N° 4195

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 mai 2021

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (n° 4090),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

 

ANNEXE N° 40
 

 

SÉCURITÉS

 

SÉCURITÉ CIVILE

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Bruno DUVERGÉ

 

Député

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SOMMAIRE

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Page

SYNTHÈSE ET Chiffres-clés

RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

SUIVI DES RECOMMANDATIONS DES ANNÉES PRÉCÉDENTES

PREMIÈRE PARTIE : REVUE DES DÉPENSES

I. Une exÉcution supÉrieure À l’autorisation budgÉtaire votÉe en loi de finances initiale

1. Effets de la crise sanitaire sur l’exécution budgétaire

a. En raison de la crise, des crédits supplémentaires sont venus abonder le programme

b. Une légère sous-exécution des dépenses de personnel

2. Analyse des dépenses par action

a. Action 11 – Prévention et gestion des crises

b. Action 12 – Préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux

c. Action 13 – Soutien aux acteurs de la sécurité civile

d. Action 14 – Fonctionnement et soutien logistique

3. Dans le contexte sanitaire particulier à l’année 2020, un effort particulier a été consenti pour le déploiement d’outils de travail à distance. L’Agence du numérique de la sécurité civile, unique opérateur du programme

II. le dispositif de performance du programme

DEUXIÈME PARTIE   THÈME D’ÉVALUATION : L’ENTRETIEN ET LE RENOUVELLEMENT DES FLOTTES AÉRIENNES DE LA SÉCURITÉ CIVILE

I. Le renouvellement des moyens aériens de la Sécurité civile est à accélérer

A. état des lieux des moyens de la sécurité civile : un renouvellement nécessaire

1. Des moyens aériens vieillissants et une flotte d’hélicoptères déjà sousdotée

2. Une flotte fortement mise à contribution, ce qui accélère le vieillissement et conduit à l’augmentation des coûts de maintenance

a. L’activité du groupement des hélicoptères de la sécurité civile (GHSC), en augmentation depuis plus de 15 ans

b. L’utilisation des avions, corrélée au nombre de feux

c. Les opérations de maintenance, en régie pour la flotte des hélicoptères, confiées à un sous-traitant pour les avions

3. La solution intermédiaire du « rétrofitage »

a. La rénovation des avions Beechkraft

b. La modernisation de l’avionique des hélicoptères

4. Le caractère essentiel de la disponibilité des moyens aériens

B. Les récentes commandes d’appareils, un mouvement à amplifier dans le cadre des réflexions sur la composition des flottes

1. Un objectif cible de 38 hélicoptères, contre 34 hélicoptères actuellement

a. L’indispensable achat d’hélicoptères pour assurer le contrat opérationnel

b. Le plan de relance de l’industrie aéronautique

c. Les opérations envisagées à partir du PLF 2022

2. Les évolutions de la flotte d’avions de la sécurité civile à horizon 2023

a. Les commandes d’avions multi-rôle Dash-8

b. La flotte des Canadair et les commandes intégrées au programme rescUE

II. Les actions de mutualisations inter-administrations, une bonne pratique à approfondir

A. L’approfondissement des mutualisations avec les autres directions du ministère de l’intérieur

1. Renforcer la mutualisation de l’utilisation des avions Beechkraft et des Dash-8

2. Approfondir les mutualisations existantes avec la direction générale de la gendarmerie nationale

a. Le bilan très positif de la mutualisation du marché commun de soutien et de marché de maintien en conditions opérationnelles des hélicoptères à la base de Nîmes-Garons

b. Les pistes d’approfondissement de la mutualisation avec la DGGN

B. Les relations de la DGSCGC avec le ministère des armées et le ministère des solidarités et de la santé

1. La conduite des négociations des marchés de maintenance par la DMAé

2. Les structures de coopération entre la sécurité civile et les établissements de santé doivent être approfondies

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

ANNEXE 1 : COUVERTURE TERRITORIALE DU GROUPEMENT DES HÉLICOPTÈRES DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA SÉCURITÉ CIVILE ET DE LA GESTION DES CRISES

ANNEXE 2 : IMPLANTATION DES HÉLICOPTÈRES REMPLISSANT DES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC EN FRANCE


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   SYNTHÈSE ET Chiffres-clés

En 2020, les crédits du programme 161 Sécurité civile ont été exécutés à hauteur de 474,26 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 555,36 millions d’euros en crédits de paiement (CP), soit une progression respectivement de 4,73 % et 1,3 % par rapport à 2020.

La crise sanitaire a eu des conséquences importantes sur les activités de la sécurité civile en 2020, ce que reflète l’exécution du programme.

L’exécution des AE est inférieure de 3,11 % par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale, principalement en raison de retards et reports de divers marchés.

L’exécution des CP est largement supérieure au prévisionnel (+6,7 %), reflet de la hausse des dépenses d’intervention, telles les subventions exceptionnelles attribuées aux associations et organismes concourant à la mission de sécurité civile, au regard de la perte de leurs recettes habituelles.

Évolution de la consommation des crédits du programme 161

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

Ont été inscrits en lois de finances rectificatives :

– En LFR3, 32 millions d’euros en AE et 28,8 millions d’euros en CP, pour le financement de deux hélicoptères au titre du plan de soutien à l’aéronautique.

– En LFR4, 21,2 millions d’euros de crédits en AE et en CP pour les subventions exceptionnelles aux associations agréées par la sécurité civile.

*

*     *

La partie thématique du rapport porte sur l’évolution de la flotte aérienne de la sécurité civile et les actions de mutualisation mises en œuvre avec d’autres administrations. Ces moyens sont inscrits à l’action Préparation et intervention des moyens nationaux, premier poste du programme, à savoir, en 2020, 57,22 % des AE et 64 % des CP exécutés.

● L’accélération du renouvellement des moyens aériens de la sécurité civile est impérative. Essentiels aux missions de protection de la population et de gestion de crises, ils sont fortement mis à contribution dans un contexte de vieillissement de la flotte aérienne. Cela pose un triple enjeu de sécurité pour les agents, de disponibilité des appareils et de coûts importants de maintenance.

● Au-delà des contrats de maintenance mutualisés entre les administrations, sous l’égide de la direction de maintenance aéronautique (DMAé) du ministère des armés, il apparaît opportun d’approfondir les actions de mutualisation déjà commencées par la DGSCGC, en particulier avec les directions du ministère de l’intérieur intéressées par l’utilisation de ses moyens aériens (police nationale, sécurité intérieure) ou disposant d’appareils équivalents (gendarmerie nationale), ainsi que les actions de coordination de l’emploi et de la localisation des hélicoptères de la sécurité civile et des Hélismur, avec le ministère des solidarités et de la santé et les agences régionales de santé.

 


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   RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

Le rapporteur spécial estime qu’il est urgent d’investir dans le renouvellement des hélicoptères et des avions de la sécurité civile, dans le prolongement de l’acquisition de deux hélicoptères inscrits en 2020 au plan de soutien à l’industrie aéronautique.

Recommandation n° 1 : confirmer en commandes définitives les deux options sur l’acquisition de deux hélicoptères H145 supplémentaire, dans le cadre du plan de relance.

Recommandation n° 2 : mettre en place un plan d’acquisition pluriannuel pour le renouvellement de la flotte aérienne, qu’il s’agisse des hélicoptères et des avions.

Recommandation n° 3 : porter au niveau européen l’urgence des commandes d’avions Canadair de nouvelle génération CL515 financés à 90 % par des fonds européens dans le cadre du plan rescUE.

Recommandation n° 4 : approfondir les actions de mutualisation, de prestation de services et de coordination avec les autres directions du ministère de l’intérieur et avec d’autres administrations.

Recommandation n° 5 : réévaluer la dotation à la BSPP lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2022.

 


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   SUIVI DES RECOMMANDATIONS DES ANNÉES PRÉCÉDENTES

– Le rapporteur spécial se félicite que, comme il l’avait recommandé l’année dernière, un abondement de crédits ait été inscrit en loi de finances rectificative pour 2020 pour subventionner les associations agréées nationales et départementales de sécurité civile, qui ont perdu, pendant la crise sanitaire, une partie de leurs recettes habituelles, avec l’annulation des grands événements culturels et sportifs.

– Pour ce qui concerne la flotte aérienne de la sécurité civile, le rapporteur spécial se réjouit que la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) se soit dotée d’objectifs capacitaires explicites, comme il l’avait recommandé en 2020. Ces objectifs cibles lui donnent en effet une meilleure visibilité pour envisager ses investissements, qui s’inscrivent nécessairement sur le long terme.

 


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   PREMIÈRE PARTIE : REVUE DES DÉPENSES

Le programme 161 Sécurité civile porte, au sein de la mission Sécurités, l’ensemble des crédits des politiques du ministère de l’intérieur consacrées à la protection des populations et à la gestion de crise.

Il est composé de quatre actions :

– l’action 11 Prévention et gestion de crises finance les dispositifs de prévention, d’alerte, de mobilisation opérationnelle et de solidarité nationale en cas de crise ;

– l’action 12 Préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux finance l’acquisition, l’entretien et la mobilisation des moyens nationaux de sécurité civile : flottes d’hélicoptères et d’avions, forces militaires de la sécurité civile, équipes de démineurs ;

– l’action 13 Soutien aux acteurs de la sécurité civile finance la coordination et la formation des autres acteurs de la sécurité civile : services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) et associations de sécurité civile ;

– l’action 14 Fonctionnement, soutien et logistique finance les fonctions de soutien général du programme : services d’état-major, inspection générale de la sécurité civile, fonctions financières, juridiques et de gestion des ressources humaines, dépenses informatiques et de carburant des véhicules terrestres.

Les activités de l’année 2020 de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) ont été particulièrement marquées par la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19. Mobilisée sur plusieurs fronts, la sécurité civile a notamment participé à l’évacuation de malades, à la mise en place de tests antigéniques dans les ports et aéroports français accueillant des passagers internationaux. La DGSCGC reste aujourd’hui pleinement investie dans la lutte contre l’épidémie, puisqu’elle est chargée du financement des vaccinodromes gérés par les sapeurs-pompiers.

Parallèlement, elle a assuré la continuité du service public de secours et de lutte contre les feux. Peuvent être signalées en particulier, en fin d’année 2020, les interventions réalisées après les importantes inondations provoquées par la tempête Alex.

Pour le rapporteur spécial, le vieillissement des flottes aériennes obère les capacités d’intervention de la sécurité civile. Il est urgent d’investir dans le renouvellement des aéronefs pour assurer la pérennité de l’exécution de leurs missions.

