N° 4195

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 mai 2021

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (n° 4090),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 27
 

 

GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Jean-Paul MATTEI

 

Député

____

 

 


 

 

 

 


— 1 —

SOMMAIRE

___

Page

SYNTHÈSE ET ChiffreS-clés

RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

SUIVI DES RECOMMANDATIONS DES ANNÉES PRÉCÉDENTES

PREMIÈRE PARTIE : l’exécution des crédits du compte d’affectation spéciale (CAS) gestion du patrimoine immobilier de l’état en 2020

I. aprÈs une annÉe 2019 exceptionnelle, le CAS a ÉtÉ touchÉ par la crise sanitaire

A. la chute des recettes est imputable À la rÉduction du produit des cessions

1. La crise sanitaire a mis un coup d’arrêt aux cessions après une année 2019 particulièrement exceptionnelle

2. Les mesures de report et d’annulation des redevances domaniales et des loyers ont été une mesure de soutien à l’économie

3. La mobilisation du foncier public s’est essoufflée en 2020

B. la crise sanitaire a fortement ralenti l’engagement des dÉpenses sans avoir encore eu un effet sur la consommation des crÉdits dÉjÀ engagÉs

1. La crise sanitaire a conduit à l’interruption de projets en cours et au report de nouveaux projets

2. Les travaux d’entretien à la charge du propriétaire ont été moins touchés par la crise sanitaire

II. la crise sanitaire confirme la fragilitÉ structurelle du CAS

A. le CAS continue À ne jouer qu’un rÔle mineur dans la politique immobiliÈre de l’État

B. les ressources du CAS doivent Être diversifiÉes pour garantir ses moyens sur le long terme

SECONDe partie  thÈme d’Évaluation : le contrÔle de la sÉlection des projets et de l’efficience de la dÉpense dans la mise en œuvre du volet « rÉnovation thermique des bÂtiments publics » du plan de relance

I. la rÉnovation ÉnergÉtique des bÂtiments publics est un enjeu du programme Écologie du plan de relance

A. Les enjeux de la rÉnovation ÉnergÉtique pour la politique immobiliÈre de l’État

1. La rénovation énergétique est un impératif urgent pour les bâtiments de l’État

2. Le plan de relance est une opportunité historique pour la transition énergétique

B. des appels À projet ambitieux menÉs dans des dÉlais très courts

1. Un processus de sélection particulièrement rapide

2. Une enveloppe conséquente pour une multitude de projets facilement réalisables

II. un effort bienvenu mais insuffisant au regard des enjeux et des perspectives de long terme

A. des projets sÉlectionnÉs en fonction de la rapiditÉ et de la facilitÉ de rÉalisation

1. Les critères de sélection n’ont pas cherché à favoriser des projets d’envergure et de long terme

2. Le plan de relance aura finalement servi de support budgétaire pour des projets difficiles à financer sur les crédits des programmes ministériels

B. une demande bienvenue en soutien du tissu Économique local qui pose nÉanmoins des questions sur la capacitÉ des acteurs À y rÉpondre

1. Les projets de rénovation énergétique de bâtiments publics entendent relancer l’économie locale

2. Une forte demande qui risque de ne pas pouvoir être honorée dans les délais et les prix fixés

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

SOURCES UTILISÉES


— 1 —

   SYNTHÈSE ET ChiffreS-clés

Le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État sert à mutualiser les recettes issues des ventes de biens immobiliers, des redevances domaniales et des loyers dans le but de financer aussi bien des opérations structurantes que des dépenses d’entretien « du propriétaire ».

Le rapporteur rappelle que ce CAS ne joue qu’un rôle très modeste dans la politique immobilière de l’État (à peine 9,3 % de toutes les autorisations d’engagement pour les dépenses du propriétaire) qui s’appuie surtout sur les budgets des programmes ministériels ainsi que sur deux programmes spécifiques des missions Transformation et fonction publiques (rénovation des cités administratives) et Plan de relance (rénovation énergétique).

Seul le programme 723 du CAS est abondé.

exÉcution des crÉdits du
cas GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’état en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2020

Exécution 2020

Écart à la prévision

LFI 2020

Exécution 2020

Écart à la prévision

P721 – Contribution des cessions immobilières au désendettement de l’État

0

0

-

0

0

-

P723 – Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État

428

392

– 8,4 %

447

522

+ 16,8 %

 

 

 

 

Recettes

LFI 2020

Exécution 2020

Écart à la prévision

380

262

– 31 %

Source : commission des finances d’après le rapport annuel de performance pour 2020.

La diminution des recettes par rapport à la LFI est principalement due à la suspension des cessions ainsi qu’aux mesures de report puis d’annulation des loyers et redevances prises à l’égard des débiteurs du fait de la crise sanitaire. Celle-ci a fortement ralenti l’engagement des dépenses sans avoir encore eu un effet sur la consommation des crédits déjà engagés.

 

Thème d’évaluation 2021 : le contrôle de la sélection des projets et de l’efficience de la dépense dans la mise en œuvre du volet « rénovation énergétique des bâtiments publics » du Plan de relance

Les deux appels à projet – l’un pour les bâtiments de l’enseignement supérieur, l’autre pour ceux des autres ministères – lancés dans le cadre de France Relance constituent un enjeu majeur pour le patrimoine immobilier de l’État. L’amélioration de la performance en matière d’énergie devrait avoir un impact sur l’équilibre financier du CAS à moyen et long termes. Le rapporteur a voulu connaître les critères d’examen des dossiers et étudier la pertinence de ces investissements dans un horizon d’une cinquantaine d’années.

La sélection des dossiers s’est déroulée dans un délai très court de seulement trois mois de septembre à décembre 2020. Plus de 6 000 candidatures ont été déposées pour bénéficier du Plan de relance. À l’issue des deux appels à projet, 4 214 dossiers ont été sélectionnés pour un montant total de 2,7 milliards d’euros.

 

 

Nombre de projets

Montant (en milliards d’euros)

État (hors ESR)

3 160

1,4

Enseignement supérieur et recherche (ESR)

1 054

1,3

Total

4 214

2,7

Plus de la moitié des projets ont un coût estimé à moins de 100 000 euros. Ils relèvent, pour la plupart, d’actions dites « à gains rapides » (renouvellement des éclairages, amélioration de l’isolation, changement d’équipements de chauffage, de climatisation et de ventilation). Si le rapporteur salue cet effort sans précédent d’amélioration globale des performances énergétiques, il constate que la priorité a manifestement été donnée à une multitude de projets rapidement réalisables plutôt qu’à des opérations d’ampleur et de long terme.

Il s’avère que les dossiers ont été analysés à partir de deux critères : la capacité à mettre rapidement en œuvre le projet – afin de soutenir le tissu économique local (artisans, TPE et PME) – et le gain en performance énergétique. L’objectif premier du Plan de relance demeurant le redémarrage de l’économie sur tout le territoire, la rénovation énergétique des bâtiments publics s’est donc inscrite dans cette optique. Le rapporteur s’interroge sur la capacité des entreprises à répondre rapidement à la demande adressée, a fortiori dans un contexte de pénurie des matériaux qui ne devrait pas se résorber avant l’hiver 2021.

 

 


— 1 —

   RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

● Exécution des crédits en 2020

– faire du compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État le support budgétaire de l’ensemble des politiques transversales ayant trait au parc immobilier de l’État et de ses opérateurs ;

– poursuivre le développement de modes alternatifs de valorisation du patrimoine immobilier de l’État afin de diversifier les ressources du CAS.

