N° 292

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 octobre 2022.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023 (n° 273),

 

PAR M. Jean-René CAZENEUVE,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 18
 

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT et MOBILITÉ durables :

 

PAYSAGE, EAU ET BIODIVERSITÉ

 

EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET MÉTÉOROLOGIE

 

PRÉVENTION DES RISQUES

 

CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L’ÉCOLOGIE,
DU DÉVELOPPEMENT ET DES MOBILITÉS DURABLES

 

FONDS D’ACCÉLÉRATION DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE
DES TERRITOIRES

 

Rapporteurs spéciaux : Mme Alma DUFOUR et M. Sébastien ROME

 

Députés

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS des rapporteurs spÉciaux

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. LE PROGRAMME 113 : un effort en faveur de la prÉservation de l’eau et de la biodiversité qui n’est pas À la hauteur des besoins

A. Le budget du programme 113 progresse en 2023 pour permettre la mise en œuvre de la stratÉgie nationale pour la biodiversitÉ

B. Le Budget des opÉrateurs du programme 113 ne rEflÈte pas la nécessitÉ de protÉger la ressource en eau et la biodiversitÉ

1. Les moyens humains et financiers des agences de l’eau restent stables malgré les alertes sur la gestion de la ressource en eau

2. Le conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres

3. L’office français de la biodiversité

4. Les parcs nationaux

II. LE PROGRAMME 159 : Des moyens humains enfin stables pour l’expertise et l’ingéniÈrie environnementales

A. Le budget du programme 159 est en augmentation

B. Les moyens allouÉs aux opÉrateurs du programme : Une stabilitÉ en 2023 qui ne compense pas des annÉes de rÉduction d’effectifs

1. La gouvernance du CEREMA est révisée pour intégrer les collectivités territoriales

2. Les missions de l’IGN continuent d’évoluer

3. Le Gouvernement a enfin pris conscience du rôle central de Météo-France pour la stratégie au changement climatique

III. Le programme 181 : la politique de prÉvention des risques n’est pas assez ambitieuse pour faire face au changement climatique

A. Le Budget du programme 181 n’augmente pas suffisamment pour entraÎner un vÉritable tournant dans la politique de prÉvention des risques

1. Les moyens alloués à la réglementation et au contrôle des installations classées pour la protection de l’environnement doivent encore être renforcés

2. L’augmentation des moyens de l’Autorité de sûreté nucléaire doit être anticipée dans les années à venir

3. Les crédits du Fonds de prévention des risques naturels majeurs sont en retrait, alors même que les besoins d’adaptation augmentent

B. Les moyens financiers allouÉs aux opÉrateurs du programme continuent de progresser

1. L’ADEME est aujourd’hui un opérateur sur-mobilisé après avoir été fragilisé pendant plusieurs années

2. L’Institut national de l’environnement industriel et des risques

IV. Le programme 217 : une stabilisation des effectifs qui ne donne pas à l’État les capacitÉs de piloter la transition Écologique

A. Les dÉpenses de personnel se stabilisent

B. Les dÉpenses de fonctionnement augmentent

C. Les dÉpenses d’investissement se maintiennent

V. Le programme 380 crÉe un fonds d’accÉlÉration de la transition Écologique des territoires

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

 

 

 

 

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 85 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances. Les rapporteurs spéciaux déplorent ce faible taux de réponse.

 


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PRINCIPALES OBSERVATIONS des rapporteurs spÉciaux

Les moyens alloués aux politiques de protection de la biodiversité, de prévention des risques et d’adaptation au changement climatique ne sont pas à la hauteur des enjeux. Selon l’institut I4CE, ce sont au moins 2,3 milliards d’euros supplémentaires chaque année qui devraient être investis au titre de l’adaptation ([1]) .

Le budget augmente légèrement et les effectifs sont stabilisés. En comparaison avec la situation des dix dernières années, c’est-à-dire des réductions d’effectifs continues et un budget en stagnation, les rapporteurs spéciaux ne peuvent que s’en réjouir. Ils ne peuvent néanmoins pas s’en satisfaire car en dehors des moyens nouveaux liés au fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, les crédits augmentent pour l’essentiel du fait de la revalorisation du point d’indice

Le réchauffement climatique s’accélère, et entraîne avec lui la multiplication et l’intensification des aléas climatiques, la progression de notre exposition et de notre vulnérabilité face aux risques, et des désastres écologiques tels que la perte de biodiversité sera irrémédiable. En utilisant les méthodes du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur le seul territoire français, des chercheurs du CNRS et de Météo-France ont estimé que d’ici 2100, notre territoire subirait une augmentation 3,8 °C par rapport au début du XXᵉ siècle, et ce dans un scénario d’émissions modérées de gaz à effet de serre ([2]) . Dès lors, les rapporteurs spéciaux estiment qu’il faut commencer dès à présent à préparer notre adaptation à cette hypothèse.

Or, en 2023, le budget alloué à la protection de la biodiversité s’élève à 274,5 millions d’euros ; les moyens finançant l’expertise de l’État en matière environnementale se portent à moins de 500 millions ; le budget de la prévention des risques s’élève à 1,14 milliard d’euros. C’est insuffisant.

Les moyens humains le sont tout autant : en 10 ans, les effectifs du pôle ministériel de l’environnement et de la cohésion des territoires ont diminué de moitié. Ce sont des compétences qui ont été perdues, et qui rendent l’État vulnérable en matière de transition écologique, car incapable de s’appuyer sur ses propres experts. Ce sont aussi des bras qui manquent pour permettre l’utilisation des financements alloués à la transition écologique. Les rapporteurs spéciaux rappellent qu’il faut des personnels formés et efficaces pour permettre le traitement des dossiers des appels à projets, pour allouer des subventions, et pour mettre en œuvre les politiques publiques.

