N° 4693

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 novembre 2021

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI
 

visant à moderniser la lutte contre la contrefaçon (n° 4555)

 

 

 

PAR MM. Christophe BLANCHET et Pierre-Yves BOURNAZEL

Députés

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 4555.


– 1 –

 

 

SOMMAIRE

___

Pages

AVANT-PROPOS............................................ 5

Synthèse

I. Présentation synthétique de la proposition de loi

II. Les apports de la commission des Lois

Examen des articles

Article 1er Instauration d’un délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon

Article 2 (art. L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle) Instauration d’une amende civile et d’une amende forfaitaire à l’encontre d’une personne condamnée pour contrefaçon

Article 2 bis (nouveau) (art. 67 bis-1 du code des douanes) Extension de la pratique des coups d’achat douaniers aux médicaments falsifiés

Article 3 (art. L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle) Autorisation des agents assermentés et habilités par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à constater une infraction au droit des marques

Article 4 (art. L. 713-7 et L. 713-8 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) Suspension ou suppression groupées de noms de domaine et comptes de réseaux sociaux

Article 5 Habilitation des policiers municipaux à constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette

Article 5 bis (nouveau) (art. L. 511-1 et L. 521-1 du code de la sécurité intérieure) Habilitation des policiers municipaux et des gardes champêtres à constater le délit de vente à la sauvette

Article 6 Instauration d’une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges concernant le commerce en ligne

Article 7 Gage financier

Compte rendu des débats

Personnes entendues

 

AVANT-PROPOS............................................ 5

Synthèse

I. Présentation synthétique de la proposition de loi

II. Les apports de la commission des Lois

Examen des articles

Article 1er Instauration d’un délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon

Article 2 (art. L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle) Instauration d’une amende civile et d’une amende forfaitaire à l’encontre d’une personne condamnée pour contrefaçon

Article 2 bis (nouveau) (art. 67 bis-1 du code des douanes) Extension de la pratique des coups d’achat douaniers aux médicaments falsifiés

Article 3 (art. L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle) Autorisation des agents assermentés et habilités par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à constater une infraction au droit des marques

Article 4 (art. L. 713-7 et L. 713-8 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) Suspension ou suppression groupées de noms de domaine et comptes de réseaux sociaux

Article 5 Habilitation des policiers municipaux à constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette

Article 5 bis (nouveau) (art. L. 511-1 et L. 521-1 du code de la sécurité intérieure) Habilitation des policiers municipaux et des gardes champêtres à constater le délit de vente à la sauvette

Article 6 Instauration d’une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges concernant le commerce en ligne

Article 7 Gage financier

Compte rendu des débats

Personnes entendues

1


– 1 –

 

 

 

Mesdames, messieurs,

Encore anodine aux yeux du grand public, la contrefaçon est un phénomène qui croît de manière exponentielle, ainsi que le démontrent les nombreux travaux publiés sur ce sujet par des instances telles que l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) ou l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Tous convergent vers un même constat, également dressé l’an dernier par vos rapporteurs, dans le cadre de leur mission d’évaluation de la lutte contre la contrefaçon ([1]) : l’action des contrefacteurs n’est pas anodine. Au contraire, elle est dangereuse à de nombreux égards et nécessite une réaction forte des pouvoirs publics.

Si, aux yeux du plus grand nombre, la contrefaçon concerne singulièrement l’industrie du luxe, la dislocation des chaînes de production en a changé le visage : désormais, ce phénomène touche tous les types d’entreprises et tous les secteurs d’activité.

Ce « crime du XXIe siècle », comme l’a qualifié l’Organisation mondiale des douanes, pose de graves problèmes de sécurité et de santé publique, notamment quand il concerne des médicaments falsifiés, des cigarettes ou des pièces automobiles contrefaites, pour ne citer que ces exemples.

Qu’il s’agisse de l’industrie du luxe, du jeu, des jouets, des articles de beauté, des articles vestimentaires ou des articles de sport, la contrefaçon est responsable de la destruction de milliers d’emplois et de pertes de recettes fiscales importantes pour l’État.

Estimé entre 7,5 et 8 milliards d’euros par an pour nos entreprises, le manque à gagner dû à l’activité des contrefacteurs constitue un frein à l’innovation et à la compétitivité, tout en mettant à mal les savoir-faire français et européens, volés par des entreprises qui produisent sans normes et sans scrupules, au mépris des lois et de la santé du consommateur. La contrefaçon a ainsi des conséquences sur les manières de produire, et donc sur la planète. Elle est, encore aujourd’hui, un moteur du travail des enfants dans les pays où, hélas, il existe toujours.

Elle est, enfin, un puissant catalyseur de la délinquance car elle représente une activité très lucrative et moins risquée que le trafic de stupéfiants.

Ces difficultés concernent particulièrement la France, deuxième pays le plus victime des contrefacteurs, après les États-Unis. Les saisies douanières, qui représentaient environ 200 000 articles interceptés en 1994, ont été multipliées par près de 30, pour atteindre 5,6 millions d’articles l’année dernière. Cette explosion du nombre d’objets saisis s’explique notamment par le développement d’Internet et des commerces en ligne qui représentent une belle opportunité pour nos entreprises, mais charrient aussi leur lot de produits contrefaits.

En 2019, 39 millions de Français avaient utilisé Internet pour y réaliser des achats – et c’était avant l’épidémie de Covid-19, qui a bousculé nos modes de consommation. Cette activité commerciale s’est également étendue aux réseaux sociaux, qui sont devenus les relais des entreprises mais aussi, par effet de miroir, des contrefacteurs.

Ce constat d’une progression fulgurante du phénomène a conduit vos rapporteurs à déposer une première proposition de loi en juin 2021, comptant 23 articles reprenant l’ensemble des recommandations du rapport d’information rendu quelques mois plus tôt. Ce premier projet a été retravaillé pour aboutir à un second texte plus court, déposé le 12 octobre dernier, dans un format plus adapté aux spécificités des « journées réservées » des groupes politiques.

Vos rapporteurs tiennent à cet égard à remercier le groupe Agir ensemble pour l’inscription de ce texte à son ordre du jour. Le Parlement s’honore de débattre des nombreuses difficultés que pose la contrefaçon, et adresse ainsi un signal fort au monde économique, aux consommateurs, mais également aux contrefacteurs.

 


   Synthèse

I.   Présentation synthétique de la proposition de loi

Enregistrée le 12 octobre 2021 à la Présidence de l’Assemblée nationale, la présente proposition de loi comprend, dans sa version initiale, sept articles.

L’article 1er instaure un délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon et à la promotion des droits de propriété intellectuelle.

L’article 2 créé une amende civile prononçable à l’encontre du vendeur de produits contrefaits. Il prévoit l’extinction de la procédure pouvant aboutir à une telle sanction par le versement d’une amende forfaitaire. Enfin, il instaure une peine de confiscation des avoirs tirés d’une infraction de contrefaçon.

L’article 3 permet aux agents assermentés et habilités par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de constater une infraction aux dispositions du code de la propriété intellectuelle concernant les marques de produits ou de services et d’intervenir, au nom du titulaire des droits, auprès de l’autorité administrative ou des autorités judiciaires compétentes.

L’article 4 autorise le titulaire des droits à solliciter, auprès de l’autorité judiciaire, la suspension ou la suppression groupée des noms de domaine ou comptes de réseaux sociaux contrefaisant la marque ou permettant la publication de contenus contrefaisants.

L’article 5 permet aux agents de police municipale, à titre expérimental pour une durée de cinq ans, de constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette.

À titre expérimental pour cinq ans, l’article 6 met en place, dans trois tribunaux judiciaires, une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges relatifs au commerce en ligne.

Enfin, l’article 7 a pour objet de compenser la charge éventuelle qui pourrait résulter de la mise en œuvre des dispositions qui précèdent sur le budget de l’État.

II.   Les apports de la commission des Lois

L’article 1er a été modifié par un amendement de rédaction globale des rapporteurs complétant les missions dévolues à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) afin de lui permettre de collecter des données relatives à la contrefaçon et de réaliser une analyse des conséquences économiques de cette infraction.

L’article 2 a été réécrit par un amendement des rapporteurs instaurant une procédure d’amende forfaitaire délictuelle en cas d’achat de contrefaçons.

La commission des Lois a adopté un amendement portant article additionnel des rapporteurs, devenu l’article 2 bis, dont l’objet est d’étendre la procédure de coup d’achat douanier aux médicaments falsifiés.

Par un amendement des rapporteurs, les dispositions de l’article 3 ont été précisées pour y inscrire, d’une part, que les agents concernés par la disposition sont ceux de l’INPI et, d’autre part, qu’ils sont agréés par le ministre chargé de la propriété industrielle. Ce même amendement supprime l’alinéa permettant à ces agents d’intervenir devant les autorités administrative et judiciaire puisqu’une telle possibilité leur est déjà ouverte à droit constant.

À l’article 5, la Commission a adopté un amendement de rédaction globale des rapporteurs supprimant l’expérimentation prévue et étendant aux gardes champêtres, par cohérence, la prérogative nouvelle offerte aux agents de police municipale.

Elle a voté un nouvel article 5 bis, introduit par un amendement des rapporteurs, afin de permettre aux agents de police municipale et aux gardes champêtres de constater le délit de vente à la sauvette, prévu à l’article 446-1 du code pénal.

Enfin, la commission des Lois a supprimé, par l’adoption d’un amendement des rapporteurs, l’article 6 de la proposition de loi.

*

* *


Examen des articles

Article 1er
Instauration d’un délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 1er propose la création d’un délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon et à la promotion des droits de propriété intellectuelle.

       Position de la Commission

Cet article a été modifié par un amendement de rédaction globale des rapporteurs complétant les missions dévolues à l’Institut national de la propriété industrielle afin de lui permettre de collecter des données relatives à la contrefaçon et de réaliser une analyse des conséquences économiques de cette infraction.

1.   L’état du droit

Dans son récent rapport sur la lutte contre la contrefaçon, la Cour des comptes regrette « la dispersion de l’action des pouvoirs publics » en la matière ([2]). En particulier, elle déplore le fait que les différentes administrations et acteurs publics concernés par ce phénomène – direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), forces de sécurité intérieure, justice – ne disposent pas de données uniformisées et consolidées pour en mesurer l’ampleur.

La Cour des comptes dressait déjà, dès 2014, le constat d’un paysage institutionnel fragmenté, en dépit d’un renforcement des échanges entre les administrations concernées et les entreprises victimes des contrefacteurs ([3]).

Depuis sa création en 1995, de tels échanges ont notamment lieu au sein du Comité national anti-contrefaçon (CNAC).

Le comité national anti-contrefaçon

Créé en 1995, le comité national anti-contrefaçon (CNAC) est une structure informelle, présidée par un sénateur ([4]) et rassemblant les acteurs publics de la lutte contre la contrefaçon, les fédérations industrielles et artistiques, les associations professionnelles et les entreprises concernées.

Le CNAC, dont le secrétariat général est assuré par l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) depuis 2002, a pour objectifs de renforcer l’échange d’informations et de bonnes pratiques, coordonner des actions concrètes et formuler de nouvelles propositions en matière de lutte contre la contrefaçon. À cette fin, le CNAC comprend cinq groupes de travail : sensibilisation et communication, coopération internationale, aspects normatifs et juridictionnels, cybercontrefaçon et œuvres d’arts.

Dès 2014, la Cour des comptes recommandait la création, au niveau interministériel, une instance de réflexion stratégique et de pilotage opérationnel de la lutte contre la contrefaçon, dont le secrétariat serait confié à la DGDDI. La création d’une telle instance a été annoncée en 2016, mais elle n’a finalement jamais été mise en place.

Par ailleurs, dans son dernier rapport sur la lutte contre les contrefaçons, la Cour des comptes a également recommandé « de conforter le dispositif national […] en élaborant à brève échéance, sous l’autorité du Premier ministre, un plan d’action interministériel de lutte contre les contrefaçons ».

Vos rapporteurs partagent pleinement le constat dressé par la Cour des comptes. Dans leur rapport d’information sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, ils ont d’ailleurs souligné la nécessité d’élaborer « une stratégie nationale, après une étude approfondie de l’OCDE sur l’impact de la contrefaçon sur notre économie, et un plan d’action de lutte contre la contrefaçon. Un délégué interministériel assurerait sa mise en œuvre sous l’autorité du Premier ministre. Le sujet mérite de s’y consacrer à temps plein, ce qu’un ministre, a fortiori le premier d’entre eux, ne peut pas faire. » ([5])

Les acteurs auditionnés dans le cadre de cette proposition de loi ont également souligné l’intérêt que présenterait la mise en place d’une telle structure. M. Pascal Faure, directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), a notamment insisté sur le besoin de renforcer les synergies entre les divers acteurs gouvernementaux chargés de la lutte contre la contrefaçon.

Une démarche du même type a déjà été suivie en matière de stupéfiants. Ainsi que l’observait M. Bernard Leroy, directeur de l’Institut international de recherche anti-contrefaçon de médicaments, la création, en 1982, de la mission permanente de lutte contre la toxicomanie, devenue la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) a permis aux acteurs de la santé, aux forces de l’ordre et aux magistrats de travailler ensemble. La mission est chargée de coordonner les recherches et observations, les questions de prévention, de santé et d’insertion, l’application de la loi, ainsi que les politiques de lutte contre les trafics et de coopération internationale.

