N° 4195

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 mai 2021

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (n° 4090),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 46
 

 

PlaN d’urgence face à la crise Sanitaire

 

 

 

 

 

 

Rapporteurs spéciaux : MM. Eric Woerth et Laurent Saint-Martin

 

Députés

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SOMMAIRE

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Page

SYNTHÈSE ET ChiffreS-clés

Avant-Propos du PrÉsident Éric Woerth,  co-rapporteur de la mission

Avant-Propos du Rapporteur gÉnÉral,  Laurent Saint-Martin, co-rapporteur de la mission

PREMIÈRE PARTIE : UN CHOC ÉCONOMIQUE SANS PRÉCÉDENT DONT LA PORTÉE A ÉTÉ ATTÉNUÉE PAR DES MESURES D’URGENCE COMPARABLES À CELLES MISES EN PLACE PAR NOS PRINCIPAUX PARTENAIRES

I. La dégradation de la conjoncture économique française est comparable à celle observée dans les autres pays européens

II. un choc Économique amorti par l’intervention de l’État

A. Un support budgétaire unique pour identifier l’effort de soutien aux entreprises et à l’emploi

B. La réponse à la crise a concerné tout le budget de l'֤État

C. La mesure des effets de l’intervention publique sur les conséquences de la crise

III. Le dispositif de soutien français dans l’environnement Européen

DEUXIÈME PARTIE : UNE MISSION BUDGÉTAIRE UNIQUE RASSEMBLANT L’EFFORT DE SOUTIEN  À L’ÉCONOMIE ET À L’EMPLOI

I. Le périmètre comme les ressources de la mission se sont continuellement élargis

II. Le rythme des décaissements de la mission est corrélé au degré de restrictions sanitaires

III. Une exécution partielle des crédits conduisant à des reports conséquents sur 2021

IV. Une mission exceptionnelle dont la gestion a pu s’écarter de l’esprit de certains principes budgétaires

TROISIÈME PARTIE : L’EXÉCUTION DE LA MISSION  PLAN D’URGENCE

I. L’activité partielle ou la priorité donnée au soutien à l’emploi

A. L’activité partielle d’urgence se caractérise par une prise en charge publique massive

B. Près de la moitié des crédits de la mission ont été destinés au soutien à l’emploi

C. Un recours massif lors du premier confinement mais relativement moindre par la suite

D. L’activité partielle, nouvel outil pérenne des politiques de l’emploi ?

II. Le fonds de solidarité : un outil indispensable dont les règles d’éligibilité ont beaucoup évolué

A. L’Évolution des rÈgles d’ÉligibilitÉ au premier volet du fonds de solidaritÉ

B. L’évolution des critères se reflète dans la consommation du fonds de solidarité

C. Un dispositif indispensable pour soutenir les entreprises

III. Renforcement exceptionnel des Participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire

A. Une sous-consommation Signe d’une résistance des entreprises françaises

B. Le programme pourrait être de nouveau sollicité en 2021

IV. l’exonération et l’aide au paiement des charges sociales ont allégé la pression exercée sur la trésorerie des entreprises

A. Un dispositif combinant un système traditionnel d’exonération et une aide inédite au paiement

B. L’exécution budgétaire

C. Un dispositif prisé des entreprises dont l’extinction progressive est prévue pour le troisième trimestre 2021

QUATRIÈME PARTIE – LES CRÉDITS DE LA RELANCE EN 2020

Annexe 1 : surcoûts et moindres dépenses par mission du budget général en lien avec la crise, en millions d’euros

Annexe 2 : Répartition des montants versés au titre du fonds de solidarité par secteur (en %) (extrait du rapport du comité Coeuré)

Annexe 3 : décaissements du plan de relance en 2020, extrait du rapport de la Cour des comptes sur l’exécution budgétaire 2020

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX


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SYNTHÈSE ET ChiffreS-clés

Pour financer les mesures de soutien à l’économie et l’emploi dans le cadre de la crise sanitaire, le choix a été fait par les pouvoirs publics d’une mission budgétaire unique, à même de garantir une certaine visibilité de l’autorisation parlementaire pour les acteurs économiques. Prévue initialement pour le seul exercice 2020 et dénommée Plan d’urgence face à la crise sanitaire, cette mission a été créée par la LFR 1 ([1]) pour accueillir les crédits finançant les principales mesures en faveur des entreprises, à l’exception notable des prêts garantis par l’État (PGE) ([2]) : fonds de solidarité et activité partielle puis renforcement des participations financières de l’État (LFR 2) ([3]) et exonérations de cotisations sociales (LFR 3) ([4]). Quatre programmes ont accueilli les crédits correspondants à chacune de ces mesures.

L’ouverture et la consommation des crédits de la mission ont évolué parallèlement à la situation sanitaire du pays. Au total, 41,8 milliards d’euros ont été consommés en 2020 sur les 70,6 milliards d’euros de crédits disponibles. Cela témoigne d’une approche prudente du Gouvernement qui a préféré éviter le risque de rupture de trésorerie, parfois au détriment des principes de gestion budgétaire classiques. L’intégralité des crédits non consommés en 2020, soit 28,8 milliards d’euros, a fait l’objet de reports sur l’année 2021. Prévue pour une durée d’un an, la mission a en effet dû être prolongée tant que le soutien aux entreprises et à l’emploi ne pouvait refluer dans un contexte sanitaire toujours dégradé.

Évolution des ouvertures et de la consommation des crédits sur l’ensemble de la mission en 2020


(en milliards d’euros, AE=CP)

Source : commission des finances d’après Chorus.

Pour évaluer l’efficacité de l’intervention publique en faveur de l’économie, un comité de suivi et d’évaluation, dit « comité Coeuré », a été créé par l’article 6 de la LFR 1. Ses premiers travaux suggèrent un effet massif des mesures d’urgence sur la santé financière des entreprises et sur le maintien de l’emploi. Les anticipations des entreprises ayant été stabilisées, l’hypothèse d’une reprise vigoureuse de l’économie, à l’image de celle observée au troisième trimestre de l’année 2020, est plausible.

Les quatre dispositifs financés par la mission, associés aux prêts garantis par l’État et aux autres mesures adoptées au cours de l’année, forment une boîte à outils qui a permis à chaque entreprise de solliciter les instruments qui convenaient à sa situation. En termes budgétaires, l’activité partielle et le fonds de solidarité ont mobilisé près de deux tiers des crédits de la mission. La première a surtout été sollicitée lors du premier confinement tandis que l’élargissement du fonds de solidarité et l’assouplissement de ses conditions d’accès ont conduit à le rendre incontournable à compter du deuxième confinement.

CrÉdits consommÉs en 2020 par programme sur la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire

(en millions d’euros, AE=CP)

Source : rapport annuel de performances.


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   Avant-Propos du PrÉsident Éric Woerth,
co-rapporteur de la mission

Le 17 mars 2020, la France est entrée dans une période de confinement, qui s’est traduite juridiquement par l’institution d’un état d’urgence sanitaire avec la loi n° 2020-290 du 23 mars d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.

Cet état d’urgence sanitaire a conduit à la restriction de la liberté d’entreprendre. La mise à l’arrêt complète et immédiate du pays a provoqué un choc économique d’une ampleur inouïe, avec des conséquences budgétaires graves, qui se sont matérialisées également dès le mois de mars avec le vote, en quelques jours, de la première loi de finances rectificative pour 2020, laquelle a institué une nouvelle mission budgétaire : la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, dont le présent rapport analyse l’exécution. L’État n’était pas dans une bonne situation financière au moment d’aborder la crise, ce qui rend d’autant plus dangereuse la gestion et d’autant plus périlleuse la sortie de cette crise. 

*

Des sommes considérables ont été mobilisées pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire. En 2020, la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire a été dotée, par les quatre lois de finances rectificatives successives, de 70,6 milliards d’euros. C’est l’équivalent, à quelques milliards près, du budget de l’enseignement scolaire sur la même année.

Sur ces 70,6 milliards d’euros, 41,8 milliards ont été dépensés. 2021 ne signe pas la fin des subventions publiques, puisque 5,6 milliards d’euros ont été ouverts en loi de finances initiale sur cette mission, qui s’ajoutent aux 28,75 milliards d’euros de crédits reportés de 2020 sur 2021, soit 34,35 milliards d’euros. 

D’emblée, je souhaite saluer le travail du comité de suivi créé à notre demande dans la première loi de finances rectificative pour 2020, dont certains parlementaires étaient membres. Ce comité, présidé par Benoît Coeuré, s’est réuni à de nombreuses reprises et a régulièrement informé les parlementaires des évolutions de la crise sanitaire. Le rapport d’étape publié en avril 2021 a utilement nourri notre réflexion.

*

La France a soutenu massivement les entreprises, via le fonds de solidarité et les prêts garantis par l’État, et préservé le pouvoir d’achat des ménages grâce à l’activité partielle. S’agissant des mesures d’urgence, chaque pays européen a décliné sa version de ces deux piliers : l’Allemagne a par exemple versé des subventions aux entreprises calculées sur la base de leurs coûts fixes, dispositif couplé à celui de l’activité partielle.

Si les mesures d’urgence sont similaires, l’effort engagé est proportionnel au degré de restrictions sanitaires. Ainsi, pour l’activité partielle, si l’Allemagne et la France ont décaissé des montants comparables (respectivement 22 milliards d’euros et 27,5 milliards d’euros), le Royaume-Uni a lui dépensé 64,6 milliards d’euros. Cela s’explique non seulement par un confinement strict pendant quatre mois mais également par la structure de son économie (par exemple, existence de contrats « zéro-heure »). 

Le fonds de solidarité a été un outil extrêmement utile. Très tôt, les Républicains ont alerté sur la nécessité d’adapter le critère de perte de chiffre d’affaires, fixé à l’origine à 70 %. Le Gouvernement a entendu les alertes de l’opposition et abaissé le seuil à 50 %. Force est de reconnaître que l’exécutif s’est ensuite attaché à modifier les critères d’éligibilité pour garantir une couverture équitable des entreprises.

Cette préoccupation a cependant un coût. Alors que cet outil était très simple et très lisible lors de sa création, il est devenu un fonds tentaculaire, à plusieurs volets, dans lequel il est difficile de s’y retrouver. Le décret du fonds de solidarité a ainsi été modifié à plus de vingt reprises depuis sa publication. Bien que ce soit le prix à payer pour un dispositif qui soit adapté à la fois aux différents degrés de restrictions sanitaires selon les secteurs d’activité et à la structure économique des entreprises, cela reste regrettable.

La prise en charge des coûts fixes par le fonds de solidarité, intervenue en janvier 2021, a été très tardive, contrairement à d’autres pays comme l’Allemagne dont le régime d’aide pour couvrir les coûts fixes sur la période de mars 2020 à juin 2021 a été approuvé par la Commission européenne dès le 20 novembre 2020. 

Le recours à l’activité partielle était indispensable pour préserver les capacités productives du pays, et un dispositif plus favorable que le droit commun antérieur a été mis en place rapidement. Le défi aujourd’hui, c’est la sortie progressive du dispositif, avec une phase de transition : la prise en charge par l’État doit être proportionnée à la reprise de l’activité économique et différenciée selon les secteurs. 

20 milliards d’euros ont été ouverts par la deuxième loi de finances rectificative pour renforcer les participations financières de l’État dans des entreprises stratégiques. Cette ouverture importante était un signal fort de soutien envoyé aux entreprises. La consommation moins importante que prévue montre que les prédations redoutées n’ont pas eu lieu, ce qui est une bonne nouvelle.

Les prêts garantis par l’État, s’ils ont évité aux entreprises d’être confrontées à des problèmes massifs de trésorerie, auraient dû, à mon sens, être complétés par un dispositif de renforcement des fonds propres des entreprises. Je crains que beaucoup n’arrivent pas à rembourser leurs prêts, trop fragilisées par une année d’inactivité.

Les entreprises ne peuvent investir avec cette épée de Damoclès au-dessus de leur tête : il est donc urgent que le Gouvernement clarifie ses intentions. La durée de remboursement des PGE sera-t-elle prolongée ? Des annulations auront-elles lieu, au cas par cas ? Qu’en est-il des dettes fiscales et sociales des entreprises qui se sont accumulées avec le mécanisme de report ? Si la mise en place des prêts participatifs, assimilables à des quasi-fonds propres, est un pas dans la bonne direction, l’effort doit être d’une autre ampleur. Les dettes sociales et fiscales des entreprises, qui représentaient plus de 24 milliards d’euros en avril 2021, pourraient par exemple être annulées en priorité. 

On peut regretter enfin les ouvertures massives en fin de gestion, qui auraient trouvé toute leur place dans la loi de finances initiale pour 2021. Le montant élevé des reports de crédits sur 2021 témoigne d’une ouverture excessive de crédits lors de la quatrième loi de finances rectificative pour 2020, et la Cour des comptes a logiquement déploré le manque de réalisme des prévisions budgétaires dans son analyse de la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire

*

Le plan de relance n’est pas l’objet principal de ce rapport, mais il faut l’évoquer lorsqu’on parle de l’exécution 2020. La nécessité d’un plan de relance ne peut être discutée, mais son articulation avec les mesures d’urgence complexifie sa lisibilité. La Cour des comptes souligne que la coexistence de supports budgétaires multiples « fait peser un risque sur la lisibilité des dépenses correspondantes » ([5])

Il y a ainsi une véritable zone grise, entre urgence et relance, dans laquelle se situent beaucoup de dispositifs, que ce soit la transformation des reports de charges sociales en exonérations définitives ou encore la sortie progressive du dispositif d’activité partielle jusqu’alors pris en charge intégralement par l’État et l’Unédic. La recapitalisation de la SNCF, à hauteur de 4,05 milliards d’euros, est comptabilisée dans les dépenses de la mission Plan d’urgence mais apparaît également dans les 100 milliards du plan de relance. De la même façon, les plans sectoriels, comme ceux concernant l’aéronautique et l’automobile, comptabilisés dans le plan de relance, relèvent pourtant bien de l’urgence, puisqu’ils viennent soutenir des secteurs très fragilisés par les restrictions sanitaires. Tout cela contribue à brouiller les chiffres.

Le calendrier du plan de relance ne laisse pas non plus d’interroger. Dès le 7 avril 2020, je faisais des propositions pour la mise en œuvre rapide d’un plan de relance coordonné avec l’Europe : le plan de relance n’a été finalement présenté devant notre commission que le 3 septembre 2020. Des engagements plus précoces auraient pourtant permis de donner de la visibilité et des perspectives aux entreprises. 

Le Gouvernement annonce que 70 milliards d’euros auront été décaissés à la fin 2021 au titre de la relance : sur le papier, c’est une bonne nouvelle, à condition que ces crédits soient dépensés de manière efficiente. Le plan de relance doit faire l’objet d’une évaluation en continu, gage d’une allocation efficace des ressources. Je serai également attentif à l’articulation entre les dépenses de relance et les dépenses d’urgence, qui vont demeurer très significatives en 2021.

