N° 280

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÉME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 septembre 2022.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à lutter contre les plastiques dangereux pour l’environnement et la santé (n° 205).

 

 

PAR M. Jimmy PAHUN

Député

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Voir le numéro :

 Assemblée nationale :  205.

   


  SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 1er (article L. 541-15-10 du code de l’environnement) Interdiction des emballages en plastique non recyclables

Article 2 (article L. 541-15-10 du code de l’environnement) Interdiction de produits constitués de composés perfluorés

Article 3 (article L. 541-9-1 du code de l’environnement) Information sur les produits à usage unique contenant une part de plastique

Article 4 (articles L. 415-1, L. 541-15-10-1 [nouveau] et L. 541-44 du code de l’environnement) Limitation de la détention d’objets en plastique à usage unique dans les espaces protégés

Article 5 (nouveau) Rapport sur les mesures d’accompagnement des acteurs publics et privés dans leurs efforts de réduction de l’usage du plastique

Examen en commission

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

contribution Écrite reçue


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   INTRODUCTION

La pollution plastique est un fléau. Un fléau qui nous est familier, que nous croyons cerner dans son intégralité, dans toute sa gravité. En réalité, nous commençons à peine à comprendre toute l’étendue des dangers générés par notre surconsommation de plastique. À mesure que la science progresse, ces dangers se précisent et nous en découvrons de nouveaux, tant pour l’environnement – la biodiversité et le climat – que pour notre santé.

Certes, nous ne sommes pas les premiers responsables de cette pollution, de ces 11 millions de tonnes de plastiques déversées chaque année dans l’océan. Certes, nous avons un cadre réglementaire déjà robuste avec la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (dite « AGEC ») et la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Mais il nous reste tant à faire en France, en Europe et dans le monde pour espérer, d’abord, maîtriser la pollution plastique, et peut-être un jour, qui sait, la stopper complètement. Il nous faut donc, en France, être exemplaire et souhaiter cette même ambition pour l’Europe.

Il est, par exemple, important d’acter, en France et en Europe, la fin du recyclage comme première solution à la pollution plastique. Un récent rapport de la Cour des comptes pointe d’ailleurs notre incapacité à tenir nos objectifs de collecte, de tri et de recyclage depuis plus de dix ans maintenant ([1]). Cela a pour conséquence aussi l’exportation des déchets que nous ne sommes pas en mesure d’absorber, comme le montre un rapport de Human Rights Watch de septembre 2022 ([2]) qui met en lumière le fait qu’« En Turquie, nouvelle poubelle de l’Europe, le recyclage du plastique nuit gravement à la santé et à l’environnement » ([3]).

Nous devons donc recentrer le recyclage sur les quelques plastiques pour lesquels les filières sont d’ores et déjà efficaces, et pour le reste mettre l’accent sans attendre sur la réduction à la source. C’est la philosophie de la loi AGEC, que cette proposition de loi s’autorise, modestement, à faire vivre.

Diminuer à la source les plastiques à usage unique et ce, de manière drastique, contribuerait également à réduire notre consommation d’énergies fossiles et donc à atteindre nos objectifs climatiques et de sobriété énergétique. Selon un rapport publié en septembre 2022 par des ONG, la production de plastique représente 8 % de la consommation finale de pétrole au niveau européen ([4]). La production de plastique, industrie la plus consommatrice d’électricité ([5]), va plus que doubler d’ici à 2040 au niveau mondial ([6]).

La solution à la pollution plastique n’est donc pas de construire de nouvelles infrastructures et de nouveaux procédés plus énergivores que les précédents mais bien d’agir pour une réduction à la source.

C’est là une très forte demande de nos concitoyens. Selon un récent sondage Ipsos, 80 % des Français veulent réduire leur utilisation de plastiques à usage unique. Ils sont 75 % à vouloir la fin des plastiques à usage unique ([7]). À combien ce pourcentage monte-t-il chez les plus jeunes ? Je n’ai pas le chiffre mais je vois leur extrême préoccupation devant l’immensité de cette pollution, et j’y vois chez beaucoup le moteur d’un engagement associatif et civique puissant.

La présente proposition de loi contenait initialement quatre articles dont le premier prévoyait l’interdiction du polystyrène sans condition de recyclage. En commission, il a été décidé de remplacer l’article 1er par une disposition visant à interdire les plastiques non recyclables en 2025. La rédaction de l’article 2 relatif à l’interdiction de produits constitués pour tout ou partie de composés perfluorés, a été modifiée pour élargir le champ d’application de la mesure et la coordonner avec le calendrier européen. Le champ d’application de l’article 3 a été revu pour mieux cibler les produits devant faire l’objet d’un marquage sur la présence de plastique. Enfin, l’article 4 a également été réécrit pour confier aux gestionnaires d’espaces protégés le pouvoir d’interdire des produits en plastique à usage unique dans tout ou partie de ces espaces. Un cinquième article a été ajouté pour demander un rapport au Gouvernement sur l’accompagnement des acteurs publics et privés dans leurs efforts de réduction de l’usage du plastique.

 


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   COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 1er
(article L. 541-15-10 du code de l’environnement)
Interdiction des emballages en plastique non recyclables

Adopté par la commission avec modifications

L’article 1er de la proposition de loi initiale visait à interdire, à compter du 1er janvier 2025, les emballages en plastique constitués pour tout ou partie de polystyrène. La commission a réécrit cet article pour interdire l’ensemble des emballages en plastique non recyclables, à compter du 1er janvier 2025.

I.   Le polystyrÈne, un plastique dangereux et trÈs mal recyclé POUR LEQUEL DES ALTERNATIVES EXISTENT

1.   Un plastique dangereux pour l’homme et pour l’environnement

Le styrène, monomère utilisé dans la fabrication du polystyrène, est considéré par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme un cancérogène possible pour l’humain depuis 2002. En 2019, l’OMS a réévalué cette position en plaçant le styrène comme probablement cancérogène pour l’homme, confirmant ainsi une étude du Centre international de recherche sur le cancer de mars 2018 ([8]). Le styrène possède également des propriétés neurotoxiques qui ont amené l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) à préconiser un abaissement des valeurs limites d’exposition pour les salariés exposés ([9]).

Particulièrement toxique, le polystyrène peut migrer et contaminer l’homme, comme le montrent plusieurs études scientifiques. Par exemple, une étude menée au sein de l’université de Bretagne sud dans le cadre du projet européen OceanWise visant à développer des mesures à long terme pour réduire l’usage du polystyrène ([10]). Cette étude, réalisée en France sur du poulet contenu dans des plateaux en polystyrène expansé issus de quatre marques différentes, conclut que des microparticules de polystyrène sont présentes sur la surface et dans l’emballage ainsi que sur la viande. Les microplastiques de polystyrène adhèrent donc à la surface de la viande et sont de ce fait très probablement ingérés par les consommateurs.

Le polystyrène menace également les milieux naturels et notamment les écosystèmes marins. Troisième plastique le plus représenté dans les prélèvements effectués en mer et en eau douce, il est surreprésenté dans le milieu naturel par rapport à sa production, selon la fondation Tara Océan auditionnée par le rapporteur. À titre d’exemple, des études démontrent l’impact du polystyrène sur le plancton, organisme à la base de la chaîne alimentaire et fondamental pour la captation du carbone ([11]).

2.   Un plastique très mal recyclé

Le polystyrène constitue l’un des principaux gisements d’emballages plastiques ménagers en France, en particulier pour les produits frais. À titre d’exemple, selon le rapport intitulé « Quel potentiel 3R d’ici 2025 ? (Réduction, Réemploi, Recyclage) pour les emballages en plastique », publié en novembre 2020 par le ministère de la transition écologique ([12]), il représente environ 70 % des emballages plastiques utilisés par l’industrie des produits laitiers en France, soit environ 100 000 tonnes par an.

Or, son recyclage, du fait du manque d’infrastructures dédiées, demeure à ce jour très faible. Le recyclage mécanique des plastiques styréniques reste un échec, la plupart des pilotes engagés il y a une dizaine d’années en France ayant été abandonnés. Demeurent, en Espagne et en Allemagne, deux unités industrielles faisant du downcycling, c’est-à-dire de la valorisation du matériau en produits bon marchés et jetables (pots de plantes plastiques et cintres à usage unique). L’intérêt d’un recyclage chimique du polystyrène ne semble pas non plus attesté, près de quinze ans après les premières annonces de travaux sur sa recyclabilité ([13]). Comme indiqué par l’Agence de la transition écologique (Ademe) lors de son audition par le rapporteur, le recyclage chimique a un bilan environnemental moins bon que le recyclage mécanique. La Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec) a également indiqué au rapporteur que le coût financier du recyclage chimique serait trois fois plus élevé que celui du recyclage mécanique. Enfin, chaque plastique nécessite sa propre filière de recyclage dont l’équilibre économique est conditionné à un flux minimum. Aussi, pour être rentable, la création d’une filière de recyclage spécifique rendrait indispensable l’augmentation de la production de déchets en polystyrène, ce qui va à l’encontre des objectifs de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite « loi AGEC », en matière de réduction du recours au plastique. La mise en place de cette filière nécessite également la création d’unités de « sur-tri » opérées directement par Citeo pour assurer la qualité des déchets à recycler : nouvelle organisation du tri que l’association Amorce juge contraire à la libre administration des collectivités territoriales et non sans risque pour leurs finances.

Lors de l’examen de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi climat et résilience », les industriels favorables au polystyrène, regroupés au sein du Consortium PS25, se sont engagés solennellement à apporter, avant la fin de l’année 2021, les preuves de la viabilité technique et financière d’une filière de recyclage chimique pour 2025, et à défaut d’établir une trajectoire de sortie progressive du matériau. Ce Consortium a effectivement produit un rapport en décembre 2021, sur la base duquel il a jugé son engagement rempli. Les membres du Consortium interrogés n’ont pas souhaité transmettre ce document au rapporteur. Questionnés lors des auditions, les services de l’État n’ont pas souhaité formuler d’observations sur ce rapport. L’Ademe, de son côté, n’entrevoit pas de filière opérationnelle d’ici le 1er janvier 2025.

3.   Un plastique pouvant être remplacé par des alternatives existantes

Plusieurs grands groupes de l’agroalimentaire se sont engagés à ne plus recourir au polystyrène. Nestlé s’est ainsi engagé à ne plus y recourir dès 2022 et Danone à horizon 2025. Plus largement, des engagements collectifs ont été pris aux États-Unis et au Royaume-Uni dans le cadre des « pactes emballages » pour se séparer de ce matériau jugé problématique. D’après la fondation Ellen Macarthur, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont fait le choix d’interdire le polystyrène, de même que de nombreux acteurs économiques dans le cadre du Consumer goods forum ou du Global commitment.

Des alternatives au polystyrène sont, en effet, immédiatement disponibles. Danone, par exemple, a récemment changé l’emballage de l’une de ses gammes de yaourts pour du PET (polytéréphtalate d’éthylène). Un plastique qui n’est pas identifié comme problématique pour la santé et dont le recyclage mécanique est parfaitement maîtrisé. Le choix des industriels pourrait être également celui d’anticiper l’objectif zéro plastique en 2040 fixé par la loi AGEC, en investissant dès maintenant dans des solutions de vrac et de réemploi.

En tout état de cause, les acteurs économiques – en particulier les petites et moyennes entreprises – devront être accompagnés par la puissance publique dans la réalisation de ces nécessaires transitions.

II.   L’état du droit

1.   Les objectifs de réduction du plastique

La loi AGEC du 10 février 2020 précitée constitue une avancée indéniable en matière de lutte contre la pollution plastique en prévoyant que la France se donne pour objectif d’atteindre la fin de la mise sur le marché d’emballages en plastique à usage unique d’ici à 2040.

Afin d’atteindre cet objectif, l’article L. 541-10-17 du code de l’environnement, créé par l’article 7 de la loi AGEC, rend obligatoire l’élaboration de stratégies quinquennales de réduction et de recyclage des plastiques à usage unique. Ces stratégies fixent un objectif de réduction, un objectif de réutilisation et de réemploi, ainsi qu’un objectif de recyclage, par voie de décret, d’abord pour la période 2021-2025, puis pour chaque période consécutive de cinq ans. Les stratégies nationales sont élaborées et révisées en concertation avec les filières industrielles concernées, les collectivités territoriales et les associations de consommateurs et de protection de l’environnement.

Le décret n° 2021-517 du 29 avril 2021 relatif aux objectifs de réduction, de réutilisation et de réemploi, et de recyclage des emballages en plastique à usage unique pour la période 2021-2025 est venu préciser ces dispositions. Il instaure notamment :

– un objectif de 20 % de réduction des emballages en plastique à usage unique d’ici fin 2025, dont au minimum la moitié obtenue par recours au réemploi et à la réutilisation ;

– un objectif de tendre d’ici fin 2025 vers une réduction de 100 % des emballages en plastique à usage unique « inutiles », définis comme ceux n’ayant pas de fonction technique essentielle comme une fonction de protection, sanitaire et d’intégrité des produits, de transport, ou de support d’information réglementaire ;

– un objectif de tendre vers le recyclage de 100 % des emballages en plastique à usage unique mis sur le marché, en veillant à ce qu’ils ne perturbent pas les chaînes de tri ou de recyclage et qu’ils ne comportent pas de substances ou d’éléments susceptibles de limiter l’utilisation du matériau recyclé.