2.   Le dispositif proposé

L’article 1er instaure un délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon et à la promotion des droits de propriété intellectuelle, chargé d’animer et de coordonner les activités de lutte contre la contrefaçon et de promotion de la propriété intellectuelle.

Il est responsable de deux missions :

– la supervision des actions d’information à destination du public ;

– la mise en œuvre du plan national de lutte contre la contrefaçon, sous l’autorité du ministre chargé de l’économie.

Les modalités d’application de l’article seront précisées par décret.

3.   La position de la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement de rédaction globale présenté par les rapporteurs qui charge l’INPI de la collecte des données sur la contrefaçon

Les auditions menées dans le cadre de la préparation de son examen ont en effet permis de souligner le rôle nouveau joué par les groupes opérationnels nationaux anti-fraude (GONAF), sous l’égide de la mission interministérielle de coordination anti-fraude (MICAF), en matière de lutte contre la contrefaçon.

Le rôle de la mission interministérielle de coordination anti-fraude

Face à des fraudes toujours plus organisées, complexes et mobiles, le gouvernement a souhaité donner une nouvelle impulsion interministérielle en matière de lutte contre la fraude aux finances publiques (fraude aux prélèvements obligatoires fiscaux et sociaux, fraude aux prestations sociales). Le nouveau dispositif de coordination interministérielle, organisé autour de la Mission interministérielle de coordination anti-fraude (MICAF), a donc pour vocation d’être mieux adapté aux enjeux d’aujourd’hui. Priorité est donnée aux partages opérationnels de renseignements et à la définition de stratégies communes d’actions entre administrations et organismes partenaires.

Au niveau national, la MICAF assure à cette fin, en partenariat avec des directions « cheffes de file », un suivi actif de 10 groupes opérationnels nationaux anti-fraude (GONAF). Ces groupes réunissent les administrations des ministères de l’Économie, des Finances et de la Relance, de la Justice, de l’Intérieur, des Solidarités et de la Santé, du Travail, les organismes de protection sociale ainsi que les services d’enquêtes administratifs et judiciaires autour des enjeux prioritaires suivants : la fraude à la TVA, la contrefaçon, les trafics de tabac, la fraude fiscale et sociale commise via l’e-commerce, le travail illégal et la fraude fiscale connexe, les fraudes fiscales et sociales commises via des sociétés éphémères frauduleuses, la fraude à la résidence, la fraude documentaire et à l’identité, l’adaptation des moyens d’enquêtes aux enjeux du numérique, la recherche d’un meilleur recouvrement des créances en matière de fraude aux finances publiques.

Ces GONAF ont pour vocation de favoriser le décloisonnement des approches par le partage d’informations et d’analyses, l’établissement de cartographies communes des risques, l’élaboration des stratégies d’actions et d’enquêtes coordonnées. Il s’agit notamment de mieux identifier et combattre les fraudes complexes et organisées en favorisant une meilleure articulation des actions administratives et judiciaires.

Au niveau local, la MICAF assure une coordination des Comités opérationnels départementaux anti-fraude (CODAF), placés sous la coprésidence des préfets et procureurs de la République dans leur forme plénière et, sous la seule présidence des procureurs, dans leur forme restreinte. Leur activité est organisée autour de priorités d’actions et d’échanges de renseignements en matière de fraude aux prélèvements fiscaux et sociaux et de fraude aux prestations sociales. Il s’agit ainsi, en tenant compte des spécificités de chaque département, de mobiliser l’ensemble des sanctions administratives et judiciaires en matière de lutte contre la fraude aux finances publiques (redressements, pénalités, récupérations d’indus, sanctions pénales…).

Au niveau européen, la MICAF a également pour vocation institutionnelle de faciliter la coopération avec les instances européennes chargées de la protection des intérêts financiers de l’Union européenne, et notamment les échanges opérationnels avec l’Office européen de lutte anti-fraude. Dans ce nouveau cadre interministériel, la MICAF peut impulser de nouvelles synergies en matière d’échanges d’informations entre partenaires, notamment en matière d’interconnexions de données. Elle propose aussi toute réforme visant à favoriser une plus grande efficacité et un meilleur recouvrement en matière de lutte contre la fraude aux finances publiques. La MICAF contribue, par ailleurs, à une meilleure connaissance de la fraude en élaborant chaque année un document de politique transversale dans le cadre du projet de loi de finances et en favorisant les actions de formation à destination des partenaires. Elle informera tous les ans le Premier ministre et le Ministre chargé du budget de l’action menée en matière de coordination interministérielle anti-fraude.

Source : site du ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance

La création d’un délégué interministériel, alors que les résultats de la MICAF n’ont pas encore été évalués, n’apparaît pas opportune à ce stade. Par ailleurs, et bien que vos rapporteurs demeurent convaincus de son utilité, l’instauration d’un délégué ministériel n’est pas du ressort de la loi.

Il importe néanmoins de renforcer l’information et les données disponibles en matière de lutte contre la contrefaçon, ce dont aurait notamment été chargé le délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon et à la promotion des droits de propriété intellectuelle.

Le nouveau contrat d’objectifs et de performance (COP) de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) pour les années 2021-2024 prévoit, « afin de fournir des données consolidées sur le phénomène de la contrefaçon en France, [la création], sur le modèle de l’observatoire européen de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), [d’un observatoire chargé de collecter et d’exploiter toutes les données relatives à la contrefaçon en France. Cela permettra de mieux coordonner l’action de tous les acteurs français et de renforcer l’efficacité de la lutte anti-contrefaçon ».

Cette structure aura nécessairement besoin de collecter régulièrement des données relatives à la quantification de la contrefaçon. Le présent amendement vise ainsi à mettre en adéquation la loi avec cette nouvelle prérogative. Il complète les missions dévolues à l’INPI pour habiliter l’Institut à collecter de telles données.

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Article 2
(art. L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle)
Instauration d’une amende civile et d’une amende forfaitaire à l’encontre d’une personne condamnée pour contrefaçon

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 crée une amende civile prononçable à l’encontre de la personne condamnée pour contrefaçon. Il prévoit l’extinction de la procédure pouvant aboutir à une telle sanction par le versement d’une amende forfaitaire. Enfin, il instaure une peine complémentaire de confiscation des avoirs tirés d’une infraction de contrefaçon.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2014-315 du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon a aggravé les peines encourues en cas de contrefaçon commise en bande organisée ou sur un réseau de communication au public en ligne, ou lorsque la contrefaçon concerne des marchandises dangereuses pour la santé ou la sécurité de l’homme ou l’animal, de 5 à 7 ans d’emprisonnement et de 500 000 euros à 750 000 euros d’amende.

       Position de la Commission

La Commission a adopté cet article, modifié par un amendement de rédaction globale des rapporteurs instaurant une procédure d’amende forfaitaire délictuelle en cas d’achat de contrefaçons.

1.   L’état du droit

Les auditions menées par vos rapporteurs dans le cadre de la mission d’information du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon ont révélé que cette infraction demeure particulièrement lucrative pour les contrefacteurs, les dommages et intérêts versés étant généralement largement inférieurs aux bénéfices réalisés.

L’infraction de contrefaçon peut en effet être considérée comme une faute lucrative, c’est-à-dire une faute commise délibérément afin de permettre à son auteur d’obtenir un gain ou une économie supérieurs aux dépenses qu’il a entreprises.

● L’amende civile en droit français

Afin de permettre la sanction du contrefacteur à la hauteur des gains effectivement obtenus par la commission de l’infraction, le recours à une amende civile pourrait être envisagé.

L’amende civile existe déjà dans le code de procédure civile, où les articles 32-1 (action en justice dilatoire ou abusive), 559 (appel dilatoire ou abusif), 581 (recours extraordinaire dilatoire ou abusif) et 628 (pourvoi en cassation jugé abusif) permettent la sanction de tels comportements par une amende civile d’un montant maximal de 10 000 euros. Les articles 88-1 et 177-2 du code de procédure pénale prévoient également une telle amende, prononcée par le magistrat instructeur s’il estime que la constitution de partie civile a été abusive ou dilatoire.

L’article R. 741-12 du code de la justice administrative dispose que « le juge peut infliger à l’auteur d’une requête qu’il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000  ». Dans une décision du 31 octobre 1980, le Conseil d’État a précisé que « l’amende pour recours abusif est une amende civile et ne constitue ni une sanction pénale, ni un impôt et n’est pas comprise dans les frais de justice » ([6]).

Enfin, l’amende civile existe également, en matière commerciale, pour sanctionner les pratiques restrictives de concurrence. Ainsi, l’article L. 442-4 du code du commerce permet au ministre chargé de l’économie ou au ministère public de demander le prononcé d’une amende civile d’un montant maximal de cinq millions d’euros, ou du triple du montant des avantages indûment perçus ou obtenus, ou d’un montant équivalent à 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre.

 

En 2017, la Chancellerie a proposé un projet de réforme de la responsabilité civile généralisant ce dispositif, en matière extracontractuelle, « lorsque l’auteur du dommage a délibérément commis une faute en vue d’obtenir un gain ou une économie ».

L’amende civile dans le cadre du projet de réforme de la responsabilité civile lancé par la Chancellerie en 2017

Article 1266-1 du Code civil. – En matière extracontractuelle, lorsque l’auteur du dommage a délibérément commis une faute en vue d’obtenir un gain ou une économie, le juge peut le condamner, à la demande de la victime ou du ministère public et par une décision spécialement motivée, au paiement d’une amende civile.

Cette amende est proportionnée à la gravité de la faute commise, aux facultés contributives de l’auteur et aux profits qu’il en aura retirés.

L’amende ne peut être supérieure au décuple du montant du profit réalisé.

Si le responsable est une personne morale, l’amende peut être portée à 5 % du montant du chiffre d’affaires hors taxes le plus élevé réalisé en France au cours d’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel la faute a été commise.

Cette amende est affectée au financement d’un fonds d’indemnisation en lien avec la nature du dommage subi ou, à défaut, au Trésor public.

Elle n’est pas assurable.

● La sanction pénale de la contrefaçon

L’article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle punit de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros l’acte de contrefaçon, c’est-à-dire le fait de détenir sans motif légitime, importer, exporter, offrir à la vente ou vendre, reproduire, imiter, utiliser un objet contrefaisant, ou d’apposer ou supprimer une marque en violation des droits de propriété intellectuelle de son titulaire.

Lorsque ces faits sont commis en bande organisée ou sur un réseau de communication au public en ligne, ou lorsque la contrefaçon concerne des marchandises dangereuses pour la santé ou la sécurité de l’homme ou l’animal, les peines encourues sont portées à 7 ans d’emprisonnement et 750 000 euros d’amende.

● Des dommages et intérêts insuffisants

Les victimes de contrefaçon peuvent percevoir des dommages et intérêts, calculés selon les modalités précisées à l’article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle. Le juge doit ainsi prendre en compte trois facteurs afin de les déterminer :

– les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

– le préjudice moral causé à cette dernière ;

– et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirés de la contrefaçon.

À la demande de la victime, une somme forfaitaire ([7]) peut toutefois lui être allouée.

En dépit de ces dispositions a priori favorables aux titulaires de droits, vos rapporteurs regrettent que les dommages et intérêts versés soient généralement insuffisants pour couvrir les pertes de l’entreprise victime de contrefaçon. Ainsi qu’ils l’observaient en conclusion de leur mission sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, « il est certain que la comparaison faite par les avec les dommages‑intérêts prononcés dans les pays de Common law est très défavorable à notre système : les tribunaux accordent à la victime des dommages‑intérêts punitifs ou exemplaires, qui peuvent être supérieurs aux dommages subis, si une faute intentionnelle lucrative est démontrée. Le ministère [de la Justice], tout en reconnaissant que cette règle est très dissuasive et contrarie les logiques lucratives des contrefacteurs, considère qu’elle ne peut s’intégrer dans la tradition juridique française attachée au principe de réparation intégrale. » ([8])

2.   Le dispositif proposé

Le rapport d’évaluation sur la lutte contre la contrefaçon préconise « l’institution, dans le code de la propriété intellectuelle une amende civile à l’encontre du vendeur de contrefaçon » ([9]).

L’article 2 complète à cette fin l’article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle. Il prévoit ainsi que l’acte de contrefaçon peut être sanctionné par une amende civile dont le montant est proportionné à la gravité de la faute commise, aux facultés contributives de l’auteur de l’infraction et aux profits qu’il en a retirés.

Ce même article prévoit en outre que l’action publique peut être éteinte par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 200 euros – ou de 150 euros si l’amende est minorée, 450 euros si elle est majorée.

Enfin, l’article 2 créé une nouvelle peine complémentaire de confiscation des avoirs tirés de l’infraction. Ainsi que l’observaient vos rapporteurs dans leur rapport sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, « l’objectif que sous-tend cette [disposition] est de se rapprocher de la pratique des pays de droit anglo-saxon, où la saisie des avoirs issus de la contrefaçon est plus facile à mettre en œuvre, et montre son efficacité. » ([10])

3.   La position de la Commission

La commission des Lois a adopté l’article 2, réécrit par un amendement de rédaction globale de vos rapporteurs. Cet article prévoit désormais l’introduction d’une procédure d’amende forfaitaire délictuelle en cas d’achat de contrefaçons.