I.   Une exÉcution supÉrieure À l’autorisation budgÉtaire votÉe en loi de finances initiale

En 2020, année fortement marquée, pour la sécurité civile, par la crise sanitaire, l’exécution des crédits du programme 161 Sécurité civile s’établit à 474,26 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE), et 555,36 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

exÉcution des crÉdits de la mission pour 2020

(en millions d’euros)

 

Crédits demandés

Crédits exécutés

Écart en valeur absolue (et en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 161

493,45

520,10

474,26

555,36

– 3,11 %

+ 6,78 %

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

En comparaison avec l’année 2019, les crédits exécutés progressent de 21,88 millions d’euros en AE et de 7,05 millions d’euros en CP, à périmètre courant.

Évolution de l’exÉcution des crÉdits de la mission au cours des trois derniÈres annÉes à périmètre courant ([1])

(en millions d’euros)

 

Crédits exécutés en 2018

Crédits exécutés en 2019

Crédits exécutés en 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 161

768,5

452,4

452,38

548,31

474,26

555,36

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

Évolution de la consommation des crÉdits du programme 161

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

La consommation des crédits en AE est légèrement inférieure à la prévision de la loi de finances initiale, dans la mesure où 96,11 % des crédits ont été consommés, tandis que la consommation des crédits en CP est supérieure aux CP ouverts en loi de finances initiale à hauteur de 6,78 % (y compris fonds de concours et attribution de produits).

Toutes les actions du programme présentent une consommation en crédits de paiement supérieure aux crédits votés en LFI, reflet de l’impact de la crise sanitaire : les dépenses supplémentaires se sont avérées plus importantes que les économies liées au recul des interventions pendant le confinement.

Comme tous les ans, des ressources extrabudgétaires (fonds de concours et attributions de produits) sont venues abonder le programme 161. Elles sont présentées ci-après.

Ressources extrabudgÉtaires du programme 161 en 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Nature des dépenses

Ouvertes en 2019

Prévues en LFI pour 2020

Ouvertes en 2020

Ouverts en 2019

Prévus en LFI pour 2020

Ouverts pour 2020

Dépenses de personnel

0,25

0

0,085

0,25

 

0,085

Autres natures de dépenses

18,62

2,05

2,37

18,62

2,05

2,37

Total

18,87

2,05

2,46

18,87

2,05

2,46

Source : rapport annuel de performances 2020.

En 2020, ces ressources ont été estimées à 2,46 millions d’euros pour un résultat identique, soit 2,46 millions d’euros en 2020. Le transfert du volet numérique de l’INPT ([2]) au programme 216 a eu pour conséquence une nette diminution du montant des fonds de concours perçus par rapport à 2019. La variation des attributions de produits s’explique quant à elle par la baisse des prestations réalisées par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) du fait de la crise sanitaire.

Par ailleurs, le programme comprend deux dépenses fiscales :

– l’exonération des vacations horaires et des avantages retraite servis aux sapeurs-pompiers volontaires, dont le coût en 2020 est, à l’instar de 2019, de 64 millions d’euros, contre 56 millions d’euros d’après les estimations initiales pour 2020 ;

– l’exonération de droits de mutation à titre gratuit des successions des sapeurs-pompiers décédés en opération de secours, dont le coût n’est pas précisé.

Le programme 161 Sécurité civile a également bénéficié en 2020 d’un dégel partiel de la réserve de crédits hors T2, à hauteur de 7,3 millions d’euros de CP, afin de compenser l’arrêt de l’utilisation des avions Tracker – location d’hélicoptères –, la facture plus importante que prévu des maintiens en condition opérationnelle (MCO) des hélicoptères, la décision modificative votée en conseil de Paris abondant le budget de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) et la projection en Guyane de l’Élément de Sécurité Civile Rapide d’Intervention Médicale (Escrim), l’hôpital de campagne projetable de la sécurité civile, dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid‑19. Comme la transaction concernant les Tracker n’a pas pu être réalisée en 2020, 3,75 millions d’euros de crédits dégelés ont été reportés en 2021, ainsi que la solde de la réserve de précaution hors T2 (3,2 millions d’euros) en vue de couvrir les dépenses liées aux inondations d’octobre 2020 dans les Alpes-Maritimes.

La crise sanitaire liée au Covid‑19, par son ampleur et sa durée, est l’événement qui a le plus marqué l’exécution budgétaire 2020. Si on peut considérer que l’exécution du programme diverge de l’autorisation budgétaire, notamment du fait d’une surconsommation des crédits de paiement, des situations variées peuvent être observées selon la nature des dépenses, expliquant ainsi les écarts constatés entre la prévision et l’exécution des crédits par actions.

1.   Effets de la crise sanitaire sur l’exécution budgétaire

a.   En raison de la crise, des crédits supplémentaires sont venus abonder le programme

La gestion budgétaire 2020 a été très affectée par la crise sanitaire. Les abondements de crédits sont retracés dans le tableau ci-après.

Gestion budgÉtaire 2020

(en millions d’euros)

 

Programme 161 Sécurité civile

AE

CP

LFI

491,40

518,05

LFR 3 et LFR 4

52,12

48,92

Autres mouvements de crédits

Reports de crédits 2019

Virements

Transferts

Décrets d’avance

82,42

77,81

- 0,38

4,98

0,00

9,38

4,78

- 0,38

4,98

0,00

Fonds de concours et attributions de produits

2,46

2,46

Total des crédits ouverts

628,39

578,81

Gel initial

Surgels

Dégels en gestion

Annulation de crédits gelés

0,00

10,40

9,47

0,93

0,00

11,47

10,54

0,93

Crédits disponibles

628,39

578,81

Crédits consommés

474,26

555,36

Source : DGSCGC.

La troisième loi de finances rectificative pour 2020 a apporté des crédits supplémentaires au programme à hauteur de 32 millions d’euros en AE et de 28,8 millions d’euros en CP, finançant l’achat de deux hélicoptères au titre du plan de soutien à l’aéronautique. Le responsable du programme a toutefois demandé un blocage technique d’une partie des CP ouverts en vue de sanctuariser le report de 12,8 millions d’euros sur l’exercice 2021.

La quatrième loi de finances rectificative pour 2020 a ouvert 21,2 millions d’euros de crédits en AE et en CP, finançant la subvention d’associations agréées par la sécurité civile (AASC).

Enfin, le décret de transfert de 4,5 millions d’euros en provenance de la mission Santé a permis de financer les tests aéroportuaires réalisés par les AASC et les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) en novembre et en décembre.

b.   Une légère sous-exécution des dépenses de personnel

La consommation du plafond d’emplois du programme 161 Sécurité civile est de 2 454,40 ETPT pour un plafond à 2 479 ETPT, soit une vacance de 24,6 ETPT. 98,99 % des emplois ont ainsi été dotés.

La DGSCGC indique n’avoir pu réaliser son schéma d’emploi prévu pour 2020, qui prévoyait le recrutement de douze personnels des moyens aériens. La crise sanitaire a en effet eu pour conséquence un décalage des périodes de formation. Le rapporteur spécial constate néanmoins que le report de ces recrutements, dont la nécessité a été très tôt identifiée, a été inscrit en loi de finances initiale (LFI) pour 2021.

La sous-exécution des crédits de titre 2, à hauteur de 3,46 millions d’euros dont 2,16 millions d’euros hors CAS Pensions, a permis de financer certaines dépenses non prévues en loi de finances initiale : versement d’une « prime Covid » aux agents de la DGSCGC ayant participé aux transports de malades ou particulièrement impliqués dans les travaux de la cellule interministérielle de crise, indemnisation des heures supplémentaires effectuées par les personnels de police du corps d’encadrement et d’application de la police nationale.

2.   Analyse des dépenses par action

Comme indiqué ci-dessus, la consommation en CP de chacune des actions du programme s’avère supérieure aux crédits votés en LFI. La situation est similaire pour les autorisations d’engagement, à l’exception de celles de l’action 12.

ExÉcution 2020 par action

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI*

Exécution

Écart

LFI*

Exécution

Écart

11 – Prévention et gestion des crises

29,25

34,76

+ 18,72 %

29,91

30,91

+ 3,34 %

12 – Préparation et intervention spécialisées des moyens nationaux

323

271,38

– 16 %

348,99

355,84

+ 2 %

13 – Soutien aux acteurs de la sécurité civile

131,53

158

+ 20 %

131,53

158,36

+ 20,4 %

14 – Fonctionnement, soutien et logistique

9,68

10,51

+ 8,57 %

9,68

10,26

+ 6 %

Total programme 161

493,45

474,26

 3,9 %

520,1

555,36

+ 6,8 %

*Prévision en loi de finances initiale, y compris fonds de concours et attribution de produits.

Source : rapport annuel de performances 2020.

a.   Action 11 – Prévention et gestion des crises

ExÉcution 2020 de l’action 11 par titre

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Titre et catégorie

Prévision LFI

Réalisation

Prévision LFI

Réalisation

Titre 2 : Dépenses de personnel

11,35

11,13

11,35

11,13

Titre 3 : Dépenses de fonctionnement

13,6

10,97

13,24

9,79

Titre 5 : Dépenses d’investissement

0,56

2

1,59

2,29

Titres 6 : Dépenses d’intervention

3,74

10,29

3,74

7,71

Total

29,25

34,38

29,91

30,91

Source : rapport annuel de performances 2020.

Une des explications à la sous-consommation des dépenses de fonctionnement est la moindre utilisation en 2020 de produits retardants – produit utilisé dans la lutte contre les feux de forêts. La consommation a été moitié moins importante qu’en 2019, passant de 1 500 tonnes en 2019 à moins de 850 tonnes en 2020. La consommation de crédits pour ce produit avait été de 4,8 millions d’euros en AE et de 5 millions d’euros en CP en 2019, contre seulement 2,62 millions d’euros en AE et en CP pour l’année 2020. En 2020, les actions contre les feux de forêt ont débuté trois semaines plus tard que l’année précédente.

La crise sanitaire a également retardé la mise en œuvre du projet d’installation du système d’alerte et d’information aux populations (SAIP), inscrit au titre des dépenses d’investissement : seulement 59 sirènes ont pu être installées en 2020, faisant passer leur nombre total à 2 052. La consommation de crédits pour ce projet avait été de 3,9 millions d’euros en AE et en CP en 2019, pour 1,79 million d’euros en AE et 2,14 millions d’euros en CP pour 2020.

La hausse des dépenses d’intervention reflète les nombreuses mises en œuvre en 2020 des colonnes de renfort, déployées contre les feux de forêts et les catastrophes climatiques (tempête Alex par exemple) : 9,16 millions d’euros en AE et 6,58 millions d’euros en CP pour 2020. Un allongement en 2020 de la saison des feux de forêts, bien que d’intensité moyenne, a été constaté. L’écart entre la prévision et l’exécution s’explique également par l’engagement de dépenses pour les « tests Covid » réalisés dans les aéroports.

b.   Action 12 – Préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux

ExÉcution 2020 de l’action 12 par titre

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Titre et catégorie

Prévision LFI

Réalisation

Prévision LFI

Réalisation

Titre 2 : Dépenses de personnel

167,64

164,4

167,64

164,4

Titre 3 : Dépenses de fonctionnement

120,86

66,65

92,15

98,29

Titre 5 : Dépenses d’investissement

34,39

40,34

89,19

93,14

Total

323

271,38

348,99

355,84

Source : rapport annuel de performances 2020.

