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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUINZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 novembre 2021
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE,
SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT
APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCEDURE ACCÉLÉRÉE,
relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration
et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale
par Mme Élodie JACQUIER-LAFORGE,
M. Bruno QUESTEL, Mme Maina SAGE
Députés
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AVIS
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
par M. Mickaël NOGAL
Député
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AVIS
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
par M. Didier MARTIN
Député
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AVIS
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
par M. Jean-Claude LECLABART, Mme Laurianne ROSSI
Députés
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TOME III
COMPTES RENDUS
Voir le numéro : 4406
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Pages
travaux de la commission des Lois
Première réunion du lundi 22 novembre à 17 heures
Deuxième réunion du lundi 22 novembre à 21 heures
Première réunion du mardi 23 novembre à 17 heures
Deuxième réunion du mardi 23 novembre à 21 heures 30
Deuxième réunion du mercredi 24 novembre à 14 heures 30
Troisième réunion du mercredi 24 novembre à 21 heures
Travaux de la commission des affaires économiques saisie pour avis
Réunion du mardi 16 novembre à 21 heures
Première réunion du mercredi 17 novembre à 9 heures 30
Seconde réunion du mercredi 17 novembre à 15 heures
Travaux de la commission des affaires sociales saisie pour avis
Réunion du mardi 16 novembre 2021 à 21 heures
Seconde réunion du mercredi 17 novembre 2021 à 15 heures
TRAVAUX DE LA COMMISSION du développement durable et de l’aménagement du terrIToire saisie pour avis
Première réunion du mardi 16 novembre 2021 à 18 heures
Deuxième réunion du mardi 16 novembre 2021 à 21 heures
Réunion du mercredi 17 novembre 2021 à 9 heures 30
travaux de la commission des Lois
Première réunion du lundi 22 novembre à 17 heures
Deuxième réunion du lundi 22 novembre à 21 heures
Première réunion du mardi 23 novembre à 17 heures
Deuxième réunion du mardi 23 novembre à 21 heures 30
Deuxième réunion du mercredi 24 novembre à 14 heures 30
Troisième réunion du mercredi 24 novembre à 21 heures
Travaux de la commission des affaires économiques saisie pour avis
Réunion du mardi 16 novembre à 21 heures
Première réunion du mercredi 17 novembre à 9 heures 30
Seconde réunion du mercredi 17 novembre à 15 heures
Travaux de la commission des affaires sociales saisie pour avis
Réunion du mardi 16 novembre 2021 à 21 heures
Seconde réunion du mercredi 17 novembre 2021 à 15 heures
TRAVAUX DE LA COMMISSION du développement durable et de l’aménagement du terrIToire saisie pour avis
Première réunion du mardi 16 novembre 2021 à 18 heures
Deuxième réunion du mardi 16 novembre 2021 à 21 heures
Réunion du mercredi 17 novembre 2021 à 9 heures 30
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travaux de la commission des Lois
I. Audition de Mme Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et de Mme Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la fonction publiques, et discussion générale
Première réunion du lundi 22 novembre à 17 heures
Lien vidéo : https://assnat.fr/FDnERS
Lors de sa première réunion du lundi 22 novembre 2021, la Commission auditionne Mme Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et Mme Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la fonction publiques, et procède à la discussion générale sur le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (n° 4406) (Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Bruno Questel et Mme Maina Sage, rapporteurs).
Mme la Présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous débutons l’examen du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dit 3DS.
Ce texte, examiné par le Sénat, comprend de très nombreux articles, sur lesquels plus de 1 300 amendements ont été déposés. D’ores et déjà, 178 ont été déclarés irrecevables par la commission des Finances au titre de l’article 40. De mon côté, je n’ai pas encore terminé l’examen de recevabilité au titre de l’article 45. Je vous livrerai le chiffre des irrecevabilités que j’aurai prononcées soit ce soir, soit demain. Cet examen est toujours très difficile, et c’est tout particulièrement le cas s’agissant de ce texte.
Nous procéderons cet après-midi à l’audition de Mme Jacqueline Gourault et de Mme Amélie de Montchalin, qui sera suivie de la discussion générale dans le cadre de laquelle chaque groupe s’exprimera.
Nous avons délégué plusieurs articles aux trois commissions des Affaires économiques, du Développement durable et des Affaires sociales. Notre commission des Lois ne reviendra donc pas dessus, s’en tenant à ceux qu’il lui appartient de traiter.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Le projet de loi « 3DS » vient parachever le travail important que nous avons réalisé ensemble depuis 2017 avec la loi « engagement et proximité », la loi organique sur les expérimentations locales, la loi sur la collectivité européenne d’Alsace, et, plus récemment, avec la réforme de la formation des élus. Nous avons construit ces réformes ensemble et la commission des Lois y a pris toute sa part. Nous les avons conduites au fond en suivant une même boussole : simplifier l’action publique, lever les freins et les blocages, faciliter la vie des maires et des élus. C’est le mouvement que je vous propose de poursuivre à présent avec ce projet de loi « 3DS ».
Ce texte a connu une longue maturation. Voilà deux ans que nous y réfléchissons et que nous l’élaborons avec les élus des territoires, deux ans au cours desquels j’ai fait le tour de France, à la rencontre des maires, des présidents d’intercommunalité, des présidents de département et de région, même si la crise de la covid a ralenti notre démarche. Dans le cadre de nos échanges, nous posions une même question aux élus : qu’est-ce qui, au quotidien, fait concrètement obstacle à l’exercice efficace de votre action ?
Avec les préfets, nous avons recueilli un grand nombre de propositions et les avons étudiées avec les associations d’élus pour identifier tout ce qui relevait de la loi.
Les attentes étaient fortes et concrètes. Non, les élus ne veulent pas d’un big bang ni d’un énième redécoupage des périmètres et des compétences ; ils veulent de la stabilité, des moyens et un cadre sécurisant. C’est cette vision d’une loi concrète, utile et de terrain que je défends.
Le texte repose sur quatre piliers.
Premièrement, la différenciation qui doit permettre à nos élus d’adapter au mieux la règle aux réalités de leur territoire, dans le respect du principe d’égalité inscrit dans notre Constitution. Il en va ainsi, par exemple, des dispositions sur le logement social et de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), qui vise à maintenir une ambition forte en matière de construction, tout en permettant l’adaptation locale aux contraintes des communes.
Deuxièmement, la décentralisation que nous proposons de poursuivre sur le fondement d’une idée simple : la décentralisation de projets. Il revient aux territoires de décider les compétences nouvelles qu’ils souhaitent exercer. C’est dans cet esprit que nous proposons d’engager la décentralisation sur une base volontaire de 10 000 kilomètres de routes nationales aux métropoles, aux départements et, à titre expérimental, aux régions qui le souhaitent.
Nous avons pleinement travaillé avec l’Assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France pour aboutir à un accord afin que la répartition des tronçons entre départements et régions intervienne dans la concertation et dans un souci d’efficience des moyens consacrés aux réseaux routiers. Je vous présenterai deux amendements, conjointement avec le rapporteur.
Troisièmement, la déconcentration, corollaire de la décentralisation, sera renforcée autour de la figure du préfet, par exemple en nommant le préfet de région délégué territorial de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (ADEME), à l’image de ce que nous avons déjà fait pour d’autres agences, comme l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), afin de garantir l’unité de l’action de l’État et de ses opérateurs, ou encore en faisant du Centre d’études et d’expertise sur les risques (CEREMA), qui possède une ingénierie forte, un outil commun de l’État et des collectivités.
Quatrièmement, la simplification, que je promeus avec Amélie de Montchalin, consiste à alléger les normes qui pèsent sur le quotidien de nos concitoyens et de nos élus, à travers des mesures facilitant le partage d’informations entre administrations pour mieux protéger les élus exposés à des situations de conflit d’intérêts, faciliter leur travail en matière d’urbanisme et de revitalisation des centralités.
Telle est l’architecture de ce projet de loi qui s’inscrit pleinement dans la filiation du travail que nous avons réalisé ensemble depuis maintenant plus de quatre ans. Ce projet de loi a été adopté au Sénat en juillet. Le travail avec les sénateurs s’est bien passé. Aucune des mesures phares du texte initial n’a été supprimée.
Il reste, bien sûr, des sujets de désaccord, sur l’intercommunalité, par exemple. Tout au long de ce quinquennat et dans ce texte en particulier, le Gouvernement a fait le choix de ne pas réaliser de nouveaux transferts au profit des intercommunalités. Tel était le souhait de nombreux maires. Non, nous n’avons pas dépossédé les maires de leurs prérogatives depuis 2017, comme on l’entend dire parfois. C’est faux. Bien au contraire, à la faveur de la loi « engagement et proximité », nous avons donné aux maires la souplesse qu’ils réclamaient. C’est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable à certains amendements adoptés par le Sénat qui tendent à revenir en arrière, sur l’eau et l’assainissement, par exemple. Je rappelle qu’au moins un cinquième de l’eau est perdu en raison d’infrastructures vétustes et qu’il s’agit d’un enjeu majeur car, avec le changement climatique, la ressource va se raréfier. Il nous faut préserver la construction intercommunale qui, dans l’immense majorité des cas, se déroule bien, voire très bien.
Un mot sur la métropole Aix-Marseille-Provence, actuellement entravée par un mode de gouvernance très particulier, hérité de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) et de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Nous travaillons avec en tête trois objectifs clairs, que j’ai présentés à l’ensemble des maires du territoire : restituer les compétences de proximité aux communes et conforter la métropole dans ses compétences stratégiques ; simplifier le fonctionnement de la métropole, ce qui passe par la suppression des conseils de territoire et le renforcement de ses services déconcentrés ; créer les conditions d’un rééquilibrage des relations financières entre la métropole et les communes. Nous progressons bien avec l’ensemble des acteurs et serons en mesure de vous présenter des propositions concrètes en séance.
J’ai rencontré bien des élus pour construire cette loi ; vous-mêmes échangez au quotidien avec ceux de vos circonscriptions respectives. Ils nous demandent de les laisser travailler, de leur donner des moyens, de faciliter leur travail et de les accompagner dans leurs projets. C’est en travaillant main dans la main que la confiance se construit. C’est ce que je porte au quotidien, et je suis fière de notre mobilisation depuis 2017 en faveur des collectivités. Je rappelle la stabilité financière, aussi bien de la dotation globale de fonctionnement (DGF), que des dotations d’investissement qui, grâce au plan de relance, sont à un niveau historiquement élevé ; la fin de la lente érosion des services départementaux de l’État ; la mise en place des programmes de l’ANCT, qui viennent en soutien de projets portés par les élus – Action cœur de ville, Petites villes de demain, France services, France très haut débit.
Avec ce projet de loi « 3DS », je vous propose de prolonger cette action concrète, pragmatique et ambitieuse. Nos échanges, j’en suis sûre, seront très riches, à l’image du travail particulièrement constructif que nous avons mené ensemble ces dernières années.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la fonction publiques. Ce projet, dans son ensemble, promeut une vision de simplification et reflète la manière dont nous concevons l’action publique depuis 2017, ainsi que l’a rappelé le Président de la République à la tribune du congrès des maires, la semaine dernière. Nous voulons une action publique à l’écoute de celles et ceux qui utilisent au quotidien des services publics, et une action publique qui permette à ceux qui les organisent de les faire bien fonctionner, aux côtés des collectivités et des élus qui assument des responsabilités de service public.
L’exigence de simplification de l’action publique a été au cœur de très nombreuses réformes législatives depuis 2017, que ce soit la loi pour un État au service d’une société de confiance (ESSOC) instaurant le droit à l’erreur, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), la loi d’accélération et simplification de l’action publique (ASAP) qui a donné lieu à la suppression des commissions administratives et la déconcentration des décisions individuelles, ou encore tout ce qui a favorisé une action publique menée au bon niveau, plus simple et plus efficace.
Dès ma prise de fonction, j’ai placé la simplification au cœur de la transformation de l’action publique, guidée par deux boussoles. La première est l’impératif de transparence de l’action publique. Grâce au baromètre des résultats de l’action publique, lancé en janvier dernier, chaque Français peut savoir, en visitant le site du Gouvernement, comment se déploient, dans son département, les quarante-trois réformes prioritaires. L’immense majorité d’entre elles n’est d’ailleurs pas le seul fait du Gouvernement mais bien le fruit d’un travail partagé entre collectivités et État ou entre collectivités, impliquant d’ailleurs parfois l’action des citoyens ou des entreprises.
Seconde boussole, un pilotage de l’action publique cohérent avec une vision territorialisée, un pilotage « jusqu’au dernier kilomètre », par le renforcement de l’État territorial départemental. Le préfet du département, notamment, a gagné des marges de manœuvre budgétaires et en ressources humaines, les effectifs étant redéployés partout dans le territoire, l’action publique dans son ensemble étant pilotée par une feuille de route interministérielle adaptée – la feuille de route de la Seine-Maritime n’a rien à voir avec celle de la Charente-Maritime ou celle d’un département plus rural ou plus urbain.
Je commencerai par détailler des mesures très emblématiques qui figurent dans ce titre consacré à la simplification, particulièrement liées à l’utilisation numérique.
L’innovation numérique doit, en effet, être mobilisée pour améliorer la qualité des services publics et, partant, la relation entre l’administration et les Français. L’article 50 du projet de loi instaure ainsi, en quelques mots, un réel changement de paradigme en accélérant le partage de données entre administrations. L’une des complexités principales rencontrées par les usagers dans leurs démarches tient à l’obligation de fournir encore et encore les mêmes informations que celles dont les administrations disposent déjà. Cette disposition concrétise une simplification profonde qui doit aboutir à une action publique unifiée pour les usagers, que celle-ci soit conduite par l’État, par une collectivité ou par un opérateur social.
Ce matin même, avec Jacqueline Gourault, nous rencontrions les associations d’élus pour suivre le déploiement des 88 millions d’euros de France relance consacrés à la mise à niveau numérique des collectivités. Nous avons notamment rappelé l’ambition partagée, très forte, de déployer France Connect dans l’ensemble des collectivités – régions, départements, intercommunalités, communes.
La règle, aujourd’hui, est l’interdiction du partage de données entre administrations, sauf dérogation expressément autorisée par voie réglementaire, après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). J’ai souhaité que la logique soit inversée et que le partage devienne la règle par défaut. Ce sera le cas avec l’article 50, pourvu que le partage de données bénéficie à l’usager. Cet article a, bien évidemment, fait l’objet d’un travail précis et approfondi avec la CNIL, afin de maintenir un cadre respectueux de la protection des données à caractère personnel de nos concitoyens.
Le but est aussi d’accompagner les Français dans leurs démarches. Dans de nombreuses communes, par exemple, les démarches sont souvent très lourdes pour inscrire un enfant à la crèche, pour calculer un tarif de cantine scolaire. Les familles doivent fournir de nombreux justificatifs de quotient familial ou de revenus. Pourquoi devoir encore fournir notre date de naissance, celle de nos enfants, nos adresses, des informations que la ville, la direction des finances publiques ou les allocations familiales connaissent déjà ?
Ce partage de données représente avant tout, pour moi, un outil destiné à lutter contre le non-recours – une priorité pour de très nombreux parlementaires depuis des années. Un meilleur partage des données, c’est l’octroi automatique de droits ouverts par les parlementaires. Le chèque énergie a été déployé de cette manière, et l’inscription automatique à la complémentaire santé solidaire, votée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, rendra les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ou du minimum vieillesse directement éligibles, grâce au partage de données.
Tout cela pousse à décloisonner l’action publique, à inciter les administrations d’État et les administrations des collectivités territoriales à travailler main dans la main. Nombre des démarches qu’il nous appartient de simplifier sont réalisées à l’échelon des collectivités, quelle que soit leur taille. C’est la raison pour laquelle madame la rapporteure Jacquier-Laforge, que je tiens sincèrement à remercier, propose un amendement de rétablissement de l’article initial du projet de loi. Le seuil de 10 000 habitants introduit par le Sénat est inutile, car le texte prévoit déjà que les administrations techniquement dans l’incapacité de partager leurs données, notamment les plus petites, n’auront pas l’obligation de le faire. L’article ouvre des possibilités sans contraindre.
Pour aller plus loin, je vous proposerai un amendement pour faire en sorte que le partage de données entre administrations permette d’attribuer de façon proactive aux usagers le bénéfice des aides auxquelles ils ont droit, sans qu’ils aient eux-mêmes à en faire la démarche. Il s’agit d’ailleurs d’une pratique qui s’est développée pendant la crise sanitaire. Pour certaines aides aux entreprises, les administrations sont allées au-devant des besoins pour en assurer la pleine efficacité.
Plus largement, cette vision du numérique s’inscrit dans notre plan de numérisation des 250 démarches les plus usuelles du quotidien des Français, entreprises comme particuliers. Nous avons atteint 86 % de l’objectif et nous nous engageons à le remplir à 100 % au cours de l’année 2022.
Parce que le numérique ne remplace évidemment pas la proximité, et parce qu’il n’est pas utile ni réaliste d’opposer développement d’un numérique de qualité et développement d’un très bon réseau de proximité, fondé sur un accompagnement humain et personnalisé, Jacqueline Gourault a usé d’un volontarisme soutenu pour déployer, avec les élus locaux, le réseau France services. D’ici à la fin de l’année, ce réseau disposera de 2 000 lieux d’accueil de proximité de service public sur le territoire, puis 2 500 d’ici à la fin 2022. Ce n’est en rien un gadget. Les élus qui s’engagent dans cette dynamique disent déjà combien, après six ou neuf mois d’ouverture, l’accès aux droits des personnes en difficulté s’en trouve changé.
Une autre avancée majeure de ce texte est la part donnée à l’expérimentation au service de l’innovation de l’action publique. En matière d’expérimentation et de dérogation, on doit déjà à Jacqueline Gourault le texte majeur qu’est la loi organique sur l’expérimentation, qui a permis d’ouvrir le droit de dérogation des préfets. Mais il importe de donner aux acteurs publics comme aux entreprises davantage de marges de manœuvre en termes d’innovation.
Depuis 2016, la démarche France expérimentation a accompagné 350 projets proposés, pour un quart d’entre eux, par des start-up, mais également par des groupements d’intérêt public et des associations. Entre avril et juin, cette année, j’ai lancé un nouvel appel à projets pour que les acteurs économiques de tous nos territoires puissent solliciter des dérogations législatives expérimentales et temporaires. Le texte prolonge donc l’appel à projets France expérimentation dans le contexte de la relance. Une centaine de dossiers a été déposée. La majorité d’entre eux trouvera un accompagnement, une expérimentation de niveau réglementaire ou une clarification de leur cadre juridique d’action. Le but est de s’assurer que les lois d’hier n’empêchent pas l’innovation de demain et que tous nos territoires bénéficient de projets qui facilitent leur organisation. Par exemple, comment permettre la réutilisation des eaux usées traitées pour irriguer ? Comment entretenir des logements vacants pour donner plus de perspectives d’installation à des entreprises ou à des citoyens ? Nous présenterons probablement une disposition intéressante pour faciliter la colocation de personnes âgées dans des lieux de vie sociaux qui, aujourd’hui, ne sont pas ouverts à de telles expérimentations.
Bref, ce projet de loi « 3DS » vient ici renforcer un dispositif catalyseur d’innovation dans les territoires, tout en permettant aux agents de s’impliquer et de se former sur le terrain. Nous travaillons à de nouvelles propositions qui arriveront dans les jours qui viennent.
Le Président de la République avait pris l’engagement fort de bâtir une action publique plus proche et plus efficace. Le Gouvernement s’emploie à le tenir depuis quatre ans, et ce texte y participe réellement. À l’issue de cette période, 72 % de nos concitoyens disent faire confiance à l’administration, soit une progression de trois points depuis 2016. Du côté des entreprises, le taux de confiance dans l’administration est à ce jour de 76 %, contre 66 % en 2019. En un an, nous avons gagné dix points de confiance, ce qui montre que la manière de faire change radicalement la perception des usagers des services publics.
Parce que ces résultats nous commandent de continuer à agir, l’objet de ce projet de loi et l’action du Gouvernement s’inscrivent pleinement dans cette exigence d’une relation de confiance avec nos concitoyens.
M. Bruno Questel, rapporteur pour les titres Ier à V. Ce projet de loi est attendu et marquera, c’est certain, l’histoire des collectivités locales.
Le 15 janvier 2019, le Président de la République lançait le grand débat. En sont ressorties des attentes fortes qui se sont imposées à nous : renforcement de l’action publique de proximité ; meilleure prise en compte des particularités locales ; assouplissement de l’organisation territoriale des politiques publiques. Les acteurs locaux aspiraient à être mieux compris et soutenus dans l’exercice de leur mission. Ils exprimaient une fatigue résultant des réformes institutionnelles incessantes, les traumatismes engendrés par les lois NOTRe et MAPTAM n’étant toujours pas résorbés pour certains d’entre eux. Avec la loi « engagement et proximité », nous avons redonné aux élus, en particulier aux premiers d’entre eux, les maires, la possibilité d’agir sur le quotidien des citoyens et de mettre en œuvre leurs engagements.
La revalorisation de l’action des élus ainsi actée, le Gouvernement a repris l’ouvrage pour nous proposer un texte utile et pragmatique. Celui-ci ne peut être appréhendé avec des œillères occultant tout ce qui a été fait sous cette législature pour conforter l’action des collectivités territoriales. En matière financière, je pense à la sanctuarisation de la DGF et aux efforts importants en faveur de l’investissement, avec la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), en période ordinaire, et la dotation de soutien à l’investissement (DSIL), en période extraordinaire, avec principalement le plan de relance.
S’agissant du principe de différenciation, nous avons commencé à lui donner une concrétisation en adoptant la réforme des procédures d’expérimentation, qui a constitué la première pierre de l’édifice. Sans entrer dans le détail des dispositions des articles 1er à 5 du présent projet de loi, je relèverai néanmoins l’affirmation du principe de différenciation, indispensable à la mise en œuvre d’une approche plus fine et plus intelligente des politiques publiques, pour répondre aux problématiques spécifiques des différents territoires. Qu’il s’agisse des mesures adaptées aux enjeux transfrontaliers, de l’expérimentation tant attendue d’un financement différencié du RSA en métropole ou du développement du pouvoir réglementaire des collectivités locales, nous jetons les bases d’une pratique qui devra inéluctablement être prolongée à l’avenir.
Je relève également un nouvel acte de décentralisation routière, avec les articles 6, 7 et 8 qui permettront notamment et principalement de transférer des routes du réseau national pour les confier à titre expérimental aux régions.
Concernant les gestionnaires de collèges et lycées, le Gouvernement a proposé un début de réponse aux difficultés constatées sur le terrain depuis des décennies, avec l’article 41 – malheureusement supprimé par le Sénat. Je serai donc favorable à son rétablissement sous la forme aménagée proposée par le Gouvernement.
Initialement composé de 84 articles, ce texte a quasiment triplé de volume à l’issue de son examen par le Sénat. Il en compte désormais 217. Nombre de ces ajouts s’avèrent pertinents et ont vocation à jeter les bases d’un travail conjoint entre nos deux chambres. Certains articles devront néanmoins être supprimés, mais je souhaite ici saluer les deux rapporteurs du Sénat, Françoise Gatel et Mathieu Darnaud qui, comme à leur habitude, ont œuvré pour les collectivités locales, avec la force de persuasion qui les caractérise. Nous les retrouverons, avec mes collègues Maina Sage et Élodie Jacquier-Laforge, en commission mixte paritaire pour, j’en suis persuadé, travailler conjointement, dans le respect de nos deux assemblées, au renforcement des collectivités dans le cadre novateur que nous souhaitons tous.
Avec mes deux collègues rapporteures de la commission des lois, mais aussi avec les rapporteurs des trois autres commissions saisies du texte, nous avons mené un travail approfondi et fructueux, fondé sur l’écoute et le pragmatisme. Je salue également la contribution de la délégation aux collectivités territoriales et de son président, Jean-René Cazeneuve. Je souhaite adresser mes remerciements à notre ministre des relations avec les collectivités locales, Jacqueline Gourault, à son cabinet, ainsi qu’à la direction générale des collectivités locales (DGCL) et à son directeur.
Madame la ministre, vous avez engagé le travail de concertation sur ce texte il y a maintenant près de deux ans. Depuis, vous n’avez pas dévié de votre cap, faisant preuve d’une constance et d’une détermination sans faille. Je sais que le souci d’écoute et de concertation a été permanent, jusqu’à la dernière minute sur certains sujets, notamment aux articles 6 et 7, et qu’il se poursuit encore sur d’autres – je pense à la métropole Aix-Marseille-Provence.
Je nous souhaite des débats de fond constructifs et sereins, qui aboutiront, j’en suis certain, à une loi équilibrée et juste, dans l’intérêt de toutes les collectivités territoriales de métropole, de Corse et d’outre-mer.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure pour les titres VI et VII. Les titres VI et VII portent sur les mesures relatives à la déconcentration et la simplification. Il me sera impossible de toutes les présenter dans mon propos liminaire, aussi insisterai-je sur quelques points.
Dans le titre VI, consacré aux mesures de déconcentration, plusieurs dispositions renforcent le rôle des préfets. Notamment, le préfet de région devient délégué territorial de l’ADEME, et le préfet coordonnateur de bassin assurera désormais systématiquement la présidence du conseil d’administration des agences de l’eau.
L’expertise du CEREMA sera mise à la disposition des collectivités territoriales qui le souhaitent.
Les maisons France services seront enfin inscrites dans la loi, la labellisation France services garantissant à tous les usagers un accès aux services publics du quotidien à moins de trente minutes de leur domicile.
S’agissant du titre VII et des mesures de simplification, je tiens à saluer le dispositif d’échange d’informations entre administrations, prévu à l’article 50. Il améliorera le principe du « Dites-le nous une fois ». Je vous proposerai de revenir sur certaines modifications du Sénat, qui fragilisent le mécanisme, mais aussi d’étendre ce dernier au domaine de l’insertion professionnelle, avec ma collègue iséroise, Monique Limon.
Autre mesure saluée, la consécration du recours à la visioconférence pour les assemblées délibérantes locales, prévue à l’article 52 bis, complète utilement le dispositif introduit pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dans la loi « engagement et proximité ». Je vous proposerai d’étendre cette possibilité à certaines collectivités omises par le Sénat – la Corse, la Guyane et la Martinique –, ainsi qu’aux commissions permanentes, ce qui devrait répondre aux attentes de nombreux collègues.
L’article 56 concerne la réforme touchant la métropole Aix-Marseille-Provence. Il s’agit pour le Gouvernement d’en inscrire le principe dans le texte, en cohérence avec l’engagement sans précédent du chef de l’État et du Gouvernement pour ce territoire. Le Sénat a proposé des aménagements, et le travail se poursuit, à l’heure où je vous parle, entre tous les acteurs concernés pour aboutir – enfin ! – à une organisation et à des modalités d’exercice des compétences pleinement dignes de l’ambition de la deuxième métropole de notre pays. Comme mes collègues rapporteurs et moi-même l’avons souvent indiqué lors des auditions, nous ne pouvons pas nous permettre d’échouer sur ce sujet.
L’article 59 permettra d’approfondir la coopération entre les collectivités transfrontalières, en ouvrant la possibilité aux collectivités étrangères d’investir dans des sociétés publiques locales (SPL). Le besoin est réel : ces structures permettront de favoriser les projets communs, par exemple la réalisation de services de transports ou de réseaux transfrontaliers, en mutualisant les coûts. Il nous faudra veiller à préserver le contrôle des collectivités françaises dans ces entreprises, et ainsi revenir sur certaines des modifications apportées par le Sénat.
Je salue également le dispositif aménageant la responsabilité civile des gardiens d’espaces naturels s’agissant de certains sports, comme l’escalade, dispositif au sujet duquel Xavier Roseren et moi-même vous proposerons une précision utile.
Une série d’articles traitent des entreprises publiques locales (EPL). De récents rapports d’évaluation ont révélé le réel engouement suscité par le recours aux procédés de prise de participation et de filialisation par les entreprises publiques locales. Ces techniques permettent la diversification de leur activité, mais ne sont pas sans risque pour les collectivités : risque de dilution de leur pouvoir de contrôle, mais également risques financiers. Les articles 70 et 71 apportent des solutions, en renforçant le contrôle des assemblées délibérantes des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires sur les EPL, et en élargissant les cas et les modalités d’intervention des commissaires aux comptes dans ces entreprises.
Un autre volet concernant les EPL est celui, capital, de la prévention des conflits d’intérêts. Un cadre juridique sécurisé est prévu, notamment à l’article 73 ter ; je vous proposerai de le préciser. Nous pouvons nous réjouir de l’évolution proposée conjointement par le Gouvernement et le Sénat. Je vous proposerai également d’étendre à toutes les EPL et à leurs filiales l’encadrement des rémunérations des élus locaux, dont l’écrêtement suggéré par la Cour des comptes.
Des simplifications déclaratives auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ont également été introduites au Sénat. Elles vont dans le bon sens. Je vous proposerai de les préciser et de les compléter pour mettre en œuvre plusieurs recommandations de la HATVP.
Le texte comporte également d’intéressantes évolutions en matière d’évaluation des politiques publiques. En particulier, l’article 74 autorisera les collectivités territoriales à saisir la cour régionale des comptes compétente sur une thématique d’évaluation. Je vous proposerai d’aller plus loin, en permettant à ces collectivités de solliciter l’expertise des juridictions financières sur les grands projets d’investissement.
Enfin, le Sénat a enrichi le texte d’évolutions intéressantes en matière de droit funéraire, que je vous proposerai de compléter.
Pour conclure, je m’associe à mon corapporteur pour remercier mesdames les ministres et leurs cabinets du travail accompli. Je suis sûre que nous trouverons sur tous les sujets des solutions pratiques pour les élus dans le but final de répondre aux besoins de nos concitoyens.
Mme Maina Sage, rapporteure pour le titre VIII. Le texte relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et la simplification intéresse les collectivités d’outre-mer, car celles-ci présentent des spécificités géographiques, juridiques et culturelles. Pour rappel, les outre-mer représentent onze territoires, cinq départements, six collectivités, répartis dans trois océans différents, situés entre 8 000 et 22 000 kilomètres de la métropole, et près de 3 millions de nos concitoyens. Le titre VIII est certes consacré à des sujets propres aux outre-mer, mais ces territoires sont également concernés par l’ensemble du texte, en vérité. C’est pourquoi j’ai tenu à les entendre sur tous les titres.
Nous avons fortement ressenti le besoin des territoires d’outre-mer d’être mieux écoutés et pris en considération. Aussi ai-je cosigné avec mes collègues rapporteurs un amendement à l’article 1er bis, qui réclame au minimum un accusé de réception pour les demandes transmises au Premier ministre ainsi que leur recensement dans un rapport annuel rendu public. Je salue l’attention portée à ce que ces demandes soient transmises au Parlement, tout en souhaitant que les délégations aux collectivités territoriales et aux outre-mer puissent en être destinataires.
La première grande mesure du titre VIII découle des travaux menés par nos deux chambres à la suite de l’ouragan Irma qui a frappé les Antilles en 2017. L’article 75 du projet de loi permet d’instaurer par décret dans une collectivité d’outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie l’état de calamité naturelle exceptionnelle, sous certaines conditions. Cela permettra de faciliter et d’accélérer les procédures menées par l’État en réponse à la crise.
Les missions spécifiques que nos deux chambres avaient conduites sur la gestion des risques naturels majeurs avaient donné lieu à la création d’une délégation interministérielle aux risques majeurs. Pendant deux ans, l’ensemble des territoires s’y sont réunis pour formuler des propositions à la fois sur le volet préventif, sur la gestion de la crise et sur la reconstruction. Je salue, à cet égard, les travaux de notre collègue Fabien Matras. Pour ma part, je soutiendrai des amendements pour renforcer les actions de développement de la culture du risque, notamment dans le milieu scolaire.
Enfin, il me semble utile de clarifier le déclenchement de ce mécanisme dans les collectivités relevant de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie ainsi que de travailler à des outils de transparence et d’évaluation de ce dispositif.
L’article 76 prévoit et organise le transfert des zones des agences des cinquante pas géométriques vers les collectivités de Guadeloupe et de Martinique. Le Sénat a procédé à cet apport très utile, repris dans la loi « climat et résilience ». C’est la raison pour laquelle il a vocation à être supprimé. Il conviendra néanmoins de préparer les collectivités pour assurer la qualité de ce transfert et les accompagner, étape par étape. Nous proposons également que les agences puissent être présidées par des représentants de ces collectivités.
Cet article facilite aussi la régularisation foncière, problème récurrent dans tous les territoires d’outre-mer. L’article 77, ajouté par le Sénat, promeut la prescription acquisitive pour accélérer la régularisation des problématiques foncières à Mayotte.
L’organisation de la santé est particulièrement sensible en outre-mer. L’article 81 bis prévoit un rapport sur l’organisation du système de santé à Saint-Barthélemy pour poser les contours de la création d’une caisse autonome. J’ai souhaité soutenir la demande de notre collègue Olivier Serva d’un rapport spécifique à la Guadeloupe. Dans les circonstances actuelles, je tiens à apporter tout notre soutien à nos collègues élus de Guadeloupe et aux autorités locales. La crise sanitaire révèle des retards structurels et la situation mérite toute notre attention et notre vigilance. Puissions-nous, en votant ce texte, être utiles et aider à rétablir le dialogue le plus rapidement possible.
Plus rapidement, d’autres dispositions du titre VIII traitent de sujets liés aux terres australes, tels les prêts participatifs que nous étendrons aux conventions de mandat ou encore l’organisation des conseils économiques sociaux de ces territoires.
Un amendement tendra à ajouter un article facilitant la cohérence de l’application de la loi « littoral » en Guyane et à Mayotte pour tenir compte des spécificités de ces territoires
Pour terminer, j’appelle l’attention sur une difficulté récurrente dans l’ensemble du texte. Le fait que certains territoires soient cités et pas d’autres nuit à la lisibilité du droit applicable en outre-mer. Il serait utile que nous soutenions ensemble la création d’un véritable code des outre-mer.
Je tiens à remercier l’ensemble des personnes auditionnées, les administrateurs de la commission et toutes les équipes ministérielles avec lesquelles nous avons travaillé sur ces différents articles. Un dernier mot à l’adresse à mes collègues Bruno Questel et Élodie Jacquier-Laforge pour évoquer l’excellente coopération qui a présidé à la préparation de ce texte.
M. Rémy Rebeyrotte. On continue d’entendre ici ou là des discours infondés.
D’abord, l’intercommunalité n’est pas l’ennemi des communes, bien au contraire, et le sera de moins en moins avec ce texte qui va rétablir l’équilibre entre communes et intercommunalités.
En 1992, les communes ont vu augmenter leurs compétences, parmi lesquelles certaines qu’elles ne pouvaient plus gérer seules et dont la gestion avait besoin de stabilité –développement économique, collecte et traitement des déchets, en particulier. Le choix a été fait du maintien de la proximité communale parallèlement à la construction d’outils de gestion stables au travers des intercommunalités. Nous avons ainsi, heureusement, échappé à des fusions autoritaires de communes qu’on a pu voir dans d’autres pays.
L’intercommunalité se révèle encore plus pertinente aujourd’hui au regard des enjeux de la transition écologique et de la résilience climatique : gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI), eau potable et assainissement, mobilité, organisation du territoire, préservation des espaces naturels, etc.
Dans le même ordre d’idée, la loi SRU, dont il s’agit ici de réaffirmer la nécessité et de prolonger les effets, a été faite, non pas pour ennuyer les communes, mais pour lutter contre la ghettoïsation, le cloisonnement urbain des populations, et pour maintenir, sans doute insuffisamment, une mixité des publics et des parcours dans l’habitat – d’où les mesures tendant à renforcer la mixité et la diversité dans le texte.
Faut-il également rappeler ici la nécessaire unicité de l’État sur le plan national mais aussi et surtout dans les territoires ? Plus que jamais, les élus et les acteurs locaux en ont besoin. Rien n’est plus déstabilisant que d’avoir, sur un dossier, des avis divergents, exprimés par des directions appartenant toutes à l’État, parfois devant le préfet lui-même, un peu comme si, parallèlement aux préfets de département ou de région, il y avait un préfet de l’environnement ou un préfet de la santé, pour ne prendre que deux exemples de grands secteurs de compétence de l’État.
Non, les agences et les services extérieurs ne sont pas autonomes ou autarciques ; ils doivent travailler très étroitement avec les préfets, sous leur autorité – qui est celle du Gouvernement – et dans un rapport de confiance indispensable. Dire cela n’est pas remettre en cause l’existence des agences ou des services extérieurs, c’est réaffirmer l’unicité de l’État, toujours nécessaire et encore plus impérieuse dans une période de crise majeure. L’État débat en interne, comme toute institution mais, vis-à-vis de ses partenaires, l’information et la décision doivent être fluides, claires, uniques et incarnées. Dans ce texte, nous faisons des pas en ce sens.
On nous reprochera sans doute de faire la part belle aux départements, un peu aux métropoles aussi, dans de nouveaux enjeux de décentralisation – sans revenir, heureusement, à la clause de compétence générale. Or, depuis la loi de 2016, la taille de certaines régions a renforcé la place du département, l’intérêt de sa dimension et de sa proximité. De plus, depuis l’origine, le département est une institution de gestion dotée de services et de personnels, ce qui en fait une institution stable et apte à accueillir de nouvelles compétences, si elle le souhaite, ou à conforter les compétences existantes. Le texte tient compte de ces réalités.
S’agissant de la différenciation, le choix a été fait d’étendre le pouvoir réglementaire local ainsi que la possibilité des expérimentations, c’est-à-dire d’aller au maximum de ce qu’il est possible de faire sans changement constitutionnel. C’est là un débat qui dépasse nos préoccupations de ce jour.
Tels sont les quelques éléments que je souhaitais rappeler au moment où nous abordons ce dernier texte du mandat, qui facilitera la vie des élus et des acteurs locaux de nos territoires – c’est bien ce qui caractérise les différents textes dont nous avons eu à débattre au cours de cette législature. Ainsi nos collègues élus et les acteurs locaux pourront-ils prendre plus facilement l’initiative, à un moment où leur engagement pour la relance du pays est un enjeu majeur dans l’ensemble de nos territoires.
M. Sébastien Jumel. Ce sont juste deux questions qui ne sont pas abordées dans la loi !
M. Vincent Bru. Ce projet de loi était très attendu, comme en témoigne l’ample travail accompli par nos ministres depuis deux ans, en lien avec les différents acteurs locaux, tous désireux de faire de ce texte un véritable atout pour la vitalité et le développement harmonieux de nos territoires.
S’il ne bouleverse pas fondamentalement le cadre de la décentralisation, ce texte a vocation à rendre plus fluide et plus efficace l’action publique dans les territoires, à faciliter le quotidien des élus au sein de nos collectivités. La crise sanitaire nous a en effet montré l’importance qu’il y a à introduire plus de souplesse, plus de simplification, plus de pragmatisme dans l’action publique.
Depuis 2010, les réformes à répétition n’ont pas toujours été à la hauteur des enjeux, il faut bien le reconnaître. C’est pourquoi ce projet de loi doit véritablement traduire l’ambition nouvelle du Président de la République et de notre majorité pour nos territoires : celle de la confiance dans nos élus locaux, dans les territoires et dans la valorisation de la proximité.
Le Sénat nous a transmis un texte qui a fortement évolué. Notre groupe a choisi de ne pas partir dans tous les sens et de se concentrer sur quatre axes prioritaires. Premièrement, la gouvernance des agences publiques doit être plus efficace et plus lisible pour une meilleure action au service du territoire. Nous soutiendrons des amendements en ce sens. Deuxièmement, les compétences des collectivités en matière de transition écologique et de mobilité doivent être renforcées, car elles ont un rôle à jouer dans ce domaine. Troisièmement, s’agissant de l’urbanisme, et notamment du logement, nous mettons un point d’honneur à ce que soit renforcée la mixité sociale. Quatrièmement, en matière de coopération transfrontalière, nous nous préoccupons de la répartition des compétences de police administrative ou de santé.
Notre groupe pense qu’il ne faut pas présenter des amendements trop nombreux, et nous sommes tous d’accord pour rétablir en grande partie les articles modifiés par le Sénat. C’est la raison pour laquelle nous soutiendrons les amendements qui seront présentés par les rapporteurs.
Nous avons également essayé d’apporter des éléments nouveaux. Je défendrai, en particulier, un amendement portant sur les biens sans maître – essentiellement des terrains –, afin de faciliter leur appropriation par les communes.
À l’initiative de Sylvain Waserman, nous proposerons des amendements relatifs à la coopération transfrontalière. Ils visent à développer l’apprentissage transfrontalier, à faciliter les manifestations sportives transfrontalières et à protéger les sociétés publiques locales dans lesquelles des collectivités étrangères détiennent des capitaux.
Notre collègue Christophe Blanchet est également à l’origine d’amendements, dont l’un concerne l’élargissement au département de l’utilisation de mécanismes de mise en réserve, déjà pratiquée au niveau interdépartemental, pour gérer la répartition du fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux.
Un de nos amendements tendait à donner, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, aux départements et régions la possibilité de déléguer les compétences concernant les infirmières, les gestionnaires et intendants de collèges et de lycées. Je viens d’apprendre que cet amendement a été déclaré irrecevable, mais je pense que le sujet nécessite néanmoins d’être traité. J’aimerais d’ailleurs avoir l’avis de madame la ministre sur ce sujet.
La discussion qui s’ouvre aujourd’hui doit nous permettre d’avancer ensemble vers un renforcement de la cohésion de notre territoire et de l’efficacité de l’action publique en son sein. C’est la raison pour laquelle notre groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés soutient très largement ce projet de loi.
M. Hervé Saulignac. Nous voilà donc devant un texte très attendu, sans doute parce que très annoncé à la suite du grand débat national. Celui-ci a été l’occasion pour le Président de la République de se confronter au mal-être des élus locaux, en manque de considération, de moyens ou de latitude pour agir – ils ont pourtant été déterminants dans la lutte contre la covid-19, par leurs initiatives, leur audace, leur réactivité et leur capacité à se mobiliser. J’avais donc cru comprendre que ce texte devait être la traduction des engagements du chef de l’État, constituer une réponse, même partielle, à la crise des Gilets jaunes, et un nouvel élan donné à la république territoriale.
Chacun constatera que rien de ce qui a été promis par le Président de la République n’y figure. Cela ne signifie pas pour autant que rien n’est intéressant, mais on ne trouve pas de trace des débats sur les échelons administratifs trop nombreux, les niveaux de collectivités qui s’empilent, l’ambition de changer le mode d’organisation de notre République, la nécessité d’une plus grande proximité, d’une plus grande clarté dans l’action publique, etc. Nulle part ne figurent des réponses à ces questions, dont pourtant chacun partage le bien-fondé. À aucun moment, le texte ne semble vouloir se connecter un tant soit peu avec l’esprit des pères fondateurs de la décentralisation, malgré ce que son titre laisse accroire.
Alors même que ces fameux 3D devraient contribuer à revigorer la démocratie, on peine à croire que plus de 200 articles, souvent sans grande cohérence, n’atteignent pas leur objectif. Ce texte a d’ailleurs recueilli les avis défavorables du Conseil national d’évaluation des normes, ainsi que du Conseil d’État qui, lui-même, déplore les absences de ce texte.
Loin d’engager une grande réforme, ce texte paraît boucher des trous tous azimuts. Boucher des trous, pourquoi pas, mais bouchons-les ensemble et essayons au moins de le faire en cohérence avec l’objectif de simplification affiché. Force est de constater que certains articles alourdissent plus qu’ils n’allègent, que d’autres ont un caractère particulièrement limité, si limité que l’on pourrait peut-être admettre que leur vertu simplificatrice est à peu près nulle.
Il faudrait être malhonnête pour ne pas voir, dans ce grand catalogue, des avancées sur les agences publiques d’État, sur l’aide à l’installation des professions de santé, et sur un certain nombre de procédures de délégations de compétences entre l’État et les collectivités. Mais ce texte répondra-t-il aux attentes de nos concitoyens, dont chacun sait qu’ils nourrissent de la défiance à l’égard de leurs élus et des institutions ? Si la confiance vis-à-vis de l’administration s’améliore, et c’est tant mieux, la défiance envers les élus, elle, ne s’améliore pas. Ce texte aurait pu être l’occasion d’y remédier.
Apporte-t-il des réponses solides aux élus qui, pour les plus anciens, ont bien vu que notre modèle prétendument décentralisé est en réalité très dépendant d’un État qui lentement reprend la main ces dernières années ? Nous aurions aimé parler levier fiscal, relations financières avec l’État, coordination de l’action publique, tous sujets qui intéressent vraiment les élus locaux et dont ils parlent entre eux. Nous aurions aussi aimé débattre de démocratie locale, à l’heure où l’abstention règne en maître, de participation citoyenne, de processus électoraux, quand on ne sait plus vraiment distribuer une profession de foi ou dématérialiser une procuration. Malheureusement, nous allons légiférer sur l’alignement des arbres, sur la mise en place de radars automatiques par les collectivités, sur la visioconférence pour les commissions permanentes ou bien encore, pour celui qui dispose de trois francs six sous, sur la façon de récupérer le RSA sur un livret épargne. J’ose espérer que l’on corrigera cela !
On attendra donc encore un peu pour connaître une nouvelle ère de la décentralisation. Nous défendrons, quand les articles nous le permettront, une république des territoires qui a besoin de retrouver du souffle, du sens et de l’efficience, car il y va de l’avenir de notre démocratie.
M. Christophe Euzet. En 2017, le Président de la République Emmanuel Macron appelait déjà de ses vœux une nouvelle donne territoriale, un État partenaire appelé à se substituer à l’État censeur, trop souvent décrié. Depuis, des événements majeurs sont venus bouleverser notre pays ; le mouvement des Gilets jaunes et la covid-19 ont révélé une demande et un besoin criants de collectivités territoriales.
Mesdames les ministres, vous nous présentez ce projet de loi au terme de trois ans de travail. Il arrive considérablement enrichi, parfois même alourdi, par le Sénat, ce qui incite le groupe Agir ensemble à rechercher une position d’équilibre entre la version initiale et celle portée à notre connaissance aujourd’hui.
Ce texte repose sur un certain nombre de piliers que les précédents orateurs ont déjà évoqués. Le renforcement de la différenciation territoriale et de l’expérimentation devrait être largement abordé dans la suite des débats. Sur les nouvelles étapes de la décentralisation, les paroles sont tenues, notamment en matière de logement, de transport, de transition écologique. Sur la question de la déconcentration, le renforcement des pouvoirs du préfet nous paraît une bonne chose. En dépit de ce qu’on peut en dire par ailleurs, ce projet de loi est un nouvel acte de décentralisation, adapté et fortement orienté, qui reprend résolument les annonces du Président de la République à l’issue du grand débat national le 25 avril 2019.
Il faut rappeler le contexte dans lequel s’inscrit ce texte ainsi que les dispositifs législatifs multiples qui ont été déployés depuis le début de la législature. Je pense à la loi « engagement et proximité », à la loi « expérimentations locales », mais également à la création de l’Agence nationale de la cohésion des territoires. Il était utile, madame la ministre, de rappeler que des dispositifs majeurs comme Action cœur de ville, Petites villes de demain ou France très haut débit ont jalonné l’action continue du Gouvernement et de sa majorité pendant toute la période, avec une volonté claire de simplifier, de faciliter, de lever freins et blocages.
La nécessité a été évoquée d’aller bien plus loin et de provoquer un changement majeur. En tout état de cause, ce projet de loi, à droit constitutionnel constant, fait œuvre utile et pratique au regard de la stabilisation de l’intercommunalité – qui n’est effectivement pas l’ennemi de la commune –, des grands équilibres et des grands blocs, notamment de la DGF, dans un souci d’accompagnement des collectivités territoriales et de bienveillance, car l’État ne saurait davantage être l’ennemi des collectivités territoriales. Ils fonctionnent de concert, comme chacun sait.
Pour ce qui est du groupe Agir ensemble, il accueille avec bienveillance la pérennisation du dispositif SRU. Nous veillerons néanmoins à ce que les considérations quantitatives ne soient pas privilégiées au détriment du qualitatif. Nous nous préoccupons également des questions de mixité sociale, de sanctions et du décompte des logements sociaux.
Nous voyons également d’un bon œil l’amendement très positif des rapporteurs, visant à assortir d’un certain nombre de garanties la transmission des demandes d’adaptation de l’ensemble des collectivités. Il est en effet utile de favoriser un changement de pratiques afin que les forces de proposition des collectivités territoriales soient pleinement entendues et prises en considération.
Madame la ministre de Montchalin, vous avez évoqué un amendement à venir qui devrait nous faire basculer vers une administration proactive dans le cadre de l’article 50. À quel type de prestation pensez-vous ? Quels droits pourraient être attribués automatiquement ? À qui et sous quelles conditions ?
M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Vingt années de députation et presque autant de textes promettant décentralisation, déconcentration et simplification pour nos territoires ! En réalité, aucune loi n’a su faire ses preuves autant que les premières lois de décentralisation, mises en œuvre en 1982. Dernier grand acte, la loi NOTRe et la fusion des vingt-deux régions en treize nouveaux territoires, comportant son lot d’incohérences et ses irritants qui ne sont toujours pas corrigés, y compris par ce texte. Même si retracer sur une carte tous vos déplacements depuis 2017 est une tâche bien ardue, madame le ministre, je ne suis pas persuadé que ce long et sérieux travail de terrain, que vous avez réalisé à la rencontre de nos élus locaux et des préfets, se retrouve entièrement dans ce projet. Charge à nous, parlementaires, de suivre la voie ouverte par les sénateurs pour, non pas détricoter le travail des uns et des autres, mais avancer ensemble.
La différenciation est présentée comme une aspiration majeure du projet. Comme le Conseil d’État l’avait relevé dans son avis du 7 décembre 2017 sur la différenciation des compétences, la reconnaissance aux collectivités territoriales de marges de manœuvre accrues est de nature à renforcer la démocratie locale et à leur permettre d’exercer leurs compétences avec une plus grande efficacité.
Le principe d’égalité a été consacré au sein du bloc de constitutionnalité par la Déclaration des droits de l’Homme, notamment son article 6, et par le préambule de la Constitution de 1946. Il l’a également été par la jurisprudence, depuis la décision du Conseil constitutionnel du 27 décembre 1973, dite taxation d’office, qui en a fait un élément majeur du contrôle de conformité des lois. Bien qu’elle soit, par principe, proscrite par le bloc de constitutionnalité, une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel considère que le principe d’égalité devant la loi ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général. Des exemples existent d’ores et déjà : la collectivité européenne d’Alsace, la Corse et les DOM-TOM.
Votre projet de différenciation apportera-t-il une réelle avancée ou restera-t-il une pétition de principe ? Je crains que notre droit ne soit très complexe et j’émets de forts doutes. Je proposerai néanmoins, par amendements, de poser les jalons d’une réflexion pour un statut adapté à l’hyper-ruralité. Certains territoires n’y parviendront que par des mesures particulières. Il ne peut y avoir de territoires oubliés de la République. Madame la ministre, êtes-vous prête à engager une réflexion sur une expérimentation spécifique sur la notion d’hyper-ruralité, chère au feu sénateur de la Lozère, Alain Bertrand ?
Cela permettrait également de traiter de manière spécifique le département de la Lozère, territoire de montagne situé à 1 000 mètres d’altitude et le seul à compter moins de 100 000 habitants – 76 000, avec une moyenne de 15 habitants au kilomètre carré. Autant dire que nous sommes toujours atypiques, pour ne pas dire en dehors de toutes les normes, et ce serait un geste de la part du Gouvernement que de bien vouloir en tenir compte.
Nos collègues sénateurs ont introduit un article 13 quater qui autorise l’abattage des loups. Ceux-ci constituent un fléau particulier aux zones de montagne, et il serait bon de permettre des avancées sur ce sujet.
Je salue, au nom de mon groupe, le renforcement du poids des élus dans les agences régionales de santé (ARS), même si l’utilité de ces monstres administratifs, continuellement critiqués, reste à définir.
Enfin, mes collègues de l’UDI, Philippe Gomès et Philippe Dunoyer, seront particulièrement attentifs au volet relatif aux outre-mer et vous proposeront des évolutions par voie d’amendement.
M. Paul Molac. En 2019, le Président de la République avait annoncé un nouvel acte de décentralisation, souhaitant changer le mode d’organisation de notre République, notamment sur les problématiques de la vie quotidienne – transition écologique, logement, transport –, avec un objectif de garantie de décision au plus près du terrain. Pour notre groupe, le texte qui nous est présenté n’a rien d’une loi de décentralisation, et encore moins d’une loi relative à l’autonomie des collectivités locales et l’autonomie régionale que nous appelons de nos vœux. Par rapport à nos voisins, qui sont tous des États régionaux ou fédéraux, la France est bien singulière.
Ce projet de loi risque donc d’être une occasion manquée, et la déception est pour nous assez grande. Si certains articles sont bienvenus, on voit bien que l’État se débarrasse de ce qu’il ne veut plus gérer. Je pense aux petites lignes de chemin de fer, qui ne sont plus entretenues depuis des années, ou au défaut d’investissement dans les établissements publics de santé. Cela ne me paraît pas totalement anodin. À titre d’illustration, le centre hospitalier de la ville de Redon doit être reconstruit pour un montant de 200 millions d’euros ; l’ARS nous propose une participation de 22 %, et nous laisse trouver les 78 % restants. Ce n’est pas avec un hôpital en déficit, comme le sont tous les hôpitaux, que nous pourrons contracter un emprunt. On voit bien la tendance qui se dessine : débrouillez-vous avec vos collectivités locales ! Mais quels financements mobiliser ? Une part de CSG, peut-être ?
S’agissant des routes nationales, il en reste assez peu à transférer.
Nous aurions aimé qu’il soit répondu aux demandes de compétences concernant la santé, la formation, l’emploi, l’eau, l’environnement et notamment la gestion de la politique agricole commune, souhaitée par la région Bretagne. Si quelques velléités se dessinent, ce texte ne va vraiment pas au bout des choses.
Les critères drastiques de recevabilité des amendements font que les deux tiers de nos amendements ont été jugés irrecevables : demander des transferts de compétences est désormais considéré comme une charge, ce qui est contestable puisque l’on ne fait que les transférer de l’État aux régions. Nous sommes donc circonspects s’agissant de la déconcentration. Donner plus de pouvoir au préfet, ce n’est pas donner plus de pouvoir aux élus du peuple, c’est donner plus de pouvoir à l’administration, en l’occurrence, au ministre de l’Intérieur qui devient un super ministre. Je ne sais si l’inspection académique, qui dépend directement du ministère de l’Éducation nationale, dépendra des préfets, comme ce sera le cas pour l’ADEME, si la loi est votée, mais cela m’inquiète, car faire de la décentralisation et de l’autonomie régionale n’est pas leur rôle.
Nous plaidons pour l’autonomie fiscale, qui a été réduite à trois fois rien. Vous avez supprimé la taxe d’habitation, et avant vous « la patente » avait connu le même sort. Or les élus doivent pouvoir lever des impôts en fonction des compétences qui sont les leurs, sans avoir à attendre une dotation qui viendrait de l’État. Ainsi, les départements qui demandent la recentralisation du RSA peinent peut-être à le payer à cause d’une péréquation insuffisante. Je ne pense pas que ce soit une bonne disposition de recentraliser le RSA.
S’agissant des mesures de différenciation, vous avez dit, à juste titre, que la carte des régions a été une erreur – je l’avais moi-même dit en 2015 et j’avais voté contre. Je note que deux territoires réclament une adaptation : l’Alsace, qui souhaite redevenir une région ; la Bretagne qui plaide pour sa réunification historique à cinq départements et non quatre. À cet égard, le département de Loire-Atlantique a demandé l’organisation d’un référendum au Président de la République, qui ne lui a toujours pas répondu.
