Mayotte

31 800 000

4 500 000

14 %

Réunion

12 410 000

0

– 

St Pierre et Miquelon

6 500 000

6 016 064

93 %

Total général

227 680 000

18 280 071

8 %

Source : données communiquées par la DGITM lors de l’examen du PLF 2021.

Si l’on considère le taux d’exécution avec les données les plus récentes, qui ne tiennent compte que des montants qui restent inscrits dans le volet « Mobilité multimodale » des CPER et qui transitent via le programme 203, soit 78,5 milliards, le taux d’exécution est de 30 % en AE et de 10 % en CP.

exÉcution des AE de l’État dans les CCT

(en millions d’euros)

Source : données communiquées par la DGITM.

exÉcution des CP de l’État dans les CCT

(en millions d’euros)

Source : données communiquées par la DGITM.

Compte tenu des nombreux changements de périmètre, l’avancement des CPER outre-mer devenus contrats de convergence et de transformation est difficilement lisible.

3.   L’exécution des CPER par les autres cofinanceurs : un manque de données qui empêche toute comparaison

S’agissant des autres cofinanceurs des CPER, le peu d’informations disponibles ne permet pas de connaître le taux d’exécution des CPER dans leur ensemble, ni de comparer le taux d’exécution des crédits de l’État par rapport à ceux des autres cofinanceurs.

a.   Le taux d’engagement des régions

Malheureusement, les données les plus récentes à la disposition de Régions de France remontent au 31 décembre 2018. Pour les régions métropolitaines, tandis que l’État avait engagé à cette date 1,8 milliard d’euros, soit 34 % des montants inscrits, les régions avaient engagé 2,5 milliards d’euros, soit 54 % des montants. S’agissant des CP, 17 % avaient été crédités par l’État (0,9 milliard d’euros) contre 24 % par les régions (1,1 milliard d’euros).

Les rapporteurs regrettent le manque de données consolidées sur l’exécution des CPER par les régions, qui ne permettent pas de comparer de manière fiable l’état d’avancement des projets par l’État et par les régions.

b.   L’exécution des crédits de VNF

La DGITM a été en mesure de communiquer aux rapporteures les données concernant l’exécution des crédits de VNF sur une partie du volet fluvial.

À la fin de l’exercice 2020, le taux d’exécution des crédits de VNF atteint 63 % en AE et 41 % en CP. Ils sont relativement proches du taux d’exécution des crédits de l’État. Ils sont légèrement inférieurs à la moyenne étatique.

ExÉcution des crÉdits de VNF dans le cadre des CPER

Source : données communiquées par la DGITM.

La DGITM indique que les taux d’exécution sont calculés sur des données partielles. Ils ne valent pas pour l’ensemble du volet fluvial et, notamment, ne tiennent pas compte des 2,1 millions d’euros de part État inscrits au titre du CPER Guyane (où VNF n’a pas compétence). En outre, ils ne sont pas calculés par rapport à l’intégralité des engagements de VNF dans les CPER (282,2 millions d’euros) et excluent, par exemple, le plan Seine (4,5 millions d’euros), qui ne relève pas directement du volet mobilité des CPER.

c.   L’exécution des crédits du volet routier

Concernant l’exécution des CPER par les autres cofinanceurs, les seules informations disponibles concernent le volet routier, pour lequel l’État assure la maîtrise d’ouvrage des opérations inscrites aux CPER et contrats de convergence et de transformation.

Sur ce mode, tous cofinanceurs confondus, les montants exécutés à fin 2020 atteignent 26 % en AE et 15 % en CP. Ils sont donc inférieurs au taux d’exécution des crédits de l’État au titre du volet routier à la fois en AE (58 %) et en CP (34 %).

ExÉcution des crÉdits du volet routier tous cofinanceurs confondus

Source : données communiquées par la DGITM.

Si la DGITM a été en mesure de fournir aux rapporteurs des données détaillées sur l’exécution des crédits de l’État, le suivi des financements mobilisés par les autres cofinanceurs dans le cadre des CPER fait l’objet de grandes lacunes, qui compliquent le travail d’évaluation.

C.   Un taux d’exÉcution comparable aux gÉnÉrations prÉcÉdentes grÂce aux crÉdits du plan de relance

Mesurer le taux de réalisation des CPER à l’aune du taux théorique et inatteignable de 100 % n’a guère de sens. Toutefois, on peut le comparer avec celui des deux générations précédentes – les limites de cette comparaison ayant déjà été soulignées. À cet égard, force est de constater que le taux d’engagement de 70 % constaté fin 2020 est inférieur à celui du volet transport des CPER 2000-2006 (84 %) et à celui des CPER 2007-2014 (85 % ([33])).

Toutefois, en tenant compte du plan de relance, il est attendu un taux de réalisation de 90 % en 2022. Le plan de relance permettra donc d’atteindre un taux d’engagement au moins équivalent sinon légèrement supérieur à celui des générations précédentes. Cette comparaison est légitime dans la mesure où les taux d’engagement des CPER 2000-2006 et 2007-2014 tiennent eux-mêmes compte des mesures de rallonge décidées en fin d’exécution. Ainsi, les CPER 2007-2013 avaient été prolongés jusqu’en 2014 tandis que les CPER 2000-2006 avaient bénéficié d’un plan de relance pour les opérations routières dans la loi de finances rectificative pour 2005.

 

Par ailleurs, le volume des engagements de l’État exécutés dans le cadre des CPER est en augmentation sur la dernière décennie. Selon les données transmises par la DGITM, le volume des engagements de l’État atteint en moyenne 822 millions d’euros par an sur la période 2015-2020 contre 690 millions d’euros par an sur la période 2007-2014 (en tenant compte des CPER et des PDMI). Cette moyenne tient compte des AE exécutés en 2020 (1,25 milliard d’euros) et donc des crédits du plan de relance dédiés au renforcement des CPER.