L’amende forfaitaire

L’amende forfaitaire est une procédure de transaction qui se traduit, une fois le paiement de l’amende, par l’extinction de l’action publique ([11]). Elle constitue une réponse pénale simplifiée aux contentieux de masse en permettant de verbaliser automatiquement certaines infractions. Elle permet ainsi de sanctionner les comportements litigieux et de parvenir à un meilleur taux de recouvrement des amendes, tout en évitant de solliciter les tribunaux.

Ce mécanisme a été jugé conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, « à la condition de ne porter que sur les délits les moins graves et de ne mettre en œuvre que des peines d’amendes de faible montant. Dès lors, les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître le principe d’égalité devant la justice, s’appliquer à des délits punis d’une peine d’emprisonnement supérieure à trois ans. » ([12])

Le recours à l’amende forfaitaire délictuelle demeure une faculté pour le ministère public qui peut plutôt, si les faits de l’espèce le nécessitent, décider d’engager des poursuites devant le tribunal correctionnel.

L’article 529 du code de procédure pénale prévoyait initialement l’application de la procédure de l’amende forfaitaire à certaines contraventions des quatre premières classes, dont la liste est précisée par décret en Conseil d’État et figure à l’article R. 48-1 du même code ([13]).

La loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles a étendu le recours à cette procédure pour certaines contraventions de cinquième classe, qui figurent au même article de la partie réglementaire du code de procédure pénale.

L’amende forfaitaire a pour la première fois été ouverte à certains délits avec l’entrée en vigueur de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, qui a rendu ce mécanisme applicable aux délits de conduite d’un véhicule sans permis, ou avec un permis correspondant à une catégorie n’autorisant pas sa conduite, ainsi qu’au délit de conduite d’un véhicule sans assurance. Le législateur a ensuite allongé la liste des délits pouvant faire l’objet d’une telle procédure ([14]).

Toutefois, la procédure de l’amende forfaitaire est exclue dans trois cas de figure :

– en matières contraventionnelle et délictuelle, lorsque plusieurs infractions sont constatées simultanément et que l’amende forfaitaire n’est pas prévue pour au moins une d’entre elles ([15]) ;

– en matière contraventionnelle, lorsque la loi prévoit que la récidive de l’infraction constitue un délit ([16]) ;

– en matière délictuelle, quand l’infraction a été commise par un mineur ou si le mis en cause est en état de récidive légale ([17]).

L’amende forfaitaire doit être réglée dans les 45 jours : elle est minorée lorsqu’elle est soldée directement auprès de l’agent verbalisateur ou dans un délai de 15 jours, et majorée lorsqu’elle n’a pas été réglée passé le délai de 45 jours.

L’intéressé peut former une requête en exonération dans les 45 jours de la contestation de l’infraction ou de l’envoi de l’avis, ou une réclamation dans les 30 jours suivants l’envoi de l’avis invitant à payer l’amende majorée auprès du ministère public. Le ministère public peut alors déclarer la requête irrecevable, renoncer aux poursuites ou saisir la juridiction de jugement. En cas de condamnation par le tribunal correctionnel, l’amende prononcée ne peut être inférieure au montant de l’amende forfaitaire augmenté d’un taux de 10 %.

Vos rapporteurs ont en effet constaté, au fil de leurs auditions, que les réflexions relatives à l’instauration d’une amende civile, prévue dans la rédaction initiale de l’article, ne sont pas suffisamment abouties pour envisager un dispositif juridiquement solide et facilement mobilisable pour les praticiens du droit. En revanche, l’instauration d’une amende forfaitaire délictuelle pour l’acheteur de produits contrefaisants, elle aussi envisagée dans le dispositif initial, représente un signal fort et une incontestable avancée dans la lutte des pouvoirs publics contre ce délit.

Elle permettra de sanctionner facilement l’achat de contrefaçons par une amende de 200 euros. L’article 2 ainsi rédigé prévoit par ailleurs un montant minoré s’élevant à 150 euros et un montant majoré fixé à 450 euros.

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Article 2 bis (nouveau)
(art. 67 bis-1 du code des douanes)
Extension de la pratique des coups d’achat douaniers aux médicaments falsifiés

Introduit par la commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 bis a pour objet d’étendre la procédure de coup d’achat douanier aux médicaments falsifiés.

 

L’article 52 ter de la directive du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain ([18]), telle que modifiée par la directive du 8 juin 2011 dite directive « médicaments falsifiés » ([19]), impose aux États membre de mettre en place des mesures appropriées pour que les médicaments soupçonnés d’être falsifiés ne puissent pas être mis en circulation sur le marché de l’Union. La transposition des dispositions relatives aux médicaments falsifiés a été réalisée par une ordonnance du 15 décembre 2016 ([20]).

Afin d’améliorer la lutte contre l’importation de médicaments falsifiés, l’article 2 bis, introduit par un amendement portant article additionnel de vos rapporteurs, modifie l’article 67 bis-1 du code des douanes relatif aux coups d’achat, afin de le rendre applicable aux médicaments falsifiés.

Cet article permet aux agents des douanes, sur autorisation du procureur de la République, d’acheter et de contrôler la nature des produits prohibés, d’identifier les auteurs et complices et d’effectuer des saisies. Pour préserver la sécurité des douaniers, il est permis aux douaniers de faire usage d’une identité d’emprunt pour l’achat des marchandises. Par ailleurs, ils sont exonérés de toute responsabilité pénale pour ces acquisitions.

Les marchandises contrefaisantes peuvent déjà faire l’objet de coûts d’achats, sur le fondement du même article du code des douanes. Cependant, tous les médicaments falsifiés ne sont pas des médicaments de contrefaçon. En effet, selon l’article L. 5 111-3 du code de la santé publique, la définition du médicament falsifié va bien au-delà de la seule contrefaçon au sens du code de la propriété intellectuelle.

La notion de médicaments falsifiés dans le code de la santé publique

Article L. 5 111-3. – On entend par médicament falsifié tout médicament, tel que défini à l’article L. 5 111-1, comportant une fausse présentation :

1° De son identité, y compris de son emballage et de son étiquetage, de son nom ou de sa composition s’agissant de n’importe lequel de ses composants, y compris les excipients, et du dosage de ces composants ;

2° De sa source, y compris de son fabricant, de son pays de fabrication, de son pays d’origine ou du titulaire de son autorisation de mise sur le marché ;

3° Ou de son historique, y compris des autorisations, des enregistrements et des documents relatifs aux circuits de distribution utilisés.

La présente définition n’inclut pas les défauts de qualité non intentionnels.

C’est pourquoi vos rapporteurs ont souhaité compléter l’article 67 bis-1 du code des douanes afin de le rendre applicable aux médicaments falsifiés.

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Article 3
(art. L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle)
Autorisation des agents assermentés et habilités par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à constater une infraction au droit des marques

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 3 permet aux agents assermentés et habilités par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de constater une infraction aux dispositions du code de la propriété intellectuelle concernant les marques de produits ou de services et d’intervenir, au nom du titulaire des droits, auprès de l’autorité administrative ou des autorités judiciaires compétentes.

       Dernières modifications législatives intervenues

Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2014-315 du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon, l’ordonnance rendue par le juge civil aux fins de réaliser une saisie-contrefaçon peut autoriser, en l’absence de possibilité de saisir les produits contrefaisants, la saisie réelle de tout document s’y rapportant. Le juge civil peut également ordonner la description détaillée des matériels ou instruments ayant servi à commettre l’acte de contrefaçon.

       Position de la Commission

La Commission a adopté cet article modifié par un amendement des rapporteurs précisant, d’une part, que les agents concernés par la disposition sont ceux de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) et, d’autre part, qu’ils sont agréés par le ministre chargé de la propriété industrielle. Ce même amendement supprime l’alinéa permettant à ces agents d’intervenir devant les autorités administrative et judiciaire puisqu’une telle possibilité leur est déjà ouverte à droit constant.

1.   L’état du droit

● La preuve de l’infraction de contrefaçon par tout moyen

L’article L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle admet le recours à la saisie-contrefaçon afin d’apporter la preuve de la commission du délit de contrefaçon.

La saisie-contrefaçon

La saisie-contrefaçon est un moyen privilégié de preuve qui permet au titulaire de droits de faire procéder, en tout lieu et par tous huissiers, éventuellement assistés d’experts, à la description détaillée ou à la saisie réelle des produits ou services contrefaisants ou des instruments utilisés pour les fabriquer ou les distribuer.

Le dernier alinéa de l’article L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle prévoit que, si le demandeur ne s’est pas pourvu au fond dans un délai fixé par voie réglementaire, l’intégralité de la saisie, y compris la description, est annulée à la demande du saisi, sans qu’il ait besoin de motiver sa demande et sans préjudice des dommages et intérêts qu’il peut réclamer.

Ce même article pose cependant pour principe que « la contrefaçon peut être prouvée par tous moyens. » Ainsi, la jurisprudence a notamment admis comme preuves des procès-verbaux de l’administration des douanes ([21]), un constat dressé à la demande du titulaire de la marque par un agent de l’Agence pour la protection des programmes ([22]), quand bien même celui-ci serait intervenu dans un litige ne relevant pas du champ de compétence de l’agence ([23]) ou un constat d’achat ([24]).

L’article L. 716-4-2 du code de la propriété intellectuelle précise la qualité des personnes ayant un intérêt à agir. Il s’agit :

– du titulaire de la marque,

– du licencié s’il a recueilli le consentement du titulaire ;

– des personnes habilitées à faire usage d’une marque de garantie ou d’une marque collective, sur consentement du titulaire ;

– de la personne habilitée à utiliser l’une ou l’autre de ces marques, qui peut intervenir à l’instance engagée par le titulaire, dans le but d’obtenir la réparation de son propre préjudice ;

– enfin, de toute partie à un contrat de licence, qui peut intervenir dans l’instance en contrefaçon intentée par une autre partie afin d’obtenir la réparation du préjudice qui lui est propre.

● Des agents assermentés habilités à constater les infractions au droit d’auteur

Le code de la propriété intellectuelle permet déjà à certains agents assermentés d’apporter la preuve du constat d’infractions au droit d’auteur.

Ainsi, l’article L. 331‑2 du code de la propriété intellectuelle habilite les agents assermentés du Centre national du cinéma et de l’image animée, des organismes de défense professionnelle et des organismes de gestion collective à réaliser de tels constats probatoires. Ces agents sont agréés par le ministre chargé de la culture, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d’État.

Les agents assermentés constatant les infractions au droit d’auteur

Le décret du 29 décembre 2009 relatif à l’organisation de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI) a permis à un certain nombre d’organismes de défense ou de gestion de droits d’assermenter des agents qui pourront constater des infractions au droit d’auteur. Il s’agit de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), de la Société pour l’administration du droit de reproduction mécanique des auteurs, compositeurs et éditeurs (SDRM) ou du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), notamment.

Fruit de la fusion entre le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et HADOPI, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) verra le jour au début de l’année 2022. Elle aura pour objectif de lutter contre le streaming illégal sous toutes ses formes et devra notamment bannir le référencement des liens pirates. L’Autorité pourra être saisie par un procureur, par constat d’huissier mais également par les agents assermentés de la SACEM, du CNC, et de l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA).

Source : rapport d’information n° 3650 de MM. Christophe Blanchet et Pierre-Yves Bournazel, précité.

2.   Le dispositif proposé

L’article 3 complète les dispositions de l’article L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle. Il permet à des agents assermentés et habilités par la DGCCRF de rédiger des constats probants en matière d’infractions au droit des marques.

Il s’agit ainsi de permettre aux agents de structures représentant et protégeant les titulaires de droits – comme l’INPI et l’Unifab – de notifier à la DGCCRF la présence de contrefaçons sur un site de e-commerce, voire d’intervenir auprès de la juridiction judiciaire compétente.

Cette disposition, fruit d’une réflexion avec les titulaires de droits, permettra d’engager plus facilement des actions rapides et coordonnées, notamment au bénéfice des petites et moyennes entreprises ne disposant pas toujours de conseils juridiques et n’ayant pas toutes les moyens d’engager par elles-mêmes les actions administrative et judiciaire pour lutter contre les contrefacteurs qui nuisent à leur savoir-faire.

Enfin, l’article 3 renvoie à un décret en Conseil d’État pour déterminer les modalités d’application de cet article.

3.   La position de la Commission

La commission des Lois a voté l’article 3, modifié par un amendement de vos rapporteurs apportant trois clarifications au dispositif initial :

– d’une part, l’amendement précise que les agents concernés par les prérogatives prévues à cet article sont ceux de l’INPI ;

– d’autre part, l’amendement inscrit dans l’article le fait que les agents sont agréés par le ministre chargé de la propriété industrielle – et non par la DGCCRF – sur le modèle de ce qui existe déjà dans le code de la propriété intellectuelle pour la protection du droit d’auteur ;

– enfin, l’amendement supprime les deux derniers alinéas, les agents de l’INPI pouvant déjà intervenir auprès des autorités administrative et judiciaire.