● Thème d’évaluation : le contrôle de la sélection des projets et de l’efficience de la dépense dans la mise en œuvre du volet « rénovation énergétique des bâtiments publics » du Plan de relance

– améliorer la performance énergétique des bâtiments de l’État pour les cinquante prochaines années ;

– prévenir les risques de dépassement des délais et des coûts pour la réalisation des projets de rénovation énergétique sélectionnés dans le cadre du Plan de relance ;

– allouer les économies éventuellement réalisées sur les projets moins coûteux que prévus vers ceux nécessitant des financements supplémentaires.

 

 

 


— 1 —

   SUIVI DES RECOMMANDATIONS DES ANNÉES PRÉCÉDENTES

Dans son rapport spécial sur l’exécution des crédits du compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État de mai 2020 ([1]), le rapporteur avait formulé quatre recommandations :

La raréfaction des biens attractifs compromet un financement principalement basé sur les produits des cessions immobilières. C’est pourquoi le rapporteur appelait à diversifier les ressources pour permettre au CAS de disposer de recettes récurrentes.

De 2019 à 2020, la part des redevances domaniales et des loyers dans les recettes a augmenté en passant de 14,7 % à 36,1 %. Toutefois, ce ratio est, à la fois, la conséquence de la crise sanitaire et de l’arrêt des cessions et celle du très haut niveau de ventes en 2019. Abstraction faite de ces éléments conjoncturels, la structure du financement du CAS n’a pas évolué.

L’existence du CAS n’est actuellement pas remise en cause par le Gouvernement.

Lors de l’examen de ses crédits en commission d’évaluation des politiques publiques (CEPP), le ministre délégué chargé des comptes publics a indiqué travailler sur son avenir en explorant la piste des nouveaux modes de valorisation.

Toute opération engagée sur le programme 723 Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État qui contribue à accélérer la transition énergétique et à réduire la part structurelle de la dépense publique est effectivement comptabilisée dans le champ du grand plan d’investissement (GPI).

Ce procédé de labellisation n’a pas changé, d’autant plus que les dépenses liées à la rénovation énergétique des bâtiments publics sont portées par le véhicule budgétaire du Plan de relance et non par le CAS.

La direction de l’immobilier de l’État mène actuellement cette réflexion sur l’adaptation des bâtiments publics aux nouveaux usages. Toutefois, les effets de la crise sanitaire sur ces usages au sein des administrations demeurent encore indéterminés.

 


— 1 —

   PREMIÈRE PARTIE : l’exécution des crédits du compte d’affectation spéciale (CAS) gestion du patrimoine immobilier de l’état en 2020

Le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État sert à mutualiser les recettes issues de la vente de biens immobiliers et de la perception de redevances domaniales et de loyers dans le but de financer des projets immobiliers et des dépenses d’entretien à la charge du propriétaire pour le compte des administrations occupantes.

Il a été créé par l’article 8 de la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.

En 2020, les recettes qui y sont affectées se sont élevées à près de 262 millions d’euros.

Un compte spécial constituant une mission, conformément à l’article 20 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État comprend deux programmes placés sous la responsabilité du directeur de l’immobilier de l’État du ministère de l’économie, des finances et de la relance :

– le programme 721 Contribution des cessions immobilières au désendettement de l’État ;

– le programme 723 Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État.

Le premier n’est plus abondé depuis le 1er janvier 2018. Son maintien dans la nomenclature budgétaire du CAS permet de respecter formellement la prescription de l’article 7 de la LOLF. Quant au second, ses dépenses se sont élevées à 522 millions d’euros en crédits de paiement en 2020.

Malgré un résultat déficitaire de 260 millions d’euros en 2020, le solde cumulé de CAS demeure excédentaire grâce à sa trésorerie qui s’élevait à 785 millions d’euros au 31 décembre 2020.

Recettes constatées du CAS en 2020

(en millions d’euros)

 

Prévision

Réalisation

Écart en valeur absolue (et en %)

Recettes

380

261,55

– 118,45

(– 31,2 %)

 

 

ExÉcution des crÉdits du CAS pour 2020

(en millions d’euros)

 

Crédits demandés

Crédits exécutés

Écart en valeur absolue
(et en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 721 – Contribution des cessions immobilières au désendettement de l’État

0

0

0

0

0

(-)

0

(-)

Programme 723 – Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État

428

447

392,46

522,03

– 35,54 (– 8,3 %)

+ 75,03

(+ 16,8 %)

Total CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État

428

447

392,46

522,03

– 35,54 (– 8,3 %)

+ 75,03

(+ 16,8 %)

évolution des Recettes constatées du CAS au cours des trois dernières années

(en millions d’euros)

 

2018

2019

2020

Recettes

370,49

729,05

261,55

Évolution de l’exÉcution des crÉdits du CAS au cours des trois derniÈres annÉes

(en millions d’euros)

 

Crédits exécutés en 2018

Crédits exécutés en 2019

Crédits exécutés en 2020

AE

CP

AE

 CP

AE

CP

Programme 721 – Contribution des cessions immobilières au désendettement de l’État

0

0

0

0

0

0

Programme 723 – Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État

362,55

480,63

598,31

385,81

392,46

522,03

Total CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État

362,55

480,63

598,31

385,81

392,46

522,03

 

 


I.   aprÈs une annÉe 2019 exceptionnelle, le CAS a ÉtÉ touchÉ par la crise sanitaire

Au 31 décembre 2020, le solde du compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État s’est établi à 785,05 millions d’euros contre 1 045,52 millions d’euros au 1er janvier de la même année.

Si le résultat de l’exercice 2020 demeure donc excédentaire, la différence entre les recettes (261,55 millions d’euros) et les dépenses (522,03 millions d’euros en crédits de paiement) a nécessité de puiser dans la trésorerie du CAS pour financer ses opérations à hauteur de 260,47 millions d’euros, soit une diminution d’un quart du solde disponible.

Cette situation est due à une baisse importante des recettes par rapport à ce que prévoyait la loi de finances initiale (- 31,2 %) du fait de la crise sanitaire couplée à un niveau élevé de dépenses (+ 35,3 % par rapport à 2019), l’exécution des crédits de paiement n’ayant, quant à elle, pas été immédiatement impactée par la pandémie lors de l’exercice 2020.

En revanche, l’engagement de nouvelles dépenses s’est ralenti pour ces mêmes raisons (- 8,3 % par rapport à la prévision).

solde du CAS en 2020

(en millions d’euros)

Solde au 1er janvier 2020

1 045,52

Recettes

+ 261,55

Dépenses (crédits de paiement)

– 522,03

Solde au 31 décembre 2020

785,05

Source : rapport annuel de performances.

résultat du CAS en 2020

(en millions d’euros)

Source : rapport annuel de performances.

A.   la chute des recettes est imputable À la rÉduction du produit des cessions

Les recettes du CAS se sont élevées à 261,55 millions d’euros au lieu de 380 millions d’euros prévus par la loi de finances initiale, soit un écart de près d’un tiers. Par rapport à 2019, elles sont en baisse de 467,6 millions d’euros, soit une chute de 64,1 %.

Cette diminution considérable doit toutefois être relativisée en raison du caractère particulièrement exceptionnel de l’année 2019 pour les ressources du CAS qui étaient presque le double de celles de 2018.

Elle a pour cause la suspension des cessions pendant une grande partie de l’année du fait de la pandémie de Covid-19. La crise sanitaire explique également le recul des produits des redevances domaniales et des loyers.

Recettes du CAS

 

LR 2019

LFI 2020

PLR 2020

Produits des cessions

613,3

280

157,5

Produits de redevances domaniales et de loyers

107,1

100

94,3

Versement du budget général

4,6

0

5,4

Fonds de concours

4,1

0

4,3

Total des recettes

729,1

380

261,5

évolution des recettes du CAS depuis 2017

(en millions d’euros)

Source : rapport annuel de performances.

