N° 4195

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 mai 2021

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (n° 4090),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 20
 

 

Économie :

 

DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES ET RÉGULATIONS

 

PRÊTS ET AVANCE À DES PARTICULIERS
OU À DES ORGANISMES PRIVÉS

 

 

Rapporteurs spéciaux : Mme Valéria Faure-Muntian
et M. Xavier ROSEREN

 

Députés

 

____


 

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Page

SYNTHÈSE ET Chiffres-clés

RECOMMANDATIONS des rapporteurs spéciaux

Suivi des recommandations des années précédentes

PREMIÈRE PARTIE : Revue des dépenses

I. Programme 134, Développement des entreprises et régulations

A. Une exécution fortement marquée par la crise sanitaire

1. L’action 23, Industrie et services

2. L’action 24, Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur

3. L’action 25, Mesures exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire

B. Le schéma d’emplois

C. Des dépenses fiscales importantes mais insuffisamment évaluées

D. Les indicateurs de performance du programme : une évolution globalement positive bien que certains doivent encore être consolidés

E. Une maquette à clarifier

1. L’effort de lisibilité du programme 134 doit être poursuivi

a. Des progrès de cohérence interne qui doivent encore être approfondis

b. Des problématiques de cohérence externe du programme 134 qui persistent

II. Programme 343, Plan France Très haut dÉbit

A. Une structure budgétaire complexe

B. Une sous-exécution des crédits du programme 343 liée à la crise et à des difficultés de prÉvision des dépenses

C. Un indicateur de performance à repenser

III. Le compte de concours financier Prêts et avances à des particuliers ou À des organismes privés

SECONDE partie - THÈME D’ÉVALUATION : La garantie BPI

I. L’activité de garantie de BPI France, essentielle à l’Économie, a vocation À se renforcer dans la période postcrise sanitaire

A. À travers son activité de garantie, la BPI offre un soutien essentiel aux petites et moyennes entreprises

1. Différents types de garanties adaptées aux différents projets

2. Des modalités d’octroi adaptées à la dimension du projet

3. Des modalités de mise en œuvre de la garantie qui assurent une perte limitée pour l’État

B. Impactée par la crise sanitaire, l’activité de garantie de BPI France a vocation à monter en charge

1. Renforcées dans un premier temps, les garanties BPI ont laissé la place au prêt garanti par l’État

2. Alors que les PGE arrivent à leur terme, la garantie BPI doit monter en charge

II. La question du financement budgétaire de la garantie BPI : un cordon ombilical à maintenir

1. Le financement budgétaire historique de la garantie BPI en voie d’extinction au profit de l’autofinancement

2. Un enjeu économique et financier

3. Un enjeu de conformité aux règles budgétaires : le problème de la débudgétisation

4. Un enjeu démocratique

III. Un service qui peut encore être améliorÉ

1. La question des délais de réponse

2. La question du reporting

Examen en commission

Personnes auditionnÉes par le rapporteur spÉcial


—  1  —

   SYNTHÈSE ET Chiffres-clés

En 2020, 3,39 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,92 milliards d’euros en crédits de paiement ont été consommés sur la mission Économie, soit des taux d’exécution de 178 % et 123 % respectivement. Le budget de la mission a en effet été fortement impacté par la crise sanitaire.

Le programme 134, Développement des entreprises et régulations, a été le principal support budgétaire des mesures de soutien aux entreprises durant l’année 2020. Alors que 1 066 millions d’euros en AE et 1 080 millions d’euros en CP avaient été ouverts en LFI 2020, ce sont plus de 2 500 millions d’euros en AE et 1 862 millions d’euros en CP qui ont in fine été consommés.

Près de 285 millions d’euros ont ainsi été ouverts par le décret du 18 mai 2020 pour financer l’acquisition de masques ainsi qu’une aide aux centres équestres ; et 774 millions d’euros (CP) ont été ouverts par les lois de finances rectificatives pour financier les dispositifs de soutien aux filières aéronautique et automobile, abonder le fonds de garantie de BPI France et accompagner les PME et TPE dans leur numérisation. 91 % des AE et 75 % des CP débloqués pour faire face à la crise ont été consommés.

Le programme 343, Plan France très haut débit, porte les crédits destinés au dispositif éponyme. Les projets financés sont sélectionnés par appel à projet. Sur les 3,3 millions d’euros d’AE ouvertes, aucune n’a été consommée en 2020 ; et seuls 225 millions de CP l’ont été sur les 440 millions ouverts. Si cette sous-exécution est liée en partie à la crise qui a conduit à des retards opérationnels et à la mise en place d’un nouveau cahier des charges, elle est également due à une estimation des décaissements aujourd’hui obsolète. Des dispositifs sont d’ores et déjà mis en œuvre pour améliorer leur prévisibilité.

Les rapporteurs spéciaux se sont intéressés cette année à « la garantie BPI ». En se portant garante d’une partie du risque, la Banque publique d’investissement (BPI) permet l’accès au crédit des TPE, PME et ETI. En 2019, près de 7 milliards d’euros de crédits bancaires ont été garantis, au bénéfice de plus de 50 000 entreprises – dont 90 % de TPE.

Alors que le financement budgétaire historique de ce dispositif a vocation à disparaître, les rapporteurs spéciaux plaident pour son maintien et proposent la création d’une mission parlementaire d’audit et de contrôle de la distribution de la garantie Bpi.

 

 

L’exécution des crédits de la mission pour 2020

(en millions d’euros)

 

Crédits demandés

Crédits exécutés

Écart en valeur absolue (et en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 134, Développement des entreprises et régulations

1 066,82

1 080,34

2 562,36

1 862,89

1 495,54
140 %

782,55

72 %

Programme 343, Plan France Très haut débit

3,3

440

0

225

– 3,3

– 100 %

– 125

– 49 %

Programme 220, Statistiques et études économiques

437,48

439,99

435,19

434,82

– 2,29

– 1 %

– 5,17

– 1 %

Programme 305, Stratégie économique et fiscale

402,58

404,98

393,27

396,95

– 9,31

– 2 %

– 8,03

– 2 %

Total Mission

1 910,18

2 365,31

3 390,82

2 919,66

1 480,64

78 %

554,35

23 %

PART RESPECTIVE DES CRÉDITS OUVERTS EN LFI DU PROGRAMME 134
ET DES DÉPENSES FISCALES RATTACHÉES EN 2020

(en millions d’euros)

Évolution de la dotation budgétaire en faveur de la garantie Bpi
(hors dotations liéeS à la crise sanitaire)

(en millions d’euros)

 


—  1  —

   RECOMMANDATIONS des rapporteurs spéciaux

Sur l’exécution budgétaire

Conduire une réflexion sur le soutien aux entreprises électro‑intensives au regard des objectifs de verdissement du budget.

Continuer à tenir compte des besoins des entreprises pour adapter le schéma d’emploi des entités dépendant du programme 134.

Fournir a minima un point d’étape des travaux en cours sur les dépenses fiscales dans les futurs documents budgétaires

Assurer la consolidation des indicateurs du programme 134.

Reprendre les réflexions sur la maquette du programme 134

Fournir dans les documents budgétaires une synthèse du suivi des dépenses du Plan France Très haut débit.

Poursuivre la mise en œuvre de nouveaux dispositifs visant à améliorer la prévision des décaissements sur le programme 343.

Proposer dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2022 un nouvel indicateur pour le programme 343.

Sur la garantie BPI

Faire davantage connaître aux banques le dispositif de la garantie Bpi.

Faire état dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de règlement de la consommation des crédits ouverts lors de la discussion du projet de loi de finances.

Créer un jaune budgétaire dédié aux liens entre Bpifrance et l’État.

Rétablir de manière pérenne une ligne dédiée à la garantie Bpi France au sein du programme 134.

Créer pour les entrepreneurs une interface dédiée au suivi des demandes.

Renforcer le reporting sur les produits Bpi distribués.

Créer une mission parlementaire d’audit et de contrôle de la distribution de la garantie Bpi.

 


—  1  —

   Suivi des recommandations des années précédentes

Recommandation : Harmoniser les modalités de prise en compte du montant des dépenses fiscales non chiffrées entre les différents documents budgétaires. Développer, sur le modèle de la démarche adoptée en loi de finances pour 2020, le bornage et l’évaluation des dépenses fiscales rattachées au programme 134.

  Recommandation réitérée en 2020. La responsable du programme 134 a assuré aux rapporteurs spéciaux qu’un travail d’ampleur sur les dépenses fiscales allait être lancé sous peu.

Recommandation : Clarifier le financement du Plan France Très Haut débit en indiquant, au sein des rapports annuels de performances, les recettes annuelles du Fonds pour la société numérique et les décaissements qu’il réalise.

  Recommandation partiellement suivie : Les décaissements du Fonds pour la société numérique figurent désormais dans le rapport annuel de performances. Ce n’est toutefois pas le cas des recettes.

*

Recommandations dont la mise en œuvre a été interrompue ou rendue impossible par la crise sanitaire

Recommandation : Mener à bien le travail de mise en cohérence du programme 134, à la fois au sein des actions qu’il finance et avec les dispositifs de soutien aux entreprises présents sur d’autres périmètres budgétaires Le travail de mise en cohérence a été commencé mais interrompu par la crise sanitaire.

Recommandation : Cibler le dispositif d’avances remboursables et de prêts bonifiés sur les entreprises stratégiques et économiquement viables.

Recommandation : Sincériser le schéma d’emploi des administrations du programme, en particulier celui de la DGE, à l’aune de la surexécution observée sur les deux derniers exercices budgétaires Recommandation à suivre : la crise sanitaire ayant fortement impacté la réalisation des schémas d’emploi, il est nécessaire d’attendre une année à la gestion normalisée pour juger de la bonne mise en œuvre de cette recommandation

 


—  1  —

   PREMIÈRE PARTIE : Revue des dépenses

La mission Économie regroupe les politiques relevant du ministère de l’économie, des finances et de la relance (MEFR) consacrées à l’amélioration de la compétitivité des entreprises, l’élaboration d’un environnement offrant une concurrence saine entre acteurs économiques, la protection des consommateurs et la mise en œuvre d’une stratégie économique et fiscale soutenant une croissance durable et équilibrée.