C’est la raison pour laquelle les rapporteurs spéciaux accueillent la création d’un fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires avec réserve. L’existence de ce fonds devrait permettre aux collectivités territoriales d’avoir accès à des financements dont elles manquaient cruellement auparavant. Néanmoins, ces moyens sont insuffisants : il faudrait au moins 10 milliards d’euros par an. Par ailleurs, ces financements sont-ils pérennes dans la mesure où ils ne sont même pas prévus par la loi de programmation des finances publiques ? D’un point de vue pratique, quelles vont être les modalités d’attribution de ces subventions ? Toutes les collectivités pourront-elles vraiment y avoir accès ou est-ce que ces moyens ne bénéficieront finalement qu’à quelques-unes ? L’État est-il vraiment en capacité d’engager 1,5 milliard d’euros, voire 2 milliards d’euros en seulement un an, alors qu’on constate que l’ADEME, malgré de nombreux recrutements ces deux dernières années, a le plus grand mal à traiter l’ensemble des dossiers de subvention qui lui parviennent ?

Ce budget 2023 soulève beaucoup de questions mais n’apporte que peu de réponses aux enjeux soulevés par les rapporteurs spéciaux. Or, notre inaction a un coût, et celui-ci ne fait qu’augmenter.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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   DONNÉES CLÉS

Évolution des crÉdits DES PROGRAMMES 113, 159, 181, 217 ET 380 DE LA MISSION ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

(en millions d’euros)

 

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2022

PLF 2023

Évolution (en %)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution (en %)

113 – Paysages, eau et biodiversité

244,07

274,49

+ 12,47 %

244,08

274,51

+ 12,47 %

159 – Expertise, information géographique et météorologie

471,05

497,75

+ 5,67 %

471,05

497,75

+ 5,67 %

181 – Prévention des risques

1 065,56

1 141,51

+ 7,13 %

1 072,20

1 143,15

+ 6,62 %

217 – Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables

2 874,18

3 004,46

+ 4,53 %

2 916,77

3 021,61

+ 3,59 %

380 – Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires

1 500,00

375,00

Total

4 654,85

6 418,22

+ 37,88 %

4 704,10

5 312,02

+ 12,92 %

Part des programmes 113, 159, 181, 217 et 380 dans le budget de la mission Écologie

21,53 %

22,52 %

22,09 %

19,40 %

Budget total de la mission Écologie

21 624,90

28 495,65

+ 31,77%

21 296,82

27 386,08

28,59 %

Source : projet annuel de performances.

Évolution du plafond d’emplois des programmes 217 et 337 entre 2010 et 2023


(en ETPT)

Source : MTECT.


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   INTRODUCTION

Le présent rapport spécial s’intéresse à cinq programmes de la mission budgétaire Écologie, développement et mobilités durables : les programmes 113 Paysages, eau et biodiversité, 159 Expertise, information géographique et météorologie, 181 Prévention des risques, 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables, et le nouveau programme 380 Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires.

Ces programmes regroupent les financements des politiques publiques en faveur de :

– la protection de la biodiversité et de la ressource en eau ;

– l’expertise publique en matière environnementale et climatique ;

– la prévention des risques naturels et technologiques, qui résultent notamment du dérèglement climatique ;

– l’adaptation des collectivités territoriales au changement climatique.

Ces politiques publiques sont menées par de grands opérateurs rattachés aux différents programmes tels que les agences de l’eau, l’Office français de la biodiversité (OFB), Météo-France, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), l’agence de la transition écologique (ADEME), entre autres.

En 2023, le budget des programmes 113, 159, 181 et 217 semble marquer un changement de trajectoire par rapport aux moyens qui leur ont été alloués au cours de la dernière décennie. S’y ajoute un nouveau programme 380 destiné à soutenir les collectivités territoriales dans leur transition écologique. Au total, ce sont 6,42 milliards d’euros en AE et 5,3 milliards d’euros en CP qui sont prévus au titre du financement des programmes entrant dans le champ du présent rapport spécial.

Les crédits du programme 113 – Paysages, eau et biodiversité progressent de 30,4 millions d’euros en 2023 (+ 12,5 %) essentiellement en raison d’une forte augmentation de la subvention pour charges de service public (SCSP) de l’Office français de la biodiversité (OFB), de l’ordre de 25 millions d’euros.

Les crédits du programme 159 – Expertise, information géographique et météorologie augmentent de 26,7 millions d’euros. Cette augmentation résulte principalement de la compensation de la hausse du point d’indice de la fonction publique pour les opérateurs du programme 159, ainsi que d’une dotation spécifique intégrée à la SCSP de Météo-France pour financer le renouvellement de ses supercalculateurs (15,3 millions d’euros).

Les crédits du programme 181 – Prévention des risques augmentent de 75,9 millions d’euros en AE et de 70,9 millions d’euros en CP, montants qui correspondent pour l’essentiel au solde de l’augmentation de la SCSP de l’Agence de la transition écologique (ADEME) à hauteur de 101,7 millions d’euros en AE et en CP et de la diminution des crédits alloués au Fonds de prévention des risques naturels majeurs (Fonds Barnier) de l’ordre de 30 millions d’euros (fin des crédits alloués à la gestion des conséquences de la tempête Alex).

Les crédits du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables progressent de 130,3 millions d’euros en AE et de 104,8 millions d’euros en CP. Cette progression résulte principalement de l’augmentation des dépenses de personnel du fait de la hausse du point d’indice de la fonction publique (47,8 millions d’euros hors CAS Pensions) et du financement du GVT (25 millions d’euros hors CAS Pensions), mais aussi par l’augmentation des dépenses d’investissement engagées pour la rénovation de la Tour Séquoia (26,31 millions d’euros en 2023) et de la Grande Arche de la Défense (11,23 millions d’euros en 2023).