Pour conclure, ce projet de loi est très en deçà de ce que nous sommes en droit d’attendre.
M. Sébastien Jumel. Au sein du groupe GDR, nous sommes pour un État qui protège, pour un État qui prend soin. Nous considérons que la première pierre sur laquelle repose tout l’édifice républicain est la capacité de l’État à rendre concrète l’égalité républicaine. Cela suppose que, où que l’on habite, où que l’on naisse, y compris dans les territoires oubliés, humiliés de la République, l’on puisse avoir accès aux mêmes droits – au logement, à la santé, à l’éducation, à l’emploi –, et aspirer à une vie digne, du berceau jusqu’à la tombe. Force est de constater que, même si vous êtes très sympathique, madame la ministre, et très à l’écoute, le compte n’y est pas. Vos différentes réformes ont abîmé la République, qui devrait être présente partout et pour tous. Le seul exemple des déserts médicaux et des 6 millions de Français qui n’ont pas accès au droit fondamental à la santé illustre concrètement cette absence de l’État qui prend soin.
Cet attachement à un État fort qui tient son rang et son rôle sur les questions d’aménagement du territoire et de péréquation, y compris en termes de moyens, n’est pas contradictoire avec notre volonté de défendre ardemment la commune et le principe de libre administration des collectivités locales. De ce point de vue, je le dis avec les maires de France : les communes, piliers de la République de proximité, ne demandent pas à être flattées ; elles veulent seulement être écoutées, accompagnées, respectées. Une chose est de saluer leur mobilisation exemplaire pendant la crise sanitaire, une autre est de veiller à ce que les compensations des dépenses interviennent dans les temps et à l’euro près, ce qui n’est pas le cas. Le niveau de dépendance des collectivités à l’égard de l’État a augmenté de façon préoccupante du fait de la suppression de la taxe d’habitation, pour les communes, et de la suppression des impôts de production, pour les intercommunalités.
Les députés de la majorité pourraient crier en chœur : hors sujet ! Eh bien, non ! Car moins l’État assure, moins l’État assume, moins l’État protège, plus il est enclin à se délester sur les collectivités locales en leur demandant de financer ce qu’il n’est plus en situation d’assumer lui-même. Les routes nationales abandonnées, les petites lignes nécessaires pour aller se soigner, travailler ou se former, l’invitation à participer aux investissements pour pallier l’abîme de l’hôpital public en sont l’illustration.
Hormis les outre-mer et la Corse, qui peuvent légitimement prétendre à une adaptation, la différenciation nous semble dangereuse pour l’unicité de la République. La décentralisation à la carte est tout aussi dangereuse, qui explose l’unicité de la France « façon puzzle », comme on dit chez les Tontons flingueurs ! Enfin, on a peine à croire sur le terrain que la déconcentration corrigera concrètement le déménagement du territoire et la préoccupante métropolisation des réponses publiques depuis la loi NOTRe. D’ailleurs, les corrections que le Président de la République, à Bourgtheroulde, chez notre collègue de l’Eure, avait envisagé d’y apporter ne sont pas dans ce projet de loi.
Votre admirable sens de l’égalité consiste à donner tout à ceux qui ont déjà beaucoup. Le couple préfet-maire est un couple à l’ancienne, où le premier décide de tout, tout le temps, pour toute la famille. Dans les faits, les directeurs académiques des services de l’éducation nationale (DASEN) continuent de faire pression sur les maires pour réduire les classes, voire pour supprimer des écoles en milieu rural. Dans le même temps, les sous-préfets continuent d’être notés en fonction des intercommunalités mastodontes qu’ils construisent, voire qu’ils imposent dans les territoires.
Quant à l’objectif que vous assignez de réduire ce qui fait obstacle au quotidien à l’exercice des missions des maires – plans de prévention des risques inondation (PPRI), plans de prévention des risques naturels (PPRN), défense incendie –, ces normes sont élaborées loin du cœur, loin des yeux, en tout cas loin du terrain, complexifiant l’exercice quotidien de nos maires. Tout semble conçu comme s’il s’agissait de faire entrer les élus locaux dans des moules confectionnés loin des réalités quotidiennes.
Si certains dispositifs vont dans le bon sens lorsqu’ils sont accompagnés financièrement – Action cœur de ville apporte vraiment des corrections dans les villes moyennes –, force est de constater que la généralisation des appels à projets, dans des délais intenables techniquement, voire administrativement, est de nature à renforcer les inégalités territoriales. Les collectivités ne sont pas toutes armées de la même manière en ingénierie et en compétences pour y répondre.
Renforcement du poids des élus et des usagers dans la gouvernance et l’élaboration des réponses aux questions qui les concernent en matière de santé et de logement, place essentielle du couple communes-département dans l’action de proximité, renforcement du rôle des régions et de l’État dans l’aménagement du territoire, j’espère que le débat nous permettra d’aborder tous ces sujets.
M. Raphaël Schellenberger. Au départ, il y avait une difficulté majeure de votre pouvoir avec les corps intermédiaires. La première crise d’ampleur du quinquennat, celle des Gilets jaunes, est née, sans conteste, de votre incapacité à concevoir que la décision publique se construit avec des acteurs intermédiaires – des relais dans l’entreprise, dans la vie associative et les fédérations ou les collectivités territoriales, dans la vie politique. Vous avez entendu la critique politique sur l’absence de prise en compte des territoires et la déconnexion de la réalité des collectivités territoriales. Vous avez tenté d’apporter une réponse avec la loi « engagement et proximité », qui cherchait à répondre à la question de la place des maires, à peu près au moment où il fallait recruter des candidats aux élections municipales. C’était opportun !
Au cours de la discussion de ce texte, on a beaucoup parlé d’Alexis de Tocqueville, de sa conception de la démocratie en Amérique et de la nécessité de faire confiance à la proximité et à cet échelon où le citoyen comprend et participe activement à la décision publique locale. Mais attention, le cadre était posé : il n’y aurait pas de Grand soir de l’organisation territoriale en France, même si tout le monde convenait que le principal grain de riz dans les rouages – qui était tout même très gros – était cette loi NOTRe, voulue sous le quinquennat précédent par nos amis socialistes. Il y avait donc à la fois une promesse de stabilité – on ne touche pas à la loi NOTRe – et une promesse de récupération des corps intermédiaires.
La loi « engagement et proximité » n’était pas suffisante et il fallait bien que la ministre de tutelle du ministre délégué qui l’avait soutenue propose un texte plus ambitieux. Naquit le projet de loi « 3DS » – déconcentration, décentralisation, différenciation, simplification, cette dernière remplaçant avantageusement le terme de « décomplexification » un temps évoqué par le Premier ministre. Si cela est plus simple à comprendre, ces termes ne veulent pas dire grand-chose pour les Français.
Nous qui sommes tous, notamment au sein de cette commission, des spécialistes de la construction de la décision publique locale, de l’administration locale, nous savons à peu près ce que signifie « décentralisation ». La « déconcentration », ceux qui ont fait un peu de droit l’ont rencontrée au moins une fois au détour d’un cours et ceux qui ont exercé des mandats locaux ont à peu près compris qu’il s’agissait du sous-préfet. Quant à la « différenciation », c’est la recette miracle : quand le système ne marche pas, on invente un nouveau terme ! Dans tous les cas, on cherche à apporter une réponse complexe à un problème pourtant simple : la responsabilité et la capacité d’agir des élus locaux. Avec la loi au titre pompeux de « nouvelle organisation territoriale de la République », on a compliqué la capacité d’agir des élus locaux. Plutôt que de leur rendre la capacité d’agir en les laissant simplement faire ce dont ils avaient besoin, se saisir des problèmes, créer des politiques innovantes et de nouveaux moyens d’action, on leur a dit de demander s’ils en avaient le droit, et que, si l’on jugeait cela opportun sur leur territoire, alors peut-être on légiférerait pour leur donner le droit de faire ! C’est là une façon bien compliquée de concevoir un système simple d’action locale et d’action efficace.
Je sais qu’il est très difficile d’accepter l’idée que d’autres que soi-même peuvent faire bien, différemment et efficacement. On le voit y compris dans les collectivités territoriales, quand le département et la région ne s’entendent pas ou quand le département et les communes ont des objectifs différents. Pourtant, c’est aussi cela l’administration locale, la libre administration des collectivités. C’est ce qui fait la beauté de notre politique locale que chacun puisse librement s’administrer, même de façon différente. Malheureusement, ce n’est pas tout à fait l’esprit de ce texte, qui se fonde plutôt sur la volonté de contrôler ce que feront les collectivités locales, considérées comme des niveaux infra de l’État, des exécutantes des décisions du niveau central. Cela ne nous satisfait pas.
Le texte du Sénat est un minimum. Malheureusement avec quatre-vingts amendements de suppression déposés par vos rapporteurs et plus de 60 % de nos amendements jugés irrecevables, il nous semble difficile de tomber sur un point d’accord.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je partage la vision de Rémy Rebeyrotte d’une intercommunalité qui conforte les communes. C’est toujours ce que j’ai pensé et en quoi j’ai cru. Ce texte ne fragilise en rien les communes, bien au contraire. Merci de l’avoir rappelé.
Nous sommes absolument d’accord sur l’unicité de l’État dans les territoires. J’indique à monsieur Jumel que les préfets représentent l’ensemble du Gouvernement, l’ensemble des ministres. Notre destin ne passe pas par le ministère de l’Intérieur, sauf pour l’aspect sécuritaire. Amélie de Montchalin et moi-même travaillons en permanence avec les préfets. Je crois à cette unicité ou unité de l’État, car il est impossible que certains établissements publics oublient les liens qui les unissent à l’État, ce qui est souvent reproché dans les territoires.
Vincent Bru s’est préoccupé de la recherche de la fluidité de l’action publique : elle s’inscrit précisément dans l’esprit de notre loi, tout comme la confiance et la proximité. S’agissant de la possibilité de donner délégation pour les gestionnaires de collège et de lycée, nous en avions introduit le principe dans la loi. Le Sénat l’a supprimé, non pas parce qu’il n’était pas d’accord, mais parce qu’il trouvait que nous n’allions pas assez loin. Bien évidemment, il faut répondre à la demande de clarification des relations des gestionnaires dans les collèges et lycées. Le Gouvernement a présenté par voie d’amendement une nouvelle proposition, qui, je l’espère vous satisfera.
Monsieur Hervé Saulignac, je crois que vous vous êtes trompé de quinquennat ! Contrairement à ce que vous avez indiqué, nous avons entrepris des réformes structurantes. Pérenniser la loi SRU n’est pas totalement secondaire, c’est important. Décentraliser 50 % du réseau routier national l’est tout autant. Quant à l’expérimentation de la reprise du financement du RSA par l’État, je rappelle qu’il s’agissait d’une demande des départements, en particulier ceux de gauche. Nous avons passé un accord construit avec monsieur Stéphane Troussel. Tout cela a du sens. Il s’agit de mesures structurantes et il nous faut travailler ensemble dans un esprit constructif.
Je le souligne, car vous avez indiqué qu’il avait donné un avis négatif, que le Conseil d’État peut émettre des remarques sur certains articles mais ne donne pas d’avis sur les projets de loi. Votre expression n’est donc pas juste.
J’ai toujours cru à la république des territoires. Nous n’avons pas envisagé de grandes réformes territoriales car, dès notre arrivée au pouvoir, les élus ont réclamé une pause. Les réformes avaient été très nombreuses depuis 2010. Je n’en dis pas plus pour ne pas être désagréable – je vous aime bien.
Monsieur Morel-À-L’Huissier, je suis d’accord avec vous, ce projet de loi n’est pas équivalent aux lois Defferre votées sous la présidence de François Mitterrand à partir de 1982. À l’époque, tout était à faire, car il s’agissait de changer un système entièrement centralisé et jacobin. Je m’en souviens car, en 1983, j’étais conseillère municipale. Les lois de décentralisation de Jean-Pierre Raffarin n’avaient déjà pas non plus l’ampleur des lois Defferre. On entend dire qu’il faut toujours plus décentraliser, mais arrive un moment où on se heurte au mur du régalien. Les Français sont aussi attachés à l’État, monsieur Jumel l’a rappelé, comme garant de l’égalité des droits et des devoirs, quel que soit l’endroit où l’on vit.
La différenciation, c’est aider par la contractualisation les territoires qui en ont le plus besoin et reconnaître la spécificité de leurs problèmes. Il peut s’agir de problèmes liés à l’hyper-ruralité, comme ceux que connait la Creuse ; à la désindustrialisation, comme ceux que connaît le territoire de Sambre-Avesnois-Thiérache, dans lequel je me suis rendue avec le Président de la République, ou encore à la montagne. Quand nous votons une loi montagne, que nous signons un pacte comme celui du territoire de Sambre-Avesnois-Thiérache ou que nous mettons en œuvre un plan pour la Creuse, nous faisons bien de la différentiation. Je rappelle qu’une étude du Conseil d’État recommandait d’élargir l’expérimentation et la différenciation, et que la politique de différenciation est menée dans le cadre de la loi organique du 19 avril 2021, qui a été votée à une large majorité.
Monsieur Molac, la France n’est pas un État fédéral et je pense que la majorité des Français n’en voudraient pas. Ce n’est pas notre histoire et c’est ce que je sens. Ce n’est pas parce que je suis ministre que je ne connais pas les territoires. La déconcentration, c’est la présence de l’État dans les territoires qui se manifeste par l’ensemble des personnes qui agissent au nom de l’État, mais le préfet a vocation à les représenter toutes.
De nombreuses petites lignes de chemin de fer ont été fermées, mais beaucoup de régions ont depuis demandé leur réouverture. L’État et la SNCF ont donc signé des accords avec les régions. C’est une bonne chose et je suis allée moi-même signer de tels accords, dans le Grand Est et chez moi en Centre-Val de Loire. En signant ces accords, l’État ne se décharge pas de ses responsabilités. Les collectivités territoriales ne peuvent pas tout faire toutes seules. C’est en travaillant main dans la main qu’on arrive à trouver des solutions.
Vous êtes contre la recentralisation du RSA ; je vous rappelle qu’il s’agit d’une demande des élus. Cette demande a d’abord émané d’élus de gauche de territoires urbains, mais elle est aujourd’hui également portée par des élus de droite de territoires ruraux. Je ne parle pas de ceux du centre, car sinon vous m’accuseriez de faire de la politique.
Enfin, je ne suis pas sûre que le transfert d’une quote-part de TVA aux régions constitue un recul des moyens des régions.
Monsieur Schellenberger, nous n’avons pas souhaité traiter du périmètre des régions dans ce projet de loi. La loi sur la collectivité européenne d’Alsace a été faite à la demande des Alsaciens ; ce n’est pas nous qui leur avons demandé de passer de deux départements à une seule collectivité. J’ai beaucoup travaillé avec Édouard Philippe pour la satisfaire et ce travail a abouti aux accords de Matignon qui posaient deux conditions à la création de la collectivité européenne d’Alsace : la nouvelle collectivité devait rester dans la région Grand Est et elle ne devait pas avoir de statut particulier. La loi créant cette collectivité ne vous satisfait peut-être pas entièrement, mais elle est le signe que nous avons tenus les engagements que nous avions pris.
Vous m’invitez à expliquer la cohérence entre la loi « engagement et proximité » et la loi « 4D ». La réponse est simple : elles ont été construites dans le même esprit de confiance entre les élus et les collectivités territoriales, mais la loi « engagement et proximité » traite du couple communes et intercommunalités alors que la loi « 4D » se concentre sur les politiques publiques des collectivités en général. Elles sont donc complémentaires.
Monsieur Jumel, j’ai bien aimé votre expression « prendre soin ». C’est le rôle de l’État, associé aux collectivités territoriales, de prendre soin de nos concitoyens. J’ai été maire pendant vingt-cinq ans. Rien dans cette loi n’abîme les mairies ou les collectivités territoriales en général. Par ailleurs, la suppression de la taxe d’habitation est compensée à l’euro près.
Vous estimez que l’État n’a pas fait grand-chose pendant la crise sanitaire.
M. Sébastien Jumel. Je n’ai pas dit cela. L’engagement des collectivités pendant la crise sanitaire n’a pas été compensé. L’Association des maires de France (AMF) le dit elle-même !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’AMF ne détient pas la vérité !
Pendant la crise sanitaire, l’État a mis en place un filet de sécurité pour les collectivités territoriales, et nous avons récemment décidé de prolonger à l’année prochaine certaines mesures de la loi de finances de l’année dernière, notamment celles concernant les régies. On ne peut pas à la fois nous reprocher de ne pas en faire assez et de ne pas surveiller suffisamment les finances de l’État. Nous essayons de respecter un équilibre.
Concernant les appels à projets, je suis plutôt d’accord avec vous. Je préfère, dans mon ministère, déconcentrer les financements. Cela dit, nous avons développé, avec l’Agence nationale de cohésion des territoires, l’accompagnement en ingénierie. C’est un acquis important pour les territoires.
Monsieur Molac, les régions et le Gouvernement sont très liés pour la gestion des fonds européens.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur Euzet, vous m’avez interrogée sur les projets qu’on pourrait imaginer pour informer proactivement les citoyens et leur fournir une assistance de manière proactive.
L’information proactive permet aux citoyens de mieux connaître leurs droits. On le fait déjà concernant l’éligibilité des collégiens et des lycéens aux bourses scolaires, car le taux de non-recours aux bourses est aujourd’hui encore élevé. On peut aussi informer les citoyens des démarches d’inscription sur les listes électorales au moment où ils signalent leur changement d’adresse sur la carte crise après un déménagement. À partir du moment où l’administration est au courant d’une démarche ou d’une situation, elle informe les citoyens d’autres droits et démarches. On peut appliquer ce principe dans de très nombreux domaines, mais le plus intéressant pour le citoyen, c’est qu’il n’ait pas à faire de démarches du tout s’il estime que l’information que détient l’administration sur sa situation est correcte.
Ainsi, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 prévoit que toute personne touchant le minimum vieillesse ou le RSA sera automatiquement éligible et inscrite à la complémentaire santé solidaire. Je peux citer d’autres exemples : les pensions alimentaires fixées à la suite d’un divorce, qui, à partir de 2022, seront automatiquement versées par l’intermédiaire de la caisse d’allocations familiales (CAF), sauf avis contraire des deux époux ; l’allocation de rentrée scolaire ; le chèque énergie ou la déclaration automatique d’imposition depuis 2020.
Nous devons changer notre vision de l’administration. Elle ne peut être réduite à un ensemble de guichets derrière lesquels les fonctionnaires attendent que le citoyen bien informé trouve le bon guichet pour faire valoir ses droits. Cela reviendrait à organiser institutionnellement le non-recours. L’administration doit se mettre au service de l’exercice réel des droits que vous, parlementaires, avez ouvert aux citoyens. À partir du moment où l’administration sait qu’un citoyen est éligible à tel ou tel droit, elle doit lui y donner accès.
Pendant la crise sanitaire, l’État a mené des actions différentes qui ont bien fonctionné. Ainsi, la Caisse nationale d’assurance vieillesse a appelé par téléphone les personnes âgées isolées qui touchaient une retraite inférieure au minimum vieillesse et qui n’avaient pas d’autres revenus, pour les aider à activer le minimum vieillesse, si elles le souhaitaient. Un autre exemple de la lutte pied à pied, citoyen par citoyen, contre le non-recours est le préremplissage en temps réel de demandes de certaines aides sociales, comme l’aide personnalisée au logement (APL), à partir de données fiables. Ce principe de contemporanéisation des aides sociales est un mécanisme efficace de lutte à la fois contre le non-recours et contre la fraude. À partir du moment où les informations sur l’éligibilité aux droits sont fiables et échangées directement, le citoyen qui a accès à un droit perçoit la prestation alors que celui qui n’y est pas éligible n’y aura pas accès. Les critiques de ceux qui associent l’ouverture de nouveaux droits à l’augmentation de la fraude deviennent ainsi stériles.
Le principe de proactivité est essentiel à une administration moderne qui génère de la confiance. Il permet à l’administration, comme le recommande Pierre Rosanvallon, de créer de la certitude et de la prévisibilité.
Monsieur Jumel, je tiens à vous dire de la façon la plus solennelle que le Président de la République, le Premier ministre et l’ensemble des ministres souhaitent que le préfet soit celui qui incarne l’ensemble des politiques publiques dans les territoires. Pour faire vivre cette vision, nous nous sommes engagés, lors des deux derniers comités interministériels de la transformation publique à Mont-de-Marsan et à Vesoul, à ce que les préfets soient évalués sur les résultats des politiques publiques que les Français voient dans leur vie quotidienne.
Ces résultats sont publiés par le baromètre de l’action publique, disponible sur le site du Gouvernement. Grâce à cet outil, il suffit de taper son code postal pour visualiser les résultats des quarante-trois politiques prioritaires définies par le Gouvernement qui sont autant d’enjeux dans la vie quotidienne des Français : accès au numérique par la fibre, santé, éducation, apprentissage, etc. Pour chacune de ces politiques, des indicateurs présentent la situation initiale depuis 2017, la valeur actuelle, ainsi que la cible en 2022. C’est sur la base de ces résultats que le Premier ministre a envoyé à chaque préfet sa lettre de mission. La feuille de route de l’Oise n’est pas celle de la Seine-Maritime, qui n’est pas celle de l’Isère. Ce changement majeur s’inscrit dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique que je porte activement. Il implique que nos fonctionnaires soient évalués non plus à partir d’indicateurs de moyens budgétaires, mais à partir d’indicateurs mesurant l’impact réel de l’action publique dans la vie de ceux et celles qu’ils servent chaque jour avec beaucoup d’ambition et beaucoup de volonté.
M. Sébastien Jumel. Donner au préfet, au DASEN ou au directeur d’ARS le soin de mettre en œuvre les politiques publiques ne garantit pas l’unicité de la République. Je travaille depuis plusieurs semaines sur la lutte contre les déserts médicaux. Certes, des situations différentes demandent des réponses différentes, c’est le sens de la différenciation, mais à situation égale, à besoin de santé équivalent et à déserts médicaux équidistants, les réponses publiques varient sur l’ensemble du territoire national du simple au quadruple.
Je respecte profondément les hauts fonctionnaires, ils sont consubstantiels à l’unicité de la République à laquelle je suis attaché. Mais je constate que beaucoup de DASEN conditionnent la mobilisation de la DETR ou de la DSIL à la fermeture par les maires des écoles qu’ils jugent trop petites, alors même que le Président de la République a déclaré qu’aucune école ne sera fermée sans une délibération du conseil municipal pour respecter la libre administration des communes. C’est la réalité des territoires !
De la même manière, alors qu’on a dit qu’il ne fallait pas de big bang territorial, qu’il fallait faire une pause dans le processus de création d’intercommunalités, et malgré l’analyse, y compris politique, des retours d’expérience des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI), je connais des sous-préfets, et pas seulement dans mon arrondissement, qui vont voir les responsables d’intercommunalités pour leur dire qu’elles sont trop petites et qu’il faut poursuivre les fusions à tout prix. Font-ils du zèle ou agissent-ils sciemment en contradiction avec les objectifs fixés par le législateur ? Voilà ce que je voulais dire en parlant, d’un côté, des orientations stratégiques et, de l’autre, de la réalité du terrain.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Sur l’intercommunalité, je vous demande de me donner des exemples précis.
M. Sébastien Jumel. Je vous en donnerai
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Les préfets n’ont reçu aucune injonction du Gouvernement de demander aux petites intercommunalités de fusionner. Il peut arriver tout au plus que des préfets ou des sous-préfets le suggèrent dans le cadre de discussions informelles.
La loi « engagement et proximité », portée par Sébastien Lecornu, prévoit au contraire la possibilité de sortie d’une structure intercommunale. L’État a ainsi récemment autorisé la scission de la communauté de communes des Hautes-Vosges. Il existe un autre cas dans le Morbihan. Les injonctions à fusionner ont pu exister dans le passé ; ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur Jumel, ce que vous avez dit est très important. La mise en œuvre des politiques publiques par les préfets ne se fait pas nécessairement de manière homogène et c’est pour cela que nous avons créé le baromètre de l’action publique. Depuis son élection, le Président de la République a une obsession, qui est celle de s’assurer que, malgré les spécificités et les difficultés de chaque territoire, les résultats des politiques publiques soient les mêmes pour tous les Français.
Prenons l’exemple des maisons de santé pluriprofessionnelles, qui sont une vraie réponse à la désertification médicale tout en facilitant l’exercice coordonné, la libération de temps médical et la santé de proximité. Il en existe trente en Seine-Maritime, onze dans l’Orne, vingt-trois dans l’Eure, seize dans le Calvados et vingt et une dans la Manche, soit un total de 101 maisons en Normandie et 130 en Bretagne. Ce n’est pas parce que, tout ministre que l’on est, nous avons fixé des objectifs qu’ils se réaliseront. Nous suivons donc département par département leur réalisation. C’est notre obsession. Le baromètre de l’action publique permet justement de suivre la réalisation de nos objectifs en toute transparence. Ainsi, pour les maisons pluriprofessionnelles de santé, nous constatons que l’objectif est atteint en Seine-Maritime alors que d’autres départements en sont plus éloignés.
M. Sébastien Jumel. L’Orne et la Manche, par exemple.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Nous reconnaissons donc que certains objectifs ne sont pas atteints. Nous donnons alors aux acteurs de terrain des outils pour atteindre les objectifs et ces outils ne se réduisent pas à des moyens budgétaires. Ceux-ci, en effet, ont souvent été accordés de façon homogène. Par conséquent, si les objectifs ne sont pas atteints, c’est bien qu’il existe également d’autres enjeux, notamment de coopération et de travail politique.
Je me rends régulièrement sur le terrain, comme tous les ministres, car le Gouvernement ne considère pas que les territoires doivent se débrouiller avec les moyens qui leur sont accordés. Ce gouvernement est exigeant quant aux résultats qu’il veut apporter à chaque Français.
M. Jean-Félix Acquaviva. Ce projet de loi était attendu. Il suscite quelques regrets, mais aussi des espoirs.
Les regrets concernent la conception par le projet de loi de la différenciation et du pouvoir réglementaire. Ce texte nous semble avoir davantage une portée pédagogique qu’un véritable pouvoir normatif. Le Sénat l’a d’ailleurs souligné en se rapportant aux avis du Conseil d’État ou à la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la déclinaison du principe d’égalité dans le respect de l’article 73 de la Constitution prévoyant la catégorisation des collectivités territoriales : celles de droit commun, celles d’outre-mer et celles à statut particulier, dont la Corse fait partie.
Nous espérons, par des amendements, pouvoir renforcer le pouvoir réglementaire local sur les compétences des collectivités, qui reste trop subsidiaire, et améliorer la procédure de demande d’adaptation des lois et des règlements, qui est aujourd’hui trop contrôlée en opportunité par l’administration centrale. Les élus du peuple doivent être placés au centre des discussions avec l’État et avec le Gouvernement. Cela nous semble essentiel d’un point de vue démocratique.
Je le dis sans polémique, madame Gourault, mais je regrette de vous entendre dire qu’il faut réduire l’ampleur de la décentralisation, car nous aurions connu un trop grand mouvement de décentralisation à la suite des lois de décentralisation initiales. Cela me rappelle le principe de la productivité marginale en économie. Si on rentre dans le détail des échanges d’expérience des collectivités à statut supposément particulier, comme la Corse, on constate que l’État a donné d’un côté, mais n’a pas transféré de l’autre, je pense notamment au transfert de charges.
Je rappelle également que les élus corses n’ont reçu aucune réponse positive aux soixante-dix demandes d’adaptations réglementaires qu’ils ont faites en vingt ans. J’espère que nous pourrons rattraper les choses au fil des débats. Je constate que le Gouvernement a répondu favorablement aux demandes des élus alsaciens concernant la création de la collectivité européenne d’Alsace ainsi qu’à celles de recentralisation du RSA. J’espère qu’il saura répondre favorablement aux demandes réitérées des élus régionalistes corses, qui ont été validées par le suffrage universel, à plus de 70 %, lors des dernières élections territoriales, car le choix de répondre à certaines demandes et pas à d’autres me semble plus politique que juridique.
M. Rémy Rebeyrotte. Les préfets doivent retrouver un rôle majeur de coordination de l’action publique, dans tous ses domaines. Nous avons tous connu des situations abracadabrantesques. Par exemple celle où le préfet attribue une subvention au titre de la DETR pour financer des travaux de modernisation d’une école que le DASEN propose de fermer deux ans après. Autre exemple, dans le domaine de la santé : il arrive qu’un directeur de l’ARS soit obligé d’appeler le préfet à la rescousse, car il n’arrive plus à gérer une situation difficile avec les usagers à la suite d’une décision prise hâtivement. Je suis en train de le vivre sur mon territoire. Je ne parle même pas de la crise sanitaire au cours de laquelle il y a eu, dans certaines régions, des problèmes de coordination entre la préfecture et l’ARS. Nous avons besoin d’un préfet qui incarne pleinement l’unité de l’État. De nombreux collègues y sont très attachés et c’est en cela que cette loi est importante.
On parle beaucoup de décentralisation, mais on parle nettement moins de déconcentration. Il est tout aussi important pour les élus locaux d’avoir une décentralisation réussie qu’une déconcentration réussie.
M. Sébastien Jumel. C’est une question qui n’est pas abordée dans la loi.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur Acquaviva, je n’ai pas dit que les lois de décentralisation de 1982 et 1983 étaient trop importantes. J’ai dit qu’elles étaient très importantes puisqu’elles s’attaquaient à un État entièrement centralisé.
Par ailleurs, je crois savoir que le rapporteur fera des propositions intéressantes sur la procédure de demande d’adaptation des collectivités. Ces propositions devraient vous satisfaire doublement, puisqu’elles sont très intéressantes sur le fond et viennent du rapporteur.
Lors de ses réunions des lundi 22 novembre, mardi 23 novembre et mercredi 24 novembre 2021, la Commission examine le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (n° 4406) (Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Bruno Questel et Mme Maina Sage, rapporteurs).
Deuxième réunion du lundi 22 novembre à 21 heures
Lien vidéo : https://assnat.fr/xTKU0I
Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous entamons l’examen des articles du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (no 4406).
Lorsque nous aborderons les articles dont l’examen au fond a été délégué à d’autres commissions, nous mettrons directement aux voix, sans discussion, les amendements et articles concernés, puisqu’ils ont été discutés par les commissions compétentes.
Je vous rappelle que M. Bruno Questel est rapporteur pour les titres Ier à V.
titre Ier
La différenciation territoriale
Article 1er (art. L. 1111-3-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Définition du principe de différenciation
Amendement CL1222 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Il s’agit de reconnaître dans la loi que la définition des règles relatives à l’attribution et à l’exercice des compétences applicables à une catégorie de collectivités territoriales est déterminée en conciliant le principe d’égalité et celui de subsidiarité, lequel consiste à confier l’exercice d’une compétence à l’échelon territorial le plus pertinent au regard de l’efficacité qui en est attendue.
M. Bruno Questel, rapporteur pour les titres Ier à V. La différenciation permet de concrétiser le principe de subsidiarité. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Même avis.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL917 de M. Jean-René Cazeneuve, amendements identiques CL359 de M. Hervé Saulignac et CL474 de M. Charles de Courson (discussion commune).
Mme Catherine Kamowski. L’amendement CL917 est issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Il s’agit d’un amendement de clarification rédactionnelle.
M. Hervé Saulignac. L’amendement CL359 vise à préciser les fondements de la différenciation. Celle-ci doit tenir compte de la nature rurale ou urbaine des collectivités territoriales. L’expression « différences de situations », à l’article 1er, risque d’être interprétée sous l’angle démographique. Or la différenciation devrait tenir compte des spécificités géographiques des territoires, en particulier la densité de leur population.
M. Jean-Félix Acquaviva. L’article 1er inscrit dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) un principe de différenciation territoriale, qui permet de tenir compte, dans l’élaboration des règles relatives à l’attribution et à l’exercice des compétences locales, des différences de situation existant entre des collectivités relevant de la même catégorie.
C’est une avancée, mais la rédaction du texte risque de conduire à interpréter ces différences de situation sous l’angle démographique, alors qu’il est nécessaire d’analyser la différenciation à travers les spécificités géographiques des territoires, en particulier la densité de population. Les difficultés ne sont évidemment pas les mêmes dans une commune périurbaine comptant moins de 500 habitants et dans une commune de même taille mais située dans un territoire hyperrural – au sens de la nouvelle définition du terme donnée par l’INSEE.
Les amendements identiques sont inspirés d’une des propositions formulées par Jean-Pierre Cubertafon dans son rapport intitulé « Action publique et ruralité à l’ère de la différenciation ».
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL917 apporte une simplification rédactionnelle. J’y suis favorable, même si je me demande s’il n’aurait pas mieux valu faire référence aux « différences objectives de situation ».
Monsieur Saulignac, monsieur Acquaviva, vous avez oublié les territoires rurbains, notion reconnue par les urbanistes et les géologues et qui est prise en compte en matière d’aménagement du territoire. Au-delà de cette question, je suis défavorable aux amendements identiques car ce n’est pas seulement sur ce fondement que l’on différencie les territoires.
La commission adopte l’amendement CL917.
En conséquence, les amendements CL359 et CL474 tombent.
Amendement CL644 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Jean-Félix Acquaviva. Il s’agit de poser une définition claire du principe de différenciation, notamment dans son rapport avec le principe d’égalité, comme le faisait l’avant-projet de loi.
M. Bruno Questel, rapporteur. Vous proposez d’inscrire dans la loi la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative aux marges de manœuvre que permet le principe d’égalité. Si je ne suis pas défavorable à votre amendement, je vous demande de le retirer pour en retravailler la rédaction d’ici à la séance, de manière à éviter toute difficulté d’interprétation.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. On comprend bien l’objectif poursuivi. Celui-ci est inscrit dans la Constitution, du reste, mais si vous voulez réécrire le texte pour préciser les choses, pourquoi pas.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 1er modifié.
Après l’article 1er
Amendement CL849 de M. Jimmy Pahun.
M. Jimmy Pahun. Je défends à travers cet amendement une belle et juste idée : la reconnaissance dans la loi de la spécificité des îles de la Manche et de l’Atlantique – Ouessant, Belle-Île-en-Mer, Houat, Hoedic, Arz, Sein, l’Île-aux-Moines, Groix, ou encore Bréhat. Cette reconnaissance est justifiée par des « handicaps significatifs entraînant des conditions de vie plus difficiles et restreignant l’exercice de certaines activités économiques », à l’instar de ce que prévoit la loi Montagne de 1985. Ces îles se caractérisent aussi par un « accroissement important des coûts » et une « limitation considérable des possibilités d’utilisation des terres » – pour citer de nouveau le même texte.
Ces communes insulaires font face à des défis majeurs auxquels il convient d’apporter des réponses adaptées : l’hyperfréquentation touristique, l’envolée des prix du foncier, le maintien de la population locale ainsi que la protection d’un écosystème fragile, notamment face à la montée des eaux.
Leur reconnaissance dans la loi est également justifiée par l’histoire et les modes de vie propres à ces communautés insulaires, qu’il convient de préserver car elles sont une part essentielle du patrimoine national.
Certains de ces territoires ne sont pas plus grands que des confettis, il est facile d’ignorer leur existence ; mais, sans eux, la France ne serait pas la France. J’en veux pour preuve les mots du général de Gaulle selon lesquels l’île de Sein était « le quart de la France ». Ces îles sont notre histoire et notre géographie.
Avec plusieurs députés insulaires, nous vous proposons de rappeler l’attachement de la République à ces petites îles de la Manche et de l’Atlantique, de dire leur importance et de reconnaître leurs spécificités. La démarche est symbolique, mais elle doit aussi garantir la possibilité pour ces communes insulaires de demander à bénéficier du droit à la différenciation. Au-delà de cette question, leur reconnaissance dans la loi rappellera leur existence à chaque acteur public concerné, politique et administratif, lors de sa prise de décision.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement est très intéressant et je serais enclin à émettre un avis favorable, mais il mériterait un travail de réécriture avec le cabinet de la ministre et la commission. Je vous propose donc de le retirer.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Pourquoi ne citez-vous pas Noirmoutier et Oléron, monsieur Pahun ?
M. Jimmy Pahun. Nous n’avons retenu que les territoires vraiment insulaires, c’est-à-dire qui ne sont pas reliés au continent par des ponts.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Quoi qu’il en soit, c’est tout le problème avec cet amendement comme avec les précédents : quand on commence à entrer dans le détail s’agissant de la différenciation, on peut être sûr que cela va coincer à un moment ou un autre. Moins on précise les choses, plus on a de chances, en réalité, de faire en sorte que la différenciation s’applique à un grand nombre de situations – car la différenciation peut concerner un territoire insulaire, de montagne, frontalier, etc. Il vaut mieux se contenter de poser le principe.
Il m’est difficile d’accepter cet amendement tel qu’il est rédigé. En effet, pourquoi seulement les îles de l’Atlantique et de la Manche – sinon par patriotisme, ce que je comprends très bien ? La différenciation ne peut pas ne pas s’appliquer aux îles de Méditerranée, par exemple.
M. Paul Molac. Je ne peux que soutenir M. Pahun : bien que je sois un député de l’intérieur des terres en Bretagne – je n’ai qu’une seule commune littorale dans ma circonscription –, je connais bien les enjeux insulaires. Ce sont de très beaux endroits, avec la mer et un écosystème formidable, mais il n’est pas évident d’y vivre : il est compliqué, notamment, de calculer ses trajets en fonction des horaires des bateaux. Samedi, par exemple, j’ai croisé sur le continent des habitants de Belle-Île qui étaient obligés de dormir sur place et de reprendre le bateau le lendemain. Outre la contrainte que cela représente pour les îliens, cela entraîne pour eux des coûts importants. Je ne sais pas comment on pourrait rédiger cet amendement pour qu’il soit satisfaisant, mais lorsqu’il sera présenté de nouveau en séance, je pourrai tout à fait le voter.
M. Jimmy Pahun. Pour bien différencier ces îles de toutes les autres qui parsèment le littoral, nous avons ciblé celles qui forment une seule commune – à l’exception des Glénans, qui dépendent de la commune de Fouesnant.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il n’est pas difficile de réécrire cet amendement.
M. Jimmy Pahun. Avec l’aide de vos services, certainement…
L’amendement est retiré.
Article 1er bis (art. L. 3211-3 [nouveau], L. 3444-2, L. 4221-1, L. 4422-16, L. 4433-3, L. 7152-2 et L. 7252-2 du code général des collectivités territoriales) : Demande de mise en œuvre du principe de différenciation par les collectivités territoriales
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1006 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL918 de M. Jean-René Cazeneuve.
Mme Catherine Kamowski. Il s’agit d’un amendement de coordination rédactionnelle, proposé par le groupe de travail de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation chargé d’étudier le projet de loi. Il vise à prendre en compte l’inscription du principe de différenciation dans le CGCT.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.
La commission adopte successivement l’amendement rédactionnel CL1007 et l’amendement de précision CL1008 rectifié de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL1009 rectifié de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement a pour objet de renforcer les dispositions de l’article 1er bis qui imposent au Premier ministre de notifier aux collectivités territoriales, dans un délai de six mois à compter de leur réception, les suites données aux propositions qu’elles présentent en vue de modifier ou d’adapter les dispositions législatives ou réglementaires qui les concernent.
Il s’agit de permettre aux collectivités en question d’avoir l’avis de l’exécutif sur les demandes de dérogation qu’elles formulent. Un trop grand nombre de ces collectivités – qu’il s’agisse de l’outre-mer ou de la Corse – ne reçoit pas de réponse, ce qui n’est pas acceptable. Le rapport mentionné dans l’amendement serait rendu public, ce qui assurait la transparence totale de la gestion de ces demandes de dérogation.
Mme Maina Sage, rapporteure pour le titre VIII. Dans tous les territoires d’outre-mer nous entendons parler des nombreuses demandes restées sans réponse. Il faut, à tout le moins, acter l’envoi d’un accusé de réception. Un document retraçant annuellement toutes les demandes doit également être établi et rendu public. Je souhaiterais d’ailleurs que, lors de transmission aux assemblées, il arrive jusqu’à la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et à la délégation aux outre-mer.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable. C’est une réponse opérationnelle qui est également conforme à la Constitution.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL655 de M. Jean-Félix Acquaviva, amendements CL913 et CL943 de M. Michel Castellani (discussion commune).
M. Jean-Félix Acquaviva. L’amendement CL655 vise à permettre à la collectivité de Corse de demander d’expérimenter des mesures relevant de dispositions législatives en vigueur ou en cours d’élaboration lorsque celles-ci présentent, pour l’exercice de ses compétences, des difficultés d’application liées aux spécificités de l’île. Nous avons déjà défendu cette idée dans le cadre de l’ordre du jour réservé au groupe Libertés et Territoires.
D’une part, l’amendement permettrait d’accroître l’effectivité de la procédure prévue au II de l’article L. 4422-16 du CGCT et de renforcer le pouvoir réglementaire de la collectivité de Corse. D’autre part, il s’agit de réintroduire une disposition de la loi du 22 janvier 2002 relative au statut de la Corse, censurée à l’époque par le Conseil constitutionnel. Entre-temps, la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République a introduit un quatrième alinéa à l’article 72 de la Constitution, qui dispose : « les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l’a prévu, déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences ». Les travaux préparatoires de cette révision constitutionnelle sont éclairants : la censure de cet article de la loi de 2002 était bien le socle de l’évolution proposée.
L’amendement prévoit que la demande soit formulée par délibération motivée de l’assemblée de Corse, prise à l’initiative du conseil exécutif. Il appartient bien sûr au législateur de fixer la nature et la portée de l’expérimentation. L’amendement fixe également les modalités d’information du Parlement sur la mise en œuvre de ces dispositions. Enfin, les mesures prises à titre expérimental par la collectivité cesseront de produire leurs effets au terme du délai fixé si le Parlement, au vu du rapport d’évaluation qui lui est fourni, n’a pas été procédé à leur adoption ou modification.
L’expérimentation de différenciation que nous proposons semble réalisable. Même si, par ailleurs, nous sommes de fervents partisans d’un statut particulier d’autonomie pour la Corse, elle marquerait une avancée essentielle. La collectivité a en effet formulé soixante-dix demandes d’adaptations réglementaires et législatives – une a reçu un avis négatif, les autres n’ont pas été traitées.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je demande le retrait des amendements CL913 et CL943 au profit de l’amendement CL655, auquel je suis favorable. Il s’agit de dispositions que nous avons adoptées ici même en mars. Or il n’est pas dans notre habitude de nous déjuger.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Pour ma part, je suis également défavorable à l’amendement CL655. La création d’une voie nouvelle voie d’expérimentation spécifique à la collectivité de Corse n’est pas conforme à la Constitution : le législateur ordinaire ne peut prévoir une délégation du pouvoir législatif à une collectivité territoriale en dehors des cas prévus dans la Constitution. Pour cette raison, l’amendement n’est pas recevable. Je vous demande de le retirer.
Par ailleurs, la loi organique du 19 avril 2021 permet des expérimentations. Elle s’applique à tous les territoires, y compris la Corse.
M. Jean-Félix Acquaviva. Je maintiens cet amendement ainsi que les deux autres.
S’agissant de la constitutionnalité du dispositif, mon interprétation est différente de la vôtre. La procédure proposée est précise ; c’est le Parlement qui définit le champ de l’expérimentation et peut prononcer son extinction. Il n’y a donc aucune délégation du pouvoir législatif. Eu égard aux propos tenus par Pascal Clément et René Garrec, rapporteurs du projet de loi constitutionnelle de 2003, la cause nous semble largement défendable devant le Conseil constitutionnel.
La Corse est une collectivité à statut particulier – cette fameuse troisième catégorie citée par le Conseil d’État et par le Conseil constitutionnel, à côté des collectivités de droit commun et des collectivités d’outre-mer. Il nous semble donc tout à fait possible de faire ce petit pas supplémentaire. Cela nous paraît nécessaire pour rendre le processus d’adaptation des lois et règlements plus systémique.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte l’article 1er bis modifié.
Après l’article 1er bis
Amendement CL1628 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. La rédaction de cet amendement tient compte des conditions d’irrecevabilité découlant de l’article 40 de la Constitution. Il vise à faire en sorte que, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport relatif à la spéculation foncière et immobilière en Corse et aux outils de différenciation susceptibles d’être mobilisés pour y faire face, notamment en permettant à la collectivité de Corse d’instaurer et d’exercer, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, un droit de préemption sur les transferts de propriété bâtie ou non bâtie. Cette disposition a été adoptée dans le cadre de la proposition de loi de M. Acquaviva que nous avons examinée en mars – les propositions de loi ne sont pas soumises au même régime de recevabilité financière, ce qui explique que la mesure ait réussi à franchir les fourches caudines de l’article 40. L’amendement a pour objet de permettre que le débat ait lieu en séance, car la disposition est essentielle pour l’île de Beauté.
La commission adopte l’amendement.
Article 1er ter (art. L. 1115-4-3 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Rôle des départements frontaliers dans le cadre de la coopération transfrontalière
Amendements de suppression CL1010 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL919 de M. Jean-René Cazeneuve, CL1154 de M. Christophe Euzet et CL1364 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet article, ajouté par le Sénat, concerne la coopération transfrontalière. Or l’article 59 bis vise à doter les départements frontaliers d’un rôle de chef de file spécifique dans ce domaine.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 1er ter est supprimé et les amendements CL834 de Mme Catherine Osson et CL625 de M. Mansour Kamardine tombent.
Article 2 (art. L. 111-4, L. 123-6, L. 132-1, L. 245-3, L. 262-3-1 [nouveau] et L. 262-49 du code de l’action sociale et des familles, art. L. 241‑11 du code forestier, art. L. 2333-84 et L. 4134-2 du code général des collectivités territoriales, art. L. 4383-2 du code de la santé publique, art. L. 143-25, L. 153-25, L. 153-26 L. 421-4 et L. 421-5 du code de l’urbanisme et art. L. 312-10 du code de l’éducation) : Extensions du pouvoir réglementaire local
Amendement CL920 de M. Jean-René Cazeneuve.
Mme Catherine Kamowski. Cet amendement a pour objectif d’affirmer un principe de portée générale selon lequel les collectivités territoriales disposent d’un pouvoir réglementaire pour mettre en œuvre les compétences qui leur ont été reconnues par la loi.
Au lieu d’énumérer dans cet article une liste de politiques publiques où il y aurait lieu de renforcer le pouvoir normatif local, il est préférable de faire figurer en exergue du CGCT le principe selon lequel ce sont les organes délibérants des collectivités territoriales qui décident des mesures d’application, sauf si un texte de loi renvoie à un décret en Conseil d’État ou à un texte réglementaire national. À travers cet amendement, nous essayons de renforcer le principe de libre administration des collectivités territoriales.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement, même si je partage le constat et comprends les raisons qui ont poussé le président Cazeneuve et les membres de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation à le déposer. Le dispositif doit être retravaillé. Il pourrait notamment être inscrit à un autre endroit du texte.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’amendement vise à réécrire entièrement l’article, alors que la disposition pourrait venir en complément.
L’amendement est retiré.
Amendements identiques CL1011 de M. Bruno Questel et CL300 de M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac. Il s’agit de supprimer les alinéas 2 et 3. Ces dispositions, ajoutées par le Sénat et qui modifient le code de l’action sociale et des familles, permettraient de fonder le refus d’une prestation au seul motif que le postulant ne remplit pas les conditions fixées par le règlement départemental d’aide sociale. S’agissant de prestations sociales et de solidarité nationale, on ne peut admettre qu’il y ait des variations sur le territoire en fonction des desiderata des collectivités départementales.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte les amendements.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1012 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendements identiques CL1013 de M. Bruno Questel et CL301 de M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac. Il s’agit cette fois de supprimer les alinéas 5 à 7 permettant aux collectivités de procéder, selon leurs propres critères, à des évaluations des ressources des personnes sollicitant une aide sociale.
La commission adopte les amendements.
La commission adopte successivement les amendements identiques CL1014 de M. Bruno Questel et CL1495 de M. Hervé Saulignac, les amendements identiques CL1015 de M. Bruno Questel et CL1302 de M. Hervé Saulignac, faisant ainsi tomber l’amendement CL626 de M. Mansour Kamardine, et les amendements identiques CL1016 de M. Bruno Questel et CL1303 de M. Hervé Saulignac.
Amendement CL1017 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il vise à donner la possibilité aux collectivités territoriales et aux groupements concernés de déterminer librement les représentants à associer au sein de la commission consultative des services publics locaux.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements CL1018 et CL 1019 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendements identiques CL1020 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL378 de M. Yannick Kerlogot et CL865 de M. Christophe Euzet.
M. Yannick Kerlogot. Suite au rapport que M. Euzet et moi-même avons présenté, nous rappelons par la suppression de l’alinéa 42 le travail engagé auprès du Premier ministre et du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports pour inscrire dans la loi, pour la première fois, la définition d’un enseignement bilingue par immersion alors que cet alinéa tend à le restreindre aux seules écoles privées sous contrat.
M. Christophe Euzet. Cet alinéa se situe en effet très en-deçà de la définition de l’enseignement immersif que nous avons obtenue.
M. Paul Molac. Mon amendement CL1422, qui tombera si ces amendements sont adoptés, visait précisément à revenir à une définition permettant de laisser aux pédagogues le soin de répartir le temps nécessaire à l’apprentissage de la langue régionale et du français avec un seul but : l’égale maîtrise des deux langues.
M. Raphaël Schellenberger. Je suis favorable à l’adoption de l’amendement de M. Molac. La définition de l’enseignement immersif adoptée par le Sénat n’est en rien satisfaisante, même si la présence d’une définition légale constituait une avancée.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je suis favorable aux amendements identiques et non à celui de M. Molac.
La commission adopte les amendements identiques.
L’amendement CL1422 de M. Paul Molac tombe.
Elle adopte l’amendement CL1021 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL455 de M. Mansour Kamardine.
M. Raphaël Schellenberger. Il vise à s'assurer de l'application de l’article 2 à Mayotte, collectivité unique qui exerce les compétences du département et de la région.
M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait. Une application spécifique pour Mayotte n’est pas nécessaire.
La commission rejette l’amendement.
La commission adopte l’article 2 modifié.
Après l’article 2
Amendement CL361 de M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac. Il reprend une proposition de France urbaine qui s’inscrit pleinement dans la logique de différenciation puisqu’il vise à permettre aux élus locaux d’accélérer la transition en matière de performance énergétique.
Dès lors qu’ils disposent d’un programme de l’habitat exécutoire, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) doivent pouvoir se porter volontaires pour fixer un critère de performance énergétique à respecter plus exigeant que celui prévu par le décret.
M. Bruno Questel, rapporteur. La loi Énergie-Climat du 8 novembre 2019 a renforcé la prise en compte de la performance énergétique. Elle impose notamment de fixer un seuil maximal de consommation énergétique au-delà duquel le logement doit être considéré comme indécent. Le décret du 11 janvier 2021 a fixé cette consommation à 450 kilowattheures d’énergie finale par mètre carré de surface habitable et par an. Nous avons donc instauré un maximum quand vous proposez de fixer un critère minimal. Je vous propose de laisser entrer en vigueur, au 1er janvier 2023, la mesure que nous avons d'ores et déjà votée. Demande de retrait, sinon, avis défavorable.
L’amendement est retiré.
Article 2 bis (art. L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales, art. L. 216-2 du code de l’éducation, art. L. 2121-3 du code des transports et art. 21 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique) : Extensions du pouvoir réglementaire local
Amendements identiques CL1022 de M. Bruno Questel, rapporteur et CL362 de M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac. Il s’agit de supprimer les alinéas 1 à 3.
Nous reprenons une proposition défendue par l’Association des communautés de France, visant à maintenir le principe de l'intervention d'un décret en Conseil d’État concernant les mécanismes destinés à attirer les professionnels de santé.
En effet, en l’absence de mécanismes modérateurs, les stratégies locales pourraient considérablement accroître les inégalités territoriales – les collectivités les plus riches pouvant verser des aides plus importantes – et les effets d’aubaine dont bénéficient les professionnels de santé courtisés.
M. Raphaël Schellenberger. Nous en sommes tous d’accord, la démographie médicale est problématique dans un certain nombre de territoires mais rarement dans ceux qui sont financièrement attractifs en raison des activités et des services qu’ils proposent, ce qui ne justifie pas la politique que vous préconisez.
Vous alourdissez en effet les procédures en retirant aux collectivités territoriales une possibilité d’action alors que nous sommes déjà confrontés à un certain nombre de lourdeurs institutionnelles en matière d’installation médicale, auxquelles les grands corps de l’État se montrent assez poreux.
La commission adopte les amendements.
Amendement CL1023 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous propose de supprimer l’alinéa 4 afin de revenir sur la disposition adoptée par le Sénat, notamment parce que les modalités de classement des établissements d’enseignement public de la musique, de la danse et de l’art dramatique ont vocation à rester du ressort de l’État afin d’assurer une cohérence nationale.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur Schellenberger, nous rétablissons des dispositions supprimées par le Sénat qui sont fort utiles.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL1024 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de permettre à l’État d'accomplir sa mission de garant de l’unicité du système de transport ferroviaire.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques CL558 de M. Raphaël Schellenberger et CL613 de M. Paul Molac.
M. Raphaël Schellenberger. Proposé par Régions de France, cet amendement vise à ce que le périmètre des zones de revitalisation rurale (ZRR) soit établi par délibération du conseil régional et non plus par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de l’aménagement du territoire, ce qui semble logique dès lors que les régions ont des prérogatives en matière de planification et qu’elles élaborent des documents importants tels que les schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) et les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET).
M. Paul Molac. La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a modifié la définition des ZRR et j’ai parfois un peu de mal à m’y retrouver. Des zones qui n’y figuraient pas s’y retrouvent désormais sans pour autant avoir besoin du même accompagnement que des zones qui connaissent de vraies difficultés. Pire : les industriels qui s’y trouvent préfèrent parfois « délocaliser » leur activité vers la ville centre, à une vingtaine de kilomètres, alors que ces zones devraient pouvoir maintenir une activité industrielle soutenue.
M. Bruno Questel, rapporteur. Un classement en ZRR permet de bénéficier d’exonérations sociales et fiscales qui relèvent du budget de l’État, lequel doit donc avoir son mot à dire dans la procédure. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Autrement dit, ce serait inconstitutionnel.
La commission rejette les amendements.
La commission adopte l’article 2 bis modifié.
Article 3 (art. L. 1111-8, L. 1111-9-1, L. 1511-2 et L. 4221-1-1 du code général des collectivités territoriales) : Conférences territoriales de l’action publique
Amendements identiques CL1025 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL1181 de M. Christophe Euzet et CL1365 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Rémy Rebeyrotte. Il s’agit simplement de rétablir l’article 3 dans la rédaction initiale du projet de loi.
M. Raphaël Schellenberger. Nous revenons considérablement sur les travaux du Sénat alors que certains d’entre eux méritent d’être discutés d’une manière plus approfondie.
Dans la rédaction du Sénat, cet article rappelle – enfin ! – ce qu’est vraiment la subsidiarité, trop souvent confondue avec le « grand mouvement » de la décentralisation lancé en 1982 et la possibilité, pour l’État, de confier à des collectivités territoriales l’exercice d’un certain nombre de compétences. Or la subsidiarité, ce n’est pas aller du haut vers le bas mais du bas vers le haut. Si elle était appliquée sur le plan européen comme elle l’est en France, nous la jugerions insupportable !
Cet article défend au contraire une vision moderne de la subsidiarité de telle sorte, par exemple, que des EPCI puissent confier une compétence au département.
La commission adopte les amendements et l’article 3 est ainsi rédigé.