La mission Économie se compose de quatre programmes : Développement des entreprises et régulations (programme n° 134), Statistiques et études économiques (programme n° 220), Stratégie économique et fiscale (programme n° 305) et France très haut Débit (programme n° 343). Le présent rapport spécial porte sur les programmes 134 et 343 de la mission.

L’exécution des crédits de la mission pour 2020

(en millions d’euros)

 

Crédits demandés

Crédits exécutés

Écart en valeur absolue (et en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 134, Développement des entreprises et régulations

1 066,82

1 080,34

2 562,36

1 862,89

1 495,54
140 %

782,55

72 %

Programme 343, Plan France Très haut débit

3,3

440

0

225

– 3,3

– 100 %

– 125

– 49 %

Programme 220, Statistiques et études économiques

437,48

439,99

435,19

434,82

– 2,29

–1 %

– 5,17

– 1 %

Programme 305, Stratégie économique et fiscale

402,58

404,98

393,27

396,95

– 9,31

– 2 %

– 8,03

– 2 %

Total Mission

1 910,18

2 365,31

3 390,82

2 919,66

1 480,64

78 %

554,35

23 %

Source : Commission des finances, à partir des documents budgétaires.

L’Évolution de l’exÉcution des crÉdits de la mission au cours des trois derniÈres annÉes (À maquette comparable)

 

Crédits exécutés en 2018

Crédits exécutés en 2019

Crédits exécutés en 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 134, Développement des entreprises et régulations

981,18

950,74

872,69

902,33

2 562,36

1 862,89

Programme 343, Plan France Très haut débit

158,52

- 10,9

0

30

0

225

Programme 220, Statistiques et études économiques

456,99

449,17

444,28

443,83

435,19

434,82

Programme 305, Stratégie économique et fiscale

425,29

423,09

415,80

409,98

393,27

396,95

Total Mission

2 021,99

1 812,1

1 732,77

1 786,14

3 390,82

2 919,66

Source : Commission des finances, à partir des documents budgétaires.

En loi de finances initiales (LFI) pour 2020, ont été ouverts sur cette mission 1,9 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 2,4 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), en hausse de 7,3 % et 21,5 % par rapport à la LFI 2019 respectivement ([1]). Le plafond d’emplois de la mission s’élève à 11 246 ETPT pour l’État et 2 496 ETPT pour trois opérateurs, soit des baisses respectives de 2,5 % et de 1,0 % par rapport à 2019 ([2]).

Comparaison des crédits ouverts en LFI 2019 et en LFI 2020

(en millions d’euros)

 

LFI 2019

LFI 2020

Écart en %

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 134, Développement des entreprises et régulations

898,2

912,3

1 066,8

1 080,3

18,8

18,4

Programme 343, Plan France Très haut débit

5,0

163,4

3,3

440,0

 34

169,3

Programme 220, Statistiques et études économiques

443,0

441,5

430,7

433,2

 2,8

 1,9

Programme 305, Stratégie économique et fiscale

427,0

422,5

401,1

403,5

 6,1

 4,5

Total Mission

1 773,2

1 939,6

1 901,9

2 357,0

7,3

21,5

Source : Commission des finances, à partir des documents budgétaires.

Le programme 134, Développement des entreprises et régulations et le programme 343, Plan France Très haut débit, qui sont l’objet de ce rapport, représentent la majorité des crédits de la mission, 45 % et 19 % respectivement.

La crise sanitaire a eu un impact fort sur la mission Économie, en particulier sur le programme 134, Développement des entreprises qui a servi de support budgétaire à certaines mesures prise en réponse à la crise. Des crédits complémentaires ont ainsi été ouverts par les lois de finances rectificatives et par le décret du 18 mai 2020 ([3]), pour financer des achats de masques ou encore le soutien aux filières aéronautiques et automobiles. Hors dégel de la réserve, ce sont ainsi 1,67 milliard d’euros et 1,1 milliard d’euros en CP qui ont été ouverts au cours de 2020 en lien avec la crise, dont respectivement 1,39 milliard d’euros et 0,77 milliard d’euros par les lois de finances rectificatives.

 

 

Passage de la LFI a l’exécution 2020 en crédits de paiement

Source : Cour des comptes, Note d’analyse de l’exécution budgétaire de la mission Économie, 2 020

I.   Programme 134, Développement des entreprises et régulations

Les politiques publiques retracées par le programme 134 visent à développer la compétitivité des entreprises et à favoriser un environnement économique propice à la croissance et à lemploi, dans une dimension nationale et internationale. Elles visent également à assurer la régulation et la sécurisation des marches, ainsi que la protection des consommateurs. À cette fin concourent trois directions générales (direction générale des entreprises, direction générale du Trésor, DGCCRF), le Conseil général de l’économie et deux autorités administratives indépendantes, l’ARCEP et l’Autorité de la concurrence.

Le programme 134 a été le support privilégié des mesures de soutien à l’économie durant la crise sanitaire.

Comparaison des crédits en LFI 2019 et 2020 (périmètre courant)

En millions d’euros

 

LFI 2019

LFI 2020

Écart en %

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 134, Développement des entreprises et régulations

898,2

912,3

1 066,8

1 080,3

18,8

18,4

Source : Commission des finances, à partir des documents budgétaires.

Présentation des AE et CP ouverts en consommés par action
du programme 134, en 2019 et 2020

(en millions d’euros)

 

AE

CP

ouvertes

consommées

ouverts

consommés

Action 4, Développement des postes, des télécommunications et du numérique

166,94

177,59

166,94

169,14

Action 7, Développement international des entreprises et attractivité du territoire

143,155

249,74

143,155

249,65

Action 8, Expertise, conseil et inspection

18,03

16,46

18,03

16,46

Action 13, Régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)

20,96

19,96

22,80

21,95

Action 15, Mise en œuvre du droit de la concurrence (Autorité de la concurrence)

21,65

20,69

22,96

21,91

Action 22, Contrats à impact social

0,30

0,02

0,34

0,04

Action 23, Industrie et services

470,26

1 332,31

479,93

725,29

Action 24, Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur

225,79

231,04

226,49

230,75

Action 25, Mesures exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire

0

514,56

0

427,719

Programme 134, Développement des entreprises et régulations

1 066,82

2 562,36

1 080,35

1 862,89

Source : Commission des finances, à partir des documents budgétaires.

Présentation des crédits du programme 134 consommés par rapport aux années précédentes.

 

(en millions d’euros)

Note : La sur-exécution en 2017 s’explique par le versement opéré par le budget général des crédits ouverts par décret n° 2017‑1182 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance du 20 juillet 2017 au compte d'affectation spéciale « Participations financières de l’État » afin de contribuer au financement de l'augmentation de capital de New ArevaHolding SA.

Source : Commission des finances, à partir des documents budgétaires.

A.   Une exécution fortement marquée par la crise sanitaire

Le programme 134 a été le principal support des mesures de soutien aux entreprises durant la crise sanitaire. De ce fait, les importants mouvements de crédits et les ouvertures de moyens complémentaires par les lois de finances rectificatives ont eu un impact important sur son exécution.

Les actions les plus importantes du programme 134 sont les actions 23 Industrie et service, 24 Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur – et l’action 25, créé courant 2020, Mesure exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire, qui a porté les crédits ouverts pour financer l’achat de masques textiles à usage non sanitaire, au bénéfice de plusieurs administrations, de publics vulnérables et de TPE‑PME, pour appuyer des projets d'investissements dans la production de matériaux de fabrication des masques, ainsi que les dispositifs d'aide exceptionnelle aux cirques, parcs zoologiques, aquariums et refuges, ainsi qu’aux centres équestres et poneys clubs ([4]).

passages des crédits ouverts aux crédits consommés

(en millions d’euros)

HORS TITRE 2

Programme 134

AE

CP

LFI

683 305 690

696 828 587

LFR

1 365 947 159

773 432 091

Autres mouvements de crédits

309 475 521

316 878 492

Reports de crédits 2 019

6 999 011

14 859 924

Virements

-

- 560 799

Transferts

9 304 412

9 407 269

Décrets d'avance

-

-

Répartitions

284 200 000

284 200 000

Annulations

727 902

727 902

Fongibilité asymétrique

9 700 000

9 700 000

Fonds de concours et attributions de produits

1 159 535

1 159 535

Total des crédits ouverts

2 359 887 905

1 788 298 704

Réserve en fin de gestion
(e) = (a) + (b) - (c) - (d)

0

0

Gel initial (a)

14 119 305

15 660 220

Surgels (b)

20 452 841

27 967 909

Dégels en gestion (c)

14 119 305

15 660 220

Annulation de crédits gelés (d)

20 452 841

27 967 909

Crédits disponibles

2 359 887 904

1 788 298 705

Crédits consommés

2 187 890 848

1 488 424 655

Source : Documents complémentaires envoyés par le secrétariat général des ministères économiques et financiers aux rapporteurs spéciaux.

1.   L’action 23, Industrie et services

Plus de 470 millions d’euros en AE et près de 480 millions d’euros en CP avaient été ouverts sur l’action 23 Industrie et service, en loi de finances initiale pour 2020, soit 90 millions et 185 millions d’euros de plus qu’en 2019 respectivement.

L’exécution est cependant bien supérieure aux crédits ouverts en LFI, et s’élève à plus d’1,3 milliard d’euros en AE et plus de 725 millions d’euros en CP.

Cet écart s’explique principalement par d’importants reports de crédits (2,4 millions d’euros en AE et 6,5 millions d’euros en CP) et l’ouverture de crédits en loi de finances rectificatives n° 3 du 30 juillet 2020 d’un montant total de 809 millions d’euros en AE et 224 millions d’euros en CP au titre des mesures d’urgence liées à la crise sanitaire (notamment les dispositifs « recherche de repreneurs », « soutien conseils aux TPE et PME ») et des dispositifs du plan de relance de l’économie (soutien à la filière aéronautique, soutien à la filière automobile, aux relocalisations territoriales, à la décarbonation de l’industrie et à l’industrie du futur, pour un total de 785 millions d’euros en AE et en CP).