1.   La crise sanitaire a mis un coup d’arrêt aux cessions après une année 2019 particulièrement exceptionnelle

Les produits des cessions immobilières se sont élevés à 157,55 millions d’euros en 2020 (60,2 % du total des recettes). Ils accusent un écart de 122,45 millions d’euros par rapport à la prévision en loi de finances initiale (280 millions d’euros), soit une réalisation de recettes à seulement 56,3 %.

Cet écart important a essentiellement pour cause la crise sanitaire qui a conduit à suspendre les cessions pendant les deux périodes de confinement sans laisser le temps à une reprise forte à leur issue. La prise en compte de cette situation a conduit les troisième et quatrième lois de finances rectificatives ([2]) à diminuer respectivement de 60 et 40 millions d’euros les prévisions de produits de cessions.

En 2020, 567 biens immobiliers ont été vendus pour un montant de 96,7 millions d’euros. Le montant des recettes au titre des produits de cession est cependant plus élevé en raison du décalage dans le temps entre la vente et l’encaissement du prix. La diminution des ressources a ainsi été atténuée par le versement de soldes au titre de ventes antérieures à 2020.

Les cessions de plus d’un million d’euros ont été au nombre de 23, soit 4 % des ventes réalisées en 2020.

cessions les plus importantes de 2020

(en millions d’euros)

Bien cédé

Prix de vente

partie de la base militaire de Toulouse-Francazal (Haute-Garonne)

4,1

dernier bâtiment occupé par l’ENS de Cachan (Val-de-Marne)

3,8

cité administrative de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques)

3,1

Total

11

Source : rapport annuel de performances.

Si les recettes enregistrées en 2020 sont considérablement inférieures à celles de l’année précédente (– 467,6 millions d’euros), c’est principalement en raison du caractère particulier de la vente de trois biens immobiliers en 2019.

Il s’agissait de la seconde partie de l’îlot Saint-Germain (anciens bâtiments du ministère des armées situés boulevard Saint-Germain dans le 7e arrondissement de Paris) pour 368 millions d’euros, de l’hôtel de Seignelay (Paris 7e également) pour 61 millions d’euros ainsi que de la majeure partie du site occupé par l’école normale supérieure (ENS) de Cachan (Val-de-Marne) à hauteur de 32 millions d’euros.

En conséquence, les cessions situées en Île-de-France représentaient 80 % des produits de vente en 2019 contre un quart seulement en 2020.

Abstraction faite de ces opérations exceptionnelles par leur montant, les recettes des produits de cession sont relativement stables. Les ventes à un prix inférieur à 25 millions d’euros correspondent à un total compris entre 150 et 250 millions d’euros par an depuis plusieurs années.

évolution des recettes du CAS par type de produits

Source : Cour des comptes.

Le rapporteur constate à quel point les ressources du CAS sont dépendantes de la réalisation de cessions immobilières. La crise sanitaire est particulièrement révélatrice à cet égard.

2.   Les mesures de report et d’annulation des redevances domaniales et des loyers ont été une mesure de soutien à l’économie

Les produits de redevances domaniales et de loyers ont représenté 94,29 millions d’euros en 2020. Ils ont été inférieurs de 5,71 millions d’euros au montant prévu en loi de finances initiale (100 millions d’euros), soit une réalisation de recettes de 94,3 %.

Cet écart résulte des facilités de paiement accordées aux débiteurs dans le contexte de la pandémie de Covid-19, facilités qui ont consisté en la suspension voire l’annulation des montants dus à l’État.

Afin d’atténuer les conséquences de la crise sanitaire sur l’économie, l’article 6 de l’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 ([3]), modifié par l’article 20 de l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 ([4]), dispose que « lorsque le contrat emporte occupation du domaine public et que les conditions d’exploitation de l’activité de l’occupant sont dégradées dans des proportions manifestement excessives au regard de sa situation financière, le paiement des redevances dues pour l’occupation ou l’utilisation du domaine public est suspendu pour une durée qui ne peut excéder la période [de l’état d’urgence sanitaire] ».

La troisième loi de finances rectificative ([5]) a, quant à elle, annulé les redevances d’occupation du domaine public dues par les professionnels des secteurs touchés par la crise sanitaire (tourisme, hôtellerie, restauration, sport, culture et événementiel) au titre des trois premiers mois de la crise sanitaire, soit le quart du montant annuel.

Du fait du coup d’arrêt qu’ont connu les cessions immobilières, la part des redevances et loyers dans l’ensemble des recettes du CAS a atteint 36,1 % contre 14,7 % en 2019.

part des différentes recettes du CAS en 2019

Source : rapport annuel de performances.

part des différentes recettes du CAS en 2020

Source : rapport annuel de performances.

Le rapporteur considère que cette progression « en trompe-l’œil » ne doit pas occulter la fragilité structurelle des recettes du CAS qui reposent excessivement sur les ventes de biens immobiliers.

3.   La mobilisation du foncier public s’est essoufflée en 2020

Sans rapport direct avec la crise sanitaire, il convient de noter également le ralentissement, en 2020, de la mobilisation du foncier public permise par deux dispositifs juridiques dérogatoires permettant de céder un actif à un prix inférieur à celui du marché immobilier.

Ils constituent ainsi des atténuations de produits de cession pour le CAS.

Depuis 2009 ([6]), l’État a la possibilité de vendre pour un euro symbolique les emprises du ministère des armées, qui ont été reconnues inutiles, aux communes qui en font la demande.

Ces moindres recettes ont représenté un total de 15 millions d’euros en 2020, contre 19,4 millions d’euros l’année précédente, pour cinq biens cédés à l’euro symbolique.

Quant à la décote « Duflot » ([7]) – qui permet à l’État de céder un terrain pour un prix inférieur à sa valeur vénale afin de favoriser la production de logements sociaux –  elle n’a été utilisée que trois fois en 2020 contre 11 l’année précédente pour un coût de 2,6 millions d’euros contre 17,3 millions.

Depuis son entrée en vigueur, ce dispositif a conduit à la cession de 123 terrains dans le but de construire environ 8 800 logements sociaux. Il a, jusqu’à présent, coûté au total 229 millions d’euros aux finances publiques.

À l’initiative du rapporteur ([8]), un mécanisme de plafonnement de cette décote a été introduit en loi de finances pour 2019. Un décret d’application ([9]) fixe désormais une limite à celle-ci en fonction du coût moyen du logement social, lorsqu’une collectivité territoriale, un établissement public ou encore une société disposent de réserves foncières ou de biens immobiliers susceptibles d’accueillir un programme de logements sociaux, pour une surface de plancher au moins égale à celle du programme prévu.

B.   la crise sanitaire a fortement ralenti l’engagement des dÉpenses sans avoir encore eu un effet sur la consommation des crÉdits dÉjÀ engagÉs

Le programme 721 Contribution des cessions immobilières au désendettement de l’État n’est plus abondé depuis le 1er janvier 2018. L’analyse de l’exécution des crédits ne portera donc que sur les dépenses du programme 723 Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État.

Les dépenses du CAS se sont élevées à 392,46 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 522,03 millions d’euros en crédits de paiement (CP). Les AE et CP ont suivi une trajectoire inverse :

– la consommation d’AE est inférieure à la prévision en loi de finances initiale (91,7 %) ainsi qu’à l’exécution 2019 (– 34,4 %) ;

– l’exécution des CP est au-dessus de la prévision pour 2020 (116,8 %) et du réalisé 2019 (+ 35,3 %).

actions du programme 723

(en millions d’euros)

Action

LR 2019

LFI 2020

PLR 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

723-11

Opérations structurantes et cessions

419,56 

215,04 

268,00 

287,00 

238,06 

362,96 

723-12

Contrôles règlementaires, audits, expertises et diagnostics

23,02 

22,70 

22,00 

22,00 

24,98 

21,78 

723-13

Maintenance à la charge du propriétaire

47,92 

48,91 

45,00 

42,00 

50,58 

48,28 

723-14

Gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état

107,82 

99,17 

93,00 

96,00 

78,83 

89,01 

P723

Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État

598,31 

385,81 

428,00 

447,00 

392,46 

522,03 

Source : rapport annuel de performances.