Volume des crÉdits de l’État exÉcutÉs dans le cadre des CPER

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.

D.   Il est difficile d’estimer l’avancement rÉel des cper

Outre l’exécution des crédits budgétaires, il est difficile d’estimer l’avancement réel des opérations inscrites dans les CPER.

1.   Il n’existe pas d’indicateurs de performance spécifiques aux CPER

D’après les informations transmises par la DGITM, sur les 563 projets inscrits dans le volet « Mobilité » des CPER 2015-2020, seuls 128 soit 23 % d’entre eux ont abouti, 309 soit 55 % sont encore en cours de réalisation et 126 soit 22 % d’entre eux restent à initier. Une majorité d’opérations sont donc encore en cours mais, pour une grande partie, devraient pouvoir être achevées d’ici 2022 grâce à la prolongation du volet mobilité du CPER.

En dehors de ces considérations générales, il n’existe que peu d’informations pour évaluer l’avancement réel des CPER. Les seuls indicateurs disponibles sont ceux contenus dans les projets et les rapports annuels de performance du programme 203 :

– le premier indicateur concerne l’intérêt socio-économique des opérations (indicateur 1.1), dont la première composante relative aux opérations ferroviaires, fluviales et portuaires est difficilement lisible. Quant à l’intérêt socio-économique des opérations routières, il est en hausse de 2,50 euros par euro investi en 2018 à 3,3 euros en 2020 ;

– concernant le deuxième indicateur, relatif à l’état des réseaux routier, ferroviaire et fluvial (indicateur 2.2), il ne démontre aucune amélioration depuis plusieurs exercices, comme les rapports spéciaux précédents ont pu le souligner ;

– enfin, s’agissant de la part modale des transports non routiers (indicateur 3.1), celle-ci est, en 2020, non seulement inférieure aux prévisions, mais aussi en baisse par rapport aux années précédentes.

En outre, ces indicateurs sont limités en ce qu’ils englobent l’ensemble des dépenses consacrées aux infrastructures et services de transports, et non uniquement les crédits engagés dans le cadre des CPER.

2.   Des limites méthodologiques qui freinent toute évaluation

Les rapporteures ont tenté de connaître le nombre de kilomètres de voies ferroviaires, de routes ou de canaux fluviaux concernés par les CPER.

S’agissant du volet routier, environ 177,3 kilomètres de routes ou sections de routes ont été mis en service sur le réseau routier national non concédé dans le cadre d’opérations financées par les CPER 2015-2020, soit un rythme annuel d’environ 29,6 kilomètres. Ces chiffres ne tiennent pas compte de l’ensemble des sections existantes sur lesquelles des aménagements ont été réalisés.

Nombre de kilomètres de routes mis en service dans le cadre des CPER

Régions

Nombre de kilomètres de routes (RRN non concédé) mis en service entre 2015 et 2020 dans le cadre des CPER

Auvergne Rhône-Alpes

32,40 km

Bourgogne Franche-Comté

15,00 km

Bretagne

12,10 km

Grand Est

40,65 km

Hauts-de-France

15,77 km

Ile-de-France

5,73 km

Nouvelle Aquitaine

21,00 km

Occitanie

27,65 km

Provence-Alpes-Côte d’Azur

3,00 km

Pays de la Loire

4,00 km

Source : données communiquées par la DGITM.

Concernant le volet ferroviaire des CPER, aucun chiffre n’est disponible. La DGITM souligne que de telles estimations sont délicates, dans la mesure où de nombreux projets sont difficilement caractérisables par un kilométrage (réaménagement de plans de voies, mise en accessibilité de gares, études de grands projets).

Pour le domaine fluvial, une réflexion en nombre de kilomètres n’est pas adaptée non plus, puisqu’elle ne permet pas de tenir compte de la reconstruction de barrages, de l’approfondissement des canaux ou encore de la modernisation des écluses.

Les rapporteures prennent acte de ces limites méthodologiques. Toutefois, elles s’étonnent du manque d’indicateurs disponibles pour évaluer la mise en œuvre réelle et la performance des CPER. Elles notent que les régions elles aussi regrettent la difficulté rencontrée par les gestionnaires d’infrastructures pour délivrer un état patrimonial détaillé du réseau existant.

III.   L’Évaluation des CPER : Un dÉcalage entre la contrainte budgÉtaire et les ambitions portÉes dans les CPER

Les CPER ne constituent pas un engagement contractuel, au sens juridique du terme, mais davantage une programmation prévisionnelle des dépenses sur une période de six à huit ans. D’une part, ils n’ont pas de caractère contraignant sur les lois de finances. D’autre part, la programmation peut faire l’objet de modifications au gré des difficultés techniques rencontrées, des procédures juridiques engagées et des surcoûts qui peuvent en découler. En tout état de cause, les contrats n’emportent aucune conséquence directe quant à la réalisation effective des opérations ([34]).

Le faible taux d’avancement des CPER tient à la contrainte budgétaire qui, jusqu’à la loi d’orientation des mobilités puis au plan de relance, a fortement pesé sur le niveau des engagements de l’État. Toutefois, il résulte aussi du décalage entre le faible niveau d’engagements que l’État était en mesure de mobiliser et le niveau d’ambition parfois très fort des contractualisations ainsi que par la trop faible maturité de certains projets.