Ces ressources supplémentaires ont permis de financer tant des mesures d’urgences liées à la crise sanitaire que divers dispositifs de soutien dans le cadre du plan de relance.

Parmi les mesures d’urgence liées à la crise sanitaire, on compte notamment :

– le dispositif « recherches de repreneurs » (1,10 million d’euros en AE et 0,96 million d’euros en CP). Ce dispositif doté d’une enveloppe de 5 millions d’euros a permis de financer via des missions de cabinets de conseil spécialisés, des recherches de repreneurs ou d’adossements financiers pour permettre la relance d’entreprises considérées comme stratégiques pour le pays ou de sites importants désinvestis par des groupes industriels. 8 dossiers ont été soutenus en 2020 ;

– le dispositif « frais de gestion de Bpi au titre du programme 877 » (0,93 million d’euros en AE et 0,3 million d’euros en CP). La gestion du dispositif d’avances remboursables et de prêts à taux bonifiés pour les petites et moyennes entreprises (PME) institué par l’article 23 de la loi n° 2020 473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 (programme 877 du compte spécial Prêts et avances aux particuliers et organismes privés), a été confiée à Bpifrance Financement SA. Ce dispositif doté d’une enveloppe de 5 millions d’euros est utilisé pour la rémunération de l’opérateur pour cette prestation de service. Le nombre de dossiers inférieurs aux estimations initiales pour 2020 conduit à une sous-exécution des frais de gestion ;

– le dispositif « soutien au conseil des ETI-TPE-PME » (14 millions d’euros en AE et 4,2 millions d’euros en CP sur une enveloppe de 14 millions d’euros de crédits ouverts en LFR n° 3). Le dispositif opéré par BPI vise à mettre en place des dispositifs d’accompagnement pour accélérer et sécuriser la reprise d’activité. La totalité des AE a été consommée.

Parmi les dispositifs de soutien aux entreprises dans le cadre du plan de relance, figurent notamment les dispositifs suivants ([5]) :

le dispositif « IA Booster » (5 millions d’euros en AE sur une enveloppe de crédits ouverts par la LFR n° 3 à hauteur de 5 millions d’euros en AE et en CP sur l’action 4 du programme 134). Il vise à accompagner les PME et les ETI dans leurs processus de transformation numérique et d’amélioration de leur compétitivité par l’intégration de solutions d’intelligence artificielle ([6]) ;

– le dispositif « soutien à la décarbonation de l'industrie » (198,50 millions d’euros en AE et 10 millions d’euros en CP sur une enveloppe de crédits ouverts en LFR n° 3 à hauteur de 199 millions d’euros en AE et 10 millions d’euros en CP). Trois appels à projets ont été lancés en 2020 pour permettre l’accélération de la décarbonation de l’industrie au travers de deux dispositifs : la chaleur décarbonée avec des aides à l’investissement et au fonctionnement et le soutien à des projets visant à accompagner la décarbonation industrielle. L’ensemble des crédits ouverts a été consommé en 2020 ;

le dispositif « soutien à l’Industrie du futur » (38,80 millions d’euros en AE et 10 millions d’euros en CP sur une enveloppe de crédits ouverts en LFR n° 3 à hauteur de 40 millions d’euros en AE et 10 millions d’euros en CP). Ce dispositif, opéré par l’Agence de services et de paiements, vise à soutenir les investissements dans l’industrie du futur des PME et ETI via des aides directes proportionnelles au montant de l’investissement (10 %). Il s’agit d’une dépense de guichet. L’ensemble des crédits ouverts a été consommé en 2020 ;

le dispositif « soutien aux investissements de modernisation de la filière aéronautique » (102,90 millions d’euros en AE et 52,70 millions d’euros en CP sur une enveloppe de crédits ouverts en LFR n° 3 et 4 à hauteur de 105 millions d’euros en AE et 56 millions d’euros en CP). Le dispositif, mis en œuvre par appels à projets, a été lancé en 2020. Les crédits non consommés sont reportés sur le programme 362 Écologie de la mission relance en 2021.

le dispositif « soutien aux investissements de modernisation de la filière automobile » (200,50 millions d’euros en AE et 98,80 millions d’euros sur une enveloppe de crédits ouverts en LFR n° 3 et 4 à hauteur de 205 millions d’euros en AE et 106 millions d’euros en CP). Le dispositif opéré par Bpifrance vise à soutenir des projets de diversification, de modernisation, et d’adaptation à la transition environnementale de la filière automobile. Il est mis en œuvre par appels à projets, dont un a été lancé dès 2020. Les crédits non consommés seront reportés sur le programme 362 Écologie de la mission relance en 2021 ;

le dispositif « relocalisation et soutien aux projets industriels dans les territoires » (185,90 millions d’euros en AE et 56,50 millions d’euros sur une enveloppe de crédits ouverts en LFR n° 3 et 4 à hauteur de 189 millions d’euros en AE et 60 millions d’euros en CP). Le dispositif opéré par Bpifrance est mis en œuvre par appels à projets (un a été lancé en 2020). Il vise à soutenir des projets matures à dimension industrielle et à fort impact territorial : créations de sites industriels, augmentation de capacité de production, diversification d’activité, mise en place de plateaux techniques pour des formations industrielles. Il est piloté dans le cadre du programme Territoires d’Industrie et suit un processus déconcentré, suivant un objectif de proximité de la décision. Les crédits non consommés seront reportés sur le programme 363 Compétitivité de la mission relance en 2021 ;

le dispositif « relocalisation et soutien aux projets dans les secteurs critiques » (126,90 millions d’euros en AE et 37,60 millions d’euros sur une enveloppe de 129 millions d’euros en AE et 40 millions d’euros en CP). Le dispositif opéré par Bpifrance est mis en œuvre par appels à projets (un a été initié en 2020). Il vise à soutenir l’investissement dans les secteurs stratégiques, pour lesquels les enjeux de souveraineté ont été identifiés comme les plus prégnants : santé, agroalimentaire, électronique, intrants essentiels de l’industrie (chimie, matériaux, matières premières, etc.). Les crédits non consommés seront reportés sur le programme 363 Compétitivité de la mission relance en 2021.

Sur le total des crédits ouverts, les crédits ont été sous-consommés à hauteur de 67 millions d’euros en AE et près de 100 millions d’euros en CP. Cette sous-consommation concerne pour l’essentiel les crédits ouverts en lois de finances rectificatives du 16 avril et du 30 juillet 2020 pour financer les dispositifs mis en place dans le cadre du plan de relance et pour répondre à la crise sanitaire qui n’ont pu être totalement mis en œuvre en 2020.

Sous-exécution des crédits ouverts pour répondre à la crise sanitaire (dispositif et montant de la sous-exécution)

-          mesures destinées à la « digitalisation des entreprises » (60 millions d’euros en AE et en CP) ;

-          frais de gestion de Bpi (4 millions d’euros en AE et 4,7 millions d’euros en CP) ;

-          soutien au conseil des TPE/PME (9,8 millions d’euros en CP) ;

-          dispositif de recherches des repreneurs (3,9 millions d’euros en AE et 4 millions d’euros en CP) ;

-          relance filière automobile (6,8 millions d’euros en CP) ;

-          relance filière aéronautique (3,3 millions d’euros en CP) ;

-          soutien aux relocalisations (5,8 millions d’euros en CP).

Hormis les mesures liées à la crise, la principale dépense d’intervention de l’action 23 est la compensation carbone des sites électro‑intensifs exposés à la concurrence internationale et qui s’élève à près de 267 millions d’euros en AE comme en CP, contre 102 millions en 2019, soit une augmentation de plus de 165 millions d’euros. Cette dépense correspond à une dépense de guichet, destinée aux entreprises éligibles au dispositif, prévu par le code de l’énergie, de compensation des coûts indirects dus au système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne. La crise a toutefois eu un impact sur cette dépense, puisque l’ouverture du guichet a été exceptionnellement prolongée un mois après la fin de l’État d’urgence sanitaire, soit le 23 août 2020 (par ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période).

Entre les campagnes 2 019 (consommation 2018) et 2020 (consommation 2 019), l’assiette éligible est restée relativement stable, alors que le prix des quotas de carbone a augmenté de 5,88 €/t à 16,18 €/t. Pour la campagne 2021 (consommation 2020), la crise de la COVID-19 devrait mener à une baisse de l’assiette éligible estimée entre 5 et 10 %. Cette baisse sera largement compensée par l’augmentation du prix du quota qui atteint 25,22 €/t. Le budget prévisionnel 2021, qui repose sur un montant connu du quota, est de 403 millions d’euros.

En tout état de cause, de nouvelles lignes directrices relatives à ces aides d’État ont été adoptées par la Commission européenne, le 25 septembre dernier lesquelles sont de nature à entraîner une diminution structurelle des montants de la compensation. Cette diminution devra être mise au regard de l’évolution des prix des quotas de carbone.

Les rapporteurs s’interrogent en outre sur l’importance du soutien aux entreprises électro-intensives, alors que des crédits ont été ouverts sur la mission Plan de relance pour favoriser la décarbonation des entreprises, et que le Gouvernement comme le Parlement est attaché à un verdissement du budget.

Recommandation : Conduire une réflexion sur le soutien aux entreprises électro-intensives au regard des objectifs de verdissement du budget.

2.   L’action 24, Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur

230,7 millions d’euros en CP ont été exécutés sur cette action pour 226,49 millions d’euros ouverts en LFI.

Les crédits inscrits sur l'action 24 Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur, conduite par la DGCCRF, incluent l'activité des services à compétence nationale qui lui sont rattachés (service informatique, école nationale et service national d’enquêtes), les dépenses métiers des DD(CS)PP et des DIRECCTE, ainsi que certaines dépenses de fonctionnement de l’administration centrale.