Enfin, un nouveau programme 380 – Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires est créé au sein de la mission Écologie, développement et mobilités durables. Il est doté de 1,5 milliard d’euros en AE et de 375 millions d’euros en CP pour 2023, et vise à financer les projets des collectivités territoriales dans les domaines de la performance environnementale, de l’adaptation des territoires au changement climatique et de l’amélioration du cadre de vie.

De manière notable, les effectifs des opérateurs et du ministère de la transition écologique ne diminuent plus, après des années de réduction à un rythme soutenu (environ 2 % par an). En 2023, le plafond d’emplois de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) s’élèvera à 457 ETPT, contre 445 ETPT en LFI 2022. Le plafond d’emplois du programme 217 s’élève à 35 162 ETPT en 2023, en augmentation de 4 ETPT, après prise en compte des effets des schémas d’emplois en année pleine et en année courante.

Néanmoins, un examen attentif de ces évolutions en termes budgétaires et d’effectifs montre que les moyens alloués aux politiques publiques portées ces programmes ne sont pas à la hauteur des enjeux, et qu’il n’y a aucune volonté de la part du Gouvernement de véritablement renforcer la capacité du ministère de la transition écologique à piloter la transition énergétique et l’adaptation au changement climatique.

Les réductions d’effectifs de ces dernières années, tant pour le ministère de la transition écologique que pour ses opérateurs, ont en effet conduit à une perte de compétences au sein de l’État qu’il sera difficile de résorber, si les moyens humains prévus en loi de finances initiale ne sont pas alignés avec les besoins en ingénierie et en expertise nécessaires pour accompagner la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l’adaptation au changement climatique. La stabilisation annoncée ne compense pas ces suppressions de postes alors que les missions de l’État et des opérateurs vont augmenter dans les prochaines années.

I.   LE PROGRAMME 113 : un effort en faveur de la prÉservation de l’eau et de la biodiversité qui n’est pas À la hauteur des besoins

La préservation de la biodiversité est un enjeu qu’il faut traiter avec la même importance que les enjeux liés au réchauffement climatique. La crise sanitaire liée à la Covid-19 a montré les liens systématiques qui existent entre biodiversité, santé et économie. Or, cinq types de pressions pèsent sur la biodiversité : la destruction et la fragmentation des espaces naturels, le réchauffement climatique, la surexploitation des ressources, les espaces exotiques envahissantes, et les diverses sources de pollution.

L’état de la biodiversité en France est inquiétant, selon les données de l’observatoire national de la biodiversité :

– seulement 20 % des habitats d’intérêt communautaire du territoire métropolitain et 6 % des écosystèmes humides remarquables sont dans un état de conservation favorable ;

– seulement 43,1 % des rivières, plans d’eau, lagunes et mers côtières sont en bon état écologique ou très bon état écologique ;

– près d’une espèce sur cinq présente un risque de disparition à l’échelle nationale, et ce risque est plus élevé en outre-mer qu’en métropole.

Par ailleurs, les rapporteurs spéciaux souhaitent rappeler que la protection de la biodiversité est également une source de richesse économique : un euro dépensé au titre de la protection de la biodiversité génère en moyenne 2,64 euros de production et 1,31 euro de valeur ajoutée ([3]). Dès lors, le respect de la biodiversité ne devrait jamais être perçu comme une contrainte, mais bien plutôt comme une opportunité de concevoir l’avenir.

A.   Le budget du programme 113 progresse en 2023 pour permettre la mise en œuvre de la stratÉgie nationale pour la biodiversitÉ

Le programme 113 – Paysages, eau et biodiversité est le programme support des politiques de l’eau, de la biodiversité et de la protection du littoral, des milieux marins et des paysages.

En 2023, il est doté de 274,5 millions d’euros en AE et en CP, soit une augmentation de 30,4 millions d’euros (+ 12,47 %).

Évolution des crÉdits du programme 113 en 2023 Par rapport À 2022

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

2022/2023

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

2022/2023

Action 01 – Sites, paysages, publicité

6,54

5,72

– 12,43 %

6,53

5,90

– 9,69 %

Action 02 – Logistique, formation et contentieux

5,39

11,18

+ 107,39 %

5,38

9,91

+ 84,27 %

Action 07 – Gestion des milieux et biodiversité

232,14

257,59

+ 10,96 %

232,18

258,70

+ 11,43 %

113 - Paysages, eau et biodiversité

244,07

274,49

+ 12,47 %

244,08

274,51

+ 12,47 %

Source : PAP 2023.

● Cette progression correspond au solde du montant des mesures suivantes :

– l’augmentation de la subvention pour charges de service public (SCSP) de l’Office français de la biodiversité (OFB) à hauteur de 25 millions d’euros ;

– l’augmentation du financement des missions d’intérêt général de l’Office national des forêts (ONF) à hauteur de 2,5 millions d’euros ;

– l’augmentation des dépenses du programme en faveur de la gestion des grands prédateurs terrestres (loups, ours, lynx) pour un million d’euros ;

– le financement de mesures nouvelles pour 7 millions d’euros afin de renforcer l’action de la DGALN en matière d’approvisionnement de matières critiques (un million d’euros), pour financer la mise en œuvre du Varenne de l’eau et du changement climatique (0,9 million d’euros), pour le cofinancement de programmes LIFE ([4]) (1,6 million d’euros) et des plans nationaux d’actions en faveur des espèces menacées (2 millions d’euros), pour augmenter la subvention du Museum national d’histoire naturelle (un million d’euros) et du Mont-Saint-Michel (0,5 million d’euros) ;