Deux types de dépenses sont financées par le programme 723 : les opérations structurantes (action 11) et l’entretien dit « du propriétaire » (actions 12, 13 et 14).

1.   La crise sanitaire a conduit à l’interruption de projets en cours et au report de nouveaux projets

L’action 11 Opérations structurantes et cessions finance les restructurations du parc immobilier de l’État (remise à neuf, agrandissement, modifications structurelles…) mais aussi les frais préalables aux cessions de ses biens (organisation matérielle, expertises techniques, honoraires…). Ces dépenses représentent 61 % de la consommation d’AE (238,1 millions d’euros) et 70 % des CP exécutés (363 millions d’euros) de l’unique programme abondé du CAS. Elles relèvent de dépenses d’investissement (titre 5) en majorité.

L’année 2020 a été marquée par un fort ralentissement de la consommation des AE par rapport à la loi de finances initiale (– 11,2 %) mais surtout en comparaison de l’exercice 2019 (– 43,3 %).

Cette contraction résulte principalement de la pandémie de Covid-19 qui a interrompu des projets immobiliers en cours, surtout au moment du premier confinement où l’arrêt de l’activité a été la plus forte et la plus soudaine, et qui a retardé le lancement de nouvelles opérations.

À l’instar des recettes issues des cessions (cf. supra), cette diminution importante contraste avec le haut niveau d’engagement de dépenses en 2019. Cette année-là avait notamment été marquée par la consommation de 114 millions d’euros en AE pour l’acquisition de terrains à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) dans le but de construire le futur site de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

Près de la moitié des AE consommées en 2020 (116 millions d’euros) l’ont été pour le préfinancement du projet immobilier de l’office national d’études et de recherches aérospatiales (ONERA) pour le compte du ministère des armées.

La faiblesse des investissements est la conséquence directe du tarissement des cessions en 2020 puisque la charte de gestion du CAS conditionne le financement de toute nouvelle opération structurante à l’encaissement de recettes de ventes équivalentes.

Le rapporteur observe que la faiblesse des ressources du CAS l’empêche de remplir pleinement son rôle d’instrument au service de l’État-propriétaire.

En conséquence, le solde combiné des restes à payer et des AE affectées, qui correspond aux opérations en cours, s’élève à près de 70 % de la trésorerie disponible contre 62 % un an auparavant. Sur les 389,8 millions d’euros de restes à payer au 31 décembre 2020, seulement 7,5 % correspondaient à des dettes ou à des factures non parvenues, le restant étant constitué d’engagements hors bilan.

évolution des restes à payer en 2020

(en millions d’euros)

Solde au 1er janvier 2020

AE consommées

CP exécutés

Solde au 31 décembre 2020

sur AE consommées avant 2020

sur AE consommées en 2020

519,3

+ 392,5

– 374,5

– 147,5

389,8

Source : Cour des comptes (à partir des données de la direction de l’immobilier de l’État).

À l’inverse, les dépenses en crédits de paiement ont significativement augmenté par rapport à la prévision (+ 26,5 %) mais surtout en comparaison de l’année 2019 (+ 68,8 %). Cette tendance inverse n’a rien de surprenant compte tenu des délais entre l’engagement d’une dépense, sa liquidation et son paiement.

Il s’agit essentiellement de la poursuite de projets déjà engagés.

opérations engagées les plus importantes en 2020

(en millions d’euros de CP)

Opération

Coût en 2020

nouveau site de la DGSI à Saint–Ouen

113,7

projet de l’ONERA

58,6

CHU du Grand Paris–Nord

25

Total

197,3

Source : rapport annuel de performances.

2.   Les travaux d’entretien à la charge du propriétaire ont été moins touchés par la crise sanitaire

Les opérations d’entretien à la charge du « propriétaire » – dans le sens où le CAS finance des dépenses que devrait honorer un propriétaire dans le cadre d’un bail – correspondent :

– aux contrôles réglementaires, aux audits, aux expertises et aux diagnostics (action 12) ;

– à la maintenance préventive (action 13) ;

– au gros entretien, à la réhabilitation, à la mise en conformité et à la remise en état (action 14).

L’ensemble de ces charges ont représenté un coût de 154,4 millions d’euros en AE (39 % du programme) et de 159,03 millions d’euros en CP (30 %) en 2020.

entretien à la charge du propriétaire (somme des actions 12, 13 et 14)

(en millions d’euros)

LR 2019

LFI 2020

PLR 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

178,75 

170,77 

160,00 

160,00 

154,40 

159,06 

Source : rapport annuel de performances.

Si les actions de maintenance et de contrôles sont restées stables par rapport à 2019 et conformes aux prévisions, ce n’est pas le cas des dépenses de gros entretien.

Ces travaux, qui consistent à remédier à des situations de vétusté et d’obsolescence technique, représentent plus de la moitié des AE et CP des opérations à la charge du propriétaire.

Ils ont conduit à un niveau inférieur d’engagement de dépenses (– 15,2 % par rapport à la loi de finances initiale et – 26,9 % par rapport à 2019) de même que de consommation des crédits (– 7,3 et – 10,2 % respectivement) du fait, principalement, des retards occasionnés par la crise sanitaire.

Le rapporteur s’inquiète des retards qui ont pu être pris dans la mise en conformité et la remise en état d’un certain nombre de biens immobiliers qui sont marqués par leur vétusté et leur obsolescence, alors qu’il est impératif de valoriser davantage le patrimoine immobilier de l’État afin de diversifier les ressources du CAS.


II.   la crise sanitaire confirme la fragilitÉ structurelle du CAS

La contraction des recettes issues des ventes de biens immobiliers couplée au maintien d’un haut niveau de dépenses engagées avant le début de la crise sanitaire rappelle que le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État est trop dépendant du rythme des cessions.

Conçu comme l’instrument budgétaire au service de l’État–propriétaire, le CAS n’occupe pourtant qu’une place marginale dans la politique immobilière de l’État. En l’absence de diversification de ses ressources, il ne dispose que de peu de moyens pour jouer pleinement ce rôle.

Cette fragilité interroge donc la place du CAS voire sa pérennité.

A.   le CAS continue À ne jouer qu’un rÔle mineur dans la politique immobiliÈre de l’État

Le CAS a en principe vocation à mutualiser les recettes issues de la vente d’actifs immobiliers dont l’État est propriétaire. La récolte de ces produits doit permettre de financer des opérations structurantes pour le compte des différents services de l’État ou de leurs opérateurs.

L’État et ses opérateurs occupent un parc immobilier d’environ 97 millions de mètres carrés (m²) de surface utile brute (SUB) ([10]). Cinq régions concentrent la moitié de cette surface : Île–de–France (21 %), Grand–Est (10 %), Auvergne–Rhône–Alpes (9 %), Provence–Alpes–Côte–d’Azur (9 %) et Nouvelle–Aquitaine (9 %).

Près de la moitié de ce parc est occupé par les services du ministère des armées (26 %) et par ceux du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports et du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (21 %).

Répartition des surfaces de biens immobiliers de l’état par occupant

Source : document de politique transversale annexé au projet de loi de finances pour 2021.

