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N° 4707

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 novembre 2021.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi visant à atténuer les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur générées par Parcoursup,

 

 

 

Par Mme Karine LEBON,

 

 

Députée.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro : 4588.


 

 

 


—  1  —

SOMMAIRE

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 Pages

avant-propos

I. L’opacité du fonctionnement de Parcoursup

A. Une transparence de façade

B. Des algorithmes locaux soustraits au regard public

C. L’émergence de pratiques de sélection à la légalité et l’opportunité douteuses

D. Un besoin de transparence renforcé par la récente réforme du baccalauréat

II. Un système sous pression

A. L’augmentation continue du nombre de filières en tension

B. L’absence d’un cadre de pilotage clair

C. La situation particulièrement dégradée des bacheliers professionnels et technologiques

III. Un service public de l’orientation défaillant

A. Des initiatives nombreuses mais peu coordonnées

B. Un renforcement dans le cadre du plan étudiant aux effets décevants

C. Une persistance des inégalités appelant à un renforcement de l’accompagnement à l’orientation

commentaires des articles

Article 1er Amélioration de la plateforme Parcoursup

Article 2 Amélioration du processus d’information et d’orientation des candidats à l’enseignement supérieur

TRAVAUX DE LA COMMISSION

annexe  1 : Liste des personnes entendues par la rapporteure

Annexe  2: textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

 


—  1  —

   avant-propos

 

Il est certain que l’on ne trouvera personne ou presque pour regretter la disparition du logiciel « Admission Post Bac » (APB), qui avait pour fonction l’affectation des néo-bacheliers dans l’enseignement supérieur. Consistant en un élargissement d’une expérimentation menée par l’Institut national polytechnique de Toulouse, APB a représenté un indéniable progrès dans les premières années de son déploiement. À partir de 2009, il accueillait la quasi-totalité des filières proposant des formations de première année de l’enseignement supérieur et a ainsi répondu à un réel besoin de centralisation des canaux de candidature, autrefois particulièrement nombreux. Si certaines formations continuaient de recruter « hors APB », la vraie difficulté a résulté dans la prise en charge d’une reprise de l’augmentation de la démographie étudiante qui est intervenue de manière simultanée à l’incorporation des licences universitaires dans le logiciel. En effet, entre 2009 et 2016, le nombre de bacheliers a cru de 17 %, cette augmentation ayant été principalement absorbée par les licences universitaires.

Si ces filières sont, en droit, non sélectives (le baccalauréat représentant un « ticket d’accès » à ces formations), les universités ont rencontré de grandes difficultés à faire face à cet afflux massif de néo-bacheliers, issus du baby-boom des années 2000. Alors que la population étudiante a fortement augmenté entre 2009 et 2016, la dépense intérieure par étudiant s’est contractée sur la même période : en hausse constante jusqu’en 2010, elle est revenue en 2016 à son niveau de ?, c’est‑à-dire à 11 510 euros. Cette donnée générale ne saurait éluder les écarts de dotation en fonction de la filière d’enseignement supérieur considérée : la dépense moyenne par étudiant représentait 10 210 euros pour un étudiant à l’université, contre 15 110 euros pour un étudiant en classe préparatoire aux grandes écoles (CPGE). En somme, les universités ont dû faire face à une massification importante de leurs effectifs dans un contexte budgétaire tendu ([1]).

Outre la dégradation des conditions d’étude liée à une baisse importante du taux d’encadrement dans les filières universitaires (ratio du nombre d’emplois pour 100 étudiants) passé de 9,8 en 2013 à 8,9 en 2018, un nombre croissant d’entre elles ont atteint leur capacité maximale d’accueil. Dès lors qu’il était impossible de départager des candidats sur des critères objectifs, APB procédait à un tirage au sort. À l’opposé des valeurs fondant le système éducatif français, ce procédé de sélection a été vertement critiqué. Il a mobilisé, contre lui, des institutions publiques comme la Cour des comptes ([2]), la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ([3]), mais surtout une large partie de la population : 80 % d’entre elle la jugeait profondément injuste – ce chiffre atteignait 81 % des parents de lycéens et 87 % des parents d’étudiants ([4]).

La loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (« loi ORE »), qui constituait le volet législatif du « Plan étudiant », a profondément réformé l’article L. 612-3 du code de l’éducation en établissant une nouvelle « procédure nationale de préinscription », matérialisée par la plateforme Parcoursup.

Les ambitions de ce plan étaient importantes : amélioration de l’accompagnement à l’orientation et accès plus juste et plus transparent dans le supérieur, notamment. Malheureusement, la dépense par étudiant a continué de baisser ([5]).

Dans cette mesure, l’instauration de Parcoursup ne pouvait que conduire à une réorganisation d’une sélectivité croissante pour l’accès à l’enseignement supérieur, particulièrement préjudiciable à deux titres.

● En premier lieu, cette sélectivité contribue à entretenir les inégalités très présentes dans le système éducatif français ([6]), en empêchant une véritable démocratisation de l’enseignement supérieur. En effet, pour l’année universitaire 2018-2019, les étudiants des catégories socio-professionnelles les plus favorisées étaient fortement surreprésentés à l’université en comparaison avec les étudiants issus de milieux plus modestes ([7]). Aux inégalités socio-économiques doivent être ajoutées les inégalités territoriales, qui jouent également un rôle important dans les choix d’orientation post-bac ([8]). Cela est particulièrement vrai pour les étudiants issus des territoires ultra-marins.

● En second lieu, les bacheliers professionnels et technologiques, où les classes les moins favorisées sont davantage représentées, ressentent plus fortement les conséquences de cette sélectivité croissante. Cela se traduit par des sorties prématurées du système scolaire, ainsi que par des orientations par défaut, le plus souvent en licence universitaire, où le taux de réussite de ces bacheliers est extrêmement faible (3,4 % en 3 ans pour les bacheliers professionnels) ([9]).

Face à ce constat, une réforme globale de l’enseignement supérieur devrait être conduite, qui s’appuierait nécessairement sur une hausse substantielle du budget consacré à l’enseignement supérieur. Seul un effort financier conséquent pourrait en effet permettre de créer des capacités d’accueil suffisantes pour accéder aux demandes d’orientation formulées par les néo-bacheliers.

Tel n’est toutefois pas l’objet de la présente proposition de loi. S’appuyant sur les différents travaux d’évaluation qui ont été conduits depuis l’entrée en vigueur de la loi ORE, notamment ceux de la Cour des comptes ([10]), du comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale ([11]), de la commission des affaires culturelles et de l’éducation du Sénat ([12]), et dans l’attente d’une réforme d’ampleur, l’ambition de ce texte est d’apporter une réponse rapide aux trois défis les plus urgents : l’opacité du fonctionnement de Parcoursup (I), l’augmentation du taux de pression dans les différentes filières (II) et la défaillance du service public d’orientation (III).

I.   L’opacité du fonctionnement de Parcoursup

A.   Une transparence de façade

Le 29 mars 2018, le Président de la République Emmanuel Macron déclarait : « l’État, pour ce qui le concerne, rendra […] par défaut public le code de tous les algorithmes qu’il serait amené à utiliser, au premier rang desquels […] celui de Parcoursup car je pense que c’est une pratique démocratique », prônant ainsi une « transparence complète ». À la suite d’un amendement présenté par le député Cédric Villani au cours de la discussion de la loi ORE, le code source et le cahier des charges de l’algorithme national de Parcoursup ont été rendus publics ([13]). Néanmoins, et contrairement à la situation qui prévalait dans le cadre d’APB, la publication de l’algorithme national de classement des candidatures ne présente que peu d’intérêt. En effet, Parcoursup n’a vocation qu’à déterminer un ordre d’appel, reposant pour l’essentiel sur une liste établie dans chaque établissement par une commission d’examen des vœux (« CEV »).

 

 

B.   Des algorithmes locaux soustraits au regard public

Si la construction de cette liste ne suscite que peu d’enjeux pour les filières non-sélectives ne se trouvant pas en état de tension, puisqu’elles ont vocation à accueillir toute candidature, éventuellement en assortissant leur acceptation d’une formation complémentaire, la situation est bien différente s’agissant des filières sélectives et des filières non-sélectives en tension.

En effet, dans ces formations, les CEV vont devoir procéder à un classement des candidatures, soit à la main (lorsque le nombre de candidatures permet un tel traitement), soit, plus fréquemment, au moyen d’algorithmes qualifiés de « locaux » (par opposition à l’algorithme « national » précédemment décrit). Le ministère de l’enseignement supérieur met d’ailleurs à la disposition des établissements un « outil d’aide à la décision » librement paramétrable pour procéder à ce traitement automatisé des candidatures. Lors de son audition, M. Romain Delès, maître de conférence en sociologie à l’Université de Bordeaux, soulignait ainsi que dans son université 4 000 dossiers devaient être examinés par deux personnes seulement, ce qui empêchait une étude sérieuse de chacun des dossiers.

Or, à la suite d’un amendement présenté par le gouvernement au cours de la discussion du projet de loi ORE, ces algorithmes locaux ont été soumis à un régime de publicité dérogatoire prévu au dernier alinéa du I de l’article L. 612-3 du code de l’éducation. Se fondant sur le principe du respect du secret des délibérations des jurys, cette disposition entraîne l’impossibilité pour les candidats, actuels ou futurs, de connaître la manière précise avec laquelle les CEV vont procéder au classement des candidatures. Cette situation est préjudiciable, d’une part parce qu’elle empêche les candidats de pouvoir mesurer leurs chances de succès avant de postuler, d’autre part parce qu’elle rend plus difficile, pour des lycéens en classe de seconde et de première, la construction de stratégies de formation au regard de leur projet d’orientation future. Elle contribue à amplifier un phénomène de stress des élèves, souligné par bon nombre de personnes auditionnées et plus spécifiquement par les organisations lycéennes et les associations de parents d’élèves.

Cette disposition a donné lieu à un contentieux devant la juridiction administrative ([14]) ainsi qu’à une question prioritaire de constitutionnalité ([15]) . Le Conseil constitutionnel a admis la constitutionnalité de cette disposition, en assortissant sa décision d’une réserve d’interprétation tendant à ce que les établissements d’enseignement supérieur soient tenus de publier, au terme de la procédure nationale de préinscription, les critères en fonction desquels les candidatures ont été examinées et en précisant, le cas échéant, dans quelle mesure des traitements algorithmiques ont été utilisés pour procéder à cet examen ([16]) . Si cette décision a permis d’enrichir les informations disponibles en permettant un regard rétrospectif sur la manière dont les candidatures ont été appréciées par le passé, le système reste globalement opaque.

Le rapporteur public du Conseil d’État, dans ses conclusions sous les requêtes précédemment mentionnées ([17]), ne dit pas autre chose : « On peut penser que cela n’est guère satisfaisant pour les intéressés, qu’il y a même ici un habile procédé d’escamotage. Et cela, combiné au caractère ex post des informations communiquées, appelle sans doute une réflexion et une intervention du législateur pour que le droit d’accès aux éléments qui pourront la fonder, concrètement aux critères de classement des candidatures, puisse s’exercer préalablement à la décision administrative prise sur la candidature et non postérieurement à elle. Comme le dispositif actuel, cette obligation de transparence préalable pourrait ne bénéficier qu’aux candidats, à l’exclusion des tiers. Mais c’est au législateur qu’il revient de se prononcer sur tous ces points. »

C.   L’émergence de pratiques de sélection à la légalité et l’opportunité douteuses

L’opacité de Parcoursup ne résulte pas uniquement de la manière dont les critères de sélection sont utilisés, mais également de celle avec laquelle ils sont définis. En effet, la loi ne dit rien sur la nature de ces critères. Deux dispositions réglementaires précisent où ces critères doivent être publiés et par qui ils doivent être définis ([18]). Le ministère de l’enseignement supérieur a quant à lui précisé que « ces critères généraux doivent être cohérents avec le contenu, les attentes et les exigences de la formation ; ils ne doivent pas être discriminatoires » ([19]).

Si cette affirmation semble relever de l’évidence, le laconisme des normes applicables en la matière et la forte autonomie reconnue aux établissements d’enseignement supérieur dans le cadre de cette nouvelle procédure ont entraîné une pratique à la légalité douteuse – notamment questionnée par le Défenseur des droits ([20]) – consistant à introduire le critère du « lycée d’origine » pour procéder à l’examen des candidatures.

Cette pratique, adoptée par 20 % des formations non-sélectives selon la Cour des comptes ([21]), se fonde sur l’existence d’un phénomène de sur ou de sous notation dans certains lycées et permettrait de compenser les inégalités induites par ce phénomène dans la prise en compte des notes obtenues par les candidats au titre du contrôle continu. Ce souci est également au cœur de la récente réforme du baccalauréat, qui accentue le poids de devoirs réalisés et corrigés au sein des lycées d’origine des candidats pour l’obtention de ce diplôme. Lors de son audition, le directeur général de l’enseignement scolaire a ainsi indiqué qu’un mouvement d’harmonisation des notations entre les établissements devrait être observé au cours des prochaines années sous l’effet de cette réforme. Le maintien d’un tel critère en deviendrait davantage injustifiable.

En effet, si ce critère n’est jamais un critère primordial, il peut néanmoins recouvrir une certaine importance. Dans son rapport, la Cour des comptes mentionne une CEV d’une université pour l’accès à une première année de licence en droit qui utilise les critères suivants : 80 % pour les résultats, 10 % pour le lycée d’origine, 8 % pour le profil, 1 % pour la provenance géographique et 1 % pour la situation sociale ([22]). Or, la Cour rappelle que si le phénomène de sur ou de sous notation existe bel et bien, ce critère du lycée d’origine n’est pas toujours défini de manière objective, et s’appuie le plus souvent sur la « réputation » de ce lycée.