Les dépenses de fonctionnement de l’action 12 présentent de larges sousconsommations des AE.

La loi de finances initiale prévoyait 102,5 millions d’euros en AE et 72,3 millions d’euros en CP, alors que l’exécution est finalement de 30,41 millions d’euros en AE et 63,59 millions d’euros en CP.

La raison en est principalement le retard constaté dans des projets pluriannuels aéronautiques relatifs au MCO (maintien en condition opérationnelle) des hélicoptères. Un marché, qui devait se traduire par un important engagement pluriannuel, devait être notifié en 2020 : il ne l’a été qu’en janvier 2021. 47 millions d’euros d’AE ont ainsi été reportés en 2021.

La sous-consommation des dépenses d’investissement s’explique par le retard dans la réalisation du programme de rénovation de l’avionique, du fait de la crise sanitaire et du fait de l’indisponibilité pendant une longue période d’un hélicoptère après un accident en juin 2020 dans les Pyrénées. L’exécution au titre de la modernisation et de l’équipement des aéronefs a donc été de 0,075 million d’euros en AE et de 2,92 millions d’euros en CP pour une programmation de 15 millions d’euros en AE et 5,2 millions d’euros en CP.

c.   Action 13 – Soutien aux acteurs de la sécurité civile

ExÉcution 2020 de l’action 13 par titre

(en millions d’euros)

 

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Titre et catégorie

Prévision LFI

Réalisation

Prévision LFI

Réalisation

Titre 2 : Dépenses de personnel

2,55

2,63

2,55

2,63

Titre 3 : Dépenses de fonctionnement

14,40

15,49

14,40

15,49

Titres 6 : Dépenses d’intervention

108,52

133,97

108,52

134,33

Titre 7 : Dépenses d’opérations financières

6,05

5,90

6,05

5,90

Total

131,53

158

131,53

158,4

Source : rapport annuel de performances 2020.


La large sur-consommation des AE et des CP pour les dépenses d’intervention de l’action 13 du programme 161 est due à deux facteurs :

– l’augmentation de la participation de l’État au budget de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). En loi de finances initiale, cette participation avait été fixée à 86,81 millions d’euros en AE et en CP, pour une exécution finale de 91,6 millions d’euros en AE et en CP, en raison d’une décision modificative adoptée par le conseil de Paris en juillet 2020.

L’écart de budgétisation a été couvert par redéploiement des crédits au sein du programme, et non par une réévaluation de la dotation du programme 161. Le rapporteur spécial demande à ce que le projet de loi de finances pour 2022 le prenne en compte, dans le contexte du plan décennal de modernisation de la BSPP ;

Recommandation n° 5 : réévaluer la dotation à la BSPP inscrite lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2022.

– la subvention exceptionnelle aux associations et organismes concourant à la mission de sécurité civile et le financement du fonctionnement du centre national relais 114. Le rapporteur spécial se réjouit que, comme il l’avait recommandé l’année dernière, un abondement de crédits ait été inscrit en LFR4 pour compenser une partie des pertes de recettes habituelles des associations agréées de sécurité civile nationales et départementales.

Le rapporteur spécial constate que le niveau des crédits arbitrés en 2017 pour cinq ans pour le financement des dépenses d’emploi des sapeurs-pompiers mis à disposition de la DGSCGC est désormais insuffisant, au regard notamment de l’augmentation du niveau de recrutement. Il appelle à leur réévaluation, dans un souci de sincérité budgétaire, en rappelant que les compétences techniques et opérationnelles des sapeurs-pompiers sont indispensables à la structure.

d.   Action 14 – Fonctionnement et soutien logistique

ExÉcution 2020 de l’action 14 par titre

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Titre et catégorie

Prévision LFI

Réalisation

Prévision LFI

Réalisation

Titre 2 : Dépenses de personnel

4,64

4,57

4,64

4,57

Titre 3 : Dépenses de fonctionnement

4,99

5,8

4,99

5,51

Titre 5 : Dépenses d’investissement

0,03

0,13

0,03

0,18

Titre 6 : Dépenses d’intervention

0,02

0,002

0,02

0,002

Total

323

271,38

348,99

355,84

Source : rapport annuel de performances 2020.

3.   Dans le contexte sanitaire particulier à l’année 2020, un effort particulier a été consenti pour le déploiement d’outils de travail à distance. L’Agence du numérique de la sécurité civile, unique opérateur du programme

Le programme 161 Sécurité civile est le support d’un unique opérateur, créé en 2018 : l’Agence du numérique de la sécurité civile (ANSC). Elle est notamment chargée de la mise en œuvre du projet NexSIS 18-112 et elle est financée par les services départementaux d’incendie et de secours ainsi que par l’État.

Financement de l’ANSC par l’État

(en millions d’euros)

 

Réalisation 2019

Prévision LFI 2020

Réalisation 2020

Opérateur financé et nature de la dépense

AE

CP

AE

CP

AE

CP

ANSC – Agence du numérique de la sécurité civile

6,81

6,81

7

7

6,76

6,76

Subvention pour charges de service public

3,13

3,13

3,15

3,15

3,06

3,06

Dotation en fonds propres

3,69

3,69

3,85

3,85

3,70

3,70

Source : rapport annuel de performances 2020.

L’ANSC a reçu une subvention pour charges de service public de 3,1 millions d’euros à laquelle s’est ajoutée une dotation en fonds propres d’un montant de 3,7 millions d’euros.

Les crédits du programme 161 consacrés à l’ANSC s’élèvent à 6,8 millions d’euros, représentant ainsi 42 % des recettes de l’établissement. La part de la dotation en fonds propres, majoritaire dans le financement apporté par l’État, a vocation à être réduite au profit de la subvention pour charges de service public dès l’exercice 2021.

Par ailleurs, l’ANSC dispose d’un plafond d’emplois s’élevant à 12 ETPT. Ce plafond, à l’issue de l’exercice 2020, a été exécuté à hauteur de 10 ETPT.

II.   le dispositif de performance du programme

Maquette de performance du programme 161

Objectifs

Indicateurs

1 – Assurer l’efficacité et l’efficience des dispositifs de lutte contre les feux de forêt

Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne « saison feux »

2 – Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels

Efficience des opérations de secours aux personnes en hélicoptère dans les milieux difficiles

Taux de disponibilité opérationnelle des avions d la sécurité civile

3 – Faire évoluer la cartographie des centres de déminage pour éliminer les munitions historiques et faire face à la menace terroriste

Taux d’évolution des stocks collectés de munitions anciennes

Interventions sur objets suspects dans les délais

4 – Harmoniser les moyens des services départementaux d’incendie et de secours

Taux d’adhésion des SDIS à l’infrastructure complémentaire Acropole-Antarès

Source : rapport annuel de performances 2020.

Dans l’ensemble, les résultats des indicateurs du programme sont satisfaisants.

RÉsultats des indicateurs de performance du programme 161

Indicateurs

 

Prévision PAP 2020

Réalisation 2020

Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne « saison feux »

Pourcentage des incendies ne dépassant pas 5 hectares

96,00 %

93,39 %

Nombre d’hectares brûlés en fonction de l’intensité de l’aléa climatique pendant la « saison des feux »

11 ha

7,58 ha

Efficience des opérations de secours aux personnes en hélicoptère dans les milieux difficiles

Taux de disponibilité des hélicoptères EC 145 de la sécurité civile en base

95,00 %

92,17 %

Taux de disponibilité opérationnelle des avions de la sécurité civile

 

98,00 %

94,10 %

Taux d’évolution des stocks collectés de munitions anciennes

 

- 10 %

1,94 %

Interventions sur objets suspects dans les délais

Interventions sur des objets suspects dans les délais des équipes prépositionnées (<15 minutes)

98,00 %

95,15 %

Intervention sur objets suspects dans les délais des équipes non prépositionnées (<2 heures)

97,00 %

96,90 %

Taux d’adhésion des SDIS à l’infrastructure complémentaire Acropole-Antarès

 

97,00 %

98,01 %

Source : rapport annuel de performances 2020.

Le rapporteur spécial souhaite toutefois souligner plusieurs points d’attention particuliers.

La disponibilité des hélicoptères de la sécurité civile est, cette année encore, légèrement en dessous de l’objectif, avec un taux de disponibilité de 92,17 % pour un objectif de 95,00 %. Les difficultés logistiques rencontrées par l’entreprise Airbus Helicopters, titulaire du marché jusqu’en janvier 2021, se sont traduites par des délais d’approvisionnement supplémentaires de certaines pièces critiques, se répercutant sur les temps de réalisation des visites périodiques.

Ces difficultés, à laquelle s’est ajouté un accident survenu dans les Pyrénées en juin 2020 qui a immobilisé un appareil, ont entraîné une diminution des appareils disponibles se répercutant, faute d’appareils en nombre suffisant, sur la fermeture de la base de Quimper en février 2020 et l’incapacité à armer deux détachements à Mende et Melun pendant toute la période estivale.

S’agissant des avions de la sécurité civile, la tenue des alertes pour la flotte de Dash‑8 a été moins bonne (91,2) en raison de nombreuses pannes engageant pour certaines des immobilisations de longue durée. Deux pannes de longue durée en mai et juin ont également dégradé la disponibilité de l’appareil B96.

L’indicateur d’évolution des stocks collectés de munitions anciennes n’a pas pu obtenir les résultats escomptés, principalement à cause de la crise sanitaire qui a obligé à fonctionner en format réduit pour respecter les mesures de confinement.


—  1  —

   DEUXIÈME PARTIE   THÈME D’ÉVALUATION :
L’ENTRETIEN ET LE RENOUVELLEMENT DES FLOTTES AÉRIENNES DE LA SÉCURITÉ CIVILE

La majorité des crédits du programme Sécurité civile est consacrée aux dépenses relatives aux moyens aériens de la sécurité civile, portés par l’action 12 Préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux. La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) dispose aujourd’hui d’une flotte aérienne composée d’hélicoptères et d’avions.

Le groupement d’hélicoptères de la Sécurité civile (GHSC) est chargé à titre principal des missions de secours d’urgence et de protection des personnes et des biens. Il participe dans ce cadre également à l’aide médicale urgente (AMU). Ses 34 hélicoptères de type EC145, surnommés « dragons », en raison de leurs couleurs rouge et jaune, sont implantés sur l’ensemble du territoire français ([3]), dans une configuration qui évolue au cours de l’année et des besoins. Leur maintenance est assurée sur la base de Nîmes‑Garons.