Ils participent à la mise en œuvre des missions de régulation concurrentielle des marchés, de protection économique du consommateur et de sécurité du consommateur.

3.   L’action 25, Mesures exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire

L’action n° 25, créée en 2020, intègre exclusivement des mesures adoptées en réponse à la crise sanitaire. À ce titre, elle a bénéficié des ressources suivantes :

● l’utilisation de la réserve de précaution du programme 134 (14,1 millions d’euros en AE et 15,7 millions d’euros en CP) ;

● l’ouverture de crédits en loi de finances rectificative du 25 avril 2020 à hauteur de 281,1 millions d’euros en AE et en CP, dont 222,10 millions d’euros pour permettre de notifier les premiers marchés d’acquisition de masques textiles à usage non sanitaire, 40 millions d’euros pour le financement des mesures de soutien à l’investissement pour des machines permettant la production de matériaux utilisés pour la confection des masques sanitaires, et 19 millions d’euros au titre des mesures de soutien aux zoos et cirques ;

● l’ouverture de crédits par décret n° 2020‑584 du 18 mai 2020 à hauteur de 284,2 millions d’euros en AE et en CP, destinés à lancer de nouveaux marchés d'acquisition de masques textiles à usage non sanitaire (264,2 millions d’euros) et à financer des mesures de soutien des centres équestres (20 millions d’euros).

D’autres actions ont également bénéficié de crédits complémentaires pour répondre à l’urgence sanitaire. Il en va ainsi de l’action 4, Développement des postes, des télécommunications et du numérique, abondée à hauteur de 16 millions d’euros en LFR au titre du dispositif de soutien de France Num « formations-actions collectives » et du dispositif d’accompagnement des entreprises, intitulé « IA Booster » (qui vise à accompagner les PME et les ETI dans leurs processus de transformation numérique et d’amélioration de leur compétitivité par l’intégration de solutions d’intelligence artificielle), de l’action 7, Développement international des entreprises et attractivité du territoire qui a bénéficié de crédits complémentaires ouverts en LFR pour notamment abonder les fonds de garantie de BPI Financement (100 millions d’euros) et accroître les subventions versées à Business France (6,5 millions d’euros), de l’action 22, Contrats à impact social, sur laquelle 30 millions d’euros ont été ouverts en LFR afin de venir en aide aux acteurs de l’économie sociale et solidaire.

*

*     *

Les rapporteurs spéciaux se félicitent de cette ouverture massive de crédits, qui a permis de faire face à une situation sanitaire et économique inédite et de répondre à un réel besoin – la Cour des comptes souligne ainsi qu’en dépit de leur ouverture tout au long de l’année, les crédits liés à la crise présentent un taux d’exécution élevé compte tenu de la nature des mesures financées (90,7 % en AE et 74,4 % en CP) ([7]). In fine, ce sont donc 1 521,7 millions d’euros en AE et 815,4 millions en CP supplémentaires qui ont été dépensés pour répondre à la crise sanitaire.

L’avenir des crédits dédiés à la relance

En loi de finances pour 2021, la quasi-intégralité des crédits dédiés à la relance qui étaient inscrits en 2020 sur le programme 134, Développement des entreprises, ont été inscrits au sein de la mission Plan de relance, sur les programmes Écologie (programme n° 362) et Compétitivité (programme n° 363) et sur la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, au sein du Matériels sanitaires face à la crise (programme n° 366).

Les rapporteurs recommandent que figure dans les documents budgétaires un tableau récapitulant l’ensemble des crédits de relance par politique publique, afin d’en connaître l’exact coût.

Recommandation : Fournir dans les futurs documents budgétaires une synthèse des dépenses de soutien aux entreprises lies à la crise sanitaire, depuis leur mise en œuvre jusqu’à l’année en cours.

B.   Le schéma d’emplois

En LFI, le plafond autorisé d’emplois s’élevait à 4 540 équivalents temps plein travaillés (ETPT) ; il a été ramené à 4 537 par la quatrième loi de finances rectificatives pour 2 020 du 30 novembre 2020. Le plafond a été consommé à hauteur de 4 527 ETPT, soit un taux d’exécution de 99,5 %. L'écart de - 13 ETPT entre la réalisation et la LFI 2020 traduit l’allongement du délai moyen de recrutement, notamment pour des profils rares et très techniques. L’augmentation des délais de recrutements et les décalages de paye ont été accrus en 2020 sous l’effet de la crise sanitaire.

Le schéma d’emploi pour 2020 s’établit quant à lui à -92 ETP, un niveau inférieur de 63 ETP à la prévision de la LFI (-155 ETP). Dans un contexte où les directions du programme ont été fortement sollicitées par la crise sanitaire et économique, cet assouplissement en gestion s’est avéré nécessaire pour conserver une relation de proximité sur le terrain avec les entreprises les plus affectées par la crise et accompagner la mise en œuvre du plan de relance et le soutien aux entreprises. La finalisation de la réforme du réseau territorial de la DGE a été différée à 2022. Le réseau territorial a en effet été fortement sollicité pour accompagner les entreprises en difficultés et faciliter l’accès aux dispositifs de relance.

Recommandation : Continuer à tenir compte des besoins des entreprises pour adapter le schéma d’emploi des entités dépendant du programme 134.

 

 

 

C.   Des dépenses fiscales importantes mais insuffisamment évaluées

Les dépenses fiscales représentent le principal financement du programme 134, tant en les rapportant aux crédits votés en LFI qu’aux crédits effectivement consommés.

Le recours aux dépenses fiscales pour le soutien aux entreprises est en effet massif : ces « niches » représentent un véritable point de fuite de la dépense publique, sans que, du fait de leur dérogation aux principes d’unité et d’universalité, il ne soit possible de chiffrer précisément leur impact et leur coût pour les finances publiques.

part respective des crédits ouverts en LFI du programme 134 et des dépenses fiscales rattachées en 2020

(en millions d’euros)

part respective des crédits consommés en LFI du programme 134 et des dépenses fiscales rattachées en 2020

(en millions d’euros)

Source : Assemblée nationale, commission des finances d’après les documents budgétaires.

Les rapporteurs spéciaux soulignent par ailleurs le nombre trop important de dépenses fiscales non chiffrées et celles de très faible montant. Sur les 68 dépenses fiscales figurant dans le document budgétaire, 13 ne sont pas chiffrées et 15 ont un coût inférieur à 5 millions d’euros.

Comme dans leur rapport de l’an passé et leur rapport spécial portant sur le projet de loi de finances pour 2021, les rapporteurs spéciaux réitèrent la nécessité d’améliorer ce chiffrage afin de mieux connaître le réel soutien apporté par l’État à l’économie et assurer une information complète du Parlement.

Le secrétariat général des ministères économiques et financiers a indiqué aux rapporteurs spéciaux que des travaux d’évaluation sur la performance des dépenses fiscales rattachées au programme 134 venaient de débuter, entre le responsable de la fonction financière ministérielle, la direction de la législation fiscale, le responsable de programme et la DGE.

Recommandation : Fournir a minima un point d’étape des travaux en cours sur les dépenses fiscales dans les futurs documents budgétaires

D.   Les indicateurs de performance du programme : une évolution globalement positive bien que certains doivent encore être consolidés

Les indicateurs de l’objectif Assurer le fonctionnement loyal et sécurisé des marchés sont en progression entre 2019 et 2020. L’indicateur 3.1 Taux de suite opérationnelle des enquêtes de pratiques anticoncurrentielles passe ainsi de 42 % en 2019 à 48 % en 2020 ; l’indicateur 3.2 Taux de mise en conformité des opérateurs suite à une demande de l'administration, créée en 2020, atteint le très bon niveau de 95 % en dépit du contexte sanitaire, ce que les rapporteurs saluent.

L’indicateur 2.1 Efficience du soutien public de Business France en matière d'internationalisation des entreprises, qui calcule le montant de la subvention publique de l’État par opération d’internationalisation d’entreprise aboutie avec le concours de Business France, s’élève pour 2020 à plus de 26 000 euros, contre un peu moins de 18 000 euros en 2019. Cette forte dégradation est directement imputable à la crise sanitaire qui a provoqué une diminution des exportations.

Les indicateurs de l’objectif n° 1 du programme, Renforcer l’efficacité des aides aux entreprises, ont vu leur méthodologie révisée.

L’indicateur 1.2, qui donne l’écart de taux de pérennité à 3 ans des entreprises aidées, s’établit entre 5 et 10 points. Les rapporteurs saluent l’évolution de méthodologie destinée à fiabiliser cet indicateur.

L’indicateur 1.1, Écart entre le taux de croissance des entreprises aidées par Bpifrance financement et celui des entreprises comparables, qui s’élevait à 4,4 points en 2019, est simplement « supérieur à 0 » dans les documents budgétaires 2 020. L’objectif avait été fixé en 2018 de rendre cet indicateur plus robuste en augmentant la comparabilité entre les entreprises bénéficiaires des garanties et des entreprises comparables, certaines ayant recours à d’autres types de crédits. Les rapporteurs saluent cette volonté de précision et appellent de leurs vœux que la consolidation des résultats puisse aboutir rapidement.

Recommandation : Assurer la consolidation des indicateurs du programme 134.