En privilégiant les lycées de « bonne réputation » et donc les classes sociales favorisées qui les fréquentent, cette pratique contribue à alimenter le phénomène de reproduction sociale, déjà particulièrement prégnant dans notre système éducatif.

D.   Un besoin de transparence renforcé par la récente réforme du baccalauréat

À compter de la rentrée scolaire 2019, les séries du baccalauréat général ES, L et S ont disparu. Le nouveau baccalauréat général s’articule autour de deux blocs. Le contrôle continu représente 40 % de la note finale, avec des épreuves communes organisées au cours des années de première et de terminale ainsi qu’une prise en compte des bulletins scolaires des élèves. Les épreuves finales représentent quant à elles 60 % de la note : elles sont constituées des épreuves anticipées de français en première, de l’écrit de philosophie, du grand oral mais aussi de deux épreuves portant sur des enseignements de spécialité.

En effet, la réforme du baccalauréat propose une nouvelle typologie des enseignements en filière générale : enseignements communs, de spécialité et optionnels. Un nombre très important de « combinaisons » d’enseignements optionnels et de spécialité remplace donc les trois parcours « type » antérieurs (ES, L et S). Si cette réforme est de nature à permettre aux lycéens de construire un emploi du temps reflétant leurs centres d’intérêt et d’explorer des domaines pour lesquels ils éprouvent de la curiosité, les choix qu’ils sont amenés à faire vont compter pour la suite de leur parcours académique. Ceci a été affirmé tant par les représentants de la conférence des grandes écoles (CGE) que par le directeur général de l’enseignement scolaire.

Un véritable besoin d’information est apparu pour déterminer quelles sont les combinaisons les plus pertinentes à retenir pour intégrer une formation d’enseignement supérieur spécifiquement considérée ([23]). Sur ce besoin d’information non comblé par le service public d’orientation, des offres d’accompagnement privé à but lucratif ont prospéré. Selon le Conseil National d’évaluation du système scolaire([24]), c’est ainsi un élève sur cinq qui a recours à un coach privé. Une telle situation conduit à avantager les lycéens issus de familles disposant des moyens permettant de financer de telles prestations. Dans le cadre de leur audition, les représentantes d’une association de coaching ont indiqué que leur offre répondait à un besoin laissé vacant par le service public de l’éducation, tout en indiquant prendre en charge des situations dépassant le seul besoin d’informations relatives à l’orientation (apprendre à connaître ses goûts, gérer son stress, etc.). Si l’ensemble des acteurs auditionnés ont pu déplorer l’émergence de ces offres privées d’accompagnement, certaines d’entre elles, à l’image de la fédération des parents d’élèves de l’école publique (PEEP), ont questionné l’apport réel de ces prestations, jugé principalement tourné vers la réduction du stress des familles.

II.   Un système sous pression

A.   L’augmentation continue du nombre de filières en tension

La massification de l’enseignement supérieur liée à l’arrivée de la génération du babyboom des années 2000 n’a pas été correctement anticipée, avec à la clef une augmentation régulière du nombre de formations en tension, c’est‑à‑dire des formations recevant un nombre de candidatures supérieur au nombre de places disponibles.

Si l’utilisation du taux de pression – tel qu’il est calculé actuellement par le ministère – comme outil mathématique permettant de mesurer avec précision la réalité du nombre de ces formations fait débat, le constat d’une augmentation du nombre de filières en tension est largement partagé. L’exemple de la filière « sciences et techniques des activités physiques et sportives » (« STAPS ») est à cet égard symptomatique : en 10 ans, cette filière a doublé ses effectifs. À l’université Rennes 2, l’une des unités de formation et de recherche (UFR) de STAPS les plus importantes sur le territoire national, le taux d’encadrement est particulièrement dégradé : un enseignant prend en charge en moyenne 44 étudiants – chiffre à mettre au regard du taux d’encadrement moyen en filière STAPS (1 pour 37) et surtout du taux d’encadrement moyen dans l’enseignement supérieur (1 pour 18) ([25]).

Au total, la Cour des comptes évalue à 9 802 le nombre de formations réellement en tension au titre de l’année 2019 – soit les deux tiers de l’ensemble des formations disponibles sur Parcoursup. L’état de tension est davantage un problème de filières sélectives (87 % d’entre elles sont concernées, avec un taux de pression moyen plus important que celui constaté dans les filières non-sélectives en tension) ([26]).

Bien loin d’endiguer ce phénomène, les premières années de déploiement de Parcoursup ont été concomitantes à une augmentation du taux de pression dans les filières en tension. La Cour des comptes relève que le taux de pression a augmenté entre 2018 et 2019. Le nombre de formations non-sélectives en tension a également suivi une tendance haussière sur la même période et ce en dépit d’un effort financier réalisé par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation qui a conduit à la création de nombreuses places supplémentaires ([27]).

B.   L’absence d’un cadre de pilotage clair

Si des places supplémentaires ont bien été créées, elles ne l’ont pas été en nombre suffisant et parfois au bénéfice de formations non-concernées par une problématique de tension. Il en ressort que les créations de places ont été décorrélées des besoins réels rencontrés sur le terrain. Une telle situation est regrettable, tant du point de vue de l’efficacité de la dépense publique que de celle du service public de l’enseignement. Une augmentation des filières en tension signifie d’une part une sélectivité croissante et donc l’accroissement de phénomènes d’orientation par défaut ou de sorties prématurées du système éducatif, et d’autre part des conditions d’études dégradées pour les étudiants finalement acceptés dans ces filières.

Le III de l’article L. 612-3 du code de l’éducation prévoit l’existence d’un dialogue entre l’autorité académique et les responsables d’établissement d’enseignement supérieur s’appuyant sur les perspectives d’insertion professionnelle des formations, l’évolution des projets de formation exprimés par les candidats ainsi que le projet de formation et de recherche de l’établissement pour définir les capacités d’accueil. Il n’est nullement fait mention du taux de pression antérieurement constaté. Pratiquement, cette question est pourtant au centre des échanges entre l’autorité académique et les responsables de formation, mais sans qu’un cadre clair organise ces échanges ([28]). Une telle situation ne saurait perdurer au regard des enjeux précédemment mentionnés. La direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP) a néanmoins précisé, au cours de son audition, que le principe d’autonomie des établissements d’enseignement supérieur pouvait constituer un frein pour répondre avec efficacité aux problématiques liées à l’évolution de la démographie étudiante.

C.    La situation particulièrement dégradée des bacheliers professionnels et technologiques

La massification de l’enseignement supérieur a très largement été portée par l’accroissement du nombre de bacheliers technologiques et professionnels, notamment sous l’effet de la réforme de la voie professionnelle en 2008. Pourtant, les ouvertures de nouvelles capacités d’accueil ont surtout été réalisées en licence universitaire, où le taux de réussite de ces bacheliers est faible ([29]), et non dans les filières davantage adaptées à leur parcours antérieur (c’est-à-dire dans les sections de techniciens supérieurs (STS») ou dans les instituts universitaires de technologie (IUT). La situation de ces bacheliers est par ailleurs marquée par de nombreuses difficultés, liées à :

– une inadéquation entre la demande des candidats et l’offre de formation en STS qui conduit à un taux de vacance d’environ 6,5 %, ce qui pose la question de la réallocation des moyens entre les différentes filières STS ;

– l’échec relatif du dispositif des classes passerelles ([30]) dont l’attractivité pour les élèves apparaît comme faible ;

-         Un dispositif « oui si » à l’Université peu convaincant pour les bacheliers professionnels où rares sont ceux qui arrivent à passer en deuxième année ([31]).

– la proportion importante de bacheliers généraux candidatant en IUT, en dépit du fait que cette voie a pour vocation d’accueillir prioritairement des bacheliers technologiques ;

– un désintérêt des bacheliers technologiques pour les IUT, soit au bénéfice des filières STS jugées plus accessibles et promues par certaines équipes enseignantes qui souhaitent attirer les meilleurs bacheliers technologiques vers les filières présentes dans l’établissement, soit au bénéfice des licences universitaires qui sont socialement davantage valorisées en raison de leur caractère généraliste ;

– des déséquilibres importants dans la répartition territoriale de ces filières ([32]).

Dans ce contexte, la politique de quotas créée par l’article 33 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, qui prévoit que l’autorité académique fixe pour chaque formation en STS et IUT un pourcentage minimum de bacheliers technologiques et professionnels, n’a pas pu atteindre l’objectif escompté. La part de bacheliers professionnels en STS a stagné et celle de bacheliers technologiques en IUT a timidement progressé (augmentation de 2 points) entre 2016 et 2019.

 

Encadré : la politique de quota, quelle application concrète ?

Le rapport du comité éthique et scientifique de Parcoursup remis au Parlement en janvier 2020 fait état d’inégalités territoriales dans la fixation et l’application des taux minimums de bacheliers professionnels en STS, et de bacheliers technologiques en IUT. Certes, les quotas de bacheliers technologiques appliqués aux IUT restent en moyenne supérieurs à la part de bacheliers technologiques dans les IUT de l’académie, et même particulièrement supérieurs pour 45 % des IUT à l’échelle nationale. On observe un quota moyen de 33 %, pour un pourcentage de bacheliers technologiques candidats de 28 %.

Mais, pour 24 % des 792 IUT proposés, la situation est inverse. Le nombre de bacheliers technologiques candidats est supérieur au quota fixé par le recteur. Parmi ces IUT, la moitié présente des quotas inférieurs de 5 points au pourcentage de candidats issus du baccalauréat technologique, ce qui concerne principalement les académies de La Réunion, de Nancy-Metz et de Montpellier.

D’autre part, plus de 4 000 STS sont concernés par la fixation d’un taux minimum de bacheliers professionnels. Aux disparités territoriales s’ajoute ici l’inégalité entre lycées privés et publics ; en Île-de-France en 2019, les lycées privés n’avaient aucun quota de bachelier professionnel en STS. La moitié des STS présentent des quotas inférieurs de 5 points au pourcentage de candidats issus du baccalauréat professionnel.

Si le rapport du comité éthique et scientifique de Parcoursup mentionne l’absence de consigne d’ordre général de la part du ministère pour la fixation des quotas de bacheliers technologiques et professionnels en IUT et STS, donnant lieu à un « volontarisme de l’ensemble des acteurs (…) très disparate », la Cour des comptes souligne au contraire « une gestion des capacités d’accueil des différentes filières qui prend davantage en compte leurs spécificités ». Cela n’occulte pas un bilan très mitigé de mise en pratique de ces quotas, fixés de manière insatisfaisante pour près de la moitié des formations qu’ils concernent.

La réforme de la scolarité en IUT, qui prévoit la création d’un bachelor universitaire de technologie (BUT) en trois ans en lieu et place des DUT en deux ans, a été l’occasion de raffermir cette politique de quotas. Il est en effet prévu l’obligation d’accueil de 50 % de bacheliers technologiques en première année ([33]). Au cours de son audition, le président de l’assemblée des directeurs d’IUT a néanmoins indiqué que, d’une part, le passage d’une scolarité de deux à trois ans posait des difficultés d’organisation pratique dans un certain nombre de territoires et, plus fondamentalement, que cette réforme ne répondait pas au besoin pourtant réel de davantage d’adéquation entre les filières technologiques au lycée et les filières technologiques universitaires.

III.   Un service public de l’orientation défaillant

A.   Des initiatives nombreuses mais peu coordonnées

La politique publique de l’orientation, qui a émergé à compter des années 1970 avec l’institution d’organismes tels que l’Office national d’information sur les enseignements et professions (ONISEP) et le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (CEREQ), s’est d’abord fondé sur la nécessité de mettre en cohérence les formations avec les besoins rencontrés sur le marché du travail. Des parcours structurés ont par la suite progressivement été mis en œuvre, à compter d’une circulaire de 2008 relative à la découverte des métiers et formations ([34]).

En dépit d’une réorganisation tendant à garantir le droit au conseil en orientation qui a été affirmé par l’article L. 313-1 du code de l’éducation, c’est‑à‑dire recentrant l’objet de cette politique publique vers la prise en compte des aspirations personnelles des jeunes et de leur famille, le constat d’un éparpillement des initiatives peut être dressé : on dénombre quelques 8 000 structures compétentes dans ce domaine ! Cet éparpillement est notamment lié à des mouvements de décentralisation de cette compétence au bénéfice des régions ([35]), qui ne disposent toutefois pas de la possibilité de conduire une action d’ensemble sur cette thématique, avec également un risque de conduire à des inégalités territoriales d’accès à l’information sur l’orientation ([36]).

L’instauration, en 2017, des psychologues de l’éducation nationale (psy‑EN) démontre bien les problèmes de coordination mais aussi de financement : leur nombre est clairement insuffisant (1 psy-EN pour 1 500 élèves) et ils sont rarement associés aux actions touchant à l’orientation organisées par les professeurs principaux de terminale ([37]) , alors que leur statut ([38]) en fait des ressources particulièrement précieuses sur ces questions. Ces problèmes de coordination ont été relevés par les syndicats enseignants auditionnés, qui ont insisté sur le rôle du facteur humain – certains psy-EN étant mal identifiés de leurs collègues – mais aussi sur les inégalités territoriales. Dans certains bassins, un psy-EN peut parfois intervenir sur quatre à cinq établissements différents, ce qui a logiquement des conséquences sur le temps cumulé passé dans chacun d’entre eux.

B.   Un renforcement dans le cadre du plan étudiant aux effets décevants

Le plan étudiant a souhaité accorder une importance première à l’accompagnement à l’orientation. Les cinq premières mesures qu’il contenait étaient rassemblées sous l’étiquette « mieux accompagner l’orientation au lycée » et prévoyaient le dédoublement des professeurs principaux en classe de terminale, la tenue de deux semaines consacrées à l’orientation et un rôle accru du conseil de classe dans l’examen des souhaits d’orientation notamment.