L’État est propriétaire de 75 % de ces surfaces.

La politique immobilière de l’État demeure éclatée entre 60 programmes ([11]) qui relèvent des différents ministères. Ces ministères disposent d’un « droit de tirage » pour faire financer, par le CAS, les opérations structurantes dont elles ont besoin mais également une partie de l’entretien à la charge du « propriétaire » (cf. supra).

Concrètement, le responsable du programme 723 Opérations immobilières de l’État, unique programme abondé du CAS, met des crédits à disposition de 12 budgets opérationnels de programme (BOP) centraux – correspondant aux ministères –, 2 BOP centraux mutualisés ainsi que 24 BOP déconcentrés au niveau régional.

répartition par boP des crédits mis à disposition

(en millions d’euros)

BOP

Consommation 2020

AE

CP

BOP centraux

286

429

dont ministère des armées

132

148

dont ministère de l’intérieur

11

121

dont ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation

39

39

BOP régionaux

106

93

dont Île–de–France

24

20

Source : rapport annuel de performances

Le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État n’ouvre qu’environ 10 % des autorisations d’engagement au titre des charges de propriétaire de l’ensemble de la politique immobilière de l’État (11,3 % en 2019 et 9,3 % en 2020) ([12]).

Outre le financement de ces dépenses par les programmes supports des différentes administrations de l’État, le caractère marginal du rôle du CAS est accru par la fonction remplie par le programme 348 Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi–occupants de la mission Transformation et fonction publiques créé par la loi de finances pour 2018. Ce programme a représenté 166 millions d’euros en AE et 35 millions d’euros en CP en 2020.

Comme le programme du CAS, il est placé sous la responsabilité de la direction de l’immobilier de l’État (DIE) et a pour objectif le financement interministériel de la rénovation des sites occupés par plusieurs administrations. Doté d’un milliard d’euros sur cinq ans, il doit contribuer à la réalisation de deux priorités du grand plan d’investissement (GPI) : accélérer les transitions écologique et numérique.

actions du programme 348 Rénovation des cités administratives

Action

LR 2019

LFI 2020

PLR 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

348–11

Études

11,01

7,59

19,00

57,00

10,21

7,14

348–12

Travaux et gros entretien à la charge du propriétaire

82,02

3,89

37,00

72,00

57,86

14,43

348–13

Acquisitions, construction

0,44

0,41

24,00

39,00

97,64

13,39

P348

Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi–occupants

93,46

11,89

80,00

168,00

165,71

34,95

Le rapporteur observe que le programme 348 fait double emploi avec le programme 723 du CAS dans la mesure où il est également amené à supporter les dépenses liées à des opérations structurantes ainsi qu’à l’entretien du propriétaire.

Il estime que le CAS devrait être l’unique instrument interministériel de gestion mutualisée du patrimoine immobilier de l’État.

Le rapporteur spécial de la mission Transformation et fonction publiques, M. Alexandre Holroyd, recommande d’ailleurs d’entamer une réflexion sur la possibilité de transférer les crédits du programme 348 vers le CAS.

Recommandation n° 1 : faire du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État le support budgétaire de l’ensemble des politiques transversales ayant trait au parc immobilier de l’État et de ses opérateurs.

Ce constat de marginalisation du CAS est également renforcé par le financement de l’enveloppe de 2,7 milliards d’euros consacrée à la rénovation énergétique des bâtiments publics de l’État par le programme 362 Écologie de la mission Plan de relance en 2021.

Le contrôle de la sélection des projets financés, auquel le rapporteur a consacré ses travaux d’évaluation, fait d’ailleurs l’objet de la seconde partie du présent rapport.

B.   les ressources du CAS doivent Être diversifiÉes pour garantir ses moyens sur le long terme

Toute l’architecture budgétaire du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État repose sur les produits des cessions. La crise sanitaire a été particulièrement révélatrice à ce sujet : la faiblesse des recettes due à la suspension des ventes de biens immobiliers pendant les périodes de confinement a conduit à la mobilisation de la trésorerie pour assurer le financement des différentes opérations supportées par le programme 723 Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État.

C’est pourquoi le rapporteur appelle à sortir de l’impasse du « tout–cession » pratiquée depuis plusieurs années en diversifiant les ressources du CAS. Cette diversification doit passer par de nouveaux modes de valorisation du patrimoine immobilier de l’État.

Cette recherche est d’autant plus impérative qu’une raréfaction des biens attractifs se manifeste. La direction de l’immobilier de l’État (DIE) considère ainsi que plus des trois quarts des 1 870 biens déclarés inutiles et remis au domaine sont « difficiles » ou « très difficiles » à céder selon sa cotation.

En conséquence, un tarissement des cessions et donc une réduction continue des ressources sont à craindre pour les années à venir.

Dès lors, la valorisation de ces actifs impliquerait un important programme de réhabilitation et de remise en état. Or la faiblesse des ressources du CAS ne lui permet pas de mener à bien un tel chantier, ce qui encourage un peu plus sa marginalisation par rapport aux programmes supports des différents ministères et au programme 348 dédié à la rénovation des sites multi–occupants.

Le rapporteur estime que ce « cercle vicieux » montre l’épuisement de la logique de fonctionnement du CAS.

Cette situation nuit d’ailleurs à la progression de la performance. Les deux indicateurs présentés dans les documents budgétaires annexés aux lois de finances témoignent d’une certaine stagnation, voire dégradation en raison de la crise sanitaire.

 

C’est notamment le cas :

– du rendement d’occupation des surfaces qui passe de 14,4 mètres carrés (m²) de surface utile nette (SUN) par poste de travail en 2019 à 15,73 m² en 2020 ;

– de la proportion de surfaces de bureaux inoccupés remis à la DIE depuis trois ans par rapport à l’ensemble des bureaux remis qui atteint 46,26 % en 2020 contre 34,87 % un an auparavant.

rendement d’occupation des surfaces

(en m² de SUN par poste)

Réalisation 2018

Réalisation 2019

Réalisation 2020

Cible 2022

14,63

14,4

15,73

13,4

Source : rapport annuel de performances.

part des surfaces de bureaux remis au domaine inoccupés depuis trois ans

(en pourcentage de m²)

Réalisation 2018

Réalisation 2019

Réalisation 2020

Cible 2022

23

34,87

46,26

20

Source : rapport annuel de performances.

En octobre 2018, le deuxième comité interministériel de la transformation publique (CITP) s’est penché sur la question de l’amélioration du cadre de travail des administrations et de la gestion du parc immobilier de l’État. Il a constaté que le « modèle d’une valorisation du parc par la seule cession s’est essoufflé et n’est pas soutenable » ([13]). Le CITP en est arrivé à la conclusion qu’une des priorités serait de diversifier les moyens permettant la valorisation du patrimoine de l’État, notamment par le biais de l’occupation temporaire ou de la mise en location.

En 2020, deux hôtels particuliers ([14]) ont fait l’objet d’un appel d’offres pour la signature d’un bail emphytéotique au lieu d’être mis en vente.

Lors de son audition par les membres de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, réunis en commission d’évaluation des politiques publiques (CEPP) le 1er juin 2021, le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics a confirmé que le Gouvernement travaille actuellement sur des pistes de valorisation alternative à la cession.

Le rapporteur salue cet effort et appelle à poursuivre cette voie.

Recommandation n° 2 : poursuivre le développement de modes alternatifs de valorisation du patrimoine immobilier de l’État afin de diversifier les ressources du CAS.