Si un second plan de relance s’avère nécessaire, il devra être très ciblé et très sélectif. Surtout, il ne doit pas être élaboré avant qu’une évaluation précise du premier plan ne soit conduite. Il faut aujourd’hui concentrer toutes les énergies sur la mise en œuvre efficace du premier volet de la relance, sur l’évaluation et l’ajustement des mesures et sur la réussite de la vaccination.

L’intervention budgétaire de l’État, massive, était nécessaire. Plus que jamais, elle doit s’accompagner de réformes structurelles, comme une réforme des retraites, afin que notre pays soit mieux préparé à la prochaine pandémie. L’argent public ne peut se substituer sur le long terme à des mesures structurelles, lesquelles permettront le retour à un niveau de dette soutenable. La crise et le « quoi qu’il en coûte » ne doivent pas être un prétexte à une augmentation générale des dépenses de l’État, diluant l’efficacité des dépenses d’investissement dans une course en avant des dépenses de fonctionnement. C’est là l’exigence indispensable pour assurer une maîtrise des finances publiques ainsi que la compétitivité de notre économie. 

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   Avant-Propos du Rapporteur gÉnÉral,
Laurent Saint-Martin, co-rapporteur de la mission

En imposant des mesures strictes à la société dans son ensemble lorsque le pays a été frappé par la crise sanitaire de la Covid-19 en mars 2020, les pouvoirs publics ont su mettre en place, en parallèle et en quelques jours, des mesures de soutien essentielles à la protection des entreprises et des emplois.

Dès le 23 mars, soit une semaine après le début du confinement, l’adoption d’une loi d’urgence et d’une loi de finances rectificative a introduit les premiers instruments qui allaient constituer les prémisses d’un véritable arsenal de soutien aux ménages et aux entreprises. La mission budgétaire Plan d’urgence face à la crise sanitaire a été créée pour loger les crédits concourant à cette fin. Son périmètre comme ses moyens ont été ensuite élargis pour financer le fonds de solidarité, l’activité partielle, les interventions en capital de l’État dans les entreprises durement frappées par la crise et les allègements et l’aide au paiement des cotisations sociales. En 2020, 41,8 milliards d’euros ont été décaissés sur cette mission, soit près de 11 % des dépenses du budget général de l’État ([6])

Outre le plan d’urgence, les prêts garantis par l’État (PGE) associés à une palette de dispositifs fiscaux ont permis de constituer une boîte à outils dans laquelle les entreprises ont pu trouver des solutions adaptées à leurs spécificités. Entre mars et septembre 2020, ce sont 3,8 millions d’établissements employant 17 millions de salariés qui ont eu recours aux prêts garantis par l’État, à l’activité partielle, au fonds de solidarité ou aux exonérations et à l’aide au paiement de charges sociales. Les comportements des entreprises ont évolué parallèlement au contexte sanitaire. L’activité partielle a été très sollicitée durant le premier confinement, conduisant à des décaissements allant jusqu’à 8,4 milliards d’euros en avril 2020 alors que 8,6 millions de salariés étaient placés en activité partielle. À l’inverse, la transformation du fonds de solidarité, initialement conçu comme un filet de sécurité de 1 500 euros mensuel pour les petites entreprises, puis devenu un mécanisme de couverture des coûts fixes pour des montants pouvant atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros, a conduit à des décaissements dépassant les 4 milliards d’euros à la fin de l’année 2020.

La crise a mis en lumière la capacité de l’État à trouver des solutions neuves et efficaces dans l’urgence. En témoignent le fonds de solidarité dont l’adaptation progressive a été menée au plus près des besoins des entreprises tout au long de la crise ou l’aide au paiement des cotisations sociales dont la simplicité a conduit à une grande appropriation par les entreprises. Des mécanismes existants ont également été adaptés au contexte, au point de devenir aujourd’hui des outils majeurs de politique économique à l’image de l’activité partielle qui perdurera comme un instrument d’ajustement de l’emploi parfois plus efficient que le licenciement.

Entre juin 2020 et mars 2021, seules 0,5 % des entreprises ayant bénéficié de l’activité partielle ont procédé à des licenciements. Celles qui ont dû malgré tout licencier se sont souvent engagées dans des négociations autour de l’activité partielle de longue durée, créée en 2020, pour trouver un équilibre acceptable entre réduction de l’activité et maintien de l’emploi d’un certain nombre de salariés.

La réactivité requise dans la mise en œuvre des mesures et l’impératif de disposer à tout moment des crédits nécessaires dans un contexte sanitaire mouvant et incertain ont conduit à doter la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire de 70,6 milliards d’euros alors que seuls 59 % de ces moyens ont finalement été consommés. Les critiques émises a posteriori sur le bon calibrage de ces crédits sont donc bien évidemment recevables. L’essentiel reste malgré tout que les ruptures de paiement ont été évitées et que le Gouvernement a toujours répondu présent aux demandes des entreprises. Par ailleurs, l’intégralité des 28,8 milliards d’euros non consommés a été reportée en 2021 sur la même mission. Ils ont financé des dépenses dont le fait générateur a eu lieu en 2020 mais dont le décaissement est intervenu en 2021 pour environ 4,2 milliards d’euros au titre du fonds de solidarité et des compensations d’exonération de charges sociales. Ils ont également contribué à continuer de financer les dispositifs de la mission alors que l’épidémie et les mesures de restrictions associées sont restées prégnantes. Au 31 mai 2021, 19,8 milliards d’euros ont ainsi été consommés sur la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire.

*

Le rebond économique vigoureux du troisième trimestre 2020, comme celui que l’on semble observer après la fin du troisième confinement tendent à confirmer que le soutien fourni par l’État n’est pas étranger à la préservation du tissu économique. En 2009, la crise financière a engendré une dégradation structurelle de la situation financière des entreprises et du marché du travail avec la persistance d’un chômage de longue durée. Aujourd’hui, les premières évaluations économiques suggèrent que la solvabilité des entreprises n’a pas été trop durement entamée. Les défaillances d’entreprises ont d’ailleurs fortement diminué en 2020 (– 39 % par rapport à 2019). Les dépenses d’investissement ont reculé de 10,3 % en cohérence avec le PIB (– 8,2 %), alors qu’un repli deux fois supérieur était envisagé par les modèles économiques. L’activité partielle a empêché que le recul de la production n’ait pour conséquence une forte disparition des emplois et ne se traduise par une hausse du chômage de longue durée ou de l’inactivité. Le revenu des ménages a, de fait, bien résisté avec un taux d’épargne passé de 14,9 % à 21,3 % entre 2019 et 2020.

À cet égard, certaines leçons de la crise de 2009 ont été retenues et l’État a fait en sorte, dans toute la mesure du possible, que des perturbations conjoncturelles ne deviennent des déterminants économiques de long terme. L’horizon fixé par le plan d’urgence puis le plan de relance est le retour, dès 2022, à un niveau d’activité similaire à celui observé en 2019.

Une grande partie du plan de relance est donc tournée vers l’emploi et la formation notamment via le plan « 1 jeune, 1 solution ». La reprise économique doit permettre d’absorber le chômage né de la crise. L’investissement public porté par le plan de relance doit stimuler le tissu économique, démultiplier l’investissement privé et l’orienter massivement vers la transition écologique et la souveraineté industrielle. En quelque sorte, urgence et relance ont eu et auront pour objectif à la fois de maintenir notre tissu économique et de le moderniser en profondeur. 


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PREMIÈRE PARTIE : UN CHOC ÉCONOMIQUE SANS PRÉCÉDENT DONT LA PORTÉE A ÉTÉ ATTÉNUÉE PAR DES MESURES D’URGENCE COMPARABLES À CELLES MISES EN PLACE PAR NOS PRINCIPAUX PARTENAIRES

Les effets économiques de la crise sanitaire ­ et des mesures de restrictions associées ont été très violents dès le mois de mars 2020 mais ont évolué de façon hétérogène ensuite (I). Les premiers éléments d’évaluation suggèrent un effet de soutien important sur l’économie française des dispositifs mis en place (II), ceux-ci s’inscrivant dans la lignée des plans d’urgence de nos principaux partenaires économiques (III).

I.   La dégradation de la conjoncture économique française est comparable à celle observée dans les autres pays européens

La réaction face à la crise sanitaire des principales économies européennes a été similaire au début de la crise puis plus différenciée selon les pays une fois la première vague passée. Cette désynchronisation s’explique par des évolutions distinctes de l’épidémie et des réponses gouvernementales tant économiques que sanitaires.

La chute de l’activité en France au deuxième trimestre a été très marquée en France, le rebond du troisième trimestre y a été toutefois vigoureux.

Évolution par trimestre du PIB dans La zone euro et plusieurs États membres par trimestre en 2019 et 2020

(PIB en valeur, base 100 au T4 2019)

Source : Eurostat, PIB et principaux composants extraction au 27 mai 2021.

Il en résulte pour l’année 2020, un recul du PIB français de – 8,2 % contre – 6,6 % pour la zone euro ([7]). Au-delà des différences dans l’ampleur de la récession selon les pays européens, de nombreuses similitudes ont pu y être observées s’agissant des réactions des agents économiques. Le tableau ci-après résume l’évolution des principaux déterminants de l’économie nationale à compter du deuxième trimestre 2020.

Évolution des principales variables économiques en glissement annuel

 

Deuxième trimestre

Troisième trimestre

Quatrième trimestre

Moyenne annuelle

PIB (en %)

– 18,6

 – 3,7

– 4,9

– 8,2

Consommation ménages

(en %)

 – 15,8

 – 1,0

 – 6,6

 – 7,0

Investissement (en %)

 – 23,0

 – 5,6

 – 4,7

 – 10,3

Contribution commerce extérieur
(en point de PIB)

– 2,7

– 1,7

– 0,6

– 1,5

Emploi salarié privé fin de trimestre (en % et en milliers)

– 2,5
(– 497,3)

– 1
(– 204,3)

– 1,6
(– 320,2)

– 1,7
(– 332,4)

Demandeurs d’emploi en fin de mois
France métropolitaine
(DEFM cat. A, en %)

+ 22,7

+ 9,5

+ 8,1

+ 9,6

Taux de chômage BIT

(en points)

– 1,3

+ 0,7

 – 0,1

 – 0,4

Taux d’emploi (en points)

– 1,2

– 0,3

– 0,4

– 0,3

Taux de marge des sociétés non financières (en points)

– 6,0

– 3,6

– 2,9

– 4,0

Taux d’épargne des ménages (en points)

+ 12,8

+ 1,7

+ 7,0

+ 6,4

Défaillances d’entreprises (en %)

– 56,0

– 35,2

– 37,1

– 38,9

Créations d’entreprises

(en %)

 – 18,1

+ 21,5

+ 16,3

+ 4,0

Source : Insee, Dares, Banque de France.

Plusieurs premiers constats peuvent être tirés du comportement des agents économiques au cours de l’année 2020.

Le revenu des ménages a résisté notamment du fait de l’activité partielle mais la consommation a baissé. Il en résulte, au global, une augmentation importante de l’épargne des ménages en France, passant de 14,9 % à 21,3 % du revenu disponible brut entre 2019 et 2020.

L’emploi salarié se détériore peu, baissant de manière nettement plus modérée que l’activité (hausse du taux de chômage au sens du BIT de 1,1 % en France) au quatrième trimestre 2020 en glissement annuel.

L’investissement des entreprises résiste également au choc puisque sa chute est en ligne avec celle du PIB, alors qu’une élasticité plus élevée, de l’ordre de deux, est généralement observée.

Les défaillances d’entreprises ont, elles, fortement diminué en 2020 (– 39 % en France). Au-delà de la cessation d’activité des tribunaux de commerce et de la suspension des assignations par l’Urssaf, les premiers résultats d’études économiques pointent un lien avec les dispositifs de soutien (voir infra). Les créations d’entreprises progressent de 4 % sur l’année, portées par les micro-entrepreneurs (+ 9 %), alors que les créations d'entreprises classiques ont diminué de 13 % ([8]).

II.   un choc Économique amorti par l’intervention de l’État

La réaction des pouvoirs publics à la crise sanitaire a été particulièrement rapide. Le dispositif de soutien aux entreprises a été mis en place dès les premiers jours du premier confinement, dans la foulée d’une première loi d’urgence ([9]) et de la première loi de finances rectificative (LFR 1) ([10]), toutes deux adoptées le 23 mars 2020.

Le dispositif global de soutien a été conçu comme une « boîte à outils » permettant de combiner des mesures différentes, sans cesse étendues, pour offrir les réponses les plus adaptées aux situations particulières de chaque entreprise. Le principal support de financement de ces mesures est la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire qui fait l’objet du présent rapport (A), toutefois la réponse à la crise sanitaire a mobilisé bien au-delà et concerné l’ensemble du budget de l’État (B). Un dispositif d’évaluation ad hoc a permis de suivre l’effet de ces mesures sur l’économie française. Un premier rapport d’étape, publié en avril 2021, suggère un effet important de ces outils en faveur de la préservation de l’emploi et du tissu économique (C).

A.   Un support budgétaire unique pour identifier l’effort de soutien aux entreprises et à l’emploi

Pour financer les mesures de soutien à l’économie et l’emploi, le choix a été fait par les pouvoirs publics d’une mission budgétaire unique, à même de garantir une certaine visibilité de l’autorisation parlementaire pour les acteurs économiques.

Prévue initialement pour le seul exercice 2020 et dénommée Plan d’urgence face à la crise sanitaire, cette mission a été créée par la LFR 1 pour accueillir les crédits finançant les principales mesures en faveur des entreprises, à l’exception notable des prêts garantis par l’État (PGE) : fonds de solidarité et activité partielle puis renforcement des participations financières de l’État (LFR 2) ([11]) et exonérations de cotisations sociales (LFR 3) ([12]). Le présent rapport se consacrera donc à l’analyse de ces dispositifs et de leur financement.

Les prêts garantis par l’État

Le dispositif de prêt garanti par l’État est complémentaire des mesures d’urgence financées par la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire.

Créé par l’article 6 de la LFR 1, il permet à l’État de s’engager à garantir les prêts consentis aux entreprises par les établissements de crédit et les sociétés de financement à hauteur d’un encours total de 300 milliards d’euros. Le dispositif, qui devait être clos au 31 décembre 2020, devrait être prolongé jusqu’au 31 décembre 2021 par le premier projet de loi de finances rectificative de l’année 2021. Le montant du prêt ne peut excéder trois mois du chiffre d’affaires de l’emprunteur de l’année 2019 et peut être amorti sur cinq ans. Si le remboursement devait initialement intervenir un an après l’emprunt, la possibilité pour les entreprises de demander un différé d’un an supplémentaire a été décidée le 14 janvier 2021 par le ministre de l’économie, des finances et de la relance.