Le groupement d’avions de la Sécurité civile (GASC) est chargé de conduire les missions de lutte aérienne contre les feux de forêt, mais aussi d’assurer des missions de liaison, de transport de personnel ou de fret au profit du ministère de l’intérieur. La flotte d’avions, basée sur la base de la sécurité civile de Nîmes‑Garons, est composée de :

– douze avions amphibies Canadair CL415 ;

– cinq avions de ravitaillement au sol Dash-8, qui peuvent à la fois être mis en œuvre pour la lutte contre les feux de forêt et le transport de passagers ou de matériel, quantité qui sera portée à huit d’ici 2023 ;

– trois Beechcraft King 200, avions de commandement et d’investigation.

Après l’arrêt brutal de l’utilisation des avions Tracker en 2020, la DGSCGC a loué deux hélicoptères Puma bombardier d’eau en urgence. Pour 2021, la location d’un premier appareil du même type pourra être complétée par la location d’un second appareil suivant l’intensité de la saison des feux de forêt.

La DGSCGC ne décide pas seule de l’emploi de ses moyens aériens. Ces derniers sont en effet mis à disposition des préfets de zone de défense et du centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC). Les seules missions déclenchées par le GASC et le GHSC sont celles relatives à la formation et au maintien des compétences.

Ces moyens aériens ont été mobilisés une nouvelle fois en 2020 pour des missions cruciales de lutte contre les feux de forêt et d’aide aux personnes, tels le transport des patients atteints de la Covid‑19, ainsi que les interventions réalisées après les inondations dans les Alpes-Maritimes causées par la tempête Alex.

Après le rapport sur la maintenance des aéronefs de la sécurité civile rendu en 2006 par l’inspection générale de l’administration et le contrôle général des armées, le rapporteur spécial a voulu à son tour étudier la question du renouvellement et de la maintenance de la flotte aérienne de la DGSCGC, à la lumière de l’actualité récente : le plan de relance à l’industrie aéronautique a été l’occasion pour la DGSCGC de commander en 2020 deux nouveaux hélicoptères.

Pour le rapporteur spécial, le renouvellement des moyens aériens est à intensifier, dans un contexte d’utilisation accrue accélérant le vieillissement et au regard des nouveaux équipements techniques aériens (I).

Il salue les actions de mutualisations déjà en cours, notamment avec la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), et appelle à leur approfondissement (II).

I.   Le renouvellement des moyens aériens de la Sécurité civile est à accélérer

A.   état des lieux des moyens de la sécurité civile : un renouvellement nécessaire

Plusieurs facteurs, tels que l’âge des appareils et l’intensité de leur utilisation accélérant leur vieillissement, pèsent sur la bonne disponibilité des appareils, pourtant essentielle à l’accomplissement des missions dévolues à la sécurité civile.

1.   Des moyens aériens vieillissants et une flotte d’hélicoptères déjà sous‑dotée

La flotte aérienne de la DGSCGC se compose d’aéronefs acquis entre 1993 et 2011.

Vieillissement moyen de la flotte aérienne de la sécurité civile

Type

Qté

Vieillissement

moyen

Observations

Canadair

CL415

12

23 ans

1er appareil construit en 1993, dernier appareil en 2006.

Dash-8

5

19 ans

1er appareil construit en 2001, 3 MRBET réceptionnés en juillet 2019 (M75), février 2020 (M76) et mars 2021 (M77).

Beechcraft King 200

3

36 ans

1er appareil construit en 1981 et dernier appareil en 1990. Ces appareils ont été entièrement rénovés et remotorisés entre les saisons feux de forêt 2018 et 2019.

EC145

34

16 ans

1er appareil construit en 2001, dernier appareil en 2011.

Source : DGSCGC.

38 hélicoptères de type EC145 produits par Airbus Helicopters ont été acquis depuis 2001 dans le cadre de trois marchés successifs. Aujourd’hui, cette flotte est réduite à 34 appareils en raison de plusieurs accidents.

Les « dragons » ont un âge moyen de 16 ans et affichent une activité aérienne moyenne de 7 500 heures de vol.

S’agissant des avions, la DGSCGC, après un incident majeur survenu le 12 septembre 2019, a décidé d’arrêter l’utilisation de la flotte des Tracker, utilisés pour le guet aérien armé (GAAr) contre les feux de forêt (« attaque » des feux naissants, avec du produit retardant, avant l’arrivée de la flotte des Canadair), et dont l’âge moyen était de 63 ans. Après plusieurs investigations, la direction générale de l’armement (DGA) a émis le 12 février 2020 une consigne de navigabilité indiquant l’inopérabilité des Tracker, aussitôt prise en compte par le DGSCGC.

Deux hélicoptères bombardier d’eau EC 225 ont été loués en 2020 pour compenser l’arrêt de l’utilisation des Tracker et renforcer les moyens aériens de la sécurité civile dans la lutte contre les feux de forêt, l’un en France métropolitaine, l’autre en Corse. À l’heure actuelle, la location d’un hélicoptère EC 225 a été renouvelée pour la période février 2021‑mai 2021. Cette démarche s’inscrira dans la durée, un marché en appel d’offres ayant été ouvert pour les années 2021, 2022 et 2023.

Les conséquences du brutal arrêt de l’exploitation des Tracker : la location d’hélicoptères bombardier d’eau

Pour couvrir les besoins immédiats de la sécurité civile, le service de l’achat, de l’innovation et de la logistique (SAILMI) du ministère de l’intérieur a passé, en mai 2020 et pour la DGSCGC, un marché en urgence impérieuse auprès de Airtelis visant à la location d’un hélicoptère bombardier d’eau (HBE), pour renforcer les moyens aériens de la sécurité civile dans la lutte contre les feux de forêts en Corse.

Parallèlement, la DGSCGC a utilisé la possibilité offerte par un marché conclu en 2017 avec Airtelis pour obtenir la mise à disposition d’un HBE en France métropolitaine.

En février 2021, un nouveau marché a été notifié pour que la DGSCGC dispose de ce type d’hélicoptère jusqu’à la fin mai 2021.

En avril 2021, un appel d’offres portant sur deux hélicoptères HBE lourds et un hélicoptère lourd multi‑rôles HMR (hingeless main rotor) a été publié par le SAILMI pour mettre à disposition de la sécurité civile ces appareils en 2021, 2022 et 2023 d’octobre à fin juin.

Source : DGSCGC.

L’âge de la flotte conduit à s’interroger sur la question des pannes, des coûts de maintenance, et des conditions de sécurité pour les équipages et les personnes secourues. Le rapporteur spécial, interrogeant la DGSCGC sur cette question, a constaté l’extrême précision des contrôles techniques et de sécurité opérés. Pour autant, l’âge des appareils impose une vigilance supplémentaire.

2.   Une flotte fortement mise à contribution, ce qui accélère le vieillissement et conduit à l’augmentation des coûts de maintenance

a.   L’activité du groupement des hélicoptères de la sécurité civile (GHSC), en augmentation depuis plus de 15 ans

Les missions de secours accomplies par la flotte d’hélicoptères, répartie sur différentes bases sur le territoire national sont en augmentation régulière depuis plus de 15 ans, soit, comme l’indique le tableau ci-après, une progression de 70 % entre 2002 et 2018.

En 2020, le premier confinement s’est traduit par une chute générale des missions de secours d’urgence à la personne. Toutefois, lissé sur l’année, l’érosion de l’activité s’est limitée à 9,8 % par rapport à 2019 en raison d’un nombre supérieur à la moyenne d’interventions sur la période estivale et des transports de patients malades de la Covid‑19.

D’après la DGSCGC, la sécurité civile est l’autorité d’emploi dont les hélicoptères volent le plus. De ce fait, ses hélicoptères subissent un vieillissement accéléré ainsi qu’un caractère plus fréquent de la visite périodique obligatoire, réalisée toutes les 800 heures.

visites périodiques menées de 2003 à 2020

En vert : nombre de visites effectuées

En bleu : durée moyenne de la visite périodique obligatoire (en jours)

En rouge : ligne logarithmique sur l’évolution de la durée moyenne de la visite périodique obligatoire

Source : DGSCGC.

En raison de la progression des heures de vol, la DGSCGC a également indiqué au rapporteur spécial que ces visites plus fréquentes se heurtent à la capacité du centre de maintenance de Nîmes‑Garons à absorber ces activités supplémentaires, ce qui limite là aussi l’emploi des hélicoptères.

Évolution du nombre de missions réalisées par le GHSC

Années

Total missions

Dont missions de secours

2010

18 337

12 975

2011

19 487

14 809

2012

19 279

14 664

2013

19 384

15 246

2014

20 299

16 121

2015

20 538

16 459

2016

20 178

16 072

2017

20 892

16 598

2018

21 876

17 425

2019

20 535

15 839

2020

18 947

14 359

Source : direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. Par « missions » sont entendues les missions de secours mais également les missions d’entraînement, les missions de maintien de compétence au profit des équipages et des partenaires, ainsi que les autres missions de la sécurité civile (lutte contre les feux de forêts, transports d’équipes spécialisées, etc.)

b.   L’utilisation des avions, corrélée au nombre de feux

Les heures de vols des avions bombardiers d’eau, les Canadair, sont corrélées au nombre et à l’intensité des feux de forêts et feux de chaume, variables d’une saison à une autre. Au cours des douze dernières années, 2017 a été la saison à l’activité la plus importante, avec près de 5 000 heures de vol cumulées dans la lutte contre les feux, et 2018 celle à l’activité la plus basse (1 100 heures), pour une moyenne de 2 640 heures de vol par saison. À ces sorties s’ajoutent les heures de vol de maintien en condition des appareils et les heures de formation.

Heures de vols cumulées des avions de la sécurité civile

Source : DGSCGC.

Le groupement des moyens aériens constate une zone d’intervention s’étendant de plus en plus vers le nord. Les conséquences du réchauffement climatique pèseront certainement dans les prochaines années sur l’activité et la zone d’intervention de la flotte.

c.   Les opérations de maintenance, en régie pour la flotte des hélicoptères, confiées à un sous-traitant pour les avions

Les activités de maintenance présentent un caractère stratégique, non seulement en termes de sécurité des équipages, mais aussi en raison de leur impact sur la disponibilité des appareils. Plus qu’ailleurs, les opérations de maintien en condition opérationnelle (MCO) doivent être réalisées dans des temps très contraints.

● La maintenance des hélicoptères de la sécurité civile est assurée très majoritairement en régie sur la base de Nîmes‑Garons. Les visites périodiques obligatoires évoquées au paragraphe précédent, d’une durée moyenne de 100 jours, y sont effectuées. Le choix d’une maintenance en régie répond à des critères de disponibilité et à la volonté de la sécurité civile de conserver son indépendance en matière de gestion de sa flotte d’hélicoptères.