A.   Une contrainte budgÉtaire forte en dÉbut de pÉriode mais dessERrÉe par la loi d’orientation des mobilitÉs

Si la loi d’orientation des mobilités a permis des avancées indéniables, elle est arrivée en cours d’exécution et ne permet pas de combler l’intégralité des retards pris en début de programmation en raison de la faiblesse structurelle des ressources de l’AFITF.

1.   Le manque de ressources structurel de l’AFITF

Le volet « Mobilité multimodale » est intégralement financé par l’AFITF, qui finance aussi nombre d’autres investissements en matière de transports. Le budget de l’AFITF ne comporte pas d’échéancier spécifique lié aux CPER. L’agence signe annuellement des conventions avec l’État, pour chaque financement, sans s’engager sur une programmation pluriannuelle de ses crédits. Le taux d’avancement des CPER est donc conditionné aux ressources de l’agence sur la ligne des CPER, qui dépendent des affectations décidées dans les lois de finances.

Or, l’AFITF est confrontée à un manque structurel de ressources pour faire face à l’intégralité des dépenses qu’il lui est demandé de prendre en charge. Depuis sa création en 2004 ([35]), toutes les tentatives de consolidation se sont soldées par un échec. La programmation budgétaire de l’agence a été remise en cause en 2006 par la privation des sociétés concessionnaires d’autoroutes, en 2013 par la suspension de l’écotaxe poids lourds, en 2018 par la diminution des recettes d’amendes radars et l’abandon de la hausse de la taxe carbone sur les carburants et en 2020 par l’effondrement des recettes de la taxe de solidarité sur les billets d’avion dans le contexte de crise sanitaire.

L’agence a également dû financer à titre exceptionnel les pénalités résultant de l’abandon de l’écotaxe (326 millions d’euros en 2018) et financer du matériel roulant (trains d’équilibre du territoire) pour des montants importants. Ce manque de visibilité sur les recettes affectées à l’AFITF est pénalisant pour financer des investissements programmés à moyen ou long termes.

En conséquence, l’AFITF a dû revoir ses priorités et reporter ses engagements en faveur des CPER, qui ont souvent constitué une variable d’ajustement. Toutefois, c’est bien le manque de moyens de l’État qui a conduit à cette dérive. L’agence quant à elle a pu honorer l’ensemble des appels de fonds qu’elle a reçus pour le programme 203 sur la période 2015-2020.

La rareté des ressources de l’AFITF a conduit à des taux d’engagement réels très inférieurs au taux d’engagement théorique qui aurait permis une exécution intégrale des CPER. Les opérations inscrites dans les contrats nécessitaient un engagement compris entre 1,1 et 1,2 milliard d’euros par an. Or, le budget total de l’AFITF, hors remboursement de l’écotaxe poids lourds, s’élevait à 1,8 milliard d’euros en 2015 et 2,1 milliards d’euros en 2016. Le niveau des engagements de l’État pour les CPER n’a dépassé 800 millions d’euros qu’en 2019 avant d’atteindre 1,25 milliard d’euros en 2020 à la faveur du plan de relance.

Comparaison des engagements thÉoriques et rÉels de l’État
dans le cadre des CPER 2015-2020

Source : commission des finances d’après les données transmises par la DGITM.

En début de programmation, l’avancement des CPER a également été freiné par des mesures de régulation budgétaire. Ainsi, en 2017, l’exécution du programme 203 a été contrainte par le gel de 289 millions d’euros de fonds de concours reportés de 2016 et provenant des collectivités territoriales, pour l’essentiel au titre des investissements des CPER.

2.   Des « découpages » malvenus

Les contraintes pesant sur les finances publiques nuisent d’autant plus à l’exécution des CPER qu’elles peuvent parfois conduire, sur demande des régions mais aussi de l’État lui-même, à « découper » les projets en plusieurs opérations distinctes. Si cette pratique permet de combler temporairement certaines attentes locales, elle multiplie de fait la charge budgétaire qui pourrait être optimisée par une « massification ». Le manque de visibilité sur les crédits mobilisables empêche ainsi une programmation efficace.

En conséquence, il a été progressivement mis fin à cette pratique. Sous l’impulsion du contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM), une application plus ferme de la LOLF ([36]) a été mise en œuvre pour éviter les contractualisations partielles d’opérations sauf s’il existe plusieurs phases pouvant être mises en service séparément selon la logique des tranches fonctionnelles. Désormais, pour les opérations nouvelles non engagées en travaux, il est impératif de mettre en place en une seule fois l’intégralité des AE nécessaires au financement d’une phase fonctionnelle (au sens de la mise en service pour l’usager).

Par ailleurs, le manque de moyens budgétaires conduit aussi les maîtres d’ouvrage à réduire le coût des opérations au minimum, ce qui entraîne nécessairement des surcoûts au moindre aléa, avec des difficultés de renégociation des conventions de financement entre les différentes parties prenantes.

3.   Les avancées importantes permises par la loi d’orientation des mobilités

Dans la continuité des Assises de la mobilité qui se sont tenues à l’automne 2017 et des travaux du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) présentés en février 2018, la loi d’orientation des mobilités a prévu une programmation pluriannuelle ambitieuse qui prévoit d’augmenter significativement les investissements de l’État dans les infrastructures de transports.

Évolution des dÉpenses de l’AFITF
prÉvue dans la loi d’orientation des mobilitÉs

(en millions d’euros)

 

2019

2020

2021

2022

2023

Dépenses totales

2 683

2 982

2 687

2 580

2 780

Source : article 2 de la loi d’orientation des mobilités.