Un bilan contrasté de ces différentes initiatives a néanmoins pu être dressé ([39]), au regard notamment des déficits de formation chez les professeurs principaux s’agissant des différentes formations existant dans le supérieur ([40]), ainsi que des mises en œuvre inégales des 54 heures d’accompagnement et des semaines de l’orientation en fonction des établissements considérés. L’ensemble des acteurs auditionnés sur ce point (parents, lycéens, enseignants) a indiqué que ces mesures étaient en effet très imparfaitement appliquées. Les syndicats enseignants ont plus précisément déploré l’absence de formation des professeurs principaux, qui n’ont d’autre choix que celui d’apprendre « sur le tas » le fonctionnement de la plateforme et les caractéristiques des différentes formations.

La réforme de la filière générale intervenue à la rentrée 2019 fait prendre à cette question un relief particulier. D’une part, elle invite à un questionnement en fin de classe de seconde sur les combinaisons de spécialités et d’options les plus pertinentes à retenir pour l’accès à des formations du supérieur – avec un enjeu d’accès à l’information pour déterminer quelles combinaisons ces formations entendent privilégier. D’autre part, elle affecte l’existence d’un « groupe classe » homogène, dans la mesure où des élèves d’une même classe peuvent suivre des spécialités et options très différentes, alors même que c’est au sein de ce groupe que la question de l’orientation était prioritairement prise en charge (au regard du rôle des professeurs principaux et du conseil de classe).

C.   Une persistance des inégalités appelant à un renforcement de l’accompagnement à l’orientation

Les choix d’orientation restent marqués par l’influence des inégalités. S’agissant des inégalités sociales, l’Observatoire de la vie étudiante a établi ([41]) que plus de la moitié des élèves appartenant aux classes sociales les moins favorisées ont saisi seuls leurs candidatures sur Parcoursup (contre un tiers des élèves des classes sociales les plus aisées).

Les inégalités de genre sont également prégnantes ([42]) : les femmes sont sous-représentées dans les filières scientifiques ou dans les filières professionnelles de production mais sur-représentées dans celles préparant au secteur des services. Les critères à partir desquels les garçons et les filles construisent leur choix d’orientation diffèrent également sensiblement. Les filles accordent davantage d’importance que les garçons au goût pour un secteur ou une discipline, tandis que les garçons accordent davantage d’importance que les filles à la rémunération associée à un choix d’orientation ([43]).

Les inégalités territoriales jouent également un rôle, ce qui peut s’expliquer par différents facteurs : l’attachement au territoire d’origine, l’offre de formation de proximité, l’économie du territoire et les difficultés de mobilité ou de coût. De manière symptomatique, les bacheliers parisiens sont deux fois plus nombreux à s’orienter en classe préparatoire aux grandes écoles. Les bacheliers des territoires ruraux sont plus nombreux à s’orienter vers des filières courtes (47 % contre 38 % ailleurs). La proportion de titulaires d’un diplôme universitaire de 2ème ou 3ème cycle est deux fois plus faible en territoire rural qu’en territoire urbain ([44]).

Dans ce contexte, la demande de conseils en orientation est forte. Aussi, le Conseil national d’évaluation du système scolaire (CNESCO) note dans un rapport de 2018 ([45]) qu’« il y a des jeunes qui doutent d’eux-mêmes, et que l’orientation stresse, d’autres jeunes plus sûrs d’eux, qui savent ajuster leurs choix à leurs résultats... ou l’inverse (...) ; d’autres manifestent des difficultés à rechercher, à décoder ou à exploiter les informations ou les propos de leurs proches ou de médias, souvent peu à même de délivrer une information fiable et pertinente ». Alors qu’un peu moins de la moitié des élèves de terminale déclarent ne pas avoir eu d’entretien personnalisé pour préparer la procédure Parcoursup ([46]), il est urgent de construire un accompagnement individualisé pour chaque lycéen qui doit choisir ses enseignements de spécialité dès la classe de seconde.

L’audition de madame la Rectrice de l’académie de la Réunion a permis de mesurer à quel point, lorsque des moyens humains y sont consacrés, une politique d’accompagnement personnalisée et vertueuse peut être menée. Une cellule de plusieurs agents sise au rectorat a en effet été constituée pour appeler individuellement chaque lycéen n’ayant pas eu de réponse positive à l’issue de la première phase de Parcoursup. De telles initiatives doivent pouvoir être généralisées, au niveau des rectorats, mais également des établissements d’enseignement secondaire.

 


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   commentaires des articles

Article 1er
Amélioration de la plateforme Parcoursup

Supprimé par la commission

Le présent article vise à améliorer la transparence du fonctionnement de la plateforme Parcoursup, à limiter les inégalités que son fonctionnement actuel peut contribuer à entretenir ainsi qu’à lutter contre l’augmentation du nombre de filières en tension, avec une attention particulière portée aux effets que cette situation crée pour les bacheliers des filières technologiques et professionnelles

I.   le droit existant

A.   L’accès à l’information, enjeu central de la nouvelle procédure de Parcoursup

L’article L. 612-3 du code de l’éducation dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (« ORE ») est la base légale de la plateforme « Parcoursup » qui a succédé à la plateforme « Admission post bac » (APB) pour organiser la centralisation du traitement des candidatures pour l’entrée dans l’enseignement supérieur. Parcoursup matérialise la « procédure nationale de préinscription » qui se déroule selon un calendrier au cours duquel le candidat :

1° s’informe des formations et des établissements de l’enseignement supérieur ;

2° formule des vœux ;

3° valide les propositions d’admission reçues.

1.   Des informations et des « attendus » indispensables

Afin de permettre aux candidats de faire des choix conscients et informés, un certain nombre d’informations leur est apporté : nature et contenu des formations proposées par les différents établissements, localisation géographique, nombre de places disponibles, notamment.

Parmi ces informations intéressant les candidats, actuels (lycéens en classe de terminale ou personne en réorientation immédiate) et futurs (lycéens en classe de seconde, de première et personnes envisageant une réorientation), se trouvent celles relatives aux conditions d’accès aux formations. L’article D. 612-1-6 du code de l’éducation évoque ainsi les « attendus », notion recouvrant « les connaissances et compétences attendues pour la réussite dans la formation ». Ces attendus sont fixés au niveau national par arrêté du ministre chargé de l’enseignement supérieur en application de l’article D. 612-1-5 pour chaque filière (« attendus nationaux ») mais peuvent être complétés par des « attendus locaux » par chaque établissement (article D. 612-1-6).

Si la publication des attendus implique que les candidats actuels et futurs puissent se faire une idée générale sur les attentes des formations pour lesquelles ils souhaitent candidater, ils ne contiennent aucun élément permettant d’évaluer comment leur candidature va être appréciée et classée concrètement. Cette information revêt pourtant une importance fondamentale s’agissant des filières sélectives mais aussi non sélectives actuellement en tension, dont le nombre suit une tendance haussière eu égard à la massification continue de l’enseignement supérieur. Pour ces filières, en effet, une procédure de « départage » doit être mise en œuvre.

2.   Une compétence confiée aux établissements de l’enseignement supérieur, via des algorithmes locaux opaques

L’un des apports principaux de la loi ORE est qu’elle transfère aux établissements la compétence d’organiser cette procédure, qui était antérieurement gérée au niveau national par la plateforme APB. L’article D. 612-1-13 du code de l’éducation prévoit ainsi la mise en place d’une « commission d’examen des vœux » (CEV) dans chaque établissement, qui a la responsabilité de définir les « modalités et critères d’examen » des candidatures et de proposer au chef d’établissement les réponses à apporter à celles dont il est saisi. La publicité de ces modalités et critères apparaît dès lors comme un enjeu important.

En effet, si l’algorithme national de traitement des candidatures a été rendu public en application du II de l’article L. 612-3 du code de l’éducation, et est accessible sur le site du ministère chargé de l’enseignement supérieur depuis le 21 mai 2018 ([47]), cette publicité présente un faible intérêt s’agissant de l’évaluation de l’appréciation des candidatures. En effet, au regard de la décentralisation, au profit des établissements, de la procédure de départage, l’algorithme national de Parcoursup n’a pour fonction que la seule détermination de « l’ordre d’appel » des candidats en fonction du classement établi par les établissements d’une part et d’autres critères nationaux ([48]) (pourcentages minimaux de boursiers, pourcentages maximaux de non-résidents, entre autres) d’autre part.

Dès lors, le cœur du nouveau dispositif de classement des candidatures est constitué par la procédure de départage localement organisée par les établissements. Or, le dernier alinéa du I de l’article L. 612-3 du code de l’éducation – issu d’un amendement gouvernemental – organise un régime de publicité dérogatoire aux dispositions de droit commun en matière de communicabilité des documents administratifs prescrites dans le code des relations entre le public et l’administration (aux articles L. 311-3-1 et L. 312-1-3). Ce régime dérogatoire, fondé sur le principe de secret des délibérations des équipes pédagogiques, permet implicitement aux établissements de recourir à des algorithmes dits « locaux » pour départager les candidats. Le ministère chargé de l’enseignement supérieur met d’ailleurs à leur disposition un logiciel paramétrable en fonction des critères choisis, les établissements pouvant, du reste, recourir à un autre logiciel ou ne recourir à aucun logiciel tout en les dispensant de l’obligation de les rendre publics. Les candidats ne disposent que de la faculté de demander, après la réception d’une décision et dans un délai d’un mois, les critères et modalités d’examen de leurs candidatures ainsi que les motifs pédagogiques justifiant la décision prise. Il s’agit donc d’une information ex post, donnée au seul candidat et non aux tiers (c’est‑à-dire, notamment, les candidats futurs).

Cette disposition a fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité dans le cadre d’un litige porté devant la juridiction administrative par un syndicat étudiant souhaitant contester le refus que des établissements avaient opposé à sa demande de communication des algorithmes locaux. La décision n° 2020-834 QPC du 3 avril 2020 a déclaré cet alinéa conforme à la Constitution tout en formulant une réserve tendant à ce que les établissements soient tenus, au terme de la procédure nationale de préinscription, de publier les critères en fonction desquels les candidatures ont été examinées et en précisant, le cas échéant, dans quelle mesure des traitements algorithmiques ont été utilisés pour procéder à cet examen.

Le commentaire de la décision ([49]) permet de réaliser une synthèse du droit applicable, en distinguant la situation des candidats et des tiers.

S’agissant des candidats, ils ont accès :

– en amont de la procédure, aux attendus locaux et nationaux ainsi qu’aux critères généraux d’examen des candidatures par les CEV ;

– en aval de la procédure, à la hiérarchisation et à la pondération des différents critères généraux établies par les établissements ainsi qu’aux précisions et compléments apportés à ces critères généraux.

S’agissant des tiers (et donc des futurs candidats), ils ont accès :

– en amont de la procédure, aux mêmes informations que les candidats, celles-ci n’étant pas couvertes par le secret prévu à l’article L. 612-3 et présentent dès lors le caractère de documents administratifs communicables (paragraphe 15 de la décision précitée) ;

– en aval de la procédure, à une publication, par chaque établissement, des critères en fonction desquels les candidatures ont été examinées et en précisant, le cas échéant, dans quelle mesure des traitements algorithmiques ont été utilisés pour procéder à cet examen.

Il en ressort qu’il est impossible, pour des personnes n’ayant pas encore candidaté dans une formation, de connaître avec précision la manière dont leur candidature serait évaluée. Elles ne disposent en effet, à ce stade, que des critères généraux d’examen des vœux, ainsi que des rapports des établissements sur la manière dont ces critères généraux ont été appréciés les années précédentes, notamment par le biais d’algorithmes.

3.   L’imprécision des critères d’évaluation des candidatures

Si la transparence du fonctionnement de Parcoursup est un enjeu important, la question des critères potentiellement mobilisables dans le cadre de cette procédure est également essentielle.

À ce titre, la loi ne précise pas selon quels critères les candidatures peuvent être appréciées par les CEV. Deux dispositions de nature réglementaire traitent néanmoins de cette question :

– d’une part l’article D. 612-1-5 du code de l’éducation prévoit que les établissements doivent faire figurer, dans la page qui leur est dédiée sur la plateforme Parcoursup, les « critères généraux encadrant l’examen des candidatures » ;

– d’autre part, l’article D. 612-1-13 du même code donne compétence aux CEV pour établir ces critères généraux.

Une note de cadrage du ministère de l’enseignement supérieur relative à l’examen des vœux formulés par les candidats pour la session 2020 précise que « ces critères généraux doivent être cohérents avec le contenu, les attentes et les exigences de la formation ; ils ne doivent pas être discriminatoires ».

B.   Une augmentation des filières en tension interrogeant les modalités de fixation des effectifs des formations

Le III de l’article L. 612-3 du code de l’éducation détermine les critères que doit prendre en compte l’autorité académique pour fixer les capacités d’accueil d’une formation, dans le cadre d’un dialogue avec chaque chef d’établissement : les perspectives d’insertion professionnelle des formations, l’évolution des projets de formation exprimés par les candidats ainsi que le projet de formation et de recherche de l’établissement.

Cette disposition ne dit rien de la prise en compte de l’éventuel taux de pression pesant sur l’offre de formation entendu comme l’adéquation entre les capacités d’accueil physique des étudiants dans une formation et le nombre des candidatures qui y sont présentées.

La Cour des comptes a néanmoins fait le constat que, dans la pratique, le dialogue entre l’autorité académique et le chef d’établissement est principalement construit autour du taux de pression apprécié à l’échelle de chaque filière. Dans le même temps, la Cour relève que ce dialogue souffre d’un défaut d’harmonisation (modalités et calendrier) entre les différentes académies.