— 1 —

   SECONDe partie – thÈme d’Évaluation :
le contrÔle de la sÉlection des projets et de l’efficience de la dÉpense dans la mise en œuvre du volet « rÉnovation thermique des bÂtiments publics » du plan de relance

Les appels à projet pour la rénovation énergétique des bâtiments publics de l’État dans le cadre de France Relance sont un enjeu majeur pour le patrimoine immobilier de l’État. L’amélioration de la performance en matière d’énergie des biens qui le constituent devrait avoir un impact sur l’équilibre financier du compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État à moyen et long termes.

Celle–ci pourrait diminuer les besoins de financement en matière d’opérations supportées par le CAS tout en accroissant la valeur des biens cédés et donc des recettes du compte. C’est pourquoi le rapporteur a souhaité évaluer le contrôle de la sélection des projets et de l’efficience de la dépense dans la mise en œuvre du Plan de relance concernant ce volet.

Le rapporteur a notamment voulu connaître les critères d’examen des dossiers et étudier la pertinence de ces investissements dans un horizon d’une cinquantaine d’années.

I.   la rÉnovation ÉnergÉtique des bÂtiments publics est un enjeu du programme Écologie du plan de relance

Dans le cadre de France Relance, deux appels à projet ont été lancés en septembre 2020 pour la rénovation énergétique des bâtiments publics de l’État. L’un concernait les administrations centrales et déconcentrées hors enseignement supérieur et l’autre était destiné aux universités au sens large.

Trois mois après leur lancement, 4 214 projets d’un montant total de 2,7 milliards d’euros ont été retenus.

A.   Les enjeux de la rÉnovation ÉnergÉtique pour la politique immobiliÈre de l’État

Le parc immobilier de l’État représente près de 100 millions de mètres carrés ([15]). À lui seul, il compte pour un quart des émissions de gaz à effet de serre en France en raison de la consommation de ses bâtiments en énergie.

1.   La rénovation énergétique est un impératif urgent pour les bâtiments de l’État

La rénovation thermique des bâtiments publics constitue donc un enjeu de taille pour l’environnement, en réduisant leur empreinte énergétique, mais aussi pour les usagers des services publics et les agents des administrations en ce qu’elle permet une modernisation des lieux de vie collectifs et des espaces de travail.

Un tiers du patrimoine immobilier de l’État relève des établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche (ESR), d’où la démarche d’un appel à projet propre à ces derniers (cf. infra). Celui–ci rejoint l’objectif porté par le plan d’efficacité énergétique des campus pour 2030 (PEEC 2030) élaboré par un groupe de travail de la conférence des présidents d’université (CPU) à partir de 2016 et lancé en 2019. Ce programme tire les conséquences d’un patrimoine vieillissant et de plus en plus inadapté dans un contexte de dépenses d’énergie en hausse, dopées par les nouveaux usages numériques.

De manière générale, la réduction de l’empreinte énergétique des bâtiments publics est une obligation posée par le décret du 13 juillet 2019 ([16]) pris en application de la loi ELAN du 23 novembre 2018 ([17]). Elle implique de diminuer de 60 % la consommation des bâtiments de plus de 1 000 m² de surface à l’horizon de 2050 par rapport au niveau de consommation de 2010.

2.   Le plan de relance est une opportunité historique pour la transition énergétique

En application de la loi de finances pour 2021 ([18]), la mission Plan de relance consacre au total 6,3 milliards d’euros en autorisation d’engagement (AE) et 2,8 milliards d’euros en crédit de paiement (CP) pour la rénovation énergétique dans le cadre du programme 362 Écologie. Cette action concerne à la fois les bâtiments publics, les logements sociaux, les logements privés ainsi que les locaux des TPE et PME.

Les bâtiments publics bénéficient d’une enveloppe de 3,7 milliards d’euros en AE et de 1,6 milliards d’euros en CP, soit près de 58 % du montant consacré à l’action Rénovation énergétique. Sur l’ensemble des 36,4 milliards d’euros d’AE et des 22 milliards d’euros de CP du Plan de relance, elle représente respectivement environ 10 et 7 %, montant qui témoigne de l’ambition inédite d’assurer la transition énergétique des bâtiments publics.

part de la rénovation énergétique des bâtiments publics dans le plan de relance

(en milliards d’euros)

Source : projet annuel de performances de la mission Plan de relance pour 2021.

Le rapporteur entend souligner le caractère historique de cette opportunité, pour l’État, d’investir dans la performance énergétique de son immense patrimoine immobilier.

Cet objectif majeur du Plan de relance sera mesuré par un indicateur de performance estimant les économies d’énergie réalisées. Ces gains devraient être de deux types : économies réalisées sur la facture énergétique des projets sélectionnés (isolation, chauffage et ventilation, éclairage, etc.) et suppression de factures énergétiques (libération de biens locatifs et domaniaux).

Aucune prévision n’avait été fixée pour 2021 ([19]) dans l’attente de la fin des appels à projet. Il ressort de la conclusion de ces derniers que la réduction de la consommation d’énergie à la fin des travaux (2023–2024) devrait s’élever à 400 millions de kilowattheure en énergie finale ([20]) (kWhef) ([21]).

Le suivi des opérations de rénovation financées par le Plan de relance, confié à la direction de l’immobilier de l’État (DIE), permettra d’actualiser cette cible et d’établir des prévisions pour cet indicateur lors des prochains projets de loi de finances.

B.   des appels À projet ambitieux menÉs dans des dÉlais très courts

À l’issue de la conférence nationale de l’immobilier public (CNIP) stratégique du 7 septembre 2020, deux appels à projet ont été lancés pour la rénovation énergétique des bâtiments publics de l’État dans le cadre du Plan de relance. Ceux des collectivités territoriales et de leurs établissements publics feront l’objet d’autres appels à projet au niveau local, financés par des dotations gérées par les préfets. Ils concernent, pour l’un, les bâtiments ESR et, pour l’autre, l’ensemble des autres biens de l’État.

1.   Un processus de sélection particulièrement rapide

La sélection des dossiers s’est déroulée en trois grandes étapes d’environ un mois chacune entre septembre et décembre 2020 :

– du 7 septembre au 9 octobre 2020 : dépôt des candidatures par les porteurs de projet auprès des rectorats des régions académiques, pour les projets ESR, et des missions régionales de la politique immobilière de l’État (MRPIE), pour les projets hors ESR ;

– du 9 octobre au 10 novembre 2020 : instruction des dossiers inférieurs à 5 millions d’euros (8 millions en Île–de–France) au niveau régional par les MRPIE et les services déconcentrés du ministère de la transition écologique (MTE) et des dossiers supérieurs à ces seuils au niveau national par la DIE et le MTE ;

– du 10 novembre au 14 décembre 2020 : classement des listes régionales de projets et sélection finale en CNIP stratégique présidée par le Premier ministre.

Le rapporteur note le caractère particulièrement rapide des délais dans lesquels ont été menés des appels à projet aussi ambitieux, eu égard aux enjeux de rénovation énergétique à l’horizon de 2050.

Plus de 6 000 candidatures ont été déposées pour bénéficier des financements du Plan de relance. Elles représentaient un montant total d’environ 7,8 milliards d’euros (dont 3,6 pour les bâtiments universitaires et 4,2 pour l’immobilier hors ESR).