Les dépenses de l’AFITF, qui s’étaient élevées à 9,2 milliards d’euros sur la période 2013-2017, doivent atteindre :

– 13,4 milliards d’euros entre 2019 et 2023, soit 2,7 milliards d’euros par an, ce qui représente une hausse de 40 % par rapport à la période précédente ;

– puis 14,3 milliards d’euros sur la période 2023-2027, soit 2,9 milliards d’euros par an.

L’augmentation des ressources de l’agence, malgré l’impact de la crise sanitaire qui a été compensée en 2020 (voir la première partie du présent rapport), combinée au plan de relance en fin d’année dernière, conduit à un renforcement des crédits dédiés aux CPER. La DGITM anticipe ainsi un taux d’engagement de 90 % fin 2022.

À cet égard, les rapporteures tiennent à souligner la logique de la loi d’orientation des mobilités, qui était de mettre en cohérence les moyens budgétaires mobilisés avec les besoins identifiés et priorisés. S’il était déjà trop tard pour rattraper l’intégralité des retards au début de la période 2015-2020, la loi constitue un bon élément de réponse et une base solide sur laquelle il sera possible de s’appuyer à l’avenir.

4.   Des responsabilités financières insuffisamment définies

Il convient de souligner que l’intégralité des financements prévus dans le cadre du volet « Mobilité multimodale » des CPER n’étaient pas affectés à un cofinanceur précisément identifié.

Ainsi, Régions de France estimait, en début de programmation, que 23 % des contributions financières aux CPER n’étaient pas affectées, soit 5,4 milliards d’euros (dont 3,3 milliards d’euros en Île-de-France). En outre, 11 % des contributions affectées des CPER n’étaient pas contractualisées et apparaissaient seulement comme des contributions potentielles des collectivités territoriales, des gestionnaires d’infrastructures et de l’Union européenne. Ces parts variaient selon les régions.

La DGITM confirme que toutes les opérations d’investissement routier ne disposaient pas d’un financement intégral et que, malgré les contre-indications soulevées par l’État, certaines régions avaient souhaité inscrire dans les CPER des opérations partielles. S’agissant du ferroviaire, dans la plupart des régions, les plans de financement étaient majoritairement exhaustifs. Néanmoins, certaines régions, faisaient exception en prévoyant notamment une participation de collectivités locales sans que celles-ci aient été identifiées préalablement à la signature du CPER ou un subventionnement européen non certain à la date de signature du CPER.

Par ailleurs, la répartition des surcoûts apparus en cours de réalisation n’est pas régie par des règles uniformes et dépend de l’origine de ces surcoûts. Leur prise en charge résulte d’une négociation entre les parties prenantes avec l’idée sous-jacente de respecter autant que possible la répartition initiale du financement de l’opération.

5.   La question de la participation de SNCF Réseau aux CPER

L’exécution des CPER 2015-2020 a été marquée par la signature du contrat de performance 2017-2026 entre l’État et SNCF Réseau. Il impose notamment au gestionnaire d’infrastructures une règle d’or ([37]) visant à limiter son endettement.

Les régions estiment que le contrat de performance conduit à exclure des CPER toutes les opérations de renouvellement du réseau existant et à limiter la participation de SNCF Réseau.

Toutefois, la DGITM indique que le contrat de performance n’a pas eu d’impact sur les montants de participation de SNCF Réseau aux projets inscrits dans les CPER. Le contrat n’a fait que préciser les conditions dans lesquelles SNCF Réseau pouvait contribuer aux projets de maintenance du réseau ferroviaire réalisés à la demande des pouvoirs publics en reprenant les règles précédemment applicables à Réseau Ferré de France : pour tout projet d’investissement, « SNCF Réseau détermine sa part contributive dans le financement de ce projet de manière à éviter toute conséquence négative sur ses comptes au terme de la période d’amortissement des investissements du projet » ([38]).

Ainsi, SNCF Réseau peut contribuer aux opérations de régénération des petites lignes à hauteur de la valeur actualisée nette des économies de maintenance permises par ces opérations, évaluées en moyenne nationale à 8,5 % du coût des opérations.

B.   Le manque de maturitÉ de certains projets face aux alÉas d’exÉcution

Les projets inscrits dans les CPER impliquent des opérations lourdes qui pour certaines s’étalent sur plusieurs années voire plusieurs décennies. Sur les volets routier et ferroviaire, les délais classiquement observés entre l’initiation d’une opération et le démarrage effectif des travaux sont de 4 à 10 ans, selon l’ampleur de l’opération et des phases de concertation nécessaires. L’inscription d’un projet au CPER doit prendre en compte la phase d’études et tous les délais associés aux procédures et aux concertations.

Or, il apparaît que certains des projets inscrits dans les CPER 2015-2020 n’étaient pas suffisamment matures pour être engagés sur la durée du contrat. Les aléas survenus en cours d’exécution ont non seulement pu allonger les délais d’études préalables, mais aussi entraîner des surcoûts budgétaires nécessitant une renégociation des conventions de financement, voire remettant en cause l’équilibre économique des opérations prévues.

1.   Certains projets inscrits dans les CPER manquaient de maturité

La mise en œuvre d’un projet d’infrastructure de transports se heurte parfois à des procédures légales et réglementaires plus complexes ou plus longues qu’anticipé : obligations de concertations préalables, participation du public, évaluation environnementale au titre de la loi sur l’eau ou de la protection d’espèces protégées, évaluation socio-économique, déclaration d’utilité publique. Il peut également s’agir de problématiques d’acquisitions foncières impliquant ou non des expropriations. Ce phénomène a été amplifié du fait des deux évolutions réglementaires majeures que représentent les deux ordonnances sur la consultation du public et l’évaluation environnementale de 2016 et 2017.