C.   La situation dégradée des bacheliers professionnels et technologiques

S’agissant des bacheliers professionnels et technologiques, le VII de l’article L. 612-3 a confirmé l’institution de quotas pour l’accès aux sections de techniciens supérieurs (STS) et aux instituts universitaires de technologies (IUT), pratique qui avait été pérennisée par l’article 33 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche.

Le législateur, constatant des différences significatives sur le territoire en matière de pratiques d’accueil des bacheliers professionnels et technologiques en STS et IUT, a préféré déléguer aux rectorats le soin de conduire cette politique. Les quotas sont donc fixés par l’autorité académique pour chacune des formations, en accord avec les chefs d’établissement les accueillant. Cette gestion, dans le cadre de la déconcentration, n’empêche pas le ministère de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur de fixer des objectifs indicatifs au niveau national ([50]).

Les bacheliers professionnels et technologiques rencontrent néanmoins des difficultés pour l’accès à ces formations alors même qu’elles sont davantage adaptées à leur parcours. Ceci a pour conséquences, pour ceux d’entre eux n’ayant pas été acceptés en STS ou en IUT, soit une sortie précoce du système éducatif, soit une orientation subie dans une filière d’enseignement supérieur non cohérente eu égard à leur parcours antérieur (principalement en licence universitaire, où leur chance de réussite est faible).

II.   les dispositions de la proposition de loi

L’alinéa 3 de l’article 1er modifie le I de l’article L. 612-3 du code de l’éducation afin d’affirmer que le droit à l’accès à l’enseignement supérieur est reconnu à chacun, indépendamment de son établissement d’origine. Cette affirmation implique l’interdiction de l’utilisation du critère du « lycée d’origine » dans le cadre de la procédure de départage gérée par les CEV.

Les alinéas 4 et 5 organisent la publication, en amont de la phase de candidatures, des critères d’examen des candidatures utilisés par les CEV : les candidats se verront communiquer les critères d’examen des candidatures et les traitements algorithmiques qui seront appliqués. Le cadre de cette obligation est celui prévu aux articles L. 311-3-1 et L. 312-1-3 du code des relations entre le public et l’administration qui prévoient que lorsqu’une décision individuelle est prise sur le fondement d’un traitement algorithmique, l’intéressé doit en être explicitement informé. À la demande de l’intéressé, les règles définissant ce traitement ainsi que les principales caractéristiques de sa mise en œuvre lui sont communiquées par l’administration ; ces règles sont également publiées en ligne.

En conséquence, l’alinéa 6 supprime le dernier alinéa du I qui prévoyait, a contrario, le régime de publicité dérogatoire de ces critères aux fins de garantir la protection du secret des délibérations des équipes pédagogiques chargées de l’examen des candidatures.

L’alinéa 8 modifie le III de l’article L. 612-3 pour indiquer l’obligation, pour l’autorité académique, de tenir compte du taux de pression constaté l’année précédente pour la fixation des capacités d’accueil dans les différentes formations.

L’alinéa 9 modifie ce même III en prévoyant que l’autorité académique formule un plan d’action pour corriger les insuffisances d’accueil dans les formations en tension, en portant une attention particulière aux sections de techniciens supérieurs et aux instituts universitaires de technologie afin que les bacheliers professionnels et technologiques puissent y disposer d’un nombre de places suffisant. Il est prévu que ce plan d’action soit établi en lien avec les établissements.

III.   la position de la rapporteure

En vue de l’examen en commission, la rapporteure propose des amendements permettant de préciser certains dispositifs initialement envisagés, notamment au regard de remarques formulées par certaines personnes auditionnées.

S’agissant de l’anonymisation du lycée d’origine, la conférence des grandes écoles a indiqué que cette information pouvait être intéressante dans le cadre des dispositifs visant à concrétiser l’égalité des chances. Aussi, la rapporteure propose de préciser que cette anonymisation devra néanmoins ménager la possibilité, pour les formations d’enseignement supérieur, d’être informées de la participation de l’établissement d’un élève à un tel dispositif.

S’agissant de l’amélioration de la transparence de Parcoursup, la rapporteure souhaite préciser que cette amélioration passerait par une publication des critères et modalités d’examen des candidatures au titre de l’année en cours avant l’ouverture de la plateforme. Cette publication, qui ne serait pas limitée au bénéfice des seuls candidats, permettrait également aux lycéens en classe de seconde et de première de réaliser des choix stratégiques de combinaison d’enseignements. En réponse à une remarque de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), il est également proposé d’inscrire dans la loi le principe d’accessibilité et d’intelligibilité des informations ainsi transmises. Il est enfin précisé que cette publication se réaliserait en accord avec le principe de respect du secret des délibérations du jury, lorsque celui-ci procède à des classements non-automatisés, notamment après avoir mobilisé un algorithme de pré-classement.

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Article 2
Amélioration du processus d’information et d’orientation des candidats à l’enseignement supérieur

Supprimé par la commission

Le présent article prévoit le renforcement de l’accompagnement à l’orientation durant la procédure de préinscription ainsi que la mise en cohérence des informations obligatoirement transmises dans le cadre de cette procédure avec la réforme de la filière générale du baccalauréat.

I.   le droit existant

Une politique publique de l’orientation scolaire a été progressivement mise en place à compter des années 1970, avec la création d’un certain nombre d’acteurs ayant un rôle d’impulsion et de coordination en la matière à l’image de l’ONISEP (Office national d’information sur les enseignements et les professions).

La loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour l’avenir de l’école de la République s’est inscrite dans ce mouvement, qui a fait une place croissante à la volonté des familles et des élèves eux-mêmes dans la construction de leur parcours d’orientation. Au travers de la création d’un « Parcours avenir », prévu à l’article L. 331-7 du code de l’éducation et précisé par un arrêté du 1er juillet 2015, chaque élève doit pouvoir « comprendre le monde économique et professionnel, […] connaître la diversité des métiers et des formations, […] développer son sens de l’engagement et de l’initiative et […] élaborer son projet d’orientation scolaire et professionnelle ». Ce « Parcours avenir » constitue l’une des traductions du droit au conseil à l’orientation consacré par l’article L. 313-1 du code de l’éducation.

L’article L. 331-7 précise que le droit à l’éducation se décline en un droit au conseil en orientation et à l’information sur :

– les enseignements ;

– l’obtention d’une qualification professionnelle ;

– les professions ;

– les débouchés et les perspectives professionnels.

Ce même article consacre également l’existence des conseillers d’orientation psychologues et précise les attendus de leur propre formation.

Le plan étudiant, dont la loi ORE constitue le volet législatif, a souhaité renforcer cette politique d’orientation à destination des élèves de terminale : les cinq premières mesures fortes de ce plan sont ainsi regroupées sous l’appellation « mieux accompagner l’orientation au lycée ». C’est dans ce cadre qu’ont notamment été décidés, pour la classe de terminale :

 la création d’un binôme de professeurs principaux sur le niveau (décret n° 2017-1637 du 30 novembre 2017), dont le rôle premier en matière d’orientation est consacré par la circulaire n° 2018-108 du 10 octobre 2018 ;

 la tenue de deux semaines consacrées à l’orientation ;

 l’octroi d’un volume de 54 heures, à titre indicatif, pour l’accompagnement à l’orientation (arrêté du 16 juillet 2018) ; un volume de 265 heures sur trois ans est prévu s’agissant des lycées professionnels.

II.   les dispositions de la proposition de loi

Le 1° du présent article modifie l’article L. 313-1 du code de l’éducation afin de garantir la mise en place d’un accompagnement personnalisé pour chaque élève durant la procédure de préinscription dans les établissements d’enseignement supérieur. Cet accompagnement est mis en place par chaque établissement de second degré.

Les 2° et 3° modifient respectivement les articles L. 612-1 et L. 612‑3 du même code afin de garantir la publication des enseignements de spécialité du baccalauréat que les candidats retenus ont suivies d’une part et que les établissements du supérieur considèrent comme indispensables pour accéder à la formation d’autre part, dans le cadre de leur examen des candidatures. Les attendus de chaque formation devront être précisés.

III.   la position de la rapporteure

La rapporteure propose deux amendements de nature à améliorer l’accompagnement des élèves dans la préparation des choix liés à Parcoursup.

Un premier amendement permet de veiller à ce que l’accompagnement personnalisé de chaque élève se fasse bien en amont des choix qu’il devra opérer lors de la procédure de Parcoursup. Compte tenu de l’importance des choix des enseignements de spécialité, l’accompagnement à l’orientation doit être mis en place dès la classe de seconde. Sans que l’amendement en fasse mention, il convient que des moyens budgétaires soient consacrés à cet accompagnement qui, s’il existe aujourd’hui, est fait à géométrie variable : d’un simple sms à l’entretien personnalisé avec le futur bachelier.

Un second amendement assouplit le dispositif proposé afin que soient portés à la connaissance des candidats les enseignements de spécialité du baccalauréat conseillés pour l’accès à chaque formation. Mentionner des enseignements de spécialité « indispensables » fermerait la possibilité pour les établissements de l’enseignement supérieur de diversifier les profils des élèves inscriptibles. Cet amendement procède également à des modifications rédactionnelles.

 

 

 


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 23 novembre 2021, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation a examiné la proposition de loi visant à visant à atténuer les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur générées par Parcoursup ([51]).

M. le président Bruno Studer. Nous examinons la proposition de loi visant à atténuer les inégalités d’accès générées par Parcoursup. Ce texte est inscrit à l’ordre du jour de la journée réservée au groupe de la Gauche démocrate et républicaine, le 2 décembre prochain.

Mme Karine Lebon, rapporteure. La loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, dite loi ORE, a été l’un des premiers textes examinés par notre commission en début de législature. À quelques semaines de la fin de nos travaux, il est apparu nécessaire au groupe GDR de proposer un temps de réflexion commune sur l’application de cette loi, et ce pour trois raisons.

Tout d’abord, le contexte de l’enseignement supérieur a évolué. L’augmentation de la démographie étudiante s’est poursuivie sans effort de financement proportionnel, entraînant une hausse du nombre de filières en tension. Les conséquences directes de ces évolutions ont été une sélectivité croissante pour l’accès aux études supérieures, un allongement du temps d’attente des candidats pour l’obtention d’une affectation, ainsi qu’un accroissement du niveau de stress ressenti par les élèves et leur famille.

Ensuite, le cadre juridique a connu des changements. La réforme du baccalauréat général a conduit à la disparition des traditionnelles filières économique et sociale, littéraire et scientifique au profit de combinaisons d’enseignements optionnels et de spécialités variées. De plus, à la suite de contentieux engagés par des associations étudiantes mais aussi de l’appropriation, par les différents acteurs, de la plateforme Parcoursup, le contenu de celle-ci s’est progressivement enrichi.

Enfin, les premières années d’application de la loi ORE ont permis de mettre au jour des dysfonctionnements et des effets inégalitaires dans le déroulement de la procédure Parcoursup : opacité des modalités de sélection entraînant des inégalités d’accès à l’information amplifiée par l’accroissement des offres d’accompagnement privé ; utilisation d’un critère tiré du lycée d’origine des candidats pouvant conduire à avantager des établissements déjà socialement favorisés ; défaillance du service public d’orientation supposé accompagner au mieux l’ensemble des élèves dans ce moment déterminant de leur parcours de vie.

Avec le groupe GDR, nous avons conçu cette proposition de loi comme un point d’étape. Nous sommes convaincus que notre service public d’éducation et d’enseignement supérieur aurait besoin d’être réformé en profondeur, notamment par le biais d’un investissement financier massif. Il permettrait d’accompagner l’évolution de la démographie étudiante et de concrétiser le rôle d’ascenseur social de l’école, pilier de notre pacte républicain. Une telle réforme, que nous appelons de nos vœux, conduirait du reste à la suppression de Parcoursup. Tel n’est toutefois pas l’objet du présent texte.

Celui-ci a été conçu dans une démarche d’ouverture et de consensualisme. Nous nous sommes appuyés, d’une part, sur des travaux de tous horizons – rapports de la Cour des comptes, du Centre national d’études des systèmes scolaires, du comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale – et, d’autre part, sur l’ensemble des acteurs intéressés à la question de la transition entre le secondaire et le supérieur : les lycéens et leurs parents, les étudiants, les enseignants, les directeurs d’établissement de l’enseignement supérieur.

Il ressort de cette démarche des soutiens, toujours quasi unanimes, aux modifications que cette proposition de loi se propose d’apporter pour corriger les dysfonctionnements et les effets pervers les plus patents du système Parcoursup qui jouent en défaveur des enfants des classes sociales les plus défavorisées ou des enfants qui ne peuvent bénéficier d’un accompagnement parental. C’est dans cette même démarche d’ouverture que j’invite chacune et chacun d’entre vous à se placer pour examiner ce texte.

Le premier correctif que nous souhaitons apporter vise à mettre un terme à une pratique de sélection qui s’est développée depuis le déploiement de la plateforme et qui consiste à introduire, dans le cadre de l’examen des candidatures par les formations, un critère tiré du lycée d’origine des candidats. Cette pratique a été vertement dénoncée par les acteurs de terrain que nous avons pu rencontrer, au premier rang desquels les lycéens, les étudiants mais aussi les enseignants du second degré. Le Défenseur des droits a également souligné, dans une décision du 18 janvier 2019, qu’un tel critère avait un caractère potentiellement discriminatoire. Cela doit d’autant plus nous alerter que notre système éducatif s’illustre par sa propension à reproduire fortement les inégalités sociales.