Cet outil a été fortement sollicité dès sa mise en place : ainsi, 58 % du montant total des PGE accordés l’a été sur la période de fin mars 2020 à mi-mai 2020 ([13]). Au 30 avril 2021, l’encours des prêts garantis par l’État représentait 137 milliards d’euros, pour plus de 672 000 prêts ([14]). Parmi ceux-ci, les PGE pour les grandes entreprises représentaient 16,8 milliards d’euros (pour 46 grandes entreprises) ([15]) 

À fin septembre 2020, 3,7 millions d’entreprises avaient bénéficié d’au moins une des quatre mesures de soutien financier d’urgence (hors intervention en capital), pour un montant global de près de 163 milliards d’euros, dont 26 milliards de subventions et 136 milliards de prêts. À cette date, le report de cotisations sociales a bénéficié à quatre fois plus d’entreprises que le PGE (2,4 millions d’entreprises contre 600 000), notamment en raison du caractère automatique du report pour les indépendants. Le fonds de solidarité, initialement ciblé sur les TPE, a concerné 1,7 million d’entreprises. L’activité partielle, qui par définition n’est accessible qu’aux entreprises employant des salariés, a été mobilisée par un million d’entre elles ([16]).

B.   La réponse à la crise a concerné tout le budget de l'֤État

Outre les outils présentés par le présent rapport qui se rattachent à la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, une panoplie d’autres instruments budgétaires et fiscaux a été déployée : prêts et avances remboursables de l’État, reports de charges fiscales, garantie de l’État sur les préfinancements d’affacturage, remboursement anticipé des créances de report en arrière des déficits, dégrèvements exceptionnels de cotisation foncière des PME des secteurs les plus touchés, crédit d’impôt sur les abandons de créances de loyers, etc.

Le financement des subventions aux entreprises est en outre logé dans différentes missions du budget général de l’État. Ainsi, la mission Économie a permis de financer des mesures de soutien sectorielles aux filières automobile et aéronautique (366 millions d’euros), un abondement des fonds de garantie de BPIfrance (100 millions d’euros) ou encore des mesures de restructuration, de conseil et d’accompagnement à la numérisation des TPE et PME (40 millions d’euros). Ces mesures ayant ensuite été comptabilisées dans le plan de relance de 100 milliards d’euros annoncé en septembre 2020.

De même, des mesures de soutien aux ménages, notamment les plus modestes, ou des dispositifs d’aides à certains publics précaires ont été prises en charge par le budget de l’État. Ainsi l’aide exceptionnelle de solidarité versée à deux reprises aux ménages modestes et aux étudiants a été imputée sur la mission Solidarité, insertion et égalité des chances (2,4 milliards d’euros). De même, les moyens en faveur de la politique d’hébergement d’urgence ont été renforcés sur la mission Cohésion des territoires (449 millions d’euros).

La Cour des comptes ([17]) dénombre 7,9 milliards d’euros de dépenses nettes ([18]) liées à la crise ouvertes sur des missions du budget général autres que la mission Plan d’urgence. Le total des dépenses liées à la crise s’élève donc à 49,7 milliards d’euros ([19]), dont 15,9 % ont été ouverts hors de la mission Plan d’urgence.

C.   La mesure des effets de l’intervention publique sur les conséquences de la crise

Pour évaluer l’efficacité de l’intervention publique en faveur de l’économie, un comité de suivi et d’évaluation, dit « comité Coeuré », a été créé par l’article 6 de la LFR 1. Présidé par M. Benoît Cœuré, ancien membre du directoire de la Banque centrale européenne, il inclut des représentants des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, des associations des régions, des départements et des communes de France, des organisations représentatives patronales et de salariés, de la Cour des comptes et des administrations (Direction générale des finances publiques et Direction générale du Trésor). Le secrétariat du comité est assuré par France Stratégie et par l’Inspection générale des finances.

Son champ d’analyse couvre les mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de Covid-19. En attente de son rapport final prévu pour le mois de juillet 2021, le comité a publié un rapport d’étape en avril 2021 qui fait part des connaissances accumulées après un an de crise.

De premiers résultats d’évaluation ont été proposés par ce rapport : les éléments disponibles permettent de suggérer un effet massif des dispositifs de soutien sur l’économie française. Cette première conclusion est étayée par trois arguments.

En premier lieu, les mesures de soutien auraient permis de préserver la situation financière des entreprises. Comme le retrace le tableau ci-dessous, les évènements d’illiquidité ou d’insolvabilité des entreprises auraient été minimisés grâce à l’intervention de l’État.

Synthèse des principaux résultats des études de micro-simulation académiques et institutionnelles

 

 

Scénario sans crise (a)

Scénario de crise sans soutien public (b)

Scénario de crise avec soutien public (c)

Effet de la crise
(c-a)

Effet de la crise sans soutien public (b-a)

Illiquidité

 

 

 

 

 

DG Trésor (main simu)

15,60 %

36,00 %

24,00 %

8,4 pp

20,4 pp

DG Trésor (full simu)

15,60 %

34,40 %

21,80 %

6,2 pp

18,8 pp

Demmou et al. (2020a)

 

30 %

10 %

 

 

Guerini et al. (2020)

3,80 %

13,80 %

10,10 %

6,3 pp

10,0 pp

Gourinchas et al. (2020)

9,00 %

16,90 %

11,30 %

2,3 pp

7,9 pp

Insolvabilité

 

 

 

 

 

DG Trésor (main simu)

3,60 %

11,90 %

6,60 %

3,0 pp

8,3 pp

DG Trésor (full simu)

3,60 %

9,90 %

4,90 %

1,3 pp

6,3 pp

Demmou et al. (2020a)

 

 

7 %

0,0 pp

0,0 pp

Guerini et al. (2020)

1,80 %

4,40 %

3,20 %

1,4 pp

2,6 pp

*pp : points de pourcentage

Source : Comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de Covid-19 - Rapport d'étape, avril 2021, p. 278.

Le comité estime en outre que la différence d’ampleur entre les pertes d’emploi et la perte d’activité en 2020 va bien au-delà des mécanismes habituels de rétention. L’activité partielle a donc certainement joué un rôle.

Enfin, le fait que la baisse de l’investissement se soit limitée à la chute du PIB est interprété comme un signe de stabilisation des anticipations des entreprises, ayant pour origine les mesures mises en place par les pouvoirs publics – à même de permettre une reprise rapide à l’issue de la période de restrictions sanitaires.

III.   Le dispositif de soutien français dans l’environnement Européen

L’Europe a été fortement touchée par la pandémie de covid-19. Tous les pays européens, après avoir mis en place des restrictions sanitaires, ont engagé des dépenses de soutien à l’économie, suivies de mesures de relance.

Le rapport du comité Coeuré fait la distinction entre les mesures budgétaires (subventions, crédits d’impôt, baisse de taux d’intérêt) et les mesures de liquidité et de garantie (reports de prélèvements fiscaux, prêts garantis par l’État…).

Si chaque pays a ainsi décliné une panoplie de mesures, les fondamentaux des dispositifs sont largement similaires. La Cour des comptes souligne ([20]) que huit pays (Allemagne, Australie, Belgique, Danemark, Espagne, Italie, Pays-Bas, et Royaume-Uni) sur les neuf considérés par son étude ont distribué des subventions directes aux entreprises pour les soutenir pendant la crise sanitaire. Seuls les États-Unis ont choisi un système de prêts (convertibles en subventions sous condition de maintien de l’emploi) pour accompagner les entreprises.

Le Royaume-Uni a pris des mesures en faveur des jeunes, notamment en accordant une prime aux employeurs embauchant des apprentis, une incitation similaire à celle prise par la France.

L’Allemagne s’est préoccupée très tôt des coûts fixes des entreprises : son soutien aux entreprises était calculé sur la base de ces coûts, tels que les loyers, les intérêts payés sur les prêts et crédits commerciaux, les frais d’électricité, d’eau… Cet aspect a finalement été intégré dans le fonds de solidarité français, avec l’ouverture d’un volet « coût fixes » en janvier 2021.

Enfin, le dispositif d’activité partielle a été plébiscité : l’Italie, la Belgique, le Danemark, la France, l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Allemagne l’ont tous mis en place, avec des modalités (taux de remplacement, plafond et durée d’indemnisation…) différentes. L’Unedic a comparé les différents dispositifs dans un tableau daté de novembre 2020 ([21]), qui montre que les critères retenus pour l’activité partielle d’urgence française sont particulièrement protecteurs de nos salariés.

Le comité Coeuré remarque une certaine hétérogénéité dans le poids des mesures d’urgence et de relance comparé au PIB : l’Italie annonce un effort porté à hauteur de 19,6 % de son PIB tandis que les mesures de l’Allemagne représentent 8,3 % du PIB. Les mesures mises en œuvre par la France s’élèvent, elles, à 9,1 % du PIB ([22]). Ces éléments agrègent cependant à la fois les mesures budgétaires et les mesures de liquidité et ne représentent pas l’effort effectif des États.

Ces éléments doivent donc être mis en perspective avec les montants décaissés par chaque pays, indiqués dans le tableau ci-dessous.

Effort budgétaire annoncé par certains pays
au soutien de leur économie en 2020

(en milliards)

 

Subventions aux TPE, PME et travailleurs indépendants
(Prêts convertibles aux EU)

en % du PIB

Activité partielle

en % du PIB

Allemagne

26,5

0,8

22

0,6

Italie

14

0,8

20

1,1

Espagne

n.c

0,4

18,4

1,5

Royaume-Uni

38,3

1,5

64,6

2,6

France

21,5

0,9

27,5

1,1

États-Unis

462

2,4

 

 

Source : rapport d’étape du comité Coeuré.

Ces comparaisons doivent être utilisées avec précaution, les périmètres de chaque dispositif étant différents d’un pays à l’autre.


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   DEUXIÈME PARTIE : UNE MISSION BUDGÉTAIRE UNIQUE RASSEMBLANT L’EFFORT DE SOUTIEN
À L’ÉCONOMIE ET À L’EMPLOI

La mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire a été créée dès la loi de finances rectificative du 23 mars 2021 (LFR 1) afin de supporter les dépenses permettant de faire face aux conséquences économiques de la crise sanitaire. Son champ comme ses moyens ont été élargis au cours de l’année (I) pour s’adapter à l’évolution des restrictions économiques (II). Finalement dotée de 70,6 milliards d’euros, elle n’a finalement donné lieu qu’à un décaissement de 41,8 milliards d’euros (III). Si le reliquat a été intégralement reporté sur l’année 2021, la gestion particulière de cette mission au caractère exceptionnel ne s’est pas toujours effectuée dans le parfait respect de l’esprit de certains principes budgétaires (IV).

I.   Le périmètre comme les ressources de la mission se sont continuellement élargis

La mission comportait à sa création, par la LFR 1, les deux programmes d’urgence de soutien à l’emploi au travers de l’activité partielle (programme 356 Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire) et de soutien aux entreprises via le fonds de solidarité (programme 357 Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire). La mission s’est ensuite enrichie de deux autres programmes :

– le programme 358 Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire a été créé par la deuxième loi de finances rectificative du 25 avril 2020 (LFR 2) pour permettre des interventions en capital de l’État dans des entreprises fragilisées par la crise ;

– le programme 360 Compensation à la sécurité sociale des allègements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire pour compenser les exonérations exceptionnelles de cotisations sociales accordées aux entreprises a été créé par la troisième loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 (LFR 3).

L’ensemble de ces programmes et des dispositifs qu’ils financent font l’objet d’une description détaillée dans la troisième partie du présent rapport.

Placée sous la responsabilité du ministre chargé des comptes publics, la mission a été dotée de moyens considérables au fur et à mesure de l’adoption des quatre lois de finances rectificatives de l’année. Au total, 70,6 milliards d’euros ont été crédités sur la mission.

Évolution des crÉdits ouverts par programme sur la mission

(en millions d’euros, AE=CP)

Programme

LFR 1

LFR 2

LFR 3

LFR 4

Ouvertures lois de finances

Décret de dépenses accidentelles

Rattachement de fonds de concours

Total

P356 Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

5 500

11 700

3 333

2 100

22 633

 

 

22 633

P357 Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

750

5 500

1 700

10 810

18 760

100

878

19 738

P358 Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire 

-

20 000

 

 

20 000

 

 

20 000

P360 Compensation à la sécurité sociale des allégements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire

 

 

3 900

4 300

8 200

 

 

8 200

Total

6 250

37 200

8 933

17 210

69 593

100

878

70 571

Source : commission des finances d’après les lois de finances rectificatives et le rapport annuel de performances.

Aux 69,6 milliards d’euros ouverts par les lois de finances rectificatives, se sont ajoutés 1 milliard d’euros au bénéfice du seul fonds de solidarité, dont 0,1 milliard d’euros provenant de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles ([23]) et 0,9 milliard d’euros rattachés par voie de concours au programme 357 provenant de la contribution au fonds de solidarité de certaines régions (0,5 milliard d’euros) et des sociétés d’assurance (0,4 milliard d’euros).

II.   Le rythme des décaissements de la mission est corrélé au degré de restrictions sanitaires

Le rythme des dépenses suit, globalement, l’évolution de la situation épidémique.

Des pics de consommations ont été atteints à l’occasion des premier et deuxième confinements, jusqu’à 7 milliards d’euros consommés en avril et en décembre. La levée partielle des restrictions sanitaires à partir du mois de mai a conduit à un reflux spectaculaire de la consommation des crédits au mois de juillet (0,9 milliard d’euros).

Les décaissements d’AE et de CP sur la mission ne traduisent pas parfaitement les dépenses au titre d’un mois donné pour deux raisons : les demandes d’aides sont souvent réalisées avec décalage. Par ailleurs, l’activité partielle et les exonérations de charges sociales donnent lieu à des avances par l’État à des tiers (ASP, Acoss et CCMSA) chargés du versement effectif aux destinataires finaux.

Évolution des ouvertures et de la consommation des crédits
sur l’ensemble de la mission en 2020


(en milliards d’euros, AE=CP)

Source : commission des finances d’après Chorus.

III.   Une exécution partielle des crédits conduisant à des reports conséquents sur 2021

La mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire n’a occasionné des dépenses qu’à hauteur de 41,8 milliards d’euros alors qu’elle a été dotée de 70,6 milliards d’euros au total.

Les autorisations d’AE et CP votées par le Parlement constituent certes un plafond de dépenses mais, conformément au principe de sincérité budgétaire, la prévision des crédits demandés au Parlement doit être la plus conforme possible aux besoins finalement consommés. L’écart entre le montant des crédits ouverts par la dernière loi de finances rectificative de l’année et l’exécution budgétaire est généralement inférieur à 1 % ([24]).