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », renforce la trajectoire définie dans la loi AGEC, grâce notamment au développement de la vente en vrac. L’article 23 de la loi prévoit ainsi qu’au 1er janvier 2030, les commerces de vente au détail dont la surface est supérieure ou égale à 400 mètres carrés devront consacrer au moins 20 % de leur surface de vente à la vente de produits présentés sans emballage primaire, y compris la vente en vrac.

2.   Les interdictions du plastique

Initiée par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l’interdiction de la mise à disposition d’un certain nombre de produits en plastique à usage unique a été renforcée par la loi AGEC. Ces dispositions, aujourd’hui codifiées à l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement, sont entrées en vigueur de manière progressive.

La loi du 17 août 2015 précitée a tout d’abord interdit la production, la distribution, la vente, la mise à disposition et l’utilisation d’emballages ou de sacs fabriqués, en tout ou partie, à partir de plastique oxo-fragmentable. Cette disposition a été étendue par la loi AGEC, qui interdit, à compter du 1er janvier 2021, la mise sur le marché de l’ensemble des produits fabriqués à base de plastique oxodégradable. Cette interdiction générale se justifie par le fait que ce type de plastique renferme des additifs qui, sous l’effet de l’oxydation, conduisent à la fragmentation de la matière plastique en micro-fragments. Ces micro-particules persistent dans l’environnement et, entraînées par les eaux fluviales, se retrouvent dans les mers et les océans.

À part cette interdiction générale du plastique oxodégradable, les interdictions qui touchent le plastique visent plutôt une liste de produits, quel que soit le type de plastique utilisé pour les produire.

Ainsi, l’interdiction de mise à disposition de produits en plastique à usage unique, qui s’applique depuis 2016 aux sacs de caisse, a été étendue en 2017 à tous les sacs d’emballage aux points de vente, à l’exception des sacs compostables biosourcés. Cette interdiction concerne de nouveaux produits depuis le 1er janvier 2020, notamment les gobelets et les verres ainsi que les assiettes jetables de cuisine pour la table. Depuis le 1er janvier 2021, la même interdiction s’applique aux pailles, à l’exception de celles destinées à être utilisées à des fins médicales, aux confettis en plastique, aux piques à steak, aux couvercles à verre jetables, etc. La vente au détail de fruits et légumes frais sous conditionnement plastique en dessous de 1,5 kg ([14]), ou encore la mise sur le marché de sachets de thé et de tisane en plastique non biodégradable, sont interdites depuis le 1er janvier 2022. D’autres interdictions doivent entrer en vigueur le 1er janvier 2025. À cette date, il sera mis fin à ̀ l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en plastique dans les services de restauration collective des établissements scolaires et universitaires ainsi que dans les établissements d’accueil des enfants de moins de six ans.

Enfin, l’article 23 de la loi « climat et résilience » complète l’article L. 541‑15-10 précité pour prévoir qu’« à compter du 1er janvier 2025, les emballages constitués pour tout ou partie de polymères ou de copolymères styréniques, non recyclables et dans l’incapacité d’intégrer une filière de recyclage, sont interdits ».

III.   LE dispositif de la proposition de loi

L’article 1er de la proposition de loi initiale vise à interdire les emballages constitués pour tout ou partie de polystyrène, à compter du 1er janvier 2025.

La loi « climat et résilience » a interdit ces emballages en polystyrène à compter de 2025, mais en limitant cette interdiction aux emballages « non recyclables et dans l’incapacité d’intégrer une filière de recyclage », à la suite de l’adoption d’un amendement d’origine sénatoriale.

L’article 1er propose de revenir à la disposition telle qu’adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture de la loi « climat et résilience », avant que le Sénat ne limite sa portée et que la commission mixte paritaire maintienne la disposition dans sa version amoindrie par le Sénat.

À cette fin, l’article 1er de la proposition de loi modifie l’avant-dernier alinéa du III de l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement pour supprimer la condition de recyclabilité.

Cette interdiction plus large des emballages en polystyrène est motivée par la forte toxicité du polystyrène pour l’homme comme pour l’environnement.

IV.   Les travaux de la commission

À l’initiative de Mme Claire Pitollat et des membres du groupe Renaissance, la commission a adopté un amendement CD15 de rédaction globale de l’article 1er, avec l’avis favorable du rapporteur.

Cet amendement étend la portée de l’interdiction des emballages en plastique non recyclables par rapport au droit en vigueur. Il réécrit ainsi l’avant‑dernier alinéa du III de l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement, introduit par la loi « climat et résilience », afin d’interdire à compter du 1er janvier 2025 l’ensemble des emballages en plastique non recyclables, et non plus uniquement ceux en polystyrène non recyclables.

Un décret doit préciser les critères permettant de considérer que ces emballages peuvent intégrer une filière de recyclage, notamment leur capacité à être collectés, triés et utilisés pour la production de nouveaux produits. Il prévoit également des exemptions pour des motifs de sécurité ou de risques sanitaires.

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Article 2
(article L. 541-15-10 du code de l’environnement)
Interdiction de produits constitués de composés perfluorés

Adopté par la commission avec modifications

L’article 2 vise à interdire, à compter du 1er janvier 2025, différents produits constitués pour tout ou partie de composés perfluorés.

I.   Les composés perfluorés, des produits toxiques omniprésents dans l’environnement

Les composés perfluorés, également connus sous le nom de per- et polyfluoroalkylées (PFAS) sont des substances chimiques synthétiques antiadhésives, imperméabilisantes et résistantes aux fortes chaleurs, utilisées depuis les années 1950 dans un grand nombre de produits industriels et de biens de consommation courants (textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, revêtements antiadhésifs, cosmétiques, produits phytosanitaires, etc.). Les deux types de PFAS les plus connus sont l’acide perfluorooctanoïque (PFOA) et le sulfonate de perfluorooctane (PFOS), ces derniers étant les plus persistants dans l’environnement.

L’utilisation variée de ces composés chimiques, combinée à leur caractère très persistant, est à l’origine d’une contamination de tous les milieux naturels, qu’il s’agisse de l’eau, de l’air, des sols ou encore des sédiments. Certaines de ces substances s’accumulent dans les organismes vivants et se retrouvent dans la chaîne alimentaire. D’autres, plus mobiles, sont transportées sur de très longues distances par l’eau ou l’air et peuvent se retrouver jusque dans les océans Arctique et Antarctique ([15]).

Présentes dans l’environnement, ces substances se retrouvent également chez l’homme. Une étude de Santé publique France, menée entre 2014 et 2016 et dont les résultats ont été publiés en 2019, a permis de mesurer les niveaux d’imprégnation par les composés perfluorés dans la population française continentale, âgée de 6 à 74 ans. Malgré les restrictions d’usage de certains perfluorés, les résultats montrent que la population est exposée à un ou plusieurs de ces composés, en particulier le PFOA et le PFOS, leur présence ayant été retrouvée chez tous les participants, aussi bien les enfants que les adultes ([16]).

Or, la toxicité des PFAS pour l’homme a été démontrée par de nombreuses études. Comme le note l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, ces composés chimiques provoquent une augmentation du taux de cholestérol, peuvent entraîner des cancers, réduire la fertilité et nuire au développement du fœtus. Ils sont également suspectés d’interférer avec les systèmes endocrinien et immunitaire. Cet effet des PFAS sur le système immunitaire a récemment été mis en exergue par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) qui considère que la diminution de la réponse du système immunitaire à la vaccination constitue l’effet le plus critique pour la santé humaine.

II.   L’état du droit

1.   La réglementation internationale

La Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, adoptée en mai 2001 et entrée en vigueur en mai 2004, réglemente plusieurs composés de la famille des PFAS au niveau mondial.

L’utilisation du PFOS est restreinte depuis 2009 et le PFOA est interdit depuis 2020. Par ailleurs, la famille de l’acide perfluorohexane sulfonique (PFHxS), ses sels et composés apparentés sont envisagés pour une inclusion prochaine dans ladite Convention.

2.   La réglementation européenne

Le règlement (UE) 2019/1021 du 20 juin 2019 concernant les polluants organiques persistants interdit le PFOA, à la suite de l’adoption d’un règlement délégué le 8 avril 2020 ([17]) modifiant l’annexe I dudit règlement. Toutefois, cette interdiction s’accompagne de nombreuses dérogations. Ainsi, la fabrication, la mise sur le marché et l’utilisation du PFOA, de ses sels et des composés apparentés sont autorisées, entre autres, jusqu’en juillet 2025 pour les procédés de photolithographie ou de gravure dans la fabrication de semi-conducteurs, pour les dispositifs médicaux invasifs et implantables ou encore pour la mousse anti-incendie. Ils sont également autorisés pour les textiles hydrofuges ou oléofuges pour les vêtements de protection des travailleurs jusqu’en juillet 2023.

Une réglementation plus stricte des PFAS pourrait néanmoins être adoptée dans le cadre de la stratégie de l’Union européenne pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques, approuvée par le Conseil en mars 2021. Cette stratégie « vise à parvenir à un environnement exempt de substances toxiques avec un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement, tout en renforçant la compétitivité de l’industrie chimique de l’Union européenne » ([18]). Dans ses conclusions, le Conseil demande à la Commission de mettre en œuvre les mesures prévues dans la stratégie, notamment en rationalisant la législation de l’Union européenne relative aux produits chimiques, en remplaçant et en réduisant au minimum les substances préoccupantes et en éliminant progressivement les produits chimiques les plus nocifs. La stratégie vise spécifiquement à interdire les substances chimiques les plus toxiques présentes dans des produits de consommation comme les cosmétiques, les jouets, les détergents, les articles de puériculture, les meubles, les textiles ou les matériaux entrant en contact avec des denrées alimentaires, à moins qu’elles ne soient jugées essentielles pour la santé, la sécurité ou le fonctionnement de la société, ou qu’il n’existe pas de solution de remplacement.

Dans ce cadre, la Commission européenne a publié, lundi 25 avril 2022, une feuille de route pour restreindre l’usage des produits chimiques les plus dangereux. La Commission vise plusieurs familles de produits reconnus pour provoquer cancers ou troubles hormonaux, parmi lesquels figurent les PFAS, aux côtés notamment des retardateurs de flamme bromés, des bisphénols ou des phtalates.

La révision du règlement européen n° 1907/2006 Reach ([19]), qui fixe les règles régissant l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et la restriction des substances chimiques au sein de l’Union européenne, doit tenir compte de la stratégie du Conseil et de la feuille de route de la Commission.

À cet égard, l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) a présenté, le 23 février 2022, une proposition de restriction au titre du règlement Reach pour tous les PFAS contenus dans les mousses anti-incendie. En parallèle, cinq pays européens (Pays-Bas, Allemagne, Danemark, Suède et Norvège) proposent d’aller plus loin et ont annoncé leur intention de restreindre la fabrication, la mise sur le marché et l’utilisation des PFAS au travers du règlement Reach.

Jugeant la réglementation actuelle applicable aux PFAS insuffisante pour prévenir les risques sanitaires et environnementaux qu’ils engendrent, des États ont déjà interdit certaines utilisations des PFAS. Devançant ainsi l’évolution de la réglementation européenne, le Danemark a interdit l’usage des PFAS dans les emballages alimentaires depuis juillet 2020. L’État du Maine aux États-Unis a quant à lui promulgué une loi le 16 juillet 2021 qui interdit, dès 2030, toute utilisation de polyfluoroalkylées.

III.   Le dispositif de la proposition de loi

L’article 2 de la proposition de loi complète le III de l’article L. 541‑15‑10 du code de l’environnement, relatif à l’interdiction de divers produits en plastique, par un nouvel alinéa interdisant les emballages et contenants alimentaires constitués pour tout ou partie de composés perfluorés.

Il est précisé que cette interdiction, dont l’entrée en vigueur est prévue à compter du 1er janvier 2025, concerne les produits dont l’innocuité pour la santé humaine n’est pas établie.

Ce faisant, suivant l’exemple du Danemark qui l’a précédée, la France pourrait devenir le deuxième pays européen à interdire ces substances chimiques particulièrement toxiques.

Cette disposition est cohérente avec la stratégie de l’Union européenne pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques et avec la récente feuille de route de la Commission européenne pour restreindre l’usage des produits chimiques les plus dangereux, qui prévoit un renforcement de la réglementation européenne sur ce sujet. Des discussions sont d’ores et déjà engagées afin de modifier le règlement européen Reach précité en ce sens.