2.   Une enveloppe conséquente pour une multitude de projets facilement réalisables

À l’issue de ces deux appels à projet, 4 214 dossiers ont été sélectionnés pour un montant total de 2,7 milliards d’euros. Les dossiers portés par les établissements ESR représentent le quart du total en volume (1 054 projets) mais près de la moitié en valeur (1,3 milliard d’euros) ([22]). Les bâtiments relevant du ministère de l’intérieur et du ministère des armées regroupent plus de la moitié des projets hors ESR, ce qui est logique compte tenu de l’emprise de ces deux départements ministériels dans l’ensemble du patrimoine immobilier de l’État.

projets sélectionnés par occupant du parc immobilir de l’État

Occupant

Projets sélectionnés

Surface occupée dans le parc immobilier de l'État

Nombre

Coût

En valeur absolue

En pourcentage du total

En millions d'euros

En pourcentage du total

en milliers de mètres carrés de surface utile brute

En pourcentage du total

Enseignement supérieur

961

23

1 214

45

19 582

20

Intérieur

1 194

28

354

13

14 437

15

Multi–occupants

120

3

290

11

4 763

5

Armées

701

17

201

7

25 315

26

Transition écologique

359

9

183

7

4 177

4

Économie et finances

299

7

130

5

4 418

5

Justice

210

5

114

4

4 410

5

Affaires sociales

169

4

92

3

3 567

4

Culture

43

1

77

3

2 900

3

Agriculture

78

2

23

1

1 287

1

Éducation nationale

70

2

21

1

1 078

1

Services du Premier ministre

9

0

2

0

763

1

Affaires étrangères ([23])

1

0

2 103

2

Biens remis au domaine

1 289

1

Autre

6 705

7

Total

4 214

100

2 700

100

96 794

100

Source : commission des finances à partir des données de la direction de l’immobilier de l’État et du document de politique transversale Politique immobilière de l’État.

Plus de la moitié des projets ont un coût unitaire estimé à moins de 100 000 euros tandis que 2,5 % s’élèvent à plus de 5 millions d’euros. Ces derniers représentent ainsi plus de la moitié de l’enveloppe avec 1,39 milliard d’euros.

Les opérations de rénovation globale ou de réhabilitation lourde concernent 112 projets pour un montant global de 600 millions d’euros. Les autres projets relèvent, pour la plupart, d’actions dites « à gains rapides » (renouvellement des éclairages, amélioration de l’isolation, changement d’équipements de chauffage, de climatisation et de ventilation). Le renouvellement des éclairages représente, à lui seul, 945 projets et 425 millions d’euros.

Si le rapporteur salue cet effort sans précédent d’amélioration globale des performances énergétiques des bâtiments publics de l’État, il constate que la priorité a manifestement été donnée à une multitude de projets rapidement réalisables plutôt qu’à des opérations d’ampleur et de long terme.

II.   un effort bienvenu mais insuffisant au regard des enjeux et des perspectives de long terme

Les appels à projet ont entendu accélérer la transition énergétique tout en privilégiant une capacité rapide de mise en œuvre afin de favoriser les économies locales et le secteur du bâtiment, particulièrement touchées par la crise sanitaire.

Le Gouvernement met en avant le fait que les projets de moins de 5 millions d’euros – qui représentent la grande majorité des dossiers en volume – vont favoriser les artisans et les petites et moyennes entreprises. Il estime que la mise en œuvre de ce volet du Plan de relance permettra la création de 20 000 emplois d’ici 2023.

A.   des projets sÉlectionnÉs en fonction de la rapiditÉ et de la facilitÉ de rÉalisation

Lors de la deuxième phase des appels à projet (cf. supra), les dossiers candidats ont été analysés à partir de deux critères principaux de poids équivalent : la capacité de mettre en œuvre rapidement le projet et le gain en performance énergétique que celui–ci permettrait.

1.   Les critères de sélection n’ont pas cherché à favoriser des projets d’envergure et de long terme

Pour chacun des projets, ces critères ont donné lieu à une note sur 20. Préalablement à cette cotation, les dossiers qui affichaient un calendrier d’engagement des marchés de travaux au–delà du 31 décembre 2021 ont été écartés. De même, les bâtiments concernés qui ne faisaient pas partie de la catégorie « biens à conserver » dans les schémas directeurs immobiliers ([24]) ont été retirés.

La capacité du porteur de projet à mettre en œuvre rapidement celui–ci a été examinée au regard de deux sous–critères :

– la maturité et le calendrier, c’est–à–dire la garantie d’engager l’opération au plus tard au 31 décembre 2021 et de la terminer au plus tard au 31 décembre 2023 (31 décembre 2024 pour les plus complexes) ;

– la robustesse de l’équipe projet pour mener l’opération dans un délai contraint, qui réside dans la gouvernance de la maîtrise d’ouvrage.

Quant au critère de la performance environnementale globale du projet, il a été analysé à l’aide de trois indicateurs :

– le gain énergétique du projet, afin d’apprécier l’écart entre la consommation actuelle et celle estimée après les travaux ;

– le gain environnemental, au sens strict, du projet, dans le but de vérifier le recours aux énergies renouvelables, l’utilisation de matériaux à faible empreinte environnementale ([25]) ou issus du recyclage et du réemploi ([26]), l’action en faveur de la préservation de la biodiversité ou encore la gestion et la traçabilité des déchets produits pour les rénovations ;

– l’efficience énergétique, mesurant le coût de revient du kWhef économisé par rapport au coût de l’investissement de départ.

2.   Le plan de relance aura finalement servi de support budgétaire pour des projets difficiles à financer sur les crédits des programmes ministériels

Les porteurs de projet que sont les administrations centrales et déconcentrées, les opérateurs ainsi que les établissements ESR ont souhaité faire financer des opérations de rénovation « intermédiaires » dont le coût était trop important pour être pris en charge sur les crédits des différents programmes budgétaires et trop faible pour être financé sur ceux du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État.

Le rapporteur constate que les critères de sélection des projets ont reposé sur une logique de court terme, tant dans la réalisation des travaux que dans l’obtention de résultats.

L’objectif de relancer l’économie, notamment le tissu entrepreneurial local, et d’obtenir des gains rapides sur la facture énergétique dans le cadre d’appels à projet menés en seulement trois mois ont eu pour conséquence de faire financer par les crédits du Plan de relance des opérations de rénovation « en réserve » qui auraient également pu être pris en charge par les programmes dont sont responsables leurs ministères respectifs.

Le rapporteur recommande d’engager la transition énergétique des bâtiments publics dans une optique de long terme qui s’inscrirait également dans le cadre plus général de la valorisation et de la modernisation des biens immobiliers de l’État.

Recommandation n° 3 : améliorer la performance énergétique des bâtiments de l’État pour les cinquante prochaines années.

L’ambition de ce volet du Plan de relance demeure en deçà des besoins pour assurer cette transition. À titre d’exemple, la CPU estime à environ 7 milliards d’euros les besoins de financement pour la rénovation de l’ensemble du parc immobilier universitaire.

B.   une demande bienvenue en soutien du tissu Économique local qui pose nÉanmoins des questions sur la capacitÉ des acteurs À y rÉpondre

Il convient de rappeler que l’objectif premier du Plan de relance demeure le redémarrage de l’économie sur tout le territoire. En conséquence, le volet « rénovation énergétique des bâtiments publics » du programme Écologie s’inscrit également dans cette optique.

1.   Les projets de rénovation énergétique de bâtiments publics entendent relancer l’économie locale

La rapidité de la mise en œuvre a donc été privilégiée afin de soutenir le tissu économique local (artisans, TPE et PME), notamment dans le secteur du bâtiment. C’est pourquoi environ 2 800 projets coûtant moins de 100 000 euros chacun ont été privilégiés dans les classements réalisés au niveau régional. Ils permettraient de soutenir sans délai le carnet de commande des entrepreneurs locaux.

répartition du coût des projets par région de la métropole

(en millions d’euros : M€)

NB – Corse : 11,3 M€

Source : direction de l’immobilier de l’État

La mobilisation par le Gouvernement d’un ensemble de leviers afin de favoriser le rebond de l’activité et de l’emploi dans le secteur du bâtiment et des travaux publics peut laisser craindre un risque de surchauffe après plusieurs mois de mesures restrictives liées à la pandémie.