Même si la maintenance des hélicoptères est assurée en régie, certains marchés prévoient la livraison de pièces détachées, de l’assistance technique ou de prestations spécifiques, qui imposent une grande vigilance dans le suivi du marché eu égard, en cas de difficulté, aux conséquences en chaîne. Le rapporteur spécial a ainsi appris que le recul du nombre d’heures de vol des hélicoptères enregistrées en 2020 par rapport à 2019 était en partie due à des difficultés pour Airbus Helicopters, alors prestataire de la sécurité civile pour le marché de MCO de la cellule hors moteurs des hélicoptères, de réaliser certaines prestations.

Depuis février 2021, la société Icare Ineo Defense est, après Airbus Helicopters, titulaire du marché précité. Dans la mesure où tout début d’exploitation de contrat représente une période sensible, le rapporteur spécial appelle à une vigilance supplémentaire pour éviter tout impact sur la disponibilité des appareils.

 La maintenance des avions du groupement aérien de la sécurité civile est confiée depuis plusieurs années à la société Sabena Technics. Le contrat actuel a été passé en 2015 pour 7 ans avec une tranche renouvelable à compter d’août 2022 de 5 ans.

Le marché passé avec Sabena Technics porte principalement sur toutes les opérations de maintenance l’ensemble des différents types d’appareils, ainsi que les missions de préparation d’équipages. Depuis 2015, le marché comprend également la surveillance et le maintien de la navigabilité (OGMN). Des changements organisationnels ont été demandés à la société après les difficultés observées en 2019 et 2020, qui ont pesé sur disponibilité opérationnelle des avions.

Le marché en vigueur prévoit une tarification à l’heure de vol pour chaque type d’appareil, selon cinq plages de tarification. Les coûts de maintenance sont corrélés :

– à l’activité de la flotte et aux heures de vols ;

– dans une moindre mesure, en fonction de l’évolution du prix des pièces détachées. La tarification évoquée plus haut évolue en effet en fonction de variation d’indices prévus par le contrat et du coût revalorisé d’un « panier de pièces ».

Évolution des Dépenses de maintenance des avions de la SÉcurité civile

(en millions d’euros)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

39,7

39,8

36,5

39,6

40,10

46,99

35,15

41,77

39,17

46,58

Source : DGSCGC.

Pour 2014, compte tenu des reports de charge importants en 2015.

Pour 2019, ce montant intègre le remboursement par le prestataire de 50 % de l’avance (2,23 millions d’euros) qui lui a été nantie au début du marché en 2015.

Pour 2021, prévision qui intègre le paiement de la transaction relative à l’arrêt de l’exploitation des Tracker initialement prévu en 2020.

Le vieillissement des douze Canadair CL415 pose la question de la probable progression des coûts et du temps de maintenance. À ce paramètre s’ajoute la trajectoire inflationniste du prix des pièces détachées des Canadair CL415 (dont la production a été arrêtée), que le constructeur Viking est le seul à fournir.


3.   La solution intermédiaire du « rétrofitage »

Le « rétrofitage », opération qui vise à intégrer des dispositifs techniques supplémentaires, tant sur les hélicoptères que sur les avions, n’a pas pour objectif de prolonger directement la vie des appareils, mais de prendre en compte de nouveaux paramètres opérationnels ou de sécurité.

a.   La rénovation des avions Beechkraft

La rénovation avionique des Beechkraft, terminée en 2018, pour un montant de 4,35 millions d’euros, a intégré les nouvelles exigences réglementaires en matière de navigation aérienne, a amélioré les paramètres de sécurité et a corrigé certaines obsolescences des équipements de bord coûteux en maintenance.

b.   La modernisation de l’avionique des hélicoptères

La direction générale de l’armement (DGA) du ministère des armées a lancé un appel d’offres remporté en 2016 par Airbus Helicopters pour un montant total maximal de 28,46 millions d’euros, dont 2,9 millions d’euros de provision.

Cette opération de modernisation a pour but un maintien des capacités opérationnelles des hélicoptères EC145 au regard des nouvelles exigences réglementaires relatives aux instruments de vol. Ces opérations d’avionique prévoient également l’intégration de nouveaux systèmes pour la sécurité des vols.

À la fin mars 2021, dix hélicoptères en service avaient été « rétrofités ». Quatre autres hélicoptères devraient être réceptionnés à la fin de l’année 2021. Au rythme actuel de quatre à cinq appareils par an, la fin du chantier est estimée pour 2025.

Ces opérations ont lieu à l’occasion des visites périodiques. Elles génèrent un temps d’immobilisation supplémentaire de l’ordre de cinq semaines. Cette immobilisation supplémentaire représente une difficulté dans le contexte d’une flotte de la sécurité civile déjà sous‑dotée en nombre d’appareils.

4.   Le caractère essentiel de la disponibilité des moyens aériens

L’immobilisation des appareils au sol a un impact immédiat sur la capacité de la DGSCGC à remplir ses missions. La disponibilité des appareils est d’ailleurs un élément fondamental pour l’appréciation de la performance du programme : deux indicateurs de performance du programme Sécurité civile répondent à l’objectif « assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels ».

● Le taux de disponibilité des hélicoptères EC145 de la sécurité civile en base intègre la maintenance programmée réalisée sur les bases (visites intermédiaires) et la maintenance corrective. L’objectif est fixé à 95 %. Le taux de disponibilité des appareils basés était de 92,8 % en 2019 et 92,17 % en 2020.

Taux de disponibilité des hélicoptères de la sécurité civile

Unité

2018

Réalisation

2019

Réalisation

2020

Prévision

PAP 2020

2020

2020

Réalisation

2020

Cible

PAP 2020

%

94,54

92,8

95,00

92

92,17

95,00

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

Les moins bons résultats des années 2019 et 2020, que le rapporteur spécial regrette, s’expliqueraient par les facteurs suivants :

– un problème d’approvisionnement de pièces à travers le marché de MCO passé avec Airbus Heliocopters, évoqué plus haut, tant en 2019 qu’en 2020 ;

– un accident survenu en avril 2019 en Martinique, un hélicoptère percutant une ligne électrique. La remise en route de l’appareil, transportée sur la base de Nîmes-Garons, a nécessité 3 500 heures de maintenance. Cet évènement a créé par répercussion, par la mise à disposition d’un nouvel appareil en Martinique, un déficit capacitaire en métropole (mise en veille de la base de Besançon au mois de juillet, retrait d’un des deux hélicoptères de la base de Paris entre le 1er août et le 15 septembre) ;

– un accident survenu dans les Pyrénées en juin 2020, immobilisant l’hélicoptère au sol.

● Le taux de disponibilité opérationnelle des avions de la sécurité civile présente le nombre d’alertes tenues en fonction du nombre d’alertes demandées.

Les dispositions contractuelles du marché de maintien en condition opérationnelle, assuré par Sabena Technics, portent en effet des indicateurs assis sur un contrat opérationnel. Ce contrat opérationnel prévoit la tenue d’un nombre d’avions d’alerte quotidiennement et la réalisation de sorties (entraînements ou transports). Le niveau d’alerte est fixé par le COGIC, sur demandes exprimées par les centres opérationnels de zone (COZ). La planification des sorties est effectuée par la base de la sécurité civile (BSC) chaque semaine.

taux de disponibilité opérationnelle des avions de la sécurité civile

(nombre d’alertes tenues en fonction du nombre d’alertes demandées)

Unité

2018

Réalisation

2019

Réalisation

2020

Prévision

PAP 2020

2020

 

2020

Réalisation

2020

Cible

PAP 2020

%

94,2

89,83

96,00

92

94,10

98,00

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

 

taux de disponibilité opérationnelle par catégorie d’avion

 

CL415

Tracker

Dash-8

Beechkraft

2019

95,2 %

96,10 %

85,60 %

81,60 %

2020

97,4 %

91,70 %

95,20 %

Source : DGSCGC.

Les moins bonnes performances enregistrées en 2020, tous types d’avions confondus, reflètent l’organisation de visites techniques hivernales de grande ampleur ainsi que l’immobilisation d’un Beechkraft pour un chantier le dotant d’un nouveau dispositif optronique.

En 2020, la flotte des Canadair CL415 a atteint l’objectif de 96 %. La flotte des Dash-8 et des Beechkraft présente des résultats en‑dessous de l’objectif en raison d’immobilisations de longue durée et de la poursuite du chantier d’optronique.

La disponibilité des appareils du GASC a également été dégradée en 2019 En 2020, la disponibilité s’est relevée en grande partie grâce à l’absence d’importantes visites hivernales et à une activité d’intensité moyenne au regard des 15 dernières années.

Pour le rapporteur spécial, l’extrême sensibilité de la disponibilité des appareils, tant des hélicoptères que des avions, au regard de facteurs impondérables, doit alerter sur l’urgence de doter la sécurité civile de moyens supplémentaires. Les quatre hélicoptères manquants, par rapport aux capacités de 2011, font grandement défaut.

Le rapporteur spécial constate qu’il n’existe aucun indicateur sur les chances de survie des victimes prises en charge par hélicoptère de la sécurité civile, qui permettrait de mesurer la performance du dispositif de secours. Il devrait pour cela être commun à tous les acteurs du secours héliporté, c’est-à-dire la DGSCGC, la DGGN ainsi que les Hélismur du ministère des solidarités et de la santé.

B.   Les récentes commandes d’appareils, un mouvement à amplifier dans le cadre des réflexions sur la composition des flottes

1.   Un objectif cible de 38 hélicoptères, contre 34 hélicoptères actuellement

a.   L’indispensable achat d’hélicoptères pour assurer le contrat opérationnel

Les principales caractéristiques du contrat opérationnel de la sécurité civile sont les suivantes :

– armer tout au long de l’année les 23 bases pérennes avec deux détachements permanents, un détachement semi-permanent (six mois par an) et cinq détachements estivaux sans rupture ;

– intégrer toutes les 800 heures la visite périodique de chaque machine à l’atelier de maintenance sans avoir à externaliser certaines visites pour compenser l’insuffisance de machines et intégrer également les durées d’acheminement par bateau des machines en transit pour ou en retour des bases ultramarines ;

– disposer en permanence d’une à deux machines dédiées à la formation des pilotes et mécaniciens opérateurs de bord ;

– disposer en permanence de machines dédiées au maintien en compétence des équipages. Ces actions de maintien en compétence se font actuellement sur les hélicoptères dédiés aux interventions, ne permettant pas la réalisation de ces opérations dans de bonnes conditions.

L’activité aérienne du groupement d’hélicoptère de la sécurité civile a connu une croissance très marquée entre 2002 et 2018, passant de 10 000 à 17 000 missions par an. La durée moyenne des visites obligatoires est passée de 49 jours à plus de 100 jours.