 

On constate ainsi à la lecture du graphique précédent que le Gouvernement a fait le choix de disposer d’une marge de manœuvre particulièrement conséquente tout au long de l’année. Chaque mois, après d’avril, les crédits ouverts restant disponibles se sont situés entre 25,2 milliards d’euros (octobre) et 35,8 milliards d’euros (novembre).

Exécution des crédits de la mission par programme

Programme

Crédits ouverts

Crédits consommés

Écart (montant)

Écart (%)

P356 Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

22 633

17 806

– 4 827

– 21 %

P357 Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

19 738

11 810

– 7 928

– 40 %

P358 Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire

20 000

8 304

– 11 696

– 58 %

P360 Compensation à la sécurité sociale des allégements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire

8 200

3 900

– 4 300

– 52 %

Total

70 571

41 820

28 751

41 %

Source : commission des finances d’après le rapport annuel de performance.

Plusieurs arguments ont été mis en avant pour justifier cet écart :

– l’imprévisibilité du recours à l’activité partielle et au fonds de solidarité avec des effets volumes qui ont évolué dans le temps : l’activité partielle a été plus utilisée durant le premier confinement, tandis que le fonds de solidarité est devenu le principal dispositif sollicité par les entreprises en montant lors du deuxième confinement ;

– l’élargissement des critères d’attribution des aides et leur multiplication dont les conséquences budgétaires ne pouvaient pas toujours être bien anticipées. Ainsi, l’aide au paiement des cotisations sociales, mesure inédite, a été plus sollicitée que les exonérations de cotisations sociales, pourtant connues des acteurs ;

– le décalage entre les demandes d’aide et le décaissement des crédits.

Alors qu’elle devait être temporaire et se clore à la fin de l’année, la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire a été prolongée en 2021. Cette prolongation se justifie, d’une part, pour conserver un support de financement des reliquats de dépenses dues au titre de 2020, raison pour laquelle l’ensemble des crédits non consommés en 2020, soit 28,8 milliards d’euros, ont été reportés. D’autre part, le maintien, sinon l’amplification, des restrictions sanitaires impliquent de continuer de financer directement les mesures de soutien aux entreprises, mesures qui ont d’ailleurs connu de nouvelles extensions en 2021.

IV.   Une mission exceptionnelle dont la gestion a pu s’écarter de l’esprit de certains principes budgétaires

L’exécution budgétaire 2020 de la mission, qui s’est soldée par une sous-consommation importante des crédits de l’ordre de 28,8 milliards d’euros, et les reports associés ont fait l’objet de diverses interrogations quant à leur conformité aux principes budgétaires de sincérité, d’annualité et de spécialité.

Ainsi, dans son rapport sur le budget de l’État, la Cour des comptes ([25]) émet un jugement critique sur la proportion de crédits non consommés. Outre le différentiel mentionné supra entre les crédits disponibles et consommés tout au long de l’année, la LFR 4 a ouvert, au 30 novembre 2020, 17,2 milliards d’euros sur les programmes 356 Activité partielle (+ 2,1 milliards d’euros), 357 Fonds de solidarité (+10,8 milliards d’euros) et 360 Compensation des exonérations (+ 4,3 milliards d’euros). Sur ces trois programmes, le montant des crédits restant disponibles à la fin de l’année est de 17,1 milliards d’euros soit un niveau quasiment identique aux ouvertures de la LFR 4 sur ces programmes. La sincérité de ces ouvertures est donc remise en question, la Cour y voyant « un manque de réalisme budgétaire ». La direction du budget, interrogée par les rapporteurs de la mission, avance plutôt un niveau d’ouverture prudent et évaluatif dans le contexte sanitaire du deuxième confinement après un premier épisode de couvre-feu dont la durée et l’intensité étaient difficiles à appréhender.

Par ailleurs, les crédits non consommés en 2020, 28,8 milliards d’euros en incluant le programme 358 Participations financières ont fait l’objet d’un report intégral sur l’année 2021. L’examen concomitant de la loi de finances initiale pour 2021 et de la LFR 4 fait dire à la Cour des comptes que les crédits auraient davantage dû se loger dans la mission Plan d’urgence au titre de l’année 2021 pour respecter le principe d’annualité budgétaire. Si une partie des reports a permis de financer, en 2021, des dépenses dues au titre de l’année 2020, le principe d’annualité, en particulier concernant les crédits de paiement, est fondé sur les dépenses constatées et non les dépenses rattachées à une année donnée.

Enfin, une partie des reports effectués, 6,6 milliards d’euros, a bénéficié à d’autres programmes que ceux sur lesquels les crédits avaient été initialement ouverts. En effet, par un arrêté du 18 mars 2021, 6,6 milliards d’euros ont été versés sur le programme 357 Fonds de solidarité depuis les programmes 356 Activité partielle (2,3 milliards d’euros) et 360 Compensation des exonérations (4,3 milliards d’euros). Bien que cette possibilité de reports croisés, entre « programmes poursuivant les mêmes objectifs » est rendue possible par l’article 15 de loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la Cour y voit une « entorse au principe de spécialité budgétaire ».


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   TROISIÈME PARTIE : L’EXÉCUTION DE LA MISSION
PLAN D’URGENCE

La présente partie s’attache à présenter chacun des programmes de la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire dans l’ordre de leur création.

I.   L’activité partielle ou la priorité donnée au soutien à l’emploi

Le phénomène classique de rétention d’emploi au début d’un ralentissement économique a été accentué ([26]) par l’activité partielle dans tous les pays. Cette extension massive de l’activité partielle est un enseignement tiré de l’importante récession de 2009 où l’emploi avait bénéficié d’un dispositif d’activité partielle de grande ampleur en Allemagne (Kurzarbeit) mais pas dans les autres pays conduisant à une importante hausse du chômage ([27]).

L’activité partielle d’urgence française se caractérise par une importante prise en charge par l’État (A) conduisant à une consommation de 17,8 milliards d’euros de crédits pour l’État en 2020 (B). Plus sollicité durant le premier confinement (C) qu’ensuite, l’activité partielle demeure malgré tout un instrument clé de la politique de l’emploi appelé à se maintenir en sortie de crise (D).

A.   L’activité partielle d’urgence se caractérise par une prise en charge publique massive

Inscrite dans le code du travail depuis de nombreuses années (cf. ses articles L. 5122-1 et suivants et R. 5122-1 et suivants), l’activité partielle est classiquement un dispositif d’indemnisation des périodes chômées en soutien des rémunérations salariales, préexistant à la crise sanitaire de 2020.

Compte tenu de l’ampleur du choc sur l’activité du premier confinement, le Gouvernement a choisi d’étendre la prise en charge des coûts salariaux pour les employeurs. La crise de 2008 avait montré l’intérêt de cette mesure pour éviter les effets d’hystérèse et éviter une hausse de chômage importante durant la crise qui ne se résorberait que très lentement ensuite.

Prévue par l’article 11 de la loi du 23 mars 2020 d’urgence ([28]), l’activité partielle d’urgence a fait l’objet d’une activité législative et réglementaire intense pour adapter le dispositif aux différentes situations. Le texte de référence régissant l’activité partielle d’urgence demeure à ce jour l’ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 modifiée portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle. Le rapport Coeuré comptabilise ainsi 41 lois, ordonnances ou décrets entre le 23 mars 2020 et le 26 février 2021 dont l’un des objets a été d’aménager son régime ([29]). Ces nombreuses modifications illustrent les capacités d’adaptation des pouvoirs publics et méritent à ce titre d’être saluées, mais elles complexifient la lecture des dispositifs et, a fortiori, leur évaluation.

Il est toutefois possible de distinguer deux phases, l’une restreinte au premier confinement et l’autre qui perdure depuis.

Avant la crise, les salariés étaient indemnisés par leur employeur pour chaque heure chômée à hauteur de 70 % de leur salaire brut et une indemnisation forfaitaire allant de 7,23 à 7,74 euros était versée à l’entreprise par l’État et l’Unédic.

Le dispositif d’activité partielle d’urgence, dont les modalités ont été précisées par un décret n° 2020-325 du 25 mars 2020 relatif à l’activité partielle, est plus large que le dispositif de droit commun. L’État a choisi de prendre en charge à 100 % les indemnités versées par les entreprises aux salariés placés en activité partielle, jusqu’à 4,5 fois le Smic : le salarié est indemnisé à hauteur de 70 % de son salaire brut (soit environ 84 % de son salaire net) et l’entreprise reçoit une allocation à hauteur de 100 % de l’indemnité versée (soit 70 % du salaire brut).

Pour obtenir l’aide financière, les entreprises déposent une demande d’autorisation préalable (DAP) pour un volume d’heures chômées prévisionnel, qui doit être validée par la Direccte, puis une demande d’indemnisation (DI), indiquant les heures effectivement versées aux salariés au titre de l’activité partielle.

Après le premier confinement, le régime a évolué : à compter du 1er juin 2020, l’entreprise continue de verser à l’employé 70 % de son salaire brut mais la prise en charge par l’État et l’Unédic est abaissée de 100 % à 85 %, soit 60 % du salaire brut des salariés placés en chômage partiel.

 

Pour les secteurs protégés (tourisme, hôtellerie, restauration, culture, sports, évènementiel, transports) ou qui continuent d’être soumis à des décisions administratives de fermeture, l’indemnité d’activité partielle est intégralement prise en charge par l’État et l’Unédic.

Alors que les règles de l’activité partielle devaient évoluer pour la période du 1er novembre 2020 au 31 décembre 2020 avec une baisse de l’indemnité pour les salariés et une augmentation du reste à charge pour les entreprises, le dispositif tel que résultant du premier déconfinement a été prorogé à plusieurs reprises jusqu’en mai 2021.

Sur l’ensemble de cette période, les règles de prise en charge sont maintenues à l’identique pour les secteurs protégés. Le salarié bénéficie d’une indemnité de 84 % de son salaire net (et de 100 % au niveau du SMIC) et le reste à charge est nul pour l’employeur.

À partir du mois de septembre, l’indemnité sera abaissée à 72 %. Le reste à charge pour l’employeur passera à 25 % en août puis 40 % en septembre.

Pour les entreprises « du droit commun », hors secteurs protégés, l’indemnité salariée restera à 84 % en mai et juin, puis descendra à 72 % de juillet à septembre. Le reste à charge pour l’employeur sera de 15 % en mai, 25 % en juin, puis de 40 % de juillet à septembre.

B.   Près de la moitié des crédits de la mission ont été destinés au soutien à l’emploi

Financé au deux-tiers par le programme 356 Activité partielle de la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire et pour un tiers par l’Unédic, le dispositif d’activité partielle d’urgence a remplacé au 1er mars 2020, le dispositif de droit commun financé par le programme 103 de la mission Travail et emploi. Pour rappel, le dispositif de droit commun d’activité partielle avait coûté 55 millions d’euros en 2019.

Au titre de l’année 2020, 22,6 milliards d’euros d’AE et de CP ont été ouverts au bénéfice du programme 356 Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire. Le programme a été exécuté à hauteur de 17,8 milliards d’euros. L’Unédic a déboursé quant à elle 8,9 milliards d’euros, soit un coût total de l’activité partielle de 26,7 milliards d’euros en 2020.

Ce montant correspond aux crédits décaissés en 2020 et versés à l’Agence de services et de paiements (ASP) ainsi qu’à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).

Ces crédits ont été destinés :

– à la compensation des indemnités d’activité partielle dues par les particuliers employeurs pour un montant de 0,3 milliard d’euros. L’État a reversé ces crédits à l’ACOSS tandis que les indemnités ont été prises en charge par les Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) ;

– les demandes d’indemnisation de l’activité partielle réalisées par des entreprises ont mobilisé 17,5 milliards d’euros. L’ASP a bénéficié de ces crédits et a assuré le versement aux entreprises.

Ouvertures et exécution des crédits de l’activité partielle en 2020

(en milliards d’euros, AE=CP)

Source : rapport annuel de performance et arrêtés de reports de crédits du 24 décembre 2020 et des 17 et 18 mars 2021.

La sous exécution des crédits tient à un recours à l’activité partielle moins important en fin d’année 2020 qu’anticipé. L’évaluation des besoins associés à l’activité partielle a reposé sur des modèles développés par les ministères du travail et de l’économie et de finances prenant en compte essentiellement la baisse du PIB. En effet, bien que la quatrième LFR ait maintenu une estimation de chute du PIB de 11 % en 2020, comme la LFR 3, le modèle de prévision budgétaire prévoyait une nette augmentation du coût global de l’activité partielle d’octobre à décembre 2020, compte tenu des nouvelles mesures de restriction annoncées pour faire face à la deuxième vague épidémique et de la prolongation des barèmes exceptionnels.

Le coût total de l’activité partielle était estimé à 33,8 milliards d’euros pour 2020, correspondant à un besoin de financement de 22,6 milliards d’euros par l’État. La consommation de crédits au titre de l’activité partielle était estimée à 2,6 milliards d’euros en octobre, 4,6 milliards d’euros en novembre et 4,6 milliards d’euros en décembre. Cette prévision a conduit à ouvrir 2,1 milliards d’euros supplémentaires pour financer le dispositif ([30]).

C.   Un recours massif lors du premier confinement mais relativement moindre par la suite

La crise sanitaire a conduit à un changement d’échelle du dispositif d’activité partielle. De 2015 à 2019, entre 25 000 et 50 000 salariés étaient placés en activité partielle en moyenne chaque mois.

D’après l’enquête Acemo-Covid de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), depuis le début de la crise sanitaire en mars 2020, le taux de recours à l’activité partielle en équivalent temps plein (ETP) aurait connu son point haut – 29 % des salariés du privé – en avril 2020, puis aurait baissé progressivement pour atteindre un plancher à 2 % en septembre 2020. Suite au deuxième confinement à l’automne, le taux de recours au dispositif aurait enregistré un rebond à 8 %, avant de connaître une légère diminution, pour atteindre un plateau à 6 % début 2021.

Dit autrement, début 2021, 6 % des heures rémunérées de l’emploi salarié privé sont en réalité chômées, ce qui représente environ 4 % de la population active. Au total, en cumulé depuis mars 2020, 2,8 milliards d’heures (dont 164 millions en février 2021) auraient été indemnisées pour 29,8 milliards d’euros d’allocations versées.

Effectifs concernés et montants indemnisés au titre de l’activité partielle sur les mois de mars 2020 à février 2021

Source : France Stratégie, à partir de ASP-DGEFP-Dares – Extraction du SI APART du 22 mars 2021, s’arrêtant aux données du 23 mars 2021 ; enquêtes Acemo-Covid (Dares) ; effectifs salariés privé (Acoss et DADS 2016).