IV.   Les travaux de la commission

La commission a adopté un amendement CD20 du rapporteur de réécriture globale de l’article 2, qui permet d’étendre le champ des produits concernés par l’interdiction des substances poly- et perfluoroalkyles à compter du 1er janvier 2025.

Seraient ainsi concernés non seulement les emballages de contenants alimentaires, mais également les ustensiles de cuisine, les auxiliaires technologiques utilisés par l’industrie agroalimentaire durant la préparation ou la transformation d’aliments, les jouets, les articles de puériculture, les couches pour bébés et les produits de protection d’hygiène intime.

Cet amendement propose en outre d’inscrire l’interdiction dans la loi française dès à présent, tout en la coordonnant avec une interdiction prévue au niveau de l’Union européenne. Ce faisant, il permet à la France de se positionner clairement en faveur d’une révision ambitieuse du règlement Reach précité, qui devrait intervenir dans les prochains mois.

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Article 3
(article L. 541-9-1 du code de l’environnement)
Information sur les produits à usage unique contenant une part de plastique

Adopté par la commission avec modifications

L’article 3 tend à rendre obligatoire le marquage de produits à usage unique contenant une partie de plastique, à compter du 1er janvier 2024.

I.   L’état du droit

1.   Le développement de l’information du consommateur

Plusieurs dispositions adoptées récemment visent à améliorer l’information du consommateur sur la qualité et l’impact environnemental des produits générateurs de déchets.

● Créé par l’article 13 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite « loi AGEC », l’article L. 541-9-1 du code de l’environnement prévoit qu’afin d’améliorer l’information des consommateurs, « les producteurs et importateurs de produits générateurs de déchets informent les consommateurs, par voie de marquage, d’étiquetage, d’affichage ou par tout autre procédé approprié, sur leurs qualités et caractéristiques environnementales, notamment l’incorporation de matière recyclée, l’emploi de ressources renouvelables, la durabilité, la compostabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi, la recyclabilité et la présence de substances dangereuses, de métaux précieux ou de terres rares, en cohérence avec le droit de l’Union européenne ». Ces informations doivent être visibles ou accessibles par le consommateur au moment de l’acte d’achat.

Concernant plus particulièrement le plastique, l’article L. 541-9-1 précise que :

– les produits et emballages en matière plastique dont la compostabilité ne peut être obtenue qu’en unité industrielle ne peuvent porter la mention « compostable » ;

– les produits et emballages en matière plastique compostables en compostage domestique ou industriel portent la mention « Ne pas jeter dans la nature ».

En outre, le décret d’application n° 2022-748 du 29 avril 2022 relatif à l’information du consommateur sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits générateurs de déchets prévoit une information des consommateurs sur la présence, dans les produits textiles, de microfibres plastiques. L’indication, sous la forme de la mention « rejette des microfibres plastiques dans l’environnement lors du lavage » est mise à disposition lorsque le produit contient plus de 50 % de fibres synthétiques.

● L’article 2 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience » rend obligatoire, à l’issue d’expérimentations, un affichage environnemental, ou social et environnemental, pour certaines catégories de biens ou de services, dont la liste sera fixée par décret. Pour les autres catégories de biens et de services, l’affichage reste volontaire.

Codifié à l’article L. 541-9-11 du code de l’environnement, cet affichage s’effectue par voie de marquage ou d’étiquetage ou par tout autre procédé adapté. Il est visible ou accessible pour le consommateur, en particulier au moment de l’acte d’achat. L’information apportée doit faire ressortir, de façon fiable et facilement compréhensible pour le consommateur, l’impact environnemental des biens et services considérés sur l’ensemble de leur cycle de vie.

2.   Le marquage obligatoire de certains produits en plastique à usage unique

La directive (UE) 2019/904 du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement impose le marquage de certains produits en plastique à usage unique. Son article 7 prévoit ainsi que les États membres veillent à ce que certains produits en plastique à usage unique portent un marquage visible, nettement lisible et indélébile, apposé sur l’emballage ou sur le produit proprement dit. Ce marquage doit informer le consommateur concernant :

 les solutions appropriées de gestion des déchets ou les moyens d’élimination des déchets à éviter ;

 la présence de plastique dans le produit et les effets nocifs sur l’environnement résultant du dépôt sauvage ou d’autres moyens d’élimination inappropriés des déchets issus du produit.

Les produits concernés par la directive sont les suivants :

 les serviettes hygiéniques, tampons et applicateurs de tampons ;

 les lingettes humides, c’est-à-dire les lingettes pré-imbibées pour usages corporels et domestiques ;

 les produits du tabac avec filtres et les filtres commercialisés pour être utilisés en combinaison avec des produits du tabac ;

 les gobelets pour boissons.

Les modalités d’application de l’article 7 de la directive du 5 juin 2019 précitée sont prévues par le règlement d’application de la Commission du 17 décembre 2020. Celui-ci précise notamment que chaque unité de vente porte un marquage sur son emballage et que le marquage n’est pas requis sur les emballages dont la surface est inférieure à 10 cm2.

Le décret n° 2021-1279 du 30 septembre 2021 relatif au marquage de certains produits en plastique à usage unique transpose l’obligation de marquage prévue par la directive. Il crée un nouvel article R. 541-335 dans le code de l’environnement, qui reprend les produits listés par la directive ainsi que les modalités d’application prévues par le droit européen.

Les produits concernés bénéficient d’un délai d’écoulement des stocks courant jusqu’au 31 décembre 2022, dès lors qu’ils ont été mis sur le marché avant le 3 juillet 2021. Le défaut d’affichage est puni de l’amende prévue pour les contraventions de troisième classe, soit 350 euros.

II.   Le dispositif de la proposition de loi

L’article 3 de la proposition de loi améliore l’information du consommateur en rendant obligatoire le marquage des produits à usage unique contenant du plastique.

Il complète ainsi l’article L. 541-9-1 du code de l’environnement relatif à l’information des consommateurs sur les produits générateurs de déchets, pour prévoir que tout produit à usage unique constitué pour tout ou partie de polymères artificiels, quelle qu’en soit la proportion, fait l’objet d’un marquage.

Reprenant les termes employés à l’article 7 de la directive du 5 juin 2019 précitée, l’article 3 de la proposition de loi précise que ce marquage doit indiquer la présence de plastique dans le produit ainsi que les effets nocifs sur l’environnement résultant du dépôt sauvage ou d’autres moyens d’élimination inappropriés des déchets issus du produit. Le marquage, apposé sur l’emballage ou sur le produit proprement dit, doit être visible, nettement lisible et indélébile.

L’entrée en vigueur de cette disposition est prévue au plus tard le 1er janvier 2024.

III.   Les travaux de la commission

À l’initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement CD19 précisant que seuls sont concernés par l’obligation de marquage les produits à usage unique comportant une part de plastique, dont la liste est définie par décret.

Il vise en particulier les produits dont l’aspect laisse croire qu’ils sont en carton ou en papier, alors qu’ils contiennent en réalité aussi du plastique. Le développement de ces produits qui se prétendent plus respectueux de l’environnement qu’ils ne le sont vraiment induit le consommateur en erreur et pose des difficultés, notamment en termes de recyclage.

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Article 4
(articles L. 415-1, L. 541-15-10-1 [nouveau] et L. 541-44 du code de l’environnement)
Limitation de la détention d’objets en plastique à usage unique dans les espaces protégés

Adopté par la commission avec modifications

L’article 4 permet au gestionnaire d’un espace protégé de limiter la détention d’objets et d’emballages en plastique à usage unique dans les espaces protégés.

I.   Les déchets plastiques, une menace pour la biodiversité marine et terrestre

Dans un récent rapport intitulé « Pollution plastique : une bombe à retardement ? », l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) met en avant les impacts délétères du plastique sur l’environnement ([20]). Le député Philippe Bolo et la sénatrice Angèle Préville, auteurs du rapport, rappellent que la fabrication des plastiques contribue au réchauffement climatique et présente un facteur de risque non négligeable pour la biodiversité. Ils notent ainsi qu’« une métaanalyse récente a estimé à 2 249 le nombre de plantes, d’animaux et de microbes affectés par la pollution plastique à l’échelle mondiale. […] Plus de 300 espèces sont concernées par les enchevêtrements, les étranglements ou l’ingestion de plastiques. Or, 15 % des mammifères marins, vulnérables aux déchets plastiques, figurent déjà sur la liste rouge des espèces menacées ». Chaque année, 1,4 million d’oiseaux et 14 000 mammifères seraient retrouvés morts en raison de l’ingestion de plastiques. Des effets toxicologiques variables (sur la physiologie, le métabolisme, le comportement et la reproduction) sont en outre constatés en laboratoire sur différents organismes vivants tels que les coraux, les huîtres ou certains types de poissons.

Au-delà de cette menace pour la biodiversité, la pollution plastique est aussi visuelle puisqu’elle dégrade les paysages naturels.

Si l’ensemble des pays est aujourd’hui touché par la pollution plastique, sur terre comme sur mer, les espaces protégés doivent être les premiers à être préservés de cette forme de pollution. En France métropolitaine et dans les territoires d’outre‑mer, la surface totale des aires protégées représente 33 % du territoire national et de nos espaces maritimes. Elles comprennent notamment les parcs nationaux, les parcs naturels régionaux, les réserves naturelles, les aires marines protégées ou encore les sites Natura 2000.

II.   L’élimination de la pollution plastique dans les espaces protégés, un objectif récemment réaffirmé

À l’issue du Congrès mondial de la nature de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) qui s’est tenu à Marseille du 3 au 11 septembre 2021, les participants ont appelé les États à « éliminer la pollution par le plastique dans les aires protégées, en agissant en priorité sur les produits plastiques à usage unique ».

Les membres de l’UICN réunis lors de ce Congrès mondial ont adopté une résolution relative à la réduction du plastique à usage unique dans les espaces protégés. Celle-ci stipule que ses signataires :

 ont conscience que « les aires protégées jouent un rôle important dans la protection de la biodiversité mondiale, l’atténuation des émissions de carbone et le renforcement de la résilience face au changement climatique » ;

– reconnaissent que « les produits en plastique représentent la majorité des déchets qui polluent les aires protégées, qu’ils sont souvent éliminés de manière inappropriée et qu’il faut jusqu’à mille ans pour que les plastiques jetés dans la nature se décomposent » ;

– notent « qu’il existe des solutions de rechange pour transporter les boissons et autres produits et éviter d’apporter des emballages en plastique à usage unique dans les aires protégées, et que les politiques « geste propre – gardez et triez vos déchets » encouragent une gestion responsable des plastiques apportés dans les aires protégées ».

La résolution « prie instamment les États membres de prendre des mesures prioritaires d’ici à 2025 pour prévenir la pollution des aires protégées par les produits en plastique à usage unique, le but ultime étant d’éliminer
toute pollution par le plastique dans les aires protégées » ([21]).

III.   Le dispositif de la proposition de loi

L’article 4 de la proposition de loi permet de limiter ou d’interdire l’introduction d’objets et d’emballages en plastique jetable dans les espaces protégés.

Il crée un nouvel article L. 360-1-1 dans le code de l’environnement dont le I dispose que l’introduction, le transport et l’utilisation d’objets et d’emballages en plastique à usage unique dans les espaces protégés peuvent être réglementés ou interdits dès lors qu’ils sont de nature à compromettre soit la protection ou la mise en valeur de ces espaces à des fins écologiques, agricoles, forestières, esthétiques, paysagères ou touristiques, soit la protection des espèces animales ou végétales.

Des dérogations à ces restrictions sont prévues au I : elles ne s’appliquent pas lorsque l’introduction, le transport ou l’utilisation des objets et emballages en plastique à usage unique sont nécessaires à l’exécution d’une mission opérationnelle de secours, de sécurité civile, de police, de douanes ou de la défense nationale.

Le II du nouvel l’article L. 360-1-1 prévoit que la mise en place d’une telle réglementation est décidée par arrêté motivé, pris par les autorités suivantes :

– le maire ;

– le préfet après avis des maires des communes concernées lorsque la mesure excède le territoire d’une seule commune ;

– le préfet maritime lorsque la mesure concerne les espaces maritimes.

Le préfet peut également prendre l’arrêté de réglementation ou d’interdiction en cas d’inaction du maire et après mise en demeure de ce dernier restée sans résultat.

IV.   Les travaux de la commission

La commission a adopté un amendement CD21 du rapporteur de réécriture globale de l’article 4.

Il prévoit de confier aux gestionnaires des espaces protégés, et non plus aux maires ou aux préfets, le soin de réglementer la détention de produits en plastique à usage unique dont l’abandon est préjudiciable à l’environnement. L’information des personnes concernées sera garantie grâce à un affichage. Comme dans la version initiale de l’article, une série d’exceptions est prévue, notamment pour les secours, les interventions de police ou encore l’utilisation de dispositifs médicaux.

De plus, cet amendement modifie les articles L. 415‑1 et L. 541‑44 du code de l’environnement pour prévoir que les personnes habilitées à constater la nouvelle infraction seront celles qui sont déjà habilitées à constater les infractions au livre IV du même code. Il s’agit notamment des officiers et agents de police judiciaire, des inspecteurs de l’environnement, des gardes champêtres, des agents des réserves naturelles ou encore des gardes du littoral.