E.   Une maquette à clarifier

1.   L’effort de lisibilité du programme 134 doit être poursuivi

Les rapporteurs spéciaux soulignent les problématiques de cohérence interne et externe du programme 134.

a.   Des progrès de cohérence interne qui doivent encore être approfondis

Du fait de la grande diversité des opérations qu’il finance (les entreprises, le transport postal, certaines agences également financées par des taxes affectées), le programme 134 pose question au regard de sa spécialité, un constat souvent fait par les rapporteurs spéciaux et partagé par l’administration ([8]). Ce problème de cohérence interne conforte l’impression d’un programme « fourre-tout », sans grande clarté dans les objectifs qu’il poursuit ni les dispositifs qu’il finance. Des progrès ont cependant été réalisés, à travers plusieurs changements de périmètre mis en œuvre dans le PLF.

b.   Des problématiques de cohérence externe du programme 134 qui persistent

Comme les rapporteurs spéciaux l’avaient rappelé dans le rapport spécial portant sur le projet de loi de finances initiale pour 2020, le programme 134 pose des problèmes de « cohérence externe », pour reprendre la terminologie de la Cour des comptes :

 des crédits concourant au soutien au développement des entreprises sont ainsi portés par d’autres missions, en particulier les missions Recherche, Investissements d’avenir et Cohésion des territoires ;

 les programmes d’investissement d’avenir participent également au financement du numérique, de l’innovation et du soutien aux entreprises ;

 La création de la mission Plan de relance va permettre au programme 134 de retrouver sa structure initiale, néanmoins cela n'apportera pas plus de lisibilité.

Le soutien de l’État aux entreprises passe également par des fonds sans personnalité juridique. C’est en particulier le cas pour le Fonds pour l’innovation et l’industrie (F2I) et le Fonds pour la société numérique (FSN), dont les rapporteurs avaient déjà souligné les performances discutables et le manque de clarté des décaissements dans un rapport précédent ([9]).

Pour ne pas aggraver les incertitudes et les risques pesant sur le programme dans le contexte de crise sanitaire, les travaux engagés en début d’année 2020 pour clarifier l’architecture budgétaire ont été décalés, dans un premier temps pour répondre à l’urgence et au début de l’été dans l’attente d’une stabilisation de la mission Plan de relance.

Les rapporteurs spéciaux appellent à ce que les réflexions sur une meilleure cohérence du programme, interrompues par la crise sanitaire, puissent reprendre rapidement.

Recommandation : Reprendre les réflexions sur la maquette du programme 134

II.   Programme 343, Plan France Très haut dÉbit

Le programme 343, Plan France très haut débit (PFTHD) porte les crédits consacrés au soutien des Réseaux d’initiative publique (RIP) des collectivités territoriales. L’objectif unique du programme, Couvrir intégralement la France en accès à très haut débit d’ici 2022, est rendu d’autant plus crucial par la crise sanitaire, qui a accéléré le recours aux technologies numériques au travail et dans la vie quotidienne.

Le déploiement du très haut débit :
une action conjointe d’acteurs publics et privés

Le déploiement du très haut débit sur le territoire national procède d’une logique associant acteurs privés et acteurs publics, agissant chacun sur des zones déterminées.

L’ensemble du territoire est ainsi découpé en deux grandes catégories : la zone très dense (dont la liste de communes est définie par l’ARCEP) et la zone moins dense, correspondant aux territoires restants. Cette dernière se subdivise elle-même en zone moins dense où l’initiative privée est présente et zone moins dense où l’on constate une carence de l’initiative privée. Afin de les déterminer, le Gouvernement a recueilli en 2011 les intentions des opérateurs à déployer sur fonds propres des réseaux horizon de 5 ans dans ces zones, dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt d’investissement. L’intervention financière de l’État ne peut se faire que dans ces zones moins denses où l’initiative privée est carencée – dite zones moins dense d’initiative publique.

Ainsi, les opérateurs privés qui agissent sur la zone très dense et sur la zone moins dense d’initiative privée doivent couvrir à terme 55 % des logements et des locaux professionnels.

Sur les zones moins denses d’initiative publique, les réseaux fixes à très haut débit sont majoritairement déployés dans le cadre de projets portés par les collectivités territoriales, appelés réseaux d’initiative publique. L’État s’est déjà engagé à contribuer à hauteur de 3,3 milliards d’euros en soutien des collectivités territoriales.

Dans le but d’assurer la généralisation de la fibre optique jusqu’à l’abonné et de la 4G pour l’ensemble des Français, le Gouvernement conduit une politique appelée le « Plan France Très haut débit ».

Cette politique avait initialement deux objectifs : garantir à tous un accès au bon haut débit (supérieur à 8 Mbits/s) d’ici 2 020 et garantir un accès au très haut débit (supérieur à 30 Mbits/s) d’ici 2022. La crise sanitaire ayant mis en exergue l’importance de l’accès au numérique, un troisième objectif a été ajouté en 2020 : la couverture générale en fibre optique du territoire d’ici 2025.

Rappel sur la manière dont cela fonctionne : le programme 343 se compose ainsi d’une action unique, Réseaux d’initiative publique.

De nouveaux objectifs pour le plan France très haut débit

Les objectifs initiaux du plan France très haut débit ont été fixés en 2017, lors des conférences des territoires : atteindre 100 % du territoire couvert par le haut débit à la fin de l’année 2020, et par le très haut débit en 2022.

À cette fin, devait être utilisé un mix technologique reposant majoritairement sur la fibre optique (pour 80 % des foyers). Les 20 % restant seront notamment couverts par un réseau de fils de cuivre (technologie VDSL) et des offres satellitaires (offres lancées par Nordnet, permises par le satellite Eutelsat)

En raison du coût élevé de ces offres et de la crise sanitaire, un nouvel objectif a été fixé en 2020 : couvrir le territoire en fibre optique d’ici fin 2025.

A.   Une structure budgétaire complexe

L’effort financier global de l’État en faveur du Plan France Très Haut débit estimé jusqu’en 2022 s’élevait 2 020 à 3,3 milliards d’euros au total d’ici 2022 :

● 900 millions d’euros de crédits non budgétaires issus du Fonds pour la société numérique (FSN), qui constituait originellement l’action 1 du PIA ;

● 2,4 milliards d’euros engagés au 31 décembre 2020 sur le programme 343.

Le nouvel objectif de couverture fibre d’ici 2025 a porté le budget global estimé à 3,6 milliards d’euros. 30 millions d’euros ont ainsi été ouverts par la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 sur le programme 343 et, 240 millions d’euros ouverts en LFI pour 2021 dans le cadre du plan de relance sur le programme 364 Cohésion (action 07 Cohésion territoriale), destinés à la généralisation de la fibre d’ici 2025.

Tant les crédits du programme 343 que, pour 2021, du programme 364 de la mission Relance viennent abonder le FSN, qui finance dans un deuxième temps les projets retenus.

Les rapporteurs spéciaux s’interrogent sur le choix d’avoir ouvert des crédits sur la mission Plan de relance pour financer les mêmes opérations que celles actuellement financées par le programme 343.

Recommandation : Fournir dans les documents budgétaires une synthèse du suivi des dépenses du Plan France Très haut débit.

 

 

B.   Une sous-exécution des crédits du programme 343 liée à la crise et à des difficultés de prÉvision des dépenses

En 2020, 3,3 millions d’euros en AE et 440 millions d’euros en CP ont été ouverts sur l’action unique Réseaux d’initiative publique du programme 343, contre 5 millions et 163 millions en 2019 respectivement. In fine, aucune AE et seulement 225 millions de CP ont été consommés.

Dans une perspective de généralisation de la fibre optique à tout le territoire français d’ici fin 2025, le Gouvernement a lancé le 20 février 2020 un appel à projet « Plan France très haut débit - réseaux d’initiative publique » pour accompagner les départements non encore raccordés. L’ambition nouvelle décidée dans le cadre du plan de relance a rendu caduc cet appel à projet et conduit à la publication, le 8 janvier 2021, d’un nouveau cahier des charges.

De ce fait, aucun engagement n’est intervenu en 2020 dans l’attente de la réouverture du guichet Très haut débit, qui a été effectivement lancé le 8 janvier 2021. Le report de l'intégralité des AE ouvertes en 2020 a été obtenu pour 2021.

S’agissant des CP, près de 574 millions d’euros étaient disponibles en 2020. 225 millions ont été consommés. Près de 350 millions d’euros ont ainsi été annulés en LFR.

Si cette sous-exécution est en partie due à la crise sanitaire (source de délais opérationnels sur certains chantiers, du fait par exemple d’un absentéisme accru dans les équipes de déploiement) et à des demandes de versement adressées plus tardivement par les collectivités, le Gouvernement reconnaît également qu’il y a eu « une estimation du niveau d’avancement des travaux et des décaissements correspondants - établie en 2017 […] – qui s’est avérée ne plus être en phase avec la réalité du déploiement effectivement constaté en 2020. » ([10]). Ainsi que l’a précisé le responsable du programme 343, auditionné par les rapporteurs spéciaux, cette sous-exécution n’est donc pas due à un moindre avancement des travaux dans les territoires mais à une surévaluation des besoins pour 2020.

Les rapporteurs spéciaux invitent à améliorer les prévisions afin que les crédits votés par le Parlement correspondent bien au financement budgétaire de la politique publique sur une année donnée. La direction générale des entreprises met ainsi régulièrement à jour le coût global estimé du Plan France Très haut débit, une prévision qui s’avère assez fiable ; il s’agit désormais d’affiner la chronique des paiements, c’est-à-dire la détermination du moment où le décaissement aura effectivement lieu.

À ce titre, les rapporteurs spéciaux saluent le système récemment mis en place par la DGE, consistant en des campagnes de recensement durant lesquelles il est demandé aux porteurs de projets, au moins deux fois par an, leurs prévisions de décaissements pour l’année n et n+ 1. La DGE et l’ANCT travaillent également à un accompagnement accru des collectivités territoriales dans lesquelles les projets prennent du retard.

Recommandation : Poursuivre la mise en œuvre de nouveaux dispositifs visant à améliorer la prévision des décaissements sur le programme 343.

C.   Un indicateur de performance à repenser

L’unique indicateur de performance du programme 343, Couvrir la France en accès à très haut débit à 100 % d’ici 2022, mesure le pourcentage de locaux dont l’équipement est prévu dans le cadre des conventions de financement des projets de réseaux d’initiative publique rapporté à l’ensemble des locaux éligibles au très haut débit à l’horizon 2022 au sein des zones d’intervention publique.

La Cour des comptes souligne à juste titre dans sa note sur l’exécution budgétaire de la mission que cet indicateur ne donne pas une image fidèle des déploiements effectifs du très haut débit financé par le programme 343.