En conséquence, tous les autres amendements portant sur l’article tombent.
Après l’article 3
Amendement CL1103 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Paul Molac. La loi reconnaît à plusieurs reprises le statut d’autorité organisatrice à différents niveaux de collectivités locales, l’exemple le plus emblématique étant celui des autorités organisatrices des mobilités (AOM) défini dans le code des transports.
Ce statut permet aux régions, départements et intercommunalités d’être reconnus comme les autorités en charge de l’exercice de la politique publique de la mobilité. Il permet notamment aux AOM de définir des règlements en matière de mobilité et d’être obligatoirement associées par le chef de file lorsque celui-ci édicte un document de planification. En contrepartie, les AOM sont pleinement responsables de leurs interventions.
Chaque répartition des compétences entre collectivités publiques est un exercice périlleux. Si la technique du « jardin à la française » est reconnue dans le monde en matière de botanique, elle s’applique assez mal à notre organisation institutionnelle. Le législateur y est parvenu dans le champ de la mobilité, comme dans celui du développement économique, grâce à l’articulation entre un niveau en charge de la mise en œuvre opérationnelle de la compétence et, à un autre, de la stratégie globale et de la coordination.
Cet amendement vise à permettre d’étendre cette organisation à d’autres politiques publiques en définissant dans la loi la notion d’autorité organisatrice. Cette dernière doit reposer sur deux piliers : une collectivité ou un groupement exerce une responsabilité d’autorité organisatrice lorsqu’elle est en charge d’un service public déterminé, dont elle a la responsabilité exclusive, ou lorsqu’elle dispose d’une responsabilité de planification fixée par le législateur ; toute réglementation nationale ou tout document de planification régional ayant pour effet d’encadrer les responsabilités d’une autorité organisatrice, voire de lui imposer des obligations et charges supplémentaires, font l’objet d’une concertation approfondie, déterminée par la loi, avec leurs représentants.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement revient à donner des injonctions aux pouvoirs réglementaire et législatif. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je précise que les AOM ont succédé aux autorités organisatrices de transport (AOT) et que le texte reconnaît les autorités organisatrices de l’habitat (AOH). Il conviendra bien évidemment d’encadrer ces dispositions.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL796 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Si les politiques de tourisme sont partagées entre l’État et les collectivités territoriales, chacun s’accorde sur la nécessité de les coordonner, particulièrement au niveau de ces dernières.
Comme le projet de loi initial de la loi NOTRe l’avait prévu, nous proposons de confier à la région un rôle de chef de file chargé d’organiser les modalités de l’action commune des collectivités et de leurs groupements dans ce domaine. À cet effet, elle serait chargée d’élaborer un projet de schéma régional de développement touristique fixant les objectifs stratégiques d'aménagement, de développement et de promotion touristiques des destinations de la région, établi en concertation avec l'ensemble des collectivités et de leurs groupements compétents, puis débattu dans le cadre de la conférence territoriale de l’action publique (CTAP). Ce schéma tiendrait lieu de convention territoriale d’exercice concerté de la compétence tourisme et prévoirait, à ce titre, l’articulation des interventions des collectivités entre elles dans ce domaine.
M. Bruno Questel, rapporteur. Vous proposez en effet de rétablir l’article 4 du projet de loi NOTRe, qui avait été supprimé en commission mixte paritaire par nos collègues sénateurs, le Sénat n'ayant pas souhaité remettre en question les actions importantes menées par chaque échelon local à partir de cette compétence partagée. Je m'en remets donc sur ce point à sa grande sagesse et émets un avis défavorable à l’adoption de votre amendement.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le tourisme a en effet été reconnu comme une compétence partagée car il est parfois nécessaire qu’une ou deux régions conduisent cette politique, comme tel est le cas pour les châteaux de la Loire, mais il n’en est pas de même pour une commune comme Deauville, qui se suffit à elle-même. De plus, la région a la possibilité d’élaborer des schémas. Demande de retrait.
M. Paul Molac. C’est la politique que nous menons déjà en Bretagne, où la CTAP élabore des destinations touristiques. Nous y associons d’ailleurs le département de la Loire-Atlantique, le cinquième département breton où se trouve la grande capitale de la Bretagne, Nantes !
L’amendement est retiré.
Amendement CL569 de M. Raphaël Schellenberger.
M. Raphaël Schellenberger. Il s’agit de conforter la compétence touristique de la Collectivité européenne d’Alsace en lui permettant non seulement de « promouvoir » le tourisme mais aussi de le « favoriser », donc, de pouvoir intervenir directement auprès des entreprises de l’économie touristique.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article L. 4221-1 du CGCT donne au seul conseil régional la compétence pour promouvoir le développement économique. Vous souhaitez donc introduire une mesure de différenciation au profit de la Collectivité européenne d’Alsace.
La loi du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d’Alsace lui a confié une compétence spécifique en matière de coordination transfrontalière en raison de sa situation géographique singulière. En revanche, je ne vois pas d’élément tangible concernant l’économie touristique et culturelle de la région. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis, et M. Schellenberger sait bien pourquoi.
M. Raphaël Schellenberger. Nous avons déjà beaucoup discuté de cette question lorsque nous avons débattu de la loi d’août 2019 mais les spécificités de l’Alsace sont évidentes, qui font d’elle une destination touristique à part entière : marchés de Noël, typicités des paysages, etc. Je rappelle que l’Alsace a souvent été distinguée sur le plan mondial comme une destination touristique singulière.
La collectivité qui épouse ses contours et porte son nom doit pouvoir intervenir dans le champ touristique, non seulement pour le promouvoir mais pour préparer l’avenir et développer son territoire.
La commission rejette l’amendement.
Amendements CL621 et CL622 de M. Paul Molac (discussion commune).
M. Paul Molac. Dans un souci de souplesse et d’efficacité, le conseil régional peut déléguer au président de nombreux pouvoirs, qui sont notamment listés à l’article L. 4221-5 du CGCT. En revanche, le président ne peut, en l’état actuel du droit, recevoir délégation du conseil pour l’octroi des aides aux entreprises. Or ces dernières ont le plus souvent besoin d’être fixées rapidement quant à la possibilité de bénéficier de contributions financières de la région pour le montage ou la mise en œuvre de leurs projets. Ce besoin de réactivité n’est toutefois pas toujours compatible avec un examen des décisions d’octroi des aides par l’assemblée délibérante.
C’est pourquoi, afin de fluidifier les procédures d’instruction et d’attribution des aides aux entreprises, il est proposé, comme cela avait été prévu pendant la crise sanitaire, d’introduire dans le droit commun la faculté pour le conseil régional de déléguer au président sa compétence d’octroi des aides. En revanche, la compétence pour fixer les règles d’attribution relèverait toujours, comme actuellement, du seul organe délibérant, le président demeurant lié par le cadre préalablement défini par l’assemblée.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’émettrai également un avis défavorable. Vous proposez que le président puisse attribuer des aides aux entreprises allant jusqu’à 100 000 euros, ce qui me paraît beaucoup. Par ailleurs, je crois qu’il ne faut pas retirer à l’assemblée délibérante sa capacité de décision. Enfin, une telle disposition pourrait mettre en danger les présidents, par les temps qui courent.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CL740 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Jean-Félix Acquaviva. Nous proposons de modifier la composition de la chambre des territoires de la collectivité de Corse. Cette instance consultative a été introduite par la loi NOTRe et par l’ordonnance du 21 novembre 2016 qui ont fusionné, en une collectivité unique, la collectivité de Corse, les deux départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse et la collectivité territoriale de Corse.
Dès son installation, les membres de cette nouvelle assemblée ont fait état d’un déséquilibre en son sein et proposé au gouvernement de l’époque une composition différente. Un consensus s’est dessiné pour dire qu’il fallait faire plus de place aux maires, ce qui va dans le sens de la loi « engagement et proximité », ainsi qu’aux présidents des intercommunalités, afin que tous les territoires de l’île participent à la définition des politiques publiques de la collectivité de Corse.
En mai 2021, l’Assemblée de Corse a adopté une délibération en ce sens, après avoir consulté les associations de maires ; le consensus était total. Nous souhaiterions que ce projet de loi intègre cette modification, afin que la collectivité de Corse soit une collectivité décentralisée, conformément au souhait initial du législateur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je m’apprêtais à émettre un avis favorable sur votre amendement, car je sais qu’il est fondé, justifié et adapté aux besoins de représentativité des maires sur le territoire insulaire. Toutefois, à la demande du Gouvernement, je vais vous demander de le retirer, car il nécessite une réécriture.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il est absolument nécessaire de réécrire cet amendement, même si nous sommes d’accord sur le fond. Le président de la collectivité est mentionné deux fois, en tant que président de l’exécutif et en tant que président du comité de massif, ce qui est problématique.
L’amendement est retiré.
Article 3 bis A (art. L. 5215-20, L. 5215-20-1 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales) : Exercice de la compétence « promotion du tourisme » par les communes
Amendements identiques CL1026 de M. Bruno Questel, rapporteur CL371 de M. Hervé Saulignac, CL922 de M. Jean-René Cazeneuve, CL1107 de M. Paul Molac et CL1366 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Paul Molac. Avec ce nouvel article introduit par le Sénat, les communes membres d’une communauté urbaine ou d’une métropole et reconnues « communes touristiques érigées en stations classées de tourisme » pourraient décider de conserver ou de retrouver l’exercice de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme ». Le groupement conserverait, concurremment à ladite commune et sur son territoire, l’exercice de cette même compétence, à l’exclusion de la création d’offices de tourisme.
Ce nouvel article vise directement des territoires qui se sont récemment transformés en communauté urbaine ou en métropole. Or les élus ont adopté ce statut en connaissance de cause. Un tel retour en arrière risquerait de déstabiliser l’ensemble des communautés urbaines et des métropoles. Même s’il ne s’agirait que d’une faculté, une minorité d’élus pourrait décider de lancer le débat, ce qui ne manquerait pas de ralentir la mise en œuvre des projets métropolitains. En outre, lors de chaque renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, les nouveaux élus pourraient relancer le débat sur la répartition des compétences entre communes et intercommunalité.
Par ailleurs, cette disposition nécessiterait de revoir les dotations de ces groupements. Si leurs compétences sont moins nombreuses, il n’y aurait plus de raison pour que leurs dotations soient plus élevées que celles d’une communauté d’agglomération.
Cette disposition va à l’encontre de la recherche de stabilité réclamée par l’ensemble des associations d’élus locaux.
M. Hervé Saulignac. Penser la promotion d’une commune, si touristique soit-elle, indépendamment de son environnement, cela a pu marcher par le passé, mais ce n’est plus le cas. Désormais, une ville comme Annecy, par exemple, ne vaut que par le massif alpin et les communes qui l’environnent.
Cet article introduit par le Sénat consacrerait une forme de repli territorial et nous ferait perdre en efficacité. C’est pourquoi nous demandons sa suppression.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable aux amendements identiques.
M. Raphaël Schellenberger. Il me semble que vous idéalisez un peu la manière dont peuvent s’exercer certaines compétences à l’échelle d’une communauté urbaine ou d’une métropole. Vous oubliez qu’en matière de tourisme, le choix d’une telle échelle peut nuire à la ville centre ou à de plus petites villes, même si elles sont le fleuron touristique du territoire. On peut comprendre la volonté d’intégration pour les communautés urbaines ou les métropoles, mais le développement et la promotion touristique sont des compétences vraiment particulières, en ce qu’elles sont souvent attachées à un lieu ou à une spécificité qui est tellement localisée qu’elle ne correspond à aucun découpage administratif. Il me semble donc nécessaire de laisser de la liberté aux communes. Je m’étonne que M. Paul Molac soit défavorable à cette mesure qui renforcerait la liberté des pouvoirs locaux. Cela ne me semble pas très cohérent.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de rester cohérent avec ce que nous avons voté ensemble dans la loi « engagement et proximité ».
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 3 bis A est supprimé et l’amendement CL1118 de M. Stéphane Peu tombe.
Article 3 bis B (art. L. 5224 du code général des collectivités territoriales) : Déséquilibres du tissu commercial de proximité à l’intérieur du périmètre d’un schéma de cohérence territorial
Amendements identiques CL1027 de M. Bruno Questel et CL524 de la commission du développement durable.
M. Jean-Claude Leclabart, rapporteur pour avis de la commission du développement durable. L'article 3 bis B introduit par le Sénat propose qu’en cas de « déséquilibre du tissu commercial » dans le périmètre d’un schéma de cohérence territoriale (SCoT), les groupements de collectivités territoriales consultent les syndicats de salariés et les organisations d’employeurs sur un encadrement des jours et heures d’ouverture de certains commerces. Or le code du travail comporte déjà des dispositions de concertation sur l’ouverture des commerces. Il est donc proposé de supprimer cet article.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 3 bis B est supprimé et les autres amendements portant sur l’article tombent.
Article 3 bis (art. L. 1111-8-1 du code général des collectivités territoriales) : Facilitation de la délégation de compétences entre l’État et les collectivités
Amendement CL1028 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je propose de supprimer l’article 3 bis, introduit par le Sénat, qui modifie la procédure applicable au mécanisme de délégation de compétence par l’État à une collectivité territoriale ou à un EPCI à fiscalité propre. Il supprime le décret de validation finale de la procédure au profit de la seule convention signée par le préfet.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. Je suis surpris que vous soyez favorable à la suppression de cet article, madame la ministre, car cette disposition était un parfait exemple de ce que devrait être la différenciation. Il convient que l’État puisse différencier les territoires, c’est-à-dire confier des compétences différentes à chacun d’entre eux en fonction des réalités locales, sans passer par des processus administratifs particulièrement longs, et en faisant confiance à ses représentants dans les territoires.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 3 bis est supprimé et l’amendement CL305 de M. Hervé Saulignac tombe.
Article 3 ter (art. L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales et art. L. 5311-3, L. 5311-3-1, L. 5312-3, L. 5312-4, L. 5312-10, L. 6123-3 et L. 6123-4 du code du travail) : Compétences des régions en matière d’emploi, de formation professionnelle et d’apprentissage
Amendement CL1129 de M. Sébastien Jumel.
M. Sébastien Jumel. Certains présidents de région sont des « Monsieur Plus » : ils essaient de faire à la place de l’État, et parfois plus mal que l’État – je pense à la Normandie, que je connais bien, mais je pourrais citer d’autres régions. J’ai rappelé dans mon intervention liminaire à quel point le principe d’égalité territoriale devant la loi était consubstantiel à l’adhésion à la République. Il faut veiller à ne pas dégrader ce qui fait République et ce qui fait l’unicité de la République. Permettre le transfert à la carte de compétences aussi déterminantes que celles liées à la formation – sachant que les régions sont déjà compétentes en la matière – me paraît préoccupant. Je propose donc de supprimer l’article 3 ter, pour ne pas aller trop loin dans la République éclatée façon puzzle.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous invite à retirer votre amendement au profit de mon amendement CL1029, qui propose une réécriture de l’article 3 ter. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Vous voulez supprimer l’article 3 ter, qui transfère la coordination du service public de l’emploi aux régions. Je suis d’accord avec vous sur le fond, mais je vous invite, moi aussi, à retirer votre amendement au profit de celui du rapporteur. Il paraît en effet souhaitable que Pôle emploi et les régions travaillent ensemble sur les programmes de formation – sans transfert de compétence.
M. Sébastien Jumel. Ma grand-mère aurait dit « C’est moins pire que si c’était mieux », donc je retire mon amendement.
M. Matthieu Orphelin. Ce qui est important, c’est que les conseils régionaux et l’État travaillent main dans la main sur ces questions. Trop de conseils régionaux essaient, comme celui des Pays de la Loire, de réinventer Pôle emploi, alors que ce qui importe, c’est la coordination des deux échelles.
L’amendement est retiré.
Amendement CL1029 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Mon amendement a très bien été présenté par Mme la ministre.
M. Raphaël Schellenberger. Coordonner, c’est bien mais, en matière de formation professionnelle, il faudrait aussi laisser une plus grande marge de manœuvre aux régions. Je sais que cela peut sembler contradictoire avec la réforme de la formation professionnelle, telle qu’elle a été menée jusqu’ici mais j’ai été interpellé par plusieurs petites structures de formation. Je ne parle pas d’entreprises de formation à but lucratif qui, à certains moments, ont pu être peu scrupuleuses, mais de structures de formation publiques ou soutenues par la collectivité, qui forment à des métiers de niche.
Je pense notamment aux métiers d’art ou à l’enseignement artistique spécialisé : ce sont des secteurs où il est déjà difficile de trouver un organisme de formation. Or, quand on en trouve un, il dépend généralement d’une collectivité territoriale. La réforme de la formation professionnelle fait que ces structures n’arrivent pas à être reconnues en tant que telles, alors même que les régions cherchent à monter des programmes d’emploi dans ces domaines, car ils assurent la transmission, dans le territoire et dans le temps, d’un savoir-faire particulier.
Je peux comprendre que vous ne vouliez pas d’une réforme systémique, mais nous pourrions laisser aux régions la possibilité d’agir en la matière. J’ai le sentiment, monsieur le rapporteur, que votre amendement ne va pas assez loin.
M. Christophe Jerretie. Vous écrivez, monsieur le rapporteur, que les régions « peuvent créer une instance régionale de coordination avec l’action de Pôle emploi ». Parce qu’il est essentiel de renforcer les interactions entre Pôle emploi, les formations d’apprentissage et les régions, je me demande s’il ne faudrait pas rendre cette création obligatoire : je propose que l’on y réfléchisse, d’ici à l’examen du texte en séance publique. Mais peut-être cette rédaction est-elle le fruit d’un compromis avec les acteurs locaux ?
M. Bruno Questel, rapporteur. Effectivement, le dialogue permet toujours d’avancer avec les associations d’élus locaux.
M. Thibault Bazin. Vous nous avez promis, avec ce projet de loi, un grand acte de la décentralisation...
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Justement, non !
M. Thibault Bazin. C’est pourtant ce que j’avais cru comprendre. Mais si vous proposez seulement un ajustement technique, faisons au moins en sorte qu’il soit adapté aux territoires.
Certains territoires ont de vraies spécificités régionales et je ne suis pas sûr que, tel qu’il est rédigé, l’article adopté par le Sénat garantirait la souplesse et la différenciation nécessaires pour développer des formations ad hoc, notamment dans les métiers d’art. La Lorraine et l’Alsace ont vraiment des spécificités en la matière.
M. Rémy Rebeyrotte. Ce serait une bonne chose que les intercommunalités puissent elles aussi intervenir. Je ne sais pas à quel niveau cela doit se faire, certainement pas au niveau de la direction, mais les réflexions en cours doivent associer les intercommunalités et les territoires, aux côtés des régions.
C’est déjà le cas en matière économique mais il est absolument indispensable que ce soit aussi le cas en matière de formation, aux côtés de Pôle emploi. Il me semble que la région n’est pas la plus à même d’estimer les besoins de formation d’un territoire : elle reste un peu lointaine et il importe qu’elle dialogue avec ses intercommunalités pour savoir de quels plans de formation les territoires ont besoin. Le couple constitué par les régions et les intercommunalités s’impose désormais dans bien des domaines, en particulier dans celui de la formation.
M. Bruno Questel, rapporteur. Moi qui habite la même région que M. Sébastien Jumel, je peux vous dire que l’actuel président de région réunit les intercommunalités pour aborder ces questions. Cela relève aussi de la libre administration des collectivités locales.
M. Ludovic Mendes. Dans la région Grand-Est, l’Alsace et la Moselle ont un droit spécifique, qui a aussi des effets sur la formation et l’emploi. Le caractère frontalier de la région pose également des questions particulières en matière de formation. Dans ce contexte, faire intervenir les départements et les EPCI serait effectivement une bonne chose : cela aurait un véritable impact au niveau du territoire.
La commission adopte l’amendement et l’article 3 ter est ainsi rédigé.
Article 3 quater (art. L. 1251-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales et art. 78 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles) : Comité État-régions
Amendements identiques CL1030 de M. Bruno Questel et CL1368 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 3 quater, adopté par le Sénat, pourrait s’entendre s’il n’existait pas déjà des associations d’élus et si les gens ne se parlaient pas dans la vraie vie. En l’occurrence, il est superfétatoire. Je propose donc de le supprimer.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 3 quater est supprimé.
Article 3 quinquies (art. L. 4124-1 du code général des collectivités territoriales) : Facilitation de l’inscription à l’ordre du jour d’une fusion d’une région et des départements qui la composent
Amendement CL1119 de M. Stéphane Peu.
M. Sébastien Jumel. Nous souhaitons revenir sur un ajout adopté au Sénat, qui assouplit la procédure permettant la fusion en une collectivité unique d’une région et de ses départements.
Cela paraîtra peut-être ringard aux représentants du nouveau monde, mais je suis profondément attaché à la commune, comme pilier de la République. Je suis nostalgique d’un État qui protège, d’un État stratège, qui aménage et planifie, d’un État qui prend soin de la population, quel que soit l’endroit où l’on habite. Je suis profondément attaché, enfin, au couple que forment la commune et le département, car c’est lui qui peut répondre, au plus près, aux besoins de la population. C’est la raison pour laquelle je combats tout ce qui est de nature à effacer le département à l’insu de son plein gré.
M. Bruno Questel, rapporteur. Heureusement que M. Acquaviva n’est plus là, parce que vous l’auriez contrarié. La collectivité territoriale de Corse a vu disparaître ses deux départements et je crois comprendre que tout se passe bien. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis.
M. Paul Molac. Je n’idéalise rien et je regarde les choses telles qu’elles sont, y compris l’État, avec ses forces et ses faiblesses. Si des collectivités locales sont d’accord pour fusionner en une seule, je ne vois pas de quel droit on les empêcherait de le faire. Ce n’est pas plus compliqué que cela.
Des personnes militent en Bretagne pour que nous ayons une collectivité locale rassemblant les compétences de la région et des départements. Cela supposerait sans doute de changer le fonctionnement de la collectivité régionale, le nombre de conseillers régionaux et leur mode d’élection, qui pourrait associer un scrutin de liste et un vote par circonscription, afin d’assurer à la fois la représentation politique des partis et celle des territoires. Sachez que l’on y songe, même s’il paraît compliqué de faire fusionner cinq départements en une seule collectivité. En tout cas, je ne vois pas l’intérêt de supprimer cet article.
M. Raphaël Schellenberger. Cet article ne fait que perfectionner la loi de réforme des collectivités territoriales de 2010, qui a donné la possibilité aux régions de fusionner avec leurs départements. À l’époque, cette fusion n’était possible que si une série de conditions étaient remplies : des délibérations concordantes, une consultation de type référendaire des habitants et une majorité qualifiée, tant à l’échelle de la région que de chaque département, avec un seuil de participation minimal.
En 2013, alors que 57% des Alsaciens s’étaient prononcés en faveur de la fusion de leurs deux départements et de la région Alsace, cette fusion n’a pas eu lieu, parce que toutes ces conditions n’étaient pas satisfaites. Cet amendement aurait été pertinent avant le grand découpage régional, qui a créé de très grandes régions : je ne vois que peu d’exemples, aujourd’hui, de régions qui pourraient vouloir fusionner avec leurs départements. Mais comme on n’est jamais à l’abri d’une bonne nouvelle, je préfère que l’on inscrive cette possibilité dans la loi. On peut très bien envisager un nouveau redécoupage en régions plus petites, qui faciliterait ce type de fusion.
M. Sébastien Jumel. À cette heure-ci, la dialectique de notre collègue de droite m’échappe un peu… La loi NOTRe a servi d’accélérateur au déménagement du territoire, à la métropolisation des régions, à l’éloignement des villes moyennes et du milieu rural. Les grandes métropoles aspirent l’ensemble des services de l’État, qui connaissent si mal le terrain qu’ils doivent regarder Google maps pour instruire des dossiers de fermeture de classe ou de permis de construire.
L’avis des gens compte ! Dans ma circonscription, des maires ont été balayés aux municipales parce que les habitants n’avaient pas été consultés sur la création de communes nouvelles. C’est à la fois rassurant et inquiétant, car ces pratiques où les élus décident entre eux, parce qu’ils sont supposément les seuls à comprendre les enjeux, peuvent ouvrir un boulevard aux ennemis de la République. Partout où les choses se font sans les gens, la République recule.
C’est pourquoi je suis très attaché à ce que la loi, et les principes démocratiques, encadrent les mécanismes de fusion.
M. Thibault Bazin. Il faudrait que cet article vise des cas concrets, sans quoi il pourrait créer un doute, introduire une instabilité. Une fusion entre région et départements peut avoir du sens si l’on recherche l’efficacité et la proximité, mais il faut qu’on puisse la justifier et que les périmètres soient pertinents.
Comme Sébastien Jumel, je crois dans les cellules de base de la démocratie que sont la commune et le département. Le problème, ce sont les EPCI et les régions taille XXL : ils risquent de susciter, comme l’Europe, la défiance. Avec ces articles, nous devons chercher à résoudre la crise de confiance des citoyens dans les collectivités.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je voudrais ramener le débat à sa juste mesure en rappelant que cet article, introduit par un amendement au Sénat, vise à abaisser à 5 % la proportion de conseillers départementaux qui peuvent lancer l’initiative de fusion. Il ne concerne que le début du processus.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 3 quinquies non modifié.
Après l’article 3 quinquies
Amendement CL875 de M. Yannick Kerlogot.
M. Yannick Kerlogot. Vous avez expliqué, monsieur le rapporteur, qu’il n’était pas question de bouleverser les équilibres issus de la loi NOTRe ; c’est le sens de l’allocution du Président de République, qui a rappelé aux maires réunis en congrès que, conformément à ses engagements de candidat, son mandat n’aura pas connu de grandes réformes institutionnelles, excepté les changements apportés par les élus eux-mêmes – à l’image de la création de la collectivité européenne d’Alsace.
Toutefois, plusieurs années après le redécoupage des régions, les citoyens continuent de se mobiliser. En 2019, une pétition signée par 105 000 habitants de Loire-Atlantique réclamait qu’un référendum soit organisé sur le retour de ce département au sein de la région Bretagne. Il est important que les parlementaires entendent cette demande. Notre amendement, qui relaie une proposition de l’association « À la Bretonne ! », rappelle que le débat n’est pas clos.
Il s’agit d’ouvrir la voie à une correction à la marge du découpage des régions en permettant aux départements de changer de région, après consultation des électeurs du département sortant, accord de la région d’accueil et avis simple de la région de sortie.
M. Bruno Questel, rapporteur. Le redécoupage des régions est incontestablement une mauvaise réforme, tant les conditions dans lesquelles il a été effectué sont discutables – excepté pour la Normandie, puisque les deux régions ont fusionné de manière naturelle, selon le vœu de nombreux élus, y compris ceux présents dans cette salle…
Toutefois, et conformément aux engagements du Président de la République, nous n’entendons pas le réviser, même localement. Il ne peut y avoir d’exception à cela – y compris pour la Bretagne.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’article L. 4122-1-1 du CGCT autorise un département et deux régions contiguës à demander une modification des limites régionales visant à inclure le département dans le territoire de la région limitrophe. Or jamais les assemblées du conseil départemental de Loire-Atlantique et du conseil régional de Bretagne n’ont fait usage de cette faculté.
M. Matthieu Orphelin. Le référendum organisé en Loire-Atlantique est sans conteste un élément important de la réflexion sur le retour d’une Bretagne à cinq départements. Mais ce qui me gêne dans cette proposition de l’association « À la Bretonne ! », c’est qu’elle ne prévoit pas de consultation des habitants des autres départements de la région de sortie. Quel que soit le redécoupage concerné, il ne peut y avoir deux classes de citoyens.
Il faudrait que les deux régions administratives concernées, la Bretagne et les Pays-de-la-Loire commencent par mieux travailler ensemble. Il est lamentable de constater à quel point cela leur est difficile alors qu’il y a tant de choses à faire concernant les transports ou la recherche !
M. Sébastien Jumel. Au début du mandat présidentiel, la réforme était un principe irréfragable, c’était « Vous allez voir ce que vous allez voir ! » ; désormais, le macronisme s’apparente à du Raymond Barre revisité, c’est « il faut mettre un frein à l’immobilisme » ! Être macroniste, aujourd’hui, consiste à ne surtout pas faire peur à qui que ce soit en engageant une réforme. Voyez comme, s’agissant de la pêche, la France s’est couchée à la première quinte de toux anglaise… Le souffle du Nouveau monde s’est éteint.
Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Centrez vos propos sur les amendements, monsieur Jumel, et vous serez plus convaincant.
M. Paul Molac. Je dois le vérifier mais il me semble, madame la ministre, que le droit d’option prévu par la loi NOTRe s’est éteint en 2021.
La pétition pour que soit organisée une consultation de la population de Loire-Atlantique sur le retour du département en Bretagne, portée par l’association Bretagne réunie, a recueilli 105 000 signatures, soit un peu plus de 10 % des habitants. Il est important que cette demande aboutisse : dois-je rappeler que le non-respect d’un référendum précédent – sur la construction d’un aéroport… – a créé un certain traumatisme ?
Le département de Loire-Atlantique et la région de Bretagne en ont appelé au Président de la République. Il existe donc bien une demande de la part des deux collectivités. Je voterai cet amendement car, même si la région Pays-de-la-Loire refuse de voir la Loire-Atlantique retourner dans sa région d’origine, il me semble que c’est d’abord aux citoyens du département d’en décider.
M. Raphaël Schellenberger. Même si la littérature sur la question est très abondante, j’ignorent ce que ressentent les Bretons et, en bon décentralisateur et tenant des pouvoirs locaux, je ne me sens pas légitime à exprimer mon point de vue sur le retour de la Loire-Atlantique en Bretagne.
Je réagirai cependant à vos propos, monsieur le rapporteur. Vous expliquez que le redécoupage des régions a été mal fait, que c’est une erreur majeure du quinquennat socialiste, mais vous répétez depuis quatre ans – je reconnais votre constance – que la majorité n’y changera rien. Sébastien Jumel a raison : lorsqu’une réforme est mauvaise, vous vous précipitez pour ne pas la corriger !
M. Bruno Questel, rapporteur. Cher collègue, nous avons tous les deux mené une mission d’information sur l’évaluation de l’impact de la loi NOTRe et fait le constat du mauvais découpage d’un certain nombre de régions. Nous avons aussi préconisé de procéder à une évaluation de l’impact humain et financier préalablement à une nouvelle réforme de la carte, non de faire du cas par cas, dans une visée clientéliste.
La commission rejette l’amendement.
Article 4 (art. L. 1112-16 et L. 1821-1 du code général des collectivités territoriales) : Modalités d’organisation d’une consultation locale des électeurs dans les collectivités territoriales
Amendement CL1031 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je propose que le conseil municipal ou le bureau de l’assemblée délibérante se prononce sur la recevabilité de la pétition et, si elle est recevable, que le maire ou le président de l’assemblée délibérante en fasse rapport lors de la prochaine réunion.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques CL372 de M. Hervé Saulignac et CL1369 de Mme Émilie Chalas.
M. Hervé Saulignac. La loi prévoit qu’un électeur ne peut signer qu’une seule demande tendant à l’organisation d’une consultation par une même collectivité territoriale. Nous proposons de supprimer cette disposition absurde, qui constitue une limitation à la liberté des citoyens d’exercer leur droit de pétition.
M. Bruno Questel, rapporteur. Le souci légitime de favoriser la participation citoyenne ne doit pas conduire à paralyser l’action publique. Le risque est que les électeurs en viennent à harceler les élus. Dans les petites communes, en particulier, il n’est pas très difficile d’atteindre le seuil de signataires requis.
En tout état de cause, il ne faudrait pas que le nombre de demande par électeur excède, par année, celui des réunions de l’assemblée délibérante. Je vous propose de retirer vos amendements afin que nous travaillions ensemble à une rédaction aboutie en vue de la séance, en concertation avec le cabinet.
M. Rémy Rebeyrotte. Je retire l’amendement CL1369.
M. Hervé Saulignac. Lorsque le rapporteur parle de harcèlement des élus, il exprime une crainte à l’égard de nos concitoyens à laquelle je refuse de m’associer ! Je maintiens l’amendement.
M. Matthieu Orphelin. Entre le risque de harcèlement des élus – une formule étrange – que le rapporteur met en avant et la proposition tout à fait légitime de nos collègues, nous pouvons trouver un compromis. Il est important de renforcer la possibilité qu’ont les citoyens de participer à la démocratie.
M. Bruno Questel, rapporteur. Ce harcèlement existe dans la vraie vie ! Sans vouloir entrer dans les détails, il m’est arrivé plus d’une fois, dans mon activité professionnelle, de traiter ce genre de question. On ne peut laisser se multiplier les pétitions, ces débordements sont dus à la nature humaine. Il nous faut trouver un juste milieu et poser un cadre : c’est bien la raison pour laquelle j’ai proposé de retravailler la rédaction de ces amendements.
L’amendement CL1369 est retiré.
La commission rejette l’amendement CL372.
Amendement CL67 de M. Matthieu Orphelin.
M. Matthieu Orphelin. Tout ce qui favorise la participation citoyenne dans les décisions et dans les débats est bienvenu. Nous proposons que les collectivités territoriales assurent la promotion de ce dispositif de participation citoyenne, encore trop méconnu.
M. Bruno Questel, rapporteur. J’ai toute confiance dans le tissu associatif pour qu’il assure lui-même son autopromotion. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cette proposition, fort louable, n’a pas de caractère normatif.
M. Matthieu Orphelin. La réponse de la ministre est amusante car elle sait bien que des milliers de dispositions sans portée législative ont pourtant été inscrites dans la loi ces cinq dernières années !
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 4 modifié.
Après l’article 4
Amendements identiques CL244 de M. Thibault Bazin, CL363 de M. Hervé Saulignac, CL654 de M. Sébastien Jumel et amendement CL798 de M. Xavier Breton (discussion commune).
M. Thibault Bazin. Cette nouvelle rédaction des dispositions du CGCT relatives à la consultation citoyenne permet de renforcer la démocratie de proximité. Elle lève notamment l’ambiguïté sur la possibilité d’y recourir dans le cas d’un projet de regroupement au sein d’une collectivité unique – le sujet est à nouveau soulevé depuis le renouvellement des conseils municipaux. Il convient de préciser à quel moment cette procédure prend place et si les résultats de la consultation citoyenne engagent les conseils municipaux.
Monsieur le rapporteur, j’espère que vous considérerez avec bienveillance cette proposition et que vous ne lui réserverez pas le même sort qu’aux articles issus du Sénat.
M. Sébastien Jumel. Cela peut paraître bizarre pour les élus des métropoles, mais la République c’est une mairie, une école et même, dans certains villages, une église – et c’est un coco qui vous le dit !
Ceux qui ne l’ont pas compris ont créé des mastodontes intercommunaux, éloignés de tout et auxquelles on ne comprend rien ; ils ont, en créant des communes nouvelles, effacé cette identité qui fait la France. Ce faisant, ils ont participé à l’aggravation de la fracture entre les citoyens et la puissance publique. Vous pouvez trouver cela ringard, mais c’est ma vie : chez moi, les gens sont attachés à leur commune, à leurs racines.
Je le dis avec gravité : je ne veux pas qu’on laisse cela aux ennemis de la République. S’offrir le luxe de fusionner les communes sans consulter les citoyens est une erreur politique majeure.
Les maires ont affirmé leur attachement à la commune comme instance de démocratie vivante à Bourgtheroulde : nous y étions tous deux, monsieur le rapporteur – vous jouiez à domicile, j’étais là pour bousculer l’ambiance cosy du lancement du grand débat. Il faut préserver à tout prix cet échelon de la démocratie.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous remercie d’avoir fait référence au lieu où je suis né, où j’ai exercé et où j’habite toujours. Mais permettez-moi de corriger : il s’agit de Grand Bourgtheroulde, une commune nouvelle créée en application de la loi, après consultation de la population au moyen de plusieurs réunions publiques.
Ces amendements visent à permettre aux conseils municipaux de consulter les électeurs avant de délibérer sur la création d’une commune nouvelle, donnant ainsi un pouvoir de blocage à chaque commune dans les cas où le rejet des électeurs s’accompagne d’un vote négatif du conseil municipal.
Ils sont en partie satisfaits puisque les communes ont déjà la possibilité d’organiser des consultations, avant une décision dans des conditions de droit commun. Par ailleurs, s’il n’y a pas accord de tous les conseils municipaux et si au moins deux tiers des conseils municipaux sont favorables à la création de la commune nouvelle, une consultation électorale est organisée automatiquement. Il n’est pas souhaitable d’alourdir la procédure existante. Avis défavorable.
M. Thibault Bazin. Nous vous disons : meilleure prise en compte de l’avis des citoyens et des conseillers municipaux ; vous nous répondez : alourdissement. Nous ne sommes pas là pour alourdir ou simplifier – à ce compte, le régime le plus simple, c’est la dictature !
Dans certains endroits s’expriment des craintes, des angoisses, parce qu’il y a un problème d’adhésion et que les projets ne sont pas suffisamment concertés. Si nous avons proposé cet amendement – certes satisfait pour ce qui est de sa première partie –, c’est pour améliorer le dispositif existant.
M. Sébastien Jumel. Les Marcheurs ont pris des mauvaises habitudes – je ne parle pas du fonctionnement de cette commission, madame la présidente – : ils considèrent que la démocratie est une perte de temps.
M. Rémy Rebeyrotte. Alors qu’au parti communisme, on est démocrate !
M. Sébastien Jumel. La démocratie n’est jamais une perte de temps, elle peut même être gage d’efficacité.
M. Bruno Questel, rapporteur. Permettez-moi de préciser que Grand Bourgtheroulde compte non pas une, mais cinq églises et que sans la création de la commune nouvelle, trois d’entre elles n’auraient pu être rénovées.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CL863 de M. Yves Blein.
M. Cyrille Isaac-Sibille. Il convient d’intéresser davantage les citoyens aux décisions publiques locales. Si la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité garantit à tous les habitants d’une commune le caractère effectif du droit à en être informés, les règles encadrant la diffusion de l’information sont anciennes. Eu égard aux moyens numériques dont nous disposons, je propose que les citoyens soient systématiquement informés de l’ordre du jour des conseils municipaux.
M. Bruno Questel, rapporteur. Précisons que l’amendement prévoit la publication en ligne non seulement de l’ordre du jour mais aussi de la convocation et de la note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération. Il est en partie satisfait par l’ordonnance du 7 octobre 2021 portant réforme des règles de publicité, d’entrée en vigueur et de conservation des actes pris par les collectivités territoriales et leurs groupements, laquelle a réalisé des avancées importantes en la matière, en prévoyant notamment que le procès-verbal de chaque séance est arrêté au commencement de la séance suivante puis publié sous forme électronique de manière permanente et gratuite sur le site internet de la commune, lorsqu’il existe. Ce procès-verbal contient notamment l’ordre du jour, les délibérations adoptées et les rapports au vu desquels elles ont été adoptées.
Quant à la convocation, l’article L. 2121-10 du CGCT prévoit déjà qu’elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’ajoute qu’un des principes fondateurs du droit d’accès aux documents administratifs est la non-communication des documents préparatoires à une décision administrative : ce sont les documents finaux qui doivent être produits.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL873 de M. Yves Blein.
M. Cyrille Isaac-Sibille. Dans le même esprit, il convient que les séances des commissions permanentes soient publiques, sauf si deux membres ou le président s’y opposent.
M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable : dans sa décision du 14 janvier 1999 relative à la loi relative au mode d’élection des conseillers régionaux et des conseillers de l’assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, le Conseil constitutionnel a censuré des dispositions similaires, au motif qu’« en imposant aux débats de la commission permanente le principe de la publicité, plutôt que de laisser au règlement intérieur du conseil régional le soin de déterminer cette règle de fonctionnement, le législateur a restreint la libre administration d’une collectivité territoriale, au point de méconnaître les dispositions de l’article 72 de la Constitution ».
L’amendement est retiré.
Article 4 bis A (art. L. 5211-49 du code général des collectivités territoriales) : Modalités d’organisation d’une consultation locale des électeurs dans les établissements publics de coopération intercommunale
Amendement CL1371 de Mme Yaël Braun-Pivet.
M. Rémy Rebeyrotte. Il s’agit de faciliter l’utilisation des outils de démocratie locale en supprimant la limite annuelle d’une seule demande tendant à l’organisation d’une consultation au sein d’un EPCI par électeur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait en vue d’un travail en liaison avec le cabinet.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 4 bis A non modifié.
Après l’article 4 bis A
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CL781 de M. Thomas Rudigoz.
Article 4 bis B (art. L. 3633-2 du code général des collectivités territoriales) : Rôle de la conférence métropolitaine au sein de la métropole de Lyon
Amendement CL492 de M. Jean-Louis Touraine et sous-amendement CL1592 de Mme Blandine Brocard.
M. Jean-Louis Touraine. En septembre dernier, quarante-quatre des cinquante-neuf maires de la métropole de Lyon ont signé une tribune pour critiquer une gouvernance qu’ils considéraient comme « dogmatique et verticale ». Ils soulignaient notamment le fait que la majorité des communes n’est pas représentée au sein des instances délibératives de la métropole.
De fait, l’expérience montre qu’il serait nécessaire de mieux faire participer les maires aux décisions stratégiques de la métropole pour le territoire. Aussi le présent amendement vise-t-il à améliorer le fonctionnement de la conférence métropolitaine de manière à renforcer la démocratie locale. La conférence métropolitaine pourrait ainsi émettre un avis sur certains dossiers en amont de leur présentation devant le conseil de la métropole, où les maires ne siègent pas.
Mme Blandine Brocard. La métropole de Lyon dispose d’un statut unique, et ce depuis une date récente, puisque cela remonte à mars 2020. Elle est dotée d’un conseil élu au suffrage universel direct par un scrutin de listes à deux tours – de manière distincte du conseil municipal – et d’une conférence métropolitaine dans laquelle siègent les maires des cinquante-neuf communes constituant la métropole, les deux plus importantes étant Lyon et Villeurbanne. Le problème, c’est que dans le cadre de cette organisation, les communes les plus petites ne pèsent plus autant qu’elles pouvaient le faire auparavant, au sein du conseil de la métropole. Comme l’a dit Jean-Louis Touraine, il serait nécessaire de faire évoluer les choses sans pour autant bouleverser tout l’édifice, afin que la totalité des maires des cinquante-neuf communes aient voix au chapitre. Mon sous-amendement vise simplement à éviter tout effet contre-productif.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable sur l’amendement et le sous-amendement : si la modification du nom de la conférence et celle des modalités suivant lesquelles elle peut interpeller le conseil de la métropole ne semblent a priori pas soulever de difficultés, je suis plus que réservé sur les autres propositions. Il me semble en particulier délicat d’introduire une forme de dyarchie au sein de la métropole, à travers la « cohabitation », pour ainsi dire, de deux présidents, celui de la conférence des maires et celui de la métropole elle-même, car cela pourrait poser des problèmes de gouvernance et de lisibilité de l’action de la collectivité territoriale. En outre, je ne suis pas favorable à une redéfinition des règles de majorité. Il me semble préférable de maintenir les équilibres établis par la réforme de 2014.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je suis moi aussi défavorable à l’amendement et au sous-amendement, bien que certaines des propositions formulées ne me gênent pas fondamentalement – ainsi le changement de nom de la conférence ou la possibilité d’inscrire à l’ordre du jour du conseil de la métropole une résolution dès lors qu’un certain nombre de maires le demandent. Le reste me semble plus problématique.
Par ailleurs, une mission sénatoriale va être créée en vue d’évaluer la gouvernance de la métropole de Lyon : il serait sage d’attendre son rapport pour que l’on puisse travailler avec sérénité sur le sujet. S’il est certain que la gouvernance est à améliorer, en faisant participer l’ensemble des maires, on ne peut pas tout changer du jour ou lendemain, d’autant qu’il s’agit d’une collectivité à statut particulier, élue au suffrage universel direct.
M. Sébastien Jumel. Tiens, une fois qu’on a perdu la main, on s’aperçoit que les contre-pouvoirs ont du bon ? Pour le coup, je suis d’accord : c’est une question qui mérite d’être posée, et au-delà du cas spécifique de la métropole de Lyon, puisque, dans nombre d’intercommunalités – surtout depuis qu’on a réduit le nombre d’élus en leur sein –, des communes ne sont pas représentées. Étant profondément attaché à la commune, je souscris à cet amendement : la conférence des maires est une instance souveraine qui devrait être consultée à chaque fois que des questions de souveraineté communale sont en jeu.
M. Raphaël Schellenberger. Je trouve moi aussi que ces amendements sont intéressants et je suis surpris de la capacité de certains – notamment du rapporteur – à défendre de façon asymétrique la place des maires. Quand il s’agit de la Corse, on voudrait que les maires soient davantage entendus ; quand le résultat de l’élection du président de l’Association des maires de France ne va pas dans le sens souhaité, on dit que l’association n’est pas représentative parce que le principe « un maire, une voix » n’est pas juste ; quand on est à quelques mois d’une élection municipale où La République en marche présente des candidats, on fait une loi « engagement et proximité » pour revaloriser le rôle du maire ; mais pour Lyon, on voudrait continuer à cautionner un système dans lequel la majorité des maires sont dessaisis de leurs compétences habituelles au profit de la métropole et ne peuvent même pas émettre des avis sur les sujets qui les concernent !
Revoir le fonctionnement de la conférence des maires me semble une bonne idée, d’autant que ladite conférence ne dispose pas du pouvoir délibératif. Je ne vois pas en quoi le fait d’en confier la présidence à un maire élu par les autres maires plutôt qu’au président de la métropole créerait un déséquilibre manifeste. On a voulu encourager les conférences de maires par la loi « engagement et proximité », en soulignant que les préoccupations des communes et celles de l’intercommunalité n’étaient pas tout à fait les mêmes et que le président de la conférence des maires ne devait pas être nécessairement celui de l’EPCI, mais à Lyon, ce ne serait plus valable ? Je trouve l’amendement plutôt équilibré, car il permettrait de corriger une erreur sans remettre en cause le verdict des urnes.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il me semble avoir dit à peu près la même chose : nous sommes prêts à travailler sur cette question après que la mission d’information du Sénat aura remis son rapport.
M. Bruno Questel, rapporteur. Mon collègue Schellenberger usant facilement du procès d’intention, je vais clarifier ma position : l’adoption de l’amendement et du sous-amendement provoquerait un rééquilibrage institutionnel entre la conférence des maires et la métropole de Lyon, qui instaurerait une forme de dyarchie pour tout ce qui concerne l’organisation générale de la métropole. Vous savez très bien qu’on ne peut pas inscrire cela dans la loi.
La commission rejette successivement le sous-amendement et l’amendement.
Elle adopte l’article 4 bis B non modifié.
Après l’article 4 bis B
Amendement CL966 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille. Je propose que le conseil de la métropole élise en son sein un conseiller délégué pour chaque circonscription. L’élection s’effectuant à l’échelon de la circonscription, cela permettrait que chaque citoyen dispose d’un élu référent et que soit mieux articulés le travail entre les maires et le conseil de la métropole, sur le modèle des mairies d’arrondissement instaurés par loi « PLM ».
M. Bruno Questel, rapporteur. La représentation de chacune des circonscriptions est déjà permise par la loi : il revient au conseil de métropole de s’organiser ainsi. Aller au-delà irait à l’encontre du principe de libre administration des collectivités locales. Je peux comprendre les difficultés liées à l’exercice du mandat actuel, mais on ne peut modifier la loi pour en atténuer les effets.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il faudra examiner cela à l’issue du travail engagé par le Sénat.
M. Cyrille Isaac-Sibille. Il s’agit non pas de modifier le dispositif actuel, mais de prévoir un échelon intermédiaire. Dans le cas d’une collectivité de quelque 1,4 million d’habitants, les citoyens peuvent difficilement s’adresser directement au président de la métropole.
M. Raphaël Schellenberger. S’il importe d’apporter des modifications à la conférence des maires, qui sont des élus particuliers, je ne crois pas qu’il soit du ressort de la loi de définir en détail les modalités d’organisation du pouvoir exécutif. On n’en finirait pas : il faudrait aussi préciser que dans les conseils départementaux, il faut un vice-président par territoire, dans les conseils régionaux, un vice-président par département, etc. Laissons aux exécutifs la liberté de s’organiser comme ils le veulent, au risque que ce ne soit pas toujours optimal – mais que voulez-vous, ce sont les joies de la libre administration des collectivités territoriales !
La commission rejette l’amendement.
Amendements CL742 de Mme Blandine Brocard et CL1047 M. Cyrille Isaac-Sibille (discussion commune).
Mme Blandine Brocard. Nos amendements visent non pas à bouleverser l’équilibre institutionnel, mais à le parfaire, monsieur le rapporteur. Il s’agit d’un dispositif unique et très récent, que nous nous efforçons d’ajuster afin qu’il fonctionne le mieux possible et que les habitants de la métropole soient pleinement représentés au sein du conseil de la métropole, de même que les communes, à travers leur maire, au sein de la conférence métropolitaine, et cela quelle que soit leur taille.
Outre cette conférence métropolitaine, il existe des conférences territoriales des maires, qui n’ont d’autre fonction que de pouvoir être consultées par la métropole. Je propose qu’à l’instar de la conférence métropolitaine, et afin que tous les maires aient leur mot à dire, chaque conférence territoriale puisse demander l’inscription de certains sujets à l’ordre du jour du conseil de la métropole.
M. Cyrille Isaac-Sibille. Il importe en effet que chaque conférence territoriale puisse demander que soient abordés des sujets qui sont essentiels pour elle, comme les schémas de cohérence territoriale, les schémas de secteur, les plans locaux d’urbanisme, les programmes locaux d’habitat, les plans de mobilité, ou, au moins, qu’on lui demande son avis sur ces questions.
M. Bruno Questel, rapporteur. Madame Brocard, nous avons fait le choix de renforcer le pouvoir d’interpellation de la conférence des maires, qui me semble être l’échelon le plus approprié.
Monsieur Isaac-Sibille, c’est à la conférence métropolitaine qu’il revient d’émettre des avis, et non aux échelons inférieurs ; sinon, on n’en finirait pas et on se heurterait inéluctablement à des difficultés d’application sur le terrain.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je pense que l’amendement CL1047 est satisfait. Quant au CL742, il s’agit d’une proposition intéressante, mais qui doit s’inscrire dans une réflexion globale. Demande de retrait.
L’amendement CL1047 est retiré.
La commission rejette l’amendement CL742.
Amendement CL741 de Mme Blandine Brocard.
Mme Blandine Brocard. Sous l’impulsion de notre collègue Catherine Di Folco, sénatrice du Rhône, le Sénat a introduit la possibilité pour la conférence métropolitaine de demander, par une résolution adoptée à la majorité des deux tiers, l’inscription d’un sujet à l’ordre du jour du conseil de la métropole. Or l’article de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) instaurant la conférence métropolitaine prévoit que celle-ci rend ses avis à la majorité simple des maires représentant la moitié de la population totale des communes situées sur le territoire de la métropole de Lyon. Concrètement, cela signifie que des avis peuvent être adoptés avec les seules voix des maires de Lyon et Villeurbanne. Mon amendement vise, dans un souci d’harmonisation, à imposer la majorité des deux tiers pour toutes les décisions de la conférence métropolitaine.
M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable : nous avons déjà eu le débat à l’article 4 bis B.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Pour le coup, j’y suis défavorable.
Mme Blandine Brocard. Je ne comprends pas, madame la ministre : cette mesure est cohérente avec ce qui a été voté au Sénat, et elle est très mesurée. Ce que nous souhaitons, c’est éviter que deux énormes communes décident de tout, sans que les cinquante-sept autres aient voix au chapitre, comme c’est le cas depuis un an et demi. Il faut veiller à ce que certains sujets qui concernent plus spécifiquement certains territoires puissent eux aussi être débattus.
M. Sébastien Jumel. Je soutiens cet amendement, ne serait-ce que parce que la maire de Vénissieux m’en voudrait si je ne le faisais pas, mais je me demande si l’on aurait déposé des amendements du même type du temps de Gérard Collomb… Ce qui vous semble juste aujourd’hui ne l’était-il donc pas hier ?
M. Paul Molac. Compte tenu du fait majoritaire, la plus grande ville détient tous les pouvoirs et la conférence métropolitaine ne représente plus les territoires. Or, en démocratie, le fait majoritaire n’est pas suffisant. Dans de nombreux pays, les territoires sont pris en compte : ainsi, le Parlement allemand est composé de l’équivalent de notre assemblée nationale et d’une chambre des régions. Le problème vient peut-être du fait que le Sénat représente surtout les maires en général, et pas assez les petits maires et les élus des autres collectivités. Faire en sorte que notre système ne fonctionne pas uniquement selon le fait majoritaire, c’est être plus démocrate et même plus intelligent.
La commission rejette l’amendement.
Article 4 bis C (art. L. 5211-5-1 A du code général des collectivités territoriales) : Modalités de scission d’une intercommunalité
Amendements de suppression CL1032 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL923 de M. Jean-René Cazeneuve.
M. Bruno Questel, rapporteur. Dans le cadre d’un projet de partage d’une communauté de communes ou d’agglomération, il ne nous paraît pas opportun de déroger aux règles classiques de création des EPCI en prévoyant une situation de compétence liée du préfet pour fixer le périmètre de l’intercommunalité.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Thibault Bazin. Monsieur le rapporteur, l’exposé sommaire de votre amendement ne correspond pas du tout au dispositif proposé par le Sénat. L’article 4 bis C vise à simplifier la procédure en cas de délibérations concordantes sur un projet de périmètre d’EPCI, en prévoyant que le préfet se borne à prendre acte de cet accord. Vous dites que le préfet doit garder son pouvoir d’appréciation en la matière et vérifier que le nouveau périmètre envisagé ne porte pas atteinte aux équilibres des bassins de vie, mais si tout le monde est d’accord, je ne vois pas pourquoi il interviendrait ! Faisons confiance aux élus locaux, comme vous le souhaitez vous-même, et facilitons la vie des collectivités !
M. Bruno Questel, rapporteur. Si vous ne comprenez pas l’exposé sommaire de mon amendement, lisez celui de l’amendement CL307 de M. Saulignac, qui est identique au mien mais n’a pas pu être défendu. Il est sans doute plus intelligible pour vous.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 4 bis C est supprimé et les amendements identiques CL206 de M. Vincent Descoeur, CL245 de M. Thibault Bazin, CL314 de Mme Émilie Bonnivard, CL1085 de M. Jean-Félix Acquaviva et CL1333 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier tombent.
Article 4 bis D (art. L. 5211-19 du code général des collectivités territoriales) : Procédure de retrait d’une intercommunalité
Amendements de suppression CL1033 de M. Bruno Questel et CL924 de M. Jean-René Cazeneuve.
M. Bruno Questel, rapporteur. Le maintien de l’article 4 bis D affaiblirait inéluctablement les fondements des communautés d’agglomération.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. La suppression de cet article aurait pour effet de vider de sa substance l’intention du législateur dans la loi « engagement et proximité ». On ne peut pas affirmer que l’on permet à une commune de quitter un EPCI si l’on interdit dans le même temps à cet EPCI de passer en dessous d’un certain seuil de population. En somme, certaines communes seraient moins libres que d’autres. Admettez que le respect de ces seuils est un peu contraignant.