Enfin, il inscrit ces dispositions dans un nouvel article L. 541-15-10-1 du code de l’environnement, qui figure dans le chapitre Ier du titre IV du livre V du code, consacré à la prévention et à la gestion des déchets.

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Article 5 (nouveau)
Rapport sur les mesures d’accompagnement des acteurs publics et privés dans leurs efforts de réduction de l’usage du plastique

Créé par la commission

La commission a créé un nouvel article 5 qui prévoit la remise au Parlement d’un rapport du Gouvernement sur les mesures d’accompagnement des acteurs publics et privés dans leurs efforts de réduction de l’usage du plastique.

La commission a adopté un amendement CD1 de M. Stéphane Delautrette et des membres du groupe Socialistes et apparentés, avec un avis favorable du rapporteur.

Cet article additionnel prévoit la remise d’un rapport dressant la liste des mesures prévues jusqu’en 2027 pour accompagner les acteurs publics et privés dans leurs efforts de réduction de l’usage du plastique. Ce rapport doit être remis au Parlement par le Gouvernement dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi.

 


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   Examen en commission

Lors de sa réunion du mercredi 28 septembre 2022, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a procédé à l’examen, sur le rapport de M. Jimmy Pahun, de la proposition de loi visant à lutter contre les plastiques dangereux pour l’environnement et la santé (n° 205).

M. Jimmy Pahun, rapporteur. La pollution plastique est un fléau qui nous est familier et que nous croyons cerner dans son intégralité, dans toute sa gravité. En réalité, nous commençons à peine à comprendre toute l’étendue des dangers auxquels nous expose notre surconsommation de plastique. À mesure que la science progresse, nous précisons ces dangers et nous en découvrons de nouveaux, tant pour l’environnement – la biodiversité et le climat – que pour notre santé.

La pollution plastique affecte les sols, les eaux souterraines et de surface et, bien entendu, l’océan. Je me contenterai de rappeler brièvement son impact sur les écosystèmes marins, dimension du problème à laquelle je suis certainement le plus sensible. Il y a d’abord les déchets issus de la terre et des activités maritimes, que l’on retrouve à la surface de l’eau et sur les plages et qui défigurent nos paysages. Il y a en outre la pollution invisible, celle des nano et des microplastiques, c’est-à-dire des morceaux de plastique de taille inférieure à 5 millimètres issus soit de l’utilisation de certains produits cosmétiques, de peintures ou d’engrais, soit de la dégradation de macroplastiques. Invisibles mais plus dangereux encore, ces plastiques sont présents sur toute la profondeur de la colonne d’eau. À jamais hors de notre portée, ils intègrent la chaîne alimentaire et attaquent les organismes marins du fait de leur toxicité. Ce faisant, ils réduisent la capacité de l’océan à jouer son rôle de régulateur du climat. Agir contre la pollution plastique, c’est donc très directement mener le combat climatique.

Certes, nous ne sommes pas les premiers responsables du déversement de ces 11 millions de tonnes de plastique dans l’océan chaque année. Certes, nous avons un cadre réglementaire déjà robuste, grâce à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, à la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) et à la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Mais il nous reste tant à faire en France, en Europe et dans le monde pour espérer d’abord maîtriser la pollution plastique et, un jour peut-être, la stopper complètement. Il nous faut donc être exemplaire en France et souhaiter cette même ambition pour l’Europe.

Il importe notamment, en France et en Europe, d’en finir avec l’idée que le recyclage est la solution à la pollution plastique. Le rapport publié hier par la Cour des comptes pointe d’ailleurs notre incapacité, depuis plus de dix ans, à tenir nos objectifs de collecte, de tri et de recyclage. En conséquence, nous exportons des déchets que nous ne sommes pas en mesure d’absorber, comme le montre un rapport de Human Rights Watch sorti ce mois-ci et résumé ainsi par un journaliste du Monde : « En Turquie, nouvelle poubelle de l’Europe, le recyclage du plastique nuit gravement à la santé et à l’environnement. »

Nous devons donc recentrer le recyclage sur les quelques plastiques pour lesquels les filières sont d’ores et déjà efficaces et, pour le reste, mettre l’accent sans attendre sur la réduction à la source. C’est la philosophie de la loi AGEC, que cette proposition de loi s’autorise, modestement, à faire vivre.

La diminution drastique, à la source, des plastiques à usage unique contribuerait en outre à la réduction de notre consommation d’énergies fossiles et donc à l’atteinte de nos objectifs climatiques et de sobriété énergétique. Selon un rapport publié hier par des ONG, la production de plastique représente 8 % de la consommation finale de pétrole au niveau européen La production de plastique, industrie la plus consommatrice d’électricité, va plus que doubler d’ici à 2040 au niveau mondial. La solution à la pollution plastique est donc non pas de construire de nouvelles infrastructures et d’employer de nouveaux procédés plus énergivores que les précédents, mais bien d’agir pour une réduction à la source.

Dès lors, une planification concertée et contraignante est indispensable, car nous n’atteindrons pas l’objectif de « zéro plastique à usage unique en 2040 » fixé par la loi AGEC par les seuls engagements volontaires des acteurs économiques. Une planification non pas pour sortir du plastique – au singulier –, mais pour se séparer des plastiques les moins essentiels, les moins recyclables, les plus volatiles ou les plus toxiques. Une planification aussi pour maîtriser les conséquences économiques et sociales de ces transitions rapides, profondes et nécessaires – je partage pleinement la préoccupation exprimée par notre collègue Stéphane Delautrette à travers son amendement.

C’est là une très forte demande de nos concitoyens. Selon un récent sondage Ipsos, ils sont 80 % à vouloir réduire leur utilisation de plastiques à usage unique, et 75 % à vouloir la fin des plastiques à usage unique. J’ignore jusqu’à quel niveau monte cette proportion chez les plus jeunes, mais je constate leur extrême préoccupation devant l’immensité de cette pollution, et j’y vois chez beaucoup le moteur d’un engagement associatif et civique puissant.

L’article 1er de la proposition de loi vise à interdire sans condition de recyclage les emballages constitués pour tout ou partie de polystyrène à compter du 1er janvier 2025. Il revient en cela sur une mesure de la loi « climat et résilience » adoptée l’année dernière. Je suis parti d’un constat : le polystyrène est un plastique controversé, car il est plus dangereux qu’un autre pour la santé et pour l’environnement. Aussi me paraît-il très hasardeux de miser sur une hypothétique filière de recyclage chimique.

Cependant, je comprends de mes auditions avec les acteurs économiques et de mes discussions avec le Gouvernement et les groupes de l’Assemblée, que ce constat n’est pas suffisamment partagé pour obtenir aussi rapidement la révision d’une disposition législative récemment adoptée. C’est pourquoi, en attendant de pouvoir analyser plus en profondeur la question du polystyrène, je proposerai à la commission de soutenir l’amendement de réécriture de l’article 1er déposé par notre collègue Claire Pitollat. Il interdit l’ensemble des emballages en plastique non recyclables, à compter du 1er janvier 2025, alors que notre pays reste très en retard dans ses objectifs de recyclage dans ce domaine.

L’article 2 tend à interdire les emballages et contenants alimentaires constitués pour tout ou partie de composés perfluorés, les PFAS, sauf si leur innocuité pour la santé humaine est prouvée. Il n’est pas imaginable de les interdire un à un, car il en existerait plus de 5 000. Compte tenu de l’importante littérature scientifique attestant les risques qu’ils font peser sur notre santé, il apparaît sérieux et proportionné de s’inquiéter des PFAS dans leur ensemble, et donc de les cibler en tant que famille chimique. Cette approche a été confirmée par l’initiative de plusieurs pays européens en faveur d’une interdiction globale des PFAS dans le cadre du règlement européen Reach – enregistrement, évaluation, autorisation des substances chimiques et restrictions applicables à ces substances. Soutenir la démarche de ces pays au niveau européen apparaît comme le moyen le plus sûr, rapide et efficace d’aboutir à l’objectif fixé par la proposition de loi. Je vous proposerai donc de récrire l’article 2, d’une part pour étendre le champ d’application de l’interdiction, d’autre part pour faire référence à ce règlement européen. Ce faisant, la France rejoindrait la coalition des pays engagés contre les PFAS – l’Allemagne, la Norvège, les Pays-Bas, le Danemark et la Suède – et contribuerait à faire de cette initiative un succès au bénéfice de la santé de nos concitoyens.

L’article 3 a pour objectif de mieux informer le consommateur. Il s’inspire de la directive européenne qui impose le marquage des produits – gobelets, lingettes et produits du tabac, entre autres – lorsqu’ils contiennent du plastique. Vous connaissez peut-être le logo : il est rouge et bleu, avec une tortue mal en point. Il s’agit de prévenir le consommateur de la présence de plastique dans le produit lorsque celle-ci n’est pas évidente. Poursuivant dans cette logique, l’article 3 vise à étendre l’obligation de marquage à d’autres produits similaires. Toutefois, la rédaction actuelle n’est pas bonne, car beaucoup trop large : elle obligerait par exemple à apposer ce logo sur les bouteilles d’eau, alors même qu’il est évident pour tout le monde qu’elles sont en plastique. Je vous proposerai donc de restreindre son champ d’application aux seuls produits mêlant plastique et carton ou plastique et papier.

L’article 4 s’inscrit dans le droit fil d’une préconisation du Congrès mondial de la nature de l’UICN: l’élimination de toute pollution par le plastique dans les aires protégées. La rédaction s’inspire de celle de l’article visant à lutter contre l’hyperfréquentation des espaces protégés, que nous avions introduite dans la loi « climat et résilience ». Il apparaît finalement plus judicieux de confier ce pouvoir aux gestionnaires des espaces protégés. Tel est l’amendement de réécriture que je vous proposerai. Il s’agit bien de confier un pouvoir nouveau aux gestionnaires des espaces protégés : au cas par cas, selon leurs enjeux propres, ils pourront prendre une réglementation ou non, sur tout ou partie de leur territoire. Tout est possible, rien n’est imposé.

Je me réjouis des débats qui vont suivre. Je suis heureux que notre commission se saisisse de la question de la pollution plastique. Je dois cela à mes collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants), que je remercie sincèrement.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Claire Pitollat (RE). Je tiens à saluer, au nom du groupe Renaissance, les travaux réalisés par M. Jimmy Pahun sur l’enjeu, que nous savons crucial, de la réglementation de l’usage des plastiques dans notre quotidien. Lors de la précédente législature, nous avons été nombreux à travailler sur ces questions. La loi AGEC et la loi « climat et résilience » ont permis de premières avancées déterminantes, qu’il convient de saluer.

Cependant, les scientifiques mettent régulièrement en lumière de nouvelles préoccupations. Il est donc légitime de faire évoluer nos réglementations au regard des risques sanitaires que peuvent encourir nos concitoyens à cause des substances chimiques contenues dans les plastiques : troubles de la fertilité, cancers, malformations génitales et diabète, entre autres.

Compte tenu de ces risques, nous devons nous interroger sur la généralisation de l’usage du plastique dans notre quotidien. Depuis 1950, sa production a été multipliée par 200 au niveau mondial. L’Europe en est le premier producteur. Environ 360 millions de tonnes de plastique sont produites chaque année dans le monde, les emballages représentant 40 % de la demande. Il est démontré que chacun d’entre nous ingère quelques grammes de plastique par semaine en s’alimentant.

Le groupe Renaissance souhaite renforcer la réglementation relative à la recyclabilité des emballages, afin de réduire notre production globale ; interdire dès 2025 l’usage de certaines substances toxiques dans les produits de notre quotidien, notamment ceux avec lesquels entrent en contact les plus fragiles, particulièrement nos enfants, que nous savons sensibles à ces matières ; limiter l’utilisation des emballages à usage unique dans les zones protégées – je pense pour ma part au parc national des Calanques, dans ma circonscription. Nous souhaitons réduire nos emballages, poser la question de leur dangerosité, encourager l’utilisation de matières moins toxiques. Ces préoccupations sont au cœur de cette proposition de loi résolument tournée vers l’avenir.

M. Pierre Meurin (RN). Mon propos portera sur le texte initial, puis sur sa réécriture.

Nous partageons tous les mêmes objectifs : tendre vers davantage de sécurité sanitaire et environnementale, tendre vers une réduction du volume des plastiques à usage unique. Toutefois, la proposition de loi que nous discutons illustre le dicton « l’enfer est pavé de bonnes intentions ». Elle illustre aussi cette tendance pénible à traiter les problèmes de façon simpliste par des interdictions, des contraintes et des amendes – bref, de fausses bonnes idées.

L’article 1er vise à interdire de manière générale et absolue, dans seulement deux ans et demi, les emballages constitués de polystyrène ou de polymères équivalents, alors que la loi « climat et résilience » adoptée l’année dernière imposait la création de filières de recyclage pour ces produits. Ce texte annule ainsi les efforts consentis par nos industriels et crée une insécurité juridique qui n’honore pas la représentation nationale.