Outre les procédures administratives, la réalisation des CPER peut aussi se heurter à des questions d’acceptabilité sociale, avec par exemple des déclarations d’utilité publique contestées devant les juridictions. Si les recours ne sont pas suspensifs (sauf référé suspension), l’analyse du risque de recours peut conduire la maîtrise d’ouvrage à minimiser les possibles accroches de contentieux, ce qui pousse à approfondir les études et à respecter scrupuleusement, voire au delà du raisonnable, les procédures réglementaires.

Les projets inscrits dans les CPER peuvent aussi être retardés par l’absence d’études préalables et des difficultés techniques non anticipées. Les contraintes environnementales peuvent parfois présenter un caractère exceptionnel voire rédhibitoire surtout si elles sont identifiées de manière tardive (présence d’amiante naturelle, mise en place de nouvelles zones Natura 2000, renforcement des contraintes dans le domaine de l’eau ou des inondations, protection des espèces).

À cet égard, il convient de souligner que les contraintes d’insertion environnementale, sociale, agricole ou urbaine des projets sont de plus en plus fortes. Par exemple, dans le domaine routier, il n’est plus question de construire une autoroute à proximité immédiate d’habitations, ce qui suppose en milieu urbain d’enterrer les infrastructures, avec des aléas techniques et financiers inévitables. Des questions similaires se posent dans le domaine ferroviaire où la gestion de l’infrastructure est souvent complexe.

En outre, la réalisation des opérations inscrites dans les CPER peut se heurter à des tensions sur les ressources humaines et techniques des maîtres d’ouvrage et des maîtres d’œuvre. Ce fut le cas en début de programmation pour SNCF Réseau qui a été contraint de différer certains chantiers, notamment en Nouvelle Aquitaine, en raison de la mise en service concomitante de quatre LGV en 2016-2017 et de la priorité donnée à la maintenance du réseau suite aux accidents de Brétigny et Denguin. Cette problématique des ressources de SNCF Réseau a continué à jouer sur la fin de l’exécution, mais à une moindre échelle. Les études de certains projets ont pu être retardées, mais plus rarement des chantiers. Désormais, le manque de ressources concerne essentiellement l’Île-de-France où les réseaux et les ressources d’ingénierie sont très exploités.

2.   Les aléas survenus en cours d’exécution entraînent une redéfinition des priorités

L’allongement des délais et les surcoûts peuvent conduire à ce qu’une opération initialement inscrite ne puisse être engagée avant la fin du CPER et donc une réorientation des stratégies ou des priorités territoriales. La plupart du temps, les opérations qui n’ont pas pu être lancées ont vocation à être inscrit dans la contractualisation suivante. Dans certains cas, une hausse particulièrement significative du coût de réalisation peut conduire à s’interroger sur l’opportunité même de réaliser le projet, au moins à court terme.

Les crédits correspondant peuvent être redéployés, dans le cadre d’avenant au CPER, au profit d’autres opérations jugées prioritaires. Ainsi, avec l’abandon du projet d’aéroport de Notre Dame des Landes, les enveloppes financières dédiées aux opérations de dessertes routières de cet aéroport inscrites dans les CPER ont été redéployées vers des alternatives ferroviaires de desserte à l’aéroport existant.

De nombreux projets s’étalent inévitablement sur au moins deux générations de CPER, la première pour réaliser les études nécessaires à la bonne calibration du projet, la seconde pour réaliser les travaux. Même des projets de petite ampleur tendent désormais à dépasser le temps d’une seule programmation.

Sur le volet routier, par exemple, la part des projets qui étaient déjà inscrits aux PDMI et ont été inscrits à nouveau dans les CPER 2015-2020 varie de 25 % à 55 % selon les régions. La quasi-totalité des opérations reportées des PDMI vers le CPER actuel (que ce soit pour achèvement ou en totalité) sont désormais en service ou engagées en travaux (la totalité des AE étant désormais affectées avec une mise en service prévue prochainement).

Dans certains cas, la sincérité de la programmation peut poser question. Lorsque des projets sont inscrits depuis plusieurs années voire générations dans les CPER et que les questions d’acquisitions foncières ou les études préalables sont encore une problématique, on peut s’interroger sur la maturité du projet.

Par ailleurs, la réalisation des CPER se heurte parfois à des obstacles de nature politique. L’alignement des priorités entre l’État et une région n’est pas nécessairement acquis malgré l’inscription d’un projet dans le CPER. Certaines opérations peu portées politiquement et non prioritaires pour l’État peuvent être délaissées. À l’inverse, une volonté politique forte de la part des différents cofinanceurs peut être un facteur de déblocage de certains projets.

3.   Le cas particulier des transports collectifs en Île-de-France

La bonne réussite du CPER Île-de-France – engagé à plus de 82 % fin 2020 et qui approchera des 100 % en 2022 – résulte principalement de l’engagement rapide des financements prévus et d’une forte volonté politique partagée par l’État, la région et la SGP pour mener à bien le projet du Grand Paris express.

Toutefois, il résulte aussi de la maturité des projets, dont les études préalables avaient été menées dans le cadre des générations de CPER précédentes, ce qui aura permis de démarrer la quasi-totalité des travaux prévus avant la fin de la programmation. Certes, certaines opérations complexes (par exemple, le percement de tunnels) ont connu des aléas techniques entraînant un retard. Des recours en justice, notamment par des expropriés, ont également pu conduire à interrompre des travaux déjà entamés. Néanmoins, aucun projet inscrit sur le CPER n’a été abandonné. Seule une partie du tramway T7 à Juvisy n’a pu être engagée du fait d’un blocage politique lié à l’insertion du projet.