M. Sébastien Jumel. Imaginez que la ville centre d’une communauté d’agglomération de 50 000 habitants décide de se rattacher à une autre intercommunauté : ce faisant, elle fera nécessairement passer la communauté d’agglomération en dessous du seuil de 50 000 habitants. Cette liberté de se détacher d’un EPCI n’appartiendrait-elle qu’aux communes à faible poids démographique ? Le principe de libre rattachement ne s’applique donc qu’aux communes d’un certain niveau de population. Êtes-vous sûre que cela est constitutionnel ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Rappelez-vous comme on a perturbé les territoires lorsqu’on a abaissé à 15 000 le nombre d’habitants de la ville centre à partir duquel une communauté de communes pouvait se transformer en communauté d’agglomération. Du fait de cette mesure, il existe aujourd’hui des communautés d’agglomération qui sont, en réalité, entièrement rurales, mais qui n’en sont pas moins soumises à la réglementation des communautés d’agglomération et doivent, en conséquence, assumer un plus grand nombre de compétences obligatoires. Arrêtons de jouer avec les seuils : c’est comme cela qu’Alençon et les communes alentour ont pu former une communauté urbaine. Ce n’est vraiment pas raisonnable ! Si les communautés d’agglomération ne sont pas organisées autour d’une ville centre, elles rencontreront de nombreuses difficultés.
M. Raphaël Schellenberger. Je suis tout à fait d’accord avec vous. Cependant, si certains territoires ruraux ont souhaité accéder au statut de communauté d’agglomération, ce n’est pas pour les compétences supplémentaires que cela impliquait ou pour des raisons d’image – même s’il paraît plus prestigieux de se présenter comme le président d’une métropole que comme celui d’une communauté urbaine. En réalité, c’est souvent la bonification de dotation globale de fonctionnement (DGF) qui a poussé des communautés de communes à se transformer en communautés d’agglomération. Or, en maintenant ce statut à bout de bras, on continue d’alimenter cet effet de seuil. En ce qui me concerne, je plaide pour que l’on supprime le statut de communauté d’agglomération et que l’on fasse un peu le ménage dans les statuts d’EPCI disponibles.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 4 bis D est supprimé.
Article 4 bis (art. L. 5211-17-1 et L. 5211-17-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales et art. 1636 B octies du code général des impôts) : Transfert de compétences « à la carte » des communes membres vers leur établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre
Amendements de suppression CL1034 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL925 de M. Jean-René Cazeneuve et CL1372 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 4 bis introduit par le Sénat est contraire au principe de solidarité sur lequel est basée l’intercommunalité.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 4 bis est supprimé.
Article 4 ter (art. L. 5214-16, L. 5216-5, L. 5215-20 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales) : Critère de l’intérêt communautaire ou métropolitain pour l’exercice de diverses compétences au sein du bloc communal
Amendements de suppression CL1035 de M. Bruno Questel, CL682 de la commission du développement durable, CL926 de M. Jean-René Cazeneuve et CL1108 de M. Paul Molac.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 4 ter élargit la liste des compétences soumises à l’intérêt communautaire ou métropolitain. Il nous semble au contraire important de préserver la stabilité de l’exercice des compétences.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. La construction communautaire comme outil de coopération locale n’a d’intérêt que lorsque ce projet est partagé. Alors qu’on entend souvent une partie de la majorité expliquer à quel point le projet politique est important au niveau local, vous dites aujourd’hui que l’intérêt communautaire, à la base de la construction du projet, est moins important que la loi. Depuis le début de son quinquennat, Emmanuel Macron vante les mérites de la subsidiarité et du « bottom up », mais vous êtes plutôt dans une logique de « top down » : vous imposez les choses d’en haut, par la loi, sans écouter les territoires qui ont envie de construire un projet ensemble.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Nous n’imposons rien : nous ne changeons pas la loi.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 4 ter est supprimé et les amendements CL1334 et CL1335 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier ainsi que l’amendement CL247 de M. Thibault Bazin tombent.
Après l’article 4 ter
Amendement CL1128 de M. Sébastien Jumel.
M. Sébastien Jumel. Je ne suis pas défavorable au fait intercommunal : lorsque les communautés d’agglomération, les métropoles ou, plus largement, les intercommunalités sont à dimension humaine, elles peuvent produire des effets positifs au service de leur territoire. Cependant, elles assurent mal certaines compétences. Par exemple, elles ne savent pas animer les conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance, car les populations et les forces de l’ordre ne connaissent que le maire, qui reste d’ailleurs compétent en matière de sécurité. Il en est de même pour les sujets de proximité. Si le transfert de certaines compétences à l’EPCI peut se justifier, l’intercommunalité doit aussi pouvoir déléguer aux communes tout ou partie d’une de ses compétences lorsque l’efficacité le commande.
M. Bruno Questel, rapporteur. Nous avons déjà introduit un dispositif de délégation dans la loi « engagement et proximité » pour une compétence précisément identifiée – la gestion de l’eau – et selon des modalités encadrées. Or vous voulez en faire un principe général, sans même énoncer les conditions dans lesquelles les communes pourraient accepter ou refuser cette délégation de compétences. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Nous ne pouvons pas prévoir une disposition aussi générale. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL1171 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Cet amendement vise à mieux identifier, dans la très grande diversité des formes d’EPCI, la catégorie spécifique des EPCI à fiscalité propre. Il est ainsi proposé de regrouper sous le terme générique « intercommunalité », désormais mieux connu des Français, les différents statuts d’EPCI à fiscalité propre, qui resteront naturellement maintenus mais en formant une catégorie commune. La création de cette catégorie permettra de mieux expliquer à nos concitoyens le fait intercommunal, à travers une sémantique claire, et de simplifier l’écriture des lois et règlements tout en la sécurisant.
Outre l’obligation, pour toute commune, de faire partie d’un seul EPCI à fiscalité propre, le législateur a prévu l’exercice d’un certain nombre de compétences à l’échelle de l’intercommunalité. Les conseillers communautaires et métropolitains issus des communes de plus de 1 000 habitants sont directement élus par nos concitoyens.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement restreint le champ de l’intercommunalité, puisqu’il en exclut les syndicats de communes, qui rendent pourtant de nombreux services à la bonne administration des territoires. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement reprend une vieille demande de l’Assemblée des communautés de France, qui s’appelle d’ailleurs aujourd’hui Intercommunalités de France. Que l’on appelle « intercommunalités », dans la vie courante, les EPCI à fiscalité propre ne me dérange pas, mais au-delà des explications de M. le rapporteur, le CGCT parle d’« établissements publics de coopération intercommunale », ce qui emporte une valeur juridique. Avis défavorable, donc.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques CL261 de M. Thibault Bazin et CL1174 de M. Paul Molac.
M. Thibault Bazin. Il s’agit de remédier à un oubli de la loi NOTRe.
M. Paul Molac. Cet oubli concerne la politique locale du commerce.
M. Bruno Questel, rapporteur. La loi NOTRe n’a pas oublié cette compétence pour les communautés urbaines, comme en témoigne l’article L. 5215‑20 du CGCT. Demande de retrait.
La commission rejette l’amendement CL261, l’amendement CL1174 étant retiré.
Amendements CL264 et CL248 de M. Thibault Bazin et amendement CL353 de Mme Agnès Firmin Le Bodo (discussion commune).
M. Thibault Bazin. L’intitulé actuel de la compétence « cimetières et sites cinéraires » des communautés urbaines est source de confusion et d’insécurité juridique. La notion de gestion et le principe d’intérêt communautaire ne sont pas mentionnés : dès lors, la compétence de la communauté urbaine en matière de cimetières comprend-elle ou non l’extension des cimetières communaux existant au moment de sa création ? Dans la mesure où les dispositions législatives préétablies ne visent pas expressément la gestion des cimetières, la communauté urbaine doit-elle assurer la gestion des cimetières qu’elle aurait créés, étendus ou déplacés ? Par ailleurs, quid de la gestion des cimetières communaux existant au moment de la création de la communauté urbaine ?
L’amendement CL264 vise à clarifier et simplifier le cadre juridique applicable en alignant le libellé de la compétence sur celle exercée à ce jour par les métropoles, qui inclut la gestion des cimetières et crématoriums et soumet les cimetières concernés à l’intérêt communautaire.
L’amendement CL248 a le même objet.
M. Christophe Euzet. Je souscris aux explications de M. Bazin : l’intitulé de cette compétence est imprécis dans la mesure où il ne mentionne ni la notion de gestion ni le principe d’intérêt communautaire. Une interprétation malencontreuse de cette rédaction conduit parfois les services de l’État à considérer que la compétence en matière de cimetières et de crématoriums a été intégralement transférée aux EPCI, ce qui ne correspond pas à la volonté du législateur.
M. Bruno Questel, rapporteur. M. Bazin a raison, il faut clarifier et simplifier l’intitulé de cette compétence. Je donne donc un avis favorable à l’amendement CL264 et demande le retrait des deux autres.
La commission adopte l’amendement CL264, l’amendement CL248 étant retiré.
En conséquence, l’amendement CL353 tombe.
Amendement CL246 de M. Thibault Bazin.
M. Thibault Bazin. Il s’agit d’appliquer les principes de subsidiarité et d’adaptation locale.
M. Bruno Questel, rapporteur. Ce dispositif présente un risque sérieux de démutualisation pour les plus petites communes, qui se retrouveraient à exercer seules des compétences parfois complexes et coûteuses. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis.
M. Thibault Bazin. Ce n’est pas forcément une question de taille de la commune. On peut être de petite taille et avoir un grand cœur !
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques CL262 de M. Thibault Bazin et CL1176 de M. Paul Molac ; amendement CL263 de M. Thibault Bazin (discussion commune).
M. Thibault Bazin. Ces amendements visent, une fois encore, à remédier à un oubli de la loi NOTRe.
M. Paul Molac. Le rapporteur nous expliquera certainement qu’ils sont satisfaits.
M. Thibault Bazin. N’allez pas retirer votre amendement, monsieur Molac : il est arrivé que le législateur prévoie des dispositions pour les communautés urbaines mais oublie les métropoles, ou inversement.
M. Bruno Questel, rapporteur. M. Molac a raison, les amendements identiques CL262 et CL1176 sont satisfaits. S’agissant de l’amendement CL263, nous ne souhaitons pas modifier l’équilibre des compétences de la Métropole du Grand Paris. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Première réunion du mardi 23 novembre à 17 heures
Lien vidéo : https://assnat.fr/PDM4tV
Article 4 quater (art. L. 1121-1 et L. 1121-2 [nouveaux] du code général des collectivités territoriales et art. L. 132-14 et L. 143-21 du code de l’urbanisme) : Conférence de dialogue État-collectivités
Amendement de suppression CL1036 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur pour les titres Ier à V. L’article 4 quater, ajouté par nos collègues sénateurs, aurait pour effet de rendre inutile les associations d’élus locaux. Je propose sa suppression.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 4 quater est supprimé, et l’amendement CL231 de Mme Sandra Marsaud tombe.
Après l’article 4 quater
Amendements identiques CL397 de Mme Jeanine Dubié et CL1212 de Mme Pascale Boyer.
M. Jean-Félix Acquaviva. Les caractéristiques propres aux communes de montagne justifient d’organiser une faculté d’expression et de concertation sur les décisions qui affectent la vie de leurs populations. L’amendement CL397 prévoit, pour les intercommunalités, les départements et les régions comptant au moins 20 % de communes situées en zone de montagne ou 20 % de leur population dans une zone de montagne, qu’au moins une des délégations attribuées porte sur les problématiques et les enjeux spécifiques de la montagne. C’est une demande très forte de l’Association nationale des élus de la montagne, notamment.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable. Contraindre les assemblées délibérantes à imposer des compétences aux exécutifs locaux en ce qui concerne les enjeux très larges de la montagne ne paraît pas pertinent.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis défavorable. Naturellement, des délégations sont données à des vice-présidents, par politique publique. Je le dis par avance à M. Schellenberger, ces deux amendements ont déjà été déposés au Sénat, et repoussés.
M. Raphaël Schellenberger. Je remercie Mme la ministre pour sa réponse circonstanciée à une question que je n’avais pas posée – cela change de l’hémicycle. Elle conforte, qui plus est, l’observation que j’avais faite hier soir, lors de la discussion d’un amendement de la majorité : la délégation des exécutifs relève de la libre administration des collectivités territoriales.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL954 de M. Michel Castellani.
M. Jean-Félix Acquaviva. L’amendement, inspiré de la proposition 2 du rapport sur l’évolution institutionnelle de la Corse, rédigé par la professeure Wanda Mastor, vise à corriger les incohérences et les insuffisances de l’article L. 4422-29 du CGCT. Selon l’interprétation qui en est faite, le président du conseil exécutif de Corse ne peut intenter une action en justice au nom de la collectivité de Corse que sur une délibération d’autorisation en justice de l’Assemblée de Corse. Cela lui confère un pouvoir moindre que celui des présidents de région. Nous en appelons à la sagesse de la commission, pour considérer qu’il s’agit d’un amendement de cohérence et rectifier ce qui semble être une erreur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je suis favorable à l’amendement. Le CGCT oblige le président du conseil exécutif, bien qu’il ait reçu délégation à agir par ce dernier, à demander à chaque fois l’avis de l’assemblée délibérante, l’Assemblée de Corse.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le droit commun est applicable à la collectivité de Corse. En vertu des dispositions de l’article L. 4421-1 du CGCT, la délégation de compétences à l’exécutif est automatiquement donnée pour la durée du mandat, dès lors que, au début de son mandat, on a donné au président la capacité à représenter la collectivité en justice. Je considère que l’amendement est satisfait. Demande de retrait.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques CL370 de M. Hervé Saulignac et CL1178 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Hervé Saulignac. Les impôts directs locaux relèvent exclusivement des communes et des intercommunalités à fiscalité propre. Il apparaît nécessaire et légitime d’associer leurs représentants aux travaux des commissions départementales des impôts directs (CDID).
M. Jean-Félix Acquaviva. Puisque les impôts directs locaux relèvent exclusivement des communes et des intercommunalités à fiscalité propre, il apparaît nécessaire et légitime d’associer leurs représentants aux travaux des CDID.
M. Bruno Questel, rapporteur. Comme nous l’avons vu hier s’agissant de la Corse, on ne peut pas modifier la représentativité d’une catégorie de collectivités locales sans travailler sur les autres. De même que le retrait des amendements concernés a été demandé, je vous suggère de retirer ceux-ci pour les retravailler ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis. Le rôle des CDID devra être revu dans le cadre de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation, prévue par l’article 146 de la loi de finances pour 2020. Ce sera l’occasion de rééquilibrer le dispositif, dans son ensemble. Il n’est pas opportun de le modifier maintenant.
M. Hervé Saulignac. S’agit-il d’une demande de retrait pour le retravailler d’ici à la séance ou d’une demande de retrait pur et simple ?
M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait dans la perspective d’un travail en commun plus tard, après 2022...
La commission rejette les amendements.
Amendement CL825 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Jean-Félix Acquaviva. Lors de la refonte de la loi « montagne » en décembre 2016, une disposition relative à la présidence du comité de massif de Corse, prévue par la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse, transférant les compétences concernant l’animation, la coordination et les règles de composition du comité de massif, n’a pas été reportée dans la nouvelle rédaction de l’article 7.
Il s’agit de corriger cet oubli et de sécuriser juridiquement le comité de massif de la Corse.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit d’une conséquence de la rédaction hâtive de l’ordonnance Baylet sur la loi NOTRe. Comme précédemment pour le droit d’ester en justice, le droit commun ne s’applique pas.
Je suis favorable à clarifier la rédaction et réparer cet oubli.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’amendement me semble satisfait puisque les choses fonctionnent. L’ajout de cette précision ne semble pas indispensable, dans la mesure où le président du conseil exécutif de Corse est déjà président du comité de massif. Sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL572 de M. Bertrand Sorre.
Mme Hélène Zannier. Un millier de communes sont concernées par le régime juridique de la loi du 16 juillet 1971, dite loi Marcellin, qui avait permis les fusions simples ou fusions-associations des communes. La loi n’a pas évolué depuis 1971, et nos concitoyens ne comprennent pas pourquoi ils sont obligés de célébrer leur mariage ou d’enregistrer leur pacte civil de solidarité dans la mairie de la commune associée de résidence, et n’ont pas la possibilité de choisir celle du chef-lieu.
La loi « engagement et proximité » a modifié un article du CGCT pour permettre aux habitants résidant dans le territoire d’une commune nouvelle de se marier ou de se pacser dans la mairie de la commune nouvelle, et non plus seulement dans l’annexe de la mairie du lieu de résidence. Cette évolution législative doit pouvoir s’appliquer aux communes qui sont sous le régime Marcellin. Tel est l’objet de l’amendement.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable à cet amendement de bon sens.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Sagesse. Je connais bien mon pays, notamment les communes déléguées. Il est normal que l’amendement soit voté, mais cela fera jaser.
M. Rémy Rebeyrotte. J’y suis favorable. Les familles habitant dans une commune déléguée qui souhaitent un mariage à la mairie principale de l’agglomération contournent la règle en trouvant une famille qui peut le demander. Plutôt que d’encourager le vice, encourageons la vertu, et le mariage !
M. Raphaël Schellenberger. Je n’avais pas perçu jusque-là le caractère moralisant de la majorité ! Je suis favorable à la simplification mais le parallèle avec les cimetières qui est fait dans l’exposé sommaire est juridiquement inexact. Chacun peut demander à être inhumé dans n’importe quel cimetière, sans lien d’habitation : c’est la règle. La commune gère en fonction de règles dont elle s’est dotée, souvent en raison de contingences de place. Juridiquement, rien ne s’oppose à ce que la règle s’applique dans les communes régies par la loi Marcellin.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL827 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Jean-Félix Acquaviva. Malgré les nouvelles compétences octroyées aux collectivités territoriales, en particulier dans les collectivités à statut particulier, telles que la collectivité de Corse, le nombre de collaborateurs de cabinet n’a pas augmenté. Le conseil exécutif de Corse gère à la fois les compétences de droit commun des deux départements fusionnés, des régions et des compétences spécifiques de la collectivité de Corse. Le nombre réduit de collaborateurs crée un engorgement de travail.
L’amendement vise à demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur la refonte du décret du 16 décembre 1987 relatif aux collaborateurs de cabinet des autorités territoriales.
M. Bruno Questel, rapporteur. Lorsque nous l’avons rencontré à Ajaccio avec Raphaël Schellenberger, le président Gilles Simeoni a effectivement insisté sur cette question. La collectivité territoriale de Corse a dû assimiler les prérogatives de l’ex-région, des deux ex-départements et les nouvelles compétences de la collectivité unique. Les huit offices indépendants de la collectivité ont aussi des compétences spécifiques, ce qui entraîne certaines difficultés de gestion pour le cabinet du président du conseil exécutif.
La demande de modification est justifiée, mais ce n’est pas un rapport du Gouvernement qui permettra à la collectivité de Corse d’avancer sur le sujet. Je vous demande de retirer votre amendement, persuadé que Mme la ministre aura une réponse à vous apporter sur le fond.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Les sujets que vous soulevez relèvent du domaine réglementaire ; je m’engage à les examiner de près – le Gouvernement n’y est pas opposé par principe.
L’amendement est retiré.
Amendement CL1425 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier.
M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Dans une étude publiée le 30 avril 2021, l’INSEE a modifié la conception statistique de la ruralité, qui n’est plus définie en creux par rapport aux espaces urbanisés. Désormais, le critère de la densité de la population partage les communes françaises en quatre types : les communes « peu denses » et « très peu denses » forment la ruralité ; les communes « denses » et « de densité intermédiaire », les espaces urbains. Selon cette définition, 88 % des communes et 33 % de la population sont rurales, ce qui fait de la France le deuxième pays le plus rural d’Europe, la moyenne européenne étant de 28 %. Cette distinction en quatre types, dont deux au sein de la ruralité, introduit à demi-mot le concept d’hyper-ruralité, qui concernerait 26 % du territoire et 5,4 % de la population. L’hyper-ruralité, ce sont des zones où se cumulent les handicaps naturels et d’accès aux services publics et privés, et où rien n’est possible sans un accompagnement spécifique de l’État. Ce sont, non pas des territoires de seconde zone, mais des acteurs clés en matière de production agricole et, parfois, de patrimoine.
Une étude tenant compte de ce que dit l’INSEE devrait être menée, pour analyser les vrais enjeux de ces territoires. Elle permettrait d’envisager la différenciation que vous proposez dans le projet de loi.
M. Bruno Questel, rapporteur. Le secrétaire d’État chargé de la ruralité, Joël Giraud, diffuse régulièrement une « pause rurale » – je vous incite à vous abonner à son compte sur les réseaux sociaux. Un rendez-vous hebdomadaire est plus important qu’un rapport annuel.
Demande de retrait, sinon avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Un rapport vient d’être récemment rendu par votre collègue Jean-Pierre Cubertafon. Un rapport de plus n’est pas souhaitable. Avis défavorable.
M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Je ne suis pas convaincu que le secrétaire d’État réponde à cette problématique. Ensuite, le rapport Cubertafon est très intéressant, mais il s’agit de disposer d’éléments objectifs d’analyse de ce que l’on appelle l’hyper-ruralité. À ce jour, aucun gouvernement n’a tenu compte de cette notion, qu’avait développée feu le sénateur socialiste Alain Bertrand, et des territoires spécifiques de notre pays ne sont pas suffisamment pris en compte. Il nous faudrait des éléments objectifs, statistiques pour appuyer certaines politiques publiques et certaines demandes. Nous ne les avons pas, et c’est pourquoi j’insiste sur la nécessité de disposer d’une étude objective de la part du Gouvernement.
La commission rejette l’amendement.
TITRE II
LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE
Chapitre Ier
La répartition des compétences dans le domaine de la transition écologique
Article 5 A (art. L. 1231-1 du code des transports) : Permettre aux pôles métropolitains d’exercer le rôle d’autorité organisatrice de la mobilité
La commission adopte successivement les amendements CL972, de coordination, CL973, rédactionnel et CL975, de correction, de M. Bruno Questel, rapporteur.
Elle adopte l’article 5 A modifié.
Article 5 B (art. L. 1231-1 du code des transports) : Ajustements relatifs à l’exercice de la compétence d’organisation de la mobilité sur le territoire des communautés de communes
La commission adopte successivement les amendements CL977 et CL979, de coordination, et CL980, de correction, de M. Bruno Questel, rapporteur.
Elle adopte l’article 5 B modifié.
Article 5 (art. L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales) : Actions des collectivités territoriales en matière de transition écologique
Amendement CL1345 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement vise à rétablir pour partie la rédaction initiale du texte. L’article, dans sa rédaction adoptée par le Sénat, ne permet pas de clarifier la répartition des compétences dans le domaine de la transition écologique, ni de préciser les domaines d’intervention des différentes collectivités territoriales en tant que chefs de file.
La commission adopte l’amendement et l’article 5 est ainsi rédigé.
Article 5 bis (art. L. 5214-16 et L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales et art. 1er [abrogé] de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de commune) : Suppression du caractère obligatoire du transfert des compétences « eau », « assainissement » et « gestion des eaux pluviales urbaines » aux communautés d’agglomération et aux communautés de communes
Amendements de suppression CL981 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL694 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, CL927 de M. Jean-René Cazeneuve, CL1279 de M. Denis Sommer et CL1373 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 5 bis introduit par le Sénat remet en cause le transfert obligatoire des compétences en matière d’eau et d’assainissement aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération. Ce serait un retour en arrière non souhaité et non souhaitable, d’où cet amendement de suppression.
En commission mixte paritaire sur le projet de loi engagement et proximité, grâce à l’apport de nos collègues sénateurs, nous avions trouvé un excellent équilibre, en ouvrant la possibilité, sur demande des communes, de faire redescendre ces compétences de l’intercommunalité vers un syndicat mixte infra-communautaire, dans le cadre d’une convention au contenu précis. Il est inutile de toucher à ce bel édifice.
M. Jean-Claude Leclabart, rapporteur pour avis de la commission du développement durable. Les dispositions adoptées au Sénat remettent en cause l’exercice obligatoire des compétences relatives à l’eau et à l’assainissement pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération ainsi que le caractère obligatoire de la compétence de gestion des eaux pluviales urbaines pour les communautés d’agglomération.
M. Denis Sommer. Nos collectivités, en particulier les intercommunalités, ont besoin de stabilité. Depuis quelques années se manifeste une volonté d’aller-retour des compétences eau et assainissement, derrière laquelle se cachent parfois des intérêts locaux. Dans ma circonscription, les présidents d’intercommunalités crient halte au feu. Le temps du débat a eu lieu, le texte a été amélioré, les dispositifs fonctionnent. On a besoin de gérer intelligemment la ressource en eau à l’échelle de tout le bassin. Cela ne peut se faire qu’avec des moyens, et ce sont les intercommunalités qui le permettent. Il faut vraiment supprimer cet article.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. Je relève que toutes les voix de la majorité qui s’intéressent aux questions relatives aux collectivités depuis le début du quinquennat ont défendu le même amendement de suppression d’un article rétablissant une liberté locale en matière d’organisation des compétences eau et assainissement. C’est un peu le comique de répétition de la législature : on ne compte plus le nombre de fois où cette disposition a été débattue dans les différentes niches parlementaires et textes de loi.
Vous avez un peu reconnu la nécessité d’une souplesse, avec la possibilité de faire redescendre les compétences. Dans nombre de territoires, qui ne sont généralement pas ceux dans lesquels la gestion de ces compétences pose problème, la conjugaison de ces compétences obligatoires avec la refonte de la carte des intercommunalités conduit à des blocages dans l’organisation de ce service public de première nécessité. Comme toujours, on cherche à défaire ce qui fonctionne.
L’article est de bon sens, on ne cessera pas de le dire. Si, dans des territoires où il y avait des freins, les compétences montées aux intercommunalités par la force de la loi permettent de fonctionner, tant mieux : on ne les redescendra pas. Mais, dans ceux où elles sont remontées et que cela ne fonctionne pas, ne serait-ce que pour ces territoires, l’article vaut le coup d’être défendu.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. D’autres décisions ont été prises. Notamment, la proposition de loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes, présentée par le président M. Richard Ferrand et par M. Marc Fesneau, alors député, a permis d’assouplir le régime des syndicats d’eau à cheval sur des intercommunalités. Nous avons permis qu’ils perdurent, en abaissant le nombre nécessaire d’intercommunalités de trois à deux, ce qui a apporté une solution à de nombreux territoires.
On ne peut pas réfléchir uniquement en regardant qui fait quoi. Il faut aussi considérer l’enjeu écologique : 20 % de l’eau perdue dans les fuites, c’est beaucoup – et encore, cette estimation est basse. Dans certains départements, l’eau devient une denrée rare – on me l’a récemment expliqué dans le détail, dans la Drôme. Il faut favoriser tous les systèmes qui permettent l’investissement. Souvent, il ne peut être réalisé que lorsque l’intercommunalité engage sa force de financement, afin de réduire les fuites, de créer des interconnexions, d’assurer la conformité microbiologique : cela est bien plus efficace que lorsque la question est traitée au niveau des communes.
Il faut dépasser ce débat stérile entre communes et intercommunalités, en rappelant, au passage, que les intercommunalités sont composées de communes.
M. Stéphane Mazars, président. Demain matin, en commission des lois, nous examinerons une proposition de loi sur ce sujet, dans la niche parlementaire réservée au groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR). C’est vraiment le marronnier de la législature !
M. Rémy Rebeyrotte. Le sujet faisant partie des fameux « irritants » de la NOTRe, il est normal que l’on y revienne régulièrement. Même si la loi engagement et proximité a réglé bien des problèmes, des frottements se produisent encore sur certains sujets. C’est le propre des lois « mal digérées ».
Cette question nécessite de la stabilité. Il faut encourager nos collègues maires à ne pas attendre 2026, pour éviter ce que l’on a pu connaître à cause des délais, lorsque la loi NOTRe a fixé la date du transfert de 2020. Nombreux sont ceux qui se sont demandé comment gérer des enjeux aussi lourds à cette échéance, alors même que certains avaient déjà commencé des études. D’où le report.
Mme la ministre l’a dit, il s’agit de faire rapidement cesser certaines situations qui deviennent complexes. Dans une partie de ma circonscription, ce ne sont pas 20 % de fuites qui sont enregistrées, mais 35 % – et jusqu’à 70 % dans une commune. Dans la situation que nous connaissons, avec les sécheresses à répétition et les tensions sur l’usage de l’eau, cela n’est plus concevable.
M. Jean-Félix Acquaviva. J’entends les arguments de l’externalité positive et de l’effet de seuil en vertu desquels les intercommunalités seraient mieux placées pour réaliser les investissements nécessaires au rattrapage qui s’impose et au fonctionnement du service ensuite.
Néanmoins, dans de très nombreux cas, en Corse, mais certainement ailleurs aussi, les intercommunalités nées des regroupements au forceps imposés par la loi NOTRe sont moins armées, sur le plan budgétaire et fiscal, que les communes pour faire les investissements, ce qui menace gravement ces derniers.
J’étais maire d’une commune dans laquelle les déperditions sur le réseau d’eau atteignaient, non pas 70 %, mais 90 %. Si la commune n’avait pas décidé d’être maître d’ouvrage et s’il avait fallu attendre l’intercommunalité, les investissements, pour un montant de 1 million d’euros, n’auraient pas été réalisés. Pour la gestion, nous avons opté pour la régie qui est moins onéreuse que la concession ou à la délégation de service public qu’aurait choisie l’intercommunalité.
Le diable se niche dans les détails. Les regroupements géographiques, administratifs et technocratiques ont été créés sans avoir pris le temps de s’assurer de leur viabilité sur le plan fiscal et budgétaire. Sans accélération de la maîtrise d’ouvrage communale d’ici 2026, le sujet reviendra sur la table, car nombre d’élus refuseront d’être pris entre le marteau et l’enclume.
M. Thibault Bazin. Après trois tentatives, un compromis a été trouvé pour faire évoluer la loi NOTRe, ce dont nous vous sommes reconnaissants, madame la ministre. Ce compromis donne-t-il satisfaction ? La réponse venue du terrain est négative.
Non seulement les EPCI ne sont pas garants de l’efficacité dans la lutte contre les fuites, mais surtout, dans certains territoires, le transfert n’apparaît pas pertinent. Les arguments qui justifiaient le report du transfert obligatoire restent valables.
Vous mettez en avant la capacité de financement des EPCI, mais dans mon territoire, ceux qui ont gelé les investissements ne sont ni des communes, ni des syndicats mais des communautés de communes. Ce faisant, elles ont mis en péril des projets attendus.
Les maires ruraux, notamment en zones de montagne mais pas seulement, souhaitent vivement le maintien de l’article 5 bis. Il va dans le sens de la différenciation et ne remet pas en cause les transferts programmés sur lesquels l’accompagnement des agences de l’eau est très utile. Il faut conserver la possibilité de faire évoluer la situation dans les territoires où le transfert n’est pas pertinent, sinon il faudra encore remettre l’ouvrage sur le métier.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 5 bis est supprimé.
Article 5 ter (art. L. 5211-61 du code général des collectivités territoriales) : Possibilité de délégation, par un EPCI-FP, des compétences « gestion des eaux pluviales urbaines » et « défense extérieure contre l’incendie » à un syndicat infra-communautaire
Amendement de suppression CL817 de M. Hervé Saulignac.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il ne faut pas supprimer tout ce que le Sénat a adopté. En l’occurrence, l’article 5 ter permet de transférer à un ou plusieurs syndicats infra-communautaires l’exercice des compétences de gestion des eaux pluviales urbaines et de défense extérieure contre l’incendie. Cela peut s’avérer nécessaire dans certains territoires. Avis défavorable, à défaut de retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je suis favorable à la souplesse que le Sénat a introduite et qui étend aux eaux pluviales ce qui est déjà possible pour l’eau et l’assainissement.
M. Hervé Saulignac. Je ne veux pas supprimer tous les apports du Sénat. Sur 215 articles, dix amendements de suppression ne représentent jamais que 5 %.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL983 et CL985 de M. Bruno Questel, rapporteur.
La commission adopte l’article 5 ter modifié.
Article 5 quater A : Rapport sur l’évaluation de la mise en œuvre des règles départementales relatives à la défense extérieure contre l’incendie
La commission adopte successivement les amendements de précision CL986 et CL984 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Elle adopte l’article 5 quater A modifié.
Article 5 quater (art. L. 213-12 du code de l’environnement) : Exercice, par un même syndicat mixte sur des parties distinctes de son périmètre, des compétences d’un établissement public territorial de bassin ou d’un établissement public d’aménagement et de gestion des eaux
Amendements identiques CL988 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL1374 de Mme Catherine Kamowski
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement vise, tout en adaptant sa rédaction, à conserver l’esprit de l’article 5 quater aux termes duquel un même syndicat mixte peut, sur des parties distinctes de son périmètre administratif, exercer les compétences propres à un établissement public territorial de bassin (EPTB) ou à un établissement public d’aménagement et de gestion des eaux (EPAGE).
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable à la nouvelle rédaction, qui simplifie le dispositif dans le respect de l’esprit du texte initial.
La commission adopte les amendements et l’article 5 quater est ainsi rédigé.
Article 5 quinquies (art. 1530 bis du code général des impôts) : Affectation du produit de la taxe GEMAPI
Amendements de suppression CL989 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL696 de la commission du développement durable, CL928 de M. Jean-René Cazeneuve, CL1272 de M. Christophe Euzet et CL1375 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. La taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, dite taxe GEMAPI, est exclusivement affectée au financement de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. Il n’est pas souhaitable d’y recourir pour financer des opérations concourant exclusivement à la maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. Les discussions sur la taxe GEMAPI démontrent les difficultés que posent les taxes affectées. La politique qui découle d’une taxe affectée n’est pas toujours celle que le législateur imaginait en instaurant cette dernière. On ne force pas une collectivité librement administrée à faire quelque chose qu’elle ne veut pas faire.
Il est totalement inexact de penser que la compétence GEMAPI s’exerce indépendamment des autres politiques liées à l’eau – c’est un écosystème. La maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement contribue évidemment à la préservation des milieux aquatiques et à la lutte contre les inondations.
En leur refusant la possibilité de mobiliser la taxe, vous empêchez des collectivités d’agir. À force d’être trop rigides, vous en devenez incohérents.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’autonomie des collectivités locales s’applique en matière financière et non fiscale, vous le savez, cher collègue. Votre intervention, non dépourvue de talent oratoire, est sur le plan juridique totalement aléatoire.
M. Rémy Rebeyrotte. Il faut absolument concentrer les moyens sur ce qui relève de la gestion d’un risque. Le réchauffement climatique et les actions que nous aurons à mener pour faire face à ses conséquences dans nos territoires renforcent cette conviction.
Dans le domaine des eaux pluviales et de ruissellement, d’autres moyens peuvent être mobilisés, ceux des agences de l’eau, par exemple. À force d’avoir élargi leurs compétences – qui trop embrasse mal étreint –, celles-ci ne sont pas toujours focalisées sur les enjeux majeurs. La GEMAPI doit disposer de fonds dédiés pour que certains territoires puissent faire face à ces enjeux.
M. Thibault Bazin. En entendant « qui trop embrasse mal étreint », j’ai cru que M. Rebeyrotte parlait de l’attitude du Gouvernement et de la majorité à l’égard des maires.
On ne peut pas dire que la prévention des inondations et la gestion des milieux aquatiques, d’un côté, et la maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, de l’autre, sont dépourvus de liens.
Nous nous heurtons à des difficultés juridiques pour nous adapter aux besoins du terrain. L’amendement adopté par le Sénat a certainement été inspiré par des problèmes très concrets, parfois posés par l’interprétation des normes. Dans la logique de la décentralisation et de la confiance faite aux territoires, il faut accepter l’extension qui est proposée. Je regrette que vous souhaitiez la supprimer. Peut-être faut-il l’encadrer pour éviter les abus, mais vous ne pouvez pas balayer ainsi les problèmes sur le terrain.
Mme Frédérique Tuffnell. La taxe GEMAPI couvre difficilement le financement des actions pour prévenir les inondations.
Au cours du futur quinquennat, il faudra traiter la question de l’eau, qu’il s’agisse du ruissellement, des inondations ou du surplus d’eau. Une loi-cadre devrait revoir le financement des réseaux et définir une véritable politique de l’eau. Pour l’instant, une telle réforme me semble prématurée, raison pour laquelle je suis favorable à la suppression de l’article.
M. Hervé Saulignac. Il ne faut pas supprimer tout ce que le Sénat a pu introduire. Je connais les vertus des taxes affectées, mais l’extension proposée nous semble parfaitement cohérente et raisonnable. Nous ne soutiendrons donc pas la suppression de l’article.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Ce n’est pas l’ancienne sénatrice que je suis qui accablera le Sénat. Néanmoins, j’ai suffisamment de mémoire pour vous rappeler que la taxe GEMAPI a été créée à l’initiative d’un sénateur.
Il ne me paraît ni opportun ni lisible d’affecter la taxe GEMAPI à d’autres actions.
Le problème auquel entend remédier l’article 5 quinquies est déjà résolu par l’interprétation constante que les services de l’État font de la législation existante. Les actions menées pour limiter le ruissellement dans le but de réduire les risques d’inondation relèvent bien de la prévention de ces dernières et peuvent donc être financées par la taxe GEMAPI.
Je me souviens d’un déplacement dans le département de la Somme, territoire dans lequel les inondations sont causées par le ruissellement. Le syndicat mixte levait la taxe GEMAPI pour lutter contre ce phénomène.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 5 quinquies est supprimé.
Article 5 sexies A : Expérimentation d’un financement des missions de défense contre les inondations et contre la mer d’un EPTB par des contributions fiscalisées
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL991, CL990 et CL993 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL1273 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement vise à préciser que l’opposition d’une commune à la fiscalisation de la contribution budgétaire ne concerne que sa propre contribution, sans préjudice des décisions des autres communes membres de l’établissement.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable à cette rédaction plus lisible et sûre.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement CL818 de M. Hervé Saulignac tombe.
La commission adopte les amendements rédactionnels CL994 et CL995 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Elle adopte l’article 5 sexies A modifié.
Article 5 sexies (sous-section 5 [nouvelle] de la section 6 du chapitre unique du titre VIII du livre Ier et art. L. 541‑47 [abrogé] du code de l’environnement) : Droit de veto du conseil municipal préalablement au dépôt d’une demande d’autorisation environnementale pour l’installation d’éoliennes
Amendements de suppression CL996 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL697 de la commission du développement durable, CL71 de M. Matthieu Orphelin et CL1376 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Matthieu Orphelin. Dans sa croisade contre l’éolien, la droite sénatoriale a décidé de donner aux maires la possibilité de déclarer un moratoire sur l’implantation d’éoliennes. L’amendement vise à supprimer cette disposition.
M. Rémy Rebeyrotte. Certains maires souhaiteraient subir moins de pression en ce qui concerne l’éolien, ce qui justifie d’autant plus l’amendement.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Dans le prolongement de l’argument avancé par M. Rémy Rebeyrotte, ce n’est pas rendre un bon service aux maires que de leur accorder un droit de veto.
D’abord, les projets éoliens dépassent souvent les limites communales. C’est une charge pour les communes et les risques de contentieux sont importants. Ensuite, la procédure d’enquête publique prévoit déjà une consultation des collectivités et du public qui est prise en considération pour décider d’autoriser ou de refuser l’installation. Enfin, la loi « climat et résilience » a renforcé le rôle des maires en amont des projets. Ceux qui les développent doivent informer le maire, répondre formellement aux observations qu’il formule et présenter les éventuelles évolutions qui en résultent.
Je suis donc favorable aux amendements.
M. Thibault Bazin. Il s’agit d’un article important. De nombreux élus craignent de voir des éoliennes venir contrarier leurs projets pour leur ville, sur la base desquels ils ont été choisis par les habitants.
Certains souhaitent développer les éoliennes – c’est leur droit –, d’autres veulent pouvoir s’y opposer, car ils en ont reçu le mandat de la population. Ils demandent à donner, non pas seulement leur avis, mais leur accord. L’information est une avancée mais elle n’est pas suffisante. Il faut maintenir le droit de veto des maires, qui sont souvent engagés dans la transition écologique, dont les éoliennes ne sont pas l’alpha et l’oméga.
M. Raphaël Schellenberger. Je m’étonne de ce que certaines responsabilités en matière d’aménagement communal semblent, à vos yeux, trop écrasantes pour les maires.
Je comprends que pour les projets d’envergure nationale, le cadre juridique permette de faire prévaloir l’intérêt national sur l’intérêt local. En matière d’éolien, je suis dubitatif sur la primauté de l’intérêt national.
Alors que les maires se voient confier des missions essentielles en matière de développement durable – la maîtrise de la consommation foncière et de l’artificialisation des sols –, ils sont désarmés face aux projets d’éoliennes, ils n’ont pas voix au chapitre. C’est le seul domaine dans lequel l’artificialisation des sols est autorisée.
Le rôle consultatif auxquels sont cantonnés les maires est à l’origine d’un problème majeur de notre démocratie : l’abstention. Comment s’étonner que les électeurs s’abstiennent lors du scrutin suivant lorsque le maire qu’ils ont choisi est incapable d’agir, faute de disposer d’un pouvoir de décision ?
M. Matthieu Orphelin. L’éolien est devenu un sujet politique encore plus sensible que par le passé. Je regrette que la position des Républicains sur le sujet soit en recul par rapport à celle qu’ils défendaient lors du Grenelle de l’environnement.
L’éolien est devenu un argument de campagnes électorales. C’est dommage, car il n’est pas possible de relever avec succès le défi climatique sans les énergies renouvelables ni les éoliennes, qu’elles soient en mer ou terrestres. Dans l’intérêt des territoires et pour préserver l’avenir, on peut se passer d’un moratoire contre ces « satanées éoliennes », selon l’expression popularisée ces derniers jours.
M. Jean-Louis Bricout. Madame la ministre, vous étiez vendredi aux côtés du Président de la République pour signer le pacte pour la réussite de la Sambre-Avesnois-Thiérache. En traversant ce territoire, vous avez sans doute vu des éoliennes un peu partout. Leur omniprésence aboutit à l’encerclement de certains villages et au mitage de certains territoires, ce qui va à l’encontre du projet de territoire.
Sans aller jusqu’à doter le maire d’un droit de veto qui risque de condamner les éoliennes, nous vous proposerons plusieurs solutions pour réguler leur implantation tout en respectant le mix énergétique. Nous souhaitons que le développement de l’éolien se poursuive de manière harmonieuse. Nous ne sommes pas au pays des Teletubbies couvert d’éoliennes.
Nos amendements viseront notamment à redonner la parole aux élus locaux et aux habitants, afin de leur permettre de dire stop quand les éoliennes risquent d’être en trop grand nombre dans le territoire.
M. Hervé Saulignac. Bien souvent, les projets éoliens s’invitent dans un territoire. Autrement dit, les personnes chargées de la prospection identifient un gisement de vent et contactent – pas toujours – le maire pour l’informer de leur intention d’étudier un projet d’implantation. Ces projets correspondent rarement à un engagement de campagne d’un élu local. Ils créent souvent de fortes tensions, a fortiori dans des territoires à forte valeur environnementale.
Dans mon département, qui compte environ 180 installations, il n’y a pas une seule éolienne sans une ou plusieurs associations qui la contestent. Les maires sont aujourd’hui démunis pour faire face aux projets qui s’invitent dans leur territoire. Nous devrons, d’une manière ou d’une autre, les doter d’outils pour gérer ces situations conflictuelles et pour décider, au lieu de donner des avis.
M. Paul Molac. Je ne partage pas l’analyse de M. Raphaël Schellenberger : ce n’est pas parce que la production est diffuse qu’elle ne relève pas de l’intérêt général. L’éolien fait partie du mix énergétique. Pour s’en passer, il faut accepter de diminuer sa consommation, ce qui n’est pas aisé.
L’électron va toujours vers le lieu de consommation le plus proche. Autrement dit, les électrons produits par une éolienne servent d’abord à satisfaire les besoins électriques de la commune où elle est installée. Ensuite, ils alimentent les finances locales.
En leur octroyant un droit de veto, vous placez les maires en première ligne face aux propriétaires de résidences secondaires opposés à toute éolienne qui risquerait de faire baisser le prix de leur maison – c’est aussi un placement pour eux. Ces derniers sont capables d’arrêter les projets, car ils refusent tout, considérant qu’ils sont propriétaires du paysage.
La suppression de l’article me paraît plutôt de nature à protéger les maires.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il est possible d’interdire, dans le plan local d’urbanisme (PLU) ou dans le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI), l’implantation d’éoliennes sur certaines parcelles pour des raisons objectives tenant, par exemple, à la protection des paysages ou la présence de monuments historiques. C’est un outil trop peu connu.
Par ailleurs, il ne semble pas opportun de revenir sur les accords qui ont été trouvés lors de la commission mixte paritaire du projet de loi « climat et résilience », adopté définitivement il y a quelques mois.
Néanmoins, j’entends les arguments de M. Jean-Louis Bricout. Il est vrai que certains territoires concentrent beaucoup d’éolien, ce qui peut évidemment s’expliquer par la permanence du vent, comme en Beauce. Des résidents à l’année trouvent parfois cela excessif. On en viendrait presque à regretter les zones de développement éolien (ZDE), si on ne savait que les zonages ont provoqué de nombreux contentieux juridiques.
Le Premier ministre a demandé aux préfets, par une instruction écrite, de définir avec les élus locaux des secteurs propices à l’éolien. Le développement de ces installations doit en effet passer par le dialogue déconcentré.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, l’article 5 sexies est supprimé et les autres amendements s’y rapportant tombent.
Après l’article 5 sexies
Amendement CL916 de Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard. Comme vous l’avez dit, madame la ministre, il n’est pas souhaitable que la possibilité d’opposer un veto à l’implantation d’éoliennes repose sur les seules épaules du maire, du fait aussi que les projets de parc éolien dépassent souvent les frontières de la commune. D’où cet amendement, qui vise à soumettre ces projets à l’information préalable, non seulement du maire et des membres du conseil municipal de la collectivité concernée, mais aussi à celle des communes limitrophes.
J’en ai déposé un autre, l’amendement CL915, qui a ma préférence, qui tend à conditionner l’installation d’éoliennes à l’autorisation préalable des conseils municipaux concernés : celui de la commune sur le territoire de laquelle l’implantation est projetée, ainsi que ceux des communes limitrophes directement affectées par le projet. Dans ma circonscription, un maire avait accepté l’installation d’un parc éolien sur sa commune sans prévenir les communes limitrophes que des éoliennes seraient installées beaucoup plus près des habitations de villages limitrophes que de sa commune.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL916 relève plus du règlement de l’assemblée délibérante concernée. De surcroît, cette précision n’est pas nécessaire, car le maire, pour faire valoir ses observations, doit obtenir une délibération de son conseil municipal, et transmettre au préalable à ses membres le résumé de l’étude d’impact. Avis défavorable.
Par l’amendement CL915, vous souhaitez conférer un droit de veto aux communes limitrophes. Ce dispositif serait exorbitant du droit commun. Avis défavorable également.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je partage votre point de vue sur la nécessité de transmettre l’information. La loi d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) prévoit déjà l’obligation de présenter un résumé de l’étude d’impact aux maires de la commune concernée et des communes limitrophes un mois avant le dépôt de la demande d’autorisation. Cela dit, j’ai exprimé tout à l’heure un avis défavorable au droit de veto, et je n’ai pas changé de position.
Mme Emmanuelle Ménard. Le conseil municipal de la commune concernée est nécessairement informé, mais il n’en va pas de même des conseils municipaux des communes limitrophes. C’est pourquoi je propose de rectifier l’amendement CL916 afin de prévoir l’information de ces derniers. Dans l’exemple que je vous ai cité, les maires des communes limitrophes étaient vent debout contre le projet. Ils réclament la possibilité de donner leur avis et, le cas échéant, de s’opposer à l’installation d’un parc, surtout lorsqu’il affecte davantage leur territoire.
M. Matthieu Orphelin. Cet amendement est encore pire que celui des Républicains en ce qu’il étend le droit de veto aux maires des communes limitrophes. Il est assez savoureux de l’entendre défendre comme contribuant à la démocratie écologique.
M. Rémy Rebeyrotte. Je serais favorable à ce qu’une partie de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), notamment celle destinée aux intercommunalités, puisse revenir aux communes limitrophes.
Il arrive en effet que les éoliennes ne soient pas visibles depuis le centre-bourg de la commune concernée, mais que les habitants de la commune voisine ne voient qu’elles. Il faut donc veiller à certains équilibres.
Madame la ministre, je vous demande d’être à nos côtés lorsque des collègues, maires ou conseillers municipaux, subissent des menaces après avoir donné un avis favorable à un projet éolien. Je demande que les ministères de l’intérieur et de la justice manifestent la plus grande fermeté.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL289 de Mme Frédérique Tuffnell.
Mme Frédérique Tuffnell. Je propose de réguler le développement de l’éolien en sécurisant le versement par les opérateurs de la garantie financière, celle-ci s’élevant à 50 000 euros par pied d’éolienne. Je crains que certains d’entre eux ne disposent pas d’une garantie suffisante lorsque les installations seront démantelées, dans quinze à trente ans. Le démantèlement pourrait alors constituer une bombe à retardement financière pour les collectivités territoriales, qui devront en assumer la charge. Il est facile, à l’heure actuelle, d’obtenir une caution bancaire. Je propose, pour ma part, d’imposer une consignation environnementale, c’est-à-dire un versement d’argent. Il s’agit certes d’un effort financier considérable – qui doit être prévu, en amont, dans le plan de trésorerie –, mais ce serait un moyen de régulation efficace, qui permettrait de s’assurer du sérieux de l’opérateur. Je ne peux pas imaginer que l’on ait, demain, des cimetières d’éoliennes.
Des incidents peuvent survenir : dans l’Aude, en 2009, un site éolien a été très abîmé par une tempête. EDF a obtenu le renouvellement des baux et des autorisations pour faire traîner plusieurs années la coûteuse démolition des machines.
J’ai fait vérifier et réassurer l’amendement par la Caisse des dépôts et consignations. Je laisse au décret le soin de fixer le montant – qui pourrait être inférieur à 50 000 euros – et les modalités de versement de la consignation, qui pourrait être fractionné ou progressif. C’est un dispositif original et très ouvert.
M. Bruno Questel, rapporteur. La consignation administrative ici proposée est plus sécurisante, mais aussi plus complexe à obtenir qu’un cautionnement bancaire. Supprimer ce dernier mécanisme, aujourd’hui le plus courant, risquerait de freiner à l’excès le développement de l’éolien, ce qui menacerait l’atteinte de nos objectifs climatiques.
Puisque vous avez souligné que votre amendement a été « réassuré » par la Caisse des dépôts et consignations, nous nous sommes rapprochés d’elle. Voilà la réponse que j’ai reçue : « Je me permets de vous confirmer que l’amendement CL289, déposé par Mme Frédérique Tuffnell, qui mentionne la Caisse des dépôts et consignations dans son exposé sommaire, ne reflète en aucun cas une position officielle de l’établissement public. » Je vous invite à vous rapprocher d’eux ; on verra pour la séance.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Les éoliennes font partie des catégories d’installations soumises à garantie financière, de même que les carrières, les installations de stockage de déchets et les installations Seveso. L’exploitant d’un parc éolien ou, en cas de défaillance, sa société-mère, est responsable du démantèlement ou de la remise en état du site, lorsqu’il est mis fin à l’activité, quel que soit le motif de la cessation. La mise en service d’un parc éolien est subordonnée à la constitution de garanties financières destinées à permettre la réalisation des opérations en cas de défaillance.
L’arrêté du 22 juin 2020 a renforcé, après concertation avec les parties prenantes et consultation du public, les dispositions relatives aux garanties financières. Désormais, aux 50 000 euros s’ajoute un montant supplémentaire de 10 000 euros par tranche de 1 mégawatt de puissance, au-delà de 2 mégawatts. Ainsi, les éoliennes plus puissantes et plus grandes sont soumises à des obligations supérieures. À ce jour, il n’a jamais été nécessaire de faire appel à ces garanties financières.
Votre amendement vise à ajouter un niveau d’exigence en imposant la consignation. Je vous demande de le retirer ; il faut regarder de plus près cette question.
Mme Frédérique Tuffnell. J’ai eu un échange en visioconférence avec le service des consignations de la Caisse des dépôts et consignations, laquelle n’a, bien entendu, pas exprimé de position officielle.
En maintenant la garantie financière sous la forme d’une simple caution bancaire, on ne régulera pas le niveau des opérateurs sur le terrain. La contrainte de versement serait un outil très efficace pour le faire. Certains, de très petite taille, dérangent les collectivités. Je ne vois pas d’autre instrument financier possible. J’ai peur d’avoir demain, sur notre territoire, comme en Californie, des cimetières d’éoliennes. Je suis à votre disposition pour retravailler le dispositif en vue de la séance.
M. Mansour Kamardine. J’ai été convaincu par les arguments de Mme Frédérique Tuffnell. Sur d’autres sujets, des organismes m’ont dit qu’ils ne s’engageaient que si l’État était d’accord, avant toute consultation officielle.
Par ailleurs, on connaît de nombreux exemples d’entreprises voyous qui font des affaires puis disparaissent. Mieux vaut deux garanties qu’une, si aucune disposition juridique ne l’interdit, si cela peut éviter aux communes d’assumer la charge financière.
M. Raphaël Schellenberger. Si vous l’aviez déposé, monsieur le rapporteur, vous auriez pu dire qu’il s’agit d’un amendement de précision selon lequel, pour les éoliennes, ne serait retenue comme garantie financière que la consignation environnementale. Ce serait une sécurité de bon aloi.
Par ailleurs, un courriel de la Caisse des dépôts et consignations ne saurait empêcher la représentation nationale de voter un amendement prévoyant que cet établissement public, qui est placé sous le contrôle du Parlement, soit l’opérateur de la constitution des garanties environnementales. Cet argument est invraisemblable et c’est bien celui qui ne peut nous convaincre.
L’accélération de la construction des éoliennes donnera plus d’acuité à la question du démantèlement dans les toutes prochaines années. On commence à voir émerger le scandale du stockage des pales sur des kilomètres de terres généralement arables parce qu’on ne sait pas les recycler. Par ailleurs, on ne parle pas des tonnes de béton coulées pour former la base des éoliennes et qui rendent infertiles les sols cultivables sur une surface cumulée de plusieurs kilomètres carrés. C’est un véritable scandale. On se bat pour conserver des espaces naturels, agricoles, et, en même temps, on se tire une balle dans le pied en ne se donnant pas les moyens de démanteler correctement les éoliennes.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. On peut penser que la Caisse des dépôts et consignations serait d’accord pour recueillir des consignations et les faire fructifier : c’est son métier. Cela étant, la consignation impose de verser immédiatement l’argent, contrairement à la caution bancaire. Garanties financières plus consignation, cela fait beaucoup !
M. Sacha Houlié. Le rapport de RTE (Réseau de transport d’électricité) montre qu’il faudra déployer de nombreuses éoliennes sur notre territoire, terrestre mais aussi maritime, pour atteindre la neutralité carbone dans les trente prochaines années. Il me semble que, d’une part, conférer un pouvoir d’autorisation au conseil municipal et, d’autre part, réduire le nombre de garanties financières susceptibles d’être apportées risquerait de restreindre l’implantation des éoliennes. Ce serait totalement contraire aux objectifs que nous poursuivons à travers la stratégie nationale bas-carbone, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) 2019-2028 et dans le cadre européen. Malgré de bonnes intentions, ces amendements risquent de nous faire entrer dans une nasse.
Mme Frédérique Tuffnell. Aujourd’hui, les garanties financières prennent la forme d’une caution bancaire ou d’une consignation environnementale. Il s’agirait, par cet amendement, d’imposer le second outil. L’objectif est avant tout de sécuriser les opérations. On ne veut pas limiter l’installation d’éoliennes mais garantir la qualité des opérateurs, sachant que la somme de 50 000 euros par pied d’éolienne n’est pas suffisante pour tout démanteler et remettre le terrain en état. La consignation rassurera les collectivités, et la Caisse des dépôts et consignations sécurisera le dépôt pendant trente ans. On ne sait pas si certains opérateurs seront encore là dans dix ans. Des sites deviendront des cimetières d’éoliennes.