 

Ce changement de paradigme de l’activité partielle entraîne un rapprochement entre le profil des salariés placés dans ce dispositif et celui de l’ensemble des salariés du privé. Alors qu’avant 2020, l’activité partielle concernait majoritairement des hommes, plutôt âgés, ouvriers et exerçant dans le secteur industriel, les bénéficiaires de l’activité partielle sont désormais plus représentatifs de l’ensemble des salariés du privé. À titre d’illustration, la part des femmes parmi les personnes en activité partielle augmente nettement, passant de 26 % en moyenne entre 2015 et 2019 à 45 % environ suite à la crise, rejoignant ainsi celle observée sur l’emploi salarié privé ([31]).

Une vague de chômage massive a été sans doute empêchée grâce à ce recours important à l’activité partielle. D’après les données fournies par le délégué général à l’emploi et à la formation professionnelle, la part des entreprises ayant procédé à des licenciements économiques tout en ayant bénéficié de l’activité partielle est très faible. Entre juin 2020 et mars 2021, 744 ont mis en place un PSE bien qu’ayant bénéficié de l’activité partielle, ce qui signifie que 0,07 % des établissements bénéficiaires de l’activité partielle ont mis en place un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

Même si l’on considère l’ensemble des entreprises ayant procédé à des licenciements économiques entre juin 2020 et mars 2021, qu’elles aient conduit un PSE ou pas (licenciements de moins de 10 salariés, entreprises de moins de 50 salariés), on aboutit à un taux de 0,5 % des entreprises ayant procédé à des licenciements économiques tout en ayant bénéficié de l’activité partielle.

Par ailleurs, il faut noter que, pour un nombre important d’entreprises ayant conduit des restructurations, l’octroi de l’allocation d’activité partielle a permis de limiter le nombre de licenciements économiques. On peut à cet égard noter qu’un certain nombre d’entreprises ayant conduit un PSE ont fait rapidement le choix de s’engager dans l’activité partielle de longue durée, ce qui les a amenées à conduire des négociations en vue de trouver un équilibre acceptable socialement entre suppressions d’emploi inévitables et engagement de maintien de l’emploi pour le reste des salariés.

D.   L’activité partielle, nouvel outil pérenne des politiques de l’emploi ?

L’ampleur prise par l’activité partielle et les transformations sur l’emploi induites par la crise ont conduit à une réflexion sur l’utilisation de cet instrument en sortie de crise.

1.   Des formes d’activité partielle subsisteront après la crise

Aux côtés de l’activité partielle de droit commun préexistant à la crise, la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, précisé par un décret n° 2020-926 du 28 juillet 2020, instaure un nouveau dispositif spécifique d’activité partielle de longue durée (APLD).

D’une durée de 6 mois renouvelables jusqu’à 24 mois, l’APLD assure un taux de prise en charge de 85 % par l’État et l’Unédic de l’indemnité versée au salarié. Au préalable, un accord d’entreprise ou de branche sur l’activité partielle et l’emploi doit avoir été validé par l’État. Par ailleurs, la part d’heures chômées par salarié ne peut excéder 40 % du temps de travail, à la différence du dispositif exceptionnel d’urgence qui permet d’aller au-delà et jusqu’à l’intégralité du temps de travail.

Au moment du vote de la loi de finances pour 2021, il avait été envisagé que l’activité partielle d’urgence s’éteindrait progressivement au profit de ces deux dispositifs d’activité partielle : l’activité partielle de droit commun et l’activité partielle de longue durée, financés à hauteur de 4,4 milliards d’euros par le programme 364 Cohésion de la mission Plan de relance.

La poursuite des restrictions sanitaires n’a toutefois pas permis à ces deux dispositifs de prendre effectivement le relais entraînant, d’après le Gouvernement, une consommation des crédits au titre du seul dispositif d’activité partielle de longue durée de seulement 200 millions d’euros depuis le début de l’année.

Aucune consommation n’est à constater pour le dispositif d’activité partielle de droit commun, car celui-ci ne démarrera qu’au 1er juillet pour les secteurs non protégés et au 1er septembre pour les autres secteurs.

2.   La poursuite de l’activité partielle d’urgence en 2021

Le durcissement des mesures sanitaires depuis le début de l’année 2021 a conduit à faire perdurer le dispositif d’activité partielle d’urgence et à maintenir un reste à charge nul jusqu’à la fin du mois de juin pour les secteurs les plus atteints par la crise. En plus de la mobilisation des crédits disponibles au titre du programme 356, le Gouvernement indique avoir imputé une partie du coût de l’activité partielle d’urgence sur le programme 364 Cohésion de la mission Plan de relance, à hauteur de 3,4 milliards d’euros à fin mai.

À partir du mois de juin, le dispositif d’activité partielle d’urgence est adapté ([32]) à l’ouverture progressive de l’ensemble des activités économiques. Les règles de prise en charge de l’activité partielle :

– sont maintenues à l’identique jusqu’à la fin du mois d’août pour les secteurs protégés. Le salarié bénéficie d’une indemnité de 84 % de son salaire net (et de 100 % au niveau du SMIC) et le reste à charge est nul pour l’employeur. À partir du mois de septembre, l’indemnité sera abaissée à 72 %. Le reste à charge pour l’employeur passera à 15 % en juillet, 25 % en août puis 40 % à partir de septembre ;

– pour les entreprises du droit commun, hors secteurs protégés, l’indemnité salariée restera à 84 % en mai et juin, puis descendra à 72 % de juillet à septembre. Le reste à charge pour l’employeur sera de 15 % en mai, 25 % en juin, puis de 40 % à partir de juillet.

Le projet de loi de finances rectificative n° 4215 pour 2021, déposé le 2 juin 2021, propose une ouverture de 2,2 milliards d’euros supplémentaires sur le programme 356 pour continuer d’assurer le financement de l’activité partielle.  

3.   Les aides associées à l’activité partielle

Deux dispositions prévues par un décret n° 2020-1785 du 30 décembre 2020 font l’objet d’un financement en 2021 par le programme 356 Prise en charge du chômage partiel et financement des aides d’urgence aux employeurs et aux actifs précaires à la suite de la crise sanitaire :

– une aide exceptionnelle et non reconductible prenant en charge l’équivalent de dix jours de congés payés est octroyée, sous certaines conditions, aux entreprises les plus touchées par les effets de la crise sanitaire. Le coût de cette mesure est évalué à 200 millions d’euros ([33]) ;

– une prime exceptionnelle de l’État est versée à destination de certains demandeurs d’emploi affectés – les « permittents » – par les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire. Cette prime permet aux demandeurs d’emploi saisonniers, qui avaient travaillé plus de 60 % du temps en 2019, de recevoir une aide financière leur garantissant un revenu mensuel de 900 euros pour les mois de novembre 2020 à février 2021. La prolongation de cette prime exceptionnelle pour les mois de mars à mai 2021 a été décidée par un décret n° 2021-222 du 26 février 2021, pour un coût total du dispositif estimé à 1,5 milliard d’euros.

II.   Le fonds de solidarité : un outil indispensable dont les règles d’éligibilité ont beaucoup évolué

Le fonds de solidarité a été créé par l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. Il était initialement institué pour une période de trois mois.

Mis en place dès le début du premier confinement, le fonds de solidarité conçu comme un filet de sécurité pour les petites entreprises a progressivement évolué vers une logique de compensation des coûts fixes (A) entraînant un coût sans cesse plus important pour ce dispositif (B) devenu central dans le soutien aux entreprises (C).

 

 

A.   L’Évolution des rÈgles d’ÉligibilitÉ au premier volet du fonds de solidaritÉ

Le fonds de solidarité est constitué de deux volets. Le premier vise un nombre important d’entreprises et a vu ses conditions d’éligibilité évoluer au fil de la crise sanitaire. Le second n’est accessible qu’aux bénéficiaires du premier volet : instruit par les régions, il permet d’apporter une aide complémentaire aux entreprises qui emploient au moins un salarié. Une entreprise ne peut bénéficier qu’une seule fois du second volet. Le montant de l’aide est modulé en fonction du chiffre d’affaires du dernier exercice clos de l’entreprise. Ce volet a été supprimé en octobre, excepté pour les discothèques. 260 millions d’euros ont été versés au titre du second volet.

1.   Pendant la période du premier confinement

Le fonds était initialement ouvert aux entreprises ayant fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public entre le 1er mars et le 31 mars 2020 ou ayant subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % sur la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020. Les entreprises éligibles étaient celles ayant un effectif inférieur ou égal à 10 salariés et un chiffre d’affaires inférieur à un million d’euros. Le bénéfice imposable de l’entreprise ne devait pas excéder 60 000 euros au titre du dernier exercice clos. Le montant de l’aide, calculé pour couvrir la perte de chiffre d’affaires, était plafonné à 1 500 euros par mois.

L’article 3 de l’ordonnance du 25 mars précitée précise que le champ d’application du dispositif, les conditions d’éligibilité et d’attribution des aides et leur montant seront définis par décret. C’est le décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation qui établit ces différents éléments.

2.   Pendant la sortie progressive du premier confinement

Les critères de la taille des entreprises et de leur chiffre d’affaires ont été modifiés par l’article 7 du décret n° 2020-757 du 20 juin 2020 modifiant le décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 précité pour deux catégories d’entreprises :

– les entreprises dont l’activité principale relève d’un secteur mentionné dans l’annexe 1 du décret, parmi lesquels la restauration de type rapide, les arts du spectacle vivant et les agences de voyages (liste S1) ;

– les entreprises qui ont subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 80 % entre le 15 mars et le 15 mai et dont l’activité principale relève d’un secteur mentionné dans l’annexe 2 du décret, parmi lesquels le commerce de gros de boissons et les stations-service (liste S1 bis). Les secteurs de la liste S1 bis sont des secteurs dont l’activité est fortement dépendante ou liée à celle des secteurs figurant dans la liste S1.

Pour les entreprises de ces deux listes, le seuil de dix salariés est relevé à vingt salariés et le seuil de chiffre d’affaires fixé à un million d’euros est relevé à deux millions d’euros. Ces entreprises ont pu bénéficier d’une aide du fonds de solidarité à compter du mois de mai au titre de ces nouvelles conditions. Le montant de l’aide mensuelle est inchangé.

La liste des secteurs inscrits évoluera au fil des mois afin qu’elle corresponde aux secteurs touchés par les diverses restrictions sanitaires.

Pour les entreprises des autres secteurs, les critères initiaux d’éligibilité sont demeurés les mêmes.

Le décret n° 2020-1048 du 14 août 2020 fait évoluer les règles pour toutes les aides attribuées par le fonds de solidarité : à partir du mois de juillet, seules les entreprises appartenant aux secteurs des listes S1 et S1 bis peuvent continuer à en bénéficier. Les seuils de vingt salariés et de deux millions d’euros de chiffre d’affaires sont maintenus, ainsi que celui d’un bénéfice imposable qui n’excède pas 60 000 euros au titre du dernier exercice clos. Le montant de l’aide mensuelle est également stable.

3.   Lors de l’entrée en vigueur du couvre-feu dans certains territoires

Le décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire prévoit de nouvelles restrictions sanitaires. L’article 51 autorise ainsi le préfet de département à interdire tout déplacement entre 21 heures et 6 heures du matin, tout en prévoyant certaines exceptions.

Pour les pertes de chiffre d’affaires du mois d’octobre, trois cas de figure sont ainsi prévus, afin d’adapter l’aide aux nouvelles contraintes. Certaines entreprises pouvaient prétendre à plusieurs aides, notamment celles des listes S1 et S1 bis : elles ne sont pas cumulables, et l’entreprise bénéficiera de la plus favorable.

Les entreprises de moins de cinquante salariés ayant fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public entre le 25 septembre et le 31 octobre 2020 bénéficient d’une subvention pour compenser leur perte de chiffre d’affaires quel que soit le pourcentage de cette perte.

La subvention est fixée au montant de leur perte de chiffre d’affaires dans la limite de 333 euros par jour d’interdiction d’accueil du public. Aucun critère relatif au niveau du bénéfice imposable n’est prévu.

Cette aide est cumulable avec l’aide du fonds de solidarité au titre de la perte d’activité du mois de septembre. Ce n’est pas le cas pour l’aide au titre de la perte d’activité d’octobre.

Les entreprises situées sur les territoires concernés par le couvre-feu, dont l’effectif est inférieur à cinquante salariés et qui ont subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 %, sont éligibles au fonds de solidarité.

L’aide financière est différenciée : pour les entreprises des listes S1 et S1 bis, le plafond de la subvention, égal au montant de la perte de chiffre d’affaires, est fixé à 10 000 euros mensuels. Pour les autres entreprises, elle demeure fixée à 1 500 euros mensuels.

Les entreprises de moins de cinquante salariés appartenant aux listes S1 ou S1 bis et qui ont subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % sur le mois d’octobre sont éligibles au fonds de solidarité.

L’aide financière est différenciée selon le niveau de perte de chiffre d’affaires :

– si celle-ci est inférieure à 70 %, le montant maximal de l’aide mensuelle est fixé à 1 500 euros ;

– si celle-ci est supérieure ou égale à 70 %, le montant maximal de l’aide mensuelle est fixé à 10 000 euros, sans que le montant de l’aide puisse excéder 60 % du chiffre d’affaires de l’entreprise.

4.   Pendant le deuxième confinement

Le décret n° 2020-1310 du 29 octobre prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire instaure un deuxième confinement sur le territoire national en interdisant tout déplacement de personne sauf exceptions listées à l’article 4 du décret.

Les modalités d’éligibilité au fonds de solidarité sont une nouvelle fois adaptées.

Pour les entreprises de moins de cinquante salariés, qui soit subissent une interdiction d’accueil du public soit appartiennent à la liste S1 et ont subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 %, le montant de l’aide mensuelle est égal au montant de la perte de chiffre d’affaires, dans la limite de 10 000 euros.

Pour les entreprises appartenant à la liste S1 bis, le montant de l’aide mensuelle s’établit à 80 % de la perte de chiffre d’affaires, dans la limite de 10 000 euros.

Pour les autres entreprises, le montant de l’aide mensuelle est plafonné à 1 500 euros.

5.   Depuis la sortie du deuxième confinement et le maintien d’un couvre-feu

Alors que le confinement s’est terminé le 15 décembre, un couvre-feu reste en vigueur. Les mesures d’aides ont été une nouvelle fois adaptées pour le mois de décembre.

Deux catégories sont distinguées en fonction du critère de taille.

– Pour les entreprises ayant fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public et pour les entreprises appartenant à la liste S1 et ayant perdu au moins 50 % de leur chiffre d’affaires, aucune condition de taille n’est appliquée. L’aide versée est limitée à 200 000 euros au niveau du groupe.

Les entreprises ayant fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public bénéficient d’une aide égale à la perte de chiffre d’affaires dans une limite de 10 000 euros ou de 20 % du chiffre d’affaires de référence. Il est souvent référé à cette alternative comme « le droit d’option » de l’entreprise. La direction générale des finances publiques accorde l’aide la plus favorable à l’entreprise bénéficiaire.