Cette proposition pourrait faire naître deux séries d’objections, que je souhaite ici anticiper. En premier lieu, l’anonymisation du lycée empêcherait de prendre en compte les pratiques de sur et de sous-notation de certains établissements, ce qui conduirait à avantager ou désavantager les élèves concernés. Cette objection doit être dépassée, pour deux raisons liées l’une à l’autre. D’abord, le directeur général de l’enseignement scolaire nous a affirmé, au cours de son audition, que la réforme du baccalauréat allait conduire à un mouvement d’harmonisation des pratiques de notation, au moins s’agissant des bacheliers généraux. De plus, cette harmonisation, appelée de leurs vœux par de nombreux acteurs que nous avons entendus, sera encouragée par l’anonymisation du lycée dans Parcoursup.

En second lieu, certains auditionnés nous ont alertés sur le fait que ce critère du lycée d’origine pouvait être utilisé dans le cadre de dispositifs visant à favoriser l’égalité des chances. Notre proposition n’a bien entendu jamais eu pour objet d’empêcher ceux-ci de fonctionner. J’ai ainsi déposé un amendement visant à préciser que l’anonymisation s’exercera sans préjudice de la possibilité de faire apparaître, sur la plateforme, les informations nécessaires au bon fonctionnement de ces dispositifs.

Le deuxième correctif que nous apportons est relatif à l’amélioration de la transparence du système Parcoursup. De l’avis général des personnes auditionnées, les informations disponibles sur Parcoursup ont été amplement complétées au cours des premières années de fonctionnement de la plateforme. Nous souhaitons poursuivre ce mouvement nécessaire vers plus de transparence, à plusieurs titres. Il s’agit d’abord de demander aux formations de publier leurs critères et modalités d’examen des candidatures au titre de l’année en cours en amont de l’ouverture de la plateforme, alors que ces informations ne sont actuellement disponibles que pour l’année précédente. Dans cette mesure, les candidats pourront se faire une idée précise de la manière dont leurs mérites seront appréciés par les commissions d’examen des vœux (CEV).

Cela ne signifie pas pour autant que nous souhaitons revenir sur le principe du respect du secret des délibérations des jurys : l’obligation de communication ex ante des modalités de sélection, notamment au moyen de traitements automatisés, n’a pas vocation à figer les délibérations des membres des CEV, qui pourront toujours procéder à des classements des candidatures « à la main », en se fondant entre autres sur des éléments du dossier non résumables par un indicateur chiffré, comme les lettres de motivation. Ainsi, le dispositif envisagé propose de maintenir la faculté, pour tout candidat, de réclamer la communication des motifs pédagogiques ayant fondé la décision prise sur sa candidature après réception de celle-ci. Ce maintien est introduit par voie d’amendement.

Il est également question de tirer toutes les conséquences de la réforme du baccalauréat général, qui a conduit à la disparition des traditionnelles filières économique et sociale, littéraire et scientifique au bénéfice de combinaisons d’enseignements de spécialité et optionnels. Au cours des auditions, il est apparu clairement que les combinaisons retenues seraient déterminantes pour l’accès à certaines formations du supérieur. Nous proposons donc que ces formations aient l’obligation de rendre publiques les combinaisons qu’elles entendent privilégier.

Conséquence immédiate du point précédent : dans la mesure où ces combinaisons sont choisies par les élèves en fin de classe de seconde, mais également parce que les projets d’orientation doivent se construire dans le temps long, nous souhaitons que l’ensemble des informations que nous avons abordées soient rendues publiques, non au bénéfice des seuls élèves de terminale, mais à tous. Cette précision est apportée par voie d’amendement. Du reste, une telle publication permettra également aux étudiants en réorientation de se préparer au mieux.

Notre proposition de loi met également en lumière deux difficultés, afin d’alerter et de faire réagir les acteurs concernés, au premier rang desquels les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.

La première concerne l’augmentation du nombre de formations en tension, pour lesquelles la demande excède fortement les capacités d’accueil. L’augmentation de la démographie universitaire, non accompagnée de moyens suffisants, induit qu’un nombre croissant de filières non sélectives en droit deviennent sélectives en fait. Il en ressort un affaiblissement du principe selon lequel l’obtention du baccalauréat donne droit à un accès à l’enseignement supérieur. La présente proposition de loi propose un cadre pour permettre aux établissements d’agir en concertation avec le rectorat.

La seconde tient aux capacités d’accueil en section de technicien supérieur (STS) et en institut universitaire de technologie (IUT) pour les bacheliers professionnels et technologiques. La situation de ces élèves nous préoccupe particulièrement car nous ne sommes pas en mesure de leur proposer des études supérieures en adéquation avec leur formation. La politique des quotas n’y suffit toujours pas, les capacités des IUT n’étant pas suffisantes pour les accueillir sur l’ensemble du territoire.

Enfin, la proposition de loi entend consacrer le principe d’un accompagnement personnalisé à l’orientation pour tous les élèves à partir de la classe de seconde, qui permettra de préparer au mieux la procédure Parcoursup. Si des mesures ont été prises en début de quinquennat en ce sens, au travers du plan Étudiants – semaines de l’orientation, 54 heures annuelles dédiées à l’orientation, etc. –, le constat unanimement dressé par les acteurs de terrain est celui d’une mise en œuvre très inégale en fonction des établissements. Les différentes auditions que nous avons menées ont prouvé combien les enfants des classes sociales les plus défavorisées étaient les moins bien accompagnés dans ce parcours d’orientation et d’utilisation de la plateforme Parcoursup. Il est temps de se doter d’une politique publique forte de l’orientation pour que tous les enfants de la République soient accompagnés dans leurs choix.

La présente proposition de loi n’a pas vocation à renverser le système Parcoursup. Dans une logique constructive et dans l’attente d’une réforme de grande ampleur, elle souhaite simplement en gommer les effets les plus inégalitaires et améliorer son fonctionnement. Dans cette mesure, elle pourrait être largement soutenue, par-delà les clivages politiques.

Mme Anne Brugnera (LaREM). Le groupe La République en marche partage totalement l’objectif d’atténuer les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur ; nous y travaillons d’ailleurs depuis le début de ce mandat. Toutefois, nous ne sommes pas d’accord avec l’intitulé de cette proposition de loi, qui précise que ces inégalités seraient « générées par Parcoursup ».

Parcoursup est un outil créé par la loi « orientation et réussite des étudiants » pour remplacer l’outil précédent, Admission Post-Bac, dit APB, qui dysfonctionnait et générait une sélection par tirage au sort pour les formations les plus demandées. Parcoursup est une plateforme nationale permettant à tout lycéen, apprenti ou étudiant en réorientation, de connaître les formations d’enseignement supérieur et leurs caractéristiques, de déposer des vœux d’entrée dans ces formations, de prendre connaissance des réponses apportées à ses vœux et de répondre aux propositions d’admission transmises par la plateforme. Parcoursup a ainsi facilité l’accès de tous à l’enseignement supérieur et à ses 19 500 formations labellisées.

Les inégalités d’accès se créent en amont de l’entrée en études supérieures : elles se forgent dès l’enfance. Nous avons travaillé durant tout ce mandat à les réduire et à lutter contre les inégalités de destin. Avec le parcours des 1 000 premiers jours, le plan de lutte contre la pauvreté, le dédoublement des classes de CP et de CE1 en réseau d’éducation prioritaire REP et REP+, nous luttons pour apporter plus aux enfants qui ont moins et, ainsi, donner à tous les mêmes chances de réussite.

De même, nous avons légiféré pour rendre l’école obligatoire dès 3 ans et diminuer les effectifs en grande section de maternelle, afin que les enfants les plus défavorisés bénéficient d’un apprentissage plus précoce du langage et de la vie en collectivité. Concernant le collège et le lycée, nous avons amélioré le système éducatif, notamment ses dispositifs d’orientation, avec par exemple les troisièmes « prépa-métiers », que nous avons créées dans la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel et qui rencontrent beaucoup de succès. Avec les nombreuses mesures relevant du ministère de l’éducation nationale que nous avons adoptées – cordées de la réussite, mentorat, réforme du lycée professionnel, réforme du baccalauréat –, nous combattons les inégalités de destin.

Nous avons également amélioré ce moment important qu’est l’entrée dans l’enseignement supérieur. Tout d’abord, en mettant en œuvre une plateforme présentant toutes les formations existant en France, nous avons ouvert le champ des possibles de nos jeunes. En y explicitant les attendus de chaque formation, nous avons montré à ceux qui croyaient certaines formations inaccessibles qu’ils pouvaient légitimement candidater et être sélectionnés. J’en veux pour preuve les résultats de l’entrée à Sciences Po Paris dans l’outil Parcoursup, l’an passé, qui montrent une hausse de 45 % du nombre de lycées de provenance des jeunes sélectionnés : c’est bien l’entrée dans Parcoursup qui a diversifié l’origine des lycéens accédant à Sciences Po Paris.

La loi « orientation et réussite des étudiants » a aussi créé un accompagnement en première année. Le fossé entre le lycée et les études supérieures pouvant être grand, cet accompagnement personnalisé proposé aux jeunes qui en ont besoin permet de réduire le taux d’échec.

Voilà les quelques raisons pour lesquelles nous nous opposerons à cette proposition de loi. Si nous partageons l’objectif de réduction des inégalités d’accès à l’enseignement supérieur, nous ne partageons pas le constat que celles-ci seraient générées par Parcoursup. Nous n’approuvons donc pas les solutions que vous proposez. L’examen des articles nous permettra de démontrer que Parcoursup, dont les règles de fonctionnement visent à garantir la liberté d’accès, la transparence, la non-discrimination, l’égalité de traitement des candidats et l’équité de la procédure, est un outil efficace et robuste, qui s’est amélioré au fil des ans et des retours d’expérience et qui continuera à s’améliorer.

M. Frédéric Reiss (LR). Réduire les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur générées par Parcoursup est un objectif louable de la part du groupe GDR. L’on se souvient en effet des bugs de Parcoursup, en mai 2019 ; à cela s’ajoutent des inégalités récurrentes, non seulement dans l’accès à l’enseignement supérieur, mais aussi dans l’accès à des informations claires pour nos étudiants.

Le Gouvernement répète à l’envi que le nouveau Parcoursup est un processus plus humain que l’ancien, alors que le raccourcissement du calendrier et le peu de transparence des algorithmes inquiètent les étudiants. Il faut se rendre à l’évidence : certains d’entre eux se retrouvent dans des filières qui ne les attiraient pas vraiment. Comme ils sont invités à exprimer jusqu’à dix vœux, y compris des sous-vœux et parfois même des vœux d’apprentissage, il y a malheureusement des erreurs d’aiguillage.

Le groupe LR partage les observations formulées par la Cour des comptes dans son rapport de février 2020 : celle-ci suggère l’anonymisation du lycée d’origine, tout en insistant sur une mesure de pondération de l’écart entre les résultats au bac et les notes du contrôle continu.

L’information des élèves est évidemment fondamentale pour une bonne orientation. Ces derniers ont accès, pour chaque formation, au taux d’admission des candidats dans tel ou tel établissement, à la série du bac souhaitée ou à la part des boursiers. En revanche, ils ne connaissent pas les attentes précises pour les différentes formations ni les critères des algorithmes, lesquels sont parfois locaux. Lors de la mission flash que nous avions menée avec Géraldine Bannier sur les spécialités de première, nous avions déjà alerté sur ce point. En effet, les attendus des formations supérieures sont déterminants dans le choix des lycéens en première et en terminale, et, du fait de la disparition du groupe classe, ce ne sont pas les deux professeurs principaux qui pourront distiller les bons conseils en matière d’orientation.

La Cour des comptes propose de rendre publics les critères de sélection et de créer un outil d’aide à l’orientation permettant d’analyser les classements. Aussi ne faut-il pas s’étonner que certains élèves aient recours à du coaching privé. Si les 54 heures inscrites dans l’emploi du temps étaient effectivement consacrées à l’orientation, nous n’en serions probablement pas là.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui s’appuie largement sur le rapport de la Cour des comptes mais cite aussi le Défenseur des droits, la Commission nationale consultative des droits de l’homme ou un rapport sénatorial sur l’égalité des chances. Le constat est implacable : 67 % des enfants de cadres obtiennent un diplôme de l’enseignement supérieur post-licence, contre seulement 16 % des enfants d’ouvriers. Cela montre que l’ascenseur social est en panne.

Si, au sein du groupe LR, nous partageons le diagnostic sur les inégalités d’accès au supérieur, nous sommes beaucoup plus réservés sur les dispositifs proposés, qui sont contraires à notre vision de l’enseignement supérieur. J’ai bien noté vos arguments, madame la rapporteure, mais l’anonymisation pure et simple du lycée d’origine ne nous convient pas, pas plus que les critères de détermination des capacités d’accueil mentionnant des taux de pression, ce dernier critère étant jugé non fiable par la Cour des comptes.

Enfin, accueillir tous les candidats venant de l’enseignement professionnel et technologique en STS ou en IUT ne nous semble pas raisonnable. Une évaluation des candidatures, des critères de mérite et l’élaboration d’une doctrine fixant d’une manière concertée les capacités d’accueil pour l’ensemble des formations du supérieur nous semblent plus acceptables. Le groupe Les Républicains s’abstiendra donc sur cette proposition de loi.

Mme Géraldine Bannier (Dem). La proposition de loi du groupe GDR, avec ses deux axes – amélioration de la transparence de Parcoursup et renforcement de l’aide à l’orientation et à l’information des étudiants –, entend s’attaquer à un problème d’envergure : l’inégalité d’accès sociale et territoriale des lycéens aux études supérieures – objectif somme toute louable.

Il est vrai que les chiffres sont sévères : selon le rapport de 2017 de l’Observatoire des inégalités, si 30 % des jeunes âgés de 18 à 23 ans ont des parents ouvriers, ils ne constituent que 11 % des étudiants de l’enseignement supérieur, et le chiffre tombe à 6 % des effectifs des classes préparatoires. On connaît aussi le chiffre décevant de la promotion 2019-2020 à l’ENA, où un seul élève sur quatre-vingt-deux est fils d’ouvrier.