Il faut, bien sûr, atteindre les objectifs de la PPE mais en sécurisant les Français et les collectivités territoriales. Je suis prête à retravailler l’amendement avec vous, madame la ministre, en vue de la séance.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je donne lecture de l’article L. 553-3 du code de l’environnement :
« L’exploitant d’une installation produisant de l’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent ou, en cas de défaillance, la société mère est responsable de son démantèlement et de la remise en état du site, dès qu’il est mis fin à l’exploitation, quel que soit le motif de la cessation de l’activité. Dès le début de la production, puis au titre des exercices comptables suivants, l’exploitant ou la société propriétaire constitue les garanties financières nécessaires. Pour les installations produisant de l’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent, classées au titre de l’article L. 511-2, les manquements aux obligations de garanties financières donnent lieu à l’application de la procédure de consignation prévue au II de l’article L. 171-8, indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées. »
Les mécanismes existent donc aujourd’hui.
Je n’ignore pas les prérogatives de la Caisse des dépôts et consignations, mais il me paraît gênant d’indiquer que l’institution soutient l’amendement, alors qu’elle nous a informés que ce n’était pas le cas. On ne peut engager cet établissement si les choses ne sont pas verrouillées. Je vous invite à ce que l’on travaille ensemble pour ce faire.
Mme Frédérique Tuffnell. Je retire l’amendement avec l’assurance d’engager un travail avec le ministère.
L’amendement est retiré.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CL915 de Mme Emmanuelle Ménard.
Article 5 septies A (art. L. 515-44 du code de l’environnement) : Relèvement, par les régions, de la distance minimale entre des éoliennes et des habitations
Amendements de suppression CL998 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL698 de la commission du développement durable, CL616 de M. Paul Molac et CL1377 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement vise à supprimer cet article, adopté au Sénat, qui confère aux régions la faculté de relever la distance minimale entre les éoliennes et les habitations. Depuis 2011, l’implantation d’éoliennes de grande taille est soumise à une distance d’éloignement minimale de 500 mètres des habitations. L’article 139 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a d’ailleurs précisé que ce seuil de 500 mètres constitue un minimum.
M. Paul Molac. Cet amendement émane de Régions de France, qui souhaite, avant toute chose, évaluer cette mesure. Or cette disposition a été votée sans que l’association en ait été prévenue.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable. Les régions ont perçu le danger.
M. Raphaël Schellenberger. Je n’ai pas peur, pour ma part, de confier des responsabilités aux régions, même si c’est parfois risqué ou glissant politiquement, et nous avons des candidats aux élections régionales qui sont prêts à les assumer. Je me bats pour que l’on confie des pouvoirs aux collectivités. À ce titre, j’approuve l’intention que vous avez manifestée au début de l’examen du texte, madame la ministre, d’accorder des attributions réglementaires aux régions. C’est bien de cela qu’il s’agit ici. Ce serait un premier pas vers l’attribution d’un nouveau pouvoir normatif aux collectivités territoriales.
M. Rémy Rebeyrotte. Vous nous dites régulièrement qu’il faut écouter le terrain : nous écoutons le terrain !
M. Hervé Saulignac. En augmentant la distance minimale entre les éoliennes et les habitations, cet article aurait pour effet de concentrer le développement de l’éolien dans des zones faiblement ou très faiblement peuplées, dans la ruralité ou l’hyper-ruralité. Cela irait à l’encontre de ce que souhaitent certains territoires, c’est-à-dire un développement plus harmonieux de l’éolien.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je ne suis pas opposée à l’attribution d’un pouvoir normatif aux collectivités territoriales, mais cela doit se faire au bon niveau. Je ne suis pas sûre que, du point de vue de la proximité, les régions soient les mieux placées pour définir ces normes.
M. Raphaël Schellenberger. On peut proposer de confier cela aux maires.
M. Matthieu Orphelin. On sait très bien ce qu’il y a derrière cette proposition de distance minimale. Il s’agit, en réalité, de donner au président d’un conseil régional la possibilité de fixer une distance tellement grande qu’elle rende impossible, de fait, la construction d’éoliennes sur son territoire. Il s’agit, en d’autres termes, de rendre possible un moratoire.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 5 septies A est supprimé et les amendements CL658 de M. Luc Lamirault, CL25 de M. Daniel Labaronne et CL744 M. Xavier Batut tombent.
Après l’article 5 septies A
Amendement CL1179 de M. Jean-Louis Bricout.
M. Jean-Louis Bricout. Le fond du problème n’est pas tant la production d’énergie que la régulation de l’implantation. De ce point de vue, l’effort n’est pas très bien partagé. Si les installations se concentrent au nord et à l’est du pays, ce n’est pas seulement en raison du vent, c’est aussi parce que cela apporte des revenus aux territoires les plus pauvres. Il y a parfois une course à la fiscalité de la part des élus locaux.
La mise en œuvre des objectifs régionaux peut aboutir, à l’échelle des EPCI, à une surconcentration, source de division au sein des villages et des conseils municipaux, voire de conflits d’intérêts et de pressions. Les préfets se trouvent dans une situation délicate lorsqu’ils doivent se prononcer sur un projet éolien, car leur décision, qu’elle aille dans l’un ou l’autre sens, risque de faire l’objet d’un recours contentieux.
L’amendement permettrait de respecter les objectifs de production, mais de manière régulée. Une fois que la région aurait atteint son objectif, elle pourrait délibérer pour augmenter la distance entre les éoliennes et les habitations, ce qui revient en effet à instituer une sorte de moratoire.
En séance, nous proposerons un amendement visant à introduire de la régulation à l’échelle des microterritoires.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement a le même objet que l’article 5 septies A, que nous venons de supprimer, même si sa rédaction est plus raisonnable. Il permettrait aux régions de réguler le développement de l’éolien uniquement si les objectifs régionaux en matière de production sont atteints.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis.
M. Matthieu Orphelin. Il s’agit d’un autre type de moratoire, un peu plus souple que celui qui était prévu par l’article 5 septies A. Je regrette qu’un membre du groupe Socialistes puisse défendre un amendement anti-éolien comme celui-là.
M. Jean-Louis Bricout. Ce n’est pas un amendement anti-éolien : il vise à répartir l’effort et à fournir les outils juridiques permettant de refuser ou d’interrompre des projets quand il en est encore temps. Venez dans notre territoire ! Dans le petit village de Chevresis-Monceau, dans la vallée de l’Oise, il y a des projets éoliens tout le long de la ligne de crête : les habitants vont être complètement encerclés. Si on additionne les projets en cours et ceux à venir, cela fait 248 éoliennes sur 20 kilomètres. C’est inacceptable ! M. Sacha Houlié s’étonnait que nous protégions notre territoire ; c’est pourtant normal ! Il faut être conscient des problèmes que ces implantations posent dans une vallée, parmi des bocages. Je sais bien que certains n’ont pas d’éoliennes chez eux, mais chez nous, cela commence à gronder sérieusement !
M. Sacha Houlié. Vous n’êtes pas le seul à rencontrer le problème de la densification des éoliennes : nous y sommes également confrontés dans le nord de la région Nouvelle-Aquitaine. Cette densité implique la vigilance des préfets, notamment par le biais d’outils d’urbanisme existants, comme les schémas de cohérence territoriale (SCOT) ou les PLUI rénovés. Les EPCI ont les moyens de ménager des zones réservées ou de distinguer dans les projets d’aménagement et de développement durable (PADD) les zones où on peut prévoir l’implantation d’éoliennes de celles où ce n’est pas possible.
Tout ce que je dis est que la recherche d’éléments juridiques compromettant ou réduisant l’implantation d’éoliennes est contraire à la volonté politique que nous avons été nombreux à exprimer dans le cadre de la dernière programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). En revanche, la question de la densité peut être légitimement posée.
La commission rejette l’amendement.
Article 5 septies B (art. L. 1251-3-1 [nouveau] du code des transports) : Droit de veto du conseil municipal préalablement à la construction ou à la modification d’infrastructures de transport par câbles en milieu urbain
La commission adopte les amendements de suppression CL999 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL699 de la commission du développement durable et CL1378 de M. Rémy Rebeyrotte.
En conséquence, l’article 5 septies B est supprimé.
Article 5 septies (art. L. 1425-2, L. 4251-1, L. 4251-4 et L. 4251-8 du code général des collectivités territoriales) : Intégrer un volet relatif à la stratégie aéroportuaire dans le SRADDET
Amendement CL997 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je propose de réécrire l’article, qui insère dans les objectifs du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) une stratégie régionale en matière aéroportuaire, pour le remplacer par une coordination juridique résultant de l’article 219 de la loi dite climat et résilience.
La commission adopte l’amendement et l’article 5 septies est ainsi rédigé.
Après l’article 5 septies
Amendement CL1353 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Le classement automatique des réseaux de chaleur urbains a été instauré lors de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, dite « énergie-climat », avec pour objectif d’inverser la logique de classement pour les réseaux vertueux. Cette disposition peut sembler de bon aloi, mais, en réalité, le seuil de 50 % d’énergie renouvelable pour entraîner le classement automatique est trop bas : certains réseaux de chaleur urbains peuvent être classés alors même qu’ils utilisent du charbon ou du fioul comme source d’énergie.
En outre, la procédure est rendue plus complexe : si le classement est automatique, ses modalités pratiques ne sont pas définies, ce qui fait peser un risque juridique sur le classement. La commune doit alors délibérer pour définir des zones et mettre en cohérence son document d’urbanisme. La procédure de classement automatique dépossède la collectivité de la gestion de la temporalité du classement. Les conséquences sur les permis de construire et les raccordements obligatoires n’ont pas été anticipées.
Nous proposons donc que l’on renonce au classement automatique au profit d’un classement volontaire.
M. Bruno Questel, rapporteur. Le classement des réseaux de chaleur urbains vise à encourager le développement des réseaux de chaleur ou de froid alimentés pour plus de moitié par des énergies renouvelables ou de récupération. À cette fin, la loi « énergie-climat » a prévu qu’à compter du 1er janvier 2022, tous les réseaux de chaleur alimentés à plus de 50 % par des énergies renouvelables et de récupération, gérés par des collectivités et réunissant certains critères seront classés automatiquement, sauf décision contraire de la collectivité.
L’amendement risquerait de freiner le développement de ces réseaux de chaleur. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements CL392 et CL393 de M. Sylvain Templier.
M. Sylvain Templier. La notion de prise en compte constitue le niveau le moins contraignant de l’opposabilité. Elle permet une meilleure articulation entre les différents schémas, une quasi-connaissance mutuelle. L’amendement CL392 propose donc que le SRADDET prenne en compte le plan régional de l’agriculture durable (PRAD).
En 2015, le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) estimait souhaitable que les orientations du SRADDET portent sur les activités agricoles. En effet, le SRADDET fixe les objectifs à moyen et à long terme concernant des sujets tels que la lutte contre le changement climatique, la pollution de l’air, la restauration de la biodiversité ou la prévention des déchets, tous liés de près ou de loin à l’agriculture. Le PRAD précise, quant à lui, les actions relatives à l’aménagement des territoires ruraux et à la protection des terres agricoles ainsi que des milieux naturels. Autrement dit, SRADDET et PRAD ont des sujets communs. Il convient donc de les associer, ce qui aboutirait à ajouter le domaine agricole au SRADDET, au nom d’une logique de cohérence entre plans et schémas.
Quant à l’amendement CL393, il tend à mettre davantage en cohérence les objectifs nationaux de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et les objectifs régionaux du SRADDET. Alors que les régions avaient jusqu’au 29 juillet 2019 pour élaborer leur SRADDET, la SNBC révisée a été adoptée par décret le 21 avril 2020. Lorsqu’il a publié son rapport annuel, en juin dernier, le Haut Conseil pour le climat lui a joint une note fort intéressante sur les outils juridiques pour la neutralité carbone, où l’on constate certaines discordances entre SRADDET et SNBC, en Auvergne-Rhône-Alpes comme en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Le code de l’environnement dispose que les collectivités territoriales prennent en compte la SNBC. Or, je l’ai dit, la prise en compte est l’échelon le plus faible de l’opposabilité. Elle permet donc les discordances évoquées. Je propose qu’on lui préfère la notion de compatibilité, afin de respecter les principes essentiels de la norme supérieure. Il serait illogique de ne pas assurer la cohérence entre la SNBC et les documents de planification des collectivités, notamment s’agissant de l’atteinte des objectifs.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL392 entraînerait une obligation de mise à jour des SRADDET, alors que les deux outils, PRAD et SRADDET, sont des documents de planification distincts et qui fonctionnent bien en parallèle. Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis sur l’amendement CL393, car le code de l’environnement, en son article L. 222-1-B, prévoit déjà la prise en compte de la SNBC par les schémas régionaux, dont le SRADDET fait partie.
Les amendements sont retirés.
Chapitre II
Les transports
Article 6 : Transfert aux départements, aux métropoles et à la métropole de Lyon de certaines routes nationales non concédées
Amendements identiques CL1631 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL1630 du Gouvernement, et sous-amendement CL1665 de M. Matthieu Orphelin.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement réécrit entièrement l’article afin de tenir compte des concertations menées avec les régions et les départements sur les modalités de cette nouvelle étape importante de la décentralisation des routes, notamment quant à l’articulation entre les articles 6 et 7.
Outre l’affirmation de la compétence des départements sur le réseau routier départemental, conformément à une demande appuyée de l’Assemblée des départements de France (ADF), il précise, en coordination avec l’article 7, la procédure de décentralisation des routes nationales : publication d’une liste énumérant les voies du réseau routier national non concédé que l’État propose soit de transférer aux départements et métropoles, soit de mettre à la disposition des régions ; concertation, organisée par les préfets de région, entre l’ensemble des collectivités afin de faire émerger une répartition des voies décentralisables par niveau de collectivité ; fixation de cette répartition par décret ; demande des collectivités, dans un délai de deux mois, au ministre des transports quant aux routes dont elles souhaitent le transfert ou la mise à disposition ; décision du ministre des transports, dans un délai d’un mois, au vu notamment de la cohérence des itinéraires.
L’amendement supprimerait également les dispositions du projet de loi qui prévoyaient, par dérogation à son article 44, un régime spécifique en matière de transfert de personnel et de services. En effet, l’article 44 contient des dispositions générales relatives à la mise à disposition et au transfert de personnel, applicables de plein droit aux transferts de compétence à titre définitif prévus dans la loi, au nombre desquels figurent le transfert des routes aux départements et aux métropoles. Il n’y a donc pas lieu d’adopter des dispositions spécifiques pour le transfert des routes.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Rappelons, en complément, que la rédaction sénatoriale de cet article avait suscité un assez large accord au sein de la Haute Assemblée, mais que nous avions conscience d’un besoin de précision et surtout de négociations entre l’ADF et Régions de France. Dans le cas de l’ADF, il s’agit de décentralisation alors que, pour les régions, il s’agit d’une expérimentation.
Nous avons réuni les présidents des deux associations et trouvé un accord dont la rédaction ici proposée est le fruit. Il inclut, par exemple, une concertation de six mois dans chaque région, sous l’égide du préfet de région, afin d’essayer d’aboutir à une répartition consensuelle entre collectivités des routes que l’État proposera à la décentralisation. À l’issue de cette concertation auront lieu des consultations définitives par les collectivités concernées.
Une carte des routes décentralisables a été fournie par les services de l’État.
M. Matthieu Orphelin. Mon sous-amendement est de précision. Il vise à systématiser le transfert d’informations, qui, selon les amendements, ne se ferait que sur demande. C’est nécessaire à la concertation.
M. Bruno Questel, rapporteur. Ce sous-amendement ne change pas le fond du dispositif, mais il implique une injonction au représentant de l’État alors que l’on ne peut imaginer que celui-ci, sollicité, ne réponde pas aux questions des collectivités. En outre, le dispositif dans son ensemble a été rédigé au terme d’une concertation entre l’État, les départements et les régions que je vous demande à toutes et tous de respecter.
Demande de retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Ce que prescrit le sous-amendement est déjà prévu dans la méthode choisie. Il n’est donc pas utile.
M. Rémy Rebeyrotte. Je remercie le rapporteur et la ministre d’être parvenus à un équilibre sur un sujet délicat. On part ici du terrain : certains départements demandent de bénéficier du transfert de voies nationales pour des raisons d’homogénéité de la gestion de l’ensemble de la voirie et parce qu’ils ont développé des services pour ce faire. Il aurait été catastrophique de produire une sorte de mise en concurrence entre les régions, auxquelles l’expérimentation offre la possibilité de s’orienter vers ce type de services, et les départements.
L’équilibre est bon car les départements, bénéficiaires des logiques de décentralisation, ont la main. La région ne peut intervenir qu’en cas d’accord avec les départements, notamment si l’un d’entre eux n’est pas en mesure d’assurer la montée en puissance nécessaire à la gestion de ces routes. En outre, l’échelon régional ne peut être impliqué que de façon expérimentale.
Cette approche pragmatique satisfait la demande des départements volontaires.
M. Matthieu Orphelin. Chaque frein à la transmission d’informations me pose un problème, en particulier du point de vue des groupes minoritaires au sein des collectivités concernées, même si le président de collectivité décide qu’il n’a pas besoin de ces informations. Si j’entends les arguments qui me sont opposés, je maintiens donc mon sous-amendement.
M. Mansour Kamardine. Je me réjouis de parler à des gens qui connaissent Mayotte. Mayotte est le dernier territoire où la décentralisation a eu lieu. La pauvreté y est élevée, les dotations n’y sont pas toujours au même niveau que sur le reste du territoire national et c’est là que les routes nationales, n’ayant pas évolué en quarante ans d’existence, sont les plus reculées. Imaginer une décentralisation des routes nationales à Mayotte, où elles couvrent 86 kilomètres, c’est condamner définitivement ces routes et le développement, notamment économique, du territoire.
Lorsque l’on a procédé à la fois à la départementalisation et à la décentralisation, il a été considéré que, dans certains domaines, la décentralisation ne se ferait pas. Alors que, sur l’ensemble du territoire national, elle a une quarantaine d’années, à Mayotte, on arrive à peine à dix ans, compte tenu de nos retards et difficultés techniques. L’État a ainsi décidé de conserver l’autorité de gestion des fonds européens.
Voilà pourquoi j’ai déposé un amendement, le CL452, aux termes duquel les dispositions en discussion ne pourront s’appliquer au département de Mayotte tant que l’on n’aura pas permis à ce territoire de progresser.
M. Hervé Saulignac. Il est heureux que les amendements de réécriture de l’article introduisent une concertation sous l’égide des préfets de région, mais il faut imaginer tous les scénarios. Supposons ainsi que deux collectivités soient en concurrence : un département qui revendique le transfert des routes nationales sur son territoire et la région qui souhaite expérimenter la gestion de ces routes. Si la concertation ne permet pas de définir une bonne répartition, comment celle-ci va-t-elle s’opérer ? Accordera-t-on la priorité au transfert des routes nationales au département ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Dans ce cas, l’État tranche dans l’intérêt général et au nom de la cohérence de l’itinéraire routier.
M. Pacôme Rupin. Dans la région francilienne, Île-de-France Mobilités (IDFM), autorité organisatrice de la mobilité (AOM), rassemble dans son conseil d’administration les départements, la région, qui y est majoritaire, et les intercommunalités et communes, notamment la Ville de Paris. Comment va y être gérée l’articulation entre expérimentation et décentralisation ? On gagnerait à donner le maximum de pouvoirs à IDFM en la matière, pour une gestion cohérente des transports publics et des principaux réseaux routiers, puisque l’un des enjeux est l’intermodalité, donc la bonne coordination entre la gestion des transports en commun et celle des routes.
M. Rémy Rebeyrotte. Les deux collectivités, départementale et régionale, ne sont pas tout à fait sur le même plan : au niveau des départements, il s’agit de renforcer la décentralisation, puisqu’ils ont déjà des compétences en matière routière, tandis que, pour les régions, le transfert est expérimental. Pouvez-vous nous le confirmer, madame la ministre ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je le confirme.
Par ailleurs, pour rassurer M. Mansour Kamardine, je rappelle que la décentralisation de routes ou de portions de routes nationales n’est possible que si la collectivité le demande. Cette précision s’applique évidemment à Mayotte.
Monsieur Pacôme Rupin, pour l’instant, nous avons confié les routes aux collectivités territoriales ; il ne serait pas impossible d’en transférer la gestion à Île-de-France Mobilités, mais le Gouvernement n’a pas choisi de le faire dans ce texte, dans l’attente d’une plus grande réforme de la métropole de Paris.
La commission rejette le sous-amendement.
Elle adopte les amendements et l’article 6 est ainsi rédigé.
En conséquence, les autres amendements s’y rapportant tombent.
Article 6 bis (art. L. 153-1 du code de la voirie routière) : Harmonisation de l’usage des ressources du péage d’un ouvrage d’art
La commission adopte l’article 6 bis non modifié.
Article 7 : Mise à disposition des régions volontaires et à titre expérimental de voies du domaine public routier national non concédé
Amendements identiques CL1632 rectifié de M. Bruno Questel et CL1629 rectifié du Gouvernement.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de la procédure de mise à disposition des voies aux régions. L’amendement supprime le I A de l’article adopté au Sénat et fusionne les premières étapes de la procédure et celles du transfert aux départements, aux métropoles et à la métropole de Lyon, en cohérence avec les modifications introduites par les amendements à l’article 6 que nous venons d’adopter. Il étend également aux routes nationales ou sections de routes nationales assurant la continuité du réseau autoroutier l’avis que devra rendre le représentant de l’État territorialement compétent s’agissant des projets d’aménagements substantiels des autoroutes mises à disposition des régions.
M. Raphaël Schellenberger. Une simple remarque sans visée de remise en cause : il s’agit de transférer une infrastructure de l’État aux régions, qui n’ont pas pour l’instant de compétence en matière de routes. Or une route n’est pas n’importe quelle infrastructure. Jusqu’à présent, le transfert d’infrastructures routières bénéficiait à une collectivité qui avait déjà une expertise dans ce domaine. Il ne s’agit pas seulement de construire des routes, mais aussi de les exploiter et de les entretenir. C’est un changement majeur.
J’ai bien conscience du fait que, pour certains itinéraires d’envergure nationale, le département n’est pas le bon échelon. La compétence départementale, qui fonctionnait très bien en Alsace, où le fonctionnement routier est assez simple – un axe nord-sud qui épouse la géographie de la région –, est moins évidente dans d’autres départements.
Toujours est-il que l’on va se trouver dans une situation que l’on voulait éviter : des départements et des régions compétents en matière de route, et les points de frottement qui en résulteront. Ce ne sera pas nécessairement plus simple qu’actuellement entre départements et État.
C’est donc la fin du réseau routier national qui couvre des grands axes d’envergure stratégique, ceux qui font l’objet de la grande planification, notamment pour l’investissement dans le renouvellement et la modification de l’infrastructure. Jusqu’à présent, le contrat de plan État-région (CPER) était un moyen pour l’État de se faire financer une partie de ses investissements par les collectivités. Lorsque l’infrastructure appartiendra à la collectivité territoriale, l’État continuera-t-il à intervenir à son profit dans ce cadre ? Je schématise : j’ai bien compris que les infrastructures sont sorties du CPER.
J’avais déjà posé la question dans le cadre du débat sur la loi « Alsace » ; il m’avait été répondu de façon circonstanciée que, pour les routes transférées de l’État à la collectivité européenne d’Alsace, ce serait le cas, mais qu’en est-il désormais, hors de ce cas d’espèce et dans le cadre, non plus d’une différenciation, mais bien d’une standardisation des transferts ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’expertise des services techniques sera évidemment mise à la disposition des régions : il n’est donc pas besoin de créer de nouvelles expertises.
Nous avons décidé que les CPER n’obéiraient pas à des maquettes nationales, mais que les priorités seraient négociées avec chaque région. Bien sûr, nous maintiendrons le financement des opérations prévues pour la mobilité dans le volet 2023-2027 des CPER.
Enfin, le rattachement aux régions se justifie par les échanges entre transports en commun et routes, évoqué par M. Pacôme Rupin à propos de l’Île-de-France. Les régions, du fait de leur compétence en matière de transports, peuvent avoir intérêt à s’impliquer s’agissant des routes.
M. Raphaël Schellenberger. Il s’agit tout de même du transfert de plusieurs milliers de kilomètres d’infrastructures valant plusieurs milliards. Je ne conteste pas la pertinence du transfert, ni même le choix d’en faire bénéficier les régions. En revanche, il faut avoir conscience du fait qu’il modifie la nature même de la région. Jusqu’à présent dominait la dichotomie entre compétences de gestion pour le département et compétences de planification et de vision prospective pour la région. Or l’exploitation d’une route relève bien de la gestion.
La commission adopte les amendements et l’article 7 est ainsi rédigé.
En conséquence, les autres amendements s’y rapportant tombent.
Article 7 bis (art. 1er de l’ordonnance n° 2021-408 du 8 avril 2021 relative à l’autorité organisatrice des mobilités des territoires lyonnais et art. L. 1243-1-1 [nouveau] du code des transports) : Ouverture à la région Auvergne-Rhône-Alpes de la possibilité de se retirer de l’autorité organisatrice des mobilités des territoires lyonnais
Amendements de suppression CL1000 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL717 de la commission du développement durable et CL493 de M. Jean-Louis Touraine.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je propose de supprimer les dispositions qui permettent le retrait de la région Auvergne-Rhône-Alpes des membres de droit de la nouvelle autorité organisatrice des mobilités des territoires lyonnais.
M. Jean-Louis Touraine. Créée récemment, la nouvelle autorité organisatrice des territoires lyonnais doit entrer en activité le 1er janvier prochain et remplacer le syndicat mixte des transports pour le Rhône et l’agglomération lyonnaise. La métropole de Lyon, plusieurs EPCI à fiscalité propre et la région Auvergne-Rhône-Alpes sont membres de droit de cet établissement public local. Le périmètre de ce nouvel établissement doit permettre de répondre aux enjeux de mobilité du bassin de vie lyonnais, raison pour laquelle la région y est intégrée au titre des services de mobilité qu’elle opère dans ce bassin de vie en tant que cheffe des mobilités. Ainsi, le projet de RER pour l’aire métropolitaine lyonnaise, qui fut au cœur des débats lors des dernières élections régionales, représente une solution aux besoins de mobilité de la métropole et de la région. Il ne serait donc pas souhaitable que la région puisse se retirer de cette nouvelle autorité organisatrice.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Pacôme Rupin. Cet article illustre bien la complexité du millefeuille territorial. Je ne suis pas certain que l’on y réponde clairement. J’ai bien noté la réponse de la ministre – attendre –, mais nous attendons depuis trop longtemps cette réforme. Tant que l’on n’aura pas défini précisément les compétences de chacun, il ne faudra pas s’étonner du taux d’abstention aux élections départementales et régionales !
Pour ce qui est de l’établissement public créé pour la métropole de Lyon, il est bien normal que tous les acteurs en soient membres mais il faudra clarifier les compétences. Il est indispensable de simplifier l’organisation du millefeuille territorial dans un domaine aussi important pour nos concitoyens que celui des transports.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 7 bis est supprimé.
Article 8 (art. L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales, art. L. 121-5 [nouveau] du code de la voirie routière et art. L. 2411-1, L. 2651-5, L. 2661-5, L. 2671-5 et L. 2681-5 du code de la commande publique) : Transfert temporaire de la maîtrise d’ouvrage d’opérations d’aménagement routier aux collectivités territoriales et à leurs groupements
Amendements identiques CL1508 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL719 de la commission du développement durable.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit d’éviter les situations de blocage auxquelles pourraient donner lieu les dispositions adoptées par le Sénat relatives aux opérations d’aménagement débordant du territoire d’une collectivité, en restreignant le droit de véto aux collectivités qui disposent de la même compétence pour la maîtrise d’ouvrage des travaux.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques CL1054 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL720 de la commission du développement durable.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement tend à supprimer l’obligation de motivation spéciale de la décision de l’État de ne pas transférer la maîtrise d’ouvrage d’une opération d’aménagement routier.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL1055 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendements identiques CL1056 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL721 de la commission du développement durable.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de supprimer l’application de l’article 8 aux territoires ultramarins, qui est impossible dans les faits, faute de réseau routier concerné.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’article 8 modifié.
Article 8 bis (section 2 [nouvelle] du chapitre V du titre Ier du code de la voirie routière et art. L. 2411-1 du code de la commande publique) : Élargissement des transferts de maîtrise d’ouvrage d’opérations d’aménagement et de travaux du domaine routier
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1057 et CL1058 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Elle adopte l’article 8 bis modifié.
M. Stéphane Mazars, président. Nous abordons les premiers articles dont l’examen a été délégué à d’autres commissions. Comme la présidente de la commission des Lois l’a indiqué hier, il nous faut formellement adopter ces articles, sans rouvrir les débats.
Par conséquent, je vais mettre directement et successivement aux voix les amendements adoptés par la commission du développement durable, puis les articles.
Article 9 (examen délégué) (art. L. 2111‑1‑1, L. 2111‑9‑1 A, L. 2111‑9‑1 B [nouveau], L. 2122‑2 et L. 2221-1 du code des transports et article L. 3114‑1 du code général de la propriété des personnes publiques) : Conforter les possibilités de transfert des petites lignes ferroviaires
La commission adopte successivement les amendements CL722, CL723, CL724, CL726, CL728, CL729 et CL730 de la commission du développement durable.
Elle adopte l’article 9 modifié.
La commission adopte l’amendement de suppression CL731 de la commission du développement durable.
En conséquence, l’article 9 bis est supprimé.
Article 9 ter (examen délégué) (art. L. 2121‑22 du code des transports) : Prise en compte des évolutions d’effectifs lors d’un changement d’attributaire d’un contrat de service public ferroviaire
La commission adopte l’amendement CL732 de la commission du développement durable.
Elle adopte l’article 9 ter ainsi modifié.
Après l’article 9 ter (examen délégué)
La commission adopte l’amendement CL733 de la commission du développement durable.
Article 9 quater (examen délégué) (art. 4 de la loi n° 2019‑1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités) : Étendre la possibilité de créer une société de projet pour financer et réaliser des projets d’infrastructures de transport phasés et à un stade plus précoce de leur élaboration
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL734 de la commission du développement durable.
Elle adopte l’article 9 quater ainsi modifié.
Article 9 quinquies (examen délégué) : Expérimentation du transport autonome sur rail par les conseils régionaux
La commission adopte l’amendement CL735 de la commission du développement durable.
Elle adopte l’article 9 quinquies ainsi modifié.
M. Stéphane Mazars, président. Nous reprenons l’examen du texte au titre de la commission des Lois, saisie au fond.
Article 10 (art. L. 130‑9 du code de la route) : Faculté pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’installer des radars automatiques
Amendements de suppression CL824 de la commission du développement durable et CL400 de M. Guillaume Garot.
M. Hervé Saulignac. L’amendement tend à supprimer cet article qui prévoit d’autoriser les collectivités territoriales et leurs groupements à installer des radars automatiques. Il suffit d’en parler à son préfet si l’on pense qu’il en manque un. Cette décision doit relever de l’État.
M. Bruno Questel, rapporteur. Les collectivités territoriales sont des acteurs majeurs de la sécurité routière au niveau local, gérant les infrastructures et disposant du pouvoir de police de la circulation, en particulier s’agissant de l’abaissement de la vitesse maximale autorisée. Dans ces conditions, les élus locaux sont souvent les mieux placés pour juger du bien-fondé de l’implantation d’un radar sur la voirie qu’ils gèrent et dont ils ont la responsabilité.
Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet article répond à une forte demande des maires de pouvoir installer des radars, après avis du préfet. Il ne s’agit pas de les multiplier pour complaire à qui que ce soit. Le ministère de l’intérieur y est favorable, mais il continuera à veiller à la cohérence des implantations. Il ne s’agirait que d’une faculté laissée aux maires.
Avis défavorable.
M. Pacôme Rupin. Une nouvelle fois, vous prenez le risque de brouiller la répartition des compétences, en accordant au maire un pouvoir qu’il devra partager avec le préfet. L’installation des radars doit relever exclusivement de l’État. Surtout, les élus locaux peuvent d’ores et déjà solliciter le préfet s’ils jugent nécessaires d’en implanter un nouveau. Par ailleurs, le maire pourrait être tenté de céder à la pression de ses administrés là où le préfet aurait une approche plus globale de la situation.
M. Rémy Rebeyrotte. L’intérêt de cette proposition est évident, surtout pour sécuriser l’entrée dans certaines villes. En revanche, il me semble indispensable de prévoir un avis conforme du préfet. Le maire sera pris en tenaille entre ceux qui voudront que la vitesse soit régulée et ceux qui se plaindront d’être attrapés pour excès de vitesse. Le préfet sera mieux placé pour juger de l’intérêt d’une telle décision et il pourra réfléchir avec le maire à la meilleure solution à retenir.
M. Hervé Saulignac. Je ne pensais pas que vous feriez ce cadeau au Sénat. Naïvement, j’étais convaincu que vous supprimeriez cet article dangereux. Nous aurons ainsi les radars du maire et ceux du ministre de l’intérieur.
Je suppose qu’une fois la décision prise par la collectivité territoriale d’installer un radar, c’est cette dernière qui en assumera la dépense. L’économie ainsi espérée pour l’État explique peut-être votre position mais qui encaissera les recettes ? Je comprendrais mal que ce soit l’État.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il ne s’agit pas d’un cadeau au Sénat mais d’un article initial du projet de loi. Pour avoir été maire et conseiller départemental, je mesure toute la complexité du problème. Rappelons cependant que l’avis du préfet devra être conforme, ce qui garantira la cohérence de l’implantation des radars.
L’installation d’un radar coûte plusieurs milliers d’euros et cette somme ne sera sans doute pas couverte par la dotation d’équipement des territoires ruraux. Beaucoup de maires reculeront face à la dépense. Enfin, la question, quand on est « à portée d’engueulade », n’est pas tant celle de la vitesse que de la sécurité, que nous devons toujours privilégier.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’ai été maire durant vingt-cinq ans : il est arrivé que des radars soient installés dans ma commune sans que j’en sois informée et tout le monde pensait que c’était le radar du maire !
Par ailleurs, les maires peuvent réguler la vitesse dans leurs communes. Les radars s’inscrivent dans cette logique. Leur installation sera à la charge des municipalités mais leur gestion relèvera de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI). Les amendes seront reversées à la collectivité territoriale.
La commission rejette les amendements.
Suivant l’avis du rapporteur, elle adopte successivement le sous-amendement rédactionnel CL1634 de M. Bruno Questel, rapporteur, et l’amendement CL1379 de Mme Nathalie Sarles sous-amendé.
La commission adopte successivement les amendements CL1292, de précision, et CL1059, rédactionnel, de M. Bruno Questel, rapporteur.
Elle adopte l’article 10 modifié.
Après l’article 10
L’amendement CL745 de la commission du développement durable est retiré.
Article 11 (art. L. 4316-12 [nouveau] du code des transports et art. L. 2132-10 du code général de la propriété des personnes publiques) : Renforcement des sanctions sur le domaine public fluvial
Amendements identiques CL1061 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL746 de la commission du développement durable.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de rétablir le caractère immédiat de la majoration de la redevance en cas d’installation sans titre d’ouvrage.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’amendement de précision CL1062 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL1530 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement tend à lever le plafond contraventionnel de la majoration de la redevance hydraulique en cas de rejets de sédiments non autorisés.
La commission adopte l’amendement.
Amendements CL747 de la commission du développement durable et CL1069 de M. Bruno Questel, rapporteur (discussion commune).
M. Bruno Questel, rapporteur. J’invite le rapporteur pour avis à retirer l’amendement de la commission du développement durable.
L’amendement CL747 est retiré.
La commission adopte l’amendement CL1069.
Amendement CL1070 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de supprimer la précision, introduite par le Sénat, selon laquelle l’autorité administrative veille à ce que le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues. En vertu du principe constitutionnel de proportionnalité des peines, il n’est pas nécessaire d’y faire explicitement référence.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL1072 de M. Bruno Questel, rapporteur.
La commission adopte l’article 11 modifié.
Après l’article 11
Amendements identiques CL1536 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL1535 du Gouvernement.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement tend à créer, dans une logique de partenariat, un régime de convention qui permettrait à l’État de confier à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales tout ou partie de l’aménagement, de l’exploitation et de l’entretien du domaine public fluvial. Ce faisant, ce régime offrirait une alternative au transfert de propriété. L’État resterait propriétaire de la voie d’eau et les collectivités prendraient une part active à la valorisation du domaine.
M. Raphaël Schellenberger. Je voterai ces amendements, car il est souhaitable que les collectivités territoriales puissent engager des projets pour des infrastructures fluviales de l’État. Cette proposition, cependant, ne vaut que pour l’avenir. Concernant le passé, les canaux de la Hardt et le canal Vauban en plaine d’Alsace, délaissés par l’État, sont sur le point d’être repris par la collectivité européenne d’Alsace en raison de leur importance pour l’aménagement hydraulique et à l’aménagement agricole. Cependant, la question de leur statut reste à trancher : s’agit-il d’infrastructure relevant du domaine public ou privé de l’État ? Je suppose que le ministère concerné saura y répondre en moins de trois ans.
Par ailleurs, les infrastructures sont occupées à titre gratuit, ce qui est bien compréhensible. En revanche, cela l’est moins lorsqu’elles sont laissées à des entreprises privées. C’est le cas de certaines installations hydroélectriques sur le Rhin et le canal du Rhin, concédées à EDF sans paiement de redevance aux collectivités territoriales. Si l’on compare cette situation à celle du Rhône, le manque à gagner pour les collectivités territoriale est abyssal.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Bien évidemment, je ne peux pas vous répondre ! Je transmettrai votre demande au ministère chargé des transports.
La commission adopte les amendements.
Chapitre III
La lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la biodiversité
Article 12 (art. L. 131-4 et L. 131-6-1 [nouveau] du code de l’environnement) : Réforme de la gouvernance de l’ADEME et délégation d’une partie des fonds « chaleur » et « économie circulaire » aux régions
Amendement CL1073 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de rétablir la rédaction initiale du projet de loi s’agissant de la présence d’un représentant des EPCI à fiscalité propre au conseil d’administration de l’ADEME. Il n’est pas souhaitable, comme l’a fait le Sénat, de fixer dans la loi la proportion de telle ou telle catégorie de représentants au sein du conseil d’administration. De telles précisions relèvent du domaine réglementaire.
Les collectivités territoriales et les EPCI représenteront ainsi de l’ordre de 15 % des membres du conseil d’administration, proportion relativement proche de celle prévue par le Sénat.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, les amendements se rapportant à l’alinéa 2 tombent.
Amendement CL1074 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de rétablir, à quelques différences rédactionnelles près, la rédaction initiale du projet de loi s’agissant de la délégation aux régions volontaires de la gestion des fonds « chaleur » et « économie circulaire ». La rédaction issue du Sénat ne précise pas suffisamment le montant des fonds délégués à chaque région. Elle laisse penser qu’il serait possible de confier à chaque région 20 % de l’ensemble des crédits de l’agence, ce qui est impossible en pratique.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement CL929 de M. Jean-René Cazeneuve tombe.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1075 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Elle adopte l’article 12 modifié.
Après l’article 12
Amendement CL1076 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de modifier la composition du conseil d’administration de l’Agence nationale de l’habitat en prévoyant une représentation de Régions de France.
La commission adopte l’amendement.
Article 12 bis (art. 78 et intitulé du chapitre VII du titre II de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles) : Transfert aux régions de la fonction comptable de la gestion des fonds structurels et d’investissement européens
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1077 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL456 de M. Mansour Kamardine.
M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement traduit l’inquiétude légitime de M. Mansour Kamardine quant à l’applicabilité de cet article à Mayotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis. L’article 12 bis prévoit que l’État confie aux régions, en leur qualité d’autorité de gestion des fonds européens, les missions relevant de la fonction comptable pour la période de programmation 2021-2027. Or Mayotte n’est pas une autorité de gestion.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 12 bis modifié.
Article 12 ter (art. L. 112-1-1 et L. 112-1-2 du code rural et de la pêche maritime) : Modification de la composition des commissions départementale et territoriale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers
Amendements de suppression CL1078 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL748 de la commission du développement durable et CL358 de M. Hervé Saulignac.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement tend à supprimer l’article afin de maintenir la composition actuelle des commissions de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF). Renforcer le poids des collectivités territoriales en attribuant au moins 50 % des sièges à leurs représentants reviendrait à amoindrir la représentation des autres acteurs. Ces collectivités et groupements sont déjà fortement représentées dans les CDPENAF. Enfin, une telle précision relève du domaine réglementaire.
M. Hervé Saulignac. Il serait regrettable, en effet, de briser l’équilibre, notamment au détriment des professions agricoles.
M. Paul Molac. Sans oublier les professions forestières, les chambres d’agriculture, les organismes nationaux et les associations de défense de l’environnement.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 12 ter est supprimé et les amendements CL425 de Mme Sereine Mauborgne, CL227 de Mme Sandra Marsaud et CL1256 de Mme Danielle Brulebois tombent.
Article 13 (examen délégué) (art. L. 414-1, L. 414-2 et L. 414-3 du code de l’environnement ; art.1395 E du code général des impôts) : Transfert de la compétence de gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres aux régions
La commission adopte successivement les amendements CL749, CL750, CL751, CL752, CL753 et CL754 de la commission du développement durable.
Elle adopte l’article 13 modifié.
La commission adopte l’amendement CL755 de la commission du développement durable.
Elle adopte l’article 13 bis ainsi modifié.
Article 13 ter (examen délégué à la commission du développement durable) (art. 167 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages) : Modalités de compensation de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les terrains situés sur un site Natura 2000 faisant l’objet d’un engagement de gestion
La commission adopte l’amendement de suppression CL756 de la commission du développement durable.
En conséquence, l’article 13 ter est supprimé.
Article 13 quater (examen délégué à la commission du développement durable) : Application différenciée des plafonds d’abattage des loups définis au niveau national
La commission adopte l’amendement de suppression CL757 de la commission du développement durable.
En conséquence, l’article 13 quater est supprimé.
Deuxième réunion du mardi 23 novembre à 21 heures 30
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Article 14 (art. L. 360-1 [nouveau] et L. 571-7 et chapitre III du code de l’environnement, art. L. 5211-9-2 et L. 5842-4 du code général des collectivités territoriales et paragraphe 4 [nouveau] de la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l’urbanisme) : Création d’un pouvoir de police spéciale dans les espaces naturels protégés
Amendement CL1079 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL758 de la commission du développement durable (discussion commune).
M. Bruno Questel, rapporteur pour les titres Ier à V. L’amendement tire les conséquences de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite climat et résilience, promulguée après l’adoption par le Sénat du présent projet de loi. Son article 231 permet déjà au maire ou au préfet de réglementer ou d’interdire l’accès aux espaces naturels protégés. Il prévoit également une interdiction des atterrissages d’aéronefs motorisés à des fins de loisirs en zones de montagne, rendant ainsi caduques les dispositions du présent article.
Mon amendement reprend toutefois la proposition du Sénat qui ouvre la possibilité, pour les maires, de transférer, de façon facultative, ce nouveau pouvoir de police des espaces naturels protégés au président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI).
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Je suis favorable à l’amendement CL1079 et demande le retrait de l’amendement CL758.
L’amendement CL758 est retiré.
La commission adopte l’amendement CL1079 et l’article 14 est ainsi rédigé.
En conséquence, les amendements identiques CL252 de M. Thibault Bazin, CL387 de Mme Marie-France Lorho, CL535 de M. Raphaël Schellenberger et CL1318 de M. Fabrice Brun tombent.
Après l’article 14
Amendement CL1381 de Mme Émilie Chalas.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement prévoit le transfert automatique de certains pouvoirs de police administrative en matière environnementale au président du conseil de métropole. Je comprends l’objectif, mais il s’agit là de pouvoirs de police d’ultraproximité et je m’interroge donc sur la pertinence de les laisser aux maires, plutôt qu’aux présidents de métropoles.
En outre, sur le plan juridique, les transferts de pouvoir de police ne s’appliquent qu’en cas de transferts de compétences de la commune vers l’EPCI dans le domaine réglementé.
Enfin, le transfert de pouvoir de police que vous prévoyez est automatique, et non facultatif, ce qui me semble excessif. Demande de retrait.
L’amendement est retiré.
Amendement CL1152 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Paul Molac. Il s’agit de transférer des pouvoirs de police aux intercommunalités qui, avec les maires, en feraient la demande. En l’état du droit, c’est impossible.
M. Bruno Questel, rapporteur. Votre amendement est déjà satisfait par l’article L. 541-44 du code de l’environnement et le décret n° 2020-1573 du 11 décembre 2020 portant diverses dispositions d’adaptation et de simplification dans le domaine de la prévention et de la gestion des déchets.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL1380 de Mme Émilie Chalas.
M. Rémy Rebeyrotte. Il est défendu.
M. Bruno Questel, rapporteur. Défavorable.
M. Rémy Rebeyrotte. Par solidarité, j’ai souhaité défendre ces amendements, mais vous avez raison de vous interroger sur l’unicité du pouvoir de police. La proximité est importante.
L’amendement est retiré.
Article 14 bis (art. L. 1111‑10 du code général des collectivités territoriales) : Dérogation aux règles régissant le financement des opérations dont les syndicats mixtes d’aménagement et de gestion de parcs naturels régionaux sont maîtres d’ouvrage
Amendement CL1529 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de conserver l’esprit de l’article 14 bis introduit par le Sénat, tout en le sécurisant juridiquement et en l’encadrant. L’amendement permet à un syndicat de parc naturel régional (PNR) et, plus largement, à un syndicat mixte fermé ou ouvert restreint, à un pôle métropolitain ou à un pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) de comptabiliser les concours financiers au budget du syndicat versés par ses membres, y compris les contributions exceptionnelles, comme des participations du maître d’ouvrage au financement des projets. Cela permettra d’assurer le financement des projets d’investissement des syndicats de PNR.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 14 bis modifié.
Article 14 ter (art. L. 122-1 et L. 181-10 du code de l’environnement) : Obligation de consultation du syndicat mixte d’aménagement et de gestion de parc naturel régional pour les plans et projets soumis à évaluation et autorisation environnementale
Amendement CL1066 de suppression de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous propose de supprimer cet article, qui vise à rendre obligatoire la consultation des PNR dans différentes procédures d’évaluation et d’autorisation environnementale.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 14 ter est supprimé.
Après l’article 14 ter
La commission rejette l’amendement CL1327 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier.
TITRE III
URBANISME ET LOGEMENT
Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous allons mettre aux voix les articles qui ont fait l’objet d’une délégation à la commission des affaires économiques.
Article 15 (examen délégué) (art. L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation) : Évolutions des modalités de détermination de la liste des communes exemptées de l’application des obligations SRU
La commission adopte successivement les amendements CL1429, CL1430, CL1431, CL1432 et CL1433 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 15 modifié.
Après l’article 15 (examen délégué)
La commission adopte l’amendement CL1434 de la commission des affaires économiques.
Article 15 bis (examen délégué) (art. L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation) : Pondération par typologie de prêt des logements intégrés au décompte SRU
La commission adopte l’amendement de suppression CL1435 de la commission des affaires économiques.
L’article 15 bis est supprimé.
Article 16 (examen délégué) (art. L. 302-7 du code de la construction et de l’habitation) : Contrôle préfectoral renforcé sur le bon usage des ressources financières issues du prélèvement SRU
La commission adopte successivement les amendements CL1436, CL1437, CL1438 et CL1439 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 16 modifié.
Article 17 (examen délégué) (art. L. 302-8 du code de la construction et de l’habitation) : Suppression de la date butoir de mise en conformité avec les obligations SRU et différenciation du rythme de rattrapage selon les communes
La commission adopte successivement les amendements CL1440, CL1441, CL1442, CL1443, CL1444, CL1445 et CL1446 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 17 modifié.
Article 18 (examen délégué) (art. L. 302-8-1 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) : Consécration législative du contrat de mixité sociale et capacité d’adapter l’échéancement du rattrapage des communes déficitaires
La commission adopte successivement les amendements CL1447, CL1448, CL1449, CL1450, CL1451, CL1452, CL1453 et CL1454 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 18 modifié.
Article 19 (examen délégué) (art. L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation) : Adaptation de la carence à la création du contrat de mixité sociale et instauration d’un taux de majoration minimal en cas de carence
La commission adopte l’amendement CL1455 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 19 modifié.
Article 19 bis (examen délégué) (art. L. 210-1 du code de l’urbanisme) : Suppression de l’exercice du droit de préemption par le préfet en cas d’arrêté de carence
La commission adopte l’amendement CL1456 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 19 bis modifié.
Article 20 (examen délégué) (art. L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l’habitation) : Suppression de la procédure d’aménagement des objectifs triennaux et des commissions départementales
La commission adopte l’amendement CL1457 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 20 modifié.
Article 20 bis (examen délégué) (art. L. 364-1 du code de la construction et de l’habitation) : Co-présidence par un élu du comité régional de l’habitat de l’hébergement (CRHH)
La commission adopte l’amendement CL1458 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 20 bis modifié.
Article 20 ter (examen délégué) (art. L. 364-1 du code de la construction et de l’habitation) : Élargissement des missions du comité régional de l’habitat de l’hébergement (CRHH)
La commission adopte l’amendement de suppression CL1459 de la commission des affaires économiques.
L’article 20 ter est supprimé.
Article 20 quater (examen délégué) (art. L. 411-5-1 du code de la construction et de l’habitation) : Avis conforme du préfet de département et du maire sur le déconventionnement de logements sociaux par les bailleurs institutionnels
La commission adopte l’article 20 quater non modifié.
Article 20 quinquies (examen délégué) (art. L. 442-6-4 du code de la construction et de l’habitation) : Rétablissement du lien entre le bail d’un logement social et celui de l’aire de stationnement associée dans les communes soumises à la loi SRU
La commission adopte l’amendement de suppression CL1460 de la commission des affaires économiques.
L’article 20 quinquies est supprimé.
Article 20 sexies (examen délégué) (art. L. 302-5-1 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) : Limitation de l’autorisation de construction des logements sociaux financés en prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI) dans les communes comptant déjà plus de 40 % de logements sociaux
La commission adopte l’amendement de suppression CL1461 de la commission des affaires économiques.
L’article 20 sexies est supprimé.
Article 20 septies (examen délégué) : Remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement sur les conséquences du zonage du financement des logements sociaux dans les communes soumises à la loi SRU
La commission adopte l’amendement de suppression CL1462 de la commission des affaires économiques.
L’article 20 septies est supprimé.
Article 21 (examen délégué) (art. L. 313-34 du code de la construction et de l’habitation) : Élargissement de l’objet social de l’Association foncière Logement
La commission adopte l’article 21 non modifié.
Article 22 (examen délégué) (art. L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation, art. 111 et 114 de la loi n° 2018‑1021 du 23 novembre 2018 et art. 81 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017) : Renforcement des dispositifs de mixité sociale dans le logement social, accès au logement social des travailleurs des secteurs essentiels et report des réformes de la gestion en flux des réservations et de la cotation des demandes de logements sociaux
La commission adopte successivement les amendements CL1463, CL1464 et CL1465 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 22 modifié.
Après l’article 22 (examen délégué)
La commission adopte successivement les amendements CL1466 et CL1467 de la commission des affaires économiques.
Article 22 bis A (examen délégué) (art. L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation) : Exemption des logements réservés par les établissements publics de santé de la gestion en flux annuel des logements sociaux
La commission adopte l’article 22 bis A non modifié.
Après l’article 22 bis A (examen délégué)
La commission adopte l’amendement CL1468 de la commission des affaires économiques.
Article 22 bis B (examen délégué) (art. L. 353-15, L. 411-3 et L. 442-6 du code de la construction et de l’habitation) : Ouverture de la possibilité de changer le statut ou l’usage de logements locatifs sociaux faisant l’objet d’une opération de renouvellement urbain et suppression du droit au maintien dans le logement
La commission adopte l’amendement CL1469 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 22 bis B modifié.
Article 22 bis (examen délégué) (art. L. 441-2 du code de la construction et de l’habitation) : Réunion dématérialisée des commissions d’attribution des logements et d’examen de l’occupation des logements (CALEOL)
La commission adopte l’article 22 bis non modifié.
Article 22 ter (examen délégué) (art. L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation) : Ajout au contingent communal d’attribution de logements sociaux du reste des logements non réservés
La commission adopte l’amendement de suppression CL1470 de la commission des affaires économiques.
L’article 22 ter est supprimé.
Article 22 quater (art. L. 441-1, L. 441-1-5 à L. 441-1-6, L. 441-2, L. 441-2-2 et L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation) : Attribution des logements sociaux dans les résidences fragiles
La commission adopte l’amendement de suppression CL1471 de la commission des affaires économiques.
L’article 22 quater est supprimé.
Article 23 (examen délégué) (art. 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique) : Prolongation de l’expérimentation relative à l’encadrement des loyers dans le cadre fixé par l’article 140 de la « loi ELAN »
La commission adopte l’amendement CL1472 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 23 modifié.
Après l’article 23 (examen délégué)
La commission adopte successivement les amendements CL1473 et CL1627 de la commission des affaires économiques.
Article 24 (examen délégué) (art. 206 et 209 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique) : Prolongation des délais de mise en conformité des règlements de copropriété à propos de la consistance des lots transitoires et de la mention des parties communes spéciales ou à jouissance privative
La commission adopte l’article 24 non modifié.
Article 25 (examen délégué) (art. L. 301-5-1 du code de la construction et de l’habitation ; art. L. 3641-5, L. 5217-2 et L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales) : Harmonisation des régimes de délégation de compétences de l’État entre les EPCI et les métropoles en matière de politique de logement et d’hébergement
La commission adopte l’article 25 non modifié.
Article 25 bis A (examen délégué) : Reconnaissance aux collectivités et à leurs groupements du statut d’autorités organisatrices de l’habitat
La commission adopte l’amendement CL1474 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 25 bis A modifié.
Article 25 bis (examen délégué) (art. L.5219-1 du code général des collectivités territoriales) : Prorogation des conventions de délégation de compétences en matière de politique d’aide au logement et d’hébergement entre l’État et la Métropole du Grand Paris
La commission adopte l’article 25 bis non modifié.
Article 26 (examen délégué) (art. L. 303-3 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) : Ouverture des opérations de revitalisation de territoire aux communes périphériques d’une intercommunalité polycentrée
La commission adopte l’article 26 non modifié.
Article 27 (art. L. 1123-1, L. 2222-20 du code général de la propriété des personnes publiques, art. L. 2243-1, L. 2243-3, L 2243-4, L. 6213-7, et L. 6313-7 du code général des collectivités territoriales) : Biens sans maître et biens en état manifeste d’abandon
Amendement CL143 de M. Vincent Bru.
M. Vincent Bru. Il s’agit de faciliter l’appropriation des biens sans maître par les communes. Dans la rédaction actuelle de l’article, le bien n’a pas de maître si « aucun successible ne s’est présenté » à la succession ou en l’absence de « propriétaire connu ».
La notion de « successible » et le fait que ce dernier doive se « présenter » semblent insuffisants. La vérification au fichier immobilier tenu par le service de la publicité foncière serait un critère objectif de vérification.
De même, de qui doit être « connu » le propriétaire ? L’ajout du terme « identifiable » permettrait de recourir au fichier d’état civil, aux matrices cadastrales ainsi qu’à tout document objectif, ce qui sécuriserait la procédure.