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Article 4
(art. L. 713-7 et L. 713-8 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle)
Suspension ou suppression groupées de noms de domaine et comptes de réseaux sociaux

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 4 autorise le détenteur des droits à solliciter, auprès de l’autorité judiciaire, la suspension ou la suppression groupées des noms de domaine ou comptes de réseaux sociaux contrefaisant la marque ou permettant la publication de contenus contrefaisants.

       Position de la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

1.   L’état du droit

L’article L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle permet au titulaire des droits sur une marque de saisir la juridiction civile en référé aux fins de « prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon », au besoin sous astreinte.

Le juge civil peut également se prononcer sur requête « lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ».

Ces mesures peuvent être imposées au contrefacteur, mais également aux intermédiaires lui proposant leurs services. Elles ne peuvent être prononcées que dans la mesure où le titulaire des droits apporte des éléments de preuve, qui rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente.

Les mesures provisoires pouvant être prises par le juge civil – article L. 716-4-7 alinéas 2 et 3

La juridiction peut interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon, la subordonner à la constitution de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du demandeur ou ordonner la saisie ou la remise entre les mains d’un tiers des produits soupçonnés de porter atteinte aux droits conférés par le titre, pour empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux. Si le demandeur justifie de circonstances de nature à compromettre le recouvrement des dommages et intérêts, la juridiction peut ordonner la saisie conservatoire des biens mobiliers et immobiliers du prétendu contrefacteur, y compris le blocage de ses comptes bancaires et autres avoirs, conformément au droit commun. Pour déterminer les biens susceptibles de faire l’objet de la saisie, elle peut ordonner la communication des documents bancaires, financiers, comptables ou commerciaux ou l’accès aux informations pertinentes.

Elle peut également accorder au demandeur une provision lorsque l’existence de son préjudice n’est pas sérieusement contestable.

Malgré des dispositions qui permettent à droit constant la fermeture de sites internet ou de comptes sur les réseaux sociaux faisant la promotion de marchandises contrefaisantes, les titulaires de droits ont, en pratique, le plus grand mal à lutter efficacement contre cette infraction lorsqu’elle est commise en utilisant des moyens numériques.

Ainsi que l’observaient vos rapporteurs dans leur rapport d’information sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, « les tribunaux font une utilisation parcimonieuse et restrictive des dispositions, peut‑être car le bien à saisir est immatériel. Alors que les titulaires de droits voudraient bloquer des centaines ou milliers de sites présentant une marchandise contrefaisante, ils doivent motiver leur demande en identifiant clairement le défendeur, lier les sites entre eux en démontrant un lien de connexité, et apporter des éléments de preuve respectant de préférence la forme classique de constat d’huissier. En pratique, on parvient à bloquer quelques sites par une requête ou un référé, or, comme l’ont souligné plusieurs représentants entendus par les rapporteurs, c’est en bloquant 1 000 sites que l’action des contrefacteurs serait véritablement freinée ! » ([25])

En outre, le droit français ne permet pas aux magistrats de prononcer la fermeture du site internet proposant des contenus contrefaisants lorsque le responsable de ce site n’est pas connu, bien qu’une jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne ait ouvert la possibilité, pour le juge national, d’adresser une injonction à un intermédiaire dont les services sont utilisés en violation d’un droit de propriété intellectuelle.

Comme l’observaient vos rapporteurs, « la notion d’intermédiaire est interprétée largement [par la Cour], et il peut s’agir d’un intermédiaire permettant le commerce physique comme d’une place de marché en ligne. L’arrêt cite en outre l’article 8 de la directive de 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, qui "oblige les États membres à garantir que l’intermédiaire dont les services sont utilisés par un tiers pour porter atteinte à un droit de propriété intellectuelle puisse, indépendamment de sa propre responsabilité éventuelle dans les faits litigieux, être contraint de prendre des mesures visant à prévenir de nouvelles atteintes". 

« Ces dispositions auraient été insuffisamment ou non transposées en droit interne lors de la loi de transposition, selon M. Christophe Caron, avocat spécialisé dans le domaine de la contrefaçon et professeur de droit, entendu par les rapporteurs. » ([26])

2.   Le dispositif proposé

L’article 4 insère deux nouveaux articles L. 713-7 et L. 713-8 dans le code de la propriété intellectuelle. Le premier permet au détenteur des droits sur une marque de demander à l’autorité judiciaire la suspension ou la suppression groupées de plusieurs noms de domaine ou de plusieurs comptes sur les réseaux sociaux, lorsque ces plateformes contrefont la marque en question ou partagent des offres de vente de produits contrefaisant.

Ce même article L. 713-7 prévoit, lorsque les propriétaires de ces noms de domaine ou comptes de réseaux sociaux ne sont pas connus, que l’action judiciaire peut être engagée auprès des prestataires de service intermédiaires identifiables.

L’article L. 713-8 dispose que les plateformes de marché, les réseaux sociaux et, le cas échéant, les prestataires de service intermédiaires notifient les pages ainsi suspendues ou supprimées à leurs utilisateurs. Il renvoie les modalités d’application de cette dernière disposition à un décret en Conseil d’État.

3.   La position de la Commission

La Commission des Lois a adopté cet article sans modification.

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Article 5
Habilitation des policiers municipaux à constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 5 permet aux agents de police municipale, à titre expérimental pour une durée de cinq ans, de constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette.

       Position de la Commission

La Commission a adopté un amendement de rédaction globale des rapporteurs supprimant l’expérimentation prévue et étendant aux gardes champêtres, par cohérence, la prérogative nouvelle offerte aux agents de police municipale.

1.   L’état du droit 

● l’élargissement continu des prérogatives des policiers municipaux

Ainsi qu’en dispose l’article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure, les policiers municipaux sont chargés, sous l’autorité du maire, des tâches qu’il leur confie relevant de sa compétence en matière « de prévention et de surveillance du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques ».

Cette mission générale de police administrative est déclinée par le même article. La police municipale peut ainsi être chargée :

– de l’exécution des arrêtés municipaux (alinéa 2 du code de la sécurité intérieure) ;

– de l’inspection des bagages et, avec le consentement de leur propriétaire, de leur fouille ([27]) (alinéa 6 du code de la sécurité intérieure).

À ces missions de police administrative s’ajoutent d’autres missions de police judiciaire, les policiers municipaux étant considérés, au sens de l’article 21 du code de procédure pénale, comme des agents de police judiciaire adjoints (APJA). À ce titre, ils peuvent constater :

– la plupart des contraventions prévues par le code de la route et celles prévues par le code pénal, dès lors qu’elles ne nécessitent pas d’actes d’enquête et ne répriment pas des atteintes à l’intégrité des personnes (alinéa 2 du code de la sécurité intérieure) ;

– le délit d’attroupement portant atteinte à la libre circulation dans les parties communes des immeubles (alinéa 4 du code de la sécurité intérieure) ;

– les infractions à la police des transports publics ferroviaires ou guidés (alinéa 7 du code de la sécurité intérieure) ;

– l’outrage sexiste (avant-dernier alinéa de l’article 21 du code de procédure pénale) ;

– les infractions à certaines interdictions ou obligations édictées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire lorsqu’elles sont commises sur le territoire communal et ne nécessitent pas d’actes d’enquête (article L. 3 136-1 alinéa 6 du code de la santé publique).

● La sanction de l’acquisition de produits du tabac manufacturé à la sauvette

Avant l’entrée en vigueur de la loi LOPPSI 2 ([28]), deux dispositions permettaient de réprimer les ventes de biens non autorisées sur le domaine public :

– l’article R. 644-3 du code pénal punissait de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe « le fait, sans autorisation ou déclaration régulière, d’offrir, de mettre en vente ou d’exposer en vue de la vente des marchandises ou d’exercer toute autre profession dans les lieux publics en violation des dispositions réglementaires sur la police de ces lieux » ;

– l’ancien article L. 442-8, devenu L. 442-11 du code de commerce, interdit à toute personne d’offrir à la vente des produits ou de proposer des services en utilisant, dans des conditions irrégulières, le domaine public de l’État, des collectivités locales et de leurs établissements publics. Cette infraction est encore en vigueur et est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, conformément aux dispositions de l’article R. 442-4 du code de commerce.

Afin de rendre la sanction de l’infraction de vente à la sauvette plus efficace et dissuasive, la loi LOPPSI 2 a créé un nouvel article 446-1 dans le code pénal, élevant ainsi cette contravention au rang de délit.

Désormais, la vente à la sauvette, c’est-à-dire « le fait, sans autorisation ou déclaration régulière, d’offrir, de mettre en vente ou d’exposer en vue de la vente des biens ou d’exercer toute autre profession dans les lieux publics en violation des dispositions réglementaires sur la police de ces lieux », est punie de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende.

Depuis 2019, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 euros ([29]).

Le code pénal sanctionne également l’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette. Cette contravention, qui figure à l’article R. 644-3 du code pénal, est punie d’une amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe.

Or, les policiers municipaux ne disposent actuellement pas de prérogatives leur permettant de constater cette infraction et de verbaliser l’acheteur, alors même qu’ils assistent souvent à la commission de cette infraction.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article accroît la prérogative des agents de police municipale, à titre expérimental pour une durée de cinq ans, afin de leur permettre de constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette.

Dans la dernière année de cette expérimentation, le Gouvernement doit remettre au Parlement un rapport dressant le bilan de cette expérimentation et se prononçant sur l’opportunité et les moyens de la pérenniser.

3.   La position de la Commission

La commission des Lois a adopté l’article modifié par un amendement de rédaction globale de vos rapporteurs, supprimant l’expérimentation prévue par cet article et étendant aux gardes champêtres, par cohérence, la prérogative nouvelle offerte aux agents de police municipale.

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Article 5 bis (nouveau)
(art. L. 511-1 et L. 521-1 du code de la sécurité intérieure)
Habilitation des policiers municipaux et des gardes champêtres à constater le délit de vente à la sauvette

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 5 bis habilite les policiers municipaux et les gardes champêtres à constater l’infraction de vente à la sauvette.

Cet article, introduit par un amendement de vos rapporteurs, permet aux agents de police municipale et aux gardes champêtres de constater le délit de vente à la sauvette, prévu à l’article 446-1 du code pénal.

La vente à la sauvette dans le code pénal

Article 446-1. – La vente à la sauvette est le fait, sans autorisation ou déclaration régulière, d’offrir, de mettre en vente ou d’exposer en vue de la vente des biens ou d’exercer toute autre profession dans les lieux publics en violation des dispositions réglementaires sur la police de ces lieux.

La vente à la sauvette est punie de six mois d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende.

Pour le délit prévu au premier alinéa du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 600 €.

L’auteur de cette infraction encourt également les peines complémentaires définies à l’article 446-3 du présent code.

Vos rapporteurs estiment qu’il s’agit là d’un nouveau levier d’action afin de lutter plus efficacement contre la vente de contrefaçons dans l’espace public. Ces nouveaux pouvoirs accordés aux agents municipaux et aux gardes champêtres seraient également de nature à établir une collaboration plus étroite avec les services de la police nationale.

Une expérimentation pour les agents de police municipale était déjà prévue dans le cadre de l’article 1er de la proposition de loi relative à la sécurité globale, qui instaurait une expérimentation permettant aux communes dont les polices municipales répondent à un certain nombre de critères de demander à ce que leurs agents exercent plusieurs compétences de police judiciaire, mais ce dispositif ad hoc a été censuré par le Conseil constitutionnel ([30]). Dans leur rapport d’information, vos rapporteurs saluaient cette évolution et préconisaient d’« inciter les maires à se saisir de l’expérimentation relative à la verbalisation de la vente à la sauvette par la police municipale et construire une collaboration plus étroite avec les services de la police nationale » ([31]).

L’évolution législative proposée à cet article s’inscrit donc dans la continuité de ces travaux.

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Article 6
Instauration d’une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges concernant le commerce en ligne

Supprimé par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

À titre expérimental pour une durée de cinq ans, l’article 6 met en place, dans trois tribunaux judiciaires, une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges relatifs au commerce en ligne.

       Position de la Commission

La Commission des Lois a adopté un amendement de suppression de cet article, proposé par les rapporteurs.

1.   L’état du droit

Ainsi qu’en dispose le code de l’organisation judiciaire, dix tribunaux judiciaires sont aujourd’hui chargés des actions civiles en matière de propriété intellectuelle.

Les tribunaux judiciaires compétents en matière de propriété intellectuelle

Article L. 211-10. – Des tribunaux judiciaires spécialement désignés connaissent des actions en matière de propriété littéraire et artistique, de dessins et modèles, de brevets d’invention, de certificats d’utilité, de certificats complémentaires de protection, de topographie de produits semi-conducteurs, d’obtentions végétales, d’indications géographiques et de marques, dans les cas et conditions prévus par le code de la propriété intellectuelle.

Art.D. 211-6. – Le tribunal de grande instance ayant compétence exclusive pour connaître des actions en matière de brevets d’invention, de certificats d’utilité, de certificats complémentaires de protection et de topographies de produits semi-conducteurs, dans les cas et conditions prévus par le code de la propriété intellectuelle, est celui de Paris.