– à un transfert entrant de 3,6 millions d’euros depuis le programme 217 – Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables et le programme 354 – Administration territoriale de l’État de la mission Administration générale et territoriale de l’État, correspondant au transfert des laboratoires d’hydrobiologie des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) vers l’OFB ;

– à un transfert entrant de 0,072 million d’euros du programme 149 – Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l’aquaculture de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales pour financer 1 ETPT supplémentaire au sein de l’Établissement public du marais poitevin ;

– à un transfert sortant de 0,31 million d’euros vers le programme 162 – Interventions territoriales de l’État (PITE) de la mission Cohésion des territoires afin de contribuer à la création d’une action consacrée au Plan Sargasse ;

– à un transfert sortant de 8,45 millions d’euros vers le programme 149 – Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l’aquaculture de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales au titre de la décentralisation aux régions de la gestion des mesures non-surfaciques du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) qui concernent les sites Natura 2000.

● D’un point de vue stratégique, le budget 2023 du programme 113 – Paysages, eau et biodiversité est marqué par la mise en œuvre de la Stratégie nationale biodiversité 2030 (SNB 2030).

La SNB 2030 constitue la réponse de la France aux engagements pris au niveau international en matière de protection et de restauration de la biodiversité. Le premier volet de la SNB a été adopté et présenté en mars 2022, mais sera enrichi de cibles et d’indicateurs, et devra intégrer les objectifs internationaux qui seront décidés en décembre 2022 lors de la Conférence des Nations Unies sur la biodiversité (COP 15) qui se déroulera à Montréal.

La SNB 2030 s’articule autour des trois axes stratégiques suivants :

– protéger et restaurer la nature : protéger les écosystèmes, les espèces stratégiques, lutter contre les espèces exotiques envahissantes, déployer des aires protégées sur 30 % de notre territoire (dont 10 % d’aires de protection forte), etc. ;

– accompagner la transition écologique des activités humaines les plus néfastes : limiter les pollutions des sols, de l’eau et des milieux marins, réduire l’artificialisation des sols, stopper l’étalement urbain, promouvoir les solutions fondées sur la nature, etc. ;

– soutenir l’évolution d’une société plus en harmonie avec l’environnement : protéger notre santé, former et sensibiliser, développer les partenariats avec le secteur privé, soutenir la jeunesse, etc.

Les objectifs portés par la SNB 2030 irriguent l’ensemble du programme 113, qui en est le principal levier de financement. Néanmoins, il est prévu que le programme 380 – Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires contribue également au financement de la mise en œuvre de la SNB par les collectivités territoriales.

B.   Le Budget des opÉrateurs du programme 113 ne rEflÈte pas la nécessitÉ de protÉger la ressource en eau et la biodiversitÉ

1.   Les moyens humains et financiers des agences de l’eau restent stables malgré les alertes sur la gestion de la ressource en eau

Les agences de l’eau, au nombre de six, sont des établissements publics créés en 1964 ([5]) et réformées par la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques ([6]). Elles participent, au niveau d’un ou de plusieurs bassins hydrographiques, à la mise en œuvre des politiques nationales de l’eau et de préservation de la biodiversité, qui s’inscrivent elles-mêmes dans les objectifs de l’Union européenne en la matière. Leurs interventions ont pour finalité de contribuer à l’atteinte du bon état des eaux et de la préservation des écosystèmes naturels, en réduisant l’impact des activités humaines par la préservation des ressources, et de contribuer à la satisfaction des besoins des usagers par la recherche de l’équilibre entre les ressources et les utilisations rationnelles de l’eau.

● Les ressources financières des agences sont issues des redevances qu’elles perçoivent en provenance de tous les usagers de l’eau selon les principes « pollueur-payeur » et « préleveur-payeur ». Les agences de l’eau sont aujourd’hui le principal opérateur percevant des taxes dans le champ de l’eau et de la biodiversité. Les deux principales redevances perçues par les agences de l’eau sont la redevance pour pollution domestique et la redevance pour modernisation des réseaux de collecte.

Depuis la loi de finances initiale pour 2016, les taxes affectées aux six agences de l’eau font l’objet d’un plafonnement, qui est précisé à l’article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 ([7]) et qui s’élève à 2,197 milliards d’euros depuis 2021. L’éventuel excédent de recettes est reversé au budget général de l’État. Pour les rapporteurs spéciaux, il est regrettable que les recettes des agences de l’eau soient ainsi ponctionnées par l’État, au détriment du principe selon lequel « l’eau finance l’eau », et alors même que la pression sur la ressource en eau va s’accroître dans les années à venir.

Les agences de l’eau ont été impliquées dans le cadre du plan France Relance : elles ont reçu des financements en provenance du programme 362 Écologie de la mission Plan de relance afin de contribuer au versement d’aides en faveur du petit cycle de l’eau et de la restauration écologique des cours d’eau. 253,3 millions d’euros ont déjà été engagés à ce titre. En 2023, les agences de l’eau percevront le solde des crédits de paiements en provenance de la mission Plan de relance, soit une prévision de 84,27 millions d’euros.

● En 2023, le plafond d’emplois des agences de l’eau est fixé à 1 497 ETPT. Ce plafond est stable par rapport à la LFI 2022. Le nombre d’emplois hors plafond prévisionnel augmente (+ 30 ETPT) afin de permettre le recrutement de 16 apprentis et de 11 volontaires du service civique, dans le cadre du programme national Service civique « Jeunes et nature ».

Le schéma d’emplois des agences semble enfin stabilisé depuis 2021. Toutefois, les rapporteurs spéciaux tiennent à rappeler que depuis 2018, c’est une diminution de leur plafond d’emplois à hauteur de 123 ETPT qui a été réalisée.