M. Bruno Questel, rapporteur. Votre amendement, intéressant, comporte deux parties. La première porte sur les biens en déshérence après un décès et pour lesquels personne ne se présente pour hériter. En l’état du droit, le régime des biens sans maître peut s’appliquer au bout de trente ans, lorsqu’aucun successible ne s’est présenté. Votre amendement propose de remplacer la notion de présentation du successible par une consultation du fichier immobilier. Après échange avec le Gouvernement, il apparaît que le dispositif actuel est plutôt satisfaisant. Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cette partie de l’amendement.
La deuxième partie de votre amendement porte sur les biens pour lesquels aucun propriétaire n’est connu et dont la taxe foncière n’est pas payée. La difficulté que rencontrent les communes pour identifier ces biens est réelle et la question que vous soulevez est pertinente et légitime. Toutefois, la solution que vous proposez ne me paraît pas de nature à résoudre la difficulté – elle la déplace au contraire. Vous proposez de remplacer le mot « connu » par « identifiable », ce qui n’est pas plus clair. Je vous invite à retirer votre amendement au profit de celui que j’ai déposé après l’article 27 – le CL967.
L’amendement est retiré.
Amendement CL828 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Paul Molac. Les régions méditerranéennes sont particulièrement exposées au risque d’incendie de forêt. Ainsi la Corse est-elle touchée en moyenne chaque année par plus de 2 500 incendies détruisant 21 000 hectares selon la base de données Prométhée et se déclenchant même en hiver, comme ce fut le cas dans la nuit du 3 au 4 janvier 2018. Dans le contexte actuel de changement climatique – et donc d’augmentation de la température moyenne – ainsi que de désertification rurale, le risque est extrêmement élevé dans les régions déjà touchées par le phénomène, mais ce dernier peut largement se répandre à d’autres régions habituellement moins touchées.
Parmi les mesures juridiques de prévention des incendies, l’obligation de débroussaillement des parcelles par les propriétaires est très importante, notamment pour limiter la propagation des feux proches des habitations. En cas de défaillance du propriétaire, le maire de la commune doit procéder au débroussaillement, puis au recouvrement des sommes payées auprès du propriétaire.
Cependant, de nombreux propriétaires sont défaillants et les opérations de débroussaillement et de recouvrement deviennent de plus en plus complexes à mettre en œuvre par les communes. Elles pèsent sur les budgets déjà faibles. À cela s’ajoutent parfois pour les zones montagneuses les difficultés liées au relief, comme le précisent des chercheurs de l’École nationale supérieure des mines de Paris, dite MINES ParisTech : « la carence dans la mise en œuvre de l’obligation de débroussaillement est aussi due à la difficulté de procéder au débroussaillement dans des reliefs accidentés et en lieu et place de propriétaires défaillants, ce qui constitue une lourde charge financière pour les communes, notamment les communes rurales ou de zones de montagne peu habitées ».
Afin de remédier aux carences de débroussaillement par les propriétaires bien souvent inexistants ou laxistes, et face au risque important d’incendie qui en découle, l’amendement vise à considérer qu’un bien est sans maître si son propriétaire n’a pas remboursé les sommes engagées par la commune dans un délai de douze mois à compter de l’affichage du constat de carence établi par le maire.
En outre, afin de ne pas porter atteinte au droit de propriété de manière disproportionnée, en plus du délai d’un an, les dispositions de l’article L. 2222‑20 du code général de la propriété des personnes publiques relatives à l’action en revendication s’appliqueraient pour le propriétaire.
M. Bruno Questel, rapporteur. Nous avions adopté un tel dispositif lors des débats à l’Assemblée nationale de la loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite engagement et proximité. Nous avons ensuite accepté sa suppression en commission mixte paritaire car, si on comprend son objectif, il pose plusieurs problèmes d’ordre juridique et constitutionnel.
Votre amendement propose d’appliquer le régime des biens sans maître – et donc de priver de propriété – des personnes qui ne se soumettraient pas à l’obligation de débroussaillement. Cela ne tiendrait pas devant les tribunaux. Je suis donc défavorable à l’amendement. Mais je suis à votre disposition pour traiter le problème dans un autre cadre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Un bien sans maître n’a pas de propriétaire. En l’espèce, le problème est différent : des propriétaires, connus, ne coupent par exemple pas les branches de leurs arbres, qui dépassent chez le voisin ou dans l’espace public. Dans ce cas, on fait réaliser les travaux et le propriétaire règle la facture. Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL1307 de M. Michel Castellani.
M. Paul Molac. Il s’agit de corriger un défaut de rédaction des articles L. 1123‑3 et L. 1123‑4 du code général des personnes publiques, ainsi que de l’article 713 du code civil, tels que modifié par l’article 109 de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
Le législateur avait alors souhaité rendre possible, sous conditions, le transfert de biens vacants et sans maître aux conservatoires d’espaces naturels. Tels que rédigées, ces dispositions limitent l’application de la procédure aux seuls périmètres de compétence géographique du Conservatoire du littoral. Or la maîtrise des biens vacants et sans maître dépasse les limites des périmètres d’interventions du Conservatoire du littoral.
La modification proposée contribuerait à la préservation des espaces naturels et des écosystèmes en développant la lutte contre l’artificialisation des sols. Par son extension à l’ensemble du territoire national, elle permettrait aux conservatoires d’espaces naturels d’accompagner les collectivités dans la gestion des biens vacants comportant un intérêt en termes de biodiversité.
M. Bruno Questel, rapporteur. En l’état du droit, la propriété des biens sans maître est transférée selon les cas à la commune ou à l’État. Dans le cas où elle est transférée à l’État, elle peut être transférée à certains opérateurs ou établissements, comme aux conservatoires régionaux d’espaces naturels (CREN). Il suffit que les CREN en fassent la demande, à condition toutefois que le bien soit situé dans le périmètre de compétence géographique du Conservatoire du littoral.
Votre amendement propose d’étendre le périmètre géographique d’intervention des CREN à tous les cas de figure où la propriété du bien sans maître revient à l’État. Cela me paraît pertinent car les périmètres d’intervention des CREN ne se limitent pas à celui du Conservatoire du littoral. Avis favorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je ne serai pas du même avis que le rapporteur même si, sur le fond, je suis d’accord puisqu’il s’agit d’étendre au niveau national une possibilité qui existe en Corse.
Toutefois, tel qu’il est rédigé, votre amendement ne fonctionne pas. Nous envisagions de le sous-amender mais cela impliquerait de trop nombreuses dispositions de coordination. Je vous propose donc de le retirer et de vous rallier, pour la séance publique, à la nouvelle rédaction que nous avons préparée et qui répond à votre préoccupation. Je la tiens à votre disposition.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 27 non modifié.
Après l’article 27
Amendements identiques CL424 de Mme Jeanine Dubié, CL430 de M. Raphaël Schellenberger et CL1211 de Mme Pascale Boyer.
M. Paul Molac. En métropole, la forêt appartient aux trois quarts à des propriétaires privés. Sur plus de 3 millions de propriétaires français, 2,2 millions possèdent moins d’un hectare. Les 50 000 propriétaires possédant plus de 25 hectares réunissent quant à eux environ 52 % de la surface forestière privée et assurent les trois quarts de la commercialisation des bois des forêts privées. La forêt publique domaniale ou communale représente, quant à elle, un quart de la forêt métropolitaine et fournit près de 40 % de la récolte de bois.
Ces statistiques montrent que les forêts qui disposent d’un plan de gestion durable – celles de plus de 25 hectares et les forêts publiques – sont plus productives que les petites forêts privées. Le morcellement de la forêt privée est plus important en montagne qu’en plaine et constitue un frein à son exploitation. En zone de montagne, la forêt privée se caractérise par des propriétés de faible taille, comprises entre 1,5 hectare et 5 hectares, un accroissement de la forêt privée liée à la déprise des parcelles agricoles vivrières sans aucun remembrement, et des propriétaires qui n’ont pas de culture forestière et ont souvent hérité. Parfois, certains ignorent même qu’ils sont propriétaires forestiers !
Il est nécessaire de faciliter l’utilisation de la procédure d’acquisition des biens sans maître pour les communes forestières en ramenant à dix ans – au lieu de trente actuellement – le délai pour lancer une telle procédure pour les parcelles forestières en zone de montagne, en accordant, en contrepartie, une indemnisation au propriétaire si celui-ci se manifeste avant l’échéance de la prescription acquisitive de trente ans.
Mme Catherine Kamowski. Cet amendement, porté par l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM), vise à ramener à dix ans, au lieu de trente, le délai pour lancer une procédure d’acquisition de bien sans maître.
M. Bruno Questel, rapporteur. Des amendements similaires ont été déposés à l’article 27. Votre objectif est d’étendre aux parcelles forestières des communes de montagne le dispositif proposé à l’article 27 consistant à réduire de trente à dix ans le délai à partir duquel un bien peut être considéré comme sans maître.
Mon avis est défavorable. L’extension que vous proposez porte une atteinte au droit de propriété, qui n’est pas proportionnée avec l’objectif d’intérêt général poursuivi, à savoir la redynamisation de certaines zones, entraînant un risque d’inconstitutionnalité.
L’amendement CL967 que je vous présenterai après l’article 27 permettra de faciliter l’appréhension de ces biens en prévoyant une dérogation au secret fiscal en faveur de la commune. Cela me paraît donc de nature à résoudre les difficultés que vous soulevez, sans faire peser de risques constitutionnels sur l’article.
Je vous demanderai de bien vouloir retirer ces amendements. À défaut, j’y serai défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis. En élargissant trop, on affaiblit le dispositif et on risque l’inconstitutionnalité.
M. Rémy Rebeyrotte. Je suis très partagé car les arguments de M. Molac sont pertinents : la forêt privée française est morcelée et beaucoup de biens sont complètement à l’abandon. Parfois, les propriétaires ne savent même pas qu’ils sont propriétaires de 1, 2 ou 3 hectares de forêt ! Comment dynamiser et mobiliser nos moyens forestiers ? Ne pourrait-on aller plus loin que la simple levée du secret fiscal ?
M. Raphaël Schellenberger. Je retire mon amendement, qui est un amendement d’appel, et qui contrevient en effet au droit de propriété. Le détachement de parcelles au fil des générations successives est un vrai sujet. Il s’agit souvent de biens possédés en indivision par de nombreux propriétaires qui en ignorent l’existence.
En outre, la forêt ne suscite pas vraiment d’intérêt parmi les jeunes générations qui quittent les métropoles et les villes pour s’installer à la campagne. Concernant la forêt privée, il faut distinguer le petit affouagiste qui fait du bois pour lui-même et son voisin sur ses quelques hectares de forêt des grands exploitants forestiers. Dans les années à venir, nous devrons trouver un équilibre entre les petites parcelles, qui, même sous-exploitées, présentent un intérêt certain pour la forêt, et les grandes parcelles, parfois exploitées de façon intensive.
Mme Catherine Kamowski. L’amendement CL1211, dont nous sommes plusieurs cosignataires, est issu des travaux de l’Association nationale des élus de la montagne. J’ai été maire d’une commune située en pied de montagne. À la suite d’un incendie assez important en 2013 sur un mont particulièrement raide et difficile d’accès, nous avons eu beaucoup de mal à retrouver les propriétaires des parcelles pour faire abattre les arbres qui avaient été fragilisés. Le recensement n’a pas été aisé même pour une commune de 15 000 habitants employant 400 équivalents temps plein (ETP) de personnel. Nous ne retrouvions plus, dans les archives municipales, les propriétaires de ces terrains longs et étroits que l’on appelle des drailles.
Je maintiens l’amendement, dont je ne suis pas la première signataire, tout en entendant les difficultés juridiques qu’il soulève. J’appelle l’attention sur les difficultés que rencontrent les maires en matière d’identification des propriétaires de parcelles, qui en ont parfois hérité d’un bisaïeul dont ils ne savent plus rien. Il s’agit aussi d’un problème d’occupation du territoire, non seulement en milieu rural, mais aussi, spécifiquement, en zone de montagne.
M. Paul Molac. Nous sommes confrontés au même problème en Bretagne, qui n’est pourtant pas encore une zone de montagne. Nous avons du mal à retrouver les propriétaires de parcelles de moins d’un hectare. Lorsque c’est le cas, nous parvenons parfois à faire vendre le bois et à replanter, car notre région compte de nombreuses scieries, qui produisent notamment des palettes. Leur pérennité dépend précisément de la possibilité de faire pousser des arbres.
M. Rémy Rebeyrotte. Cette situation engendre aussi des problèmes de sécurité dès lors qu’on ne peut pas entrer dans cette forêt fractionnée et qui n’est pas entretenue. Le modèle de la petite parcelle suppose en effet l’intervention des affouagistes. Or il en existe de moins en moins, et certains villages n’en ont même aucun. La forêt est donc à l’abandon, les propriétaires, souvent inconnus, ne souhaitant pas s’en occuper.
L’amendement CL430 est retiré.
La commission rejette les amendements CL424 et CL1211.
Amendements identiques CL967 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL1382 de Mme Alice Thourot.
M. Bruno Questel, rapporteur. Ces amendements devraient répondre aux interrogations et aux inquiétudes des uns et des autres. Ils visent à fusionner les procédures prévues aux articles L. 1123-3 et L. 1123-4 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) relatives à l’acquisition d’un bien bâti ou non bâti présumé sans maître, laquelle est applicable si les taxes foncières afférentes n’ont pas été recouvrées pendant trois ans. Il s’agit d’introduire une dérogation au secret fiscal en la matière. En pratique, il suffira à la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) concerné de fournir aux services fiscaux les références cadastrales de la parcelle d’assise du bien concerné pour recevoir son état de situation d’imposition et engager les procédures adaptées.
M. Rémy Rebeyrotte. Cette disposition, associée à la possibilité offerte aux acteurs de la forêt d’accéder au cadastre numérique, ce qui leur permet d’engager des démarches auprès des propriétaires, permettra, dans une logique de dialogue, de débloquer certaines situations.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’amendement CL142 de M. Vincent Bru tombe.
Article 27 bis A (art. L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales) : Extension du pouvoir de police spéciale du maire en matière d’entretien des terrains non bâtis
Amendement CL664 de M. Luc Lamirault.
M. Christophe Euzet. Afin de parer au danger que présentent certains biens non entretenus par leurs propriétaires, le droit en vigueur offre au maire la possibilité de leur demander l’exécution de travaux et d’y procéder d’office, à leurs frais, en cas d’inexécution après mise en demeure. L’amendement vise à permettre à la commune d’acquérir le bien, conformément à la procédure d’expropriation applicable aux biens en état d’abandon manifeste.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je crains que l’amendement ne contrevienne au droit de propriété. S’agissant des biens en situation de péril, il existe des procédures permettant de réaliser des travaux aux frais du propriétaire, voire de les démolir. Demande de retrait ou avis défavorable.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 27 bis A non modifié.
Article 27 bis B (art. L. 323-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique) : Acompte dû aux locataires en cas d’expropriation du local professionnel dans lequel ils exercent leur activité
La commission adopte l’article 27 bis B non modifié.
Article 27 bis (art. L. 161-6-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Régime applicable aux chemins ruraux : interruption et suspension de la prescription acquisitive
Amendements identiques CL1347 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL1095 de M. Patrick Loiseau et CL1383 de Mme Jacqueline Dubois.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de prévoir une suspension, au lieu d’une interruption, du délai de prescription applicable en cas de recensement des chemins ruraux. Un riverain qui s’approprie à tort, de façon involontaire sans doute, un chemin rural, devient automatiquement propriétaire de sa parcelle d’assise trente ans après si la commune ne fait rien pour la récupérer. Ce délai très long laisse beaucoup de temps pour réagir. En droit civil, ce mécanisme est appelé usucapion ou prescription acquisitive. Les dispositions adoptées au Sénat prévoient une interruption de celle-ci pendant le recensement des chemins ruraux. L’amendement vise à remplacer le mot « interruption » par le mot « suspension », en vue de garantir leur constitutionnalité.
La commission adopte les amendements.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1489 de M. Bruno Questel.
Amendements identiques CL759 de la commission du développement durable, CL24 de M. Bertrand Pancher, CL435 de M. Raphaël Schellenberger, CL549 de Mme Lise Magnier et CL820 de M. Hervé Saulignac.
M. Paul Molac. Il s’agit de s’assurer que le recensement des chemins ruraux vise à les conserver et à éviter leur suppression pure et simple.
M. Raphaël Schellenberger. La propriété forestière, les biens présumés, les chemins ruraux, autant de sujets importants en milieu rural ! Parfois, le retour à la ruralité est d’abord le fait des ruraux, qui en redécouvrent certains usages, même s’ils y vivent depuis plusieurs années.
Cette question est moins anodine qu’elle n’en a l’air. Souvent, les chemins ruraux qui ont été oubliés l’ont été après des remembrements, qui leur ont fait perdre leur utilité. En raison des changements de la société rurale, ils en retrouvent une. Les amendements visent à donner le temps aux acteurs des milieux ruraux et périurbains de se les réapproprier. Ils leur offrent de la souplesse, car recenser tous les chemins ruraux d’une commune n’est pas toujours simple. Certains recensements sont incomplets. Les recenseurs ont droit à l’erreur.
M. Christophe Euzet. Les chemins ruraux, pour la pratique du sport ou en raison de l’intérêt environnemental et paysager qu’ils présentent, font l’objet d’un regain d’intérêt manifeste. Au cours des dernières décennies, ils ont souvent disparu au gré des remembrements et des aliénations successives. Leur inventaire doit être exhaustif.
M. Hervé Saulignac. La suppression de l’alinéa 4, dont la rédaction induit la possibilité de ne procéder qu’à un recensement partiel des chemins ruraux, permet d’éviter la contestation du droit de propriété des communes. Il importe de procéder à leur recensement exhaustif pour éviter que la commune ne soit contestée dans son droit de propriété à l’issue de la période de prescription acquisitive.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je n’ai rien d’autre à ajouter à cet œcuménisme qu’un avis favorable.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques CL556 de M. Raphaël Schellenberger, CL945 de Mme Emmanuelle Ménard et CL1093 de M. Charles de Courson.
M. Raphaël Schellenberger. Ces amendements peuvent être utiles aux affouagistes qui exploitent une parcelle de forêt en utilisant un tracteur. Ils permettent de résoudre les difficultés soulevées à propos de la réappropriation des chemins ruraux, en permettant des échanges facilitant leur redéfinition. S’ils ont été oubliés, c’est parfois parce qu’ils sont mal placés au sein d’une parcelle, ou parce que celle-ci a été décalée en raison de l’évolution des modes d’exploitation. Il y a lieu de permettre aux collectivités locales d’échanger les parcelles où se trouvent des chemins ruraux. Il est un peu surprenant qu’elles ne le puissent pas. Au demeurant, elles le font parfois, de façon un peu cavalière. Il s’agit de leur permettre de le faire dans un cadre légal respectable.
Mme Emmanuelle Ménard. En raison d’une interprétation littérale des dispositions de l’article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime, le Conseil d’État prohibe l’échange des chemins ruraux. Conformément à une jurisprudence constante établie dès 1980, la haute juridiction considère que le législateur n’a pas entendu ouvrir aux communes, pour l’aliénation des chemins ruraux, d’autres procédures que celle de la vente dans les conditions précisées à cet article. Cette jurisprudence est la même quel que soit l’objectif de la commune, fût-ce la rectification de l’assiette d’un chemin.
Depuis plusieurs années, les gouvernements successifs sont priés de revenir sur cette position, en vue de résoudre à l’amiable le rétablissement des continuités. Il s’agit d’une mesure de bon sens, qui permettrait par exemple l’échange d’une portion de chemin rural située au milieu d’un champ cultivé avec une bande de terrain située à son périmètre, ce qui semble logique. Autoriser cette pratique en bonne intelligence de part et d’autre simplifierait les choses pour tout le monde, commune comprise.
M. Paul Molac. En cas d’échange de chemins ruraux, la largeur et la qualité environnementale du chemin créé devront être identiques à celles du chemin remplacé. Cela permet de la souplesse, tout en comportant un garde-fou.
M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable. En effet, les amendements seront satisfaits, dans leur esprit et dans leur lettre, par l’article 27 ter, qui vise à régir l’échange de parcelles au sein du régime applicable aux chemins ruraux, en préservant leur qualité d’origine.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. La disposition proposée a été adoptée par le Sénat, avec l’avis favorable du Gouvernement. Elle figure, en effet, à l’article 27 ter. Demande de retrait ou avis défavorable.
Les amendements sont retirés.
La commission adopte l’article 27 bis modifié.
Après l’article 27 bis
Amendement CL947 de Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard. Mon amendement prévoit le recensement quinquennal, par les communes, de leurs chemins ruraux. Au cours des dernières décennies, nous avons déploré la disparition d’au moins 200 000 kilomètres – 250 000 ou 300 000 d’après certaines estimations – de chemins ruraux, au gré des remembrements, des aliénations successives et des accaparements par des riverains plus ou moins indélicats. Or le réseau des chemins ruraux constitue un patrimoine inestimable qu’il convient de préserver, surtout à l’heure où les Français sont de plus en plus désireux de renouer avec la nature, donc avec les promenades qu’ils permettent. Il est nécessaire de les connaître et de les recenser régulièrement.
M. Bruno Questel, rapporteur. Madame Ménard, si l’esprit de votre amendement peut emporter l’adhésion, sa rédaction méconnaît le principe de libre administration des collectivités. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL821 de M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac. Mon amendement vise à préciser les conditions dans lesquelles les communes peuvent revendiquer la propriété des chemins ruraux sans titre, en étendant ce droit aux chemins permettant de relier deux voies publiques.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement prive la commune de la liberté d’organiser comme elle le souhaite son espace rural et de recenser ses chemins ruraux au rythme où elle le souhaite. Par ailleurs, il a pour effet d’élargir la définition du chemin rural, car il ne retient pas le critère de son affectation au public. Il constitue donc une atteinte au droit de propriété. L’incorporation automatique dans les chemins ruraux de tout chemin reliant deux voies publiques opérerait automatiquement un transfert de propriété en faveur de la commune, même s’il s’agit d’un chemin privé ou d’exploitation.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le droit en vigueur apporte une réponse suffisante au problème des chemins ruraux sans titre, dans la mesure où il fixe une présomption de propriété selon des critères légitimes. Soit le chemin rural est affecté à l’usage du public, ou fait l’objet d’actes réitérés de surveillance et de voirie accomplis par l’autorité municipale, et il est présumé appartenir à la commune ; soit il sert exclusivement à la communication entre fonds privés ou à leur exploitation, et il est présumé appartenir à une indivision propriétaire de ces fonds. Les critères de la présomption de propriété ne peuvent être élargis sans risquer de remettre en cause un droit de propriété existant. Les dispositions proposées encourent un risque d’inconstitutionnalité. Avis défavorable.
M. Raphaël Schellenberger. Nous sommes tous de grands défenseurs des chemins ruraux, mais il ne faut pas oublier qu’ils sont d’abord des chemins d’exploitation. Si l’exploitation, notamment agricole, et notamment de petites parcelles, a changé, suscitant parfois leur abandon et leur oubli, puis leur reconquête rurale nécessitant leur réappropriation publique, il ne faut pas oublier que leur vocation initiale est l’exploitation.
Le droit offre un outil assez largement utilisé en Alsace, les associations foncières de remembrement (AFR). Cela fonctionne plutôt bien jusqu’au jour où la DGFIP considère qu’il serait préférable que la collectivité s’occupe des chemins ruraux au lieu de les confier à une AFR, vue comme une sorte d’incongruité administrative qui rend complexe la comptabilité publique et dont la digestion des investissements est difficile, tant et si bien que l’AFR finit par être liquidée, et que l’on oublie que le chemin rural était un outil d’exploitation. Il devient un lieu de promenade, sur lequel le tracteur sera bientôt interdit ! Je crains que l’amendement, en considérant systématiquement le chemin rural comme un bien public, ne s’inscrive dans cette logique.
Le chemin rural est d’abord un vecteur d’exploitation. Il serait de bon ton que les agents locaux de la direction générale des finances publiques (DGFIP), et les conseillers aux décideurs locaux (CDL) appelés à les remplacer, évitent de considérer trop souvent que l’AFR est un mauvais outil. Il s’agit du meilleur outil pour associer correctement les exploitants à la gestion de leurs chemins ruraux, qui sont par ailleurs au service de l’intérêt commun.
La commission rejette l’amendement.
Article 27 ter (art. L. 161-10-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime, art. L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques) : Régime applicable aux chemins ruraux : échanges de parcelles
Amendement CL552 de Mme Lise Magnier.
M. Christophe Euzet. Le critère de « qualité environnementale » est flou, ce qui est propice aux contentieux. Le chemin rural étant une voie de circulation, il faut avant tout prendre en compte les besoins de ses utilisateurs.
La formulation proposée par l’amendement permet de garantir l’adéquation entre les caractéristiques du nouvel aménagement et les besoins des usagers.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 27 ter prévoit que l’acte d’échange doit conserver la qualité environnementale du chemin rural remplacé ou modifié par rapport au précédent, mais aussi sa largeur. Il est aussi prévu que cet acte comporte des clauses permettant de garantir la continuité du chemin rural
L’amendement est en grande partie satisfait par la rédaction actuelle, notamment en ce qui concerne la question de la largeur. Concernant les autres critères proposés par l’amendement, ils sont englobés par les notions de qualité environnementale et de garantie de la continuité du chemin. Demande de retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis défavorable, car je crois davantage à ce que M. Molac a défendu précédemment.
L’amendement est retiré.
Amendement CL551 de Mme Lise Magnier, amendements identiques CL437 de M. Raphaël Schellenberger et CL550 de Mme Lise Magnier (discussion commune).
M. Christophe Euzet. L’amendement CL551 prévoit que l’aliénation d’un chemin rural n’est possible qu’après enquête publique, ce qui permet aux usagers locaux d’exprimer leur avis sur le projet et éventuellement de s’y opposer.
L’acte d’échange doit garantir la même possibilité de contrôle par le public, à tout le moins grâce à une concertation publique, moins lourde et moins coûteuse. C’est ce que propose l’amendement de repli CL550.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’enquête publique que vous demandez n’aurait pas de sens en matière d’échange de parcelles, puisque le but de celui-ci est de conserver l’affectation d’un itinéraire au public. Demande de retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis défavorable. On nous accuse parfois de créer trop de normes ; or la procédure proposée pour un échange de parcelles est lourde.
M. Raphaël Schellenberger. J’hésitais à vous faire partager mon expérience de l’échange du chemin du Hagenbach, mais du coup je vais le faire.
On a voulu échanger un morceau de chemin contre un autre, pour permettre un remembrement. Il a donc fallu réaliser une enquête publique, avec toute la publicité que cela suppose – dans la presse et au moyen d’un écriteau planté sur le chemin pour informer ceux qui l’emprunteraient. Résultat : aucun lecteur de la presse n’a compris où se situait ce chemin, et comme plus personne ne l’empruntait personne n’a vu l’écriteau.
On aurait pu organiser une concertation plus légère qu’une enquête publique. Mais vous le refusez, madame la ministre, en étant défavorable à mon amendement qui propose de remplacer l’enquête publique par une concertation. Dans l’exemple que je vous ai présenté, la concertation aurait pu être menée avec l’association qui entretient les chemins, à l’occasion de la réunion publique annuelle de la commune, et considérer que cela valait enquête publique. Cela aurait été certainement bien plus efficace en matière de publicité et de sensibilisation du public.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’article ne prévoit ni enquête publique ni concertation ; il organise l’échange de parcelles.
M. Raphaël Schellenberger. L’échange est une forme de cession du terrain. Il y aura donc nécessité de réaliser une enquête publique.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’échange est actuellement interdit en matière de chemins ruraux. L’article 27 ter a pour objet de l’autoriser, sans prévoir d’enquête publique contrairement à ce qui est prévu pour les cessions.
L’amendement CL437 est retiré.
La commission rejette successivement les amendements CL551 et CL550.
Amendements identiques CL1348 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL760 de la commission du développement durable.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement propose de supprimer l’alinéa 4, car l’exonération fiscale concernant l’acte d’échange relève d’une loi de finances.
La commission adopte les amendements.
La commission adopte l’article 27 ter modifié.
Après l’article 27 ter
Amendements CL822 de M. Hervé Saulignac et CL810 de M. Pascal Brindeau (discussion commune).
M. Hervé Saulignac. Cet amendement vise à réintégrer les dispositions relatives aux chemins ruraux adoptées par les deux chambres lors de la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, mais qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel au titre de l’article 45 de la Constitution.
M. Pascal Brindeau. Cet amendement a le même objet : rétablir les dispositions de l’article 235 du projet de loi précité, adopté de manière consensuelle par l’Assemblée nationale et le Sénat, mais qui ont été considérées comme un cavalier législatif par le Conseil constitutionnel.
Il s’agit de protéger les chemins ruraux – qui ont été réduits de moitié en quarante ans – en prévoyant que seule l’absence d’utilisation du chemin comme voie de passage par le public permettra leur désaffectation préalable à une vente. Cela permet de revenir sur une jurisprudence constante assez néfaste pour la protection des chemins ruraux. La commune pourra imposer une contribution spéciale aux responsables de dégradations des chemins et autoriser des associations à en prendre soin, sans que cela engage la commune à les entretenir.
Je pense me faire le porte-voix de nombreux collègues en saluant les associations, et notamment la fédération française de randonnée pédestre, pour leurs actions de défense et d’entretien des chemins ruraux.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable à l’amendement CL810, pour des raisons rédactionnelles, et demande de retrait pour l’amendement CL822, qui est satisfait.
L’amendement CL810 prévoit en effet, tout d’abord, que la présomption d’affectation à l’usage du public ne peut pas être renversée par une décision administrative – en évitant la disparition des chemins ruraux, cela constitue une garantie pour le public qui les emprunte ; ensuite, que des contributions spéciales pourront être exigées auprès des personnes qui dégradent les chemins ; enfin, que la commune pourra confier l’entretien des chemins ruraux à des associations loi 1901.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je remercie tout d’abord M. Brindeau d’avoir accepté de retirer de l’ordre du jour sa proposition de loi relative aux chemins ruraux. Ses dispositions sont reprises dans ce projet de loi.
Avis favorable à l’amendement CL810, plus complet et mieux rédigé.
L’amendement CL822 est retiré.
La commission adopte l’amendement CL810.
Amendements identiques CL23 de M. Bertrand Pancher et CL823 de M. Hervé Saulignac.
M. Paul Molac. En principe, l’aliénation d’un chemin rural est la conséquence de son absence d’utilisation par le public ou les riverains, ce qui conduit à sa désaffectation, et permet de l’aliéner – c’est le cas par exemple lorsqu’il est envahi par la végétation.
Mais la jurisprudence a été remise en question par la cour administrative d’appel de Nantes, qui a considéré dans un arrêt du 20 septembre 2020 qu’un chemin rural encore utilisé par des promeneurs pouvait être aliéné.
Pourtant, en 1999 le législateur avait voulu renforcer les critères de l’affectation des chemins ruraux au public en modifiant l’article L. 161-2 du code rural. Mais la législation reste encore imprécise.
Cet amendement précise qu’un chemin rural encore utilisé par le public ou les riverains, régulièrement ou non, ne peut être supprimé. En outre, il autorise les communes à interrompre l’aliénation après l’enquête publique, ce que la jurisprudence refuse.
M. Hervé Saulignac. Cet amendement précise qu’un chemin rural encore utilisé par le public ou les riverains, régulièrement ou non, ne peut être aliéné. En outre, il permet aux communes d’interrompre l’aliénation après l’enquête publique, ce que la jurisprudence n’autorise pas aujourd’hui.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.
Un chemin rural ne peut être vendu que s’il n’est plus affecté au public. C’est d’ailleurs l’objet de l’enquête publique préalable de vérifier si le chemin est affecté au public. Inversement, il peut parfaitement être vendu s’il est emprunté à titre privé ou bien pour un usage qui exclut l’affectation au public.
Refuser ce type de vente serait contraire au droit de propriété des communes et au principe de leur libre administration. L’amendement empêcherait notamment tout réaménagement de l’espace rural.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’amendement présente deux difficultés. D’une part, il fait référence à une utilisation par le public qui peut être irrégulière, donc difficile à évaluer. D’autre part, il prévoit la faculté pour le conseil municipal d’interrompre une procédure de vente, ce qui est déjà possible. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Article 27 quater : Régime applicable aux chemins ruraux : révision du plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée
Amendements de suppression CL976 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL1040 de M. Pascal Brindeau.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 27 quater instaure une obligation pour le département de réviser le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée pour tenir compte du recensement des chemins ruraux mené par les communes.
Les départements sont parfaitement libres de réviser ce plan quand ils le souhaitent. Il n’y a pas lieu d’imposer une telle obligation. Par ailleurs, un département ne peut unilatéralement incorporer les chemins ruraux dans les itinéraires de promenade et de randonnée.
Cet article est donc inopérant.
M. Pascal Brindeau. Je remercie la ministre pour son avis favorable sur mon amendement CL810, qui reprend effectivement les dispositions de ma proposition de loi. Les intégrer dans ce projet de loi nous permet de gagner du temps.
L’article 27 quater est en effet sans objet, dans la mesure où l’article L. 361-1 du code de l’environnement prévoit en tout état de cause une délibération du conseil municipal pour autoriser que le plan départemental des itinéraires comprenne un chemin rural.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 27 quater est supprimé et les amendements CL350 de M. Julien Dive, CL553 de Mme Lise Magnier et CL228 de Mme Sandra Marsaud tombent.
Après l’article 27 quater
Amendement CL555 de Mme Lise Magnier.
M. Christophe Euzet. Le code de l’environnement impose à la commune de préserver la continuité des itinéraires départementaux de randonnée en cas d’aliénation d’un chemin rural inscrit dans un plan départemental d’itinéraires de randonnée.
Par cohérence, il est proposé d’étendre cette continuité à tous les cas de figure possibles, qu’il s’agisse d’aliénation, d’échange ou de suppression – cette dernière pouvant intervenir lors d’un inventaire ou d’un remembrement.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.
Mme la président Yaël Braun-Pivet. Nous allons procéder au vote d’articles qui ont fait l’objet d’un examen délégué à la commission des affaires économiques.
Article 28 (examen délégué) (art. L. 255-2, L. 255-3, L. 421-4, L. 422-2, L. 422-3 et L. 443-7, du code de la construction et de l’habitation, et L. 329-1 du code de l’urbanisme) : Extension des compétences des organismes de foncier solidaire (OFS)
La commission adopte successivement les amendements CL1475, CL1476 et CL1488 de la commission des affaires économiques.
La commission adopte l’article 28 modifié.
Article 28 bis A (examen délégué) (art. 150 U du code général des impôts) : Exonération de l’imposition sur le revenu lors d’une plus-value sur la cession immobilière à un organisme de foncier solidaire
La commission adopte l’article 28 bis A non modifié.
Article 28 bis (examen délégué) (art. L. 211-2 du code de l’urbanisme) : Délégation du droit de préemption à un organisme de foncier solidaire
La commission adopte l’amendement CL1477 de la commission des affaires économiques.
La commission adopte l’article 28 bis modifié.
Mme la président Yaël Braun-Pivet. Nous reprenons l’examen des articles par notre commission.
Article 29 (article L. 302-2-1 [nouveau] du code de la construction et de l'habitation) : Assistance des départements aux communautés de communes pour l’élaboration de leur programme local de l’habitat
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1490 de M. Bruno Questel.
Amendement CL982 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement prévoit que le département peut mettre à la disposition des seules communautés de communes une assistance technique pour l’élaboration de leur programme local de l’habitat (PLH).
Par ailleurs, il étend cette possibilité entre établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), lorsqu’ils appartiennent à des pôles d’équilibres territoriaux et ruraux.
La commission adopte l’amendement.
La commission adopte l’article 29 modifié.
Mme la président Yaël Braun-Pivet. Nous allons procéder au vote d’articles qui ont fait l’objet d’un examen délégué à la commission des affaires économiques.
Article 30 (examen délégué) (art. L. 211-2, L. 214-1-1, L. 312-2-1 [nouveau], L. 312-5, L. 312-7 et L. 321-2 du code de l’urbanisme) : Nouvelles dispositions et dérogations au profit des grandes opérations d’urbanisme
La commission adopte l’amendement CL1478 de la commission des affaires économiques.
La commission adopte l’article 30 modifié.
Après l’article 30 (examen délégué)
La commission adopte l’amendement CL1479 de la commission des affaires économiques.
Article 30 bis A (examen délégué) (art. 157 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique) : Simplification de la mise en œuvre d’un permis d’aménager multi-sites dans le périmètre d’une convention d’ORT
La commission adopte l’amendement CL1480 de la commission des affaires économiques.
La commission adopte l’article 30 bis A modifié.
Article 30 bis B (examen délégué) (art. 136 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et urbanisme rénové, art. L. 153-3 et 153-31 du code de l’urbanisme) : Limitation des transferts de compétence du plan d’urbanisme local
La commission adopte l’amendement CL1481 de la commission des affaires économiques.
La commission adopte l’article 30 bis B modifié.
Article 30 bis C (examen délégué) (art. L. 153-41 du code de l’urbanisme) : Accord des maires lors des modifications du droit de construction du plan local d’urbanisme intercommunal
La commission adopte l’amendement CL1482 de la commission des affaires économiques.
La commission adopte l’article 30 bis C modifié.
Article 30 bis D (examen délégué) (art. L. 321-5 [nouveau] du code du tourisme) : Cession à titre gratuit du droit de préférence de l’exploitant d’une résidence de tourisme à un opérateur public du développement touristique
La commission adopte l’article 30 bis D non modifié.
Article 30 bis (examen délégué) (art. L. 321-1 et 324-2 du code de l’urbanisme) : Articulation des rapports entre les établissements publics fonciers d’État et locaux lorsqu’ils couvrent un même territoire
La commission adopte l’amendement CL1483 de la commission des affaires économiques.
La commission adopte l’article 30 bis modifié.
Article 30 ter (examen délégué) (art. L. 324-2-1 et 324-2-1 du code de l’urbanisme) : Dispositions de coordination avec les dispositions de la loi ELAN assouplissant les conditions d’adhésion d’un EPCI à un établissement public foncier local
La commission adopte l’article 30 ter non modifié.
Article 30 quater (examen délégué) (art. L. 213-9 et L. 213-11 du code de l’urbanisme et art. L. 145-46-1 du code de commerce) : Exclusion des biens préemptés du droit de préférence
La commission adopte l’article 30 quater non modifié.
Mme la président Yaël Braun-Pivet. Nous allons procéder au vote d’articles qui ont fait l’objet d’un examen délégué à la commission des affaires sociales.
TITRE IV
LA SANTÉ, LA COHÉSION SOCIALE, L’ÉDUCATION ET LA CULTURE
Chapitre Ier
La participation à la sécurité sanitaire territoriale
Article 31 (examen délégué) (art. L. 1432-1, L. 1432-2, L. 1432-3, L. 1442-2 et L. 1442-6 du code de la santé publique) : Réforme de la gouvernance des agences régionales de santé
La commission adopte successivement les amendements CL793, CL794, CL795 et CL797 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 31 modifié.
Après l’article 31 (examen délégué)
La commission adopte l’amendement CL801 de la commission des affaires sociales.
Article 31 bis A (examen délégué) (art. L. 1434-10 du code de la santé publique) : Renforcement de la participation des usagers dans les conseils territoriaux de santé et dans les contrats locaux de santé
La commission adopte l’article 31 bis A non modifié.
Article 31 bis B (examen délégué) (art. L. 5511-2-2 [nouveau] du code de la santé publique) : Modification des règles relatives à la création d’officines de pharmacie à Mayotte
La commission adopte l’article 31 bis B non modifié.
Article 31 bis (examen délégué) (art. 199 quindecies, 199 sexvicies, 1391 B bis et 1414 B du code général des impôts et art. L. 6143-5 du code de la santé publique) : Suppression de la possibilité ouverte aux parlementaires de siéger au conseil de surveillance des établissements publics de santé
La commission adopte l’amendement CL802 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 31 bis modifié.
Article 32 (examen délégué) (art. L. 1422-3, L. 1423-3 et L. 1424-2 [nouveaux] du code de la santé publique) : Participation des collectivités territoriales au financement du programme d’investissement des établissements de santé
La commission adopte successivement les amendements CL803, CL804 et CL806 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 32 modifié.
Article 33 (examen délégué) (article L. 6323-1-5 du code de la santé publique) : Recrutement des personnels de centres de santé
La commission adopte l’amendement CL807 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 33 modifié.
Article 34 (examen délégué) (art. L. 6323-1-3 du code de la santé publique, art. L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales, art. L. 201-10 du code rural et de la pêche maritime) : Compétence des départements en matière de politique publique de sécurité sanitaire et d’accès aux soins de proximité
La commission adopte l’article 34 non modifié.
Après l’article 34 (examen délégué)
La commission adopte l’amendement CL808 de la commission des affaires sociales.
Article 34 bis (examen délégué) : Expérimentation d’une nouvelle organisation administrative par la Ville de Paris
La commission adopte l’article 34 bis non modifié.
Chapitre II
Cohésion sociale
Article 35 (examen délégué) : Expérimentation de la recentralisation du revenu de solidarité active
La commission adopte successivement les amendements CL809 et CL1173 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 35 modifié.
Article 35 bis (examen délégué) (art. L. 262-10, L. 262-40-1 [nouveau] et L. 262-37 du code de l’action sociale et des familles) : Pouvoir de contrôle du président du conseil départemental à l’égard des bénéficiaires du revenu de solidarité active
La commission adopte l’amendement de suppression CL1213 de la commission des affaires sociales.
En conséquence, l’article 35 bis est supprimé.
Article 36 (examen délégué) (art L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales, art L. 233-1-1, art. L. 281-2-1 du code de l’action sociale et des familles et art. L. 302-10 et L. 302-11 du code de la construction et de l’habitation) : Compétence départementale en matière d’habitat inclusif et d’adaptation des logements au vieillissement de la population
La commission adopte l’amendement CL1232 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 36 modifié.
Après l’article 36 (examen délégué)
La commission adopte successivement les amendements CL1245, CL1242 et CL1253 de la commission des affaires sociales.
Article 36 bis A (examen délégué) (titre VIII du livre V et art. L. 582-1 et L. 582-2 du code de l’action sociale et des familles [nouveaux]) : Adaptation de l’organisation de la prise en charge de l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap à Saint-Barthélemy
La commission adopte l’article 36 bis A non modifié.
Après l’article 36 bis A (examen délégué)
La commission adopte l’amendement CL1257 de la commission des affaires sociales.
Article 36 bis (examen délégué) (art L. 631-12-1 du code de la construction et de l’habitation [nouveau]) : Location de courte durée des résidences universitaires à des publics prioritaires
La commission adopte l’amendement CL1663 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 36 bis modifié.
Article 37 (examen délégué) (art. L. 123‑4‑1 du code de l’action sociale et des familles) : Création d’un centre intercommunal d’action sociale dans les métropoles et les communautés urbaines
La commission adopte l’amendement CL1260 de la commission des affaires sociales.
La commission adopte l’article 37 modifié.
Article 38 (supprimé) (examen délégué) (art. L. 224-1, L. 224-2, L. 224-3-1 et L. 224-9 du code de l’action sociale et des familles) : Transfert aux départements de la tutelle des pupilles de l’État
La commission maintient la suppression de l’article 38.
Mme la président Yaël Braun-Pivet. Nous reprenons l’examen des articles par notre commission.
Article 39 (articles L. 221‑2‑2, L. 221‑2‑3 [nouveau] du code de l’action sociale et des familles ) : Recours obligatoire au traitement automatisé d'appui à l'évaluation
de la minorité pour l'évaluation de la minorité et de l'isolement
des personnes se déclarant mineurs non accompagnés
Amendements de suppression CL987 de M. Bruno Questel, rapporteur, CL290 de Mme Isabelle Santiago et CL969 de M. Paul Molac.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de supprimer l’article 39, puisque cette disposition figure à l’article 15 du projet de loi relatif à la protection des enfants adopté par l’Assemblée nationale en juillet dernier et qui sera examiné prochainement par le Sénat.
M. Hervé Saulignac. L’amendement CL290 propose la suppression de l’article 39, qui instaure un recours obligatoire au traitement automatisé d’appui à l’évaluation de la minorité en matière de mineurs non accompagnés.
L’examen d’un article similaire dans le cadre du projet de loi relatif à la protection des enfants avait suscité de très vives réactions de la Défenseure des droits et de nombreux acteurs de la protection de l’enfance.
M. Paul Molac. L’article 39 est redondant car il est déjà en partie satisfait. Il met aussi les travailleurs sociaux dans une position délicate, en les forçant à rompre leur secret professionnel.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
Mme Emmanuelle Ménard. Je trouve très étrange de supprimer un article sous prétexte qu’une disposition similaire sera peut-être votée au Sénat le mois prochain. Cette dialectique est un peu bizarre. Je propose au contraire de voter dès maintenant cette disposition et d’y revenir au cours de la navette, le cas échéant.
Je comprends parfaitement que cette obligation de recourir aux fichiers d’appui à l’évaluation de la minorité suscite des débats, mais je trouve la méthode retenue très discutable.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous rassure, madame Ménard : les sénateurs ayant adopté l’article 39, on peut penser qu’il ne se contrediront pas lors l’examen de l’article 15 du projet de loi relatif à la protection des enfants. Ne vous inquiétez pas, tout ira très bien.
M. Raphaël Schellenberger. À ce stade de la législature, il ne faut pas faire des projections sur ce que pourrait être l’agenda législatif. On a le sentiment que le texte que nous examinons pourrait aboutir à un vote définitif avant la suspension des travaux parlementaires, ce qui doit inciter à y faire figurer les dispositions jugées importantes. Tous les textes en cours d’examen ne sont pas assurés d’aller au bout de la navette parlementaire.
Il est important de légiférer sur ce sujet d’actualité. Les demandes de personnes qui ne sont pas mineures mais qui cherchent à bénéficier du dispositif en faveur des mineurs non accompagnés explosent, et les départements sont complètement démunis face à ce problème. On sait qu’un certain nombre de réseaux malveillants contribuent à ce phénomène.
L’article 39 permet deux choses. Tout d’abord, et contrairement à ce que dit M. Molac, il sécurise le travailleur social grâce au recours automatique à une expertise de l’État en cas de doute. Ensuite, il permet le partage d’informations entre les départements, pour lutter contre les demandes successives dans différents départements – avec pour objectif d’obtenir au bout du compte une décision favorable dans l’un deux, soit parce qu’il est moins bien armé pour réaliser les contrôles, soit parce qu’il est dépassé par le nombre de demandes. Lorsqu’une personne a essayé de frauder une fois au sujet de sa minorité, il n’y a pas de raison de la laisser recommencer ailleurs.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 39 est supprimé et les amendements CL970 de M. Paul Molac, CL1223 Mme Emmanuelle Ménard, CL971 de M. Paul Molac, CL1227 et CL1231 de Mme Emmanuelle Ménard tombent.
Après l’article 39
Amendement CL1235 de Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard. Le fait pour un étranger de se présenter comme mineur alors qu’il est majeur est répréhensible. L’octroi de la nationalité française ou d’un titre de séjour doivent être conditionnés à l’honnêteté du demandeur d’asile. La nationalité française ne peut être bradée à des personnes qui se jouent de notre système social et du statut de mineur non accompagné.
Un demandeur d’asile qui serait majeur et qui se ferait passer pour un mineur non accompagné doit pouvoir faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire français.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable. Un tel dispositif ne relève ni de la décentralisation, ni de la déconcentration, ni de la simplification.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’amendement est déjà satisfait par le droit en vigueur.
La commission rejette l’amendement.
Article 40 (art. L. 315‑8 du code de l’action sociale et des familles) : Détachement des directeurs des établissements des services départementaux de l’aide sociale à l’enfance dans la fonction publique territoriale
La commission adopte les amendements rédactionnels CL1146, CL1504 et CL1505 de M. Bruno Questel, rapporteur.
La commission adopte l’article 40 modifié.
Chapitre III
L’Éducation et l’Enseignement supérieur
Article 41 A : Rapport sur le transfert de la médecine scolaire aux départements
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1502 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL1147 de M. Bruno Questel.
M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement rend facultative la tenue d’un débat sur le rapport relatif à la médecine scolaire, le caractère obligatoire d’un tel débat au sein des assemblées n’étant pas constitutionnel.
La commission adopte l’amendement.
La commission adopte l’article 41 A modifié.
Article 41 (supprimé) : Renforcement du lien des gestionnaires de collèges et lycées avec les collectivités territoriales
Amendements identiques CL1100 de M. Christophe Euzet et CL1385 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Christophe Euzet. L’article 41 vise à améliorer les relations entre les collectivités territoriales et les établissements d’enseignement secondaire. Il emprunte la voie rassurante de l’expérimentation en permettant qu’une convention autorise l’organe exécutif de la collectivité territoriale à donner des instructions à l’adjoint chargé des fonctions de gestion matérielle, financière et administrative de l’établissement – dans le respect du principe de l’autorité du chef d’établissement. Cette possibilité existe déjà depuis 2004 pour les techniciens et ouvriers de service.
Le groupe Agir ensemble est favorable au rétablissement de l’article 41, supprimé par le Sénat
M. Rémy Rebeyrotte. Cet amendement vise à rétablir l’article 41, supprimé par le Sénat, quitte à en améliorer ensuite la rédaction. C’est tout l’intérêt du parlementarisme, qui permet de travailler avec le Gouvernement pour améliorer encore les choses.
M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable à ces amendements qui rétablissent cet article.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable, et s’il faut encore améliorer la rédaction, le Gouvernement est disposé à le faire.
M. Raphaël Schellenberger. Les amendements que nous examinons me semblent incompréhensibles. Pour être efficace et opérationnelle, une mesure doit être simple : un agent public doit savoir qui est son supérieur hiérarchique, autrement dit de qui il dépend directement. En réalité, l’intention du Gouvernement rejoint les demandes des collectivités territoriales, qui veulent avoir un chef de service au sein des établissements. Pour mener des politiques ambitieuses à la cantine – développer les approvisionnements en circuit court, encourager le bio – ou en matière d’entretien des bâtiments – introduire divers changements techniques, par exemple des changements de produits –, elles doivent exercer une autorité hiérarchique sur le gestionnaire. Or le ministère de l’Éducation nationale met en avant le rôle pédagogique que joue aussi cette personne, notamment dans l’organisation des voyages scolaires, pour justifier son maintien au sein de ses effectifs.
Les amendements de M. Euzet et de M. Rebeyrotte ne tranchent rien, puisqu’ils se limitent à permettre aux collectivités territoriales de demander quelque chose au gestionnaire sous couvert du chef d’établissement – c’est déjà ce qui se passe dans la réalité. Si nous voulons vraiment faire en sorte que les politiques publiques menées par les collectivités dans les établissements dont elles assurent l’entretien soient efficaces, nous ne devons pas faire dans la demi-mesure : nous devons transférer les gestionnaires aux collectivités territoriales.
M. Paul Molac. Je suis d’accord avec M. Schellenberger. Tous les fonctionnaires placés sous l’autorité de l’intendant sont des fonctionnaires régionaux, dans les lycées, ou des fonctionnaires départementaux, dans les collèges. La situation est quelque peu loufoque : il serait de bon sens que l’intendant soit lui aussi transféré à la collectivité de rattachement de l’établissement, ne serait-ce que pour assurer la cohérence des politiques publiques locales – je pense par exemple aux projets alimentaires territoriaux (PAT) pilotés par les régions. Je ne comprends pas pourquoi le Sénat a supprimé cet article. Quoi qu’il en soit, nous devrons aller plus loin : je vous ferai une proposition en ce sens en séance.
M. Rémy Rebeyrotte. Si nous allons dans le sens de l’unicité de l’autorité, alors il faudra aussi remettre en cause notre modèle de sécurité civile, puisque les sapeurs-pompiers relèvent de la double autorité du préfet et du président du département. Dès lors que nous modifierons l’équilibre actuel et que nous donnerons au président du département une autorité hiérarchique sur le gestionnaire, exercée conjointement avec le chef d’établissement, cela obligera les deux côtés à travailler ensemble et à s’entendre pour faire avancer l’établissement dans le bon sens. La mise en œuvre des PAT, évoquée par M. Molac, se heurte parfois à des blocages venant d’un côté ou de l’autre. Cette double autorité n’est pas forcément un problème insurmontable, mais nous verrons dans le cadre de l’expérimentation comment les choses se passent.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Sénat a supprimé l’article 41 au motif qu’il n’allait pas assez loin. J’entends ce que vous dites, et je ne doute pas que la rédaction de cet article puisse être améliorée. Cela dit, je vous invite à voter les amendements identiques que viennent de défendre vos collègues, quitte à retravailler ensuite la rédaction de cette disposition en vue de la séance publique.
Les intendants ou gestionnaires de collège ou de lycée exercent non seulement des missions relevant de l’autorité du président du conseil départemental ou régional – vous avez parlé des PAT, du recours aux circuits courts et à l’achat direct de produits locaux pour les cantines scolaires –, mais également des missions relevant de l’autorité de l’éducation nationale. Il est encore possible de clarifier les choses.
M. Raphaël Schellenberger. Le fait que les gestionnaires exercent également des missions pour le compte de l’éducation nationale, en particulier dans les petits établissements qui ne disposent pas d’une équipe de direction, pose en effet une difficulté. Globalement, les choses se passent en bonne intelligence, mais cette dualité de missions se heurte tout de même à quelques limites. Si une collectivité veut mettre le paquet sur la qualité de l’entretien, elle n’a d’autre relais que le gestionnaire de l’établissement, qui est le supérieur hiérarchique des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) mais qui relève lui-même de l’éducation nationale. Cette question de conservation du patrimoine pose bien plus de problèmes que le changement de stratégie d’approvisionnement de la cantine – on parle beaucoup de ce sujet car il est à la mode et que l’on cherche partout à développer les circuits courts et à mener une politique ambitieuse en faveur du bio –, qui finit toujours par être évoqué au conseil d’administration du collège ou du lycée et à être mis en œuvre, malgré quelques réticences. De mon point de vue, l’autorité principale du gestionnaire devrait être la collectivité territoriale.
M. Stéphane Mazars. Les discussions autour des PAT ne sont pas qu’un effet de mode : depuis l’entrée en vigueur de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGALIM), les collectivités ont l’obligation d’assurer la montée en charge des produits sous signe ou label de qualité, des produits bio et de favoriser les circuits courts. Elles s’emparent donc de cette politique, en mettant en avant leurs filières agricoles, mais elles nous disent qu’elles rencontrent des obstacles, notamment parce qu’elles n’ont pas la possibilité d’influer sur le cours des choses dans les collèges et les lycées. Pour atteindre les objectifs ambitieux de la loi EGALIM, il faut faire preuve d’un peu plus de souplesse et permettre aux collectivités territoriales de s’intéresser à l’alimentation de nos enfants au sein des établissements scolaires.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 41 est ainsi rétabli.
Après l’article 41
Amendement CL1497 de M. Bruno Questel.
M. Bruno Questel, rapporteur. Nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport évaluant les conditions d’une délégation aux régions de la gestion opérationnelle du programme européen « Lait et fruits à l’école ».
Ces dernières années, la part des Français en situation de surpoids ou d’obésité s’est accrue ; elle est désormais proche de 50 %, et les jeunes sont particulièrement touchés par ce fléau. Il est donc nécessaire d’aller de l’avant. Pour que l’ambitieux programme « Laits et fruits à l’école » produise réellement des résultats, il me semble pertinent d’en confier la gestion opérationnelle aux régions, qui ont l’habitude de gérer les fonds européens. Une expérimentation pourrait être menée dans des régions pilotes, avant de généraliser cette mesure en tirant les enseignements de la phase expérimentale. J’espère susciter la bienveillance du Gouvernement sur ce sujet qui peut tous nous réunir.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. C’est une bonne idée, qui me rappelle le temps où Pierre Mendès France avait décidé que tous les enfants devaient boire du lait à l’école – j’avais horreur de cela…
M. Raphaël Schellenberger. Gageons que ce rapport conclura à la nécessité de transférer aux collectivités l’emploi des gestionnaires !