Pour la DGSCGC, l’ensemble de ces paramètres amène à établir un objectif cible de 38 hélicoptères pour :

– assurer le contrat opérationnel sans aucune rupture dans l’ouverture des bases. Au cours des dernières années, le rapporteur spécial regrette que certaines bases aient dû être « mises en veille », faute de machines ;

– assurer la formation des nouveaux entrants et le maintien en compétence des équipages, dans un souci accru d’augmenter la sécurité aérienne, compte tenu des accidents graves survenus ces dernières années ;

– redonner au groupement des hélicoptères de la sécurité civile la capacité de regagner la marge de manœuvre dont il ne dispose plus actuellement pour pallier les aléas cités dans la partie précédente (retard d’acheminement de pièces, accidents ou incidents graves ou renforts nécessaires liés à une situation exceptionnelle).

Le rapporteur spécial soutient cette démarche. Il constate en effet que :

– la lecture de la carte en annexe 1 fait apparaître le caractère perfectible de la couverture de la zone maritime de la Manche et de la mer du Nord, et du besoin de rouvrir la base du Touquet ;

– les nouvelles possibilités techniques, encore en cours de validation par la DGAC pour certaines d’entre elles, imposent également un renouvellement des appareils. Les hélicoptères actuels de type EC145 ne pourront en être dotés, même au cours d’opérations de maintenance évolutive.

Pour le rapporteur spécial, l’investissement dans de nouveaux appareils devra cependant se faire dans le cadre d’une réflexion stratégique sur les missions dévolues à l’avenir à la sécurité civile. La flotte d’hélicoptères, aujourd’hui exclusivement composée d’EC145, pourrait être amenée à se diversifier, pour de nouveaux usages : la location d’un hélicoptère bombardier d’eau, depuis 2020, après l’arrêt de la flotte des avions Trackers, en est un exemple. L’intervention couplée des avions et de l’hélicoptère a montré le caractère très complémentaire des appareils.

b.   Le plan de relance de l’industrie aéronautique

En 2021, dans le cadre du plan de soutien à l’industrie aéronautique, dix hélicoptères ont été commandés pour les besoins de la DGSCG et de la DGGN (direction de la gendarmerie nationale) : il s’agit d’hélicoptères de type H145, déclinaison des anciens EC145. 32 millions d’euros en autorisations d’engagement et 28,8 millions d’euros en crédits de paiement ont été inscrits sur le programme 161 Sécurité civile à l’occasion de la troisième loi de finances rectificative pour 2020, ce dont le rapporteur spécial s’était réjoui l’année passée.

En loi de finances initiale pour 2021, les crédits correspondants ont été inscrits sur la mission Plan de relance (Action 6 Commandes militaires du programme 363 Compétitivité). Les livraisons prévues devraient intervenir en octobre et décembre 2021.

La DGSCGC a posé une option pour l’acquisition deux appareils supplémentaires, toujours dans le cadre du plan de relance. Cette option complétant une première commande, ces deux hélicoptères supplémentaires seraient acquis pour 11 millions d’euros chacun contre 16 millions d’euros pour les premiers. L’arbitrage n’a pas encore été rendu, et dépendrait de l’avancement ou non d’autres projets.

Pour le rapporteur spécial, les besoins de la DGSCGC donnent à la confirmation de ces deux options un caractère primordial.

Recommandation n° 1 : confirmer en commandes définitives les deux options sur l’acquisition de deux hélicoptères H145 supplémentaire, dans le cadre du plan de relance.

c.   Les opérations envisagées à partir du PLF 2022

Le rapporteur spécial se réjouit de la préparation d’un appel d’offres pour la poursuite du renouvellement de la flotte d’EC145, qui devrait intervenir à la fin de l’année 2021.

Coût envisagÉ du renouvellement de la flotte dans le cadre du PLF 2022

(en millions d’euros)

 

Prix unitaire

Nombre d’appareils

Total

Délais de livraison

Type H145

13,1

34

445,1

24 mois

Source : DGSCGC.

Si le renouvellement peut être inscrit en loi de finances dès le projet de loi de finances pour 2022, ce que le rapporteur spécial appelle de ses vœux, la programmation de la répartition des crédits serait la suivante :

Répartition des crédits envisagée dans le cadre
du renouvellement de la flotte

(en millions d’euros)

 

2022

2023

2024

2025

2026

2027

2028

2029

AE

445,1

0

0

0

0

0

0

0

CP

0

29,7

56,2

96,4

99,5

102,6

55,1

5,6

Source : DGSCGC.

Le coût du renouvellement de la flotte serait en partie compensé par la vente des appareils actuels de la sécurité civile. La vente des huit hélicoptères les plus âgés interviendrait lors de la première livraison de huit appareils en 2025, et il en serait de même pour les livraisons suivantes.

2.   Les évolutions de la flotte d’avions de la sécurité civile à horizon 2023

a.   Les commandes d’avions multi-rôle Dash-8

Après l’arrêt définitif et brutal de la flotte des avions Tracker au début de l’année 2020, la DGSCGC a évalué les aéronefs existants sur le marché au regard des exigences suivantes :

– conserver une capacité de lutte contre les feux de forêts. La flotte de Tracker était en effet utilisée pour l’attaque des feux naissants, avant l’arrivée de la flotte des Canadair. Cette activité de guet aérien armée (GAAr) était associée à l’emploi de produit retardant ;

– bénéficier toute l’année d’une capacité dite « multi-rôles », c’est-à-dire autorisant des utilisations variées, tel que le transport de passagers ou de fret.

Au regard de ces paramètres, la DGSCGC a mandaté la DGA pour lancer à son profit un marché d’acquisition d’avions multi-rôles plus rapides et de plus grande capacité d’emport de produit retardant que le Tracker, permettant de ne remplacer les neuf Tracker qu’à hauteur de six appareils.

La DGSCGC a indiqué au rapporteur spécial que la nature et les caractéristiques du besoin faisaient des avions de type Dash-8, déjà exploités par la DGSCGC, l’option la plus cohérente de ce marché. Il s’agit d’avions également utilisés dans l’aviation commerciale pour le transport de passagers, adaptés aux usages de la DGSCGC.

Avec une durée de vie 27 % plus longue et des coûts de maintenance significativement inférieurs, le choix de l’achat d’avions neufs a paru être le plus pertinent. Le rapporteur spécial constate que le choix d’un engagement juridique sur six avions dès la notification a permis d’obtenir une réduction des prix pour les avions neufs.

Calendrier de livraison des avions DASH-8 q 400

1er avion

Juin 2019

2e avion

Janvier 2020

3e avion

Février 2021

4e avion

Novembre 2021

5e avion

Juillet 2022

6e avion

Mai 2023

Source : DGSCGC.

Plan d’accomptage de l’acquisition des DASH-8 Q 400

(en millions d’euros)

 

 

 

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Total

Marché

CF 01.2016

AE

322,06

 

 

-0,45

 

 

321.61

CP

34,35

66,55

63,32

72,75

55,20

33,44

321,61

HE

AE

 

1,62

2,30

6,24

4,06

4,74

18,96

CP

 

1,62

2,30

6,24

4,06

4,74

18,96

Provisions

AE

 

0,00

0,03

1,00

5,00

10,00

16,03

CP

 

0,00

0,02

0,01

1,00

15,00

16,03

Total

AE

322,06

1,62

2,33

6,79

9,06

14,74

356,60

CP

34,35

64,17

65,64

79,00

60,26

53,18

356,60

Source : DGSCGC.

Le rapporteur spécial appuie le choix fait par la DGSCGC d’avoir diversifié sa flotte d’avion en intégrant les avions Dash-8, dont le caractère modulable permet une mobilisation sur d’autres missions, telles que le transport de passagers et de fret.

b.   La flotte des Canadair et les commandes intégrées au programme rescUE

Le dispositif rescEU est une réserve sur-capacitaire européenne prévue par la dernière réforme du mécanisme de protection civile de l’Union européenne, entrée en vigueur le 21 mars 2019. Il est mobilisé en dernier ressort, quand les capacités nationales sont insuffisantes pour faire face à une crise par le biais d’offres spontanées ou via la réserve européenne de protection civile,

La France s’est vue confier la tâche de préfiguration de la future flotte européenne rescEU. À ce titre, la Commission subventionne l’acquisition par la France de deux avions Canadair CL515 bombardiers d’eau amphibie, à hauteur de 90 % des coûts d’investissement et de fonctionnement, soit un investissement de 81 millions d’euros. La convention attributive de subvention a été signée au mois de décembre 2020.

La France pourrait donc voir sa flotte aérienne enrichie de ces deux avions dès 2025, évolution des appareils de type CL415 actuellement exploités. Les moyens aériens acquis seront la pleine propriété de la France, intégrés à la flotte de la sécurité civile et utilisés à des fins nationales. Ces moyens pourront être mobilisés par la Commission européenne dans le cadre du dispositif rescEU. Pour le rapporteur spécial, cette stratégie présente l’avantage de compléter une flotte déjà composée de Canadair, permettant de limiter fortement les coûts d’investissement et de formation des pilotes.

Le dispositif transitoire rescEU

Eu égard au calendrier incompressible du processus d’achat d’équipements, un dispositif transitoire a été mis en place sur la période 2019‑2021 afin de répondre à l’urgence des feux de forêts en Europe.

Depuis 2019 et jusqu’en 2021, la France, dans le cadre de ce dispositif transitoire, met à disposition de l’Union européenne un avion Dash-8, du 15 juin au 30 octobre, pour la lutte contre les feux de forêts. En contrepartie, la commission européenne prend en charge les coûts de mise en attente de cet aéronef à hauteur de 7  millions d’euros.

Composition de la flotte rescEU transitoire pour la saison des feux de forêts 2020

Croatie 2 canadairs CL415

Grèce 2 canadairs CL415

Italie 2 canadairs CL415

Espagne 2 canadairs CL415

France 1 Dash

Chypre 2 air tractors AT802

Suède 6 hélicoptères AS350 (15 mai‑30 septembre) / 2 fire‑boss

Source : DGSCGC.

Le rapporteur spécial a constaté que le constructeur Viking attend 20 commandes pour mettre en place les chaînes de fabrication de ce nouveau type d’appareil, nombre qui n’est pas encore atteint. Malgré le soutien de l’Union européenne, seule la France a fait part de son intérêt.

Le rapporteur spécial attire l’attention sur l’urgence d’une coordination européenne sur cette question pour lancer la fabrication. Cette question est d’autant plus urgente que, dans l’éventualité de défaillances techniques des appareils actuels, le Canadair CL415, de la génération précédente, n’est plus fabriqué. Or, le « marché de l’occasion » serait limité aux quelques pays qui utilisent ces avions dans la lutte contre les feux de forêt, si tant est qu’ils souhaiteraient les vendre.