La rénovation énergétique des bâtiments publics ne constitue en effet qu’un volet parmi d’autres du Plan de relance. Les logements sociaux et les bâtiments privés (des particuliers et des entreprises) font également l’objet de mesure visant à assurer leur performance environnementale, à l’instar du dispositif MaPrimeRénov’, aide à la rénovation énergétique calculée en fonction des revenus et du gain écologique des travaux. S’ajoutent à ces dispositifs l’aide à la relance de la construction durable et le crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des locaux des TPE et PME.

Le rapporteur s’interroge sur la capacité des entreprises à répondre rapidement à la demande adressée pour la rénovation des bâtiments publics dans un contexte de crise sanitaire qui perdure.

2.   Une forte demande qui risque de ne pas pouvoir être honorée dans les délais et les prix fixés

Ainsi, le décalage entre l’offre et la demande pourrait éventuellement renchérir le coût estimé des projets sélectionnés ou occasionner des retards selon la théorie économique qui veut que l’ajustement est réalisé par les prix ou par les quantités.

En conséquence, le rapporteur recommande d’être vigilant quant aux risques de dérapages budgétaires et de retards de livraison.

Recommandation n° 4 : prévenir les risques de dépassement des délais et des coûts pour la réalisation des projets de rénovation énergétique sélectionnés dans le cadre du Plan de relance.

Le suivi et le contrôle des opérations de rénovation sélectionnées s’effectueront selon un angle à la fois technique et budgétaire.

La DIE a mis en place un outil informatique chargé de suivre l’exécution des opérations auquel chaque porteur de projet doit se connecter une fois par mois pour entrer des données sur l’état d’avancement. Il permet d’émettre des alertes automatisées en cas de risques et d’extraire des données en temps réel.

En outre, les projets les plus complexes ou qui présentent une sensibilité particulière font l’objet d’un suivi renforcé. Ce suivi concerne 370 opérations pour un montant global de 1,55 milliard d’euros.

Celui–ci se traduit par des échanges très réguliers avec les porteurs de projet pour vérifier la bonne trajectoire de l’opération. Selon la DIE, il permet d’identifier le plus en amont possible les risques éventuels liés à l’opération ainsi que les mesures susceptibles de les limiter.

Le principal risque identifié concerne la tenue du calendrier. Les retards pris sur les phases d’études (diagnostics et programmation) et le manque d’anticipation des assistances nécessaires à la passation et la préparation des marchés peuvent laisser craindre des dépassements de délais.

Cette inquiétude a conduit à des demandes d’assistances techniques tardives pour finaliser les programmes ou bien à la réorientation de projets en maîtrise d’ouvrage publique – qui ne peuvent être menés à bien d’ici fin 2021 – vers des marchés publics globaux permettant d’envisager une signature avant le 31 décembre.

Face aux risques de dérapage budgétaire, il a été demandé à tous les porteurs de projets de prévoir une enveloppe « aléa et révision des prix » dans leur budget. Les délais particulièrement contraints pour constituer les dossiers de candidatures à l’automne 2020 ont conduit à des estimations établies sur des ratios de coût particulièrement larges.

Le rapporteur recommande le report des économies réalisées sur les projets en deçà de l’estimation maximale vers ceux plus coûteux que prévus.

Recommandation n° 5 : allouer les économies éventuellement réalisées sur les projets moins coûteux que prévus vers ceux nécessitant des financements supplémentaires.

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION 

Lors de sa réunion du mardi 1er juin 2021, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial des crédits de la mission Gestion du patrimoine immobilier de l’État.

 

Le compte rendu et la vidéo de cette réunion sont disponibles sur le portail dédié de l’Assemblée nationale.

 

 

 

 

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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Direction de l’immobilier de l’État :

– M. Alain Resplandy–Bernard, directeur ;

– Mme Agnès Teyssier–d’Orfeuil, sous–directrice de la gouvernance, du financement et des supports ;

– M. Alain Josserand, sous–directeur du financement et de l’inventaire immobilier ;

– Mme Christine Weisrock, sous–directrice de la stratégie et des expertises de l’immobilier de l’État.

 

Direction du budget :

– M. Sébastien Bakhouche, sous–directeur de la synthèse des finances publiques.

 

Conférence des présidents d’université (CPU) :

– M. Mathias Bernard, président du comité de la transition écologique et énergétique (président de l’université Clermont–Auvergne) ;

– M. Pierre Mutzenhardt, président de la commission des moyens et des personnels (président de l’université de Lorraine) ;

– M. Vincent Huault, vice–président immobilier et transition énergétique de l'université de Lorraine.

– M. Patrice Barbel, conseiller patrimoine ;

– Mme Sybille Rochas, chargée de mission moyens et personnels ;

– M. Kévin Neuville, conseiller relations institutionnelles et parlementaires.


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   SOURCES UTILISÉES

 

– projet annuel de performances de la mission Plan de relance annexé au projet de loi de finances pour 2021 ;

– document de politique transversale Politique immobilière de l’État annexé au projet de loi de finances pour 2021 ;

– rapport annuel de performances du compte d’affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l’État annexé au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes pour 2020 ;

– Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire du compte d’affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l’État en 2020 ;

– Conférence des présidents d’université, note de cadrage méthodologique pour le programme « PEEC 2030 », février 2019 ;

– appels à projets pour le financement de projets de rénovation de :


([1]) Rapport spécial n° 27 de M. Jean-Paul Mattei annexé au rapport n° 3011 fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019 par M. Laurent Saint‑Martin, rapporteur général.

([2]) Lois n° 2020-935 du 30 juillet 2020 et n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020.

([3]) Ordonnance portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de Covid-19.

([4]) Ordonnance portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de Covid-19.

([5]) Article 1er de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([6]) Article 67 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

([7]) Loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public et au renforcement des obligations de production de logement social.

([8]) Amendement n° II-143 au projet de loi de finances pour 2019 déposé par M. Jean-Paul Mattei, devenu l’article 274 de la loi promulguée.

([9]) Décret n° 2019-1460 du 26 décembre 2019 relatif au plafonnement de la décote prévue à l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

([10]) Surface horizontale située à l’intérieur des locaux.

([11]) Document de politique transversale Politique immobilière de l’État annexé au projet de loi de finances pour 2021.

([12]) Source : Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État.

([13]) Dossier de presse du 2e comité interministériel de la transformation publique, octobre 2018.

([14]) Hôtel de Mailly-Nesle et hôtel de Grenelle à Paris (7e arrondissement).

([15]) Source : direction de l’immobilier de l’État.

([16]) Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire.

([17]) Article 175 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique.

([18]) Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([19]) Projet annuel de performance de la mission Plan de relance annexé au projet de loi de finances pour 2021.

([20]) L’énergie finale désigne la quantité consommée et facturée à son point d’utilisation par opposition à l’énergie primaire produite avant transformation et acheminement qui mesure, quant à elle, la quantité de ressources naturelles prélevée.

([21]) Réponses au questionnaire.

([22]) Source : DIE

([23]) Un seul projet a été sélectionné pour le ministère de l’Europe et des affaires étrangères pour un coût de 5 000 euros. Les données étant arrondies au million d’euros, il n’apparaît pas dans le tableau.

([24]) Schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR) pour les services déconcentrés et schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) pour les administrations centrales et les opérateurs de l’État.

([25]) Matériaux bio-sourcés ou géo-sourcés comme l’isolation en béton de chanvre, l’enduit en terre crue ou encore le bardage en bois.

([26]) Exemple des isolations en ouate de cellulose ou avec du textile recyclé.