M. Paul Molac. Je vous comprends tout à fait, madame la ministre. La décision de Pierre Mendès France visait en réalité à retirer le vin ou le cidre qui se trouvait alors sur la table des enfants, à la cantine, au moment du déjeuner – chacun sait qu’à travers l’histoire, l’eau, qui contenait de nombreux microbes, a tué beaucoup plus de monde que l’alcool…
La commission adopte l’amendement.
Article 41 bis (art. L. 123‑1, L. 165‑1, L. 166‑1, L. 167‑1, L. 211‑7, L. 214‑2, L. 232‑1, L. 255‑1, L. 256‑1, L. 257‑1, L. 614‑3 [abrogé], L. 671‑1, L. 681‑1, L. 683‑1, L. 684‑1, L. 681‑6, L. 683‑2, L. 684‑2, L. 711‑4, L. 711‑6 et L. 718‑5 du code de l’éducation et art. L. 812‑1 du code rural et de la pêche maritime) : Renforcement du rôle des régions dans le pilotage de la politique d’enseignement supérieur et de recherche
Amendements de suppression CL1148 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL615 de Mme Michèle Victory.
M. Bruno Questel, rapporteur. En adoptant l’article 41 bis, le Sénat a souhaité renforcer le rôle des régions dans le pilotage des politiques d’enseignement supérieur et de recherche. Or il ne m’apparaît pas judicieux de permettre aux régions de conclure des contrats pluriannuels d’établissement et de site, qui se fondent sur une relation exclusive entre l’État et ses opérateurs. La présence de trois représentants des régions au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) risque de déséquilibrer cette institution. Par ailleurs, la consultation obligatoire des régions sur certains projets, dans lesquels ces collectivités jouent déjà un rôle important, ne me semble pas justifiée. Enfin, il ne me paraît pas souhaitable de supprimer la carte des formations supérieures. Pour toutes ces raisons, je vous invite à supprimer l’article.
M. Hervé Saulignac. Je souscris entièrement aux arguments de M. le rapporteur.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 41 bis est supprimé et les amendements CL618 de M. Paul Molac ainsi que les amendements CL1237 et CL1238 de Mme Emmanuelle Ménard tombent.
Article 41 ter (article L. 3232‑1‑2 du code général des collectivités territoriales) : Élargissement de la compétence des départements en matière d’aides à la filière halieutique
Amendements de suppression CL992 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL1386 de M. Rémy Rebeyrotte.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 41 ter, introduit par le Sénat, remet fondamentalement en cause la répartition des compétences entre départements et régions en matière d’aide économique. Il permet en effet aux départements de définir leur propre régime d’aide en matière d’agriculture et de pêche, sans le moindre encadrement et sans que les aides ne soient complémentaires avec celles octroyées par la région. Ce dispositif méconnaît totalement – sans doute involontairement – la compétence exclusive des régions dans ce domaine. C’est pourquoi je vous propose de le supprimer.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. Imaginons qu’une région ait une zone côtière assez peu étendue, où se pratique la conchyliculture, et que le reste de sa surface soit composé de grandes prairies consacrées à l’élevage de Salers. Une intervention du département côtier visant à soutenir la filière conchylicole pourrait être pertinente, tandis que la coordination avec la région ne serait pas forcément évidente.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il n’est pas interdit aux départements d’intervenir en matière d’aide économique. Il leur est simplement demandé d’agir en complémentarité avec la région.
M. Paul Molac. Les départements peuvent très bien conclure avec la région une convention portant sur certaines activités économiques. Ainsi, la région Bretagne agit en coordination avec les départements, quand ils le veulent bien, pour soutenir la microéconomie, les petits circuits courts et les marchés.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 41 ter est supprimé et les amendements identiques CL448 de M. Philippe Meyer et CL584 de M. Raphaël Schellenberger tombent.
Article 41 quater (articles L. 214‑2 et L. 612‑3 du code de l’éducation) : Planification pluriannuelle des besoins en capacités d’accueil des filières du premier cycle de l’enseignement supérieur
Amendement de suppression CL1005 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. En confiant aux régions le soin d’effectuer le travail d’identification des besoins en capacités d’accueil dans l’enseignement supérieur, l’article 41 quater remet fondamentalement en cause la répartition des compétences entre l’État et les régions dans ce domaine. Je vous invite donc à le supprimer.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
Mme Emmanuelle Ménard. L’adoption de cet amendement de suppression fera tomber mon amendement CL1241, que je souhaite défendre succinctement.
J’aimerais que les collectivités territoriales soient davantage intégrées aux schémas régionaux de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (SRESRI). Je pense en particulier aux communes et aux EPCI, qui connaissent le mieux les besoins de leur territoire, notamment en matière de formation. Ainsi, dans l’académie de Montpellier, 75 % des étudiants sont à Montpellier et 1,8 % à Béziers : ma ville souffre donc d’un manque criant de formations. À l’antenne de l’université de Montpellier située à Béziers, on étudie les lettres et la psychologie, ce qui est très bien, mais il existe aussi d’autres besoins de formation que la ville et la communauté d’agglomération Béziers Méditerranée sont tout à fait capables de définir. Afin d’adapter le mieux possible les formations aux demandes et aux besoins des entreprises qui recrutent, on gagnerait donc à associer à l’élaboration des SRESRI les collectivités ayant une bonne connaissance de ces sujets, quel que soit leur échelon, surtout lorsque les territoires concernés sont marqués par la pauvreté et le chômage.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 41 quater est supprimé et l’amendement CL1241 de Mme Emmanuelle Ménard tombe.
Article 41 quinquies (article L. 151-4 du code de l’urbanisme) : Prise en compte des équipements sportifs dans le diagnostic du rapport de présentation du plan local d’urbanisme (PLU)
Amendement de suppression CL1042 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 41 quinquies est satisfait par les dispositions actuelles du code de l’urbanisme relatives aux rapports de présentation des plans locaux d’urbanisme (PLU). Je vous propose donc de le supprimer.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 41 quinquies est supprimé et l’amendement CL690 de Mme Marie-George Buffet tombe.
Chapitre IV
La culture
Article 42 (art. L. 2251‑4 et L. 3232‑4 du code général des collectivités territoriales) : Intervention des collectivités territoriales en faveur des établissements de spectacles cinématographiques
La commission adopte l’article 42 non modifié.
Après l’article 42
Amendement CL581 de M. Raphaël Schellenberger.
M. Raphaël Schellenberger. Nous proposons d’ériger le département au rang de chef de file en matière d’éducation artistique et culturelle. Il ne s’agit pas d’engager une bataille entre collectivités mais de faire preuve de cohérence et d’efficacité. En effet, l’éducation artistique et culturelle doit être une priorité, ce qui justifie l’intervention des collectivités territoriales en appui des actions du ministère de la culture ; or c’est au niveau du collège, qui relève de la compétence du département, qu’il me semble nécessaire d’agir prioritairement. Surtout, le département est déjà chargé d’élaborer un schéma de développement des enseignements artistiques spécialisés, une tâche qu’il accomplira d’autant mieux en tant que chef de file pour l’éducation artistique et culturelle, qui a, d’une certaine façon, vocation à susciter la pratique artistique.
M. Bruno Questel, rapporteur. Vous proposez une expérimentation octroyant au département la qualité de chef de file en matière d’éducation artistique. Or la culture est une compétence partagée entre tous les niveaux de collectivités. Le bloc communal – communes et EPCI – mène des actions très importantes dans ce domaine, au plus près des populations, au bénéfice de ceux qui sont les plus éloignés de la culture. Il en va de même pour les régions, qui encouragent notamment la jeune création et l’éducation artistique et culturelle dans les lycées. Je ne suis donc pas convaincu qu’accorder au département un rôle de chef de file soit la solution la plus adaptée. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis défavorable.
M. Raphaël Schellenberger. Loin de moi l’idée de ne plus faire de la culture une compétence partagée : je souhaite simplement que les départements puissent donner une nouvelle impulsion à l’éducation artistique et culturelle. Ils sont déjà chargés de l’élaboration d’un schéma départemental de développement des enseignements artistiques spécialisés. Peut-être que tous ne le font pas, mais ceux qui le font n’agissent pas seuls. Les plus ambitieux, comme ceux de la collectivité européenne d’Alsace, définissent même une politique de soutien et de subventionnement d’établissements municipaux, intercommunaux et de conservatoires à rayonnement départemental ou régional. Le fait que le département joue un rôle de chef de file dans ce domaine essentiel de l’éducation artistique et culturelle ne lui confère pas une compétence exclusive en la matière. Il faut bien qu’un niveau de collectivité se saisisse prioritairement de ces questions importantes, et c’est le département qui me semble l’échelon le plus approprié.
La commission rejette l’amendement.
Article 42 bis (art. L. 3211‑1‑1 [rétabli] du code général des collectivités territoriales) : Création d’un schéma départemental de la solidarité territoriale
Amendements de suppression CL1149 de M. Bruno Questel, rapporteur, et CL1153 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 42 bis, introduit par le Sénat, oblige les départements à élaborer tous les six ans un schéma départemental de la solidarité territoriale. Il n’est pas souhaitable de leur imposer cette nouvelle obligation, et le schéma proposé risque de heurter les compétences des autres niveaux de collectivités, qui interviennent également dans ce domaine.
M. Paul Molac. Cet article me semble un peu curieux et source de confusion, car il fait empiéter le département sur la compétence que la région détient depuis les débuts de la décentralisation en matière d’aménagement du territoire. La participation financière des régions aux projets des communes et de leurs groupements devrait même être compatible avec le financement des départements !
Par ailleurs, l’échelon départemental n’est pas forcément pertinent. La ville de Carhaix-Plouguer, par exemple, se trouve au carrefour de trois départements – les Côtes-d’Armor, le Morbihan et le Finistère. Pire encore, le Pays de Redon est composé de communes situées dans trois départements et deux régions différentes : il relève tantôt de la préfecture de Rennes, tantôt de la préfecture de Vannes, tantôt de la préfecture de Nantes. Je vous laisse imaginer les difficultés administratives que cela occasionne…
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 42 bis est supprimé.
TITRE V
DISPOSITIONS COMMUNES À L’ENSEMBLE DES MESURES DE LA PRÉSENTE LOI EN MATIÈRE FINANCIÈRE ET STATUTAIRE
Article 43 : Compensations financières des transferts de compétences opérés par le projet de loi
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1537 et CL1538 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL1044 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. En application de l’article 72-2 de la Constitution, l’article 43 ouvre aux collectivités un droit à compensation au titre du transfert de certaines compétences prévu par le présent projet de loi. S’agissant des charges de fonctionnement, la compensation doit être égale à la moyenne des dépenses réalisées pendant les trois ans précédant le transfert de compétences. Le Sénat a décidé que ces trois années devaient constituer une période minimale, et non maximale. Je vous propose de rétablir la version initiale de l’article et de prendre en compte une période maximale de trois ans.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. Je ne suis pas sûr que le vote du Sénat soit une erreur. Nous savons bien comment l’État – je ne fais pas le procès d’un gouvernement en particulier, je parle de l’État profond – se comporte lorsqu’il transfère des infrastructures : les projets d’investissements sont arrêtés et l’entretien est ralenti, ce qui permet d’économiser assez facilement une ou deux années de dépenses. Si l’on prend en compte, pour le calcul de la compensation, les trois dernières années précédant le transfert de compétences, il faut avoir conscience que cette période peut comporter deux années de sous-investissement. Les infrastructures, dont la qualité se sera dégradée, nécessiteront alors un surinvestissement des collectivités locales, et ces dernières se trouveront prises entre le marteau et l’enclume.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL1045 de M. Bruno Questel.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je propose de supprimer l’alinéa 14, qui prévoit l’éligibilité du réseau routier transféré au financement des futurs contrats de plan État-région (CPER).
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. Mon intervention de tout à l’heure était prémonitoire. Les réseaux routiers transférés aux régions ne seront plus éligibles aux CPER. Vous m’aviez dit qu’il n’y aurait pas de problème, mais vous voulez supprimer l’alinéa garantissant qu’ils seraient éventuellement éligibles, pour vous assurer que le principe selon lequel les collectivités paient les infrastructures de l’État ne peut surtout pas être renversé. J’appelle l’attention des régions : ne prenez pas les routes que l’État voudrait vous transférer car l’État ne paiera pas dans le cadre des CPER.
M. Paul Molac. Je ne crois pas, en fait, que le problème soit là. Le CPER fait l’objet d’une négociation entre les régions et l’État. Ce que dit l’alinéa, c’est que le réseau transféré serait d’office inclus dans le CPER. Or c’est un contrat : si on détermine d’emblée ce qu’il comprend, c’est un peu compliqué. La question est plutôt de savoir s’il y aura toujours des CPER à l’avenir. Ce n’est pas certain, car il était prévu à un moment de les supprimer. Autre interrogation, y aura-t-il suffisamment d’argent pour des financements concernant les routes ou des trains ? Cela coûte extrêmement cher.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL1539 de M. Bruno Questel.
Amendement CL1049 de M. Bruno Questel.
M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de supprimer les alinéas 17 à 19, qui introduisent une obligation de réévaluation du droit à compensation tous les cinq ans, sans limitation de durée.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 43 modifié.
Article 43 bis : Exclusion des dépenses de solidarité sociale des « contrats de Cahors »
Amendement de suppression CL1050 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. Mon amendement tend à supprimer cet article : on pourrait considérer qu’il aurait davantage sa place dans une loi de programmation des finances publiques. Il exclut en effet les dépenses de solidarité sociale des collectivités territoriales de tout objectif national visant à encadrer l’évolution des dépenses, ce qui n’a pas de rapport avec l’objet du projet de loi. Une telle discussion doit avoir lieu lors de la prochaine loi de programmation pluriannuelle des finances publiques.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet article est totalement virtuel, autant le supprimer.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 43 bis est supprimé.
Article 44 (art. 80, 81 et 82 de la loi n° 2014‑58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, et art. 10 et 11 de la loi n° 2009‑1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l’équipement et à l’évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers) : Transfert des services et agents de l'État aux collectivités et groupements concernés par les transferts de compétences opérés par le projet de loi
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1540, CL1541, CL1542, CL1544, CL1545, CL1548, CL1549, CL1550, CL1552, CL1554, CL1051 et CL1555 de M. Bruno Questel, rapporteur.
Amendement CL1080 de M. Bruno Questel, rapporteur.
M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement vise à rétablir la méthode de compensation au coût au « pied de corps » qui s’applique aux fractions d’emploi et aux emplois vacants pour refléter au mieux le coût de recrutement des nouveaux agents, en début de carrière, au sein des collectivités territoriales.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL1558 de M. Bruno Questel, rapporteur.
La commission adopte l’article 44 modifié.
Après l’article 44
Amendement CL914 de Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard. Je demande un rapport pour évaluer la corrélation entre les nouvelles compétences accordées aux collectivités et les moyens financiers dont elles disposent.
M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous renvoie au jaune budgétaire annuel portant sur les transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales.
La commission rejette l’amendement.
TITRE VI
MESURES DE DÉCONCENTRATION
Article 45 (art. L. 133-1, L. 133-9, L. 614-1, L. 624-1, et L. 635-1 du code l’environnement) : Octroi au préfet de la fonction de délégué territorial d’agences nationales
Amendement CL1087 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure pour les titres VI et VII. Cet amendement de mise en cohérence vise à rétablir la rédaction d’origine du présent article : la qualité de délégué territorial de l’ADEME accordée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a été supprimée par le Sénat. Cette disposition permettra de garantir la bonne articulation entre l’action de l’Agence et celle des autres services de l’État au niveau local et au niveau national.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques CL1084 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL761 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Je vous propose de supprimer l’extension de l’article 45 à l’Office français de la biodiversité (OFB) qu’a décidée le Sénat. L’Office est un établissement public assez jeune, puisqu’il a été créé le 1er janvier 2020 à la suite de la fusion entre l’Agence française de la biodiversité et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage. Il ne paraît pas opportun, à ce stade, de modifier la gouvernance de l’OFB, qui travaille d’ores et déjà en bonne intelligence avec les services déconcentrés de l’État.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable. On aurait pu se poser la question, mais il vaut mieux laisser la situation en l’état, compte tenu de la jeunesse de l’Office.
M. Raphaël Schellenberger. Nous nous sommes aussi posé la question et nous aimerions une autre réponse… La nature de l’ADEME et celle de l’OFB ne diffèrent pas tant que cela : pourquoi les traiter différemment et ne pas faire du préfet, dans les deux cas, le délégué territorial ? Il prendra en compte les instructions : les préfets sont de bons agents de l’État.
Quand il y a des contradictions entre ministères, il est sûr que cela devient compliqué et intéressant pour un ministère technique de disposer d’une forme de liberté par l’intermédiaire d’une organisation plus ou moins autonome dans les territoires, et c’est là que le bazar commence. C’est pour cette raison que vous avez vous-même considéré, madame la ministre, dans le texte, qu’il serait bon que le préfet soit le représentant de l’État pour l’ADEME dans les territoires. Ce raisonnement, qui est excellent, peut valoir aussi pour l’OFB. Bien qu’il soit jeune, il a en soi les mêmes faiblesses que l’ADEME ou d’autres structures de ce type.
J’ajoute que l’OFB est chargé de prérogatives de police – police rurale ou police de la chasse. S’agissant de la chasse, qui est un enjeu important dans mon département, il faut que le préfet puisse, à son niveau, assurer correctement la coordination entre les différentes parties prenantes. Nous avons besoin d’une position forte de l’État dans ces domaines. Une divergence avec l’OFB peut rendre l’action de l’État particulièrement inefficace.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’article 45 modifié.
Article 46 (articles L. 213-8, L. 213-8-1 et L. 213-9-2 du code de l’environnement) : Renforcement du rôle du préfet dans l’attribution des aides des agences de l’eau
Amendement de suppression CL401 de Mme Jeanine Dubié.
M. Paul Molac. Cet article confie la présidence du conseil d’administration de l’agence de l’eau au préfet coordonnateur de bassin où l’agence a son siège. Dans le cas de la Loire, qui prend sa source au mont Gerbier-de-Jonc, en Ardèche, et qui se jette dans l’Atlantique en aval de Nantes, c’est le préfet de la région Centre-Val de Loire qui deviendrait le grand chef du bassin. Pour l’instant, c’est un élu qui exerce cette fonction. Une telle tentative de reprise en main de la part de l’administration inquiète assez les élus. En effet, les compétences liées à la gestion de l’eau comptent parmi les plus essentielles du bloc communal, et on a l’impression d’une recentralisation.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’article 46 renforce le rôle du préfet coordonnateur de bassin dans le fonctionnement des agences de l’eau en systématisant l’attribution à celui-ci de la présidence du conseil d’administration. Vous vous inquiétez de cette mesure au motif qu’elle dissimulerait un phénomène de recentralisation de la gestion de l’eau, mais j’avoue ne pas comprendre cette préoccupation. Sur ce point, le projet de loi ne fait que consacrer la pratique actuelle.
Selon l’étude d’impact, la présidence du conseil d’administration était historiquement partagée de manière égale entre les préfets coordonnateurs de bassin et les ingénieurs généraux du ministère de l’environnement. Suite à un arbitrage du Président de la République, les présidences de conseil d’administration des agences de l’eau sont toutes occupées, depuis février 2021, par des préfets coordonnateurs de bassin.
Cet article ne fait que consacrer une évolution et un fonctionnement que vous décrivez vous-même à la fin de votre exposé sommaire comme tout à fait satisfaisant. Par conséquent, avis défavorable à l’amendement.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis. Trois nouveaux préfets ont été nommés par décret à la tête des agences de l’eau. On ne fait qu’étendre la pratique, et il n’y a pas d’inquiétude particulière à avoir, car cela se passe bien.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques CL1088 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL763 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Je propose de rétablir la rédaction initiale de l’article car la version adoptée par le Sénat ne me paraît pas opérationnelle. En pratique, elle impliquerait que plusieurs préfets effectuent de façon successive la présentation d’un rapport devant le comité de bassin, ce qui ne me paraît pas vraiment réaliste.
Il est plus judicieux de renforcer le rôle du préfet coordonnateur de bassin dans le fonctionnement des agences de l’eau en systématisant l’attribution à celui-ci de la présidence du conseil d’administration et en lui confiant la mission de porter à la connaissance de ce dernier les priorités de l’État ainsi que la synthèse des projets de l’État et des collectivités territoriales.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’article 46 modifié.
Article 46 bis (art. L. 1111‑6 du code général des collectivités territoriales) : Renforcement de l’État déconcentré : autorisation préfectorale pour déroger à des textes réglementaires
Amendements de suppression CL1090 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL1387 de M. Rémy Rebeyrotte.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Il s’agit de supprimer l’article 46 bis, introduit par le Sénat, visant à permettre aux préfets d’autoriser des dérogations au pouvoir réglementaire en faveur des collectivités territoriales. La reconnaissance d’un droit de dérogation aux normes réglementaires nationales est contraire à la Constitution : seul le pouvoir réglementaire national peut autoriser des dérogations à des dispositions réglementaires nationales.
M. Rémy Rebeyrotte. Heureusement que l’Assemblée est là pour faire respecter la Constitution de notre pays.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. La rédaction adoptée par le Sénat ne conduisait pas les collectivités territoriales à déroger, mais le préfet de département à fixer le cadre le permettant. Il ne faut pas monter sur ses grands chevaux et dire que le Sénat est complètement irrespectueux de notre Constitution. Des garanties étaient prévues, et elles me semblaient suffisantes. Je trouve qu’il serait dommage de supprimer cet article.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 46 bis est supprimé et l’amendement CL1151 de M. Christophe Euzet tombe.
Article 46 ter (article L. 2255‑1 du code général des collectivités territoriales) : Renforcement de l’État déconcentré : généralisation de l’information préalable des collectivités en cas de suppression d’un service public
Amendement de suppression CL1093 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Je propose de supprimer également cet article, qui part d’une bonne intention mais n’est pas du tout réaliste et opérationnel. Il généralise l’obligation d’information du maire et du président de l’EPCI par le préfet en cas de fermeture ou de déplacement d’un service. Actuellement, cette obligation d’information n’existe que dans les territoires concernés par une ORT, une opération de revitalisation de territoire. Généraliser ce dispositif risquerait de le rendre inapplicable, ce qui se retournerait contre les territoires qui en ont le plus besoin et bénéficient actuellement de ce dispositif d’information.
Cette généralisation n’est pas davantage utile, notamment dans les territoires dynamiques et très denses, dans lesquels il existe des services n’assurant aucun accueil du public. En pratique, cela gênerait beaucoup les opérations de réorganisation de services, en particulier en région parisienne et dans les métropoles.
Par ailleurs, l’information des élus sur les fermetures ou les déplacements de services envisagés dans leur territoire a d’ores et déjà vocation à être assurée au sein des instances de suivi des schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public, rendus obligatoires par la loi NOTRE au 1er janvier 2016.
Il n’est donc pas nécessaire de modifier le droit en vigueur, surtout par un dispositif qui n’est pas opérationnel.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
Mme Emmanuelle Ménard. Je trouverais dommage que l’on supprime cet article, car il prévoit une obligation d’information et non de concertation ou de recueil d’un avis. Ce dispositif peut être vraiment très utile dans certains cas de figure. Les maires et les présidents de communauté d’agglomération ne sont pas toujours informés des restructurations de service, qui peuvent entrer en contradiction avec les politiques menées dans des centres-villes, par exemple. Informer les communes et les EPCI à l’avance peut permettre de travailler dans la même direction.
M. Raphaël Schellenberger. Cet article a le mérite d’ouvrir un débat intéressant. Il existe une administration assez exceptionnelle en la matière : la DGFIP, la direction générale des finances publiques, qui est la gestionnaire des deniers publics. Elle considère depuis quelques années qu’on gère mieux en louant des locaux aux collectivités locales plutôt qu’en étant propriétaire. Elle demande donc aux collectivités de mettre à disposition des locaux adaptés. Dans ma circonscription, la direction départementale a tout d’un coup quitté un local et cessé de payer le loyer, sans qu’il y ait eu le moindre dialogue à ce sujet. Je peux donc comprendre qu’on aboutisse à ce genre d’article, même s’il est inutile et inopérant. Si on faisait preuve d’un peu de bon sens et s’il y avait un peu de discussion, on n’en serait pas là.
M. Rémy Rebeyrotte. Ce type de cas se présente parfois, mais il ne faut pas oublier que le Gouvernement remet des services centraux de l’administration, de la DGFIP et bientôt de l’intérieur, dans des territoires. Cela représente des familles, des compétences et des services, et c’est quand même plutôt vertueux.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 46 ter est supprimé.
Article 46 quater (articles L. 2334-36, L. 2334-37, L. 2334-42, L. 2334-43 [nouveau], L. 2522, L. 3334-10 du code général des collectivités territoriales) : Renforcement de l’État déconcentré : modalités d’attribution de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL)
Amendement de suppression CL1096 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’article 46 quater institue des commissions départementales pour la DSIL, la dotation de soutien à l’investissement local. Outre que c’est contraire à ce que nous avons voté en loi de finances, il serait dangereux de fusionner les modalités d’attribution de la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, et de la DSIL. Ces deux dotations ont des objectifs vraiment spécifiques.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je suis absolument d’accord. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 46 quater est supprimé et tous les amendements portant sur l’article tombent.
Article 46 quinquies (article 4 de la loi n° 92‑125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République) : Renforcement de l’État déconcentré : rôle prépondérant du représentant de l’État dans le département
Amendements de suppression CL1097 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL930 de M. Jean-René Cazeneuve.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Cet article, introduit par le Sénat, prévoit que toute décision de l’État prise au niveau territorial, y compris sur le plan régional, relève du préfet de département. Cette disposition semble assez peu praticable et, surtout, la répartition des attributions et des compétences entre les diverses autorités et les services qui relèvent du pouvoir exécutif a un caractère réglementaire. Il revient donc au Gouvernement d’intervenir dans ce domaine. Cet article excède les prérogatives du législateur.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.
M. Raphaël Schellenberger. L’argument relatif à l’excès de pouvoir du législateur me surprend toujours dans ce genre de texte. Je suis assez d’accord avec l’idée que la déconcentration relève d’abord de l’organisation interne de l’État et du Gouvernement et qu’elle regarde donc relativement peu le législateur. Mais dans ce cas, il ne faut pas présenter un texte comportant « déconcentration » dans son titre. Si nous ne sommes pas censés débattre de la déconcentration, il ne faut pas l’inscrire à l’ordre du jour : un projet de loi « 2DS » aurait peut-être suffi. À partir du moment où vous présentez un texte visant à légiférer sur la déconcentration, débattre du process administratif et de la place du préfet me semble plutôt pertinent.
C’est aussi une question d’efficacité. Il est souvent question de maires qui découvrent une décision prise par l’intercommunalité concernant leur commune. Quand le maire n’est plus au courant de ce qui se passe dans sa commune et que les habitants viennent lui demander s’il savait, l’intercommunalité ne peut pas fonctionner. C’est un peu pareil pour l’État. Comment voulez-vous qu’un préfet, qui est censé avoir une vision transversale du département, puisse s’en sortir si toutes les administrations techniques et les autorités ou offices indépendants prennent des décisions sans qu’il soit informé, alors qu’il mène parfois des politiques dans les mêmes domaines – cela arrive plus souvent qu’on le croit.
Cet amendement du Sénat me semble tout à fait adapté compte tenu de l’objet du texte et de nature à améliorer l’efficacité de l’action publique locale.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 46 quinquies est supprimé et l’amendement CL1250 de Mme Emmanuelle Ménard tombe.
Après l’article 46 quinquies
Amendement CL1659 de M. Bruno Questel.
M. Bruno Questel. La proposition de la loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes prévoit une interdiction de la présentation d’animaux d’espèces non domestiques dans les spectacles de cirques itinérants, dans un délai de sept ans. Il faudra s’organiser pendant cette période et protéger les exploitants des cirques itinérants, qui peuvent rencontrer des difficultés d’installation dans certains territoires communaux. Je vous propose donc d’instituer un mécanisme de médiation placé sous la responsabilité des préfets.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Avis favorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis.
M. Raphaël Schellenberger. C’est amusant. On se dit que discuter de la façon dont les administrations prennent leurs décisions en s’intéressant au rôle du préfet ne relève pas du domaine de la loi, mais là on demande que le préfet mène une médiation en cas de problème : c’est marcher sur la tête.
M. Rémy Rebeyrotte. Je soutiens cet amendement. Dans ce domaine, les préfets intiment quasiment des ordres aux communes car il faut bien trouver des solutions pour accueillir les cirques. Or c’est absolument catastrophique pour le cirque et pour la commune : vous imaginez un peu dans quel état d’esprit cela met tout le monde. Une médiation ne peut qu’être favorable.
La commission adopte l’amendement.
Deuxième réunion du mercredi 24 novembre à 14 heures 30
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Amendements de suppression CL1099 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure et CL764 de la commission du développement durable.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’article 46 sexies, introduit par le Sénat, modifie la composition du conseil d’administration de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pour introduire une parité entre les représentants des collectivités territoriales et ceux de l’État et de la Caisse des dépôts et consignations.
Plusieurs raisons justifient la suppression de cet article. L’ANCT est un opérateur de l’État, financé par l’État : la composition de son conseil d’administration a donc vocation à donner une majorité aux représentants de l’État et de la Caisse des dépôts et consignations. Par ailleurs, les collectivités territoriales sont déjà correctement représentées au sein du conseil d’administration de l’ANCT, puisqu’elles détiennent dix sièges sur trente-trois et que la présidence et la vice-présidence de l’agence leur sont confiées. Enfin, lorsqu’une délibération ne recueille pas la majorité de leurs voix, elle n’est pas adoptée ; le président du conseil d’administration doit alors inscrire à l’ordre du jour de la prochaine réunion du conseil une nouvelle délibération portant sur le même objet.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Avis favorable. Il serait gênant de modifier cet équilibre alors que l’ANCT a été installée en janvier 2020.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 46 sexies est supprimé.
Article 47 (supprimé) : Révision des contrats de cohésion territoriale
Amendement CL765 de la commission du développement durable.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Le contrat de cohésion territoriale avait vocation à devenir le cadre contractuel unifié permettant d’homogénéiser et de rationaliser les différentes démarches contractuelles engagées par l’ANCT avec les différents types de collectivités territoriales. Il n’a cependant jamais été déployé en tant que tel. Il subsiste à ce jour une multitude de démarches contractuelles, essentiellement au niveau infrarégional.
Je suis favorable à cet amendement visant à supprimer la référence à un décret pour la mise en œuvre des contrats de cohésion territoriale. En effet, ces contrats ont été mis en œuvre, sous des dénominations différentes, essentiellement par voie de circulaire. Différents types de contractualisations ont été institués au fil du temps par divers textes, le plus souvent par des circulaires. Il est donc inutile de prévoir dans la loi une référence à un décret qui ne sera jamais pris.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 47 est ainsi rétabli.
La commission adopte l’article 48 non modifié.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1560 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Amendements identiques CL1101 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, CL778 de la commission du développement durable et CL1155 de M. Paul Molac.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’article 49 vise à inscrire dans la loi le rôle et les missions du réseau France Services, qui a vocation à remplacer les maisons de services au public.
Le Sénat a ajouté un alinéa qui prévoit que, si un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) est signataire de la convention France Services, les maires de ses communes membres doivent être préalablement associés au projet de convention. Je vous propose de supprimer cet alinéa, qui pose plus de problèmes qu’il n’en résout. L’association la plus large des élus concernés par un projet de convention France Services est souhaitable, mais une telle consultation relève du fonctionnement interne de l’EPCI et n’a pas vocation à être inscrite dans la loi. En outre, l’alinéa n’est pas opérant car il ne précise pas si cette association doit passer par une consultation des conseils municipaux ou par une autre voie.
M. Paul Molac. L’alinéa 5 revient à dire aux EPCI comment ils doivent s’organiser : il me semble de bon sens de le supprimer.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques CL403 de Mme Jeanine Dubié et CL429 de M. Raphaël Schellenberger.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Les critères conditionnant l’attribution du label France Services ne sont pas fixés dans la loi ; or ces amendements ne permettent pas de savoir quel critère précis serait assoupli.
Par ailleurs, ils donnent l’impression que les usagers en zone de montagne n’auront pas droit à des espaces France Services de même qualité que les autres.
Enfin, le critère relatif à la présence de deux agents, qui pose problème aux auteurs de ces deux amendements, n’est pas aussi strict que ne l’indiquent les exposés sommaires. Une réponse ministérielle du 11 février dernier a apporté la précision suivante : « Concernant le critère de présence de deux agents d’accueil, il est à noter que ceux-ci peuvent être affectés à plein temps ou à temps partiel […]. Si la présence des deux agents ne peut être matériellement assurée, l’unique agent de la structure France Services doit être en mesure d’assurer un service public de proximité au moins vingt-quatre heures par semaine, sur cinq jours ouvrés. »
Pour toutes ces raisons, je donne à ces amendements un avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. La labellisation dépend de la qualité du service. Il n’y a aucune raison d’assouplir les critères dans les zones de montagne ; au contraire, ces territoires ont vraiment besoin de services publics de proximité où le personnel est présent. S’il a été difficile, au début, de faire admettre la présence de deux agents dans les espaces France Services, cette exigence est désormais tout à fait entrée dans les mœurs. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL1562 et CL1564, l’amendement de coordination CL1561 ainsi que les amendements rédactionnels CL1566 et CL1559 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Elle adopte l’article 49 modifié.
Amendements de suppression CL1104 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL779 de la commission du développement durable.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’article 49 bis, introduit par le Sénat, consacre dans la loi l’existence d’une commission nationale chargée d’émettre un avis sur les demandes de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Toutefois, cet article n’est pas à sa place et relève davantage d’un texte spécifique sur les catastrophes naturelles. Justement, une proposition de loi consacrant, dans son article 4, l’existence d’une commission nationale consultative des catastrophes naturelles a été adoptée par l’Assemblée nationale le 28 janvier dernier, puis par le Sénat le 21 octobre dernier. Une commission mixte paritaire doit se réunir prochainement pour tenter de trouver un accord entre les deux assemblées. Dans ces conditions, il convient de retirer, par cohérence, l’article 49 bis du présent projet de loi.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cette disposition figure en effet dans la proposition de loi visant à réformer le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles évoquée par Mme la rapporteure. Avis favorable.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 49 bis est supprimé.
TITRE VII
MESURES DE SIMPLIFICATION DE L’ACTION PUBLIQUE
Chapitre Ier
Accélération du partage de données entre administrations au bénéfice de l’usager
La commission adopte l’amendement rédactionnel CL1601 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Amendements identiques CL1514 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL79 de M. Matthieu Orphelin.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Il n’est pas souhaitable de limiter le mécanisme d’échange d’informations entre administrations aux plus grandes collectivités. Plus de 97 % des communes et la moitié de la population nationale se trouveraient, de fait, exclues d’un dispositif pourtant utile. Notre droit prévoit déjà une clause de sauvegarde pour éviter qu’une obligation n’entraîne une charge disproportionnée pour une collectivité. Afin d’assurer la bonne application du dispositif à l’égard de tous, je vous propose donc de supprimer cette limitation injustifiée introduite par le Sénat.
M. Matthieu Orphelin. L’exclusion des communes de moins de 10 000 habitants du mécanisme de transmission des informations dans le cadre du dispositif « Dites-le nous une fois » va à l’encontre du principe d’égalité de traitement des usagers devant le service public. Les habitants précaires des petites communes se verraient refuser l’application de ce dispositif censé faciliter l’accès aux prestations sociales. L’uniformité de traitement dans l’ensemble du territoire est absolument nécessaire pour lutter contre les situations de non-recours aux prestations sociales. Je demande donc la suppression de cette limitation, comme l’ont également proposé les membres du groupe écologiste du Sénat.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. L’article 50 change le paradigme des échanges de données entre acteurs publics – État, collectivités territoriales et organismes de sécurité sociale. Aujourd’hui, pour échanger des données dans un cadre sécurisé au bénéfice des citoyens, il faut demander l’autorisation explicite de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), ce qui ralentit beaucoup les procédures. Après avoir échangé avec la CNIL, j’ai proposé d’inverser cette logique : désormais, les échanges de données entre l’État, les collectivités et la sécurité sociale seront permis par défaut dès lors qu’ils se feront au bénéfice des usagers et qu’ils permettront d’informer proactivement les citoyens de leurs droits – nous examinerons même un peu plus tard un amendement visant à leur octroyer directement les aides et prestations auxquelles ils peuvent prétendre sans qu’ils n’aient à entreprendre aucune démarche. La CNIL a validé ce principe à condition de pouvoir surveiller réellement les échanges de données, ce qu’elle ne peut pas faire aujourd’hui en temps réel. Là encore, c’est une bonne chose, qui va dans le sens de la modernisation. Ce principe, qui s’inscrit dans le cadre de la démarche « Dites-le nous une fois », va révolutionner la relation des citoyens avec les administrations et simplifier la vie d’un grand nombre d’entre eux. Pour autant, cet échange de données est une possibilité, non une obligation. Il serait dommage d’exclure du dispositif les communes de moins de 10 000 habitants qui aimeraient y participer : je suis donc favorable à ces deux amendements.
M. Raphaël Schellenberger. À vous entendre, l’alinéa 7 empêcherait les communes de moins de 10 000 habitants qui seraient volontaires de participer à ce dispositif. Ce n’est pas le cas : l’alinéa 7 permettra, à l’inverse, aux communes qui ne sont pas volontaires de ne pas être contraintes d’y participer.
Certes, pour améliorer les services rendus à la population, nous avons tous intérêt à ce que le plus grand nombre de collectivités participent à ce dispositif. Néanmoins, nous discutons d’un projet de loi « relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale », et il serait paradoxal que les mesures de simplification ne s’adressent pas à ceux qui sont concernés par la différenciation, la décentralisation et la déconcentration, c’est-à-dire aux élus locaux ! Comme vous, nous sommes absolument convaincus de la nécessité de simplifier la vie de nos concitoyens et de faciliter le partage des données, mais si cela se fait au détriment des maires et des administrations des toutes petites communes, nous n’aurons rien gagné. Je le répète, l’alinéa 7 n’empêche pas les petites communes de participer au dispositif : il tempère vos velléités de suradministration dans les petites collectivités qui n’en ont pas les moyens.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Un membre de votre famille politique a parlé d’« enfer bureaucratique ». Pour ma part, je n’utilise pas ces termes, mais je constate qu’il existe des outils modernes permettant une réelle simplification des procédures.
La précaution qu’a voulu prendre le Sénat est redondante avec l’article L. 114-10 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA), qui interdit d’imposer aux administrations ou aux collectivités des obligations en matière de « Dites-le nous une fois » qu’elles seraient dans l’impossibilité technique d’assumer. Le droit actuel permet donc déjà aux maires des petites communes de ne pas partager des données. Cependant, c’est dans l’autre sens que l’échange de données peut être intéressant : ce dispositif permettra aux maires des petites communes de calculer automatiquement le tarif de cantine applicable à leurs administrés sans avoir à leur demander leur avis d’imposition ou leur quotient familial. Je vous garantis que cela facilitera tant la vie administrative des communes que la vie quotidienne de leurs habitants. Il ne suffit pas de parler de simplification : encore faut-il en imaginer les outils et avoir le courage de les mettre en œuvre.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL1603 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Amendement CL1493 du Gouvernement et sous-amendement CL1635 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Au-delà du préremplissage de formulaires et de l’information proactive des citoyens au sujet de leurs droits, nous souhaitons que cet échange d’informations permette d’aller au bout de la démarche « Dites-le nous une fois » et d’attribuer automatiquement des droits ou des prestations sociales. Vous connaissez déjà quelques exemples de cette pratique – je pense au chèque énergie, à l’indemnité inflation, ou encore à l’inscription automatique des bénéficiaires du RSA ou du minimum vieillesse à la complémentaire santé solidaire prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. À partir du moment où l’on connaît la situation des personnes, on évite toutes sortes d’erreurs voire de fraudes : tout en évitant le non-recours, on sécurise donc le système et on préserve la confiance entre les citoyens et l’administration.
L’outil au cœur de ce dispositif est FranceConnect, utilisé par 32 millions de Français. C’est un facteur de souveraineté numérique et, surtout, de sécurité, puisqu’il nous atteste l’identité de la personne qui se connecte et nous permet de l’informer en fonction de sa situation personnelle, de préremplir des formulaires et de lui octroyer des droits.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Cet amendement, que Mme la ministre avait annoncé lundi, nous permet de faire un grand pas en direction des usagers et dans la lutte contre le non-recours aux droits. Dans l’unique intérêt de nos concitoyens, il prévoit que les administrations échangent des données de façon proactive, non seulement pour informer les usagers de leurs droits, mais aussi pour les leur attribuer. Cette mesure tout à fait bienvenue aidera de façon très concrète de très nombreuses personnes, souvent précaires, qui ignorent qu’elles ont droit à des aides. Avis très favorable, donc.
Mon sous-amendement CL1635 est rédactionnel.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je donne un avis favorable à ce sous-amendement.
M. Raphaël Schellenberger. Dans le domaine du numérique, l’enfer est pavé de bonnes intentions. Cela ne me dérange pas du tout d’être le rabat-joie de service pour mettre en lumière ce qu’implique un tel amendement.
Est-il normal d’accéder automatiquement à des droits et de recevoir des aides sans même les avoir demandées ? C’est un projet de société, une question politique qu’il vous revient de trancher.
Ce faisant, vous vous apprêtez à interconnecter l’ensemble des bases de données de l’État et des collectivités territoriales. Quel est l’avis de la CNIL ? Le fait que cette mesure soit introduite par voie d’amendement est d’ailleurs surprenant – cela permet sans doute d’éviter de produire certaines études d’impact… Quels risques l’interconnexion des nombreuses données dont l’État dispose sur chacun des Français, notamment en matière fiscale, sociale et sanitaire, emporte-t-elle ? Toutes ces informations seront, « si besoin », accessibles aux collectivités locales. Quelles seront précisément les données transmises aux élus locaux, aux maires, à leurs adjoints et à leurs services ? J’entends bien que cela facilitera le calcul du tarif de cantine, mais il peut aussi s’agir de données personnelles, très sensibles, dont certains Français ne souhaitent pas qu’elles soient portées à la connaissance de n’importe qui.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Ce sont des questions importantes, sur lesquelles je veux lever toutes les inquiétudes.
La CNIL a évidemment été saisie de l’ensemble de l’article 50 et du présent amendement, qui a nécessité un important travail de rédaction – c’est pourquoi il ne vous est présenté qu’aujourd’hui. Au-delà de l’information des usagers et du préremplissage des formulaires, elle a émis publiquement un avis favorable à l’octroi des aides de manière proactive.
Le Conseil d’État a rendu le 10 novembre un avis très intéressant sur ce qu’on appelle les « bases ressources ». Notre système social compte une trentaine de ces bases – pour faire simple, il existe une base par aide sociale, et il arrive que les familles monoparentales, par exemple, ne soient pas régies par la même base que les autres usagers, ce qui signifie que les critères fiscaux ou de ressources pour bénéficier de certaines aides sont différents. C’est cette complexité que nous entendons pallier. Notre projet n’est pas d’organiser une société de la surveillance pilotée par l’État, mais de s’assurer que les droits créés par le Parlement puissent être réellement appliqués. Face à ces trente bases ressources recensées par le Conseil d’État, deux solutions sont possibles : favoriser le préremplissage des formulaires, la proactivité de l’administration et le « aller vers », ou bien fusionner l’ensemble de ces bases, ce qui peut également constituer un grand projet politique. En matière de simplification, nous devons nous donner tous les moyens d’avancer et écouter ce que disent les autorités administratives indépendantes, qui font remarquer que la complexité du système peut être combattue avec des outils adaptés. C’est bien ce que nous proposons ici.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL1636 et CL1637 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Amendement CL1515 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Cet amendement vise à supprimer le mécanisme permettant aux maires de bénéficier des échanges d’informations entre administrations pour constituer un registre de la population de leur commune. D’un point de vue juridique, cette extension du dispositif de l’article 50 est plus que fragile car elle s’écarte de la finalité constitutionnellement admise de ce type d’outils – je vous renvoie à la décision n° 2014-690 DC du Conseil constitutionnel. Elle n’est pas non plus opportune, puisqu’il existe déjà des outils permettant aux maires d’obtenir les données souhaitées, comme le traitement prévu à l’article L. 131-6 du code de l’éducation.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Dans la droite ligne des propos de M. Schellenberger, il est très important de ne pas constituer, contre l’avis de la CNIL, des bases de données dont on ne connaîtrait pas la finalité précise au moment de leur création. La CNIL a toujours considéré que les traitements de données devaient être réalisés dans une finalité très précise et que les droits et consentements des usagers devaient être garantis. Depuis plusieurs années, elle admet que les communes ont, dans certains cas, le droit de constituer des fichiers de personnes habitant sur leur territoire, par exemple pour créer des registres communaux d’alerte, d’information des populations ou de communication municipale. Ces fichiers peuvent, d’ailleurs, être alimentés par d’autres fichiers d’imposition locale, de listes électorales ou de fournisseurs d’énergie. L’alinéa 12 ne précisant pas expressément la finalité de ces registres, je suis favorable à sa suppression.
M. Raphaël Schellenberger. Je suis toujours très prudent lorsqu’on envisage d’interconnecter des bases de données et d’ouvrir à certaines personnes un accès à des informations qui, ajoutées les unes aux autres, peuvent être colossales. Il y a là un risque d’intrusion dans la vie privée des individus concernés.
Pour un maire, cependant, le fait de disposer d’un simple fichier de la population de sa commune, sans plus de précisions que celles relatives à l’état civil de ses concitoyens, sans lien avec la situation fiscale ou l’état de santé de ces derniers, s’avère tout à fait utile. Un tel fichier ne serait constitué que de données publiques, même s’il n’a pas de finalité précise – il pourrait avoir chaque jour un usage différent. Cela fait quelques années que nous nous battons pour que les maires aient la possibilité de constituer ces fichiers simples de la population de leur commune, qui se borneraient à répertorier le nom, le prénom, la date de naissance et l’adresse de leurs concitoyens, et qui pourraient être bien utiles un jour ou l’autre. Je conviens toutefois que cela ne correspond pas exactement à la disposition introduite par le Sénat.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL1516 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Il n’est pas utile de prévoir un avis du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) sur le décret d’application du mécanisme d’échange d’informations. Cette demande est satisfaite par le droit en vigueur, à l’article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je confirme que le CNEN sera consulté sur le décret d’application : la mention ajoutée par le Sénat n’est donc pas nécessaire. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL211 de M. Pierre-Alain Raphan.
M. Pierre-Alain Raphan. Cet amendement vise à donner aux maires les moyens de constituer un registre des mobilités, qui leur permettrait d’organiser une veille et d’alerter immédiatement les autorités lorsqu’ils sont sans nouvelle d’une personne censée revenir sur le territoire national.
Selon le dernier rapport du Gouvernement sur la situation des Français établis hors de France, environ 1 650 de nos compatriotes sont incarcérés à l’étranger chaque année, et près d’un tiers le sont sans cause connue. Ces détentions arbitraires, disparitions forcées ou prises d’otages politiques concernent des journalistes, des chercheurs, des touristes, des étudiants et des professionnels divers. Dans ces situations de crise, chaque seconde compte : c’est pourquoi l’implication des maires dans cette chaîne visant à secourir nos concitoyens à l’étranger est indispensable.
L’accès à une partie des données du fichier Ariane et du centre de crise et de soutien du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, dans le respect d’un cadre défini par la CNIL, permettrait aux maires d’exercer une vigilance supplémentaire, de déclencher des alertes, de lever des doutes sur certaines situations et de participer à l’accompagnement des victimes à l’étranger.
J’ai préparé cet amendement avec quatre maires bretons traumatisés par ce qui est arrivé à Michel Thierry Atangana. Stéphane Cloarec, maire de Saint-Pol-de-Léon, Pierre-Yves Mahieu, maire de Cancale, Jean-Paul Vermot, maire de Morlaix, et Jacques Edern, maire de Sibiril, souhaitent participer ainsi à une forme de décentralisation de la diplomatie française.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Vous proposez la mise en place d’un échange de données entre les administrations chargées d’accompagner nos concitoyens à l’étranger, d’une part, et les maires, d’autre part. Si je comprends votre objectif, qui est de fournir aux maires toutes les informations qui permettraient d’aider les personnes se trouvant dans des situations plus que délicates à l’étranger, le dispositif ne me semble pas pour autant opportun. Sur le fond, je ne sais pas si le maire d’une commune française est vraiment le mieux placé pour accompagner des victimes à l’étranger. En outre, d’un point de vue juridique, je ne suis pas certaine que ces échanges entrent dans le cadre constitutionnel autorisé, puisque la mise en place d’échanges de données est strictement encadrée par la Constitution et le règlement général sur la protection des données (RGPD). Votre amendement me paraît d’autant plus fragile qu’il ne prévoit pas la possibilité, pour les usagers, d’exercer un droit d’opposition. Je vous invite donc à le retirer, faute de quoi je lui donnerai un avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur Raphan, il me semble important de valoriser le combat très salutaire que vous menez pour la protection des libertés de nos concitoyens retenus, incarcérés ou privés de leurs droits à l’étranger. Néanmoins, votre amendement n’est pas opérant – plus précisément, il ne le serait que si l’ensemble des Français signalaient à leur mairie tout départ à l’étranger. Je doute que nos concitoyens y soient prêts. Le Quai d’Orsay suit déjà les mouvements que permet de retracer l’utilisation des passeports biométriques ; je ne pense pas que la constitution d’un fichier qui irait au-delà permette réellement de lutter contre les problèmes que vous soulevez. Demande de retrait.
M. Pierre-Alain Raphan. On ne perd jamais de temps à essayer de sauver des vies. L’inscription au fichier Ariane est déjà basée sur le principe du volontariat : on ne force pas les Français à déclarer leurs voyages, mais ils peuvent tous se retrouver enfermés à l’étranger s’ils ne le font pas. Outre la nécessité de sensibiliser nos concitoyens à cette démarche – le Gouvernement pourrait aussi nous y aider –, il faudrait les encourager à partager, sur la base du volontariat, ces données avec leur maire qui, en lien avec les familles, sera à même de donner l’alerte, le cas échéant, et d’organiser la remontée d’informations. Peut-être pourrions-nous retravailler cet amendement ensemble, d’ici à la séance, pour le rendre opérant rapidement.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Vous l’avez dit : lorsqu’une personne pense s’exposer à un risque en partant à l’étranger, elle peut déjà s’inscrire au fichier Ariane qui permettra d’assurer un suivi. Vous appelez de vos vœux une coordination plus étroite entre les services du Quai d’Orsay, qui suivent et protègent les Français en déplacement ou en résidence à l’étranger, et les maires des communes dont ils sont originaires. Il y a des manières beaucoup moins lourdes, plus opérantes et plus efficaces d’organiser ce partage d’informations que de constituer un fichier numérique, avec toutes les questions relatives à la vie privée que cela pose. Nous pourrons évidemment en reparler, mais je ne suis pas sûre que la meilleure solution passe nécessairement par la loi.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 50 modifié.
Après l’article 50
Amendement CL1416 du Gouvernement.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Ouvrir, faire circuler et exploiter les données publiques : c’est l’une des priorités fixées par le Premier ministre lors du dernier comité interministériel de la transformation publique et dans les feuilles de route interministérielles que j’ai présentées suite aux travaux menés par Éric Bothorel, que je tiens ici à saluer, dans le cadre de la mission parlementaire qui lui a été confiée. L’amendement CL1416 cherche à atteindre cet objectif dans le domaine des transports.
Afin d’offrir à nos concitoyens une information fiable et en temps réel, l’article 25 de la loi d’orientation des mobilités (LOM) demande aux autorités organisatrices de transport d’ouvrir les données des services qu’elles organisent ; il leur permet de déléguer la charge de cette ouverture aux opérateurs de transport chargés de l’exécution de ces services. Ce chantier avance bien, notamment grâce à la mise en place du point d’accès national transport.data.gouv.fr. Cependant, les données en temps réel sont souvent produites par des systèmes embarqués, les systèmes d’aide à l’exploitation et à l’information voyageur (SAEIV). Le présent amendement vise donc à étendre aux opérateurs de ces systèmes la possibilité de se voir déléguer par les autorités organisatrices de transport la charge de l’ouverture des données. En leur permettant d’ouvrir directement leurs données, de manière simple et juridiquement sécurisée, nous accélérerons ce mouvement et améliorerons l’expérience des transports en commun pour tous.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Cet amendement est bienvenu : il enrichira les informations utilisées pour améliorer l’information des voyageurs et proposer des possibilités de report modal pour des déplacements moins polluants. En somme, il favorise la mobilité durable : je lui donne donc un avis favorable.
Les SAEIV facilitent la conduite, assistent les exploitants de transport et informent les usagers sur leur trajet et les conditions de transport. Cela signifie-t-il que des applications telles que Google Maps ou Waze seront sollicitées ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. L’amendement permettra aux autorités organisatrices de transport comme Île-de-France Mobilités de confier la charge de l’ouverture des données de transport à des opérateurs de SAEIV – il ne s’agit pas des acteurs que vous avez cités mais de sociétés auxquelles on a délégué, par exemple, l’exploitation d’une ligne dans le cadre de l’ouverture à la concurrence.
M. Raphaël Schellenberger. Qu’est-ce qui n’est pas possible actuellement? Est-il impossible pour l’exploitant d’un réseau de tramway ou de métro de mettre des données à disposition du public ?
M. Rémy Rebeyrotte. Il faudrait également que nous légiférions pour permettre les échanges d’informations sans compensation financière. Je m’explique : actuellement, si la région Bourgogne veut communiquer les horaires de ses navettes – assurant par exemple les transferts jusqu’aux gares – sur les systèmes d’information SNCF, elle doit d’abord négocier un accord financier. Cela crée des blocages absolument partout ! À partir du moment où nous souhaitons favoriser la fluidité des transports entre les grandes sociétés et les autorités organisatrices de la mobilité (AOM), et l’intermodalité, il faut éviter ce type d’accords à caractère commercial et développer d’autres modes de compensation car, pendant ce temps, ce sont les usagers qui paient l’addition, attendent pour disposer d’informations complètes et, éventuellement, de billets combinés.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Les autorités organisatrices délèguent par exemple à un opérateur la conduite d’une ligne de bus. Dans le bus, une autre entreprise fournit ce que l’on appelle un système d’aide à l’exploitation et à l’information voyageurs (SAEIV), qui peut être un petit GPS permettant au conducteur de bus de savoir où il en est dans son plan de charge. Les données de cet outil sont non pas la propriété de l’entreprise qui gère le bus, mais celle de l’entreprise qui fournit le GPS. Nous souhaitons que ces données soient extraites et partagées en temps réel avec le public.
M. Raphaël Schellenberger. Cela signifie-t-il qu’en l’état du droit, l’entreprise qui vend le GPS – pour reprendre votre exemple – fournit une prestation en temps réel à l’exploitant, mais que les données restent sa seule propriété ? Si tel est le cas, les contrats entre les opérateurs et ces prestataires ne sont-ils pas bancals ? Les données ne devraient-elles pas tout simplement être la propriété des premiers, et non des seconds ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Pour les données en temps réel, la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (LOM) n’a pas été écrite avec toutes les chaînes de délégation. Les informations relatives aux lignes, aux arrêts, aux grilles horaires sont fournies en temps réel par les systèmes d’aide à l’exploitation, mais n’étaient initialement pas incluses dans la LOM. C’est l’objet de l’amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL146 de M. Matthieu Orphelin.