Évolution du plafond d’emplois des agences de l’eau depuis 2018

Source : DGALN.

Les rapporteurs spéciaux alertent sur la nécessité de renforcer au plus vite les moyens des agences de l’eau. L’été 2022 a montré que l’un des risques majeurs auxquels est exposée la France dans les années à venir est le manque d’eau. Cet été, 117 communes ont en effet été privées d’eau potable. Notre alimentation et notre agriculture seront particulièrement vulnérables dans les années à venir. Le récent rapport publié par des experts du CNRS et de Météo-France ([8]) indique qu’avec un réchauffement réel du territoire français à hauteur de 1,7 °C en 2022 et de 3,8 °C en 2100, la raréfaction de l’eau est un risque majeur pour le pays.

2.   Le conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres

Le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (CELRL) est un établissement public créé en 1975 ([9]) afin de conduire la politique foncière de sauvegarde des espaces naturels dans les cantons côtiers et les communes riveraines des lacs de plus de 1 000 hectares, en métropole et outre-mer. Cet opérateur contribue à la sauvegarde et à la gestion durable de l’espace littoral et des milieux naturels associés.

Les ressources financières du CELRL proviennent essentiellement de l’affectation d’une fraction du droit annuel de francisation et de navigation des navires de plaisance (DAFN), devenu taxe annuelle sur les engins maritimes à moteur (TAEMUP) depuis le 1er janvier 2022. Le plafond d’affectation de cette taxe a été rehaussé de 1,5 million d’euros en 2022 et s’élève désormais à 40 millions d’euros. Les rapporteurs spéciaux encouragent au maintien de cette taxe affectée dans les ressources financières du CELRL, car elle lui garantit une capacité de fonctionnement et d’investissement nécessaire à son action en matière de protection du domaine.

En 2023, le CERLR va également bénéficier de fonds de concours en provenance de l’agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) pour un montant total de 4 millions d’euros, dont un million d’euros versés en 2023.

Le CELRL a également été bénéficiaire d’une enveloppe de 25 millions d’euros au titre du plan de relance, pour le financement de mesures en faveur de la protection du littoral. Les engagements de l’État seront totalement effectués en 2022 et les crédits de paiement correspondant seront soldés en 2023, pour un montant de 10,6 millions d’euros.

Les rapporteurs spéciaux souhaitent attirer l’attention sur la nécessité de protéger de manière beaucoup plus rigoureuse le littoral français, qui est particulièrement exposé à l’érosion côtière et à la montée des eaux dans le contexte du réchauffement climatique.

Les politiques de prévention et d’adaptation actuelles conduisent trop souvent l’État à se décharger de sa responsabilité en matière de prévention des risques sur les communes littorales. Les rapporteurs spéciaux estiment qu’il est impératif que l’État assume le choix d’un scénario de montée des eaux, conforme aux hypothèses de réchauffement formulées par le rapport publié par le CNRS et Météo-France ([10]) pour permettre aux collectivités du littoral d’identifier les zones les plus exposées et d’entamer les démarches d’adaptation et de relocalisation qui en découlent.

Par ailleurs, les règles d’indemnisation des expropriations d’habitations situées en zone menacée, calquées sur le marché immobilier, sont inopérantes car elles ne permettent pas de réduire l’envolée des prix dans les zones touristiques, et qu’elles entraînent une indemnisation trop faible dans les zones non touristiques.

3.   L’office français de la biodiversité

L’Office français de la biodiversité (OFB) est un opérateur créé par le législateur en 2019 ([11]) à partir de la fusion de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).

L’OFB est responsable de cinq missions :

– la police de l’environnement et la police sanitaire de la faune sauvage ;

– la connaissance, l’expertise et la recherche sur les espèces, les milieux et les usages ;

– l’appui à la mise en œuvre des politiques publiques ;

– la gestion et l’appui aux gestionnaires d’espaces naturels ;

– l’appui aux acteurs de mobilisation de la société.

L’OFB est implanté dans tous les territoires, en métropole et en outre-mer, avec des directions et délégations nationales, des directions régionales et des services départementaux.

● Le premier contrat d’objectifs et de performance (COP) de l’OFB a été signé le 18 janvier 2022. Il définit la feuille de route stratégique pour l’établissement pour la période 2021-2025, en fixant les orientations stratégiques suivantes :

– concourir à la transition écologique ;

– agir dans les territoires ;

– avancer avec l’ensemble des partenaires ;

– bâtir une culture d’établissement, partager une vision commune.

Ce COP 2021-2025 sera traduit dès 2023 par l’entrée en vigueur du premier programme d’intervention de l’OFB, qui doit en décliner les objectifs et les priorités en une stratégie d’intervention.

● Les ressources de l’OFB résultent à la fois d’une contribution annuelle des agences de l’eau, prévue par l’article 135 de la loi de finances pour 2018, de l’ordre de 383 millions d’euros, et d’une subvention pour charges de service public (SCSP), versée par le budget général de l’État.

La SCSP de l’OFB est en forte progression en 2023 : 78,25 millions d’euros, contre 53,01 millions d’euros en 2022. 25 millions d’euros de crédits nouveaux sont ainsi intégrés à la SCSP pour l’année 2023 afin de réduire le déficit de l’opérateur et d’assurer le financement de ses missions dans le cadre de son COP 2021-2025. Selon les informations communiquées aux rapporteurs spéciaux par le ministère de la transition écologique, la hausse de la subvention pour charges de service public doit également permettre de couvrir les dépenses supplémentaires induites par la revalorisation du point d’indice de la fonction publique et la hausse des coûts de l’énergie pour l’opérateur.