 

 

4.   Des outils de suivi et de pilotage insuffisants

Dans son rapport sur les contrats de projet État-région de juillet 2014, la Cour des comptes soulignait l’insuffisance des outils de suivi et de pilotage des CPER.

Force est de constater que la situation ne s’est pas améliorée depuis. Durant la période 2007-2013, un système informatique, PRESAGE, était destiné au suivi des fonds structurels européens et des CPER. Il était diversement utilisé par les conseils régionaux. Dans le contexte de transfert de la gestion des fonds structurels aux régions, il n’y a pas eu d’accord sur le développement des fonctionnalités de suivi des CPER 2015-2020 avec Régions de France. Le module SYNERGIE‑CPER n’a jamais été déployé. Il n’existe donc plus d’outil de suivi.

Les retards des CPER semblent difficilement imputables à un problème de pilotage, de suivi et d’évaluation. Toutefois, les outils de suivi pourraient permettre de gagner en efficience dans la gestion des CPER, s’ils sont interfacés avec Chorus et partagés entre les différents cofinanceurs. Ils pourraient aussi améliorer la visibilité des CPER pour les citoyens et pour les entreprises.

IV.   Les CPER demeurent pertinents À condition de mieux articuler les moyens avec les besoins

Les retards permanents des CPER font courir le risque que la programmation des investissements perde toute crédibilité. Dès lors, il apparaît urgent de lancer une nouvelle dynamique de contractualisation entre l’État et les régions avec des objectifs sincères, des projets opérationnels et des ressources budgétaires réellement mobilisables.

A.   La contractualisation des investissements demeure un outil indispensable

Malgré les retards constatés dans la programmation 2015-2020, les CPER demeurent un outil indispensable pour l’aménagement du territoire, le développement économique et l’emploi local, l’amélioration des transports du quotidien ou encore la « décarbonation » des mobilités.

La prolongation du volet « Mobilité multimodale » des CPER 2015-2020 ouvre une période d’incertitude. La période de transition fait l’objet d’un traitement non homogène d’une région à l’autre – certaines régions ayant prolongé jusqu’en 2021 et d’autres jusqu’en 2022. En outre, elle se croise avec la mise en œuvre du plan de relance et du plan relatif aux lignes de desserte fine du territoire (à ce jour, quatre régions ont signé des protocoles d’accord avec l’État).

Les modalités de contractualisation envisagée après 2022 ne sont pas encore arrêtées. En raison du prolongement du volet « Mobilité multimodale », les transports n’ont pas été inclus dans les négociations ouvertes pour les CPER 2021‑2027. Compte tenu de leurs spécificités, certaines régions ont émis le souhait d’une contractualisation spécifique aux transports, distincte des autres volets des CPER. Toutefois, toutes ne sont pas unanimes sur cette question.

On peut également s’interroger sur la durée de la contractualisation. L’ensemble des acteurs reconnaissent que la durée actuelle des CPER est très courte. De fait, les contrats de plan ont été prolongés d’une année en 2014 et de deux ans en 2021-2022. En conséquence, il pourrait être envisagé d’allonger la durée des CPER à sept ans minimum, tout en prévoyant des clauses de revoyure pour conserver une certaine flexibilité en cours d’exécution.

L’avenir des CPER passera peut-être aussi par une plus grande différenciation territoriale. Chaque région fait face à des besoins et des problématiques spécifiques. Il faut donc une stratégie et des priorités spécifiques. La tendance à donner aux territoires, notamment aux régions, plus de liberté dans la définition des priorités de développement ne peux être qu’un élément accélérateur dans la réalisation des projets. Avec l’élaboration des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), les régions sont désormais l’échelon central de la programmation. Les dispositions du projet de loi « 4 D » vont renforcer cette tendance ([39]).

En tout état de cause, l’approche contractualisée demeure indispensable pour le développement des infrastructures de transport et l’aménagement du territoire. Certaines opérations trop coûteuses ou trop complexes ne pourraient pas être réalisées sans les CPER. En outre, la programmation pluriannuelle des investissements apporte de la visibilité pour les entreprises.

B.   La nÉcessitÉ de RÉconcilier les besoins et les moyens

La priorité est de réduire le décalage entre l’insuffisance des moyens mobilisés par l’État et l’ambition parfois trop forte des CPER. L’État doit renforcer la sincérité de ses engagements. Les régions doivent quant à elle accepter que tous les projets ne peuvent être menés de front et fixer des priorités.

1.   Renforcer la cohérence entre les moyens et les besoins

Le décalage entre la contrainte budgétaire et l’ambition des projets prévus demeure la raison principale des retards des CPER 2015-2020. La définition des besoins en dehors de tout cadre budgétaire puis la définition annuelle des moyens sans réelle considération pour les besoins à financer ne pouvait qu’entraîner une perte de crédibilité budgétaire pour l’État et aboutir à des situations de blocage.

Le Conseil d’orientation des infrastructures et la loi d’orientation des mobilités sont arrivés en cours d’exécution et n’ont pas pu empêcher les retards pris en début de programmation. Toutefois, c’est bien cette logique qui doit prévaloir à l’avenir. La définition préalable des besoins ne peut être réalisée en dehors de tout cadre budgétaire et l’ambition des projets retenus doit être à la hauteur des moyens mobilisables.

La programmation des CPER doit donc être alignée avec la programmation pluriannuelle des investissements en matière d’infrastructures de transports, sur une période d’au moins sept ans. La programmation des opérations doit intégrer des considérations budgétaires et être la plus globale possible – en intégrant le transport de voyageurs, le fret, les réseaux structurants au niveau national ou à l’échelle des territoires – pour concilier au mieux tous les usages.