Interrogé à ce sujet par les rapporteurs spéciaux, le responsable du programme 343 a indiqué que cet indicateur était idéal au commencement du PFTHD mais n’était en effet plus adapté aujourd’hui. Une réflexion est en cours pour faire évoluer cet indicateur. Les rapporteurs spéciaux appellent de leurs vœux que ce nouvel indicateur puisse figurer dans les documents budgétaires dès le projet de loi de finances pour 2022.

Recommandation : Proposer dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2022 un nouvel indicateur pour le programme 343

III.   Le compte de concours financier Prêts et avances à des particuliers ou À des organismes privés

Le compte de concours financier Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés est composé de quatre sections :

● Section n° 1 : « Prêts et avances pour le logement des agents de l’État » ;

● Section n° 2 : « Prêts pour le développement économique et social » ;

● Section n° 3 : « Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l'aéroport Paris‑Charles de Gaulle ».

● Section n° 4 : « Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid-19 ».

Détail des sections du compte

Depuis 2014, la première section ne comporte plus que les « Avances aux agents de l’État à l’étranger pour la prise en location d’un logement » (ligne de recettes n° 04 et action n° 04 du programme 861).

La deuxième section correspond :

• aux « Prêts pour le développement économique et social », (programme 862 et ligne de recettes n° 06 qui retracent le versement et le remboursement de prêts consentis aux entreprises rencontrant des difficultés ponctuelles de financement) ;

• aux « Prêts et avances pour le développement du commerce vers l’Iran » (programme 868) ;

• aux « Prêts octroyés dans le cadre des programmes des investissements d'avenir » (programme 876, qui porte le financement en prêt du plan Nano 2022).

La troisième section comporte une unique action : « Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris Charles de Gaulle » (programme 869).

La quatrième section comporte une unique action : « Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid‑19 » (programme 877). Cette section et le programme 877 ont été créés par la loi n° 2020‑473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

Le compte de concours financier a été particulièrement sollicité en 2020 en raison de la crise sanitaire, notamment à travers les programmes 862 et 877.

Le programme 862, Prêts pour le développement économique et social finance en effet les prêts du Fonds pour le développement économique et social (FDES) octroyés par l’État à des entreprises pour accompagner leur restructuration financière et commerciale

Alors que 75 millions d’euros avaient été prévus en LFI 2020, ce sont finalement 405,67 millions d’euros qui ont été consommés en AE et 131,37 millions d’euros en CP. 925 millions d’euros ont ainsi été ouverts par la loi de finances du 25 avril 2020 rectificative pour 2020 afin de porter à 1 milliard d’euros la capacité d’intervention du Fonds de développement économique et social (FDES), pour octroyer des prêts aux entreprises fragiles ou en difficulté dont les perspectives de redressement sont avérées.

Le programme 877, Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid19, est un programme temporaire mis en place par la loi de finances rectificatives pour 2020 du 25 avril. Il fait partie des dispositifs financiers mis en place en urgence au printemps 2020 par le gouvernement pour aider les entreprises faisant face à des difficultés de liquidités.

Finançant les dispositifs d’avances remboursables et de prêts à taux bonifiés, il bénéficie aux entreprises fragilisées par la crise sanitaire n’ayant pas trouvé de solutions de financement suffisantes auprès de leur partenaire bancaire ou d'autres financeurs privés, et qui, malgré les dispositifs mis en place par l’État pour l’ensemble des entreprises (reports de charges fiscales et sociales, activité partielle, prêts garantis par l’État et fonds de solidarité) n’ont pas réussi à surmonter leurs difficultés de liquidité.

Le programme initialement prévu pour les seules avances et prêts bonifiés aux PME, a été élargi par la 3ème loi de finances rectificative de 2020 (loi n° 2020‑935 du 30/07/2020) aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), et doté de 500 millions d’euros en AE et en CP. Aucune AE et aucun CP n’étaient donc logiquement prévus en LFI ; près de 41 millions d’euros ont été consommés.

En 2020 ce sont 81 aides octroyées pour un montant total de 60 millions d’euros ([11]). Près de 6 000 emplois ont ainsi pu être sauvegardés. Le programme devait prendre fin au 31/12/2020 cependant compte tenu des incertitudes sur l’évolution de la pandémie et de ses impacts sur l’économie il a été prolongé par décret du 23 décembre 2020 jusqu’au 30 juin 2021, financé par le report sur 2021 de la totalité des crédits non consommés en 2020 (459,30 millions d’euros) (arrêté de reports du 13/01/2021).

 


—  1  —

   SECONDE partie - THÈME D’ÉVALUATION :
La garantie BPI

La « garantie BPI » désigne les dispositifs de soutien aux entreprises portés par Bpifrance destinés aux PME afin de favoriser leur accès au financement, notamment via un fonds de garantie permettant à des entreprises moins bien cotées d’accéder à la bancarisation.

La BPI bénéficiait à ce titre historiquement d’importants financements budgétaires de l’État, portés par le programme 134. Toutefois, depuis 2019, le Gouvernement mène une importante réforme afin que le financement octroyé par BPI soit assuré exclusivement par la mobilisation de ressources internes aux fonds de garantie. En conséquence, le financement par le programme 134 est supprimé dans chaque PLF depuis 2019 – mais rétabli par le Parlement.

Alors que la crise sanitaire a rendu nécessaire le maintien du financement budgétaire de la garantie BPI (financement toutefois porté presque dans son intégralité par la mission Plan de relance, et qui a donc vocation à disparaître en 2023), les rapporteurs spéciaux ont souhaité s’intéresser à ce dispositif fondamental et interroger l’opportunité du maintien d’un financement budgétaire.

I.   L’activité de garantie de BPI France, essentielle à l’Économie, a vocation À se renforcer dans la période post‑crise sanitaire

L’activité de Bpifrance, essentielle au soutien des petites et moyennes entreprises, a vocation à se renforcer après avoir été freinée par la crise sanitaire.

A.   À travers son activité de garantie, la BPI offre un soutien essentiel aux petites et moyennes entreprises

Bpifrance offre différents types de garanties adaptées aux différents projets, tout en assurant une perte limitée pour l’État.

1.   Différents types de garanties adaptées aux différents projets

La Banque publique d’investissement (BPI) propose une offre historique de garanties ([12]) consistant à garantir les banques dès lors qu’elles prêtent aux petits et moyennes entreprises (PME), a fortiori dans les phases où l’accès au crédit est le plus complexe – jeunes entreprises en création, transmissions (rachat d’entreprises, rachat de fonds de commerce etc.) –ou lorsque le type d’investissement est plus risqué (financements ciblés sur l’innovation, sur l’international, financements de court terme etc.).

L’objectif de cette activité de garantie est de favoriser l’accès au crédit, aux financements bancaires des PME et TPE, en partageant le risque avec les établissements bancaires et en limitant les garanties personnelles des porteurs de projet.

Il existe différents fonds de garantie : le fonds création (3 milliards d’euros de risques pris par an), le fonds transmission (1,5 milliard d’euros par an), et le fonds développement (entre 750 millions et 1 milliard d’euros par an). Chaque année, la BPI garantit entre 8 et 10 milliards d’euros de crédits pour un total d’encours garantis de 100 milliards d’euros, soit environ 10 % du marché. Avec le plan de relance, l’ambition est de doubler ces volumes de crédits précrise. Cette ambition est normalement financée par le plan de relance. La Bpi a également comme ambition d’augmenter les prêts sans garantie, qui devraient permettre de financier la transition énergétique et numérique – un objectif également financé par le plan de relance, à hauteur de 500 millions d’euros, auxquels s’ajoutent les capacités de financement dégagées en interne.

Source : Documents transmis par BPI France « La garantie – Comment ça marche ? ».

2.   Des modalités d’octroi adaptées à la dimension du projet

Il existe deux manières de traiter les dossiers de garantie, en fonction du montant du crédit demandé.

● Pour les crédits de moins de 200 000 euros, ils sont accordés dans le cadre d’un contrat de garantie signé entre la BPI et la banque, qui fixe un cadre déterminant les entreprises éligibles. La garantie est réputée acquise dès lors que les termes du contrat de garantie sont remplis. La banque dispose ainsi d’une capacité de décision et bénéficie de la garantie jusqu’à 200 000 euros d’encours, par entreprise ou groupe d’entreprise, sous réserve du respect des termes du contrat de garantie. Environ 50 000 des 70 000 garanties octroyées annuellement le sont par cette voie. Dans les faits, les crédits de ce montant sont généralement demandés par des TPE.

● Pour les crédits supérieurs à 200 000 euros, l’octroi de la garantie n’est pas automatique. L’entreprise souhaitant obtenir la garantie constitue un dossier qui est ensuite adressé à la direction régionale de BPI France. Depuis 2020, ces dossiers peuvent être transmis via une demande de garantie en ligne. La BPI instruit le dossier et notifie l’octroi de la garantie le cas échéant. La majorité des entreprises demandant une garantie pour un crédit supérieur à 200 000 euros sont des PME.

In fine, 90 % des bénéficiaires de ces garanties sont des TPE et 10 % des PME/ETI.

3.   Des modalités de mise en œuvre de la garantie qui assurent une perte limitée pour l’État

Les modalités de la mise en jeu de la garantie BPI assurent une perte minimale pour l’État. La Bpi n’intervient en effet qu’en perte finale, comme le détaille l’exemple ci-après :

 

Source : Documents transmis par BPI France « La garantie – Comment ça marche ? »


B.   Impactée par la crise sanitaire, l’activité de garantie de BPI France a vocation à monter en charge

Si l’activité de garantie de Bpifrance a été largement supplantée par le prêt garanti par l’État durant la crise sanitaire, elle a désormais vocation à se renforcer et à accompagner la relance.

1.   Renforcées dans un premier temps, les garanties BPI ont laissé la place au prêt garanti par l’État

L’action de Bpifrance a été particulièrement importante dès le début de la crise sanitaire, en ligne avec son rôle contra cyclique.