Pour les entreprises appartenant à la liste S1 et ayant perdu au moins 50 % de leur chiffre d’affaires, le montant de l’aide est proportionné à cette perte : si celle-ci est inférieure à 70 %, le montant de l’aide est équivalent à cette perte avec un plafond de 10 000 euros. L’entreprise peut aussi se voir accorder 15 % de son chiffre d’affaires si ce calcul est plus favorable. Si la perte de chiffre d’affaires est supérieure ou égale à 70 %, soit la perte est indemnisée dans la limite de 10 000 euros, soit l’entreprise se voit accorder une aide équivalente à 20 % de son chiffre d’affaires.

– Pour les entreprises ayant perdu au moins 50 % de leur chiffre d’affaires et pour les entreprises appartenant à la liste S1 bis, seules celles ayant moins de cinquante salariés sont éligibles.

Les critères pour appartenir à la liste S1 bis évoluent : pour être éligible, l’entreprise doit appartenir à un des secteurs mentionnés et avoir subi une perte de 80 % de son chiffre d’affaires soit pendant le premier confinement (du 15 mars au 15 mai) soit pendant le deuxième confinement (du 1er au 30 novembre).

Les entreprises appartenant à la liste S1 bis bénéficient d’une aide mensuelle à hauteur de 80 % de leur perte de chiffre d’affaires, dans la limite de 10 000 euros.

Les entreprises ayant perdu au moins 50 % de leur chiffre d’affaires peuvent bénéficier d’une aide mensuelle de 1 500 euros.

Le critère de taille a été adapté pour les entreprises appartenant à la liste S1 bis, ayant subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % sur le mois de décembre et remplissant une des trois conditions listées ci-dessous :

– avoir subi une perte de 80 % de son chiffre d’affaires pendant le premier confinement (du 15 mars au 15 mai) pour les entreprises créées avant le 1er mars 2020 ;

– avoir subi une perte de 80 % de son chiffre d’affaires pendant le deuxième confinement (du 1er au 30 novembre) ;

– avoir subi une perte de chiffre d’affaires annuel entre 2019 et 2020 d’au moins 10 % pour les entreprises créées avant le 1er décembre 2019.

Ces entreprises étaient éligibles à une subvention égale à 80 % de leur perte de chiffre d’affaires dans la limite de 10 000 euros, si leur perte de chiffre était inférieure à 70 %. Pour celles dont la perte était supérieure à 70 %, une alternative était possible entre une subvention égale à 20 % du chiffre d’affaires de référence ou 80 % de leur chiffre d’affaires dans la limite de 10 000 euros.

Pour les entreprises de 50 salariés déjà éligibles, le montant de cette deuxième aide est diminué du montant de l’aide déjà versée.

Il faut souligner que des aides spécifiques ont été mises en place pour les commerces situés dans des stations de ski, qui ont moins de cinquante salariés et qui ont subi une perte de chiffre d’affaires de plus de 50 %. Les communes concernées sont énumérées à l’annexe 3 du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 précité.

B.   L’évolution des critères se reflète dans la consommation du fonds de solidarité

1.   Une consommation proportionnée au niveau des restrictions sanitaires en 2020

L’évolution de la situation sanitaire a impacté les montants des aides versées aux entreprises par le fonds de solidarité, comme l’illustre le graphique ci-dessous.

Consommation des crédits du fonds de solidarité avec les montants dépensés chaque mois, et les montants dépensés au titre de chaque mois

(en milliards d’euros)

Source : contribution de la direction du budget aux travaux des rapporteurs.

L’ouverture progressive du fonds de solidarité à des entreprises plus grandes, ainsi que le rehaussement du plafond des aides, ont engendré une consommation plus élevée lors du deuxième confinement (4,9 milliards d’euros versés au titre de novembre 2020) que lors du premier confinement (2 milliards d’euros versés au titre d’avril 2020), malgré des restrictions sanitaires moins sévères.

Ainsi, contrairement à l’activité partielle dont les pics de consommations ont été observés au premier confinement, les entreprises ont davantage recouru, en montant, aux aides du fonds de solidarité à l’occasion du deuxième confinement.

Début mars 2021, le montant total des dépenses rattachées à 2020 s’élevait ainsi à 15,3 milliards d’euros. Ce chiffre doit être distingué des 11,8 milliards d’euros consommés sur l’année 2020 : les entreprises ayant plusieurs mois pour formuler leur demande d’aide, certaines des dépenses rattachées à l’exercice 2020 ont été décaissées en 2021.

2.   L’installation de la crise sanitaire dans la durée a nécessité d’abonder le fonds de solidarité à plusieurs reprises

Les lois de finances rectificatives successives ont ouvert des crédits supplémentaires pour financer les adaptations du dispositif à une crise sanitaire qui s’est finalement inscrite dans la durée.

La loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 a ouvert 750 millions d’euros sur le programme Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire.

À ces crédits devaient s’ajouter 250 millions d’euros apportés par les régions. Le montant total du fonds de solidarité dans sa première version s’établissait ainsi à 1 milliard d’euros. Dans un second temps, la Fédération française de l’Assurance a également abondé le fonds à hauteur de 400 millions d’euros.

Cette première enveloppe était calibrée pour soutenir les plus petites entreprises et sur un temps limité : l’aide était à ce moment-là plafonnée à 1 500 euros par mois.

Le maintien des restrictions sanitaires a nécessité l’ouverture de crédits supplémentaires pour abonder le fonds de solidarité. À la date du 14 avril, 684 millions d’euros avaient été consommés, alors que les crédits disponibles s’établissaient à 853 millions d’euros ([34]).

La loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 (LFR 2) a ainsi ouvert 5,5 milliards d’euros de crédits sur le programme Fonds de solidarité. Le principe d’un doublement de la participation des régions au fonds a entre-temps été acté.

Après la promulgation de la LFR 2, le fonds de solidarité affichait donc 6,25 milliards d’euros de crédits ouverts par l’État, auxquels s’ajoutaient 775 millions d’euros de contributions promises par les régions et les assureurs. Au 16 juin 2020, le fonds de solidarité avait déjà versé 3,5 milliards d’euros, et au 29 juin 2020, les assureurs avaient versé 390 millions d’euros sur les 400 millions d’euros prévus, tandis que les régions avaient versé 379,39 millions d’euros sur les 500 millions d’euros prévus ([35]).

La loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 (LFR 3) a ouvert 1,7 milliard d’euros supplémentaires sur le programme Fonds de solidarité.

Cette ouverture de crédits, plus limitée que celle opérée en LFR 2, s’appuyait sur la perspective du déconfinement du pays le 11 mai et l’allègement des restrictions sanitaires. À l’exception notable des discothèques, les entreprises ont pu de nouveau accueillir du public et les besoins de crédits étaient donc moins importants.

Enfin, la loi de finances n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020 (LFR 4) a ouvert 10,81 milliards d’euros sur le programme Fonds de solidarité. Cette ouverture importante devait garantir le financement des demandes au titre des mois de novembre et décembre.

Évolution des ouvertures de crédits au titre du fonds de solidarité

(en millions d’euros, AE=CP)

Source : lois de finances rectificatives pour 2020.

Au total, c’est bien 18,8 milliards d’euros qui ont été ouverts sur le fonds de solidarité en 2020, auxquels s’ajoutent 878 millions d’euros de contributions extérieures (régions, assureurs), soit 19,7 milliards d’euros disponibles.

3.   Une prévision prudente en LFR 4 a conduit à des reports importants sur l’année 2021

Sur ces 19,7 milliards d’euros disponibles, tous n’ont pas été consommés en 2020 : selon les documents budgétaires, 11,8 milliards d’euros ont été décaissés, soit 59 % des crédits. Cette sous-consommation a entraîné le report de 7,9 milliards d’euros en 2021.

 

Cette sous-consommation des crédits est déplorée par la Cour des comptes, qui estime que le montant de l’ouverture de crédits en LFR 4 était « surdimensionné » ([36]) par rapport aux prévisions de dépenses découlant des informations disponibles.

La directrice du budget, Mme Verdier, a insisté lors de son audition par les rapporteurs spéciaux sur le contexte très incertain dans lequel avaient été décidées les ouvertures de crédits lors de l’élaboration du quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020.

4.   Le fonds de solidarité demeure un outil de soutien massif aux entreprises en 2021

Si aucun crédit n’avait été ouvert sur la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire lors du dépôt de la loi de finances initiale à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a proposé de largement abonder la mission en nouvelle lecture. 5,6 milliards d’euros ont ainsi été ouverts sur le fonds de solidarité par la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

À ces crédits s’ajoutent non seulement les crédits du fonds de solidarité reportés de l’année 2020 (7,9 milliards d’euros), mais également des crédits d’autres programmes reportés sur le programme du fonds de solidarité. En effet, par un arrêté du 18 mars 2021 portant report de crédits ([37]), le ministre de l’économie, des finances et de la relance a annulé 2,3 milliards d’euros des crédits de l’activité partielle (programme 356) et 4,3 milliards d’euros des crédits de compensation à la sécurité sociale des allègements de prélèvements (programme 360). Ces 6,6 milliards de crédits ont été reportés sur le fonds de solidarité.

Enfin, le Gouvernement, dans le décret n° 2021-620 du 19 mai 2021 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance, a annulé 7,2 milliards d’euros sur le programme 358, Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire pour ouvrir 6,7 milliards d’euros sur le programme du fonds de solidarité.

Au moment de la rédaction de ce rapport, c’est donc 26,8 milliards d’euros qui ont été rendus disponibles sur le fonds de solidarité en 2021. Au 28 mai 2021, selon les données Chorus, 16,8 milliards d’euros avaient été décaissés.

abondements du fonds de solidarité en 2021

(en millions d’euros)

 

LFI

Reports 2020

Reports croisés

Décret d’avance

Total 2021

Décaissés au 28 mai 2021

Programme 357

5 600

7 900

6 600

6 700

26 800

18 800

Source : commission des finances d’après la loi de finances initiale pour 2020, les arrêtés de report du 27 janvier et du 18 mars 2021, le décret d’avance du 19 mai 2021.

Le projet de loi de finances rectificative n° 4215 pour 2021, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 2 juin 2021, propose d’ouvrir 3,6 milliards d’euros supplémentaires, ce qui porterait le total des crédits ouverts sur le fonds de solidarité à 30,4 milliards d’euros.  

Cette consommation s’explique par de nouvelles modalités de prise en charge, qui s’ajoutent au volet habituel dont les évolutions ont été décrites supra.

● L’aide aux coûts fixes

L’aide « coûts fixes », annoncée le 14 janvier par Bruno Le Maire, a été créée par le décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 instituant une aide visant à compenser les coûts fixes non couverts des entreprises dont l’activité est particulièrement affectée par l’épidémie de covid-19.

Pour être éligibles, les entreprises doivent respecter plusieurs critères :

– une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % sur la période dite éligible (période des deux mois au titre desquels la demande est formulée) ;

– un chiffre d’affaires mensuel supérieur à 1 million d’euros pour au moins un des deux mois de la période éligible, ou avoir réalisé en 2019 un chiffre d’affaires annuel supérieur à douze millions d’euros.

La condition de chiffre d’affaires ne s’applique pas aux entreprises de certains secteurs, dont les salles de sport, les parcs d’attractions et les entreprises d’hôtellerie-restauration situées en montagne.

Les entreprises éligibles peuvent ainsi recevoir tous les deux mois, pendant le premier semestre 2021, une aide dont le montant correspond à 70 % des pertes d’exploitation sur la période des deux mois éligibles. Les aides perçues au premier semestre ne peuvent excéder 10 millions d’euros.

Le coût du dispositif est estimé à 300 millions d’euros par mois, soit 1,8 milliard d’euros sur le premier semestre. Le régime a été autorisé par la Commission européenne le 9 mars 2021. Dans sa notification, la France a estimé le budget du régime à 2 milliards d’euros.

 

 

 L’aide pour les remontées mécaniques

L’aide pour les remontées mécaniques a été créée par le décret n° 2021-311 du 24 mars 2021 instituant une aide en faveur des exploitants de remontées mécaniques dont l’activité est particulièrement affectée par l’épidémie de covid-19. Une subvention, établie à un taux de 49 % du chiffre d’affaires annuel, sera versée aux domaines skiables. L’aide sera calculée sur la période de décembre 2020 au 30 avril 2021 et n’est pas plafonnée. Son coût est estimé à 700 millions d’euros.

● L’aide à la couverture des stocks

Enfin, une aide ciblée sur les commerces de détail spécialisés dans l’habillement, la chaussure, la maroquinerie et les articles de voyage a été créée par le décret n° 2021-594 du 14 mai 2021 instituant une aide relative aux stocks de certains commerces.

Pour être éligibles, les commerces doivent avoir perçu une aide du fonds de solidarité en octobre. Le montant de l’aide est fixé 80 % de l’aide touchée au titre du mois de novembre 2020.

Cette aide doit atténuer la problématique des stocks des commerçants, qui ont pu difficilement les écouler depuis janvier. Le coût de la mesure est estimé à 200 millions d’euros.

C.   Un dispositif indispensable pour soutenir les entreprises

Les documents budgétaires chiffrent le nombre de bénéficiaires du fonds de solidarité à 1 897 200 en 2020.

Le fonds de solidarité a d’abord été ciblé sur les petites entreprises, selon une logique plutôt universelle de l’aide : l’aide était versée avec très peu de contrôles a priori et les conditions étaient peu nombreuses. Cela explique que fin mai, le taux de rejet s’élevait à 1,72 % des demandes ([38]). La mise en place progressive de filtres automatiques a conduit à une augmentation de ce taux de rejet, qui était de 8,8 % au 30 septembre.

L’évolution des restrictions sanitaires, qui se sont concentrées sur certains secteurs, a nécessité de revoir ce positionnement. Après la sortie du premier confinement, les critères d’éligibilité ont été affinés, avec des conditions différentes de chiffre d’affaires selon les secteurs concernés, par exemple. Ensuite, en octobre, le deuxième confinement a entraîné le rehaussement du plafond des aides à hauteur de 10 000 euros. Enfin, en décembre, le fonds de solidarité a été ouvert aux entreprises sans condition de taille, et le plafond a été significativement augmenté dans certains cas, pour atteindre 200 000 euros.

Cela a entraîné des contrôles supplémentaires : les dossiers de demande d’aide supérieure à 30 000 euros sont examinés par une équipe dédiée, ce qui entraîne des délais plus importants mais garantit une meilleure allocation des ressources publiques.