La définition de la prochaine programmation sera d’autant plus crédible si elle associe le Parlement et les régions. L’État et la région doivent plus que jamais renforcer l’articulation de leurs stratégies et de leurs moyens au profit de la cohésion des territoires. Les futurs CPER devront s’inscrire dans les orientations des SRADDET et intégrer pleinement les grands virages à prendre dans les domaines du numérique et de la transition énergétique. Il s’agira aussi de renforcer les ressources des régions pour dynamiser les territoires.

Une fois le niveau d’ambition déterminé, les ressources de l’AFITF doivent être mises en cohérence avec la programmation des investissements. Les moyens doivent être à la hauteur des ambitions retenues. Les CPER ne peuvent plus être la variable d’ajustement des lois de finances. Les budgets annuels de l’AFITF doivent être compatibles avec un rythme d’avancement satisfaisant des CPER. Il s’agit là d’un point crucial pour renforcer la sincérité des engagements de l’État.

Sécuriser les financements de l’État est essentiel pour renforcer la prévisibilité des dépenses et donc des opérations. Les maîtres d’ouvrage – à commencer par SNCF Réseau – et les entreprises de travaux publics, ont besoin d’une visibilité à moyen terme pour programmer efficacement les opérations et mobiliser puis engager des moyens.

Dans cette perspective, les rapporteures se félicitent de la mise en place en 2021 du Conseil d’orientation des infrastructures, en application de l’article L. 1212‑1 du code des transports, dans sa rédaction résultant de l’article 3 de la loi d’orientation des mobilités, qui constitue la première étape de la prochaine programmation pluriannuelle des investissements.

2.   Mieux sélectionner les projets inscrits dans les CPER

Compte tenu des difficultés rencontrées sur la période 2015-2020, une plus grande sélectivité des projets inscrits dans les CPER paraît nécessaire afin de permettre une exécution satisfaisante des contrats de plan.

À cet égard, il semble préférable de n’inscrire dans les CPER que des projets suffisamment matures pour être engagés sur la durée de la programmation, au risque d’affaiblir la sincérité du dispositif. Doivent donc être privilégiés les projets ayant fait l’objet d’une étude précise, d’une estimation du coût voire d’une évaluation de l’utilité socio-économique. S’agissant des autres projets, les contrats devraient se borner à prévoir le financement des études préalables au lancement des opérations.

Le choix des projets dépendra évidemment du niveau des moyens mobilisables et de l’ambition de la programmation pluriannuelle des investissements. Les priorités devront aller aux projets les plus structurants à l’échelle nationale et à l’échelle des territoires.

3.   Renforcer les outils de suivi

Enfin, il conviendrait aussi d’améliorer le suivi de l’exécution des CPER. La transparence des informations relatives aux CPER paraît être une condition indispensable à leur succès. L’exécution réelle des projets et les raisons de certains blocages sont très souvent opaques pour les entreprises de travaux publics et plus encore pour les citoyens.

À cet égard, il faudrait au minimum mettre en place de nouveaux outils de suivi et d’évaluation, fiables et partagés par l’État et les régions. Cela s’avère indispensable pour mieux suivre l’exécution du CPER, renforcer la visibilité du dispositif pour les entreprises et les citoyens, croiser les données avec les fonds européens et mieux mesurer les résultats obtenus.

À l’heure actuelle, les CPER impliquent une vraie complexité et les avancées qu’ils permettent ne sont pas comprises par les citoyens. Les CPER ne doivent pas rester uniquement un discours de techniciens. Leur fonctionnement doit être plus lisible et plus visible pour les citoyens, à la fois dans l’intérêt de l’État et celui des régions.

Une autre réponse à ce besoin pourrait passer par la création d’un conseil d’orientation des infrastructures au niveau régional, associant représentants de l’État, élus locaux, certains députés et sénateurs de la région et les milieux économiques. Sa mission serait à la fois de participer à la préparation de la programmation, de réfléchir aux enjeux régionaux de mobilité mais aussi de suivre l’avancée des projets sur un territoire et les financements de l’ensemble des cofinanceurs. Il pourrait, par exemple, publier un rapport annuel.

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION 

Lors de sa réunion de 16 heures 45, le mercredi 2 juin 2021, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu Mmes Marie Lebec et Zivka Park, rapporteures spéciales des crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables : infrastructures et services de transports, charge de la dette de SNCF réseau reprise par l’état, services nationaux de transport conventionnés de voyageurs, contrôle et exploitation aériens.

 

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail dédié de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu sera prochainement consultable en ligne.

 

 

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   PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LES RAPPORTEURES SPÉCIALES

(par ordre chronologique)

 

Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) :

– Mme Katrin Moosbrugger, secrétaire générale

 

Régions de France :

– M. Michel Neugnot, président de la commission Transports et mobilité, vice-président de la région Bourgogne-Franche-Comté ;

– M. Nicolas Pujos, conseiller transports

– M. David Herrgott, conseiller transports

 

Fédération nationale des travaux publics (FNTP) :

– M. Jean-Christophe Angenault, directeur de cabinet du président

– M. Jean-Philippe Dupeyron, conseiller transports

 

Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) :

– M. Marc Papinutti, directeur général

– Mme Isabelle Andrivon, cheffe du service de l’administration générale et de la stratégie

 

SNCF Réseau :

– M. Alain Quinet, directeur général exécutif « Stratégie et affaires corporate »

– M. Éric Veillard, chef de la mission « Lignes de desserte fine du territoire » à la direction de la stratégie

– Mme Laurence Nion, conseillère parlementaire


([1]) Loi n° 2019‑1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités.