Je précise que la pollution plastique mondiale est largement le fait d’autres continents, non soumis à la réglementation européenne. C’est toujours la même hypocrisie : nos industriels vont dépenser de l’argent et des moyens pour s’adapter aux normes, alors que nous continuerons à importer des produits qui ne respectent pas ces mêmes normes. La concurrence déloyale est toujours à notre détriment.

L’article 2, qui renverse la charge de la preuve, relève d’un extrême principe de précaution. Il mettra toute la filière en état d’insécurité juridique.

L’article 3 nous semble un gadget, car un consommateur qui achète une bouteille en plastique n’a pas besoin que ce soit écrit ; personne ne confond le verre et le plastique.

Enfin, l’article 4 vise, ni plus ni moins, à empêcher un randonneur de boire de l’eau en forêt. De telles règles, dont la majorité est coutumière, sont dignes de l’Absurdistan !

Nous voterons en revanche les amendements de réécriture du groupe Renaissance, qui ont le mérite de neutraliser la radicalité du texte initial. Je salue aussi, dans l’esprit, les amendements de la NUPES relatifs à la consignation du verre. Il faudra néanmoins revoir le dispositif pour arrêter de considérer que le temps est un ennemi.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Le plastique est désormais omniprésent dans tous les milieux naturels. En 2050, il y aura dans les océans plus de plastique que de poissons. Chaque jour, des emballages étranglent et tuent des animaux sauvages. Une tortue de mer sur deux a déjà ingéré du plastique, de même que 90 % des oiseaux de mer.

Les plastiques et microplastiques perturbent toute la chaîne alimentaire et se retrouvent dans nos assiettes et nos organismes. Chaque semaine, nous ingérons en microplastiques un poids équivalent à celui d’une carte de crédit. Le plastique est partout : dans nos bouteilles, nos vêtements, nos objets du quotidien. Rentable et pratique pour les industriels, il est cependant extrêmement nocif pour le vivant. Il est urgent d’agir.

Le plan de sortie des plastiques établi à la demande d’Emmanuel Macron est très insuffisant : il concerne seulement les plastiques à usage unique, et il faudra attendre 2040 pour que ceux-ci soient interdits. Pour nous, l’urgence est à la planification de mesures alternatives à la politique de gestion des déchets, en commençant par l’interdiction immédiate des plastiques à usage unique, le développement de l’emballage en verre et le retour à un système de consigne. Fondamentalement, le meilleur déchet, c’est celui qu’on ne produit pas. C’est donc la sobriété qu’il faut viser, en limitant ou supprimant tous les emballages superflus, mais surtout en révolutionnant nos manières de produire et de consommer.

C’est pourquoi nous saluons cette proposition de loi dans sa version initiale, notamment son article 1er, qui reprend un amendement visant à interdire le polystyrène dans les emballages alimentaires, défendu par le groupe La France insoumise et adopté contre l’avis du Gouvernement lors de l’examen du projet de loi « climat et résilience ». Malheureusement, le Sénat avait ensuite considérablement affaibli le texte en ajoutant une condition de recyclabilité, alors que les possibilités de recyclage des polystyrènes sont tout à fait insuffisantes. L’article 1er tel que M. Pahun l’a initialement rédigé rendait à cette mesure toute sa portée. Je m’étonne donc – et me désole – que la majorité ait déposé des amendements qui videront le texte de sa substance, alors qu’il aurait pu être ambitieux et marquer une réelle avancée dans la lutte contre les plastiques, dont la nécessité est chaque jour plus pressante.

Mme Anne-Laure Babault (Dem). Il nous tenait à cœur d’inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour de notre niche parlementaire, tant le combat contre la pollution plastique, que nous faisons nôtre, est mené avec ferveur par notre collègue Jimmy Pahun. Cette proposition de loi répond à la nécessité de changer nos modes de consommation face au changement climatique. Dans le cadre d’un effort global de sobriété, nous devons nous appliquer à pratiquer une sobriété du plastique, conformément à la stratégie « 3R » – réduction, réemploi, recyclage – de la loi AGEC.

Cette réduction aura des conséquences majeures sur notre empreinte écologique. D’une part, elle diminuera notre consommation énergétique. Une étude nous apprend en effet que l’industrie plasturgique représentait, en 2020, près de 9 % de la consommation de gaz fossile de l’Union européenne, et 8 % de sa consommation de pétrole. Qui plus est, les emballages représentent 40 % de l’industrie plasturgique. D’autre part, cette réduction nous permettra de diminuer la pollution, par les déchets plastiques, de milieux riches en biodiversité, notamment les océans.

La proposition initiale, qui était d’interdire le polystyrène à compter de 2025, a eu son effet : elle a mis l’accent sur la nécessité pour les acteurs de l’agroalimentaire d’accélérer les choses pour être prêts en 2025, comme l’impose la loi « climat et résilience ». La représentation nationale, notamment le groupe Démocrate, veillera tout particulièrement à ce que les objectifs précédemment fixés soient atteints en temps et en heure, à l’échelle de l’ensemble de la filière. À défaut, la loi s’appliquera : les emballages en polystyrène non recyclables seront interdits. Une filière souveraine et vertueuse pour l’environnement reste donc à développer.

Le texte comprend d’autres dispositions qui permettront de mieux protéger les citoyens et l’environnement : l’interdiction des composés perfluorés, le marquage de la présence de plastique dans les produits, la possibilité de réglementer l’utilisation des emballages dans les espaces protégés.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Merci, Monsieur le rapporteur, pour votre exposé et pour cette proposition de loi. Vous nous donnez l’occasion de débattre de mesures utiles pour accélérer la dynamique de réduction des déchets plastiques dans notre pays.

Je ne m’appesantirai pas sur un constat que nous partageons toutes et tous, ni sur l’ampleur des dégâts déjà causés par les pollutions plastiques. Permettez-moi néanmoins d’insister sur un chiffre : en France, selon une étude publiée par Citeo en novembre dernier, seuls 29 % des emballages en plastique sont recyclés. Certes, c’est 6 points de plus qu’en 2016, mais nos résultats demeurent très en deçà de ceux obtenus par nos voisins : cette part est de 46 % au Royaume-Uni et s’élève à 50 % en Allemagne. Il existe d’importantes marges de progression en matière de lutte contre les emballages en plastique. Force est de constater que la France a pris du retard.

Le groupe Socialistes et apparentés accueille donc favorablement votre initiative, qui vise à réduire les impacts de l’utilisation des plastiques sur la santé comme sur l’environnement. Dans la continuité de nos prises de position à ce sujet, nous voterons les mesures qui participent d’une stratégie ambitieuse et planifiée pour réduire drastiquement la dépendance de notre économie au plastique.

Nous soutiendrons la mesure d’interdiction, à l’horizon 2025, des emballages alimentaires constitués de polystyrène, qui permettra de limiter leur prolifération. Le marquage des produits contenant du plastique à usage unique est également un bon signal pour l’évolution de nos modes de consommation et de production. En outre, nous pensons pertinent d’ouvrir la possibilité aux élus locaux de limiter la prolifération des plastiques à usage unique dans les zones protégées, comme vous le proposez à l’article 4. Enfin, votre proposition de loi introduit l’interdiction, à compter du 1er janvier 2024, des composés perfluorés dont l’innocuité sanitaire n’est pas établie. Il s’agit d’une mesure de précaution, qui offre aux consommateurs des garanties contre l’exposition aux substances dangereuses.

Mme Anne-Cécile Violland (HOR). Je tiens à saluer le travail effectué par M. Pahun et son équipe, et les ambitions assumées dans ce texte. Chaque année en France, plus de 2 millions de tonnes d’emballages en plastique sont mises sur le marché. Leur réemploi est peu développé ; leur taux de recyclage est faible. La loi AGEC de 2020 avait introduit de nouvelles obligations, interdictions et outils visant à réduire leur utilisation et favoriser le recyclage. Certes, le plastique est un matériau commode, utile et précieux, mais il est plus qu’urgent d’améliorer son utilisation, sa réutilisation et son recyclage.

Les plastiques restent bien trop nombreux dans notre environnement. Les plastiques styréniques visés par l’article 1er sont la troisième catégorie de plastiques la plus présente dans les eaux douces et l’océan, en outre largement surreprésentée dans la totalité des déchets plastiques comparativement à leur part sur le marché de l’emballage. De nombreuses études le prouvent, il s’agit de plastiques toxiques pour l’être humain et pour l’environnement, qui mettent en danger la stabilité des populations et la structure des écosystèmes. À ce jour, aucune filière de recyclage n’est viable, ni n’a fait l’objet d’évaluations environnementales sérieuses.

Les composés perfluorés visés par l’article 2 sont eux aussi nocifs pour l’homme et pour l’environnement. De plus, ils sont très difficilement repérables par nos concitoyens.

À l’évidence, l’information du consommateur est un point clé pour la réduction de nos volumes de plastiques. Il est essentiel d’améliorer cette information, comme le prévoit l’article 3.

Nous tenons tous à nos espaces protégés. Leurs gestionnaires doivent effectivement pouvoir gérer eux-mêmes la pollution plastique et prendre à cette fin les décisions qu’ils jugeront nécessaires pour limiter l’introduction d’emballages en plastique.

Cette proposition de loi vise à adapter la législation aux pratiques des acteurs économiques et aux nouveaux matériaux pouvant être mis sur le marché. Il s’agit d’assurer le respect par la France de ses objectifs de sortie progressive du plastique à usage unique, objectifs largement justifiés par l’importance de la pollution plastique et de ses impacts sur l’environnement et sur la santé humaine. Par conséquent, le groupe Horizons et apparentés est favorable à ce texte.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Nous soutenons pleinement cette proposition de loi visant à lutter contre les plastiques dangereux pour l’environnement et la santé, déposée par le groupe Démocrate (MoDem et Indépendants). Nous remercions M. Pahun pour l’ambition qu’il y avait fixée. Ce texte s’inscrit dans la continuité de dispositions législatives nationales. L’ensemble de mes collègues l’ont reconnu, il répond à des impératifs qui nous obligent toutes et tous : la protection de la santé humaine ; la protection du vivant, des océans et des écosystèmes.

Emmanuel Macron a annoncé lui-même le 16 avril 2022 : « La politique que je mènerai dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas. » C’est pourquoi nous, écologistes, qui soutenons pleinement la proposition de loi telle qu’elle a été déposée, ne pouvons que nous interroger sur les raisons qui ont poussé la majorité à amoindrir à ce point un texte qui pouvait jouer un rôle pivot dans la transition écologique de notre pays.

En 2019, une telle avancée avait été tentée dans le cadre de la loi « climat et résilience », mais on était revenu en arrière, déjà, considérant qu’il fallait faire confiance aux industriels pour développer une filière pérenne de recyclage. Or la filière n’existe pas et ne sera sans doute pas viable en 2025. Surtout, le développement d’une telle filière pousserait l’industrie à produire toujours plus de plastique dit recyclable précisément pour la rendre viable.

Adoptée avec les amendements de la majorité, la proposition de loi ne permettrait aucune avancée ; elle marquerait un sur-place insoutenable compte tenu des enjeux. Par ailleurs, de nombreux pays, notamment le Royaume-Uni, le Portugal et l’Espagne, ont édicté une réglementation bien plus ambitieuse en matière de réduction de la pollution plastique et d’abandon du polystyrène.

Enfin, les filières de recyclage qui ont vu le jour aux États-Unis, bien plus tôt qu’ici, se sont implantées principalement dans des quartiers socialement défavorisés. Nous nous demandons quels seraient les lieux d’implantation de telles usines de recyclage en France.

Nous soutiendrons le texte en l’état, car seule cette rédaction nous permettrait de poursuivre les objectifs de la loi AGEC, à savoir la réduction de la production et de l’utilisation des plastiques et, partant, la protection du vivant et de notre santé.

M. Hubert Wulfranc (GDR-NUPES). Grosso modo, c’est un petit pas en avant ; ça ne mange pas de pain. Nous irons dans ce sens.

Par contre, il manque une application du principe pollueur-payeur à la filière, notamment par l’extension de la redevance pour pollutions diffuses. Ce point est cruellement absent du texte, alors qu’il faudrait « cirer un peu la gueule » aux industriels. Nous tâcherons d’y travailler d’ici à la discussion dans l’hémicycle.

Sur le fond, rien de particulier.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). Une forme de consensus se dégage. Sur l’ensemble de l’échiquier politique, tout le monde s’accorde à dire que la présence du plastique est un problème pour tous. Notre volonté, comme celle d’autres collègues, est d’être constructifs et d’accompagner les avancées.