Article D. 211-6-11. – Le siège et le ressort des tribunaux judiciaires ayant compétence exclusive pour connaître des actions en matière de propriété littéraire et artistique, de dessins et modèles, de marques et d’indications géographiques, dans les cas et conditions prévus par le code de la propriété intellectuelle, sont fixés conformément au tableau VI annexé au présent code ([32]).

Dans une recommandation de 2017 liées à l’évaluation de la mise en œuvre de la directive IPRED ([33]), la Commission européenne appelait les États à se doter de juges experts en matière de propriété intellectuelle, considérant qu’il « est très important [...] de disposer de juges spécialisés dans le domaine des droits de la propriété intellectuelle et, en particulier, dans le contrôle du respect des droits. Cette spécialisation peut apporter des avantages considérables, singulièrement une prise de décision plus rapide, plus efficace et plus cohérente, source d’une plus grande sécurité juridique. »

Vos rapporteurs constatent que la France dispose d’un fort maillage de professionnels du droit sensibilisés à ces sujets. Ils observent cependant que l’essentiel des difficultés rencontrées par les titulaires de droits concerne plutôt les obstacles liés au numérique, notamment du fait de la rapidité de la disparition de la preuve et de l’absence de frontières propre à internet.

La 13ème recommandation du rapport du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon appelait ainsi à adapter l’organisation judiciaire aux mutations du commerce international en ligne, notamment en instaurant une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges relatifs au commerce en ligne dans certains gros tribunaux judiciaires.

À l’issue des auditions menées dans le cadre de la mission d’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, vos rapporteurs suggéraient « d’étudier la création d’un “cyber parquet” et d’une chambre juridictionnelle traitant de la délinquance sur le web. En effet, les magistrats ont une connaissance très inégale des enjeux et des techniques de la délinquance sur internet. La compréhension de ce type de délinquance est pourtant indispensable, notamment pour accepter ou rejeter rapidement les saisines aux fins d’injonction et de blocage de sites et de réseaux sociaux […] Il importe de connaître les particularités du droit de la propriété intellectuelle sur internet : le fonctionnement des intermédiaires, la suite d’intervenants techniques avant qu’une annonce de contrefaçon s’affiche sur l’écran, par exemple […]

« Cette spécialisation permettrait aussi d’adapter à ce domaine de délinquance la production des preuves à fournir au juge pour l’ouverture d’une enquête : en effet les “circuits” de commande et d’achat sur le web ou le “dark web”, la livraison au grossiste, le stockage (ou plutôt le fait qu’il n’y ait quasiment pas de stock, avec des arrivages et des livraisons au client en flux tendu dans le cas des réseaux de vente de contrefaçon), sont complètement différents du commerce physique et vouloir établir des preuves selon les règles habituelles conduit à ralentir ou rendre inopérante l’action des services – douane ou cyberdouane. » ([34])

2.   Le dispositif proposé

Le présent article tire les conséquences de l’absence d’une véritable spécialisation judiciaire en matière de litiges liés à Internet.

Il met ainsi en place, à titre expérimental pour cinq ans, une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges relatifs au commerce en ligne, au sein de trois tribunaux judiciaires.

Dans la dernière année de cette expérimentation, le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport en dressant le bilan.

3.   La position de la Commission

La Commission a adopté l’amendement de suppression de cette disposition, proposé par vos rapporteurs.

Les auditions menées dans le cadre de la préparation des débats parlementaires ont révélé que ce dispositif n’est pas encore assez mûr, malgré l’intérêt incontestable qu’il continue de présenter aux yeux de vos rapporteurs et des nombreux professionnels qu’ils ont auditionnés.

Vos rapporteurs espèrent que les réflexions autour de cette spécialisation pourront se poursuivre afin de parvenir à une solution satisfaisante pour les titulaires de droits.

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*   *

Article 7
Gage financier

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 7 a pour objet de compenser la charge éventuelle qui pourrait résulter de la mise en œuvre des dispositions qui précèdent sur le budget de l’État.

Il prévoit la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs, prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

       Position de la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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   Compte rendu des débats

Lors de la réunion du mercredi 17 novembre 2021, la Commission examine la proposition de loi visant à moderniser la lutte contre la contrefaçon (n° 4555) (M. Christophe Blanchet et M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteurs).

Lien vidéo :

https://assnat.fr/TkMBxV

M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteur. Encore méconnue, la contrefaçon est un phénomène qui croît pourtant de manière exponentielle, ainsi que le démontrent les nombreux travaux publiés sur le sujet par des instances telles que l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) ou l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Tous convergent vers un même constat, que j’ai également dressé l’an dernier avec mon collègue et co-rapporteur Christophe Blanchet dans le cadre de notre mission d’évaluation de la lutte contre la contrefaçon : l’action des contrefacteurs n’est pas anodine ; au contraire, elle est dangereuse à de nombreux égards et nécessite une réaction forte des pouvoirs publics.

Si, aux yeux du plus grand nombre, la contrefaçon concerne singulièrement l’industrie du luxe, la dislocation des chaînes de production en a changé le visage : désormais, ce phénomène touche tous les types d’entreprises et tous les secteurs d’activité.

Ce « crime du XXIe siècle », comme l’a qualifié l’Organisation mondiale des douanes (OMD), pose de graves problèmes de sécurité et de santé publique, notamment quand il concerne des médicaments falsifiés, des cigarettes ou des pièces automobiles contrefaites, pour ne citer que ces exemples.

Qu’il s’agisse de l’industrie du luxe, du jeu, des jouets, des articles de beauté, des articles vestimentaires ou des articles de sport, la contrefaçon est responsable de la destruction de milliers d’emplois et de pertes élevées de recettes fiscales pour l’État. Le manque à gagner dû à l’activité des contrefacteurs, estimé à 7,5 à 8 milliards d’euros par an pour nos entreprises, freine l’innovation et la compétitivité, tout en mettant à mal les savoir-faire français et européens, volés par des entreprises qui produisent sans normes et sans scrupule, au mépris des lois et de la santé du consommateur. La contrefaçon a des conséquences sur les manières de produire, donc sur la planète. Elle est, encore aujourd’hui, un moteur du travail des enfants dans les pays où, hélas, il existe toujours.

Elle est, enfin, un puissant catalyseur de la délinquance, car elle représente une activité très lucrative et moins risquée que le trafic de stupéfiants. Je le constate moi-même dans le 18e arrondissement de Paris, à Château-Rouge, à la porte de Clignancourt ou à La Chapelle, où l’on vend tout et n’importe quoi à ciel ouvert. Comme Christophe Blanchet et moi-même l’avons montré dans nos travaux, la contrefaçon attire toutes sortes de délinquants : ceux qui recourent à une « contrefaçon de subsistance », aux volumes limités, et aux seules fins d’accroître modérément leurs revenus ; ceux qui la pratiquent à titre principal, sur les marchés physiques et en ligne ; enfin, les réseaux criminels qui contrôlent la contrefaçon tant pour réaliser d’importants profits que pour blanchir ceux engrangés grâce à d’autres activités.

La France est le deuxième pays victime des contrefacteurs, après les États-Unis. Les saisies douanières, qui représentaient environ 200 000 articles interceptés en 1994, ont été multipliées par près de trente, pour atteindre 5,6 millions d’articles l’an passé. Cette expansion s’explique notamment par le développement d’internet et du commerce en ligne, qui constituent une belle opportunité pour nos entreprises, mais charrient aussi leur lot de produits contrefaits.

En 2019, 39 millions de Français avaient utilisé internet pour y réaliser des achats – et c’était avant l’épidémie de covid-19, qui a bousculé nos modes de consommation. Cette activité commerciale s’est également étendue aux réseaux sociaux, devenus les relais des entreprises, mais aussi, par effet de miroir, des contrefacteurs.

Ce constat d’une progression fulgurante du phénomène nous a conduits à déposer en juin 2021 une première proposition de loi comptant vingt-trois articles et reprenant l’ensemble des recommandations du rapport d’information que nous avions rendu quelques mois plus tôt.

Ce premier projet a été retravaillé et négocié avec le Gouvernement et avec nos partenaires de la majorité pour aboutir à un second texte plus court, déposé le 12 octobre, dans un format plus adapté aux spécificités des journées réservées à des groupes politiques. Je tiens à remercier mon groupe, Agir ensemble, d’avoir inscrit ce texte à son ordre du jour réservé. Notre assemblée s’honore en reconnaissant les nombreuses difficultés que soulève la contrefaçon et je me réjouis qu’elle puisse débattre d’un sujet aussi important.

Je remercie Christophe Blanchet de son investissement depuis trois ans et demi, ainsi que l’ensemble des acteurs que nous avons auditionnés dans le cadre de la mission du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, puis de la préparation du débat qui nous réunit. Malgré des délais très courts, tous se sont rapidement mobilisés pour nous permettre d’examiner sereinement des dispositions très attendues par les entreprises, grandes comme petites et moyennes, et qui, plus largement, concernent chacune et chacun d’entre nous.

M. Christophe Blanchet, rapporteur. L’article 1er de la proposition de loi prévoit l’instauration d’un délégué interministériel chargé de lutter contre la contrefaçon et de promouvoir les droits de propriété intellectuelle. Bien que persuadés de la pertinence de cette structure interministérielle, souvent demandée lors des auditions, nous avons été sensibles à l’argument selon lequel la récente création des groupes opérationnels nationaux antifraude (GONAF), sous l’égide de la mission interministérielle de coordination antifraude (MICAF) a changé le paysage institutionnel. Faute d’évaluation de ce dispositif, et parce que l’organisation des travaux du Gouvernement échappe au législateur, nous vous proposerons un dispositif différent, quoique complémentaire, reposant sur l’Institut national de la propriété industrielle (INPI).

Le deuxième article crée une amende civile prononçable à l’encontre de la personne condamnée pour contrefaçon. Il prévoit l’extinction de la procédure pouvant aboutir à une telle sanction par le versement d’une amende forfaitaire. Enfin, il instaure une peine complémentaire de confiscation des avoirs tirés d’une infraction de contrefaçon.

Ces dispositions visent à répondre à deux préoccupations majeures des acteurs de la lutte contre la contrefaçon : mieux sanctionner la faute lucrative, c’est-à-dire commise délibérément afin d’apporter à son auteur un gain ou une économie supérieurs aux dépenses qu’il a engagées ; faciliter la sanction de l’acheteur de produits contrefaisants par le paiement d’une amende forfaitaire – dont chacun de nous connaît les facilités procédurales.

Il ressort de nos auditions que les réflexions relatives à l’instauration d’une amende civile ne sont pas suffisamment abouties pour envisager un dispositif juridiquement solide et facilement mobilisable par les praticiens du droit. Nous proposerons donc une nouvelle rédaction qui concerne uniquement l’amende forfaitaire pour l’acheteur.

Le troisième article permettra à certains agents assermentés de constater des infractions au droit des marques, comme c’est déjà possible en matière de droit d’auteur. Nous proposerons quelques ajustements rédactionnels afin de clarifier la portée de cette disposition.

Le quatrième article autorise le détenteur des droits à solliciter auprès de l’autorité judiciaire la suspension ou la suppression groupée des noms de domaine ou comptes de réseaux sociaux contrefaisant la marque.

Le cinquième article permet aux agents de police municipale, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, de constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette. Il nous semble plus pertinent de supprimer le caractère expérimental et donc d’inscrire cette disposition dans le code de la sécurité intérieure, tout en l’étendant aux gardes champêtres ; c’est le sens de notre amendement de réécriture.

Le dernier article prévoit, également à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, l’instauration d’une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges relatifs au commerce en ligne, au sein de trois tribunaux judiciaires. Les auditions préparatoires ont révélé que ce dispositif n’était pas encore assez mûr pour être adopté en l’état, malgré l’intérêt indéniable qu’il continue de présenter. Je souhaite que les réflexions se poursuivent, avec le ministère de la Justice, pour aboutir à une solution satisfaisante pour les titulaires de droits. En attendant, nous défendrons un amendement de suppression.

Enfin, nous proposerons d’ajouter deux nouveaux articles : l’un, après l’article 2, pour étendre la pratique du « coup d’achat » douanier aux médicaments falsifiés ; l’autre, après l’article 5, pour étendre l’habilitation accordée aux policiers municipaux et aux gardes champêtres à la constatation par procès-verbal de l’infraction de vente à la sauvette.

Je souhaite à mon tour remercier nos collègues du groupe Agir ensemble pour l’inscription du texte à notre ordre du jour dans le cadre de leur niche parlementaire, particulièrement Pierre-Yves Bournazel, avec qui je travaille depuis trois ans et demi. C’est un signal fort que nous envoyons aux entreprises, petites, moyennes et grandes, aux consommateurs, mais également aux contrefacteurs. Je suis fier que l’Assemblée nationale débatte de ce sujet et j’espère que ce texte, préparé avec rigueur et sérieux, saura faire consensus dans nos rangs.

M. Thomas Rudigoz. La contrefaçon a pris une dimension mondiale au cours des dernières années, sous l’effet des opportunités offertes par la vente sur internet et par les réseaux sociaux. Elle n’épargne malheureusement aucun secteur économique. Pour les marques, non seulement il s’agit d’une concurrence déloyale, mais la piètre qualité des produits copiés ternit leur image. Pour les consommateurs, elle met en danger leur santé et leur sécurité, car la commercialisation des contrefaçons passe par des circuits opaques n’offrant aucune garantie. Pour l’État, la perte de recettes fiscales s’élèverait à quelque 10 milliards d’euros par an. Pour notre économie, le nombre d’emplois détruits est estimé à 40 000 chaque année.