Au-delà de Parcoursup, qui a mis fin à l’improbable système APB de tirage au sort et permis, en 2019, l’acceptation de 21 % de boursiers en plus en phase principale par rapport à l’année précédente, c’est le système global qui doit être revu, car il n’encourage pas la mixité sociale dès le plus jeune âge. Il faudrait surtout éviter qu’il y ait d’un côté les bons établissements et, de l’autre, les moins bons. Nous avions d’ailleurs voté, lors de l’examen de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, un amendement visant à l’amélioration de la mixité sociale au sein des établissements en concertation avec les collectivités territoriales. C’est un levier majeur, le premier, pour corriger les inégalités de destin liées à l’origine sociale que de travailler partout, dans chaque établissement, qu’il soit privé ou public, à un objectif de mixité sociale, dès lors que la démographie locale ou l’adaptation des transports le permet. Un excellent élève provenant d’un établissement moins performant en comparaison d’autres, a tout le potentiel nécessaire pour rattraper très vite son retard d’acquisition et doit pouvoir avoir la même chance d’intégrer un établissement coté, même s’il n’a pas bénéficié d’un aiguillage précoce et réfléchi par des proches aguerris au système scolaire. Le second levier à actionner est celui de la lutte contre l’autocensure. Nous devons poursuivre notre action en ce sens, notamment grâce aux Cordées de la réussite mises en place entre les établissements d’enseignement pour garantir l’égalité des chances.

L’anonymisation du lycée d’origine nous paraît être une idée intéressante puisqu’elle permettrait d’éviter que d’excellents établissements fassent leur marché d’abord et avant tout auprès d’établissements tout aussi cotés. Sans être tout à fait défavorables à ce point précis, nous émettons des réserves sur les reproches faits à la nouvelle plateforme quant au fait qu’elle pérennise les inégalités sociales et territoriales dans l’accès des étudiants aux études supérieures. De fait, Parcoursup a permis d’aller plus loin dans la transparence, avec la publication de l’algorithme et des attendus de formation par les établissements d’enseignement supérieur, et fournit également des instructions strictes à ces derniers concernant l’obligation de non-discrimination et d’égalité de traitement.

Les données de Parcoursup pour 2021 nous rappellent que près de 95 % des bacheliers, quel que soit leur établissement d’origine, accèdent à l’enseignement supérieur et que la mobilité progresse de manière générale, notamment chez les élèves boursiers. On constate aussi de nets progrès dans l’accès à certaines formations d’excellence. Les écoles nationales vétérinaires et Sciences Po Paris affichent respectivement un taux d’élèves boursiers de 12 % et 13 %, en forte hausse par rapport aux années précédentes, avec une ouverture plus large aux lycéens de toutes les régions. Tout cela va dans le bon sens.

Ainsi, pour le groupe Démocrates, l’outil Parcoursup est loin d’être le problème à l’origine de l’inégalité des chances dans l’accès à l’enseignement supérieur. Nous voterons donc, malgré son objet louable, contre la proposition de loi.

Mme Sylvie Tolmont (SOC). Si le portail APB n’était pas satisfaisant, la plateforme Parcoursup ne l’est pas davantage et elle ne répond pas aux promesses de son cahier des charges. C’est le constat qui vous a amenée, madame la rapporteure, à nous présenter cette proposition de loi.

Dans leur rapport d’information sur l’évaluation de l’accès à l’enseignement supérieur, publié en juillet 2020, nos collègues Régis Juanico et Nathalie Sarles ont souligné que Parcoursup n’est qu’une plateforme d’affectation, dont le premier objectif est quantitatif, puisqu’il s’agit de faire accéder la plus grande proportion possible de candidats à l’enseignement supérieur, au détriment d’une approche plus qualitative.

Or, vous l’avez dit, les inégalités sociales et territoriales pèsent lourd, tout au long du parcours scolaire et au moment de l’accès à l’enseignement supérieur, y compris dans les filières non sélectives. Les enfants d’ouvriers représentent 12 % de l’ensemble des étudiants, alors que les ouvriers représentent 21 % de la population active ; 67 % des enfants de cadres obtiennent un diplôme de l’enseignement supérieur au-delà de la licence, et 16 % seulement des enfants d’ouvriers. Nous partageons donc votre constat, madame la rapporteure : Parcoursup est un facteur aggravant des inégalités.

Tout d’abord, les modalités d’orientation n’assurent pas un égal accès de tous les lycéens aux informations permettant de faire un choix éclairé, comme le regrette la Commission nationale consultative des droits de l’homme. En maintenant une certaine opacité sur les critères de sélection et les algorithmes, Parcoursup favorise les enfants des familles les mieux informées, très bien intégrées au système scolaire et sachant trouver l’information. Les procédures d’affectation sont anxiogènes pour 82 % des lycéens et elles sont perçues comme arbitraires par 61 % d’entre eux.

La Cour des comptes souligne que le lycée d’origine reste un critère de sélection pour 20 % des établissements d’enseignement supérieur, ce qui crée une discrimination selon le lieu de vie. Elle rappelle également que le manque de moyens consacrés à l’orientation des élèves et le non-respect du nombre d’heures dédiées à celle-ci ne permettent pas d’assurer le niveau d’information nécessaire pour garantir l’égalité d’accès à une formation supérieure. Ainsi, 30 % des lycéens n’ont pas été accompagnés du tout durant tout le processus d’inscription sur Parcoursup, depuis la formulation jusqu’à la confirmation de leurs vœux, et plus d’un tiers des élèves n’ont pas rencontré d’intervenants extérieurs, qu’ils soient universitaires ou professionnels, au cours de l’année scolaire 2018-2019.

Or la réforme du baccalauréat, avec l’introduction des enseignements de spécialité, a considérablement compliqué les choses. Elle oblige, plus que jamais, les élèves à faire les bons choix de spécialités en amont, c’est-à-dire dès la fin de la seconde, s’ils veulent intégrer la formation de leur choix, sans forcément connaître les critères de sélection. Là encore, ce nouveau système favorise les élèves issus des familles les mieux informées, qui vont jusqu’à faire appel à des organismes privés pour bénéficier d’un accompagnement.

Au-delà de ces défauts structurels, le problème de fond, c’est que l’enseignement supérieur n’est toujours pas en mesure d’accueillir la totalité des candidats, toujours plus nombreux, dans les filières de leur choix. Comme le constate Thibaut Boncourt, président de la commission d’examen des vœux Parcoursup de la licence de sciences politiques de l’université Paris 1-Panthéon Sorbonne, Parcoursup visait simplement à rendre l’éviction d’une partie des candidats plus acceptable, en écartant l’injustice du tirage au sort.

La Cour des comptes note que l’on n’a pas créé de places supplémentaires dans les filières les plus demandées. La situation est particulièrement préoccupante pour les bacheliers professionnels et technologiques, qui se dirigent vers des filières exclusivement sélectives, marquées par un manque structurel de places. En huit ans, le nombre de bacheliers professionnels est passé de 120 000 à 180 000 environ, et seules 9 000 places supplémentaires ont été créées en première année de brevet de technicien supérieur (BTS). Il est donc nécessaire de sortir de la logique actuelle et d’abandonner un dispositif qui consiste seulement à gérer des listes d’attente, à partir d’un algorithme qui décide seul de l’orientation de chacun et qui abîme le sentiment de reconnaissance sociale en donnant à des milliers de jeunes l’impression de ne pas trouver leur juste place dans la société.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons que souscrire à l’objectif de votre proposition de loi, madame la rapporteure, et nous la voterons.

M. Grégory Labille (UDI-I). Le 25 octobre, le site de L’Étudiant commençait un article consacré au bilan de Parcoursup en 2021 par une phrase assez évocatrice : « Pour réussir sur Parcoursup, il vaut mieux être un bon élève et préparer un bac général. » Ces mots témoignent d’une réalité que de nombreux jeunes ont vécue cette année encore : l’orientation est un long parcours, qui peut être semé d’embûches si l’on ne rentre pas dans certaines cases.

Je remercie donc nos collègues du groupe GDR de profiter de leur journée de niche parlementaire pour mettre sur la table un sujet qui concerne chaque année plus de 700 000 jeunes et, à travers eux, plus de 700 000 familles. Il est vrai que certains chiffres, pour l’année 2021, sont assez surprenants. Par exemple, il a fallu attendre le 4 août pour que 90 % des bacheliers sans mention aient une réponse, alors que la même proportion des bacheliers ayant obtenu une mention très bien l’avait reçue dès le 17 juin. Le 1er juillet, 79 % des bacheliers généraux avaient reçu une réponse, mais seulement 48 % des bacheliers professionnels. À cette même date, les places en BTS, pourtant très courtisées par ces mêmes bacheliers professionnels, étaient les moins pourvues. Ce que ces chiffres mettent en lumière, c’est que Parcoursup fait davantage attendre les étudiants ayant obtenu de moins bons résultats et ceux qui s’orientent vers les filières que l’on aurait tendance à considérer comme moins prestigieuses. Pensez-vous, madame la rapporteure, qu’il serait nécessaire de rétablir une hiérarchie dans les vœux ?

Pour en revenir au cœur de cette proposition de loi, même si mes propos ont été assez critiques jusqu’ici, il faut reconnaître, comme le fait la Cour des comptes, que la plateforme Parcoursup a succédé au très décrié système d’admission post-bac, notamment en raison du tirage au sort, et qu’elle a permis, dans un premier temps, de remettre de l’ordre et de donner des résultats satisfaisants pour une bonne partie des élèves.

L’article 1er s’inspire directement de l’une des recommandations de la Cour des comptes, puisque vous proposez d’anonymiser le lycée d’origine de l’élève, mais vous ne reprenez pas la seconde partie de cette recommandation, qui prévoit de « lui substituer une mesure de l’écart entre les résultats au baccalauréat et la notation au contrôle continu ». Une telle disposition serait pourtant de nature à garantir une certaine équité dans l’appréciation des dossiers. Je souscris à votre demande d’une plus grande transparence, s’agissant des critères retenus ou des spécialités favorisées par les établissements, même si je m’interroge sur la nécessité d’inscrire ces éléments dans la loi.

Votre texte soulève un problème essentiel : nos lycéens ne sont pas suffisamment accompagnés dans leur choix d’orientation. D’ailleurs, la véritable inégalité de Parcoursup concerne surtout l’accès à l’information, qui n’est pas la même en fonction de l’établissement et de la qualité de l’accompagnement à l’orientation. Je partage, à cet égard, la réflexion qu’avait faite ma collègue Agnès Thill à l’occasion de la mission flash qu’elle a conduite, avec Bertrand Bouyx, sur les spécialités en terminale dans le cadre de la réforme du baccalauréat. La disparition du groupe classe pose de nombreux problèmes et le manque de psychologues de l’éducation nationale, élément clé de l’orientation des élèves, se fait terriblement ressentir.

Si je souscris à l’ambition de ce texte d’assurer une orientation plus juste, il me semble que les cartes sont surtout entre les mains des ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche. J’espère qu’ils entendront une partie de nos revendications.

Mme Elsa Faucillon (GDR). Vous avez dit, madame Bannier, que les inégalités sociales et scolaires, qui sont fortement corrélées dans notre pays, préexistaient à Parcoursup, et que cette plateforme n’est donc pas à l’origine de ces inégalités. C’est une évidence, mais Parcoursup, en organisant et en entérinant ces inégalités, les aggrave.

Chez ceux de nos collègues qui s’opposent à notre proposition de loi, dont l’objet, je le rappelle, est d’atténuer les effets de sélection et le caractère arbitraire de Parcoursup, je vois une forme de renoncement, et même une dénégation du droit de toutes et tous d’étudier à l’université. Parce que les moyens fournis par le ministère de l’éducation nationale et par celui de l’enseignement supérieur et de la recherche ne sont pas à la hauteur, parce que l’on manque de places à l’université, on semble se faire à l’idée que l’ère de la sélection est venue et que ce n’est pas un problème si des dizaines de milliers de jeunes ne peuvent pas accéder à l’enseignement supérieur ou y poursuivre leurs études, alors que c’est leur souhait.

Nous, nous ne renonçons pas, nous considérons qu’étudier est un droit et que l’État doit mettre tous les moyens en œuvre pour garantir ce droit. Je tiens à apporter mon soutien à toutes celles et tous ceux qui se retrouvent sans affectation ou qui ont dû renoncer à la voie qu’ils avaient choisie. Au lieu de créer de nouvelles places à l’université, ce gouvernement a choisi de renoncer, en actant ce manque de places et en organisant une sélection généralisée sur la plateforme d’inscription Parcoursup, à partir de critères et d’algorithmes opaques. Le bilan, c’est qu’à la rentrée 2021, près de 22 000 bacheliers n’ont pas trouvé de place dans l’enseignement supérieur, et qu’un certain nombre d’étudiants en licence n’en ont pas trouvé en master.

Cette proposition de loi du groupe GDR vise à contrer – modestement – les conséquences désastreuses de cette plateforme inique. Je remercie la rapporteure pour son travail, qui vise à assurer aux étudiants la jouissance du droit à l’enseignement, qui est inscrit dans notre Constitution. Parcoursup a remplacé le tirage au sort par la sélection des candidats sur des critères que nous jugeons arbitraires. L’établissement d’algorithmes opaques porte atteinte au principe d’égalité, et c’est ce que l’article 1er s’efforce de corriger.

Parcoursup a également renforcé les inégalités en faisant reposer le choix des étudiants sur des stratégies scolaires qui nécessitent des ressources. Ceux qui sont le plus touchés par cette mesure sont les élèves issus des classes populaires, car la France est le pays où les inégalités sociales et scolaires sont les plus corrélées. À force d’accroître la complexité des codes scolaires, on laisse de côté celles et ceux qui ne les maîtrisent pas. Or ce sont majoritairement des élèves des classes populaires.