D’abord, une offre de crise de prêts de trésorerie et de soutien au BFR a été lancée par Bpifrance (Prêt Atout) et a nécessité des ressources publiques pour doter les fonds de garantie très importante. Des moyens internes ont été mobilisés à plus de 400 millions d’euros, en sus d’une dotation de 100 millions d’euros autorisée par une loi de finances rectificatives.

Ensuite, pour la période de relance qui s’est ouverte, c’est-à-dire les années 2021 et 2022, c’est le programme 363 de la mission Relance qui a été mobilisé en LFI pour abonder les fonds, de manière très volontariste. Les autorisations d’engagement (409 millions d’euros en 2021-2022) et les crédits de paiement (305 millions d’euros en 2021) représentent ainsi des enveloppes sans commune mesure avec les dotations budgétaires des années précédentes (20 millions d’euros en moyenne entre 2015 et 2019).

Le prêt garanti par l’État s’est cependant dans un deuxième temps substitué aux garanties classiques, dont la demande a reculé de 30 à 35 %. Les PGE ont saturé le marché durant la crise, et ont été utilisés pour diverses finalités.

 

La question du remboursement des prêts garantis par l’État (PGE)

Rappel des différentes modalités de remboursement :

– remboursement du PGE au bout d’un an : remboursement à coût nul ;

– mise en amortissement du PGE dès maintenant, pour une durée de 5 ans : taux d’environ 1,8 % pour les PME et 2,25 % pour les ETI ;

– prolongation d’une année et mise en amortissement par la suite : un taux personnalisé est communiqué aux entreprises ;

La BPI a interrogé les entreprises ayant bénéficié d’un PGE. 50 % d’entre elles ont répondu. Sur l’ensemble des réponses obtenues, il apparaît que

– 90 % vont utiliser la faculté de report du remboursement – année de différée – suivi d’un amortissement sur 5 ans ;

– 10 % comment à l’amortir dès à présent.

La proportion importante d’entreprises choisissant l’année de différé était attendue, au regard de l’absence de visibilité sur la reprise de l’activité économique.

S’agissant de l’impact des non-remboursements, il est pour l’instant très limité. Deux études faites à l’automne par la BPI et la Banque de France sont arrivées aux mêmes résultats, à savoir une perte finale de 4 à 7 %. Sur 120 milliards d’euros, cela représente donc 5 à 8 milliards d’euros pour l’État – et ce sans tenir compte des commissions perçues qui devrait représenter 2 à 3 milliards d’euros. Ces études ont cependant été réalisées avant l’annonce du troisième confinement – qui pourrait donner lieu à une perte finale davantage située entre 6 et 9 %.

2.   Alors que les PGE arrivent à leur terme, la garantie BPI doit monter en charge

Alors que les PGE arrivent à leur terme, la BPI doit désormais opérer dans un monde où la visibilité des entreprises est réduite, où les dettes sont accrues etc. Pour toutes ces raisons, le ministère de l’économie, des finances et de la relance a considéré qu’il fallait renforcer l’offre de garantie afin de permettre un retour à la normale du fonctionnement de l’économie. Cela passe par deux canaux principaux :

● une prise de risque accrue : lors de l’octroi de garantie, BPI France supporte en moyenne entre 40 et 60 % du risque. Dans le cadre du plan de relance, cette part atteint 70 % ;

● une diminution de la commission facturée aux banques.

Cette montée en charge se heurte pour l’heure à une double difficulté. Lors de son audition, la Bpi a ainsi indiqué aux rapporteurs spéciaux qu’il y avait un insuffisant retour du marché pour le moment et que les banques ne se saisissaient pas encore suffisamment de cet outil. Les banques n’ont pas encore totalement compris ce qu’était l’offre de garantie dans le plan de relance. Par ailleurs, la reprise de l’activité économique est encore trop incertaine.

Recommandation : Faire davantage connaître aux banques le dispositif de la garantie Bpi.

II.   La question du financement budgétaire de la garantie BPI : un cordon ombilical à maintenir

Alors que le Gouvernement souhaite supprimer le financement budgétaire historique de l’activité de garantie de Bpifrance, les rapporteurs spéciaux appellent à son maintien au regard du quadruple enjeu posé par sa suppression.

1.   Le financement budgétaire historique de la garantie BPI en voie d’extinction au profit de l’autofinancement

Le financement de la garantie BPI fait historiquement l’objet d’un financement budgétaire porté par le programme 134, Développement des entreprises et régulations. Jusqu’au projet de loi de finances pour 2018, ces crédits étaient portés par une action 20, Financement des entreprises.

En baisse depuis 2014, la ligne consacrée au financement budgétaire de la garantie BPI est depuis 2 019 systématiquement supprimée en projet de loi de finances – et rétablie par le Parlement durant la discussion du texte, dans des montants cependant bien inférieurs à ce qu’elle a été (10 000 euros) ([13]). Les rapporteurs spéciaux regrettent à ce titre que les documents budgétaires annexés à la loi de règlement ne fassent pas état de la consommation spécifique de ces crédits. Ainsi, si le rapport annuel de performance 2019 mentionne bien l’amendement voté lors de la discussion du projet de loi de finances, aucune information sur la consommation de ces crédits et si leur destination a bien été le soutien à la garantie Bpi n’est donnée. De même, dans le rapport annuel de performance 2020, seuls apparaissent les 100 millions d’euros complémentaires ouverts par la troisième loi de finances rectifivative (cf infra).

Recommandation : Faire état dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de règlement de la consommation des crédits ouverts lors de la discussion du projet de loi de finances.

Les années 2020 et 2021 n’ont pas fait exception. Toutefois, pour l’année 2020, le fonds de garantie Bpi a été abondé à hauteur de 100 millions d’euros pour faire face à l’urgence économique ; et pour 2021, d’importants crédits ont été proposés en PLF, mais sur la mission Plan de relance – et non plus sur le programme 134 de la mission Économie.


Évolution de la dotation budgétaire en faveur de la garantie Bpi
(hors dotations liées à la crise sanitaire)

(en millions d’euros)

L’objectif affirmé par le Gouvernement est que BPI auto-finance son activité de garantie au moyen des dividendes générés par celle-ci. Cela pose aux yeux de rapporteurs un quadruple enjeu.

2.   Un enjeu économique et financier

Au plan opérationnel, la décision de supprimer la ligne budgétaire pose un véritable enjeu de financement. L’existence d’une ligne budgétaire garantie BPI au sein du budget général permet de soutenir une activité essentielle à la bonne santé de l’économie. La Bpi a ainsi indiqué aux rapporteurs spéciaux qu’en cas de disparition définitive du financement budgétaire, l’incertitude d’un financement reposant exclusivement sur les dividendes la conduirait à revoir à la baisse le risque pris dans chaque garantie octroyée – il pourrait descendre à 30 % selon leurs estimations.

Cette ligne peut en outre être abondée en cas d’urgence, comme l’a montré la situation de crise actuelle. Le fonds de garantie BPI a ainsi été abondé à hauteur de 100 millions d’euros par la 3ème loi de finances rectificatives pour 2020, du 30 juillet 2020 ([14]).

Au plan économique, la suppression du financement budgétaire pose un enjeu de stabilité. Un pur auto-financement de l’activité de garantie, ainsi que la baisse éventuelle du niveau de prise de risque pris par la Bpi, conduirait à éroder la confiance des acteurs dans le dispositif. Or, la confiance joue un rôle préalable essentiel à toute décision d’investissement en économie.

L’économiste Kenneth Arrow ([15]) qualifie ainsi la confiance d « institution invisible » ; et Akerlof décrit la confiance comme une « précondition de l’échange et de la production » ([16]). De même, un soutien budgétaire à l’activité de garantie de très faible montant en loi de finances initiales pouvant éventuellement être revalorisé en cours d’année, n’est pas non plus une solution optimale – l’incertitude qui en découlerait pour les acteurs aurait un impact négatif sur l’investissement.

3.   Un enjeu de conformité aux règles budgétaires : le problème de la débudgétisation

Au plan des règles budgétaires, le recours aux dividendes que la BPI se verse pour doter les fonds de garantie peut s’apparenter à de la débudgétisation active. Les dividendes sont en effet actuellement versés à un établissement public industriel et commercial qui gère la participation de l’État dans BPI France (l’EPIC Bpifrance). Ces dividendes sont donc aujourd’hui des ressources de l’État. Les réinjecter directement dans l’activité au lieu de les reverser à l’État revient à verser une subvention qui n’apparaîtrait pas dans le budget.

La Cour des comptes avait souligné dans son rapport public thématique de 2016, « BPIFRANCE - Une mise en place réussie, un développement à stabiliser, des perspectives financières à consolider », les mécanismes de financements de la garantie s’apparentant à la débugétisation. Elle indiquait ainsi que le besoin de financement lié à l’activité de garantie était couvert par (i) la dotation budgétaire, (ii) le recyclage des excédents de dotations passées de l’État et (iii) le recyclage des dividendes de l’État.

La Cour montait ainsi qu’en 2013 et 2014, seule une faible partie du besoin de financement avait été couverte par les dotations en provenance du budget de l’État ; et que le reliquat l’avait été par le recyclage de disponibilités provenant de dotations de l’État antérieures, notamment dans le cadre du plan de relance en 2008-2009. Certes, ces réallocations sont validés par l’État en comité financement‑garantie de BPI France financement ; mais, pour la Cour, elles « n’en constituent pas moins un mécanisme de débudgétisation, les excédents sur dotations budgétaires devant être reversés au budget de l’État. »

En 2015, ce sont les dividendes revenant à l’État qui ont été utilisés pour couvrir le besoin de financement des fonds de garantie et qui ont été conservés au niveau de l’EPIC sans remonter dans les comptes publics. Sur les 680 millions d’euros de dividendes versés par Bpi France à l’EPIC au titre de l’exercice 2014, 614 millions ont été directement affectés au financement de l’activité de garantie de Bpifrance financement, par recyclage interne. Comme le note la Cour, « le dividende de Bpifrance a donc servi à alimenter des fonds qui sont des instruments de l’État, censés être financés par dotations budgétaires. »

Outre l’enjeu de conformité de ces modalités de financement aux règles budgétaires, ce choix prive le Parlement d’exercer ses prérogatives en matière budgétaire. Qu’il s’agisse du reliquat de dotations antérieures ou de dividendes, ils devraient être reversés au budget de l’État ; et les crédits nécessaires au financement de l’activité de Bpifrance inscrits dans le projet de loi de finances.