La lutte contre le phénomène est donc une nécessité et une priorité. Elle mobilise les services de l’État, au premier rang desquels l’INPI et les douanes.

Nous partageons l’objectif de modernisation qui anime les auteurs de la proposition de loi.

Parmi ses dispositions phares figure l’instauration d’une amende forfaitaire délictuelle de 200 euros pour l’acheteur d’un produit de contrefaçon : c’est une avancée notable ; le dispositif a déjà fait ses preuves en matière de lutte contre l’usage de stupéfiants.

L’habilitation des policiers municipaux à verbaliser acheteurs et vendeurs en cas de vente à la sauvette de produits contrefaisants est une très bonne mesure, qui rendra beaucoup plus efficace l’action des forces de l’ordre. Nous souhaitions, avec Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue, l’introduire dans la loi « sécurité globale », mais la disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel, non pour sa teneur même, mais en raison du dispositif alors proposé. Si la disposition est adoptée, l’outil sera très bien accueilli sur le terrain – je songe notamment à la place Gabriel-Péri, à Lyon, dans le quartier de La Guillotière, qu’un marché sauvage a transformée en cour des miracles et où les forces de l’ordre sont régulièrement mobilisées en nombre, sous le regard impuissant des riverains.

S’y ajoute le renforcement de la lutte contre les médicaments falsifiés, enjeu majeur de santé publique.

Mis à part son article 4, que nous jugeons insuffisamment clair – nous aurons l’occasion d’y revenir –, et sous réserve de l’adoption de certaines modifications rédactionnelles que vous proposerez, le groupe La République en marche soutiendra la proposition de loi.

M. Philippe Gosselin. Je me réjouis de l’examen de cette proposition de loi. J’ai été rapporteur du projet de loi de lutte contre la contrefaçon sous la treizième législature : c’est dire qu’il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau. De fait, dans la Rome antique, l’usurpation de marque était sanctionnée par la fameuse loi de falsis et, en France, la contrefaçon a été considérée comme un crime jusqu’au Second Empire.

Cette pratique immorale, antiéconomique et dangereuse pour les consommateurs nie en outre la propriété intellectuelle. En la matière, la France avait, pendant la Révolution, une longueur d’avance, qu’elle a d’ailleurs conservée : c’est encore elle qui donne en partie le la à ce sujet en Europe. La négation de la propriété intellectuelle donne lieu à de très nombreux litiges – pas suffisamment, car des chefs d’entreprise renoncent faute de moyens, de preuves ou parce que la démarche serait trop complexe. Le préjudice économique est également considérable, même si le coût en est difficile à évaluer ; des milliers d’emplois sont détruits chaque année. Le phénomène prend de l’ampleur avec le développement du commerce en ligne et les diminutions d’effectifs dans les services des douanes – dont je salue l’action – alors que le nombre de conteneurs à contrôler a explosé. Mais l’opinion publique est peu sensibilisée au problème, cependant que la contrefaçon prend de nouveaux visages, qu’il s’agisse des médicaments, du lait maternisé ou des plaquettes de frein.

On peut donc se réjouir que l’approche en la matière soit renouvelée, tout en regrettant qu’elle ne l’ait pas été par un texte de l’exécutif que nous aurions pu enrichir ; le travail de nos collègues rapporteurs n’est pas en cause, mais cela aurait permis de sécuriser juridiquement certaines procédures dont nous sommes au contraire amenés à repousser la mise en œuvre. Je songe à l’amende civile, dont on parlait déjà en 2007, ou à la spécialisation judiciaire en matière de commerce en ligne, qui est une disposition intéressante qu’il nous est proposé de supprimer par voie d’amendement.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Il aura fallu à nos rapporteurs bien du travail, de la détermination et de la persévérance pour en arriver là. Le rapport d’information qu’ils ont rendu il y a quelques mois proposait de nombreuses dispositions indispensables ; le texte qui nous est soumis, beaucoup plus réduit, comporte néanmoins des mesures très utiles pour moderniser les outils de lutte contre la contrefaçon.

L’essor considérable du phénomène ces dernières années, lié à l’ouverture des frontières et au commerce en ligne, appelle une adaptation rapide de notre législation ; l’enjeu en est la sécurité, notamment économique et sanitaire. Dans le domaine économique, on évalue à 40 000 le nombre d’emplois détruits chaque année par la contrefaçon, ce qui représente environ 10 milliards d’euros de pertes fiscales pour l’État. Au niveau sanitaire, il a été question des médicaments frauduleux. Il y va aussi du respect des droits humains lorsque l’on recourt au travail des enfants pour la contrefaçon.

Le groupe Démocrates soutiendra la proposition de loi et les amendements des rapporteurs, qu’il s’agisse de l’extension de la pratique du « coup d’achat » douanier à la contrefaçon de médicaments ou de l’inscription dans le code de la sécurité intérieure de la possibilité pour les policiers municipaux et les gardes champêtres de constater le délit de vente de tabac à la sauvette. Plusieurs autres amendements sont également pertinents.

J’espère que notre débat sera constructif, car la lutte contre la contrefaçon appelle un travail commun, à l’image de celui des deux groupes de la majorité qui ont préparé le texte.

Mme Cécile Untermaier. Pour ma part, c’est pendant la quatorzième législature que j’ai été rapporteure d’un texte transposant une directive européenne qui avait fait l’objet d’un beau débat en séance publique, notamment sur la prolongation de la garde à vue pour permettre le bon déroulement des enquêtes ; cela avait été compliqué, mais nous l’avions obtenue et nous avions, je crois, bien légiféré.

Le présent texte vise l’adaptation à une situation nouvelle, née notamment du développement des achats sur internet, et cherche à répondre à une préoccupation croissante : si les entreprises se sont toujours souciées de la contrefaçon, les citoyens s’en inquiètent désormais davantage, particulièrement au nom de la santé publique. À cet égard, plutôt que d’une proposition de loi, c’est d’un projet de loi dont nous aurions besoin, élaboré en lien avec les services des douanes, qu’il faut sans doute mieux doter. La vente sur internet de médicaments de contrefaçon est effrayante ; la combattre doit être une priorité.

En ce qui concerne l’habilitation des policiers municipaux et des gardes champêtres, je suis réservée : comment un garde champêtre pourrait-il agir efficacement face à la contrefaçon ? Je suis favorable à la spécificité de chaque police pour éviter une dilution de la responsabilité.

Le groupe Socialistes, globalement favorable aux dispositions proposées, ne s’opposera pas au texte.

Mme Alexandra Louis. Saluons tout d’abord le travail de nos deux rapporteurs, qu’il s’agisse de leur précédent rapport d’information ou de la présente proposition de loi : c’est d’un travail de fond que naissent les meilleures lois. Les auditions les ont conduits à souhaiter remanier le texte par voie d’amendement.

Le droit de la propriété intellectuelle est une extension du droit de la propriété incluant le droit des marques, des brevets, des dessins et modèles, ou encore le droit d’auteur. La propriété intellectuelle contribue à l’image de marque du savoir-faire français et européen et à la culture française. Dans ce domaine, l’ampleur prise par le fléau de la contrefaçon du fait du développement de la sphère numérique nous confronte à un nouveau défi.

La France est le deuxième pays le plus affecté par le phénomène, après les États-Unis. De nombreuses entreprises sont contraintes à des stratégies visant à s’en prémunir. Aux effets économiques néfastes s’ajoutent les conséquences sociales : destructions d’emplois, menaces pour la santé des consommateurs, exportation illégale, dévalorisation de nos savoir-faire.

Le texte permettra, je l’espère, de renforcer l’arsenal juridique français et européen en la matière, déjà bien établi. Au-delà de l’indispensable répression, il importe de sensibiliser encore davantage nos concitoyens aux enjeux de propriété intellectuelle.

La proposition apporte une nouvelle pierre à l’édifice permettant de combattre la contrefaçon, notamment en s’intéressant à l’administration de la preuve. En effet, constater un acte de contrefaçon est une chose, le prouver en est une autre. La voie privilégiée depuis de nombreuses années est la saisie-contrefaçon : le juge autorise à faire procéder à une saisie, souvent par ordonnance sur requête, afin de permettre au titulaire du droit de se ménager des preuves en vue d’une action judiciaire en contrefaçon. Mais ces procédures emportent des coûts élevés et ne sont donc pas accessibles à tous. Le but est donc de permettre à certains agents assermentés de constater les infractions au droit des marques et d’intervenir au nom du titulaire du droit auprès de l’autorité administrative ou des autorités judiciaires.

Il faut également chercher à mieux quantifier le phénomène et responsabiliser les opérateurs de plateformes en ligne.

Enfin, le texte aborde un aspect annexe, mais important, en permettant aux policiers municipaux de constater la contravention d’acquisition de produits de tabac manufacturés vendus à la sauvette. La mesure s’inscrit dans la continuité de la possibilité de sanctionner les acheteurs de cigarettes à la sauvette, qu’Élise Fajgeles et moi-même avons créée il y a quelques années. L’idée n’est pas d’imposer une procédure supplémentaire à la police municipale ; cette possibilité relève de ses prérogatives, qu’il faut renforcer, et est destinée à la soutenir dans son action.

Le groupe Agir ensemble votera évidemment la proposition de loi.

Mme Nicole Sanquer. Au cours des dernières décennies, la contrefaçon a connu une forte expansion, facilitée par la mondialisation des échanges, mais aussi par le développement exponentiel d’internet et de l’e-commerce.

La contrefaçon représente une triple menace pour la santé publique, pour la sécurité des consommateurs et pour l’économie nationale. Elle constitue en ce sens un défi majeur pour les États. Au niveau de l’Union européenne, les flux de produits de contrefaçon représenteraient 6,8 % des importations, 700 000 emplois détruits et 16,3 milliards d’euros de pertes fiscales par an, et compteraient une proportion croissante de produits dangereux pour la santé et la sécurité des citoyens. Ces évaluations sont considérées comme prudentes, la complexité et l’opacité du phénomène le rendant particulièrement difficile à mesurer.

Rappelons aussi que les organisations criminelles transnationales profitent de la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux au sein de l’Union pour importer certains éléments et pièces détachées par différents points d’entrée. En 2018, l’Europe était la seconde zone d’origine des contrefaçons, qui en proviennent à 25 %, derrière l’Asie. La France est le pays dont les entreprises sont les plus touchées par le phénomène, après les États-Unis et devant l’Italie.

La fraude a aussi beaucoup évolué. Tous les produits sont concernés : articles de luxe, mais aussi objets du quotidien – brosses à dents, jouets, articles de jardin, de bricolage, de puériculture –, biens de consommation courante tels que les timbres, produits industriels. Les contrefaçons, produites à l’échelle mondiale, majoritairement en Asie, circulent de manière croissante par le fret express et postal, par l’intermédiaire des plateformes de vente en ligne.

Concernant l’acquisition de produits de tabac manufacturés vendus à la sauvette, nous saluons les nouvelles prérogatives octroyées aux agents de police à titre expérimental pour une durée de cinq ans. Notre collègue Béatrice Descamps avait déjà donné l’alerte en 2018 dans sa proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le commerce illicite des produits du tabac. Il s’agissait de protéger les buralistes, dont le métier est menacé, mais aussi d’éviter aux territoires frontaliers, comme le Valenciennois, d’être investis par les trafiquants à cause de la hausse drastique des prix du tabac légal.

L’Assemblée a également adopté, suivant l’avis du Gouvernement, un amendement de Laurent Saint-Martin et Éric Woerth au PLF pour 2022, visant à doubler le montant des amendes minimales et maximales encourues en cas de fabrication, détention, vente ou transport illicite de tabac.

Saluons aussi le travail des douanes, qui ont adapté leurs méthodes et leurs moyens d’intervention en développant leur action sur internet, notamment grâce à des services spécialisés comptant des cyberdouaniers, en vue d’infiltrer et de démanteler les organisations clandestines intervenant sur le darknet.

Quant à la peine de confiscation des avoirs, elle me semble bienvenue. La saisie des avoirs criminels, sous l’égide de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC), créée par la loi Warsmann, donne des résultats satisfaisants.

Le groupe UDI et indépendants soutiendra la proposition de loi.

M. Ugo Bernalicis. Je félicite mes deux collègues pour leur rapport d’information dans le cadre du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques.

Je suis opposé au transfert de compétences aux policiers municipaux et aux gardes champêtres. Je ne vois pas le rapport entre la contrefaçon et les missions de ces derniers, dont la qualification judiciaire leur permet de lutter contre les atteintes à l’environnement. La lutte contre la contrefaçon doit être concentrée entre les mains de la police nationale. Rappelons que, dans le cadre de la loi « sécurité globale », un tel transfert au profit de la police municipale a été censuré par le Conseil constitutionnel.

Plus généralement, les contrefaçons gagnent du terrain pour deux raisons : premièrement, le capitalisme mondial financiarisé et les traités de libre-échange, qui ont accru le volume des échanges tout en réduisant le nombre de contrôles ; deuxièmement, le développement du commerce en ligne, qui facilite la commission de ce genre d’infractions.