Les rapporteurs spéciaux émettent des réserves sur la capacité de cette enveloppe supplémentaire à couvrir l’ensemble de ces coûts et demandent à ce que la prise en charge de la hausse du point d’indice et de l’augmentation des coûts de l’énergie ne se fasse pas au détriment des politiques publiques menées par l’OFB en 2023. Les objectifs fixés par le COP de l’OFB apparaissent à la hauteur des enjeux en matière de biodiversité, mais encore faut-il que les moyens humains et budgétaires de l’opérateur le soient aussi.

Dans le cadre du plan de relance, l’OFB a bénéficié d’une enveloppe de 85,32 millions d’euros sur la période 2021-2022 pour financer les mesures relatives à la protection des aires protégées (19 millions d’euros), à la restauration écologique (19,32 millions d’euros) et à la thématique de l’eau en outre-mer (47 millions d’euros). En 2023, l’OFB doit percevoir le solde des crédits de paiement destinés à financer ces projets, pour un montant prévisionnel de 24,7 millions d’euros.

● Les emplois de l’OFB continuent de progresser en 2023 : le plafond d’emplois de l’opérateur s’élève à 2 727 ETPT, contre 2 643 ETPT en 2022. Il faut néanmoins tenir compte du transfert de 69 ETPT au titre du transfert des activités des laboratoires d’hydrobiologie jusqu’ici réalisées par les DREAL vers l’OFB. Hors mesures de transfert, le plafond d’emplois augmente de 15 ETPT. Ce schéma d’emplois positif doit notamment permettre la création d’une nouvelle équipe au sein de la brigade mobile d’intervention dédiée aux grands prédateurs terrestres, prioritairement ciblée sur les Pyrénées et le Massif Central.

Les rapporteurs spéciaux se réjouissent de l’augmentation des emplois rémunérés par l’OFB en 2023, mais souhaitent attirer l’attention sur la nécessaire amélioration du dialogue social au sein de l’établissement. Les fusions successives des différents opérateurs de la biodiversité depuis 10 ans, accompagnées de transferts en provenance des services de l’État vers l’opérateur, ont fortement déstabilisé les agents et augmenté les risques psychosociaux. L’opérateur a affirmé aux rapporteurs spéciaux mettre tout en œuvre pour améliorer le dialogue social et tenir compte des difficultés rencontrées par ses agents. Toutefois, cet opérateur ne maîtrise pas les facteurs d’origine ministérielle ou parlementaire, et notamment le plafond d’emplois, l’évolution des statuts ou encore les grilles de rémunération. Il appartient donc à la représentation nationale de se montrer vigilante lors du vote du budget afin de garantir des conditions de travail satisfaisantes aux agents de l’OFB et de leur permettre d’exercer efficacement leurs missions d’intérêt général.

4.   Les parcs nationaux

En 2022, il existe onze parcs nationaux. Ces établissements publics assurent la protection d’environ 8 % du territoire terrestre de la métropole et en outre-mer. Ils représentent plus de 5 millions d’hectares, dont plus de la moitié relève de zones à protection forte. Les parcs nationaux ont trois missions principales :

– le développement des connaissances sur le patrimoine ;

– la protection et la restauration de ce patrimoine ;

– l’accueil et la sensibilisation du public.

Chaque parc dispose d’une charte qui correspond à un projet de territoire et qui est établie pour une durée de 15 ans. Elle définit les objectifs et les modalités d’application de la réglementation au cœur du parc, d’une part, et les orientations et moyens de protection, de mise en valeur et de développement durable de l’aire d’adhésion d’autre part.

Lors de la COP15 qui doit se tenir à Montréal au mois de décembre 2022, il est prévu que les parcs nationaux constituent la vitrine emblématique de la politique française en matière d’aires protégées. En 2023, les parcs nationaux contribueront à la mise en œuvre de la nouvelle SNB 2030 et à la poursuite de la stratégie nationale pour les aires protégées 2030 (SNAP 2030).

● Les ressources financières des parcs nationaux sont constituées par :

– un financement annuel en provenance de l’OFB dont la contribution en 2023, s’élèvera à 69,7 millions d’euros ;

– des subventions pour charges d’investissement dont le montant total s’élève à 4,7 millions d’euros en AE et à 4,4 millions d’euros en CP ;

– le reliquat des crédits de paiement restant à décaisser (6,3 millions d’euros) sur la totalité de l’enveloppe de 19 millions d’euros qui avait été allouée aux parcs nationaux au titre des mesures en faveur de la biodiversité du plan de relance.

● En 2023, le plafond d’emplois des parcs nationaux est stable, à 843 ETPT. En revanche, il est prévu une augmentation du nombre d’emplois hors plafond (+ 24 ETPT) en raison du recrutement d’apprentis, de contrats aidés et de volontaires du service civique.

II.   LE PROGRAMME 159 : Des moyens humains enfin stables pour l’expertise et l’ingéniÈrie environnementales

Pour affronter les conséquences du changement climatique que connaîtra le territoire français dans les années à venir, un fort niveau d’expertise sera nécessaire sur deux volets complémentaires :

– la connaissance des phénomènes climatiques et environnementaux auxquels le territoire français est exposé ;

– la maîtrise des solutions envisageables pour adapter les infrastructures à leur exposition aux risques.

Dès lors, les opérateurs et les services du ministère de la transition écologique qui agissent dans le champ de l’expertise environnementale ont un rôle fondamental à jouer dans la capacité de l’État à mener des politiques de prévention et d’adaptation efficaces.

A.   Le budget du programme 159 est en augmentation

Le programme 159 Expertise, information géographique et météorologie porte les crédits de financement d’un service et de trois opérateurs qui agissent dans le champ de l’expertise environnementale : le commissariat général au développement durable (CGDD), le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), l’institut national de l’information géographique et forestière (IGN) et Météo-France.