Néanmoins, un consensus se dégage aussi pour exprimer une forme de déception, Monsieur le rapporteur. Vous aviez envisagé initialement un pas important et courageux, fondé sur une parole politique mesurée. Comme d’autres, je regrette que la position que vous défendez désormais soit beaucoup moins ambitieuse. Je ne veux pas vous mettre dans l’inconfort, d’autant que vous souscrivez probablement en partie à mes commentaires, mais j’aimerais comprendre ce qui vous a conduit à récrire le texte – l’amendement de Mme Pitollat est d’ailleurs très bien écrit : en le lisant rapidement, on pourrait penser qu’il est plus ambitieux que la disposition initiale ! Vous avez dit que les auditions étaient passées par là. Je n’imagine pas que cela puisse résulter d’une négociation politique. Pourriez-vous nous éclairer à ce sujet ?

Vous avez imaginé que les territoires puissent prendre des dispositions pour limiter l’utilisation des emballages en plastique dans les espaces protégés. Comment envisagez-vous le dialogue avec les territoires en la matière ? Vous avez dit : « Tout est possible, rien n’est imposé. » C’est un début, mais pouvez-vous être plus précis ?

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Madame Pitollat, vous avez évoqué les risques sanitaires et rappelé que l’Europe était la première région exportatrice de déchets. Car c’est bien l’Europe, Monsieur Meurin, qui exporte des déchets partout ailleurs dans le monde. Il faut donc commencer par faire des efforts chez nous pour réduire les déchets. Quant aux produits à base de carton ou de plastique, on peut les confondre, d’où mon souhait d’aller plus loin en matière de traçabilité.

Madame Stambach-Terrenoir, nous avons un plan très ambitieux de sortie des plastiques à usage unique d’ici à 2040, dont les objectifs sont déclinés dans un décret quinquennal. Si nous arrivons à l’appliquer, nous aurons vraiment fait du bon boulot. Je compte sur vous tous pour suivre ce dossier, à travers l’élaboration de la loi et le contrôle. Il importe de débattre dès maintenant du présent texte, qui imposera, à compter de 2025, la recyclabilité de tous les plastiques.

Vous avez raison, Madame Babault, il faut que nous changions nos modes de consommation. Il faut aller vers davantage de sobriété – Mme Stambach-Terrenoir a en parlé et n’a pas tort.

Je vous remercie, Monsieur Delautrette, d’avoir rappelé ces chiffres : en Allemagne, 50 % des emballages en plastique sont recyclés ; au Royaume-Uni, 40 % ; en France, nous n’en sommes pas encore à 30 %. Nous devons faire un effort, et nous avons cinq ans pour cela.

Madame Violland, je partage votre avis sur l’importance de l’information du consommateur.

Madame Pochon, je vous remercie de soutenir cette proposition de loi, notamment parce qu’elle doit continuer à vivre au Sénat. À défaut, elle sera enterrée, et nous perdrons les avancées prévues dans les articles 2, 3 et 4.

Je remercie Mme Pitollat d’avoir déposé l’amendement étendant l’obligation de recyclabilité à tous les plastiques. J’ai tenu compte du fait que le 1er janvier 2025, c’est demain. Cela fait trente ans que l’on cherche en vain des solutions de recyclage chimique. Les Américains et les Britanniques y ont renoncé. Nous avons deux ans pour convaincre nos industriels de passer à des méthodes de recyclage plus simples, sachant qu’il faut traiter notamment 15 milliards de pots de yaourt par an ! On parvient à recycler correctement certains plastiques, notamment le polyéthylène (PE) et le polytéréphtalate d’éthylène (PET). Les tonnes de PE et de PET recyclés commencent à se vendre un peu plus cher. On progresse, mais il faut accélérer les choses.

Monsieur Wulfranc, merci.

Monsieur Saint-Huile, j’ai une pensée pour Mme Poirson, qui s’est battue pour fixer une trajectoire dans la loi AGEC. Cette trajectoire est exigeante et embête un peu les agriculteurs, qui sont confrontés en ce moment à d’autres problèmes, notamment la sécheresse et la hausse des prix de l’énergie. Il faut qu’on entraîne le pays entier dans cette voie.

Je suis élu dans l’ouest de la France. En Vendée, le tri est bien fait à 80 %. Il y a en revanche des progrès à faire sur l’axe Paris-Lyon-Marseille ; il faut qu’on habitue les Français à trier. L’extension des consignes de tri est une bonne chose : on pourra désormais jeter tous les plastiques dans la poubelle jaune. Encore faut-il que les lignes de tri puissent traiter efficacement le contenu de la poubelle jaune.

Je compte sur vous tous, je l’ai dit. Nous pourrions peut-être créer à l’Assemblée un groupe d’études sur le plastique, pour suivre l’élaboration des décrets et échanger tant avec les industriels qu’avec les ONG.

Article 1er (article L. 541-15-10 du code de l’environnement) : Interdiction des emballages en plastique non recyclables

Amendement CD15 de Mme Claire Pitollat.

Mme Claire Pitollat. Cet amendement vise à interdire, à compter de 2025, l’ensemble des plastiques pour lesquels il n’existe pas d’industrie de recyclage opérationnelle. Il faudra préciser par décret les critères relatifs à la collecte, au tri et à la recyclabilité. L’adoption de cet amendement sera une grande avancée, car il précise le cadre fixé dans la loi AGEC. Celle-ci impose simplement l’existence de méthodes de recyclage. Or, lors des auditions, les acteurs de la filière nous ont expliqué qu’ils disposaient déjà de telles méthodes. Désormais, nous leur donnons un délai de trois ans pour mettre en place de façon effective et à grande échelle ces outils de recyclage opérationnels.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. L’amendement étend la portée de l’interdiction des emballages en plastique, adoptée dans la loi « climat et résilience » d’août 2021. La rédaction actuelle de l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement ne concerne que le polystyrène non recyclable. Je suis favorable à une interdiction qui concernerait non seulement le polystyrène non recyclable, mais également l’ensemble des emballages en plastique dès lors qu’ils ne sont pas recyclables, et cela dès 2025, c’est-à-dire dans deux ans.

Mme Danielle Brulebois. Une étape importante a été franchie avec la loi AGEC, qui interdit déjà, à compter du 1er janvier 2025, l’utilisation des contenants alimentaires en plastique ainsi que les emballages en polystyrène non recyclables et dans l’incapacité d’intégrer une filière de recyclage. Les principaux acteurs de la filière se sont mobilisés, véritablement, et ont signé une charte d’engagements, qu’ils ont remise en 2021 à Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Ils respectent cette charte et rendent régulièrement des comptes.

Il est difficilement compréhensible qu’une disposition soit remise en cause un an seulement après son adoption. Nos industriels ont besoin d’un cadre réglementaire stable et conforme au droit européen. Or chacun des articles de la proposition de loi porte sur des questions débattues en ce moment au niveau européen. Plusieurs textes sont sur la table : la révision de la directive relative aux emballages et aux déchets d’emballages ; la restriction de l’utilisation des PFAS dans le cadre du règlement Reach.

Mme Anne Stambach-Terrenoir. Cet amendement fait pâle figure auprès de la version initiale de l’article 1er. En outre, qu’apportera-t-il de plus par rapport à la loi AGEC ? Cela signifie-t-il que la loi AGEC était en réalité non contraignante ? Je ne comprends pas bien.

M. Pierre Meurin. Nous voterons cet amendement de réécriture, puisqu’il rétablit la condition de recyclage figurant dans la loi AGEC. C’est de nature à redonner confiance aux acteurs de la filière.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Rien n’est remis en cause, surtout pas l’échéance de 2025. L’interdiction des emballages en polystyrène non recyclables n’est pas inscrite dans la loi AGEC mais dans la loi « climat et résilience ». L’amendement de Mme Pitollat tend à étendre cette interdiction à tous les emballages en plastique non recyclables, dont le polypropylène.

La commission adopte l’amendement et l’article 1er est ainsi rédigé.

Article 2 (article L. 541-15-10 du code de l’environnement) : Interdiction de produits constitués de composés perfluorés

Amendements identiques CD20 du rapporteur et CD16 de Mme Claire Pitollat, amendement CD4 de M. Pierre Meurin (discussion commune).

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Je propose une nouvelle rédaction de l’article 2 pour étendre le champ des produits concernés par l’interdiction des substances poly et perfluoroalkyles. Seraient ainsi concernés non seulement les emballages de contenants alimentaires mais aussi les ustensiles de cuisine, les auxiliaires technologiques utilisés par l’industrie agroalimentaire durant la préparation ou la transformation d’aliments, les jouets, les articles de puériculture, les couches pour bébés et les produits de protection d’hygiène intime.

Au niveau européen, la France soutient la démarche pour interdire l’ensemble de ces substances chimiques toxiques dans le cadre de la révision du règlement sur l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et la restriction des substances chimiques (Reach).

Cet amendement vise à inscrire l’interdiction dans la loi française dès à présent, tout en la coordonnant avec une interdiction dans le droit européen, qui devrait être adoptée dans les prochains mois.

Mme Claire Pitollat. Je retire mon amendement pour voter celui du rapporteur. Il témoigne de la détermination de notre pays à interdire les substances dangereuses pour la santé, en particulier celle des plus fragiles.

M. Pierre Meurin. Je retire également mon amendement au profit de celui du rapporteur dont la rédaction est plus claire et qui laissera aux industriels le temps de s’adapter.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. La décision de nous conformer au règlement Reach est la bonne. Nous avions d’ailleurs pris les devants en décidant, dans le cadre de la loi AGEC, de nous attaquer aux microplastiques dès 2024. L’Europe a repris à son compte l’amendement que nous avions déposé sur ce texte. Nous cheminons, comme l’Allemagne, la Norvège, les Pays-Bas.

L’adoption de cet amendement fera tomber celui de Mme Stambach-Terrenoir mais ce dernier sera satisfait puisque ces substances seront interdites, que leur innocuité pour la santé humaine ait été établie ou non.

Les amendements CD16 et CD4 sont retirés.

La commission adopte l’amendement CD20 et l’article 2 est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CD8 de Mme Anne Stambach-Terrenoir tombe.

Article 3 (article L. 541-9-1 du code de l’environnement) : Information sur les produits à usage unique contenant une part de plastique

Amendement CD18 de Mme Claire Pitollat.

Mme Claire Pitollat. Cet amendement tend à autoriser les fabricants de contenants à usage unique qui n’incorporent pas de plastique à le préciser sur l’emballage, s’ils le souhaitent. L’article 3 prévoit d’imposer aux fabricants d’indiquer la présence de plastique dans le produit et les effets nocifs pour l’environnement qui en découlent. La surcharge d’informations peut rendre l’étiquette illisible. Nous vous proposons de préférer une approche positive, plus propice à engager un changement de comportement chez le consommateur.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. L’adoption de cet amendement ferait tomber mon amendement de modification ainsi que ceux de mes collègues de l’opposition. Or le mien me semble préférable en ce qu’il tend à rendre obligatoire un marquage sur certains produits contenant une part de plastique. Il vise ainsi ceux dont l’aspect laisse croire qu’ils sont en carton ou en papier alors qu’ils contiennent aussi du plastique. Le développement de ces produits que l’on prétend plus respectueux de l’environnement qu’ils ne le sont en réalité induit le consommateur en erreur et pose des problèmes, notamment en termes de recyclage.

Votre amendement de réécriture adopte la logique inverse de mon amendement parce que le marquage ne serait pas obligatoire mais facultatif et qu’il ne concernerait pas les produits qui contiennent une partie de plastique mais, au contraire, ceux qui n’en contiennent pas.

Enfin, l’entrée en vigueur de cette disposition serait trop tardive puisqu’elle n’interviendrait qu’après l’expérimentation de l’affichage environnemental obligatoire prévu à l’article 2 de la loi « climat et résilience » – au mieux, dans cinq ans.

Mme Claire Pitollat. Pourrions-nous auditionner les acteurs concernés pour mieux comprendre l’influence de l’étiquetage sur le comportement des consommateurs ? Je pourrais alors retirer mon amendement pour que nous parvenions à nous mettre d’accord avant l’examen en séance publique.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Je crains que vous ne soyez trop optimiste en pensant qu’un affichage basé sur le volontariat suffira mais je suis d’accord pour que l’on organise ces auditions dont l’enseignement sociologique sera des plus intéressants.

L’amendement CD18 est retiré.

M. Pierre Meurin. C’est vrai, des emballages en carton peuvent contenir du plastique mais votre position est radicale en ce que vous souhaitez marquer tous les produits contenant du plastique, même les bouteilles d’eau en plastique dont la composition est évidente ! J’aurais préféré que nous retenions la proposition plus consensuelle de Mme Pitollat.

M. Bruno Millienne. Le groupe Démocrate a fait un effort pour rédiger un article 1er consensuel qui ne mette pas en danger les filières et retenir la date du 1er janvier 2025 qui convient à tout le monde. Nous devions tout de même montrer, dans ce texte, notre détermination à interdire les plastiques. C’est pourquoi nous préférons l’amendement plus contraignant du rapporteur qui vise à informer clairement le consommateur de la présence de plastique. Le consommateur y sera sensible car c’est un combat auquel il est attaché.