Concernant le premier élément, pas d’amélioration en perspective à moins de remettre en cause les traités de libre-échange. Une compétition féroce oppose les ports et les aéroports, qui cherchent à immobiliser les marchandises le moins longtemps possible, donc à réduire le temps consacré aux contrôles. Il faudrait donc une réglementation au niveau européen pour viser un taux de contrôles commun.

Sur le deuxième point, nous devons renforcer nos moyens douaniers et adopter une politique proactive sur internet pour y découvrir des infractions. Nous avons perdu des douaniers, puis leur nombre a de nouveau augmenté du fait du Brexit, mais il nous en faudrait bien davantage pour être à la hauteur des enjeux en matière de lutte contre la contrefaçon.

Mme Marie-George Buffet. La contrefaçon contrevient au respect de la propriété intellectuelle, entrave les débouchés des entreprises et met les consommateurs en péril – outre les médicaments, d’autres produits de contrefaçon peuvent comporter des dangers, par exemple les pièces automobiles.

La contrefaçon est bien sûr stimulée par internet, mais surtout par le libre-échange et la mondialisation effrénée sans aucun accord sur la régulation et les contrôles. Comme cela vient d’être dit, il faudrait convenir de la durée et des moyens des contrôles afin d’échapper à la concurrence sauvage qui conduit à négliger ces derniers pour préserver le trafic çà ou là.

Nous avons des douaniers et une police nationale, des hommes et des femmes formés, chargés de missions spécifiques. Pourquoi étendre les compétences de contrôle des contrefaçons aux policiers municipaux et, a fortiori, aux gardes champêtres ? Vous qui parlez de vente de tabac à la sauvette, allez donc faire un tour aux Quatre-Routes, à La Courneuve : vous verrez que, face à ce trafic, il faut une police nationale formée, prête à affronter des trafiquants très nombreux, très déterminés et parfois très violents, y compris entre eux. Je ne pense pas que ce soit à la police municipale de résoudre le problème, d’autant qu’elle a déjà fort à faire pour accomplir ses missions propres – assurer le respect mutuel entre citoyens, la propreté des villes, la circulation, etc.

Le groupe GDR ne s’opposera pas à la proposition de loi, mais nous insisterons sur ce point.

Mme Emmanuelle Ménard. Dans le cadre de cette proposition de loi bienvenue, deux points méritent l’attention.

Premièrement, le texte devrait parler de la fraude aux appellations d’origine protégée (AOP) et aux indications géographiques protégées (IGP), notamment les appellations viticoles, afin de permettre de lutter contre la contrefaçon d’étiquettes.

Deuxièmement, j’approuve la possibilité d’intervention des gardes champêtres, aux côtés de la police municipale, pour lutter contre les trafics en tous genres, notamment de cigarettes et d’autres produits du tabac. J’entends le risque de dilution des compétences, mais, s’agissant de certaines pratiques frauduleuses, l’apport d’une police de proximité et des gardes champêtres, qui détiennent plus de 150 compétences, en zone urbaine et rurale, peut être précieux, et il serait dommage de s’en priver.

M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteur. Merci à tous de votre intérêt pour le texte et de vos propos.

Outre la nécessité de responsabiliser les plateformes et de donner les moyens permettant de remonter les filières et les réseaux mafieux pour s’attaquer à l’argent, nerf de la guerre, il faut une coopération internationale. Les pays comme le nôtre doivent trouver des alliés pour réguler ce phénomène dangereux. Quand on veut, on peut : parmi les pays spécialistes de la contrefaçon, on compte l’organisateur des Jeux olympiques et paralympiques de 2008 ; habituellement, lors de telles manifestations, les contrefaçons sont légion ; cette fois, pas un seul objet associé à l’événement n’avait été contrefait !

L’éducation et la prévention, des acheteurs comme des consommateurs, sont un autre sujet important que nous ne pourrons éluder et qui figure dans notre rapport. La contrefaçon, c’est la destruction des emplois, de notre modèle social, de nos savoir-faire, de notre tissu de TPE et de PME mais c’est aussi l’exploitation d’enfants à l’autre bout du monde, l’affranchissement des normes, le réchauffement climatique.

J’en viens à la police municipale et aux gardes champêtres. La police municipale est un acteur essentiel du maillage de nos territoires puisqu’elle travaille au plus près du terrain. La maire de Paris, à qui j’en ai parlé, serait d’accord pour lui attribuer cette nouvelle compétence. La police nationale remplit ses missions mais elle a besoin de s’appuyer sur des maillons intermédiaires pour assurer la sécurité et la tranquillité de nos quartiers. La police municipale est l’un de ces maillons. Madame Buffet a évoqué La Courneuve. De mon côté, je connais bien le 18e arrondissement de Paris. À La Chapelle, à la porte de Clignancourt, à Château-Rouge, les vendeurs occupent illégalement le domaine public, ce qui génère des tensions, du bruit, trouble la tranquillité des habitants, qui ne se sentent plus en sécurité. Les vendeurs eux-mêmes travaillent parfois pour des filières mafieuses qui exploitent cette misère humaine. Quant à mentionner le terme de garde champêtre dans le texte, je ne suis pas le mieux placé pour donner mon avis, même si je suis né dans le Cantal. Cependant, toutes les personnes que nous avons auditionnées pensent que ce serait nécessaire.

M. Christophe Blanchet, rapporteur. Monsieur Rudigoz, vous avez raison, l’adoption de l’amende forfaitaire serait une grande avancée.

Monsieur Gosselin, oui, la contrefaçon est une pratique immorale, antiéconomique et dangereuse. Il est vrai que certaines entreprises se résignent, en particulier les PME et les TPE, car elles n’ont pas les structures juridiques qui leur permettraient de résister, contrairement aux grands groupes. Espérons que notre proposition de loi sera adoptée. Nous aurions préféré qu’elle soit plus fournie mais vous connaissez le principe de la niche parlementaire : il était plus raisonnable de nous en tenir à six articles.

Aujourd’hui, les produits issus de la contrefaçon ne sont plus acheminés par containers. À Roissy, ce sont six colis par seconde qui arrivent en provenance de Chine – je ne parle même pas de l’Asie dans son ensemble ! Nous devons nous adapter aux nouvelles pratiques des contrefacteurs. Les produits de luxe ne sont plus les seuls à être contrefaits, tous les produits du quotidien sont concernés et les conséquences peuvent être graves. La Fédération des industries mécaniques nous a appris que 900 roulements à billes contrefaits avaient été saisis en 2019, 15 000 l’an dernier. On retrouve ces roulements à billes dans les voitures mais aussi dans les remontées mécaniques. Les entreprises qui installent ces contrefaçons les achètent de bonne foi car les certificats d’origine sont, eux aussi, contrefaits ! Or au bout d’un certain nombre de tours, certains cassent, et c’est le jour de l’accident que tout est découvert.

Vous avez raison, madame Louis, de rappeler qu’il faut également sensibiliser nos concitoyens. Quatre Français sur dix achètent de la contrefaçon sans le savoir. Ils se font piéger. En revanche, six Français sur dix sont conscients de ce qu’ils font : il faut faire preuve de pédagogie pour les informer qu’il n’y a pas que des milliards d’euros et 40 000 emplois en jeu, mais aussi la santé publique et la sécurité de leurs enfants. Les jeux et jouets pour enfants sont la deuxième catégorie de produits les plus contrefaits en France, avec tous les risques d’étouffement ou d’intoxication que cela emporte.

Les contrefacteurs sont rusés, on peut se laisser piéger facilement. Prenez l’exemple d’une paire de baskets de marque, qui coûterait une centaine d’euros. Si le contrefacteur la met en vente sur un réseau à un prix de 5 euros, il est bien évident que l’acheteur comprendra de quoi il s’agit. En revanche, s’il la propose à 90 euros, le consommateur se fera duper car il pensera acheter un modèle de marque. Nous devons responsabiliser les gérants de plateforme et permettre au consommateur de se retourner contre eux.

Madame Sanquer, il est vrai qu’il existe un lien financier entre la contrefaçon et la criminalité.

Monsieur Bernalicis, nous devons mieux surveiller le commerce en ligne et nous espérons que cette proposition de loi le permettra.

Madame Buffet, la contrefaçon est une question de sécurité globale et il nous semble que la mutualisation de tous les services, qu’il s’agisse des policiers municipaux ou des gardes champêtres, permettra d’agir plus efficacement. Rappelons que les jeux et jouets pour enfants sont les produits les plus fréquemment saisis après les médicaments et les pièces pour automobiles.

Madame Ménard, nous partageons votre constat sur les étiquettes de vin, mais cette proposition de loi n’est pas le bon moyen de lutter contre cette fraude.

Article 1er : Instauration d’un délégué interministériel à la lutte contre la contrefaçon

Amendement CL5 de M. Pierre-Yves Bournazel. 

M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteur. La création d’un délégué interministériel, alors que le nouveau dispositif des groupes opérationnels nationaux antifraude n’a pas encore été évalué, ne semble pas opportune à ce stade. Par ailleurs, son instauration n’est pas du ressort de la loi. Il importe néanmoins de renforcer l’information et les données utiles à la quantification de la contrefaçon. Cet amendement tend à habiliter l’INPI à collecter l’ensemble de telles données.

La commission adopte l’amendement et l’article 1er est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CL1 de Mme Emmanuelle Ménard tombe.

Article 2 (art. L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle) : Instauration d’une amende civile et d’une amende forfaitaire à l’encontre d’une personne condamnée pour contrefaçon

Amendement CL6 de M. Pierre-Yves Bournazel. 

M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteur. Il s’agit d’instaurer une procédure d’amende forfaitaire délictuelle de 200 euros en cas d’achat de contrefaçon. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 150 euros et celui de l’amende forfaitaire majorée, de 450 euros.

La commission adopte l’amendement et l’article 2 est ainsi rédigé.

Après l’article 2

Amendement CL7 de M. Pierre-Yves Bournazel. 

M. Christophe Blanchet, rapporteur. Les marchandises contrefaisantes peuvent déjà faire l’objet de coups d’achats, sur le fondement du code des douanes. Cependant, tous les médicaments falsifiés ne sont pas issus de la contrefaçon. Afin d’améliorer la lutte contre l’importation de médicaments falsifiés, cet amendement tend à modifier l’article 67 bis-1 du code des douanes afin de rendre cette procédure applicable à de telles marchandises. Cet article permet aux agents des douanes, sur autorisation du procureur de la République, d’acheter et de contrôler la nature des produits prohibés, d’identifier les auteurs et les complices et d’effectuer les saisies.

La commission adopte l’amendement.

Article 3 (art. L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle) : Autorisation des agents assermentés et habilités par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à constater une infraction au droit des marques

Amendement CL8 de M. Pierre-Yves Bournazel. 

M. Christophe Blanchet, rapporteur. Suite aux échanges avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), l’amendement prévoit, sur le modèle des dispositions prises pour protéger le droit d’auteur, que les agents soient agréés par le ministre chargé de la propriété industrielle et non par la DGCCRF. Par ailleurs, il tend à préciser la qualité des agents qui pourraient être agréés.

Enfin, il vise à supprimer la possibilité d’agir auprès de l’autorité administrative et judiciaire pour le compte des titulaires de droits afin de préserver l’indépendance des agents, inhérente à la procédure d’agrément, dont les modalités sont renvoyées à un décret en Conseil d’État.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 3 modifié.

Article 4 (art. L. 713-7 et L. 713-8 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) : Suspension ou suppression groupées de noms de domaine et comptes de réseaux sociaux

Amendement CL3 de Mme Emmanuelle Ménard. 

Mme Emmanuelle Ménard. Certaines AOP ou IGP sont aussi victimes de contrefaçon, notamment pour ce qui concerne les appellations viticoles. Ces pratiques portent préjudice aux consommateurs et aux producteurs. Dans le Languedoc-Roussillon, les viticulteurs ont dénoncé la francisation de vins espagnols sur les étiquettes ainsi que des présentations susceptibles d’induire les consommateurs en erreur quant à la véritable origine des produits. Certains en sont venus à mener des actions coups de poing en 2016 dans les supermarchés et à la frontière franco-espagnole.

M. Christophe Blanchet, rapporteur. Sur le fond, je suis d’accord : la protection des AOP et des IGP est essentielle et mérite toute l’attention du législateur. Pour des raisons de forme, cependant, je ne peux accepter votre amendement. D’une part, il devrait se situer dans une autre partie du code de la propriété intellectuelle, au titre II du livre VII, consacré aux appellations d’origine. D’autre part, la modernisation du régime juridique de ces appellations n’est pas l’objet de ce texte qui ne traite que de la protection des marques.

Mme Emmanuelle Ménard. Je le rédigerai autrement afin de le déposer à nouveau en séance.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 4 non modifié.

Article 5 : Habilitation des policiers municipaux à constater la contravention d’acquisition de produits du tabac manufacturé vendus à la sauvette

Amendement CL10 de M. Pierre-Yves Bournazel. 

M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteur. Il s’agit d’habiliter les gardes champêtres à constater l’infraction d’achat à la sauvette de cigarettes.