En 2023, les crédits du programme 159 s’élèvent à 497,75 millions d’euros en AE et en CP, en hausse de 26,7 millions d’euros (+ 5,67 %).

Évolution des crÉdits du programme 159 en 2023 par rapport à 2022

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

(en %)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

(en %)

10 – Gouvernance, évaluation, études et prospective en matière de développement durable

15,20

17,70

16,44 %

15,20

17,70

16,44 %

11 – Études et expertise en matière de développement durable

188,97

194,07

2,70 %

188,97

194,07

2,70 %

12 – Information géographique et cartographique

85,58

88,91

3,89 %

85,58

88,91

3,89 %

13 – Météorologie

181,30

197,07

8,70 %

181,30

197,07

8,70 %

159 – Expertise, information géographique et météorologie

471,05

497,75

5,67 %

471,05

497,75

5,67 %

Source : PAP 2023.

Cette progression s’explique par :

– une augmentation de 2,5 millions d’euros liée à l’anticipation de dépenses supplémentaires par rapport aux années précédentes, dues notamment à un besoin de renouvellement des outils numériques du CGDD et au déploiement du plan national des achats durables ;

– une augmentation de 5,1 millions d’euros de la SCSP du CEREMA liée à la compensation de la revalorisation du point d’indice de la fonction publique intervenue au 1er juillet 2022 et à la revalorisation de personnels chercheurs dans le cadre de la loi de programmation pour la recherche ([12]) ;

– une augmentation de 3,3 millions d’euros de la subvention pour charge de service public de l’IGN, au titre de la compensation de la revalorisation du point d’indice et de la revalorisation des personnels chercheurs, là encore dans le cadre de la loi de programmation pour la recherche ;

– une augmentation de 16 millions d’euros de la subvention pour charges de service public de Météo-France qui se décompose en deux enveloppes : d’une part, 9,2 millions d’euros viennent permettre la poursuite du financement du supercalculateur de Météo-France ; d’autre part, 5,3 millions d’euros financent la compensation de la revalorisation du point d’indice de la fonction publique, la revalorisation des personnels chercheurs au titre de la loi de programmation pour la recherche, et la hausse du coût de l’énergie.

B.   Les moyens allouÉs aux opÉrateurs du programme : Une stabilitÉ en 2023 qui ne compense pas des annÉes de rÉduction d’effectifs

Les rapporteurs spéciaux constatent que les moyens humains des opérateurs du programme 159 sont enfin stabilisés, après des années de baisse quasi continue des effectifs. Ils regrettent que ces réductions aient été tellement importantes qu’il sera impossible de reconstituer ces emplois à court terme. Or, le manque d’expertise au sein de l’État en matière environnementale et de transition écologique se fait déjà largement ressentir.

Évolution des effectifs des opÉrateurs du programme 159 depuis 2018

(en ETPT)

Source : MTE.

1.   La gouvernance du CEREMA est révisée pour intégrer les collectivités territoriales

Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’              aménagement (CEREMA) est un établissement public créé en 2013 qui constitue un centre de ressources techniques et scientifiques au service de l’État et des collectivités territoriales. L’opérateur apporte son concours à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques publiques en matière d’aménagement du territoire et d’adaptation au changement climatique.

Le CEREMA intervient dans six domaines d’action : l’expertise et l’ingénierie territoriales ; le bâtiment ; la mobilité ; les infrastructures de transport ; l’environnement et les risques ; la mer et le littoral.

Son contrat d’objectifs et de performance (COP) 2021-2024 soutient sept axes stratégiques qui portent sur l’appui en expertise à l’État et aux collectivités territoriales, le développement des compétences scientifiques et techniques, et l’optimisation de la performance de l’opérateur.

En 2022, le CEREMA a par ailleurs fait l’objet d’une réforme importante de ses statuts et de sa gouvernance qui devrait conduire à une évolution de son modèle économique.

La réforme de la gouvernance du CEREMA

L’article 159 de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale ([13]) (loi 3DS) a organisé une évolution statutaire du CEREMA afin d’en réformer la gouvernance. Le décret du 16 juin 2022 ([14]) est venu préciser les modalités d’application de ces dispositions législatives.

Le CEREMA voit sa position d’expert de référence en matière de transition écologique et de cohésion des territoires consacrée, et devient le premier établissement public à gouvernance partagée entre l’État et les collectivités territoriales, grâce à un mécanisme de « quasi-régie conjointe » dont l’objectif est de permettre aux collectivités, comme c’était déjà le cas pour l’État, d’attribuer des marchés publics au CEREMA sans avoir à appliquer les obligations de publicité et de mise en concurrence prévue par le code de la commande publique.

Les collectivités territoriales peuvent désormais adhérer au CEREMA et accéder de manière simplifiée à l’offre de services de l’établissement afin de mobiliser plus facilement les solutions innovantes qu’il développe.

Les collectivités adhérentes peuvent également exercer une influence sur les orientations stratégiques et les déclinaisons opérationnelles du CEREMA en choisissant des représentants au conseil d’administration ou en participant aux comités d’orientation régionaux.

En 2023, la priorité du CEREMA est de mettre en œuvre les conditions de réussite de la nouvelle gouvernance de l’établissement, en suscitant le maximum d’adhésions possibles pour permettre le bon exercice du contrôle de l’établissement par les collectivités territoriales, et en répondant efficacement à leurs demandes d’accompagnement potentielles. L’établissement se donne pour objectif l’adhésion de 500 collectivités au premier semestre 2023.

Pour 2023, la SCSP du CEREMA s’élèvera à 194 millions d’euros, en augmentation de 5 millions d’euros. L’établissement bénéficie aussi de recettes propres, issues des prestations d’expertise et d’ingénierie qu’il fournit, et dont le montant annuel est de l’ordre de 45 millions d’euros. En parallèle de la montée en puissance de sa nouvelle gouvernance, l’opérateur espère voir augmenter le volume de ces recettes propres.