La Cour souligne également que l’absence de distributions de dividendes conduit à une accumulation des réserves au sein de l’EPIC, comptabilisées en report à nouveau. Entre 2013 et 2015, le montant des réserves distribuables conservées au niveau de l’EPIC est ainsi passé de 56 millions d’euros à 623 millions d’euros. Outre l’abondement des fonds de garantie, ces sommes ont permis de doter un fonds de réserve pour Bpifrance ayant vocation à absorber les pertes éventuelles en cas d’épuisement du fonds de garantie.

Enfin, la Cour rappelle l’existence du fonds de garantie à capital préservé (FGKP), créé en 2004, et destiné à couvrir l’activité de prêts aux entreprises en développement. Mes revenus financiers générés par ce placement à l’Agence France Trésor se substituent ainsi chaque année à la dotation budgétaire.

On note, pour les années 2017 à 2020, l’accentuation de ce mode de fonctionnement :

Besoins et ressources du budget de la garantie BPI 2017-2020

(en euros)

 

2017

2018

2018

2020

Besoin de financement total P134*

396 919 898

372 732 513

238 437 738

748 305 848

dont dotation Loi de finances

12 781 341

39 701 844

100 000 000

dont ressources internes mobilisées

384 138 557

333 030 669

238 437 738

648 305 848

i) redéploiement des dividendes EPIC

281 752 683

150 000 000

150 000 000

ii) produits financiers

13 004 023

8 608 131

4 000 000

4 000 000

iii) redéploiements des Fonds nationaux

89 381 851

324 422 538

84 437 738

379 305 848

iv) autres**

115 000 000

Revenus générés par FGKP***

2 246 101

1 962 592

1 994 230

1 739 221

* incluant les Fonds de garantie de place et également des dispositifs de Prêts sans garantie Bpifrance

** en 2020 : trésorerie EPIC 

*** revenus financiers ayant abondé le Fonds national de garantie Développement

Source : Documents transmis par la BPI aux rapporteurs spéciaux

Les rapporteurs spéciaux ont interrogé la direction générale du Trésor lors de son audition afin d’obtenir leur avis sur cette analyse. Si la direction générale du Trésor a affirmé qu’elle était en désaccord avec celle-ci, les rapporteurs spéciaux regrettent de ne pas avoir obtenu d’éléments clairs permettant d’étayer cette prise de position.

Cette multiplicité des sources de financements a en outre comme effet de nuire à leur bonne compréhension par les Parlement. À cet effet, les rapporteurs spéciaux rappellent l’engagement pris par la secrétaire d’État à l’économie sociale, solidaire et responsable devant le Sénat lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2021 : « Le Gouvernement prend devant vous l’engagement […] d’augmenter le niveau d’information disponible dans les documents budgétaires. Je vous propose ainsi que cela fasse l’objet d’un jaune dédié aux liens entre Bpifrance et l’État, ce qui garantit la transmission des informations précises sur les activités de Bpifrance en la matière. » Les rapporteurs spéciaux saluent cette déclaration et soutiennent l’idée de création d’un jaune budgétaire dédié.

Recommandation : Créer un jaune budgétaire dédié aux liens entre Bpifrance et l’État.

4.   Un enjeu démocratique

Enfin et surtout, la décision de supprimer le financement budgétaire de la garantie soulève un enjeu démocratique.

La BPI est comme son nom l’indique une banque publique. La représentation nationale devrait pouvoir, à travers le vote du budget, orienter ses activités. Supprimer la ligne budgétaire reviendrait à priver le Parlement de son droit de regard sur l’activité de garantie de BPI et d’en débattre à l’occasion du vote de la loi ou des lois budgétaires.

Pour l’ensemble de ces raisons, les rapporteurs spéciaux recommandent que la ligne budgétaire figurant au sein du programme 134 et dédiée au financement de la garantie Bpi soit rétablie dans ses montants historiques.

Recommandation : Rétablir de manière pérenne une ligne dédiée à la garantie Bpi France au sein du programme 134.

III.   Un service qui peut encore être améliorÉ

Si l’activité de garantie de la Bpi a fait ses preuves, elle peut encore être améliorée notamment s’agissant des délais de réponse et des mécanismes de reporting.

1.   La question des délais de réponse

S’agissant des crédits de moins de 200 000 euros, comme indiqué supra, la garantie est réputée octroyée dès lors que les conditions sont remplies. Il n’y a dès lors pas de délai de réponse.

S’agissant des crédits de plus de 200 000 euros, la BPI a assuré les rapporteurs spéciaux que le délai de réponse était inférieur à cinq jours ouvrés en moyenne, dès lors que le dossier complet est transmis à la BPI. Les rapporteurs spéciaux ont cependant eu l’occasion de s’entretenir avec des entrepreneurs qui n’avaient pas eu de réponse en dépit de leur demande – et soulignent la nécessité pour la BPI de s’assurer qu’une réponse est bien transmise.

Recommandation : Créer pour les entrepreneurs une interface dédiée au suivi des demandes.

2.   La question du reporting

Les rapporteurs spéciaux se sont particulièrement interrogés sur la question du suivi des produits Bpi octroyés. En dépit des bons résultats de la BPI, il leur est apparu lors des auditions que le suivi de la qualité de la distribution était insuffisant :

– au niveau de l’octroi de la garantie, les critères de sélection des dossiers ainsi que la qualité de la souscription ne fait l’objet d’aucun contrôle. Il a ainsi été indiqué aux rapporteurs spéciaux que les banques n’avaient pas toutes la même lecture des dossiers ni ne poursuivaient la même finalité ;

– au niveau du suivi des produits distribués, s’il existe des instances de suivi, une comitologie, des missions d’audit interne à la BPI et des études de satisfaction, aucun audit externe n'est exercé.

Les rapporteurs recommandent la mise en place d’un reporting plus approfondi – une évolution également souhaitée par la direction générale du Trésor. Par ailleurs, ils recommandent la création d’une mission parlementaire d’audit et de contrôle de la distribution de la garantie Bpi.

Recommandation : Renforcer le reporting sur les produits Bpi distribués.

Recommandation : Créer une mission parlementaire d’audit et de contrôle de la distribution de la garantie Bpi.

 

 

 

 


—  1  —

   Examen en commission 

Lors de sa réunion de 15 heures, le jeudi 3 juin 2021, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu Mme Valéria FaureMuntian et M. Xavier Roseren, rapporteurs spéciaux sur les crédits de la mission Économie : Développement des entreprises et régulations et compte de concours financiers ; Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail dédié de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu sera prochainement lisible en ligne.

 

 

 


—  1  —

Personnes auditionnÉes par le rapporteur spÉcial

 

Banque publique d’investissement :

– M. Arrnaud Caudoux, directeur exécutif et directeur général adjoint ;

– M. Jean-Baptiste, responsable des relations institutionnelles.

 

Ministère de l’économie, des finances et de la relance :

Direction générale du Trésor :

– Mme Marie-Anne Barbat-Layani, secrétaire générale des ministères économiques et financiers, responsable du programme 134 ;

– Mme Sarah Finkelstein, Cheffe du bureau Stabilité financière, comptabilité et gouvernance des entreprises.

 

Direction générale des entreprises :

– M. Olivier Corolleur, sous-directeur des communications électroniques et des postes, représentant du responsable du programme 343 ;

– M. Romain Hagenmuller, chargé de tutelle de l'agence nationale des fréquences ;

– Mme Chloé Desvilles, adjointe au chef du bureau des réseaux fixes et mobiles, membre du conseil d’administration de l’agence nationale de la cohésion des territoires.

 

 

 


([1]) L’augmentation des crédits de paiement s’élève à 7,9 % en neutralisant les dépenses du programme 343, Plan France Très haut débit, dont la prévision en LFI a été bien supérieure aux crédits effectivement consommés.

([2]) Rapport annuel de performance « Économie », annexé au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes pour 2020.

([3]) Décret n° 2020‑584 du 18 mai 2020 portant annulation de 284,2 M€ de crédits sur la dotation « Dépenses accidentelles et imprévisibles » des « Crédits non répartis » et ouverture de crédits du même montant sur le programme 134 – Développement des entreprises et régulations, de la mission Économie.

([4]) Documents budgétaires.

([5])  Les montants indiqués correspondent aux dépenses d’intervention. Les institutions gérant les dispositifs ont également bénéficié de crédits de fonctionnement.

([6])  La dépense a été imputée à tort sur l’action 23 alors qu’elle relève de l’action 04.

([7]) Cour des comptes, Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2 020 de la mission Économie.

([8]) Rapport spécial Économie sur la loi de règlement pour 2019, X. Roseren et O. Grégoire, députés, p. 11.

([9]) Rapport n° 3011, annexe 20 – Rapport de Mme Olivia Grégoire et M. Xavier Roseren sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes, après engagement de la procédure accélérée, de l'année 2019 (n° 2899), pp. 13-15.

([10]) Source : documents budgétaires.

([11]) La comptabilisation de 40,7 millions d’euros en AE est liée à un décalage à la clôture budgétaire.

([12]) La BPI propose également des crédits plus atypiques : prêts garantis par l’État (PGE), garantie des prêts étudiants, fonds de cohésion sociale…

([13]) Pour 2019, voir l’amendement AN n°II-1590 et pour 2020, voir l’amendement n°II-1082 des rapporteurs spéciaux.

([14]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([15]) The Limits of Organization, W. W Norton & Company, 1974.

([16]) Akerlof G. A., « The Market for Lemons : Quality Uncertainty and the Market Mechanism », The Quarterly Journal of Economics, vol. 84, n° 3, 1970, p. 488-500.