M. Ugo Bernalicis. Les policiers municipaux le sont parce qu’ils ne sont pas des policiers nationaux. Leurs missions sont différentes parce que leur métier n’est pas le même. Si tel n’était pas le cas, il vous faudrait accepter la proposition que notre groupe renouvelle depuis 2017 : les intégrer dans la police nationale pour créer une vraie et unique police nationale de proximité, sous la double autorité du maire et du préfet. En attendant, les policiers municipaux n’ont ni les prérogatives ni les compétences des policiers nationaux, notamment en matière judiciaire. Or, pour mettre fin à un trafic de contrefaçon, il ne suffit pas d’arrêter le revendeur, il faut s’attaquer au réseau et mener des enquêtes.

Par ailleurs, les policiers municipaux ne sont pas démunis. Comme tout citoyen, ils peuvent, en vertu de l’article 73 du code de procédure pénale, appréhender l’auteur d’un crime ou d’un délit flagrants et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche.

Nous ne souhaitons pas que les prérogatives des policiers nationaux soient étendues aux policiers municipaux et aux gardes champêtres.

Mme Emmanuelle Ménard. La vente de cigarettes à la sauvette, pour ne citer que cet exemple, est un fléau. L’Occitanie est l’une des régions les plus frappées de France par ce phénomène : entre 2019 et 2020, la consommation de cigarettes issues de la contrebande est passée de 0,5 % à 12 %. Cet été, à Montpellier, un trafic en provenance d’Ukraine, qui alimentait tout le département, a été démantelé. Le marché parallèle du tabac fait perdre au fisc entre 2,5 et 3 milliards par an.

Il semble donc légitime de mettre toutes les chances de notre côté pour lutter contre ces trafics, ce qui suppose de faire appel à toutes les forces de sécurité en présence, qu’il s’agisse de la police nationale, de la gendarmerie, des douanes mais aussi de la police municipale ou des gardes champêtres. Ces derniers travaillent au plus près du terrain et sont les mieux placés pour constater ces infractions. À Béziers, le premier réflexe des débitants de tabac qui constatent la présence de trafiquants devant leur commerce est d’appeler la police municipale.

M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteur. Rappelons une évidence : le tabac est une substance nocive, bien plus encore lorsqu’il est contrefait. Il faut bien mettre fin à ce trafic qui s’accompagne de nuisances importantes pour les habitants des quartiers ! Or, la police municipale est la mieux placée pour intervenir rapidement. Elle arpente les rues, à l’écoute des problèmes des habitants. Le rôle de la police nationale, même si ses moyens ont été renforcés, consiste plutôt à remonter les filières pour démanteler les réseaux, souvent mafieux. Police nationale et police municipale sont les maillons d’une même chaîne, destinée à assurer la sécurité de nos concitoyens. Ils doivent travailler ensemble, de manière complémentaire, sans s’opposer.

Mme Lamia El Aaraje. Nous sommes élus de territoires qui se ressemblent. La vente de cigarettes à la sauvette est un fléau, dont les nuisances, dans le 18e ou à la porte de Montreuil, sont les mêmes. Mais si nous partageons le constat et les objectifs, nous divergeons sur les méthodes.

La présence massive de policiers sur le terrain est une première réponse, ne serait-ce que pour chercher les planques. En accord avec la police nationale, nous avons installé un commissariat mobile. Les policiers nationaux, présents quotidiennement, ont travaillé étroitement avec les policiers municipaux. Mais ne confondons pas : la lutte contre ces trafics relève de la responsabilité de l’État, et les policiers municipaux, s’ils peuvent soutenir les policiers nationaux, ne sauraient en détenir les prérogatives. Surtout, ils n’ont pas les moyens de suivre le rythme de cette lutte permanente – aussitôt qu’un revendeur est arrêté, un autre prend le relais.

M. Éric Diard. Je voudrais rappeler l’extrême violence – un phénomène récent, jusqu’alors circonscrit au trafic de drogue – de ces trafiquants de cigarettes. La semaine dernière, à Marseille, ils se sont tiré dessus !

M. Philippe Gosselin. Oui, nous sommes loin des sacs à main de marque en vente sur le marché de Vintimille ! La contrefaçon recouvre désormais des filières, des réseaux mafieux, qu’ils soient internationaux ou locaux. Nous devons les démanteler.

M. Thomas Rudigoz. Nous voterons cet amendement. N’oublions pas que nous avons autorisé, il y a quelques années, l’armement des policiers municipaux. Ceux-ci sont formés, ils accomplissent un travail exemplaire, à Lyon notamment, et il ne me semble pas que nous ayons eu à déplorer un quelconque problème. Les opérations sur les marchés noirs sont souvent menées conjointement avec la police municipale mais celle-ci reste cantonnée à un rôle d’observation, ce qui est dommage.

M. Christophe Blanchet, rapporteur. Le calcul est simple : sur le marché légal, le tabac se vend 4 euros le kilogramme ; sur le marché noir, un paquet de cigarettes – soit 20 grammes de tabac – coûte 4 euros. Il suffit donc de vendre 1 paquet pour rentabiliser l’achat de la matière première nécessaire à la fabrication de 49 paquets.

Les usines qui fabriquent ce tabac de contrebande sont situées en Europe, pour la plupart dans les pays de l’est. Il est transporté dans des camions-usines qui coûtent 100 000 euros, soit bien moins que les bénéfices d’une journée de production. Les réseaux criminels mafieux, à l’origine de ces trafics, s’étendent jusqu’aux quartiers que vous avez cités, où ils exploitent la misère humaine. Des investigations doivent être menées pour remonter les filières, mais il faut aussi responsabiliser l’acheteur en le sanctionnant. C’est à ce niveau, la contravention d’acquisition, que les policiers municipaux et les gardes champêtres peuvent agir.

Pourquoi les gardes champêtres ? Parce que la vente de cigarettes de contrebande ne se déroule pas uniquement dans les grandes villes. À Trouville-sur-mer, l’été, les touristes sont si nombreux qu’ils attirent les revendeurs.

La commission adopte l’amendement et l’article 5 est ainsi rédigé.

Après l’article 5

Amendement CL11 de M. Pierre-Yves Bournazel. 

M. Pierre-Yves Bournazel, rapporteur. L’amendement vise à permettre aux agents de police municipale et aux gardes champêtres de constater l’infraction de vente à la sauvette. Pour une lutte efficace contre les ventes illégales, il est essentiel que la police municipale collabore de façon étroite avec la police et la gendarmerie nationales.

La commission adopte l’amendement.

Article 6 : Instauration d’une chambre juridictionnelle consacrée aux litiges concernant le commerce en ligne

Amendement de suppression CL12 de M. Pierre-Yves Bournazel. 

M. Christophe Blanchet, rapporteur. Nous sommes convaincus que la justice doit se spécialiser en matière de litiges relatifs au commerce en ligne. C’est la raison pour laquelle nous avons proposé, à l’article 6, d’expérimenter l’instauration d’une chambre juridictionnelle spécifique au sein de trois tribunaux judiciaires.

Cependant, les auditions préparatoires à l’examen de la proposition de loi ont révélé que ce dispositif n’était pas assez mûr pour être adopté en l’état, malgré l’intérêt que lui reconnaissent les professionnels auditionnés.

M. Philippe Gosselin. La spécialisation des tribunaux est une décision importante qui ne peut être prise dans le cadre d’une proposition de loi mais nécessite un engagement du garde des Sceaux. Notons que cette spécialisation existe déjà dans certains domaines – je pense notamment aux brevets d’invention – qui présentent un aspect très technique et où les dossiers requièrent un traitement spécifique. Gardons espoir, cela ne fait jamais que quinze ans que nous demandons un tel dispositif !

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 6 est supprimé.

Article 7 : Gage financier

La commission adopte l’article 7.

Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi visant à moderniser la lutte contre la contrefaçon (n° 4555) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

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   Personnes entendues

   M. Éric Cuziat, sous-directeur Industrie, santé, logement

   M. Xavier Bouton, chef du bureau des produits industriels

   M. Yann Ambach, chef du bureau « Politique tarifaire et commerciale », sous-direction Commerce international de la direction générale

   Mme Karine Boris-Treille, adjointe au chef de bureau « Politique tarifaire et commerciale », sous-direction Commerce international de la direction générale

   M. Alain Lefebvre, chef du bureau « Affaires juridiques », sous-direction Affaires juridiques et lutte contre la fraude de la direction générale

   M. Martin Fleury, chef de cabinet de la directrice générale des douanes et droits indirects

   M. Éric Tison, sous-directeur des libertés publiques

   Mme Sabrina Palmier, cheffe du bureau des questions pénales

   M. Thibault Cayssials, magistrat

   M. Pascal Faure, directeur général de l’INPI

   M. Bernard Leroy, directeur

 

   Mme Delphine Sarfati-Sobreira, directrice générale

   M. Rémi Mulemba, chargé d’affaires publiques et juridiques

   M. Alain Ingberg, président

   M. Yves-Alain Sauvage, head of Anticounterfeit

   M. Philippe Coy, président

   M. Cédric Michel, président

 

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([1]) Rapport d’information n° 3650 de MM. Christophe Blanchet et Pierre-Yves Bournazel, en conclusion des travaux du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, XVème législature, 9 décembre 2020.

([2]) Cour des comptes, La lutte contre les contrefaçons, mars 2020.

([3]) Cour des comptes, La politique publique de lutte contre la contrefaçon, 2014.

([4]) Son président actuel est M. Richard Yung, sénateur des Français établis hors de France.

([5]) Rapport d’information n° 3650 de MM. Christophe Blanchet et Pierre-Yves Bournazel, en conclusion des travaux du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, XVème législature, 9 décembre 2020.

([6]) Conseil d’État, 31 octobre 1980, n° 11629.

([7]) L’article L. 716-4-10 précise que cette somme est nécessairement supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte.

([8]) Rapport d’information n° 3650 de MM. Christophe Blanchet et Pierre-Yves Bournazel, précité.

([9]) Ibid.

([10]) Ibid.

([11]) Article 495-17 du code de procédure pénale : « Lorsque la loi le prévoit, l’action publique est éteinte par le paiement d’une amende forfaitaire délictuelle dans les conditions prévues à la présente section. »

([12]) Conseil constitutionnel, décision n° 2019-778 DC du 21 mars 2019, point 252.

([13]) Cette liste concerne notamment des contraventions au code de la route, certaines contraventions en matière de transport et de circulation, de protection de l’environnement, en matière rurale et maritime, en matière sanitaire, ainsi que des contraventions relatives aux bruits ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d’autrui.

([14]) Voir par exemple les délits d’installations illicites (article 322-4-2 du code pénal), usage illicite de stupéfiants (article L. 3421-1 du code de la santé publique) ; vente à la sauvette (article 446-1 du code de procédure pénale), transport routier en violation des règles relatives au chronotachygraphe (article L. 3315-5 du code des transports), vente d’alcool à un mineur et vente d’alcool dans les foires (articles L. 3352-5 et L. 3353-3 du code de la santé publique), occupation des parties communes d’immeubles collectifs (article L. 126-3 du code de la construction et de l’habitat) et abandon ou de dépôt illicite de déchets (article L. 541-46 du code de l’environnement).

([15]) Article 497-15 et 529 du code de procédure pénale.

([16]) Article 529 du même code.

([17]) Article 497-15 du même code.

([18]) Directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain.

([19]) Directive 2011/62/UE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2011 modifiant la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, en ce qui concerne la prévention de l’introduction dans la chaîne d’approvisionnement légale de médicaments falsifiés.

([20]) Ordonnance n° 2016-1729 du 15 décembre 2016 relative aux pharmacies à usage intérieur.

([21]) TGI Paris, 16 déc. 1992.

([22]) L’agence pour la protection des programmes (APP) est un organisme européen spécialisé dans la protection des logiciels, applications mobiles, bases de données, sites web et données stratégiques.

([23]) Rennes, 23 mars 2010.

([24]) Limoges, 17 mars 2010.

([25]) Rapport d’information n° 3650 de MM. Christophe Blanchet et Pierre-Yves Bournazel, précité.

([26]) Ibid.

([27]) Cette prérogative s’applique uniquement aux agents affectés sur décision du maire à la sécurité d'une manifestation sportive, récréative ou à celle des périmètres de protection ou à la surveillance de l'accès à un bâtiment communal.

([28]) Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

([29]) Le montant de l'amende forfaitaire minorée est de 250 euros et le montant de l'amende forfaitaire majorée est de 600 euros.

([30]) Vos rapporteurs observent à ce titre que la censure du Conseil constitutionnel n’était pas due aux infractions listées à cet article, mais s’expliquait en raison du dispositif de transmission directe des procédures, sous le contrôle des chefs de service ou directeur de la police municipale, qui n’ont pas la qualité d’officier de police judiciaire.

([31]) Proposition n° 2 du rapport d’information n° 3650 de MM. Christophe Blanchet et Pierre-Yves Bournazel, précité.

([32]) Ces tribunaux sont situés à Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nanterre, Nancy, Paris, Rennes, Strasbourg et Fort-de-France.

([33]) Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle.

([34]) Rapport d’information n° 3650 de MM. Christophe Blanchet et Pierre-Yves Bournazel, précité.

([35]) Cet organisme a procédé à son enregistrement au répertoire des représentants d’intérêt géré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.