Oui, Parcoursup accentue et va continuer d’accentuer les inégalités, puisqu’il organise la sélection. Dans le cadre de notre niche parlementaire, nous n’avons pas les moyens de proposer 20 milliards de plus pour l’université et la recherche, mais nous essayons au moins de réduire la sélection et l’arbitraire.

M. Maxime Minot. Nous sommes nombreux dans cette commission à dénoncer, année après année, les difficultés liées à la plateforme Parcoursup. Cette proposition de loi, qui vise à atténuer les inégalités créées par ce parcours du combattant, a donc tout son sens. Notre collègue Frédéric Reiss a fort bien résumé la position de notre groupe et montré quels sont, de notre point de vue, les avantages et les inconvénients de ce texte.

Vous proposez, à l’article 2, de renforcer l’aide à l’orientation des élèves. Il faudra nécessairement recruter des personnels pour permettre à chaque établissement de remplir ses obligations. Avez-vous pu évaluer le coût de cette mesure avec précision ?

Mme Sylvie Charrière. Madame la rapporteure, vous constatez des inégalités territoriales dans l’offre du service public de l’orientation. La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 décembre 2018 a confié aux régions la compétence d’organiser des actions d’information sur les métiers et les formations. Un cadre national de référence a d’ailleurs été signé par l’État et les régions en mai 2019. Avez-vous pu échanger avec l’Association des régions de France pour faire le point sur la mise en œuvre de cette nouvelle compétence et sur les stratégies que les régions ont adoptées : plateforme numérique, visites d’entreprises, de lycées professionnels, ambassadeurs, mécénat, immersion ? Avez-vous pu participer sur le terrain à des actions concrètes proposées par les régions ?

Les régions ayant la compétence économique, le lien avec le monde professionnel semblait aller de soi. Quelles seraient vos préconisations pour que la découverte du monde professionnel et des formations s’intensifie ?

Mme Emmanuelle Anthoine. À l’issue de la phase principale de Parcoursup, plus de 90 000 candidats étaient toujours en attente d’une proposition d’affectation dans l’enseignement supérieur, soit plus de 10 % des postulants. Cette situation reste insatisfaisante ; elle traduit l’existence d’inégalités d’accès à l’enseignement supérieur, provoquées par Parcoursup. Les bacheliers issus de filières professionnelles et technologiques sont particulièrement concernés. Ils représentaient en effet, au terme de la procédure, l’essentiel des 239 lycéens restés sans proposition d’affectation. Il semble que le nombre de propositions faites aux candidats ait diminué. En effet, 9 000 candidats de moins se sont vus proposer une inscription cette année. Pourtant, le nombre de candidats total sur la plateforme a diminué de 1,8 % – soit 15 000 bacheliers.

Face à cette réalité, il est nécessaire de veiller à ce que les capacités d’accueil permettent une intégration suffisante de ces lycéens dans l’enseignement supérieur ; c’est ce que propose l’article 1er. Mais les universités ont-elles des moyens suffisants pour augmenter leurs capacités d’accueil et éviter que des lycéens ne se retrouvent sans proposition d’affectation ?

Mme Karine Lebon, rapporteure. Que les choses soient claires : je ne regrette certainement pas le bon vieux temps d’APB. Nous sommes au moins tous d’accord là-dessus.

Nombre d’entre vous ont fait des remarques sur le titre de cette proposition de loi. Ce qui compte, c’est son contenu, et nous serions tout à fait favorables à une modification de son titre par voie d’amendement, dans la mesure où nous partageons le même objectif, celui de réduire les inégalités.

Le système devrait être revu en profondeur, c’est notre conviction, mais nous n’avons pas les moyens de le faire avec une proposition de loi déposée dans le cadre d’une niche parlementaire. Nous nous contentons donc, ici, de faire ce que nous pouvons.

Monsieur Labille, la hiérarchisation des vœux a effectivement été demandée par les syndicats étudiants et nous y serions tout à fait favorables. Quant à la deuxième partie de la recommandation de la Cour des comptes, c’est une disposition très technique que nous ne pouvions pas inscrire dans la loi : voilà pourquoi nous ne l’avons pas fait.

Madame Faucillon, vous avez parlé à juste titre des « codes » scolaires. Des remontées nous ont été faites à ce sujet, y compris de la part des entreprises de coaching qui fleurissent sur le marché de l’orientation. Elles nous ont dit que même les fils de médecin ont du mal à s’y retrouver dans les spécialités, depuis la réforme des études de médecine. C’est la preuve qu’il faut communiquer bien en amont, afin d’expliciter ces codes.

Monsieur Minot, cette proposition de loi n’est pas gagée, elle n’entraînera pas de coût supplémentaire, car tous les dispositifs sont déjà prévus dans la loi : ce sont les 54 heures annuelles et les deux semaines dédiées à l’orientation.

Madame Charrière, nous n’avons pas pu auditionner l’Association des régions de France, mais il ne m’a pas échappé que cette compétence échoit désormais aux régions. J’ai pu assister à des actions concrètes et même en proposer certaines, sur le thème de l’égalité entre les femmes et les hommes, dans le rapport d’information sur les stéréotypes de genre que j’ai réalisé avec un collègue de la majorité, M. Gaël Le Bohec. Mais il n’empêche que les mesures prévues par la loi, notamment les 54 heures dédiées à l’orientation, doivent s’appliquer. C’est là-dessus, sur le service public d’orientation existant au lycée, que porte cette proposition de loi.

Madame Anthoine, dans l’idéal, nous souhaiterions donner davantage de moyens aux universités pour qu’elles puissent accueillir plus d’étudiants, mais nous n’avons pas les moyens de le faire dans cette proposition de loi. Nous avons toutefois demandé des informations sur les formations en tension.

La commission passe à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Amélioration de la plateforme Parcoursup

Amendement AC5 de la rapporteure.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Selon la Cour des comptes, 20 % des formations non sélectives ont érigé le lycée d’origine en critère complémentaire d’examen des candidatures qui leur sont adressées. Le Défenseur des droits l’a indiqué dans une décision du 18 janvier 2019 et certains d’entre nous l’ont rappelé au cours de la discussion générale, l’utilisation d’un tel critère fait courir un risque de discrimination. De plus, elle peut contribuer à entretenir les inégalités présentes dans notre système scolaire, en avantageant les élèves issus de lycées ayant une bonne réputation.

Par cet amendement, je propose une rédaction plus opérationnelle de l’article 1er, qui tend à rendre anonyme le lycée d’origine dans Parcoursup. Je propose néanmoins de préciser que cette anonymisation s’exercera sans préjudice des mécanismes de promotion de l’égalité des chances mentionnés à l’alinéa 3 du I de l’article L. 612‑3 du code de l’éducation.

Mme Anne Brugnera. Dans Parcoursup, un certain nombre de données sont déjà anonymisées, notamment le nom, le prénom et l’âge, l’adresse pouvant être conservée pour certains dispositifs, par exemple les aides à la mobilité ou à l’internat. En outre, les établissements qui participent à la procédure nationale Parcoursup signent une charte de procédure assortie d’une note de cadrage, qui fixe des obligations de non-discrimination. Certes, on me répondra peut-être qu’elles ne respectent pas nécessairement la charte qu’elles ont signée... En tout cas, nous faisons confiance aux professionnels, qui sont très impliqués, même si certains d’entre eux peuvent faire des recherches sur les lycées d’origine. L’indication du lycée d’origine est d’ailleurs utile pour les Cordées de la réussite. Elle permet aussi d’aller chercher des profils que l’on n’aurait pas remarqués autrement.

Surtout, la mise en place de Parcoursup a été suivie par une autre réforme, celle du baccalauréat, qui introduit notamment une part de contrôle continu. La mise en adéquation de ces deux réformes se poursuit, et nous sommes à cet égard au milieu du gué. Avant d’envisager l’anonymisation du lycée d’origine, il convient de progresser en matière d’harmonisation des notes obtenues au contrôle continu. Nous voterons donc contre l’amendement.

Mme Géraldine Bannier. Je l’ai indiqué lors de la discussion générale, le groupe Démocrates est plutôt favorable à cette idée. Nous allons donc voter pour l’amendement, même si nous voterons contre l’article 1er.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC6 de la rapporteure.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Afin d’améliorer la transparence, l’amendement vise à préciser que les critères faisant l’objet d’une communication auprès des candidats sont ceux qui concernent l’année en cours. Actuellement, seuls ceux relatifs à l’année précédente sont divulgués.

M. Fabien Di Filippo. Ce que vous avez dit à propos des critères de sélection est très juste, madame la rapporteure, et je vous remercie de mettre au cœur du débat ce sujet très préoccupant pour les lycéens, dont les deux tiers sont stressés par la procédure Parcoursup, un tiers d’entre eux se disant tout bonnement perdus. Cela donne l’impression que leur avenir se joue à la roulette russe ! Vous soulignez à raison l’opacité des algorithmes. En outre, on contraint les lycéens à formuler des vœux multiples, pour qu’ils aient une solution de repli, mais ils ne sont pas nécessairement motivés par toutes ces formations. Au milieu de l’été dernier, hélas, 15 % des lycéens se sont retrouvés sans savoir ce qu’ils feraient à la rentrée. Les écoles ou cursus étrangers en font d’ailleurs un argument publicitaire : « n’attendez pas Parcoursup, venez chez nous ! »

Ce n’est pas sans lien avec l’échec de la réforme du lycée général : les établissements proposent des options différentes, retiennent des critères variables et ne notent pas de la même manière le contrôle continu. Au milieu de tout cela, les jeunes sont complètement perdus. Il est urgent d’agir, car on est en train de gâcher les parcours d’études de nombreux jeunes, parfois des plus méritants. Il n’est pas concevable que les algorithmes introduisent ainsi une part de hasard.

Mme Anne Brugnera. La transparence est un objectif primordial, assigné à l’outil Parcoursup et affiché comme tel. À cet égard, beaucoup de travail a été fait et Parcoursup a été amélioré chaque année.

Dans la procédure Parcoursup, contrairement à ce que nous venons d’entendre, ce n’est pas l’algorithme qui affecte et ce n’est pas la machine qui décide. La procédure de sélection des candidatures et de réponse aux candidats relève de commissions d’examen des vœux, composées de professionnels de l’enseignement supérieur.

Les informations relatives aux algorithmes de présélection sont désormais rendues publiques. Vous demandez en outre, madame la rapporteure, que les critères exacts de sélection des candidats soient fournis en amont du processus.

Saisi à ce sujet, notamment par un syndicat étudiant, le Conseil constitutionnel a rendu en 2020 une décision très claire, que tous connaissent et appliquent. Aux termes de cette décision, les dispositions relatives à la procédure Parcoursup sont conformes à la Constitution. Sont fournis et connus en amont les attendus de chaque formation – nationaux et locaux –, les critères généraux d’examen des candidatures, la capacité d’accueil, le rang du dernier admis dans chaque formation, autant d’éléments qui permettent aux jeunes de se positionner et de formuler leurs vœux en toute connaissance de cause. Après le processus de sélection, chaque candidat a la possibilité de demander, à titre personnel, les critères et modalités d’examen de sa candidature ainsi que les motifs de refus. Élément nouveau cette année, chaque formation doit désormais fournir un rapport d’examen des vœux, qui est rendu public. Environ 10 000 rapports de cette nature sont disponibles sur la plateforme Parcoursup. Nous pensons qu’il n’est pas nécessaire de revenir sur le dispositif résultant de la décision du Conseil constitutionnel.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Les critères actuellement communiqués aux candidats concernent l’année précédente. Lors d’une des auditions que j’ai organisées – je sais que vous avez assisté à certaines de mes auditions mais j’ignore si vous avez pu assister à celle-ci –, les dirigeants d’établissements nous ont dit que leurs critères changeaient d’année en année. Autrement dit, les candidats qui postulent sur Parcoursup se fondent sur des critères obsolètes, ce qui pose un vrai problème. Allons-nous maintenir une telle inégalité ?

Mme Anne Brugnera. Les critères généraux peuvent certes changer, mais ils sont publiés chaque année. Par ailleurs, comme l’ont très justement écrit nos collègues Nathalie Sarles et Régis Juanico dans leur rapport relatif à l’accès à l’enseignement supérieur remis au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, si l’on allait plus loin dans la transparence, on figerait complètement le processus de sélection, qui ne reposerait plus in fine que sur l’examen des notes ; il ne serait plus possible de prendre en considération la lettre de motivation, le parcours de l’élève et les appréciations. Je ne voudrais pas paraître trop négative, mais on risquerait d’en revenir à la procédure APB.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Je répète ce que j’ai dit dans mon intervention liminaire : « Cela ne signifie pas pour autant que nous souhaitons revenir sur le principe du respect du secret des délibérations des jurys : l’obligation de communication ex ante des modalités de sélection, notamment au moyen de traitements automatisés, n’a pas vocation à figer les délibérations des membres des CEV, qui pourront toujours procéder à des classements des candidatures “à la main”, en se fondant entre autres sur des éléments du dossier non résumables par un indicateur chiffré, comme les lettres de motivation. Ainsi, le dispositif envisagé propose de maintenir la faculté, pour tout candidat, de réclamer la communication des motifs pédagogiques ayant fondé la décision prise sur sa candidature après réception de celle-ci. »

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel AC9 de la rapporteure.