Constatant que la DGSCGC présente un besoin de quatre avions supplémentaires, pour porter la flotte de douze à seize appareils, le rapporteur spécial considère que la possibilité de compléter la commande par deux appareils supplémentaires, sans aides européennes, pour un coût unitaire de 55 millions d’euros, devrait être approfondie et faire l’objet d’un plan pluriannuel.

Il souhaite également qu’une stratégie de long terme sur le renouvellement de la flotte CL415 existante soit menée. Neuf appareils sur les douze présentent actuellement un vieillissement plus prononcé. La DGSCGC, qui réfléchit à étendre les capacités de la flotte de douze à seize appareils a réalisé l’analyse financière suivante : le coût total d’acquisition s’élèverait à 660 millions d’euros, soit 612 millions d’euros après revente des anciens appareils. Le rapporteur appelle à la préparation d’un plan pluriannuel.

Recommandation n° 2 : mettre en place un plan d’acquisition pluriannuel pour le renouvellement de la flotte aérienne, qu’il s’agisse des hélicoptères et des avions.

Recommandation n° 3 : porter au niveau européen l’urgence des commandes d’avions Canadair de nouvelle génération CL515 financés à 90 % par des fonds européens dans le cadre du plan rescUE.


   II. Les actions de mutualisations inter-administrations, une bonne pratique à approfondir

Certaines administrations françaises disposent de flottes d’aéronefs comparables à celles de la sécurité civile. Le rapporteur spécial s’est interrogé sur les mutualisations envisageables et celles déjà mises en œuvre, dans la recherche d’économies d’échelle et de disponibilité des appareils accrue. Le champ de cette étude porte en particulier sur la flotte d’hélicoptères de la sécurité civile et sur les avions Dash-8 de type « multi‑rôle », c’est‑à‑dire polyvalents : leur configuration est modulable selon les interventions.

Les administrations présentant des flottes d’hélicoptères comparables sont la direction nationale de la gendarmerie nationale (DGGN), la direction générale de l’offre des soins (DGOS) du ministère de la santé et son réseau d’hélicoptères Hélismur pilotés par les établissements de santé, et la Marine nationale.

Les hélicoptères de la sécurité civile et ceux de la Marine nationale concourent tous deux aux missions de sauvetage en mer, sous l’autorité du préfet maritime de la zone, qui décide des moyens à engager en fonction des caractéristiques du secours à engager.

Au regard des spécificités des appareils de la Marine nationale, cette étude se concentre sur les partenariats et mutualisations avec la DGGN et la DGOS, et s’intéresse aux relations entretenues avec la direction de la maintenance aéronautique (DMAé) du ministère des armées.

L’implantation en France des hélicoptères concourant à des missions de service public est annexée au rapport (annexe 2).

Flotte d’hélicoptères des administrations comparables

Gendarmerie nationale

Hélicoptères Hélismur

Marine nationale

Modèle de l’appareil

Nombre d’appareils

Modèle de l’appareil

Nombre d’appareils

Modèle de l’appareil

Nombre d’appareils

AS350 « Écureuils »

26

EC135

37

NH190 « Caïman »

26

EC135

15

EC145/H 145

10

AS 565 SA « Panther »

16

EC145

15

Autres

6

SA 365 F « Dauphin Pédro »

3

 

 

 

 

AS 365 N3 « Dauphin »

2

 

 

 

 

SA 365 F « Dauphin N »

6

 

 

 

 

SA 319 B « Alouette III »

9

Nombre total d’hélicoptères

56

53

62

Source : direction générale de l’offre des soins (données pour 2020), direction générale de la gendarmerie nationale, état-major de la marine nationale.

A.   L’approfondissement des mutualisations avec les autres directions du ministère de l’intérieur

1.   Renforcer la mutualisation de l’utilisation des avions Beechkraft et des Dash-8

● Deux Beechkraft de la sécurité civile viennent d’être dotés d’une boule optronique qui permet la transmission d’images et de vidéos en temps réel. Cette compétence technique, utile dans la lutte contre les feux de forêts, pourrait être mise à profit par le ministère de l’intérieur, par exemple pour des missions de surveillance du territoire.

● La DGSCGC a indiqué déjà réaliser des prestations de services pour des opérations de transport de passagers pour différentes directions du ministère de l’intérieur, telle la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), la direction générale de la police nationale (DGPN), en utilisant les avions Dash-8. Ces appareils peuvent transporter jusqu’à 64 passagers.

Le rapporteur appelle aussi, en dehors de la saison des feux de forêts et sous réserve de l’accomplissement prioritaire de ses missions, à une réflexion sur la possibilité d’élargir ses prestations de services, dans le cadre de conventions, à d’autres ministères, et dans le cadre de la réception de trois avions supplémentaires, d’ici 2023, portant le nombre d’appareils Dash-8 à six.

Le rapporteur espère que la DGSCGC recevra une réponse favorable à sa demande d’agrément pour une nouvelle configuration de ces avions Dash-8, de manière à ce qu’ils puissent à la fois transporter des passagers en cabine tout en gardant la soute de réserve d’eau (non remplie) située sous l’avion. L’usage actuel impose de choisir entre l’une ou l’autre des configurations et de procéder au démontage et au remontage des sièges, ce qui se traduit par un temps et des coûts de préparation.

2.   Approfondir les mutualisations existantes avec la direction générale de la gendarmerie nationale

a.   Le bilan très positif de la mutualisation du marché commun de soutien et de marché de maintien en conditions opérationnelles des hélicoptères à la base de Nîmes-Garons

La DGSCGC et la DGGN mutualisent une partie de la maintenance lourde de leurs hélicoptères EC145, depuis plusieurs années, sur le site de la sécurité civile de Nîmes-Garons, avant même qu’elles ne relèvent du même ministère.

Dès 2005, le marché de maintien en condition opérationnelle (MCO) a été mutualisé. Ce marché a été renouvelé à trois reprises : en 2010 et en 2015 pour des durées de cinq ans, et au début de l’année 2021 pour une durée de sept ans. Le stock de pièces aéronautiques relatif au marché commun de MCO est également en totalité localisé et mutualisé sur la base de Nîmes‑Garons.

Le rapporteur spécial a pu constater, au cours de sa visite de la base, que cette mutualisation est un succès. Certaines fonctions techniques spécifiques, telle que la réparation de la structure des aéronefs par exemple, font l’objet régulièrement d’échanges croisés – la DGGN dispose de deux techniciens spécialisés en réparation de structure sur le site de Nîmes – tout comme certaines formations :

– la formation des mécaniciens Cellule (B1) est opérée par la DGSCGC ;

– la formation des mécaniciens Avioniques (B2) est opérée par la DGGN.

De plus, les sessions de formation organisées sur les simulateurs de vol de la sécurité civile sont accessibles aux pilotes de la DGGN.

Le rapporteur spécial constate que cette bonne pratique permet d’éviter le recours à des formations externalisées coûteuses. Il constate que les mutualisations de personnels seraient difficiles à approfondir davantage, eu égard notamment aux différences de statut entre les personnels civils de la DGSCGC et militaires de la DGGN. Les opérations techniques sur les appareils sont conduites prioritairement par les personnels des deux directions sur leurs aéronefs respectifs. Par ailleurs, le plan de charge des visites périodiques des deux forces ne laisse pas de place à des « périodes creuses » permettant d’envisager des renforts sur l’une ou l’autre des deux flottes.

 

b.   Les pistes d’approfondissement de la mutualisation avec la DGGN

La DGSCGC et la DGGN ont présenté au rapporteur spécial les développements en cours pour l’utilisation d’un nouvel outil de gestion de production, permettant de suivre le carnet d’entretien de l’appareil. Ce système sera commun à la DGSCGC, à la DGGN et à la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI).

Ce projet est conduit par le service des technologies et des systèmes d’information de la sécurité intérieure (STSISI). Le rapporteur spécial salue cette mutualisation supplémentaire, génératrice d’importantes économies.

De plus, les hélicoptères EC145 ne représentent que 23 % de la flotte de la Gendarmerie nationale. Les différences entre les flottes vont s’accentuer à l’avenir : la DGGN a en effet commandé dans le cadre du plan de soutien à l’industrie aéronautique dix hélicoptères H160.

B.   Les relations de la DGSCGC avec le ministère des armées et le ministère des solidarités et de la santé

1.   La conduite des négociations des marchés de maintenance par la DMAé

La direction de la maintenance aéronautique (DMAé) du ministère des armées passe les marchés de MCO des aéronefs de l’État, et par conséquent ceux de la DGSCGC. Une mutualisation avec d’autres administrations est systématiquement recherchée lors du lancement de tout nouveau marché, dans un objectif de baisse des coûts. En effet :

– la taille plus importante du marché permet d’obtenir, grâce à un effet volume, des prix plus intéressants et a tendance à accroître le nombre d’industriels se portant candidat ;

– la mutualisation permet un partage des coûts fixes, grâce au partage de la structure logistique mise en place.

Les marchés mutualisés passés par la DMAé au profit de la sécurité civile

Opérateur / Société titulaire du marché

Objet du marché

Coûts

(en millions d’euros ; pour la Sécurité civile ;en AE ; HT)

Mutualisation

Ineo-Icare

Cellule hors moteurs

42 (5 ans, 2021)

Sécurité civile et Gendarmerie

Safran Helicopter Engines

Moteurs

5,5 (2020)

Ensemble des forces étatiques

Goodrich – périmètre repris par Ineo-Icare

Treuils

0,4 (2020)

Ensemble des forces étatiques

Thales/Sogitec

Simulateur de vol

0,3 (2020)

Ensemble des forces étatiques

Lorca

Certains rechanges de consommables aéronautiques

0,5 (2020)

Ensemble des forces étatiques

Orexad

Outillages

0,3 (2020)

Ensemble des forces étatiques

Source : DGSCGC.

La DMAé a indiqué au rapporteur spécial mener depuis quelques années une stratégie de verticalisation des contrats, avec l’objectif de passer des marchés globaux à longue échéance.

Cette stratégie confie à un maître d’œuvre unique, dans le cadre d’un contrat de longue durée, un périmètre d’actions couvrant l’intégralité de l’aéronef, incluant également la gestion logistique des stocks. Pour la DMAé, la verticalisation permet une meilleure maîtrise des coûts dans la durée.

La rémunération des industriels dépend désormais de l’atteinte d’objectifs de performance.

Le marché de maintien en condition opérationnelle passée au profit de la DGSCGC et de la DGGN avec la société Ineo‑Icare, notifié en février 2021, a été établi dans le cadre de cette nouvelle stratégie. Il concerne la maintenance des hélicoptères EC145 et de leurs équipements, hormis les moteurs, dont la maintenance relève d’un marché de soutien global de l’ensemble des turbomoteurs des hélicoptères de l’État.