Ce basculement était nécessaire pour que le fonds de solidarité demeure un outil pertinent de soutien aux entreprises. La Cour des comptes, dans son rapport annuel ([39]),reconnaît le succès d’un dispositif simple et efficace, qui a permis de limiter les effets de la crise grâce à la forte mobilisation de toutes les parties prenantes. Selon elle, « la clarté des critères d’éligibilité aux aides mensuelles du volet 1 et la simplicité des démarches ont permis à la majorité des TPE de formuler leur demande sans avoir besoin de contacter les administrations ». Elle alerte cependant les risques de cumul d’aides et de fraude qui sont attachés au changement de nature du fonds de solidarité.

Pour la Confédération des PME ([40]), la différenciation des approches selon les temps de la crise a été essentielle pour garantir un accompagnement proportionné aux difficultés des entreprises. Elle souligne qu’il importe que « les aides de l’État ciblent davantage les secteurs les plus fragilisés » et considère qu’au regard de ce critère, le calibrage du fonds est plutôt le bon.

En témoigne l’importance des secteurs les plus affectés par les restrictions sanitaires : selon les données exposées dans le rapport d’étape du comité Coeuré ([41]), le secteur de l’hébergement-restauration a bénéficié d’un tiers des aides versées depuis mars 2020 et de près de deux tiers des aides versées en février 2021 ([42])

Malgré les différents élargissements, les entreprises de moins de dix salariés restent les principales bénéficiaires du fonds : ainsi, de mars 2020 à février 2021, 90,4 % des montants versés par le fonds l’ont été à des entreprises de moins de 10 salariés ([43])

III.   Renforcement exceptionnel des Participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire

Le programme 358 Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire a été créé par la loi n° 2020‑473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

Ces crédits sont destinés à alimenter le compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État au fur et à mesure des prises de participation décidées par l’État. Ils ne peuvent être utilisés pour financer d’autres missions du budget général. Le programme, initialement abondé à hauteur de 20 milliards d’euros, n’a donné lieu finalement qu’à une consommation de 8,3 milliards d’euros, ce qui témoigne sans doute de l’efficacité des autres dispositifs d’aide proposés aux entreprises (A). Toutefois, un recours important à ce programme en 2021 n’est pas à exclure (B).

A.   Une sous-consommation Signe d’une résistance des entreprises françaises

Selon l’analyse par programme des modifications de crédits proposées par le PLFR 2, l’objectif de ce nouveau programme est de « renforcer les ressources des entreprises présentant un caractère stratégique jugées vulnérables et dont la situation pourrait s’avérer critique en raison des conséquences économiques de la crise sanitaire résultant du Covid-19 » ([44]). Ce renforcement s’effectue sous la forme de soutien en fonds propres, en quasi-fonds propres et titres de créances.

L’octroi de ces crédits a été conditionné par l’article 22 de la LFR 2, qui prévoit que l’Agence des participations de l’État (APE) « veille à ce que ces entreprises intègrent pleinement et de manière exemplaire les objectifs de responsabilité sociale, sociétale et environnementale dans leur stratégie, notamment en matière de lutte contre le changement climatique ». Cette disposition vise à ce que l’APE ait un droit de regard sur la stratégie de l’entreprise en amont de la prise de participation et puisse suivre les engagements pris par l’entreprise en la matière.

Le même article 22 prévoyait également, douze mois après l’adoption de la loi, la remise d’un rapport détaillant le bon usage des ressources publiques et le suivi des entreprises ayant bénéficié d’un renforcement en fonds propres. Il a été transmis le 31 mai 2021 au Parlement et présente la compatibilité des engagements des entreprises EDF et SNCF avec la stratégie nationale de développement à faible intensité de carbone (SNCB).

 

L’APE, la direction générale des entreprises et la direction générale du Trésor ont mené un travail d’analyse régulier pour dresser une liste des entreprises qui pourraient avoir besoin d’un renforcement en fonds propres : une vingtaine d’entreprises ont été identifiées comme vulnérables dans les secteurs les plus exposés à la crise, notamment le transport aérien et l’industrie extractive ([45]).

8,3 milliards d’euros ont été consommés sur ce programme en 2020 et ont financé quatre opérations.

– 4,05 milliards d’euros ont été utilisés pour financer l’augmentation de capital de la SNCF du 15 décembre 2020.

Sur cette opération, 2,3 milliards d’euros doivent être investis dans la régénération du réseau ferroviaire, 1,5 milliard d’euros doivent financer la fin du glyphosate ainsi que la sécurisation de certains ouvrages d’art et 250 millions d’euros viennent abonder les crédits déjà existants pour la rénovation des petites lignes. La SNCF s’est engagée, en contrepartie du soutien de l’État, à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, d’ici 2030, de 30 % pour les émissions relatives au transport et de 50 % pour les émissions relatives à l’immobilier.

– 3 milliards d’euros ont été versés au titre de l’avance en compte courant d’actionnaire à la société Air France-KLM.  

Les contreparties sur lesquelles s’est engagée la société Air France-KLM incluent la réduction des vols régionaux et la modernisation de sa flotte de moyens et longs courriers pour réduire son impact écologique. Cette avance d’actionnaire s’ajoute à un prêt garanti par l’État de 4 milliards d’euros.

– 150 millions d’euros ont été versés par l’État au fonds de soutien à l’aéronautique (Fonds Ace Aéro Partenaires).

Ce fonds, créé en juin 2020, accompagne les PME et les ETI de la filière aéronautique pendant la crise sanitaire, notamment en renforçant leurs fonds propres. Il est géré par Ace Management. La participation de l’État s’ajoute aux contributions des quatre donneurs d’ordre de la filière : Airbus (116 millions d’euros), Safran (58 millions d’euros), Dassault Aviation (13 millions d’euros) et Thales (13 millions d’euros).

– 1,1 milliard d’euros ont été utilisés pour souscrire aux obligations vertes d’EDF.

L’entreprise ayant souffert de la crise sanitaire (retard dans les activités de maintenance, diminution de la consommation d’électricité), elle a levé des financements complémentaires sous la forme d’émissions d’obligations vertes.

Il est à noter que chaque opération a été précédée d’un abondement du CAS PFE en recettes.

La Cour des comptes ([46]) s’interroge sur le lien de deux de ces opérations avec le caractère d’urgence associé à la crise sanitaire. D’une part, elle considère qu’une partie de l’augmentation de capital de la SNCF a servi à financer des dépenses d’infrastructure relevant plus de la relance que de l’urgence. D’autre part, s’agissant de la souscription par l’État à l’émission obligataire d’EDF, la Cour souligne qu’il est difficile d’évaluer précisément quel est le besoin de financement de l’entreprise qui serait directement lié à la difficulté plus grande d’accéder au marché depuis la crise sanitaire. Elle souligne que l’objectif affiché de l’émission était l’investissement dans les énergies renouvelables.

58 % des crédits du programme n’ont pas été consommés, soit la sous-exécution la plus importante de la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire. L’ensemble des crédits non consommés, soit 11,7 milliards d’euros, a été reporté en 2021 ([47]). L’ouverture de crédits ayant eu lieu au début de la crise sanitaire, il est logique que le dimensionnement de l’enveloppe ait été supérieur aux besoins : le Gouvernement souhaitait pouvoir faire face à toutes les situations.

Cette sous-consommation peut également s’expliquer par la réticence des entreprises à solliciter un apport en capital de l’État avant d’avoir utilisé les autres sources de financement possibles, comme l’indique la Cour des comptes ([48]). De nouveaux besoins pourraient donc être identifiés au cours de l’année 2021.

B.   Le programme pourrait être de nouveau sollicité en 2021

Sur les 11,7 milliards d’euros disponibles en 2021, 698 millions d’euros ont été consommés depuis le début de l’année : 593 millions d’euros ont été versés pour renforcer le capital d’Air France-KLM et 105 millions d’euros ont été versés au fonds de soutien de la filière automobile.

Le décret d’avance du 19 mai 2021 déjà évoqué a annulé 7,2 milliards d’euros sur le programme 358 pour financer des ouvertures sur l’activité partielle et sur le fonds de solidarité. Il reste donc 3,9 milliards d’euros sur le programme pour l’année 2021.

M. Olivier Dussopt, ministre de l’Action et des comptes publics, a indiqué lors de son audition par la commission de finances le 11 mai 2021 que les crédits restants sur le programme « paraissaient suffisants pour faire face à d’éventuels besoins au cours de l’année 2021 » ([49]). Le projet de loi de finances rectificative n° 4215 pour 2021, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 2 juin 2021, n’ouvre donc pas de nouveaux crédits pour le programme.

IV.   l’exonération et l’aide au paiement des charges sociales ont allégé la pression exercée sur la trésorerie des entreprises

Un dispositif d’allègement et de soutien au paiement des prélèvements sociaux a été instauré par l’article 65 de la LFR 3 ([50]) (A). Porté par le programme 360 Compensation à la sécurité sociale des allègements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire, créé à cette occasion, il a donné lieu à un décaissement de 3,9 milliards d’euros sur les 8,2 milliards d’euros ouverts en 2020 (B). Très sollicité par les entreprises, notamment dans son volet aide au paiement, le dispositif est toutefois appelé à s’éteindre parallèlement à la levée progressive des restrictions sanitaires (C).

A.   Un dispositif combinant un système traditionnel d’exonération et une aide inédite au paiement

Prévues par la LFR 3, les modalités du dispositif d’allègement et de soutien à l’aide au paiement ont été précisées par un décret n° 2020-1103 du 1er septembre 2020 et détaillées par une instruction du 22 septembre de la direction de la sécurité sociale. Deux phases peuvent être distinguées quant à sa mise en œuvre.

Au cours du premier confinement, le dispositif d’exonération des cotisations sociales patronales concernait trois catégories d’entreprises :

– les entreprises de moins de 250 salariés appartenant à un secteur particulièrement affecté par la crise dit « secteur 1 » ou « S1 » dont la liste est fournie en annexe du décret précité (principalement hôtellerie, tourisme, restauration, transports aériens, voyages, culture, évènementiel et sport) ;

– les entreprises de moins de 250 salariés appartenant à des secteurs fortement dépendants de la première catégorie S1. Le lien de dépendance est mesuré par une baisse de chiffre d’affaires d’au moins 80 %. Les secteurs concernés, dits « secteurs 1 bis » ou « S1 bis » ;

– les entreprises de moins de 10 salariés, tous secteurs confondus, accueillant du public et fermées administrativement, soit la liste « secteurs 2 » ou « S2 ».

Les exonérations portent sur l’ensemble des cotisations sociales patronales, à l’exception des cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco, dues au titre des mois de février à mai 2020 pour les entreprises S1 et S1 bis et celles dues au titre des mois de février à avril 2020 pour les entreprises S2.

De plus, ces trois catégories bénéficiaient également d’une aide au paiement de l’ensemble des cotisations et des contributions sociales patronales et salariales restant dues au titre de l’année 2020. Cette aide au paiement conduit à une réduction égale à 20 % de la masse salariale déclarée par l’employeur sur la période éligible au dispositif d’exonération.

Enfin, des réductions forfaitaires de cotisations et contributions sociales ont été mises en place pour les travailleurs indépendants, les travailleurs non-salariés agricoles et les artistes auteurs. Elles se sont élevées à 2 400 euros pour les secteurs S1 et S1 bis et 1 800 euros pour les secteurs S2. Ces montants étaient calculés de sorte à couvrir trois ou quatre mois de cotisations pour un artisan ou un commerçant au revenu moyen.

En réponse à la dégradation du contexte économique et sanitaire à compter du troisième trimestre 2020, les dispositifs d’exonération et d’aide au paiement ont été reconduits avec des critères assouplis par l’article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2021 ([51]). Les entreprises dépendantes des secteurs affectés (S1 bis) sont devenues éligibles pour une baisse de 50 % de leur chiffre d’affaires (contre 80 % auparavant) tandis que les entreprises accueillant du public et fermées administrativement (S2) ont pu prétendre au mécanisme jusqu’à 50 salariés (au lieu de 10).

Ces mesures portaient initialement sur les périodes d’emploi courant du 1er septembre 2020, ou du 1er octobre 2020 pour les entreprises qui n’étaient pas situées dans des zones ayant connu des mesures de « couvre-feu » avant le 30 octobre 2020, au 30 novembre 2020.

Le décret n° 2021-75 du 27 janvier 2021 portant application de l’article 9 de la LFSS 2021 a prolongé les périodes d’emploi ouvrant droit aux dispositifs jusqu’au 31 décembre 2020, compte tenu de la prolongation des mesures de restriction. Par la suite, deux nouveaux décrets sont venus prolonger de nouveau cette application, jusqu’au 28 février 2021([52]) puis jusqu’au 30 avril 2021 ([53]).

Les mesures de reports de charges fiscales

Les reports d’échéances fiscales sur les impôts directs sont des mesures usuelles en faveur des entreprises en difficulté. Face à l’ampleur de la crise, le gouvernement a souhaité les encadrer d’une manière systématique, rassurant par voie de presse les chefs d’entreprise quant à la bienveillance des services fiscaux, le dispositif étant ensuite précisé par des nstructions internes à la DGFiP.

Dès le mois de mars 2020, le Gouvernement a offert la possibilité aux entreprises le jugeant utile de reporter certaines échéances relatives aux charges fiscales. Le report concerne les impôts directs : impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires, cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. L’ensemble des reports mobilisés par les entreprises a atteint 3 milliards d’euros à la fin de l’année 2020 ([54]).

Parallèlement aux mécanismes de reports de charges fiscales et sociales, le Gouvernement a accéléré le remboursement aux entreprises de certaines de leurs créances fiscales : tous les crédits d’impôts restituables en 2020, les excédents d’IS, les crédits de TVA. Le gain de trésorerie global induit par ce dispositif est estimé à 14 milliards d’euros ([55]).

B.   L’exécution budgétaire

Toute mesure d’exonération ou de réduction de cotisations ou contributions sociales doit faire l’objet d’une compensation intégrale de l’État à la sécurité sociale et aux autres organismes concernés (FNAL, CNSA, assurance chômage…), en application de l’article L. 131–7 du code de la sécurité sociale, sauf à ce qu’une disposition adoptée en LFSS déroge à cette règle.

Le programme 360 a donc été créé afin de compenser le coût des dispositifs d’exonération et d’aide au paiement des cotisations et contributions sociales. Grâce aux crédits ouverts sur le budget de l’État qui leur sont versés, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) et la Caisse centrale de la Mutualité agricole (CCMSA) compensent au premier euro auprès des organismes sociaux qui sont attributaires des prélèvements sociaux, les moindres rentrées induites par les exonérations et l’aide au paiement.

Les 3,9 milliards d’euros de crédits ouverts en LFR 3 ont été évalués à partir de données de l’Acoss portant sur la masse salariale et les cotisations liquidées sur les périodes d’emploi de référence (mars à juin 2019).