([2]) Les crédits liés au transport maritime sont analysés dans l’annexe n° 17 relative aux affaires maritimes.

([3])  Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([4])  En tenant compte de l’indemnité de résiliation du contrat de l’écotaxe pour les poids lourds, le montant des fonds de concours exécuté en 2018 s’élève à 2 314 millions d’euros.

([5]) Voir l’article 30 du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets dans sa rédaction résultant des délibérations de l’Assemblée nationale à l’issue de l’examen en première lecture.

([6]) Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([7]) Le produit de la taxe de solidarité sur les billets d’avion s’est élevé à 95 millions d’euros en 2020, en recul de 172 millions d’euros par rapport à 2019. Il a été entièrement reversé au fonds de solidarité pour le développement, premier affectataire dans la limite de 210 millions d’euros.

([8]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([9]) Loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020.

([10])  Cette opération est prévue par la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire ainsi que par le contrat pluriannuel de performance 2017-2026 entre l’État et SNCF Réseau.

([11]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020 de la mission Écologie, développement et mobilité durables, page 50.

([12]) La TSBCS est prévue au 2° du A du XI de l’article 36 de la loi n° 2016-1917 de finances pour 2017.

([13]) La TATS est prévue à l’article L. 2531-17 du code général des collectivités territoriales.

([14]) La redevance hydraulique a remplacé la taxe hydraulique en 2020. Elle est due par les organismes qui prélèvent ou rejettent de l’eau sur le domaine public fluvial.

([15]) La consommation d’AE 2020 pour les lignes d’aménagement du territoire de 16,7 millions d’euros est minorée de 5,8 millions d’euros dans Chorus (10,9 millions d’euros) correspondant à des soldes d’engagement juridique comptabilisés sur les exercices antérieurs.

([16]) Voir le décret n° 2020-1388 du 13 novembre 2020 portant dérogation aux critères d’éligibilité d’une liaison aérienne à une prise en charge financière par l’État et à la limitation de la participation financière de l’État sur les liaisons aériennes métropolitaines soumises à des obligations de service public.

([17]) Loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire.

([18]) L’État a versé à SNCF Voyageurs un acompte de 242 millions d’euros en 2019. Le montant de la compensation, initialement évaluée à 245,9 millions d’euros, a été réduit à 245 millions d’euros dans le cadre du troisième avenant à la convention TET signé en février 2020.

([19]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020 de la mission Écologie, développement et mobilité durables, page 15.

([20]) Cour des comptes, ibid., page 23.

([21])  La taxe de l’aviation civile, créée par l’article 51 de la loi de finances pour 1999, est codifiée à l’article 302 bis K du code général des impôts.

([22])  La taxe de solidarité sur les billets d’avion, instituée par la loi de finances rectificative pour 2005, est une contribution additionnelle à la taxe de l’aviation civile, codifiée à l’article 302 bis K du code général des impôts.

([23]) En application des articles 18 et 24 de la LOLF, le BACEA peut recevoir des prêts et avances consentis par l’État. La loi de finances initiale fixe chaque année le plafond de cette autorisation d’emprunt, inscrite sur le programme 824 Avances à des services de l’État du compte de concours financiers Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics.

([24]) Voir la loi n° 2020‑289 du 23 mars 2020 ainsi que la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([25]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020 de la mission Écologie, développement et mobilité durables, page 31.

([26]) Cour des comptes, ibid., page 32.

([27]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020 de la mission Écologie, développement et mobilité durables, page 33.

([28]) Cour des comptes, ibid., page 35.

([29]) Voir l’alinéa 3 de l’article 11 de la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification.

([30])  Loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

([31])  Loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

([32]) Fédération nationale des travaux publics (FNTP), « Contrats de plan État-régions 2015-2020 : à quand l’accélération ? », dossiers économiques n° 160, juillet 2018, page 22.

([33]) Le taux de 85 % est calculé à partir des données figurant que le document de politique transversale « Aménagement du territoire » annexé au projet de loi de finances pour 2021, page 111. Toutefois la DGITM indique que le taux d’avancement des CPER 2007-2014 est de 92 % à fin 2014 et de 41 % pour les PDMI.

([34])  Le Conseil d’État adopté une conception restrictive des effets du contrat de plan en rejetant les requêtes de tiers. Il estime qu’un contrat de plan « n’emporte en lui-même aucune conséquence directe quant à la réalisation effective des actions ou opérations qu’il prévoit » (Conseil d’État, arrêt du 25 octobre 1996, Association Estuaire-Écologie).

([35]) La création de l’AFITF a été décidée lors du comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire du 18 décembre 2003 et l’agence a été créée par le décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004 relatif à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.

([36]) L’article 8 LOLF dispose que pour une opération d’investissement, l’autorisation d’engagement couvre un ensemble cohérent et de nature à être mis en service ou exécuté sans adjonction.

([37])  Le principe de la règle d’or a été adopté dans le cadre de la loi portant réforme ferroviaire en 2014, vise à limiter l’endettement de SNCF Réseau. Le décret d’application du 30 mars 2017 relatif aux règles de financement des investissements de SNCF Réseau précise les modalités d’application de la règle d’or.

([38]) Voir l’article 4 du décret n°97-444 du 5 mai 1997 relatif aux missions et aux statuts de Réseau ferré de France (dans sa version en vigueur de 2006 à 2015). Ces règles ont depuis été inscrites à l’article L. 2111-10-1 du code des transports par la loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire.

([39]) Le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dit projet de loi « 4D », prévoit d’élargir les compétences des régions aux petites lignes ferroviaires et celles des départements sur certains tronçons de routes nationales.