Mme Danielle Brulebois. Je préférais l’amendement de Mme Pitollat qui présentait l’avantage de ne pas surcharger inutilement les étiquettes. Rappelez-vous les difficultés que nous avons rencontrées pour imposer, à la suite de la loi AGEC, la signalétique Triman et l’info-tri sur les étiquettes !

Vouloir indiquer la présence de plastique dans les emballages part d’une bonne intention mais c’est oublier que le plastique a été remplacé par des substances beaucoup plus dangereuses : des cartons empreints d’encre ou de substances nocives, des bambous traités et moins recyclables, des cartons contenant des membranes en plastique qui ne sont plus recyclables alors que le plastique mono-matériau l’était.

M. Hubert Ott. Nous vivons dans un monde où la transparence est de rigueur. Lorsqu’un objet d’apparence inoffensive se révèle receler des composants nocifs, il faut l’indiquer. Je soutiendrai l’amendement du rapporteur, par égard pour les consommateurs.

M. Hubert Wulfranc. La majorité est en proie à une crise majeure ! Je remarquerai simplement que malgré les trésors d’éloquence que déploie le lobby du plastique depuis une semaine pour nous convaincre des bienfaits de ses produits, le groupe Démocrate tient bon et marque une avancée majeure pour l’environnement. Je l’en remercie.

Mme Anne-Cécile Violland. Il est nécessaire d’indiquer clairement la présence de plastique pour inciter les consommateurs à changer de comportement. C’est la meilleure solution pour faire évoluer les mentalités.

Amendement CD19 du rapporteur.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. J’ajouterai simplement que la liste des produits en plastique à usage unique devant obligatoirement faire l’objet d’un marquage est renvoyée à un décret d’application. Seuls sont concernés les produits comportant une part de plastique et dont l’aspect laisse croire qu’ils sont en carton ou en papier. Les bouteilles d’eau en plastique échapperont donc à cette obligation.

La commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CD6 de M. Pierre Meurin.

L’amendement CD5 de M. Pierre Meurin est retiré.

La commission adopte l’article 3 modifié.

Article 4 (articles L. 415-1, L. 541-15-10-1 [nouveau] et L. 541-44 du code de l’environnement) : Limitation de la détention d’objets en plastique à usage unique dans les espaces protégés

Amendement de suppression CD2 de M. Pierre Meurin.

M. Pierre Meurin. L’adoption de cet article conduirait à interdire aux Français d’emporter des bouteilles en plastique lorsqu’ils se promènent en forêt, ce qui serait profondément absurde.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendement CD21 du rapporteur.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. L’amendement tend à confier aux gestionnaires des espaces protégés, qui en ont une vision d’ensemble, le soin de réglementer la détention de produits en plastique à usage unique dont l’abandon serait préjudiciable à l’environnement. Il est bien évident qu’un promeneur pourra emporter une bouteille d’eau en plastique dès lors qu’il ne la jette pas dans la nature.

M. Pierre Meurin. Vous ouvrez la boîte de Pandore. Des maires écologistes très zélés pourraient être tentés de sanctionner des promeneurs.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Cet amendement qui s’inscrit dans une logique d’abandon du plastique va dans le bon sens. La loi AGEC interdit aux sponsors d’imposer l’utilisation de bouteilles en plastique lors d’événements sportifs, de distribuer gratuitement des bouteilles en plastique dans les établissements recevant du public ou dans les locaux professionnels. Elle oblige également les établissements recevant du public à s’équiper d’au moins une fontaine à eau potable accessible au public.

La commission adopte l’amendement CD21 et l’article 4 est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CD7 de M. Pierre Meurin et CD9 de Mme Anne Stambach-Terrenoir tombent.

Après l’article 4

Amendement CD11 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir. Cet amendement tend à interdire la publicité en faveur des bouteilles en plastique jetables. Il répond ainsi à la demande de la Convention citoyenne pour le climat d’interdire la publicité pour les produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre. Un million de bouteilles en plastique sont produites chaque minute dans le monde. Seules 49 % des 25 millions de bouteilles jetées quotidiennement sont recyclées tandis que les bouteilles en plastique et leurs bouchons font partie des dix déchets les plus souvent retrouvés sur les plages.

La publicité pour l’eau en bouteille plastique jetable présente ce produit comme hygiénique et de haute qualité, alors que toutes les eaux en bouteille ne sont pas minérales et que l’eau du robinet offre une consommation accessible à tous. Par ailleurs, il existe des contenants plus durables pour la conditionner et la transporter.

L’État français a déjà limité la publicité pour des raisons de santé publique ou de sécurité. L’urgence écologique le justifie aujourd’hui.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. La loi « climat et résilience » est à l’origine d’importantes avancées pour limiter les publicités en faveur de produits ayant un effet négatif sur l’environnement. Son article 7 interdit la publicité relative à la commercialisation ou faisant la promotion des énergies fossiles. L’article 12 sanctionne plus fortement l’éco-blanchiment ou greenwashing, qui consiste à faire apparaître dans la publicité un produit comme plus écologique qu’il ne l’est en réalité. L’article 14 instaure des codes de bonne conduite afin de réduire significativement les publicités audiovisuelles relatives à des biens et services ayant un effet négatif sur l’environnement.

Concernant l’interdiction de distribuer gratuitement des bouteilles en plastique, depuis janvier 2020, l’utilisation de bouteilles d’eau en plastique dans le cadre des services de restauration collective scolaire est interdite. Depuis janvier 2021, la distribution gratuite de bouteilles en plastique est interdite dans les établissements recevant du public et dans les locaux à usage professionnel. En revanche, une interdiction générale de la distribution gratuite de bouteilles en plastique me semble trop large. Par exemple, en cas de retard important d’un train ou de panne de la climatisation, comment expliquer aux personnes âgées déshydratées, aux femmes enceintes ou aux parents de nourrissons que cette distribution de bouteilles est désormais interdite ?

Avis défavorable.

M. Loïc Prud’homme. Il est bien précisé dans l’amendement qu’il s’agit d’actions commerciales. Si on ne comble pas cette lacune de la loi, la promotion des bouteilles d’eau en plastique perdurera, de manière détournée. Les industriels font preuve d’une imagination sans égale quand il s’agit de contourner les règles protectrices de l’environnement et de la biodiversité.

M. Bruno Millienne. Nous savons recycler et valoriser les déchets plastiques. Ce sont nos concitoyens qui polluent, lorsqu’ils jettent leurs bouteilles en plastique dans la nature ou ne les trient pas. Une interdiction de principe pourrait porter préjudice à nos concitoyens, ne serait-ce qu’en cas de dysfonctionnement du réseau d’eau potable, par exemple à la suite d’un événement climatique grave.

Mme Lisa Belluco. Les écologistes soutiendront cette proposition. Nous avons bien progressé ces dernières années et il ne s’agit, à présent, que de faire un petit pas de plus, celui de ne plus promouvoir l’achat de bouteilles en plastique jetables ! Je pense que nous en sommes capables !

La commission rejette l’amendement.

Amendement CD10 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir. La sortie du tout plastique doit être un objectif prioritaire de la bifurcation écologique. La loi doit proposer des alternatives et interdire les pratiques et activités polluantes. Il nous semble donc nécessaire de contraindre l’industrie de l’eau en bouteille, marché mondial extrêmement rentable, polluant et concentré. Un million de bouteilles en plastique sont produites chaque minute dans le monde. Trois groupes détiennent 76 % des parts de marché et leurs marges sont colossales. En France, des multinationales comme Nestlé Waters, Neptune et Danone bénéficient d’autorisations d’extraction et s’accaparent ainsi les ressources en eau, au détriment des populations locales. Les habitants de ces communes doivent acheter la même eau qui, autrefois, coulait dans leur robinet, 100 à 300 fois plus cher. Il est donc temps d’interdire la mise sur le marché de bouteilles en plastique.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Je partage votre objectif de lutter contre la pollution plastique mais interdire la vente de bouteilles en plastique dès 2024 – c’est-à-dire demain – serait problématique. Elle serait contraire au droit de l’Union européenne et poserait également un problème de conformité à la Constitution dans le cadre du contrôle de proportionnalité du Conseil constitutionnel.

La loi AGEC, la loi « climat et résilience », cette proposition de loi rassemblent une série de mesures progressives pour réduire drastiquement la consommation de plastiques, en particulier celle de bouteilles. C’est cette voie, réaliste et ambitieuse, que nous souhaitons suivre.

M. Pierre Meurin. Attention aux fausses bonnes idées. Pensez-vous réellement que vous ferez disparaître les bouteilles en plastique des supermarchés dans un an et demi ? Ce n’est pas réaliste ! Surtout, les conséquences seraient terribles pour nos industriels et nos emplois. Pourquoi ne pas prendre des mesures pour généraliser la consigne du verre ? Nous devrions y réfléchir pour le long terme.

M. Loïc Prud’homme. Le délai est serré, je le reconnais. Sous-amendez cet amendement pour proposer une date plus réaliste, puisque l’objectif fait consensus.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Beaucoup de mesures ont été prises dans la loi AGEC en faveur du réemploi, y compris la consigne. Ne faisons pas la bêtise de nous imposer des délais trop contraints. Des échéances ont été fixées dans les lois AGEC et « climat et résilience », faisons notre possible pour les respecter.

M. Bruno Millienne. Je comprends les intentions de M. Prud’homme mais les dates et les seuils sont des sujets importants dont on doit discuter avec les acteurs concernés, y compris les industriels, même si l’on n’a pas d’autre choix, finalement, que de les contraindre en leur imposant un délai plus serré que celui qu’ils souhaitent. En tout cas, on ne peut pas décider seuls de dates sans tenir compte des filières industrielles et leur imposer des objectifs qu’elles ne pourront pas tenir.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CD14 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir. Il s’agit de standardiser les emballages en fonction de leur contenu afin de favoriser l’implantation de consignes. Si nous voulons réussir le déploiement à grande échelle du réemploi des emballages, nous devons limiter le nombre de formats d’emballage disponibles et favoriser la fabrication d’emballages standardisés, notamment en verre. Je pense en particulier aux secteurs de la vente à emporter et de la restauration collective. C’est un préalable indispensable au déploiement des consignes obligatoires.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Je suis favorable à votre amendement sur le fond mais il est satisfait par l’article 65 de la loi AGEC, qui dispose que les éco-organismes du secteur de l’emballage définissent des gammes standards d’emballages réemployables pour les secteurs de la restauration ainsi que pour les produits frais et les boissons. Cela étant, je ne crois pas que cette mesure soit très efficace. Je vous invite donc à retirer votre amendement pour que nous y travaillions avant l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

M. Bruno Millienne. Les mesures que nous votons ont des conséquences. Certains grands groupes, comme Coca Cola, changent leur bain de nettoyage six fois plus qu’avant et utilisent donc six fois plus d’eau. Nous devons en tenir compte.

Amendement CD13 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir. Cet amendement tend à porter l’objectif de vente en vrac à 25 % en 2024 et à 50 % en 2030. Nous reprenons les seuils proposés par la Convention citoyenne pour le climat en décalant d’une année le premier objectif du fait de l’inertie du Gouvernement et du retard pris dans le développement de la vente en vrac.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. Vous proposez de modifier l’article 23 de la loi « climat et résilience » qui concerne le développement de la vente en vrac. Les dates d’entrée en vigueur de la mesure, les commerces et les surfaces de vente concernés par la vente en vrac ont fait l’objet de nombreuses concertations avec les parties prenantes. Cette mesure ambitieuse a été décidée par notre majorité mais une entrée en vigueur dès 2024 ne serait pas réaliste comme l’ont montré les auditions menées dans le cadre de l’examen de la loi « climat et résilience ». Il me paraît délicat de revenir sur une position adoptée il y a à peine un an. Je vous invite à retirer l’amendement, sinon avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 5 (nouveau) : Rapport sur les mesures d’accompagnement des acteurs publics et privés dans leurs efforts de réduction de l’usage du plastique

Amendement CD1 de M. Stéphane Delautrette.

M. Stéphane Delautrette. Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport détaillant les mesures prévues pour accompagner les acteurs publics et privés dans leurs efforts de réduction de l’usage des plastiques. Ce thème a été évoqué à plusieurs reprises et, puisque nous ajoutons des restrictions à des dispositions issues, notamment, de la loi AGEC, il conviendrait d’instaurer des dispositifs de soutien financier et technique pour accompagner les acteurs concernés par la loi, si elle est adoptée.

M. Jimmy Pahun, rapporteur. On boucle la boucle de la commission ! Je rappelle tout de même que les industriels projettent de produire deux fois plus de plastique dans les vingt ans qui viennent et que si nous parvenions à réduire notre consommation de plastique de 50 % et à aller vers 90 % de recyclage, nous pourrions faire chaque année des économies de gaz et de fioul correspondant à la consommation de la République tchèque. Nous devons donc nous efforcer d’amener nos concitoyens et nos industriels à opérer une vraie révolution – et je ne parle même pas de l’exportation des déchets plastiques, qui vont partout à travers le monde.