2.   Les structures de coopération entre la sécurité civile et les établissements de santé doivent être approfondies

Deux types d’aide médicale font intervenir des moyens héliportés, qu’il s’agisse des moyens de la DGSCGC, de la DGGN, ou des Hélismur : le service d’urgence à la personne (SUAP) et l’aide médicale urgente (AMU).

Le secours d’urgence à la personne (SUAP) relève de la compétence des services départementaux d’incendie et de secours en lien avec le ministère de l’intérieur.

 

L’aide médicale urgente (AMU) relève de la compétence du ministère chargé de la santé. Celle-ci se décline en deux types de transport : le transport primaire, qui consiste à transporter les personnes jusqu’aux établissements de santé, et le transport secondaire, qui correspond au transport inter-hospitalier.

Le transport sanitaire héliporté est en croissance, avec près de 16 % de vols supplémentaires entre 2016 et 2018 ([4]) Sur cette même période, les missions d’AMU étaient réparties à parts quasi égales entre le transport primaire (52 %) et les missions secondaires (48 %).

Le contexte actuel est marqué par une augmentation du transport sanitaire héliporté et du nombre d’hélicoptères utilisé dans le cadre de l’AMU, qu’il s’agisse des Hélismur ou des hélicoptères de la sécurité civile. Pour les Hélismur, la progression de l’activité est de 20 % entre 2016 et 2018. D’après la DGOS, 53 appareils Hélismur sont actuellement mis en œuvre par les établissements de santé.

Le rapporteur spécial a constaté que, contrairement aux appareils de la DGGN, deux obstacles principaux s’opposent à une mutualisation des moyens :

– la configuration des hélicoptères de la sécurité civile et l’emport de matériels spécialisés (civière, nacelle, treuil etc.) est adaptée au cas par cas aux spécificités de chaque mission (évacuation de blessé, secours en mer, secours en montagne...) tandis que les Hélismur sont en configuration sanitaire permanente ;

– les Hélismur sont loués par les établissements de santé à des prestataires privés dans le cadre de contrats qui comprennent également les opérations de maintenance.

Le rapporteur spécial rappelle le caractère indispensable de la coordination des interventions et de la coopération entre ces acteurs pour apporter aux victimes et aux patients le meilleur service possible. L’intervention des « dragons », des hélicoptères de la DGGN et celle des Hélismur est complémentaire, d’autant que le statut d’aéronef d’État des hélicoptères de la DGSCGC et de la DGGN les autorise à réaliser certaines missions interdites aux hélicoptères Hélismur, soumis pour leur part à la réglementation de la direction générale de l’aviation civile (DGAC).

La progression du nombre de missions de secours aériens et celle, pour certaines bases de la sécurité civile, des activités de transport primaire et secondaire, renforce, pour le rapporteur, le besoin de coordination opérationnelle pour l’usage et l’implantation des appareils.

● Le comité de pilotage interministériel (COPIL) mis en place en 2014 par la DGOS du ministère chargé des solidarités et de la santé et la DGSCGC du ministère de l’intérieur est le dispositif de concertation interministérielle sur les questions d’intérêt commun relatives aux moyens héliportés utilisés dans le cadre du service d’urgence à la personne (SUAP) et de l’AMU.

Les précédents travaux de ce COPIL ont abouti à la rédaction d’un document conjoint DGOS-DGSCGC décrivant des principes partagés pour le suivi de l’activité des moyens héliportés utilisés dans le cadre du SUAP et de l’AMU. Le COPIL avait aussi notamment identifié l’importance de respecter les quatre principes généraux suivant : principe de complémentarité entre les acteurs, principe de cohérence, principe d’efficience et principe de transparence.

Le COPIL n’a pas été réuni depuis 2019, ce que le rapporteur regrette. Il espère qu’il sera de nouveau réuni en 2021, après le caractère particulier de l’année 2020, marquée par la crise sanitaire.

● Les dispositifs prévus par l’instruction interministérielle du 24 mars 2017 relative aux moyens héliportés de la DGSCGC et des établissements de santé dans le cadre du secours à personne et de l’aide médicale urgente n’ont été mis en œuvre que de façon incomplète, notamment pour ce qui concerne les partenariats sur la localisation des moyens héliportés.

Cette circulaire avait pour objectif d’atteindre, au niveau zonal, une gouvernance partagée et des indicateurs d’activités communs. Elle prévoyait également un développement d’implantations opérationnelles communes.

En outre, les comités d’orientation et de suivi des activités de secours à personne et d’aide médicale urgente héliportée (COSA) prévus au niveau zonal, coprésidés par le préfet de zone, doivent encore être installés dans quatre des six zones prévues par l’instruction. Les COSA ne sont opérationnels que dans les zones Ouest et d’Île‑de‑France.

La localisation des « dragons » de la DGSGGC

Il existe aujourd’hui 23 bases « hélicoptères » sur le territoire français, métropole et compris en outre-mer. La DGSCGC décide de ces implantations, de même que la gendarmerie nationale pour ses hélicoptères. Les implantations des Hélismur sont décidées au niveau des agences régionales de santé (ARS).

Les évolutions dans le domaine des implantations sont abordées en COSA (conseil d’orientation et de suivi de l’activité) lorsque ceux-ci existent. C’est au sein de cette instance qu’est réalisée la concertation. Le groupement des moyens aériens (GMA) de la DGSCGC a été par exemple associé à la réflexion de l’ARS Occitanie dans le cadre du nouveau marché d’hélicoptères SAMU couvrant l’est de la zone (cette zone n’ayant pas encore créé son COSA, la concertation a eu lieu entre le GMA et l’ARS).

Les implantations des bases hélicoptères sont fixes. Elles nécessitent en effet une infrastructure logistique de soutien pour la maintenance des hélicoptères.

Il existe aujourd’hui 23 bases hélicoptères pérennes et 8 détachements saisonniers :

 5 en été (Le Luc, Mende, Courchevel, Gavarnie et Lacanau) ;

 1 semi-permanent (Alpe d’Huez) ;

 1 permanent (Chamonix) ;

 1 expérimental sur l’année (Melun).

Ces détachements disposent d’infrastructures plus légères et qui ne permettent pas l’ensemble des opérations de maintenance.

En cas d’évènements exceptionnels (par exemple des inondations de forte ampleur), les hélicoptères d’une même zone de défense peuvent être appelés en renfort pour intervenir sur un évènement particulier. C’est par exemple ce qui a été mis en œuvre pour les inondations de fin 2020 dans les Alpes-Maritimes. Dès le lendemain des inondations, 6 hélicoptères de la sécurité civile sont venus pour participer au transport de personnes et de matériels et ce durant plusieurs jours avant une diminution progressive du dispositif. Cette organisation est à la main de la préfecture de zone de défense et de sécurité concernée. Suivant la localisation de l’évènement, des moyens des autres zones peuvent être sollicités ; le COGIC est alors sollicité pour émettre un avis sur la demande.

Voir également la carte en annexe 1.

Source : DGSCGC.

D’après la DGOS, les travaux du COPIL et la circulaire de mars 2017 ont permis de mettre en œuvre des dynamiques de coopération sur les territoires, qui ne se sont pas encore développées dans l’ensemble du pays. Elle signale les conventions de partenariat mises en œuvre à Besançon, ou des opérations de médicalisation des « dragons » sur les bases de Bordeaux, Strasbourg ou Clermont‑Ferrand. Elle ajoute que le partage d’outils statistiques pourrait être développé.

Le rapporteur spécial appelle à un approfondissement du dialogue et au développement des dispositifs prévus par la circulaire de 2017.

Recommandation n° 4 : approfondir les actions de mutualisation, de prestation de services et de coordination des flottes avec les autres directions du ministère de l’intérieur et avec d’autres administrations.

Le rapporteur spécial remarque avec intérêt le projet de groupe de travail composé de l’armée de l’air, de la DGGN, de la DGSCGC, de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI)et de la DGOS, d’un mémento pratique et opérationnel tendant à sécuriser dans l’espace aérien les activités des différentes flottes. Commencé en 2020, le projet a été ralenti par la poursuite de la crise sanitaire. Le rapporteur spécial espère qu’il pourra être bientôt repris.

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION 

Lors de sa réunion de 17 heures 15, le mardi 25 mai 2021, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu M. Bruno Duvergé, rapporteur spécial sur les crédits de la mission Sécurité civile.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail dédié de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera prochainement lisible en ligne.

 

 

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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) – ministère de l’intérieur :

– M. le préfet Alain Thirion, directeur général, M. Stéphane Thebault, sous‑directeur des affaires internationales, des ressources et de la stratégie, Mme Adeliene Savy, cheffe du groupement des moyens aériens, sous-direction des moyens nationaux ;

– Visite de la base de Nîmes-Garon et audition des personnels du groupement des moyens aériens.

 

Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) – ministère de l’intérieur :

– Général de corps d’armée Hubert Bonneau, directeur des opérations et de l’emploi

– Colonel Emmanuel Josse, commandant des forces aériennes de la gendarmerie nationale

 

Direction de la maintenance aéronautique (DMAé) – ministère des armées :

– Mme Monique Legrand-Larroche, directrice

 

Direction générale de l’offre de soins (DGOS)  ministère des solidarités et de la santé :

– Mme Sylvie Escalon, sous-directrice de la régulation de l’offre de soins (SDR) 

– Mme Michelle Bronner, adjointe à la cheffe du bureau de premier recours à la SDR

– Mme Camille Brunat, chargée de mission au bureau de premier recours

 

 

 


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   ANNEXE 1 : COUVERTURE TERRITORIALE DU GROUPEMENT DES HÉLICOPTÈRES DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA SÉCURITÉ CIVILE ET DE LA GESTION DES CRISES

Les cercles rouges correspondent à ce que l’on appelle le secteur d’intervention directe (proximité de la base d’implantation) correspondant à un rayon d’action moyen de 30 minutes de vol. Ce cercle est une moyenne : en fonction de la mission l’hélicoptère basé peut avoir un rayon d’action plus ou moins important en fonction de l’autonomie recherchée sur la zone de travail.

GMA – Couverture territoriale HL EC 145 Sécurité civile

Source : direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.


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   ANNEXE 2 : IMPLANTATION DES HÉLICOPTÈRES REMPLISSANT DES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC EN FRANCE

 

 

Capture d’écran 2021-05-22 174430

Source : direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.

 


([1]) Une partie des évolutions s’expliquent par des mesures de périmètres et de transferts.

([2]) Infrastructure nationale partageable des transmissions ; fonds de concours « Contribution des services départementaux d’incendie et de secours et d’autres partenaires aux frais de fonctionnement de l’infrastructure partagée des transmissions supportant le service Antares ».

([3]) Cf. carte en annexe 1.

([4]) Chiffres transmis par la DGOS.