M. Matthieu Orphelin. Cet amendement permet aux autorités organisatrices de la mobilité d’améliorer leur connaissance des besoins de mobilité domicile-travail des travailleurs, de la répartition de leur demande entre les différents modes de transport et des contributions des employeurs aux frais de transport de leurs employés, notamment via le dispositif du forfait mobilités durables (FMD).
Alors qu’on ne connaît pas de façon transparente et exhaustive l’état d’avancement du déploiement du FMD dans les entreprises françaises, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) enregistre les données en lien direct avec le transport et la mobilité, relatives au forfait mobilités durables, via les déclarations sociales nominatives des employeurs.
Partager les données relatives au FMD entre administrations permettrait d’améliorer l’efficacité du dispositif, au bénéfice des salariés et agents qui seront plus nombreux à se déplacer à vélo ou en covoiturage, au bénéfice de la santé économique des entreprises et de l’environnement.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Je comprends la finalité de votre amendement – et la partage, tout comme le Gouvernement puisqu’un de ses amendements, que nous venons d’adopter, va dans le même sens en améliorant la circulation des informations et données pour favoriser les reports modaux et accroître les mobilités durables.
Mais, d’un point de vue pratique, il me semble peu opportun. Si l’ACOSS transmet déjà au bloc communal certains éléments recueillis lors du recouvrement du versement mobilités, ces éléments concernent les aspects qui permettent d’établir le montant du versement, pour des raisons fiscales. S’adosser, comme vous le demandez, au versement mobilités ne me semble pas idéal. En outre, pour que de tels échanges soient constitutionnels, il faut qu’ils soient strictement nécessaires et au bénéfice des usagers – ce que ne prévoit pas l’amendement.
Je vous invite donc à retirer votre amendement, au profit du dispositif du Gouvernement que nous venons d’adopter.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur Orphelin, nous avons tous très envie que le forfait mobilités durables soit massivement utilisé et qu’il participe effectivement au report sur des modes de transport plus durables. Nous avons mis en place un baromètre qui permet d’en suivre l’évolution – nombre de personnes par employeur, par région, etc.
Nous savons que 30 % des employeurs sondés ont validé la mise en place d’un forfait mobilités durables et nous sommes en train de réaliser le bilan des accords d’entreprise, ce qui nous permettra de disposer d’un état des lieux de la mise en œuvre. À l’inverse, les données que vous souhaitez voir transmises aux AOM sont nominatives. Je ne suis pas sûre que ce soit le plus intéressant. Mon avis sera donc également défavorable.
M. Matthieu Orphelin. Je le répète, le suivi de la mise en œuvre du forfait mobilités durables dans les entreprises, comme dans les collectivités territoriales, pose problème. Madame la ministre, interrogez vos services pour qu’ils vous expliquent ce que signifient ces 30 % et quelles sont les entreprises concernées. Vous aurez des surprises ! Je ne veux pas polémiquer, mais je m’inquiète car il s’agit d’un beau dispositif et il faut qu’il se déploie.
L’amendement est retiré.
Amendement CL1388 de Mme Valérie Oppelt.
Mme Valérie Oppelt. Toute subvention attribuée par une autorité administrative ou l’organisme chargé de la gestion d’un service public industriel et commercial doit, lorsque cette subvention dépasse un seuil défini par décret de 23 000 euros, conclure une convention avec l’organisme de droit privé qui en bénéficie, définissant l’objet de la subvention, son montant, ses modalités de versement et ses conditions d’utilisation. Les données essentielles de cette convention doivent ensuite, en théorie, être rendues disponibles sous forme électronique dans un standard ouvert aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé.
Les données concernant l’attribution des subventions doivent faire l’objet de davantage de transparence et d’accessibilité au grand public. Nous proposons donc une extension de l’obligation à la totalité des subventions attribuées à un seul organisme dont le montant cumulé, lors des douze derniers mois civils, est supérieur au seuil de 23 000 euros.
Les collectivités territoriales disposent d’une norme réglementaire qui permet de rationaliser la publication des données des subventions. Une extension du dispositif ne représenterait donc pas un coût supplémentaire significatif.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Comme l’a rappelé Mme Oppelt, la loi prévoit que, si une subvention accordée à un organisme excède le seuil réglementaire de 23 000 euros, elle fait l’objet d’une convention avec l’autorité qui la verse, et les éléments essentiels de cette convention sont publiés.
L’amendement propose que, si plusieurs subventions sont versées à un même organisme et si leur montant cumulé dépasse le seuil de 23 000 euros, elles soient publiées. Cela me semble tout à fait bienvenu. L’amendement est cohérent avec l’économie générale de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (DCRA) et la logique de transparence. Il vise à éviter que des fractionnements abusifs de subventions ne permettent d’échapper aux obligations de transparence. Enfin, il est équilibré, en prévoyant un encadrement temporel pour apprécier si le cumul dépasse le seuil.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je m’en remettrai à la sagesse de la commission. Votre amendement concourt à un objectif louable, et partagé : la transparence démocratique – l’information des citoyens étant fondamentale en démocratie. En effet, les subventions sont parfois accordées de manière discrétionnaire par la puissance publique alors qu’elles procurent un avantage financier.
Mais, pour que votre amendement soit pleinement opérationnel, il faut que les autorités concernées disposent des outils – notamment numériques – pour connaître le montant cumulé des subventions qu’elles accordent. Or tel n’est pas forcément le cas. À cet égard, le plan France relance accompagne la mise à niveau numérique de nombreuses collectivités locales. Ainsi, en Haute-Savoie, nous soutenons un projet de numérisation des demandes de subventions.
Si l’intention de votre amendement est louable, il faut être conscient que, tant que les collectivités n’ont pas basculé vers ces outils numériques, la charge administrative qu’il implique risque d’être assez lourde pour les acteurs.
M. Raphaël Schellenberger. Je comprends l’ambition de l’amendement mais cela me semble particulièrement complexe et risque de faire peser une nouvelle charge sur les collectivités. Il est très fréquent que des organismes bénéficient de 23 000 euros de subventions cumulées… En outre, au-delà d’un certain seuil, les associations doivent par exemple déjà recourir à un commissaire enquêteur pour la validation de leurs comptes. Le contrôle et la transparence ne sont donc pas inexistants.
Enfin, je ne comprends pas ce que vous entendez par les « douze derniers mois civils » ? S’agit-il d’une année civile ou de douze mois glissants ? Dans ce dernier cas, cela devient incompréhensible, les flux de trésorerie des collectivités étant variables d’un mois et d’une année sur l’autre. Il faut absolument se caler sur l’année civile.
M. Rémy Rebeyrotte. Il faut préciser qu’il s’agit de l’exercice budgétaire d’une collectivité. En tout état de cause, l’amendement représente un progrès en termes d’information pour le citoyen car, volontairement, ou parfois involontairement, on a tendance à fractionner le versement des subventions et on peut dépasser les 23 000 euros. Pourquoi imposer à ceux qui reçoivent une seule subvention de 23 000 euros une convention, et pas à ceux qui reçoivent la même somme de manière fractionnée ?
En outre, cela contribue à améliorer la gestion des moyens publics de la collectivité car la convention implique la transmission de pièces comptables et cela peut permettre d’anticiper d’éventuelles difficultés de la structure – nous avons tous en tête des exemples de clubs sportifs.
Mme Valérie Oppelt. Depuis un décret de mai 2017, il est de toute façon obligatoire de produire ces données. En outre, on constate des obligations similaires, voire plus drastiques, dans les autres pays européens. Ainsi, en Espagne, un citoyen peut avoir accès à de très nombreuses données, y compris les factures. L’amendement vise à simplifier l’accès à ces données pour tous les citoyens, dans un souci de transparence.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CL1134 de M. Sébastien Jumel.
M. Sébastien Jumel. Ma commune, j’y vis ; mes services publics, j’y tiens. Madame la ministre, vous savez à quel point je suis – peut-être de manière irrationnelle – attaché à la commune comme instance de proximité et de démocratie vivante.
La décision de retirer aux communes la délivrance des cartes nationales d’identité (CNI) les a dévitalisées dans leurs rapports à la population. Bien sûr, on a attribué aux communes « centres » des équipements, mais les transferts de charges ont été mal compensés. En outre, nous subissons désormais un nouveau phénomène : le week-end, des Parisiens viennent faire leur demande de passeport ou de CNI en Normandie – c’est moins long chez nous qu’à Paris.
Du fait des contraintes imposées par l’article 40 de la Constitution, mon amendement n’est pas aussi ambitieux que je le voulais mais il vise à permettre aux communes qui le souhaitent de recouvrer la délivrance des cartes nationales d’identité.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Monsieur Jumel, moi aussi, je vis dans ma commune – j’aurais du mal à vivre ailleurs. Vous proposez que les communes ne disposant pas de matériels pour la délivrance dématérialisée des cartes d’identité puissent manifester leur souhait de délivrer ces cartes en se rapprochant des communes équipées.
Vous parlez d’un lien entre la commune et le citoyen : je rappelle quand même que la délivrance des titres d’identité est faite au nom de l’État – par le maire en qualité d’agent de l’État, et le préfet.
Par ailleurs, la demande ou le renouvellement de CNI ne dépend pas du domicile et peut être fait dans toute mairie équipée d’une station d’enregistrement. De plus, je ne suis pas certaine de l’apport de votre dispositif en termes de sécurité. Mais, surtout, le déploiement de la nouvelle CNI est en cours ; ce n’est donc pas le moment de changer les procédures.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je suis également très attachée au rôle essentiel des communes en la matière. Demain, avec Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité, je serai dans le Loiret pour rencontrer des secrétaires de mairie, qui sont le premier contact de proximité avec le service public pour une grande majorité de la population.
J’ai lu avec beaucoup d’attention votre amendement, mais je ne suis pas sûre de comprendre. Vous voulez que les communes puissent saisir le préfet. Mais c’est précisément déjà son rôle que de mailler correctement chaque territoire en matériels afin que les données soient correctement saisies et que les titres puissent être correctement remis. Peut-être faut-il revoir la rédaction pour améliorer la portée normative de votre intention ? En l’état, je ne peux qu’émettre un avis défavorable.
M. Ugo Bernalicis. Avec une organisation centralisée, sécurisée, et les outils numériques, on aurait parfaitement pu retirer aux maires leur rôle d’officier d’état civil. Mais ce n’est pas le choix qui a été fait. D’ailleurs, dès la Révolution de 1789, les libertés communales ont été proclamées et ces services de proximité reconnus comme corollaire de la démocratie locale. Certes, le maire les rend au nom de l’État, mais dans l’objectif de maintenir ainsi un lien humain direct et concret entre la collectivité et ses administrés.
En l’espèce, l’amendement évoque les cartes nationales d’identité, mais le raisonnement pourrait s’appliquer aux mariages : pourquoi le maire les célèbre-t-il ? Après tout, il s’agit d’un acte contractuel entre les deux époux. Posez-vous la question ! Certes, la délivrance d’une carte nationale d’identité est peut-être un peu moins solennelle – quoique – mais ne négligeons pas l’importance du contact humain pour notre République et la démocratie locale.
M. Sébastien Jumel. Pour rédiger mon amendement, j’ai été confronté au mur infranchissable de l’examen de la recevabilité des amendements au titre des articles 40 et 45 de la Constitution, ce qui explique ce bricolage. L’interprétation de ces articles n’est d’ailleurs pas la même au Sénat et à l’Assemblée. Y a-t-il deux Constitutions, une pour la chambre haute et une pour la chambre basse ?
Mon amendement vise simplement à appeler votre attention sur le risque d’aggravation du fossé entre le maire et les habitants d’une commune du fait de la fin de la délivrance, par certains maires, des cartes nationales d’identité. Il ne m’a pas échappé que, pour cette mission, le maire représente l’État – j’ai été maire pendant dix ans.
Quand on veut réaffirmer la présence de la République partout et pour tous, on ne peut pas retirer cette impérieuse mission aux maires. Les secrétaires de mairie que vous allez rencontrer, madame la ministre, vous l’expliqueront aussi bien que moi. Dans ma belle circonscription de Seine-Maritime, qui va de Dieppe au pays de Bray, en passant par la vallée de la Bresle et Le Tréport, quand le maire d’un petit village remet sa carte d’identité à des habitants qu’il ne connaît pas – nous avons beaucoup de nouveaux venus dans nos communes depuis le début de la crise de la covid‑19 –, il en profite pour faire connaissance avec la famille et l’informer sur les services, les activités et les animations de la commune. Ainsi le maire stimule-t-il le vivre ensemble et les liens.
M. Bruno Questel. On peut comprendre la philosophie de la démarche du collègue Jumel, mais l’amendement n’est pas opérationnel. Les équipements sont propriété de l’État et mis à disposition des communes dans le cadre d’une convention. Comment mutualiser ? En outre, cela ne règle pas la question du lien. En général, ce sont les secrétaires de mairie, et non les maires, qui remettent les cartes d’identité. Et il n’y a pas de cérémonie particulière à cette occasion.
Mme Marietta Karamanli. Bien sûr, les cartes d’identité ou les titres de nationalité française sont remis par le représentant de l’État mais, en tant que représentante de la nation, je regrette que les parlementaires ne soient pas systématiquement associés à cette démarche importante.
Par ailleurs, j’étais présidente de la mission d’information commune sur l’identité numérique dont les recommandations ont été publiées en juillet 2020. Or, à ce jour, nous n’avons aucune information sur les évolutions en cours. Ne serait-il pas intéressant d’en débattre pour nous en inspirer ? Mesdames les ministres, en tant qu’ancienne sénatrice et ancienne députée, je sais que vous êtes sensibles au travail des parlementaires.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Les cartes nationales d’identité sont renouvelables tous les dix ou quinze ans, selon leur date de délivrance. J’ose espérer que le lien avec les administrés se tisse autrement…
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame Karamanli, FranceConnect, c’est 32 millions d’usagers. Nous sommes l’un des pays européens où l’identité souveraine est la plus mature et la plus développée. Par identité souveraine, j’entends un code source ouvert développé par l’État, qui ne dépend d’aucun opérateur numérique étranger ou privé, et qui permet à 32 millions de Français d’utiliser un identifiant et un mot de passe unique pour mille services publics – j’avais d’ailleurs demandé aux questeurs de l’Assemblée nationale que les députés puissent avoir accès à leur sécurité sociale avec FranceConnect.
Nous avons effectué une déclaration auprès de la Commission européenne pour déployer une solution plus sécurisée en collaboration avec La Poste – FranceConnect+. FranceConnect est donc une très bonne base pour développer l’identité numérique sécurisée.
Avec le soutien de Mme Gourault, avec les associations d’élus et les collectivités territoriales, je prépare une charte afin que FranceConnect puisse se déployer dans toutes les collectivités territoriales et tous les services publics. Trente-cinq départements ont déjà FranceConnect, ce qui permet de préremplir les demandes sociales. Soixante-cinq doivent encore sauter le pas. Le plan France relance peut les soutenir à hauteur de 5 000 euros. J’annoncerai dans les prochains jours les modalités pour aboutir.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL680 de M. Hervé Saulignac.
Mme Marietta Karamanli. Nous ne sommes pas toujours favorables aux demandes de rapports mais, là, il s’agit d’un rapport sur la pertinence de mettre à jour quasi-systématiquement le répertoire électoral unique, en inscrivant automatiquement les citoyens français sur les listes électorales à l’occasion de l’accomplissement de démarches administratives, sauf avis contraire de leur part.
Cet amendement est issu de plusieurs constats : l’abstention ; le fait que 15 % des inscrits sur les listes électorales, soit plus de 7 millions d’électeurs, sont mal inscrits ; les préconisations de la commission supérieure du numérique – à laquelle appartient M. Saulignac, premier signataire de l’amendement – et celles de la mission d’information commune sur l’identité numérique.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Je suis favorable à tout ce qui peut faciliter l’inscription sur les listes électorales de nos concitoyens – comme l’inscription automatique des majeurs que nous avons mise en place – et qui peut ainsi améliorer la participation.
Je rappelle cependant qu’une mission d’information est en cours sur la participation électorale, à laquelle M. Leseul, également signataire de l’amendement, participe en tant que vice-président. Attendons ses conclusions, qu’elle devrait rendre d’ici à mi-décembre. Demande de retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Votre amendement fait indirectement écho à celui du Gouvernement présenté à l’article 50 afin de réfléchir aux démarches qui pourraient être réalisées automatiquement grâce à l’échange de données – c’est ce qu’on appelle l’administration proactive.
Sur le fond, alors qu’une mission est en cours à l’Assemblée nationale visant à identifier les ressorts de l’abstention et les mesures permettant de renforcer la participation électorale, le Gouvernement peut difficilement produire des documents qui auraient davantage leur place dans le rapport de cette mission.
M. Raphaël Schellenberger. J’ai courageusement oublié de lever la main lors du vote sur votre amendement à l’article 50, mais si j’avais su qu’il vise par exemple l’automaticité de l’inscription sur les listes électorales du fait de l’accomplissement d’une autre démarche – le paiement de ses ordures ménagères par exemple –, j’aurais voté contre !
Où va-t-on si les Français n’ont plus besoin de demander des aides sociales et qu’on les leur verse automatiquement ? S’ils n’ont plus besoin de s’inscrire sur les listes électorales et qu’on les inscrit automatiquement, sans même se poser la question de savoir si c’est au bon endroit ? Les citoyens doivent avoir le droit de choisir où ils votent ! Cela a son importance pour les scrutins locaux. En poursuivant dans cette logique, vous allez finir par choisir vous-même pour qui votent les Français !
Mme Marietta Karamanli. Nous validons globalement la démarche à l’article 50, mais il n’est pas bienvenu de renvoyer à plus tard ce que nous pouvons faire tout de suite, au motif qu’une mission d’information est en cours et va rendre ses conclusions dans un mois car, dans un mois, nos débats auront bien avancé.
En outre, je suis bien placée pour savoir que les préconisations des missions d’information ne sont pas toujours reprises. Assurons-nous donc que la mission d’information examine ce point. Mais rien ne nous empêche de voter l’amendement en complément.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. On ne peut pas être inscrit dans deux communes sur les listes électorales.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Qu’ai-je voulu dire en parlant de faciliter les démarches ? Si vous effectuez, par exemple, un changement d’adresse sur votre carte grise, le ministère de l’intérieur vous informe, proactivement, de la manière dont vous pouvez aussi modifier votre inscription sur les listes électorales. Il vous informe, mais ne vous inscrit pas automatiquement.
En l’occurrence, l’amendement de Mme Karamanli précise bien « sauf avis contraire de leur part ». On peut donc imaginer un système où, demain, le citoyen qui vient de changer l’adresse de sa carte grise demande à être automatiquement inscrit sur les listes électorales de son nouveau domicile. Mais il faudra qu’il le demande. On ne saurait le priver de ses droits.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL1517 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. La création d’un droit à l’erreur pour les collectivités territoriales est une idée qui peut paraître intéressante. Toutefois, les dispositions de l’article 50 bis ne sont pas opportunes. En outre, une grande partie d’entre elles est largement satisfaite par le droit en vigueur.
Je m’interroge sur leurs effets concrets et sur les situations réelles auxquelles ces dispositions auraient vocation à s’appliquer. En outre, la logique du droit à l’erreur consiste à améliorer et à apaiser les relations entre l’administration et les usagers, non à remédier à une éventuelle complexité normative pour certaines administrations. Elle consiste également à passer l’éponge sur la première erreur de bonne foi. Or les dispositions proposées, en supprimant cet aspect, tendent à créer un droit à l’erreur permanent qui couvrirait des erreurs récurrentes, ce que personne ne souhaite.
À toutes fins utiles, je rappelle que les collectivités territoriales bénéficient d’ores et déjà du droit à l’erreur en leurs qualités de contribuables et d’employeurs, par exemple au titre de l’article L. 62 du livre des procédures fiscales (LPF). Par ailleurs, si elles connaissent des difficultés dans l’application ou l’interprétation d’une norme, elles peuvent d’ores et déjà s’adresser aux services déconcentrés de l’État, qui assurent auprès d’elles une mission de conseil et d’assistance. Au demeurant, elles demandent régulièrement aux parlementaires que nous sommes de les accompagner dans leurs démarches.
Enfin, les dispositions relatives aux demandes de subventions sont satisfaites par le droit en vigueur, qui prévoit, à l’article R. 2334-23 du CGCT, la possibilité de les régulariser, et empêche le rejet des dossiers incomplets de la demande sans que soit préalablement signalé leur caractère incomplet.
Cet amendement vous propose donc de supprimer cet article.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Avis favorable. Il existe des régimes de régularisation en cas d’erreur applicables aux collectivités territoriales, en tant qu’employeurs ou contribuables. Ils permettent d’accompagner leur bonne foi si des difficultés se présentent.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 50 bis est supprimé.
Article 50 ter (art. L. 1425‑2 du code général des collectivités territoriales) : Élargissement du contenu de la stratégie de développement des usages et services numériques
La commission adopte l’amendement de précision CL1518 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Amendement CL215 de M. Pierre-Alain Raphan.
M. Pierre-Alain Raphan. Il s’agit d’intégrer aux schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique (SDTAN) les actions de formation des agents en matière de cybersécurité.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’article 50 ter prévoit de compléter la stratégie de développement des usages et services numériques (SDUSN) d’un volet relatif au renforcement de la cybersécurité des services publics. La formation des agents peut en faire partie, car la portée de l’article est large, comme le suggère l’usage de l’adverbe « notamment » dans l’amendement, qui est satisfait dans son principe. Toutefois, consacrer expressément la formation des agents à la cybersécurité est bienvenu, compte tenu de l’importance du sujet. Avis de sagesse.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Même avis. Jacqueline Gourault et moi-même avons installé ce lundi un groupe de travail rassemblant les associations d’élus, dédié à l’appropriation des enjeux de cybersécurité dans les communes, petites et grandes. L’enjeu de la formation des agents est l’une des pistes de travail, que l’article 50 ter permet. Nous déployons cette mesure plutôt que d’écrire dans la loi des mots qui, trop souvent, n’ont aucune signification concrète. Surtout, le plan France relance prévoit un investissement de 136 millions d’euros pour la mise à niveau de la cybersécurité des collectivités territoriales, de l’État et des administrations.
La commission adopte l’amendement.
La commission adopte l’article 50 ter modifié.
Après l’article 50 ter
Amendements identiques CL1583 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL1389 de Mme Monique Limon.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Dans la logique de l’article 50, il s’agit de permettre, dans un cadre sécurisé et encadré, conforme au Règlement général sur la protection des données (RGPD), des échanges d’informations entre les acteurs de l’insertion professionnelle. L’objectif est d’améliorer chaque étape de l’accompagnement des personnes concernées, pour mieux connaître leurs besoins ainsi que leurs parcours et adapter les actions à leur égard.
Ces dispositions profiteront à toutes les parties prenantes de la réinsertion : aux personnes accompagnées, grâce à l’amélioration de l’offre et à l’application concrète du fameux principe « Dites-le-nous une fois » ; aux professionnels de l’accompagnement, auxquels elles éviteront de saisir plusieurs fois les mêmes informations et offriront la possibilité d’améliorer leur visibilité sur les personnes accompagnées pour renforcer leur employabilité ; aux décideurs des politiques de réinsertion, auxquels elles permettront de mieux piloter et orienter leur action.
Ces dispositions très positives seront particulièrement bienvenues pour les personnes vulnérables, que nous devons collectivement aider et accompagner.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Avis favorable. Les outils numériques permettent d’améliorer la qualité d’une politique publique donnée et de dépasser le statut juridique des uns et des autres pour travailler ensemble.
Dans le monde de l’insertion, qu’il s’agisse de l’emploi, de la formation, de l’hébergement, des soins ou de la mobilité, plusieurs acteurs ne sont pas stricto sensu des acteurs étatiques ou directement liés à des collectivités territoriales. Il est essentiel de pouvoir s’assurer que l’information circule.
En effet, 60 % des professionnels de l’insertion déclarent passer plus de trente minutes par jour à chercher des informations sur les personnes qu’ils reçoivent, et 20 % plus d’une heure, soit autant de temps d’accompagnement perdu à rechercher des données sur le parcours et les expériences qui ont déjà été fournies. Par ailleurs, il s’agit de procéder à un accompagnement plus humain de ces personnes, en leur évitant de devoir raconter leur vie à chaque étape de leur parcours. L’enjeu est à la fois l’efficacité et la nécessaire fluidité.
M. Raphaël Schellenberger. Je suis dubitatif. En effet, l’amendement va bien au-delà des informations habituellement recueillies par l’État et celles-ci vont circuler au sein d’instances dont la liste est très large : sécurité sociale, collectivités territoriales, EPCI et « tout autre organisme public ou privé » contribuant au parcours d’insertion socioprofessionnelle ou professionnelle. C’est colossal ! Ces dispositions, que vous considérez particulièrement bienvenues, madame la rapporteure, me laissent donc dubitatif précisément parce qu’elles concernent les plus fragiles.
Quant au formulaire prérempli à leur arrivée à l’association chargée de les accompagner en matière d’insertion ou aux agences de Pôle emploi, rien n’implique que l’agent le lira, mais, en tout cas, l’échange sera plus réduit.
M. Sébastien Jumel. Mon groupe aura une discussion pour consolider son opinion sur l’amendement, qui n’est pas neutre. Le sentiment affiché semble généreux et positif. Simplifier les démarches et gagner du temps administratif pour y consacrer de l’humanité semble un objectif louable.
Toutefois, le contexte dans lequel s’inscrit l’amendement est particulier. Nous en débattons en effet le jour où la majorité balaie d’un revers de la main le droit à l’amour pour les bénéficiaires de l’allocation adulte handicapé (AAH).
Mme Catherine Kamowski. Cela s’appelle la déconjugalisation de l’AAH !
M. Sébastien Jumel. Moi, j’appelle cela le droit à l’amour. Nous en débattons le jour où les Marcheurs envisagent de priver les demandeurs d’emploi de leur allocation chômage s’ils ne sont pas en mesure de démontrer qu’ils n’ont pas refusé une offre raisonnable d’emploi ou d’insertion sans motif légitime. Je m’interroge : l’ouverture de leurs données informatiques aux organismes publics et privés de l’emploi n’est-elle pas de nature, non à consolider des droits ou à en ouvrir, ce qui serait un objectif que je partage, mais à en supprimer ?
Par ailleurs, comme l’a démontré le rapport que j’ai rédigé au nom de la commission d’enquête sur l’inclusion des élèves handicapés dans l’école et l’université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005, lorsque les droits sont numérisés, 23 % de nos concitoyens dans le champ du handicap renoncent à les exercer. L’amendement ne règle rien à cet égard.
En raison de ce flou, notre groupe réserve son vote.
La commission adopte les amendements.
Amendement CL1638 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Il s’agit de supprimer l’article 51, qui vise à simplifier certaines procédures de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), notamment en matière de sanctions. Ces dispositions tout à fait opportunes figurent, mieux rédigées, à l’article 19 du projet de loi relatif à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 51 est supprimé.
Après l’article 51
Amendement CL678 de M. Hervé Saulignac.
Mme Marietta Karamanli. Il s’inspire des travaux de la mission d’information sur l’identité numérique. Il s’agit de faire en sorte que les départements puissent adopter un schéma départemental d’inclusion numérique et de lutte contre l’illectronisme.
Nous faisons chaque jour le constat, auprès de nos concitoyens, qu’ils sont nombreux à connaître des difficultés et à se trouver désemparés en matière de démarches administratives numérisées, quels que soient leur âge et le type de quartier ou de commune où ils vivent. Certains départements ont adopté de tels schémas, avec succès. Nous proposons de saisir l’occasion offerte par l’examen du présent projet de loi pour leur donner une valeur législative, afin d’amplifier le nécessaire accompagnement de nombreuses populations sur le terrain.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Tout en partageant l’objectif visé par l’amendement, je ne suis pas certaine qu’il soit opportun de créer une nouvelle obligation à la charge des départements. D’ailleurs, nous avons supprimé l’article 41 bis pour cette raison. Certains départements, notamment le Doubs, les Pyrénées-Atlantiques et le Lot-et-Garonne, ont adopté de tels schémas. Faisons confiance aux collectivités, à leurs élus et à l’intelligence des territoires au lieu de les leur imposer !
Par ailleurs, plusieurs outils sont à leur disposition, notamment les fonds et les crédits dédiés alloués par l’État et les collectivités territoriales, ainsi que les Maisons France services, que nous avons consacrées dans la loi. L’Union européenne y consacre aussi des fonds. Le Pass numérique, qui bénéficie à 400 000 personnes, permet d’accompagner et de former les gens. Citons également les labels « Numérique inclusif » et « Territoire d’action pour un numérique inclusif ». Demande de retrait ou avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame Karamanli, je vous remercie de votre proposition. Je rappelle que les départements sont chargés des schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public (SDAASAP), qui comportent deux volets.
En matière d’accès physique aux services publics, le programme France services, mené par Jacqueline Gourault et l’ANCT, en lien avec les départements, permet d’accompagner les intercommunalités et les territoires. En matière de lutte conte l’illectronisme et d’accompagnement de la médiation numérique, Jacqueline Gourault et Cédric O déploient 4 000 conseillers numériques France services. La plupart d’entre eux seront rattachés aux départements. D’ores et déjà, cinquante-huit structures départementales ont été validées, dans le cadre de contrats de conseil numérique, ce qui a permis de déployer 450 conseillers.
Nous avons intérêt à accompagner les départements pour les outiller et réfléchir avec eux à l’accès au service public, qui fait partie de leurs missions, plutôt que leur fixer une nouvelle obligation, d’autant que certains d’entre eux se saisissent de la question avec de grandes ambitions. Je ne suis pas certaine que l’ajout de quelques mots dans le projet de loi simplifie grand-chose. Demande de retrait ou avis défavorable.
Mme Marietta Karamanli. Je retire l’amendement. Notre groupe le retravaillera, à la lumière des propos de Mme la ministre, en vue de l’examen du texte en séance publique. Nous n’en constatons pas moins que, en dépit des quelques schémas, initiatives et autres services qui existent, un vide demeure. Nous nous proposons de le combler en incitant les départements, qui sont chargés de la solidarité.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 52 non modifié.
Amendement CL1519 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, amendements CL619 et CL620 de M. Paul Molac (discussion commune).
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’article 52 bis, introduit par le Sénat, vise à étendre aux collectivités territoriales la possibilité de réunir leurs conseils par visioconférence. Je soutiens cette disposition, qui s’inscrit dans la continuité de celles que nous avons adoptées pour les EPCI à fiscalité propre dans le cadre de la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique. Je propose de les compléter pour en ouvrir le bénéfice aux assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique, ainsi qu’aux commissions permanentes des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse et de Guyane. Cette extension me semble logique et cohérente.
Il est opportun de confier la définition des modalités pratiques du déroulement des visioconférences aux règlements intérieurs des assemblées considérées. Il s’agit d’un gage de souplesse et de confiance. Au demeurant, elles ont procédé ainsi depuis le début de la crise sanitaire. Les règlements devront garantir l’exigence de neutralité, et plus généralement les exigences requises pour les délibérations locales.
Un fonctionnement comme celui que nous avons expérimenté en commission des lois, selon des formats totalement en visioconférence ou mixte, depuis tout lieu, en tenant compte des éventuelles difficultés de connexion, voilà qui me semble bienvenu ! Les amendements CL619 et CL620, qui ciblent certaines collectivités en particulier, sont satisfaits par le mien.
M. Paul Molac. Il s’agit d’une mesure de bon sens. Nous voterons l’amendement CL1519.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable à l’amendement CL1519, d’autant que M. Molac a oublié de faire figurer la Corse dans ses amendements, à ma grande surprise ! (Sourires.)
M. Raphaël Schellenberger. Je suis déçu que Mme la rapporteure n’ait pas présenté un amendement de suppression de l’article 52 bis, que j’aurais voté.
En fait, nous sommes en train de transformer des règles de gestion de la crise en règles de droit commun applicables au fonctionnement des assemblées locales. Qu’il s’agisse du conseil municipal, départemental, régional ou syndical, ou de l’Assemblée de Corse, les assemblées locales sont des instances délibératives, comme l’Assemblée nationale. La politique s’y vit de façon charnelle, et non en faisant autre chose ou en participant à une autre réunion après avoir coupé la caméra de son ordinateur. Quand on prend des décisions engageant de l’argent public, l’avenir d’un territoire et le quotidien de nos concitoyens, on se déplace physiquement, on se prononce verbalement et on s’implique dans ce qu’on fait, dont on est responsable très concrètement.
J’ai très peur de la numérisation de la délibération. Progressivement, on assistera à un détachement devant l’écran. Les élus diront : « C’est passé en visioconférence, je n’ai pas fait pas attention, ce n’est pas de ma faute ! ». Tout cela, nous le voyons venir.
Le fonctionnement adopté pendant cette période de crise n’est pas satisfaisant. Ce palliatif nous a permis de continuer à fonctionner alors même que l’on ne pouvait pas se déplacer et qu’il fallait réduire les contacts. Mais le propre de la vie politique, c’est de se rencontrer, de débattre, de se contredire et de construire, dans la délibération et parfois dans la confrontation, la décision publique.
Dépenser de l’argent public, ce n’est pas rien. Cela ne se fait pas avec trois clics de souris.
M. Sébastien Jumel. Moi, je crois en l’agora et en la vitalité de la démocratie. Quand on se frotte, quand on se cogne, quand on débat, on s’enrichit mutuellement, et de là naît la démocratie. Raccommoder les liens entre les habitants et la vie politique est une impérieuse nécessité, car ils s’abiment chaque jour un peu plus, à tel point que les ennemis de la République s’engouffrent dans les trous.
Depuis un an et demi, et par la force des choses, nous avons dû expérimenter les réunions numérisées. C’était mieux que rien, comme disait ma grand-mère ! Il reste que la visioconférence est une machine à aseptiser le débat.
Mme Catherine Kamowski. À le réguler !
M. Sébastien Jumel. Ça, c’est pour ceux qui n’aiment pas le débat ! C’est une machine à fabriquer du consensus mou.
Mme Valérie Oppelt. Au contraire !
M. Sébastien Jumel. Vos réactions en sont la preuve : mes propos vous font réagir ! Voilà ce qui fait la démocratie !
Je ne suis pas pour la démocratie des startuppers. Je ne suis pas pour la démocratie virtuelle. Je suis pour la démocratie vivante, physique, au sein de laquelle nous assumons nos responsabilités. Choisir d’assister ou non à une réunion, d’y intervenir ou non, est déjà un geste politique et un signe de démocratie.
Enfin, le vote contraint, en démocratie, peut poser problème – un vote appartient intuitu personæ à celui qui l’émet. La seule façon de s’en prémunir est de veiller à ne pas trop numériser nos réunions, ce à quoi je m’oppose, sauf circonstances exceptionnelles.
M. Sylvain Waserman. Faites confiance aux élus ! Faites confiance aux présidents des exécutifs locaux pour décider s’il est opportun d’utiliser l’outil numérique ! En l’occurrence, il s’agit bien de laisser la possibilité de prendre cette décision à un président d’exécutif local de décider, avec sa majorité, avec le bureau de son assemblée…
M. Sébastien Jumel. Sans son opposition !
M. Sylvain Waserman. La décision à la majorité est la règle en démocratie.
Combien de fois vous ai-je entendu dire qu’il fallait faire confiance aux élus locaux ! Certes, il ne faut pas aseptiser les débats, et ceux-ci impliquent des contacts, mais faisons confiance aux élus locaux – certaines réunions de commissions permanentes sont peut-être moins importantes que d’autres.
La France ne peut rester l’un des rares pays à interdire un tel fonctionnement. Je suis favorable à cet amendement, et je mise sur la confiance dans les exécutifs locaux, qui savent très bien comment faire vivre la démocratie locale.
M. Paul Molac. Sébastien Jumel craint qu’un président de région ou d’EPCI ne se conduise un peu comme un dictateur, et décide seul, pour être tranquille, d’aseptiser le débat en mettant chacun derrière son ordinateur. Cela pourrait poser problème, en effet. Mais je ne vois pas comment assurer la collégialité d’une telle décision. Tous les groupes politiques sont représentés au sein de la Conférence des présidents de notre assemblée. Ce modèle pourrait-il être une cote mal taillée pour un EPCI ? Je pose la question et la livre à votre sagacité, chers collègues.
Mme Catherine Kamowski. L’amendement CL1519 dispose : « Le règlement intérieur fixe les modalités pratiques de déroulement des réunions en plusieurs lieux par visioconférence ». Or le règlement intérieur d’une assemblée locale est voté à l’issue d’une délibération. Il dispose également : « Les votes ne peuvent avoir lieu qu’au scrutin public. En cas d’adoption d’une demande de vote secret, le président reporte le point de l’ordre du jour à une séance ultérieure qui ne peut se tenir par visioconférence ».
Certes, le débat en direct est plus riche. Les variations de gestes et de tons y sont mieux ressenties. Je comprends vos préoccupations, monsieur Jumel, mais il me semble qu’elles sont satisfaites par la rédaction de l’amendement, que les membres de La République en Marche voteront.
M. Sébastien Jumel. Tout d’abord, la Conférence des présidents n’est pas institutionnalisée dans les collectivités locales. Elle n’a donc pas de valeur légale.
Ensuite, le règlement intérieur y est adopté à la majorité des suffrages exprimés, ce qui ne garantit pas les droits de l’opposition. Or notre responsabilité de législateur est de garantir le respect des droits de l’opposition, ce qui, soit dit en passant, est de nature à favoriser une République apaisée.
Par ailleurs, qui, en visioconférence, donne la parole et peut le cas échéant priver quelqu’un de son droit de parole sans que cela ne suscite aucune réaction, dès lors que celui qui n’a pas la parole n’a pas la main sur le micro ? Le président de séance !
Enfin, comment garantir la publicité des débats tenus en visioconférence, hors ceux des commissions permanentes dont seul le relevé de décisions fait l’objet d’un affichage ?
Voilà autant de problèmes, qui s’ajoutent à ceux que j’ai évoqués, et qui ne sont pas résolus.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Comme l’a rappelé Mme Kamowski, le règlement intérieur est voté. J’ajoute que le Conseil d’État a maintes fois rappelé, dans sa jurisprudence, que le droit d’amendement, le droit de prendre la parole et le droit de poser des questions, pour l’opposition, doivent être respectés. Il s’agit de droits souverains.
Par ailleurs, comme l’a rappelé Sylvain Waserman, un président de collectivité locale ne multipliera pas les visioconférences par plaisir. En outre, certains sujets, notamment le budget, ne pourront pas être traités par visioconférence. Les modalités pratiques figureront dans le règlement intérieur.
J’entends les observations et la méfiance qui s’expriment mais les dispositions proposées sont bordées au maximum.
J’ajoute enfin qu’indépendamment de la crise sanitaire, les conseillers régionaux sont demandeurs de ces dispositions. La Creuse est loin de Bordeaux ! De temps à autre, la visioconférence peut rendre service. Par ailleurs, un nombre minimal de réunions en présentiel est prévu.
M. Raphaël Schellenberger. Quatre par an !
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Monsieur Jumel, j’appelle votre attention sur le fait que l’amendement prévoir que les réunions en visioconférence sont diffusées en direct, à l’attention du public, sur le site internet de la collectivité concernée. La publicité des débats est donc assurée.
La commission adopte l’amendement CL1519.
En conséquence, les amendements CL619 et CL620 tombent.
La réunion est suspendue de seize heures trente à seize heures trente-cinq.
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1584, CL1585 et CL1605 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement CL1336 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier.
Amendement CL1520 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Cet amendement vise à articuler les dispositions de l’article 52 bis avec celles du projet de loi portant diverses dispositions de vigilance sanitaire.
M. Raphaël Schellenberger. Je répète que cet article change profondément la nature des institutions locales. Le pouvoir exécutif et le pouvoir délibératif n’y sont pas séparés, et ce dernier peut confier de très importants moyens d’action au chef de l’exécutif, que ce soit le président du conseil régional, du conseil départemental ou le maire.
Avec cet article, on va de surcroît permettre aux instances délibératives – qui ont pour mission de contrôler l’exécutif et de voter le budget – de recourir à la visioconférence, c’est-à-dire de se réunir d’une manière dépersonnalisée. J’entends qu’il faut aseptiser la vie publique, mais l’expression de la volonté populaire prend un tour physique et personnel.
Même si cet article a été introduit par le Sénat en séance publique, je m’oppose à son adoption, car on ne mesure pas complètement les conséquences de ce bouleversement sur le fonctionnement des assemblées délibératives.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je précise, monsieur Schellenberger, que ce dispositif ne concerne pas les mairies.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 52 bis modifié.
La commission adopte l’article 52 ter non modifié.
Après l’article 52 ter
Amendement CL325 de M. Sylvain Waserman.
M. Sylvain Waserman. Trois villes ont une ceinture verte définie par une loi de 1990, qui prévoit que les constructions ne doivent pas y dépasser un seuil maximum fixé en pourcentage. L’un des problèmes rencontrés est que la mesure du pourcentage des constructions déjà effectuées fait défaut. C’est le cas à Strasbourg, où les constructions se poursuivent. Faute de document opposable précisant la surface encore constructible, il est difficile d’attaquer les permis de construire ou de démontrer que la collectivité abuse en bétonnant de manière excessive.
L’amendement prévoit qu’un arrêté précisant la part de la ceinture verte pouvant être encore urbanisée soit publié chaque année, pour pouvoir vérifier si le seuil de 20 % fixé par la loi est respecté. L’amendement charge la ville de Strasbourg de cette tâche, mais on peut néanmoins réfléchir à l’opportunité de la confier à la collectivité compétente en matière de plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI), à savoir l’Eurométropole de Strasbourg.
En tout état de cause, il est important d’avoir une écologie du résultat, c’est-à-dire de disposer d’une mesure sérieuse et transparente des choses et de ne pas s’en tenir aux seules intentions.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. L’amendement est partiellement satisfait. L’état d’occupation des sols de ces zones est déjà publié sous la forme d’arrêtés municipaux annuels. À titre d’illustration, dans un avis du 28 novembre 2019, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) a fait droit à la demande d’un administré d’obtenir la communication des vingt-trois arrêtés municipaux pris en la matière entre 1990 et 2012.
En outre, la rédaction de l’amendement supprime la communication au préfet de cet état d’occupation ; or elle est utile, notamment pour que celui-ci puisse contrôler l’acte.
En revanche, je suis d’accord sur le fait qu’il serait intéressant que cet état d’occupation fasse grief – ce que le juge administratif ne reconnaît pas, comme le montre un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 juillet 2020.
Je vous invite donc à retirer cet amendement pour l’améliorer en vue de la séance. Pour renforcer la transparence, une mise à disposition par mise en ligne pourrait également être prévue. La nouvelle rédaction pourrait aussi indiquer que l’acte fait grief, en précisant que ce document peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir dans les conditions prévues par le code de justice administrative.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. C’est effectivement la métropole qui est compétente, et il faut donc travailler à nouveau cet amendement.
L’amendement est retiré.
Chapitre II
Simplification du fonctionnement des institutions locales
La commission adopte l’article 53 non modifié.
Amendement CL1599 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Cet article étend le droit d’option prévu par l’article 106 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRE), qui permet aux collectivités territoriales d’adopter le cadre budgétaire et comptable des métropoles et collectivités à statut particulier, régi par le référentiel comptable « M57 », à d’autres personnes publiques – dont les services d’incendies et de secours (SDIS), le centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et les centres de gestion de la fonction publique territoriale (CDG).
L’amendement vise à adapter les dispositions du cadre budgétaire des métropoles à ces entités, en conservant les modalités de vote de leur budget ou les exigences en matière d’informations accompagnant leurs décisions budgétaires.
Il apporte également des corrections rédactionnelles.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 53 bis ainsi modifié.
Après l’article 53 bis
Amendement CL931 de M. Jean-René Cazeneuve.
M. Jean-René Cazeneuve. Cet amendement part d’un double constat, largement partagé.
D’une part, chacun sait que les recettes des départements sont caractérisées par une forte volatilité. D’autre part, il faut augmenter la résilience de ces derniers, car la conjoncture économique peut changer rapidement. On l’a vu avec la crise de l’année dernière, qui a été suivie par une augmentation particulièrement forte des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) en 2021. Ceux-ci devraient représenter entre 2 et 3 milliards d’euros de recettes supplémentaires pour l’ensemble des départements.
L’idéal aurait été de mettre en place un fonds de garantie global, mais le temps a manqué pour y parvenir. Aussi cet amendement de repli consiste-t-il à répondre à une demande de l’Assemblée des départements de France en créant un fonds de réserve, alimenté par les excédents de recettes. La création de cette nouvelle imputation comptable permet de sécuriser l’opération, afin que les départements puissent utiliser cette réserve en cas de retournement de conjoncture.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2022, le Gouvernement a annoncé qu’il ferait droit à votre demande et instituerait dès 2022 un mécanisme de provisionnement individuel des DMTO. Cette modification ne relève pas de la loi : elle suppose la modification du cadre budgétaire.
D’après les informations dont je dispose, les instructions budgétaire et comptable « M52 » et « M57 » d’un département ou d’une collectivité territoriale unique seront modifiées en ce sens et présentées au Conseil national d’évaluation des normes le 9 décembre prochain. Elles institueront les comptes correspondants, qui seront utilisables à compter du 1er janvier 2022. Votre demande sera donc bientôt satisfaite.
Demande de retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur Cazeneuve, vous avez eu raison de souligner qu’il s’agit de répondre à une demande de l’Assemblée des départements de France, à l’initiative notamment de son vice-président délégué aux finances, M. Jean-Léonce Dupont.
L’amendement est retiré.
Amendements CL144, CL149, CL150, CL151, CL152, CL153 et CL154 de M. Christophe Blanchet.
M. Christophe Blanchet. L’amendement CL144 a été inspiré par Jean-Léonce Dupont, président du conseil départemental du Calvados. Il s’agit de permettre aux départements d’atteindre une autonomie financière en procédant à une mise en réserve budgétaire de l’excédent des DMTO. Ces derniers constituent la deuxième ressource des départements et ils sont très volatils d’une année à l’autre – cette année, ils seront très élevés.
La mise en réserve serait possible après délibération du conseil départemental, avec une obligation de rendre compte annuellement des dotations ainsi mises en réserve.
Modifier la réglementation comptable permettra la constitution de réserves issues des DMTO lorsque le marché de l’immobilier est dynamique, afin de continuer à investir lorsque les recettes s’effondrent.
Les autres amendements, de repli, prévoient des barèmes décroissants pour le montant de ces mises en réserve.
Je prends note de l’engagement ferme de procéder rapidement aux modifications nécessaires du cadre comptable, mais nous serons vigilants.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Demande de retrait, pour les mêmes raisons que celles évoquées lors de la discussion de l’amendement précédent.
Les amendements sont retirés.
Amendements de suppression CL1593 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, et CL1143 de M. Sébastien Jumel.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Les dispositions de cet article sont satisfaites par des avancées récentes de la législation.
En effet, le Parlement a adopté la loi du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances. Son l’article 48 ouvre la possibilité aux collectivités et à leurs groupements de confier à un organisme public ou privé l’encaissement de tout revenu tiré d’un projet de financement participatif.
Je vous propose donc de supprimer l’article 53 ter.
M. Pierre Dharréville. Mme la rapporteure considère que cet article est satisfait ; pour nous, il n’est pas satisfaisant.
Le service public repose sur le financement par l’impôt, avec une fonction de redistribution des richesses. C’est la condition de l’égalité de traitement de tous les citoyens. Nous sommes opposés au financement participatif des services publics, car cela peut à terme être un moyen pour l’État, voire pour les collectivités, de se dédouaner de leurs responsabilités. L’impôt doit demeurer le mode de financement des collectivités.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 53 ter est supprimé.
Amendement CL588 de M. Antoine Savignat et sous-amendement CL1667 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure, amendement CL1390 de M. Jean-René Cazeneuve (discussion commune).
M. Raphaël Schellenberger. L’amendement CL588 propose d’étendre les possibilités de délégation à un organisme public ou privé, d’une part, de l’encaissement des recettes des services de transports mis en œuvre par les autorités organisatrices de la mobilité et, d’autre part, du paiement des dépenses de remboursement des usagers de ces services.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Avis favorable à l’amendement CL588, que je propose de compléter par un sous-amendement qui fait explicitement référence aux régions en tant qu’autorités organisatrices de la mobilité. Le sous-amendement intègre, en outre, les services de stationnement et les services numériques d’information et de billettique multimodales, qui permettent la vente de services de mobilité, de stationnement ou de services fournis par une centrale de réservation.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable à l’amendement CL588 sous-amendé ; tout cela est un peu technique, mais utile.
La commission adopte successivement le sous-amendement CL1667 et l’amendement CL588 sous-amendé.
En conséquence, l’amendement CL1390 tombe.
La commission adopte l’article 53 quater modifié.
Après l’article 53 quater
Amendement CL701 de M. Jean-Félix Acquaviva.
M. Jean-Félix Acquaviva. À la différence d’autres collectivités, et en particulier des départements, les régions ne disposent souvent que d’un nombre limité de biens immobiliers. Ainsi, les présidents de conseil régional dont la résidence personnelle se situe en dehors de l’agglomération comprenant la commune chef-lieu de la région peuvent parfois se retrouver dans la situation de ne pouvoir bénéficier d’un logement dans un immeuble propriété de la collectivité. Cette réalité est d’autant plus pénalisante avec des régions qui sont aujourd’hui de grande taille.
Certes, le CGCT prévoit dans cette hypothèse la possibilité d’une indemnité de séjour. Mais l’article L. 4135-19-2 de ce code est imprécis quant aux modalités d’attribution. Il fait référence au plafond des indemnités journalières mais ne précise pas explicitement que l’indemnité de séjour peut servir à prendre en charge un loyer. Aussi le présent amendement apporte-t-il cette clarification, tout en maintenant la règle du plafond des indemnités journalières applicable par ailleurs à l’ensemble des fonctionnaires d’État.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Le CGCT prévoit que le président du conseil régional peut bénéficier d’un logement de fonction, lorsque le domaine de la région comprend un tel logement. Il faudrait un état précis du nombre de présidents de conseil régional qui n’en disposent pas.
Le conseil régional peut également décider de prendre en charge des frais engagés pour être présent au chef-lieu de la région pour assurer la gestion des affaires de la région. Cela permet de proportionner la dépense au nombre de nuitées passées dans le chef-lieu pour assurer la gestion des affaires.
Ces possibilités de prise en charge me paraissent équilibrées.
Demande de retrait, sinon avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis défavorable. L’amendement introduirait une indemnité forfaitaire basée sur une période de trente jours, ce qui est totalement en contradiction avec les modalités d’indemnisation de droit commun qui, en l’espèce, n’autorisent le versement d’une indemnité qu’au titre des seuls frais engagés pour être présent au chef-lieu de la région pour assurer la gestion des affaires de celle-ci. Ce sujet a été longuement débattu au Sénat, sans que ce dernier adopte le dispositif proposé par cet amendement.
La commission rejette l’amendement.
La commission adopte l’article 53 quinquies non modifié.
La commission adopte l’article 54 non modifié.
Amendement CL1159 de M. Paul Molac.
M. Jean-Félix Acquaviva. Cet amendement prévoit l’organisation d’un débat au sein de la conférence des maires ou, à défaut, du bureau communautaire, préalablement à la décision des maires de faire obstacle au transfert des pouvoirs de police spéciale.
L’objectif est que ce choix soit préparé en toute connaissance de cause grâce à une discussion entre les élus. Ce débat porterait, d’une part, sur l’opportunité du transfert des attributions de police au président de l’intercommunalité, pour la durée de son mandat, compte tenu de la nature des pouvoirs de police concernés et du lien avec les compétences exercées par l’intercommunalité. D’autre part, le débat aborderait les modalités d’exercice de ces pouvoirs de police administrative spéciale par les maires ou le président d’intercommunalité, selon les choix qui seront faits, en cohérence avec l’exercice de ses compétences par l’intercommunalité.
L’amendement ne remet pas en cause les choix effectués à la suite des élections de 2020 : ce débat a vocation à s’appliquer à partir des prochaines élections des présidents d’intercommunalité.
Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure. Le sujet des polices spéciales est en effet important, mais je ne pense pas que votre proposition soit opportune.
La conférence des maires n’a pas d’ordre du jour obligatoire ; c’est une latitude bienvenue. Il est d’ores et déjà possible d’y discuter de tous les sujets. L’amendement est donc satisfait sur ce point. Rendre ce débat préalable obligatoire me semble d’autant plus inopportun que cela présente une difficulté juridique : un maire qui n’aurait pas pu y participer pourrait voir le transfert de son pouvoir de police spéciale annulé, alors même qu’il y était favorable.
Demande de retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’amendement est satisfait. L’article L. 5211-9-2 du CGCT prévoit les modalités selon lesquelles les maires et le président de l’EPCI à fiscalité propre peuvent s’opposer ou renoncer au transfert automatique des pouvoirs de police spéciale. La décision d’opposition au transfert appartient au maire et, bien entendu, il peut la faire valoir à tout moment lors de la discussion sur ce transfert.
Demande de retrait.
M. Sébastien Jumel. Je soutiens cet amendement. On ne peut pas multiplier les déclarations d’amour aux maires sans que les actes suivent. Le pouvoir de police du maire est une fonction régalienne à laquelle il faut veiller comme à la prunelle de nos yeux. On ne peut pas faire comme s’il n’y avait pas de problèmes de gouvernance dans des intercommunalités construites comme des mastodontes et de manière désincarnée.
Certes, le CGCT prévoit qu’un maire peut notifier par écrit son opposition au transfert des pouvoirs de police spéciale, mais nombreux sont les maires de petites communes qui n’ont pas une connaissance fine de ce code. Si la question n’a pas fait l’objet d’un débat formel au sein de la conférence des maires de l’intercommunalité, ils peuvent se faire rouler dans la farine et voir leurs pouvoirs de fait transférés.
M. Jean-Félix Acquaviva. Il ne s’agit pas de se substituer à la décision individuelle des maires, mais d’éclairer leur choix par un débat. Certains d’entre eux ont pu avoir des regrets au sujet de ces transferts automatiques, une fois expiré le délai de six mois au cours duquel il est possible de s’y opposer. Passé ce délai, on ne peut plus revenir sur le transfert de pouvoirs de police spéciale pendant toute la durée du mandat.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement de correction CL1606 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure.
La commission adopte l’article 55 ainsi modifié.
La commission adopte l’article 55 bis non modifié.
La commission adopte l’article 56 non modifié.
M. Sébastien Jumel. Je souhaitais prendre la parole sur l’article.
Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il n’y a pas d’amendement à l’article. Dans ce cas l’usage est de passer directement au vote, sans possibilité de s’inscrire sur l’article. Cela ne se fait qu’en séance.
M. Sébastien Jumel. Avec tout le respect que je vous dois, je ne comprends pas l’accélération subite de la discussion.
L’article 56 porte sur le sujet important du fonctionnement de la métropole Aix-Marseille-Provence, et il n’y a pas de débat. Or on apprend que le Gouvernement va rencontrer les élus concernés et présenter, le cas échéant, un amendement en séance. Et l’on ne dispose d’aucune indication du Gouvernement pour savoir à quelle sauce cette métropole va être mangée !
Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Lorsque nous examinons un texte, toutes les questions peuvent être posées lors de l’audition des ministres concernés et de la discussion générale. Ensuite, la commission examine les amendements et chaque député peut intervenir à cette occasion. Mais s’il n’y a pas d’amendement, nous passons directement au vote de l’article. C’est ainsi que nous procédons depuis le début de la législature.
M. Sébastien Jumel. Avec quelques minutes de temps de parole lors de la discussion générale, il n’est pas possible d’