Cette loi a pour but de rappeler tout ce qui a été fait et tout ce que nous devons faire pour poursuivre le travail au long de ce mandat. Je suis donc favorable à cet amendement, car les industriels sont les premiers avec qui nous devrons discuter et qu’il faudra aider à aller vers des produits plus vertueux.

La commission adopte l’amendement.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous avons achevé l’examen des amendements.

M. Pierre Meurin. Le groupe Rassemblement national soutient l’ensemble des amendements de réécriture déposés sur les trois premiers articles. Demeure, en revanche et malheureusement, une ligne rouge : la possibilité laissée aux élus locaux d’interdire le transport d’objets en plastique en forêt. C’est ce qui nous fera voter contre l’ensemble du texte. Nous verrons si vous souhaitez trouver des compromis avant la séance publique. Pour nous, le travail consiste plutôt à lutter contre la grande masse de la délinquance environnementale – je pense par exemple aux décharges sauvages, contre lesquelles il conviendrait de renforcer l’arsenal répressif et préventif.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Je laisserai, bien évidemment, ma collègue Claire Pitollat exposer l’explication de vote de notre groupe Renaissance, mais je voudrais vous renvoyer au récent rapport de la Cour des comptes sur la gestion des déchets en France. Des marges de manœuvre existent, du moins pour ce qui relève d’une politique largement déconcentrée et décentralisée et des éco-organismes. La France a un peu de retard dans la capacité à recycler les plastiques, notamment parce que l’extension de consignes de tri peine à se mettre en place. Nous avons, par ailleurs, des difficultés à organiser ou à préparer la collecte des biodéchets. Il nous reste donc, globalement, des marges de progrès par rapport à nos voisins. Nous serions, en outre, avisés d’aller questionner nos partenaires que sont les collectivités territoriales, syndicats et éco-organismes en vue de faire toujours mieux dans la gestion des déchets, afin d’éviter de les retrouver dans la nature, mal recyclés ou traités en deçà des objectifs fixés par la loi.

Mme Anne-Cécile Violland. Nous pouvons nous réjouir des avancées proposées par ce texte et je remercie M. Pahun et ses collaborateurs pour ce travail effectué dans une ambiance de collégialité et d’échanges très fructueux.

Mme Claire Pitollat. Je remercie, au nom du groupe Renaissance, Jimmy Pahun pour cette proposition de loi et le travail collégial qui a été effectué. Nous avons eu l’occasion de renforcer ce que nous avions engagé avec la loi AGEC et la loi « climat et résilience ». Nous avons maintenant deux ans et demi, jusqu’à 2025, pour contrôler et évaluer – car c’est aussi le rôle du Parlement – la mise en œuvre d’une filière de recyclage de l’ensemble des plastiques.

Mme Marie Pochon. Je l’ai dit dans mon propos liminaire, la filière de recyclage classique suscitera malheureusement d’autres enjeux tels que, potentiellement, la surproduction de plastique nécessaire pour rendre viable cette filière. Il y a là un enjeu environnemental majeur, ainsi que des enjeux de santé et des enjeux économiques importants.

Nous regrettons que l’ambition du texte, notamment pour ce qui concerne l’article 1er, ait été revue à la baisse. Nous aurions en effet pu avoir une vraie loi du XXIe siècle, qui nous fasse entrer vraiment dans l’ambition écologique que représente la suppression des plastiques. Nous nous accordons tous sur les objectifs, mais malheureusement pas sur les moyens. Le groupe Écologiste-NUPES s’abstiendra donc et proposera, lors de la discussion en séance publique, de rétablir l’article 1er tel qu’il était rédigé précédemment.

M. Benjamin Saint-Huile. Mon propos fera écho à la dernière intervention : il y a un décalage entre l’écriture initiale du texte et ce qui est finalement retenu. Il me semble en outre qu’un ou deux amendements de Mme Stammbach-Terrenoir mériteraient un travail préalable à l’examen en séance. En effet, à propos de la disparition progressive des bouteilles en plastique, vous êtes arc-boutés sur la date de 2024 et sans doute avez-vous eu raison, car les aspects calendaires sont compliqués, mais je retiens la proposition de notre collègue et je pense que vous redonneriez une ambition à ce texte en acceptant de tracer une trajectoire de disparition progressive des bouteilles en plastique.

M. Hubert Ott. Je sais qu’un très grand nombre d’entre vous sont des adversaires résolus du plastique quand il échappe à tout contrôle et se diffuse dans l’environnement, mais je voudrais témoigner de ce que j’ai vu récemment dans une entreprise qui met de l’eau de source dans des bouteilles en PET, ou polytéréphtalate d’éthylène. Bien guidé sur le site par les techniciens et les responsables de l’entreprise, j’ai constaté que ce matériau permet d’envisager un recyclage en circuit fermé. C’est l’enjeu de demain : si le recyclage réussit, on aura gagné une bataille contre le plastique tout en maintenant dans le réseau certains plastiques qui rendront des services aussi bien aux usagers, du fait de leur légèreté, qu’au monde du travail, parce que cette activité génère beaucoup d’emplois. C’est aussi la source d’une évidente économie d’énergie, car refondre du plastique coûte moins cher en énergie que, par exemple, travailler le verre.

Mme Anne Stambach-Terrenoir. Comme ma collègue Marie Pochon, dont je partage pleinement la position, je suis très déçue du sort de l’article 1er. Toutefois, nous n’empêcherons pas l’adoption du texte et nous abstiendrons, dans l’attente du travail à venir.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

 

Table ronde avec des associations environnementales et M. Robert Barouki

Zero Waste France*

Mme Moïra Tourneur, responsable du plaidoyer

Association santé environnement France

M. Pierre Souvet, président

Fondation Tara Océan*

M. Henri Bourgeois Costa, directeur des affaires publiques - plaidoyer « Plastique »

Surfrider Foudation Europe*

Mme Diane Beaumenay-Joannet, responsable du plaidoyer « Déchets aquatiques »

M. Robert Barouki, chef de service en biochimie métabolomique et protéomique à l’hôpital Necker-Enfants malades, directeur de l’unité Inserm 1124

 

Conservatoire du littoral

Mme Hélène Syndique, directrice adjointe

Mme Guillemette Rolland, directrice de l’action foncière et des systèmes d’information

 

Table ronde « État et collectivités territoriales »

Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires - Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

M. Vincent Coissard, sous-directeur « Déchets et économie circulaire »

Agence de la transition écologique (Ademe)

M. Roland Marion, directeur « Économie circulaire »

Association des maires de France (AMF)

Mme Sylviane Oberlé, chargée de mission « Prévention des pollutions »

Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

 

Table ronde avec des professionnels des déchets

Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec)*

M. Manuel Burnand, directeur général

M. Christophe Viant, président de Federec Plastiques

Mme Agathe Maury, chargée de mission de Federec Plastiques

Syndicat national des entrepreneurs de la filière Déchet (Snefid)*

Mme Guénola Gascoin, secrétaire générale

Mme Cécile Janvier, chargée de mission

Citeo

Mme Sophie Genier, directrice des services « Recyclage »

M. Thibault Boucher, conseiller « Affaires publiques »

Fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (Fnade)*

Mme Clotilde Vergnon, responsable « Recyclage et filières REP »

M. Clément Bernard, chargé de mission « Plastique »

M. Thomas Sauvaget, responsable « Relations institutionnelles »

Mme Catherine Klein, directrice générale de Valorplast

 

Table ronde avec des représentants de l’industrie agroalimentaire

Association nationale des industries alimentaires (ANIA)

M. Mickaël Nogal, directeur général

M. Xavier Arrom, responsable « Environnement et économie circulaire »

Danone*

Mme Marie Piednoir, Sustainable Packaging Manager, France

Mme Marion Bouissou-Thomas, responsable du pôle « Affaires publiques & B Corp », France

Nestlé France*

M. Mathieu Tuau, directeur « Corporate Packaging »

M. Fabio Brusa, directeur des affaires publiques et européennes

Yoplait France*

M. Yves Legros, directeur général

M. Florian Trohay, responsable « RSE et développement durable »

Mme Christine Eysseric Rocca, directrice « Communication et stratégie RSE » de la coopérative Sodiaal

Table ronde avec des représentants d’entreprises de la plasturgie

Conseil national de l’emballage

M. Michel Fontaine, président

M. Brunon Siri, délégué général

Plastalliance*

M. Joseph Tayefeh, secrétaire général

M. Philippe Cohu, vice-président de Plastalliance en charge du recyclage et de l’économie circulaire, président de Soparco

M. Luc-Eric Krief, porte-parole de Plastalliance et président du groupe SD2M

Plastics Europe

M. Jean Yves Daclin, directeur général de Plastics Europe France

Mme Véronique Fraigneau, directrice des affaires publiques et de la communication de Plastics Europe France

M. Christian Block, directeur de la chaîne des styréniques de Plastics Europe

M. Martin Lefeuvre, directeur conseil, Communication & Institutions

Polyvia*

M. Marc Madec, directeur « Développement durable » de Polyvia

M. Franck Dumasdelage, General Manager de Sirap France

M. Gilles Istin, Managing Director de KNAUF Industries France

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 


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   contribution Écrite reçue

Syndifrais*

* Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 


([1]) Cour des comptes et chambres régionales des comptes, Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser, rapport public thématique, septembre 2022.

([2])  Human rights watch, “It’s as If They’re Poisoning Us” The Health Impacts of Plastic Recycling in Turkey , septembre 2022, https://www.hrw.org/sites/default/files/media_2022/09/turkey0922web_0.pdf

([3])   Stéphane Mandard et Angèle Pierre, En Turquie, nouvelle poubelle de l’Europe, le recyclage du plastique nuit gravement à la santé et à l’environnement, Le Monde, 21 septembre 2022, https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/09/21/en-turquie-nouvelle-poubelle-de-l-europe-le-recyclage-du-plastique-nuit-gravement-a-la-sante-et-a-l-environnement_6142491_3244.html#:~:text=du%20l%C3%A2cher%2Dprise-,En%20Turquie%2C%20nouvelle%20poubelle%20de%20l%27Europe%2C%20le%20recyclage,450%20000%20tonnes%20par%20an

([4]) Break Free From Plastic et Center for International Environmental, Winter Is Coming: Plastic Has To Go. A case for decreasing plastic production to reduce the European Union’s dependence on fossil fuels and Russia, septembre 2022, p. 5, https://www.ciel.org/wp-content/uploads/2022/09/September-2022-CIEL-BFFP-Winter-is-coming-report.pdf

([5]) Ibid., p. 18.

([6])WWF, Plastics: the costs to society, the environment and the economy, 2021 ,p. 6, https://media.wwf.no/assets/attachments/Plastics-the-cost-to-society-the-environment-and-the-economy-WWF-report.pdf

([7]) Ipsos, Attitudes towards single-use plastics, février 2022, https://www.ipsos.com/sites/default/files/ct/news/documents/2022-02/Attitudes-towards-single-use-plastics-Feb-2022.pdf

([8]) https://www.cancer-environnement.fr/fiches/publications-du-circ/monographies-vol-121-cancerogenicite-quinoleine-styrene-et-styrene-78-oxyde/  

([9]) https://www.anses.fr/fr/system/files/VSR2018SA0032Ra.pdf  

([10]) https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2214289419306738#!

([11]) Seoane M. et al, Polystyrene microbeads modulate the energy metabolism of the marine diatom Chaetoceros neogracil, Environmental Pollution, Vol. 251, 2019.

([12]) https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Rapport_Quel_Potentiel_3R.pdf  

([13])  https://www.reuters.com/investigates/special-report/environment-plastic-oil-recycling/

([14]) À l’exception de certains produits listés par le décret n° 2021-1318 du 8 octobre 2021 relatif à l'obligation de présentation à la vente des fruits et légumes frais non transformés sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique.

 

([15]) https://www.anses.fr/fr/content/pfas-des-substances-chimiques-dans-le-collimateur  

([16]) https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/exposition-a-des-substances-chimiques/perturbateurs-endocriniens/documents/rapport-synthese/impregnation-de-la-population-francaise-par-les-composes-perfluores-programme-national-de-biosurveillance-esteban-2014-2016  

([17]) Règlement délégué (UE) 2020/784 du 8 avril 2020 modifiant l’annexe I du règlement (UE) 2019/1021 du Parlement européen et du Conseil aux fins d’y inscrire l’acide perfluorooctanoïque (PFOA), ses sels et les composés apparentés au PFOA.

([18]) https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2021/03/15/council-approves-conclusions-on-the-eu-chemicals-strategy-for-sustainability/  

([19]) https://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2007:136:0003:0280:fr:PDF  

([20])  https://www2.assemblee-nationale.fr/content/download/320346/3119124/version/2/file/2020_0063_rapport_pollution_plastique-compress%C3%A9.pdf

([21]) https://portals.iucn.org/library/sites/library/files/resrecfiles/WCC_2020_RES_069_FR.pdf