La LFR 4 a réévalué les crédits ouverts en LFR 3 au titre du premier confinement de 1,3 milliard d’euros pour prendre en compte notamment les besoins des employeurs (300 millions d’euros), des travailleurs indépendants (800 millions d’euros) et des artistes auteurs (100 millions d’euros). Elle a également ouvert des crédits supplémentaires au titre des exonérations associées aux nouvelles mesures sanitaires mises en place de septembre à décembre 2020, à hauteur de 3 milliards d’euros ([56]).

La totalité des 3,9 milliards d’euros de crédits ouverts par la LFR 3 a été versée à l’Acoss et à la CCMSA, en trois fois, avant le 31 décembre 2020. Toutefois, les deux organismes n’ont eu à décaisser que 3,55 milliards d’euros en 2020.

Ainsi, les 4,3 milliards d’euros de crédits ouverts en LFR 4 n’ont pas été consommés puis ont intégralement reporté au profit du programme 357 Fonds de solidarité par un arrêté du 18 mars 2021.

Les droits non compensés déjà constatés au titre de 2020, ou qui seront constatés en 2021, rendent nécessaires une ouverture de crédits sur ce programme avant la fin de l’année 2021.

C.   Un dispositif prisé des entreprises dont l’extinction progressive est prévue pour le troisième trimestre 2021

1.   La mobilisation du dispositif en 2020…

S’il n’avait pas de précédent, le dispositif de l’aide au paiement des charges a fait l’objet d’une bonne appropriation par les entreprises puisque les employeurs ont déclaré des montants plus élevés d’aide au paiement que d’exonérations : 2,15 milliards d’euros contre 1,4 milliard d’euros au 8 mars 2021 ([57]). En 2020, 413 605 établissements et travailleurs indépendants ont bénéficié des exonérations de charges sociales ou de l’aide au paiement, ce qui représente environ 20 % de cette catégorie.

Des restes à financer au titre de 2020 perdurent sur l’année 2021. D’une part, au titre de l’année 2020, 4,8 milliards d’euros d’exonérations et d’aides au paiement ont été déclarés par les employeurs de salariés, soit 0,9 milliard de plus que les avances versées en 2020 par l’État à l’Acoss et à la CCMSA ([58]). D’autre part, certains bénéficiaires des deux dispositifs, notamment les indépendants et les artistes auteurs, ne réalisent leur déclaration au titre de 2020 qu’au mois de mai 2021. Pour rappel, le besoin pour ces deux catégories avait été estimé à 1,4 milliard d’euros par les LFR 3 et 4.

2.   …se poursuit en 2021

Les besoins au titre de 2021 au titre de l’exonération et de l’aide au paiement des charges sociales sont également conséquents puisque le dispositif a été prolongé à l’identique jusqu’à la fin mai 2021. Le projet de loi de finances rectificative n° 4215 pour 2021 ouvre donc logiquement 4 milliards d’euros sur le programme pour couvrir les besoins de compensation par l’État à la Sécurité sociale.

Par ailleurs, l’article 9 du même projet de loi de finances rectificative supprime le dispositif d’exonération mais maintient un dispositif d’aide au paiement des cotisations et contributions sociales pour les mois de juin à août. Sont éligibles les employeurs relevant des secteurs S1 et S1 bis. Cette aide au paiement serait égale à 15 % des rémunérations dues au titre de ces périodes d’emploi contre 20 % actuellement.

Malgré la diminution de son taux, le soutien apporté par cette aide resterait substantiel, compte tenu de l’augmentation de la masse salariale liée à la reprise de l’activité sur les périodes d’emploi sur lesquelles elle continuerait de s’appliquer.

Les employeurs qui resteraient soumis à une interdiction d’accueil du public au-delà du mois de mai continueront quant à eux à bénéficier de l’exonération jusqu’au dernier jour du mois précédent celui au cours duquel l’interdiction d’accueil du public prendra fin, ainsi que le prévoit la LFSS pour 2021 qui autorise la prolongation du dispositif actuel pour certaines catégories de redevables.

Les travailleurs indépendants éligibles dans les mêmes conditions pourront bénéficier d’une réduction forfaitaire supplémentaire de 750 euros, équivalente à l’octroi d’une aide réduite au titre des mois de mai, juin et juillet.

Le coût total du dispositif serait de 0,8 milliard d’euros ([59]) portés par le programme 360.


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   QUATRIÈME PARTIE – LES CRÉDITS DE LA RELANCE EN 2020

Si ce rapport spécial n’a pas vocation à analyser la totalité du plan de relance présenté par le Gouvernement en septembre 2020, il ne peut être faire l’économie d’un bref rappel des crédits ouverts sur l’année 2020 au titre de la relance.

Selon le rapport sur le plan de relance de janvier 2021 ([60]), 10,9 milliards d’euros en AE et 8,9 milliards d’euros en CP ont été consommés en 2020 au titre de la relance.

Parmi ces crédits se trouvent notamment :

– l’opération de capitalisation de la SNCF (4,05 milliards d’euros), détaillée supra ;

– l’abondement de la prime à la conversion (239 millions d’euros) et du bonus écologique (230 millions d’euros) en cours d’année : 177 899 primes à la conversion et 117 196 bonus écologiques ont été versés par l’Agence de services et de paiement en 2020 ;

– le soutien aux collectivités territoriales, au travers des avances remboursables au titre des droits de mutation à titre onéreux (352 millions d’euros), les prélèvements sur recettes pour les communes et les EPCI confrontés à des pertes de recette du fait de la crise sanitaire (578 millions d’euros) et l’abondement exceptionnel de la dotation de soutien à l’investissement local (571 millions d’euros) ;

– le soutien en fonds propres aux PME et ETI de la filière aéronautique, déjà évoqué supra (150 millions d’euros) ;

– l’aide exceptionnelle à l’apprentissage (630 millions d’euros) ;

– le FNE-Formation, qui propose des formations aux employés en activité partielle (337 millions d’euros) ;

– la majoration exceptionnelle de l’allocation de rentrée scolaire (500 millions d’euros).

À noter que la Cour des comptes ne comptabilise pas les mêmes dépenses ([61]) : elle retraite les crédits destinés à la SNCF des dépenses du plan de relance, car ceux-ci transitent par l’intermédiaire du programme 203 Infrastructures et services de transports et seront reversés à SNCF Réseau entre 2021 et 2023. Elle estime donc que le plan de relance a été exécuté à hauteur de 4,8 milliards d’euros en 2020, en incluant les dépenses réalisées par les administrations de sécurité sociale ([62]).

Dans leur réponse conjointe, le ministre de l’économie, des finances et de la relance, et le ministre délégué chargé des comptes publics estiment que ces crédits ayant « restauré la capacité du groupe SNCF à sécuriser un plan d’investissement », il est cohérent de comptabiliser ces dépenses comme relevant du plan de relance dès 2020.


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Annexe 1 : surcoûts et moindres dépenses par mission du budget général en lien avec la crise, en millions d’euros


Annexe 2 : Répartition des montants versés au titre du fonds de solidarité par secteur (en %) (extrait du rapport du comité Coeuré)

 


Annexe 3 : décaissements du plan de relance en 2020, extrait du rapport de la Cour des comptes sur l’exécution budgétaire 2020

 

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION 

 

Lors de sa réunion de 15 heures, le jeudi 3 juin 2021, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu MM. Éric Woerth et Laurent Saint-Martin, rapporteurs spéciaux sur les crédits de la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire.

 

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail dédié de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu sera également lisible prochainement en ligne.


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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Ministère de l’action et des comptes publics :

– Mme Amélie Verdier, directrice du budget

Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) :

 M. François Asselin, président

– Mme Stéphanie Pauzat, vice-présidente déléguée

– Mme Sandrine Bourgogne, secrétaire générale adjointe

– M. Lionel Vignaud, responsable des affaires économiques, juridiques & fiscales

– M. Adrien Dufour, chargé de mission affaires publiques et organisation

– M. Florian Faure, directeur des affaires sociales et de la formation

Ministère du travail :

– M. Bruno Lucas, délégué général à l’emploi et à la formation professionnelle

– Mme Marianne Cotis, sous-directrice en charge des mutations économiques et sécurisation de l’emploi

– M. Boris Supiot, adjoint au sous-directeur en charge du financement et de la modernisation

Préfecture du Val de Marne

– Mme Sophie Thibault, Préfète du Val-de-Marne

– Mme Faouzia Fekiri, Sous-Préfète de l’arrondissement de Créteil, chargée du plan de relance

– Mme Isabelle Golfier, Directrice de la coordination des politiques publiques et de l’appui territorial

 


([1]) Loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020.

([2]) Le caractère temporaire de la mission ne permettait pas de loger les crédits associés au dispositif des PGE. En effet, les PGE étant attribués par des banques, seules les défaillances nécessitent un financement public par crédits budgétaires au titre de la garantie de l’État qui leur est associée. Ces défaillances ayant vocation à être étalées sur plusieurs années, leur financement est assuré par la mission Engagements financiers de l’État qui abrite les crédits associés aux autres appels en garantie couverts par l’État.

([3]) Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([4]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([5]) Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020 – Mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, Cour des comptes, p. 9.

([6]) Les dépenses du budget général de l’État, hors mission Remboursements et dégrèvements se sont élevées à 427,2 milliards d’euros en crédits de paiement en 2020.

([7]) Données Eurostat.

([8]) Banque de France (2021), «Défaillances d’entreprises –janvier 2021», STAT-INFO, février.

([9]) Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

([10]) Loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020.

([11]) Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([12]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([13]) Rapport d’étape du comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de covid-19, avril 2021, p. 35.

([14]) Tableau de bord de suivi des PGE, données actualisées au 30 avril 2021.

([15])  Compte rendu de l’audition d’Emmanuel Moulin, directeur général du Trésor, devant la commission des affaires économiques du Sénat, mercredi 5 mai 2021.

([16]) Comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de Covid-19 - Rapport d'étape, avril 2021, p. 195.

([17]) Rapport de la Cour des comptes sur le budget de l’État en 2020, avril 2021.

([18]) La Cour déduit les mesures d’économies liées à la crise des dépenses nouvelles liées à la crise.   

([19]) Voir annexe n° 1 qui reproduit le tableau de la Cour sur les dépenses liées à la crise par mission du budget général.

([20]) Rapport public annuel 2021 de la Cour des comptes, Tome I, Le fonds de solidarité à destination des entreprises, p. 214

([21])  Études de l’Unédic publiée le 18 décembre 2020, « Covid-19 : les différents systèmes d’indemnisation du chômage partiel en Europe ».

([22]) Les chiffres du rapport Coeuré sont basés sur les montants annoncés et non sur les montants effectivement consommés.

([23]) Décret n° 2020-443 du 17 avril 2020 portant ouverture et annulation de crédits.

([24]) Rapport ( XVème législature) de M. Laurent Saint-Martin relatif au projet de loi de règlement (lien).

([25]) Cour des comptes, Note d’exécution budgétaire (NEB) de la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, p. 10 et suivantes.

([26]) Les économistes ont observé, en période de récession, un phénomène de « rétention de main-d’œuvre ou d’emploi ». Autrement dit, de nombreuses entreprises gardent plus de salariés que ce que nécessite leur niveau de production à ce moment-là. Cette stratégie s’explique de plusieurs manières, par exemple la volonté de l’employeur de conserver un personnel qualifié et formé afin de pouvoir reprendre immédiatement son activité au moment de la reprise économique. Il peut également être lié aux obstacles au licenciement dus à la réglementation sur la protection de l’emploi (indemnités de licenciement, par exemple).

([27]) Voir OCDE, Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2009, Faire face à la crise de l’emploi.

([28]) Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

([29])  Comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de Covid-19 - Rapport d'étape, avril 2021 (lien).

([30]) Cour des comptes, NEB Plan d’urgence face à la crise sanitaire, p. 33.

([31]) DARES, Focus n° 13, en 2020, l’activité partielle a concerné tous les secteurs et tous les profils de salariés, 20 avril 2021.

([32]) Décret n° 2021-674 du 28 mai 2021 relatif à l'activité partielle et au dispositif spécifique d'activité partielle en cas de réduction d'activité durable.

([33]) Cour des comptes, Note d’exécution budgétaire 2020 relative à la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire., p. 75.

([34]) Les contributions externes ont été versées progressivement, ce qui explique que ce n’est pas un milliard d’euros qui était disponible au 14 avril.

([35]) Rapport du Gouvernement au Parlement en application de l’article 25 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 sur le fonds de solidarité.

([36]) Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020, Mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, Cour des comptes.

([37]) Arrêté CCPB2104249A du 18 mars 2021.

([38]) Rapport public annuel 2021 de la Cour des comptes, Tome I, « Le fonds de solidarité à destination des entreprises : une mise en œuvre rapide dans un contexte instable ».

([39]) Rapport annuel de la Cour des comptes, cité supra, p. 216.

([40]) Contribution écrite de la CPME aux travaux des rapporteurs spéciaux datée du 23 mars 2021.

([41]) Rapport d’étape du Comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de Covid-19, avril 2021, p. 78.

([42]) Voir Annexe n° 2 du présent rapport.

([43]) Rapport d’étape déjà cité, p. 81.

([44]) Projet de loi de finances rectificative nº 2820 pour 2020, déposé le 15 avril 2020 sur le bureau de l’Assemblée nationale.

([45]) Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020 de la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, Cour des comptes.

([46]) Cour des comptes, NEB Plan d’urgence face à la crise sanitaire 2020, p. 8.

([47]) Arrêté du 21 décembre 2020 portant reports de crédits.

([48]) Cour des comptes, NEB Plan d’urgence face à la crise sanitaire 2020, p. 79.

([49]) Compte rendu n° 71 de la séance de 17h30 du 11 mai 2021, Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, Assemblée nationale

([50]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([51]) Loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

([52]) Décret n° 2021-430 du 12 avril 2021 relatif à la prolongation des mesures concernant les cotisations et contributions sociales des entreprises et travailleurs indépendants prévues par l'article 9 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

([53]) Décret n° 2021-709 du 3 juin 2021 relatif à la prolongation des mesures concernant les cotisations et contributions sociales des entreprises et travailleurs indépendants prévues par l'article 9 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 et à l'adaptation du dispositif d'activité partielle des salariés employés à domicile et des assistants maternels.

([54]) Cour des comptes, note d’exécution budgétaire 2020 relative aux recettes fiscales.

([55]) Id.

([56]) Cour des comptes, note d’exécution budgétaire relative à la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, p. 59.

([57]) Cour des comptes, note d’exécution budgétaire relative à la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, p. 57.

([58]) Cour des comptes, note d’exécution budgétaire relative à la mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire, p. 79.

([59]) Évaluation préalable de l’article 9 du projet de loi de finances rectificative pour 2021.

([60]) Rapport au Parlement sur le plan de relance daté de janvier 2021, p. 203.

([61]) Voir l’annexe n° 3 qui présente le tableau de la Cour des comptes sur les dépenses du plan de relance en 2020.

([62]) Cour des comptes, Rapport sur le budget de l’État en 2020, Résultats et gestion, avril 2021