Amendement AC7 de la rapporteure.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Parcoursup est critiqué pour son manque de transparence : si l’algorithme national est public, un régime de publicité dérogatoire prévaut en ce qui concerne les modalités de traitement et d’examen des candidatures au niveau local par les commissions d’examen des vœux. L’amendement vise à préciser que les établissements d’enseignement supérieur publient chaque année, avant l’ouverture de la procédure nationale de pré-inscription, les critères et modalités de sélection qu’ils comptent utiliser pour l’examen des candidatures. Cette information serait destinée non seulement aux candidats, mais aussi aux tiers. Il s’agit de permettre aux futurs candidats de réaliser des choix d’orientation éclairés, notamment en matière de filières et de combinaison d’enseignements.

M. Fabien Di Filippo. Je soutiens Mme la rapporteure à ce sujet. Je le redis, la réforme du lycée pose des problèmes. Auparavant, il existait des filières très lisibles ; chacun savait vers quoi elles menaient et, dès lors, dans quoi il s’engageait. Désormais, la combinaison des options joue un rôle très fort. En outre, notre collègue de la majorité l’a elle-même reconnu, les critères de sélection peuvent changer tous les ans. Or les lycéens construisent souvent leur parcours sur trois ans, à partir de la seconde. Compte tenu de la complexité des algorithmes et des critères de sélection, on risque de les prendre à revers, de les disqualifier, de les détourner de leur vocation initiale. Il faudrait tout de même prêter une attention particulière à cette question, car on déconstruit des parcours en plein milieu de ceux-ci, une fois que les choix ont été faits.

M. Philippe Berta. Les diplômes de l’enseignement supérieur sont évalués tous les cinq ans par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur. Tel a été le cas en 2021 pour le diplôme dont je suis responsable. Au début de chaque période de cinq ans, je dois définir les critères de sélection. Ceux-ci sont adressés aux établissements, qui les mettent à la disposition des élèves. Ils sont valides pour cinq ans, et ne sont donc pas modifiables chaque année.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Je précise que le rapporteur public du Conseil d’État a invité le législateur à se prononcer pour que les critères soient communiqués en amont.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC8 de la rapporteure.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Cet amendement va dans le même sens que l’amendement AC7.

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette l’amendement de précision AC10 de la rapporteure.

Elle rejette ensuite l’article 1er.

Article 2 : Amélioration du processus d’information et d’orientation des candidats à l’enseignement supérieur

Amendement AC11 de la rapporteure.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Par cet amendement, nous souhaitons préciser que l’accompagnement personnalisé de chaque élève se fait en amont des choix qu’il devra opérer lors de la procédure Parcoursup. L’accompagnement à l’orientation doit être mis en place dès la classe de seconde. De ce point de vue, Parcoursup arrive trop tard.

Mme Cécile Rilhac. Il va de soi que l’accompagnement à l’orientation doit se faire dès la classe de seconde, et c’est déjà le cas. Il y a certainement des choses à améliorer au sein de chaque établissement scolaire, en lien avec les régions – compétentes en la matière, Sylvie Charrière l’a rappelé –, mais cela n’a pas trait à la plateforme Parcoursup.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Je l’ai dit, et le problème a été soulevé lors des auditions, Parcoursup arrive trop tard. Si l’on n’indique pas aux lycéens dès la classe de seconde les enseignements de spécialité qu’il est nécessaire de suivre pour intégrer telle ou telle formation supérieure, des portes se ferment à eux. D’où le présent amendement.

Mme Anne Brugnera. La plateforme Parcoursup présente des conseils sur le choix des spécialités et du bac. Elle est accessible en ligne à tout moment à toute personne qui le souhaite. On peut travailler sur Parcoursup dès la seconde, et certains enseignants le font.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Les élèves ont bien sûr accès à cette information, mais elle leur demeure souvent opaque. M. Di Filippo l’a relevé, nombre d’entre eux se disent perdus. Ne soyons pas naïfs : un élève qui ne bénéficie d’aucun accompagnement et n’a pas le soutien d’une personne possédant les codes nécessaires – Elsa Faucillon et moi l’avons dit – se retrouve complètement démuni.

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite l’amendement rédactionnel AC12 de la rapporteure.

Amendement AC13 de la rapporteure.

Mme Karine Lebon, rapporteure. Cet amendement tend à préciser que les attendus exacts de chaque formation, notamment les enseignements de spécialité du baccalauréat conseillés pour y accéder, sont portés à la connaissance des candidats. Cela reviendrait à assouplir le dispositif proposé dans le texte. L’amendement vise en outre à déplacer la disposition au I de l’article L. 612‑3 du code de l’éducation, subdivision relative aux caractéristiques des formations.

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite l’article 2.

 

 

La commission ayant rejeté l’ensemble des articles, la proposition de loi est rejetée.

En conséquence, en application de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique se déroulera sur la base du texte initial de la proposition de loi.

 

 

 


—  1  —

   annexe n° 1 :
Liste des personnes entendues par la rapporteure

(par ordre chronologique)

 

     Table ronde des organisations lycéennes :

  La Voix lycéenne M. Thomas Cesbron, secrétaire général, et M. Colin Champion, président

 Droit des lycéens (*)  Mme Justine Simoes, présidente, et Mme Iliana Mezouar, vice-présidente

     Table ronde des organisations des parents d’élèves :

 Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP) – M. Emmanuel Garot, administrateur

 Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques (FCPE) – M. Moulay Driss El Alaoui, vice-président

 Association des parents d’élèves de l’enseignement libre (APEL nationale) Mme Violaine Bigot, membre du bureau national

     Table ronde réunissant les syndicats d’étudiants :

 Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) (*) – M. Etienne Matignon, vice-président en charge des affaires académiques

 Union nationale des étudiants de France (UNEF) (*)  Mme Mélanie Luce, présidente

 L’Alternative  Union syndicale et associative  M. Naïm Shili, secrétaire national

     Comité éthique et scientifique de Parcoursup – MM. Jean-Richard Cyterman, Max Dauchet et Jean-Marie Filloque

     Ministère de l’éducation nationale – Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO)  M. Edouard Geffray, directeur général, et Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval, cheffe du service de l’instruction publique et de l’action pédagogique

     M. Romain Delès, maître de conférence en sociologie à l’Université de Bordeaux

     Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP)  Mme Anne-Sophie Barthez, directrice générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle, M. Jérôme Teillard, chef du projet « réforme de l’accès à l’enseignement supérieur » et Mme Ellen Thompson, cheffe de mission orientation

     Académie de la Réunion  Mme Chantal Manès-Bonnisseau, rectrice, Mme Sandrine Ingremeau, inspectrice, M. Erwan Polard, secrétaire général adjoint, et M. Michel Muller, conseiller technique, chef du service académique de l’information et de l’orientation

     Audition commune :

 Conférence des grandes écoles (CGE) (*)  M. Romain Soubeyran, président de la commission Amont de la CGE et directeur général de CentraleSupélec, M. Thomas Lagathu, animateur du groupe de travail Parcoursup de la CGE et directeur du concours Sésame et Mme Océane Rousseau, responsable du pôle affaires publiques

 Conférence des directeurs des écoles françaises de management (CDEFM)  M. Jean Charroin, directeur général de l’Ecole supérieure de commerce d’Angers (ESSCA)

     Assemblée des directeurs d’IUT (ADIUT) M. Martial Martin, président

     Eurêka Coaching – Mme Hélène Richir, présidente, et Mme Virginie Le Large-Baude, trésorière

     Table ronde des syndicats d’enseignants du second degré :

– Syndicat des enseignants de l’UNSA (SE-UNSA) M. Mohamed Attia, délégué national

 Syndicat national des lycées, collèges, écoles et du supérieur (SNALC) M. Sébastien Vieille, secrétaire national à la Pédagogie du SNALC

     Audition commune :

 Conférence des présidents d’université (CPU) (*)  MM. Guillaume Gellé, vice-président, et président de l’université de Reims Champagne-Ardenne, et Kévin Neuville, chargé des relations institutionnelles et parlementaires

 Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI) (*)  M. Jacques Fayolle, président

 

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 


—  1  —

   Annexe N° 2:
textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de l’éducation

L. 612‑3

2

Code de l’éducation

L. 313‑1

2

Code de l’éducation

L. 612‑1

2

Code de l’éducation

L. 612‑3

 

 

 

 

 


([1])  « Le financement des universités : évolutions et enjeux », S. Calviac, Revue française d’administration publique, n° 169, 2019, p. 51-68.

([2])  « Admission post-bac et accès à l’enseignement supérieur : un dispositif contesté à réformer », Cour des comptes, Rapport public thématique, 2017.

([3])  CNIL, décision n° 2017-053 du 30 août 2017.

([4])  « Pour ou contre la sélection à l’université », IPSOS, oct. 2017.

([5])  « Dépense par élève ou étudiant, données annuelles de 1980 à 2019 », INSEE, déc. 2020.

([6])  « Résultats du PISA 2018 (volume I) », OCDE, déc. 2019.

([7])  « Les effectifs étudiants dans le supérieur en 2018/2019 en progression constante », Note du SIES, MESRI, janv. 2020.

([8])  « Parcours d’études et insertion des diplômés du supérieur : le rôle des baccalauréats et des formations Bac+2 », P. Lemistre et F. Merlin (dir), CNESCO.

([9])  « Repères et référence statistiques 2019, chiffre pour l’année 2013 », DEPP, p. 255.

([10])  « Accès à l’enseignement supérieur : premier bilan de la loi ORE », Cour des comptes, Communication au CEC, fev. 2020.

([11])  « Rapport d’information sur l’évaluation de l’accès à l’enseignement supérieur », R. Juanico et N. Sarles, CEC, juil. 2020.

([12])  Communication du sénateur J. Grosperrin lors de la réunion de la commission des affaires culturelles du Sénat le 15 juillet 2019.

([13])  https://services.dgesip.fr/T454/S764/algorithme_national_de_parcoursup

([14])  CE, 12 juin 2019, n° 427916 et 427919, Université des Antilles.

([15])  Cons. const., 3 avril 2020, n° 2020-834 QPC.

([16])  Paragraphe 17, décision précitée.

([17])  F. Dieu, conclusions sous les requêtes n° 427916 et 427919.

([18])  Articles D. 612-1-5 et D. 612-1-13 du code de l’éducation.

([19])  « Note de cadrage sur l’examen des vœux formulés par les candidats », Ministère de l’enseignement supérieur, janv. 2020.

([20])  Défenseur des droits, 18 janvier 2019, n° 2019-21, fonctionnement de la plateforme nationale de préinscription en première année de l’enseignement supérieur (Parcoursup).

([21])  Cour des comptes, rapport précité, p. 64.

([22])  Rapport précité, p. 73.

([23])  CEC, rapport précité, p. 33.

([24])  CNESCO, « Comment l’école française aide-t-elle les élèves à construire leur orientation », novembre 2018

([25])  « « Nous fonctionnons de manière dégradée ! » : le cri d’alarme du STAPS de Rennes 2 », F. Boudjelal, VousNousIls, oct. 2021.

([26])  Cour des comptes, rapport précité, p. 99.

([27])  La mesure n° 20 du Plan étudiants prévoyait 500 millions d’euros supplémentaires sur le quinquennat 2017-2022 afin d’améliorer les capacités d’accueil.

([28])  Cour des comptes, rapport précité, p. 98.

([29])  Défini par la circulaire n° 2018-089 du 18 juillet 2018.

([30])  Défini par la circulaire n° 2018-089 du 18 juillet 2018.

([31])  Note d’information du SIES, « Parcours des étudiants suivant un aménagement loi ORE, 16 avril 2021

([32])  La ville de Paris ne compte par exemple qu’un IUT pour un territoire particulièrement densément peuplé.

([33])  Art. 17 de l’arrêté du 6 décembre 2019 portant réforme de la licence professionnelle.

([34])  Circulaire n° 2008-092 du 11 juillet 2008, orientation – parcours de découverte des métiers et des formations.

([35])  Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([36])  « Refonder l’orientation, un enjeu État-régions », MM. Charvet, Lugnier, Lacroix, IGEN-IGAENR, juin 2019.

([37])  CEC, rapport précité, p. 52.

([38])  Décret n° 2017-120 du 1er février 2017 portant dispositions statutaires relatives aux psychologues de l’éducation nationale.

([39])  CEC, rapport précité, p. 49.

([40])  85 % d’entre eux déclarent n’avoir jamais reçu de formation sur l’accompagnement à l’orientation.

([41])  « L’orientation étudiante à l’heure de Parcoursup : des stratégies et des jugements socialement différenciés », Observatoire national de la vie étudiante - OVE info n° 39, sept. 2019.

([42])  « Rapport d’information sur les stéréotypes de genre », G. Le Bohec et K. Lebon, délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, oct. 2021.

([43])  « Enquête auprès des 18-25 ans », CREDOC pour le CNESCO, sept. 2018.

([44])  Rapport d’information n° 2297 sur l’évaluation de l’accès aux services publics dans les territoires ruraux,

MM. JP. Dufrègne et JP. Mattei, oct. 2019

([45])  « Politiques et dispositifs d’orientation, Un bilan international », Y. Dutercq, C. Michaut, V. Troger, CREN, Université de Nantes, CNESCO, p. 25, dec. 2018.

([46])  « Transition du secondaire au supérieur », enquête OVE 2019.

([47])  https://services.dgesip.fr/T454/S764/algorithme_national_de_parcoursup

([48])  Mentionnés au V de l’article L. 612-3 du code de l’éducation.

([49]https://www.conseilconstitutionnel.fr/sites/default/files/as/root/bank_mm/decisions/2020834qpc/2020834qpc_ccc.pdf

([50])  Pour l’année 2019, l’objectif académique au niveau national est de 37 % pour les bacheliers professionnels en BTS et de 26 % pour les bacheliers technologiques en DUT.

([51]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.11552208_619d1118f3d62.commission-des-affaires-culturelles--examen-de-la-proposition-de-loi-visant-a-attenuer-les-inegalit-23-novembre-2021