Les rapporteurs spéciaux se félicitent de cette réforme et souhaitent qu’elle puisse permettre au CEREMA de retrouver une place importante parmi les opérateurs du ministère de la transition écologique, et qu’elle offre dans le même temps aux collectivités territoriales la possibilité d’identifier un interlocuteur pertinent pour les aider dans leurs choix d’aménagement du territoire, mais aussi dans la définition même de leurs besoins en matière de transition écologique. Ils espèrent que les financements portés par le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires permettront de soutenir la recherche d’ingénierie et d’expertise des collectivités locales.

Le plafond d’emplois du CEREMA est stable en 2023, après des années de réduction d’effectifs. Les rapporteurs spéciaux souhaitent que ce soit la fin d’une trajectoire baissière qui a contribué à la perte de compétences et d’expertise au sein de l’État et de ses opérateurs.

2.   Les missions de l’IGN continuent d’évoluer

L’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) est un établissement public dont la mission est de produire de l’information géographique sur la surface du territoire national et d’en organiser la diffusion en France.

● Le contrat d’objectifs et de performance (COP) de l’IGN pour la période 2020-2024 prévoit une évolution des activités traditionnelles de l’IGN, consacrées à l’entretien et à la diffusion de données génériques, vers la production de données directement adaptées à l’appui aux politiques publiques et susceptibles d’être financées par les porteurs de ces politiques.

En 2023, il est prévu que l’IGN initie ou poursuive plusieurs chantiers emblématiques. En premier lieu, l’opérateur doit conforter ses nouvelles activités de « cartographe de l’Anthropocène » via une observation plus continue du territoire et la publication régulière de cartes sur plusieurs enjeux écologiques majeurs : vigueur des forêts, évolution du relief et des cours d’eau, potentiel de biodiversité ; artificialisation des sols.

L’IGN doit également poursuivre la constitution d’un modèle 3D de la France via le programme national « LIDAR HD », financé par le fonds pour la transformation de l’action publique. Le modèle numérique pourra ensuite être utilisé pour simuler les effets de certaines décisions publiques.

L’opérateur joue également un rôle important dans la mise en place de la Géoplateforme nationale : il s’agit de créer une plateforme nationale des données géographiques souveraine, conçue à terme comme une infrastructure mutualisée entre les différents producteurs.

● La SCSP de l’IGN s’élève à 85,63 millions d’euros en 2023, en hausse de 3,3 millions d’euros afin de compenser la revalorisation du point d’indice de la fonction publique. Le plafond d’emplois de l’IGN reste stable, à 1 447 ETPT.

3.   Le Gouvernement a enfin pris conscience du rôle central de Météo-France pour la stratégie au changement climatique

Météo-France est un établissement public créé en 1993, dont les missions recouvrent la sécurité météorologique des personnes et des biens, la fourniture du service météorologique à la navigation aérienne, l’appui météorologique aux forces armées, l’élaboration et la diffusion des connaissances relatives aux évolutions passées et futures du climat.

Depuis 2022, Météo-France dispose de 39 implantations territoriales pérennes en métropole.

Le contrat d’objectifs et de performance 2022-2026 de Météo-France fixe les orientations stratégiques à cinq ans de l’établissement dans le contexte du changement climatique, qui conduit à une intensification des épisodes météorologiques dangereux. Cinq axes prioritaires ont été identifiés :

– contribuer à la sécurité des personnes et des biens, en particulier en progressant dans l’anticipation des phénomènes météorologiques dangereux ;

– accompagner ses partenaires et clients dans leurs démarches d’adaptation au changement climatique ;

– innover et anticiper les nouveaux besoins de services des clients institutionnels, aéronautiques et commerciaux de l’opérateur ;

– stimuler la réactivité et l’innovation dans l’établissement ;

– affirmer sa responsabilité sociétale en matière de qualité de vie au travail et d’éco-responsabilité.

● Météo-France est l’un des opérateurs du ministère de la transition écologique qui a été le plus mis à contribution au titre des réductions d’effectifs. Entre 2013 et 2022, ce sont 734 ETP qui ont été supprimés, dont 440 sur la période 2018-2022.

Selon les informations communiquées aux rapporteurs spéciaux, la situation créée par les fortes baisses d’effectifs depuis 2010, et par une pyramide des âges défavorable conduisant à près de 600 départs prévisibles d’ici 2027, entraîne de fortes tensions et a des conséquences sur le bien-être des agents. Les difficultés de recrutement pèsent aujourd’hui fortement sur le quotidien des services, avec un allongement des durées de vacance de postes qui dégrade les conditions de travail des personnels.

En 2022, le schéma d’emplois initialement prévu exigeait une nouvelle diminution de – 95 ETP. La crise sanitaire ayant généré des retards dans la mise en place des réorganisations et dans le déroulement de certains projets techniques, Météo-France avait demandé l’étalement de ce schéma d’emplois. Un schéma d’emplois de – 60 ETP avait été retenu pour 2022, et le reste de la baisse des effectifs (– 35 ETP) avait été reporté à 2023.

Pour la première fois depuis plus de 10 ans, le schéma d’emplois de Météo-France est positif en 2023 : + 6 ETPT.

● En parallèle des diminutions d’effectifs, la SCSP de Météo-France a également diminué au cours des dix dernières années : – 38 millions d’euros, hors subvention spécifique en faveur du financement des moyens de calcul intensif.

En 2023, la SCSP de Météo-France augmente de 16 millions d’euros.

5,3 millions d’euros viendront financer la compensation de la revalorisation du point d’indice de la fonction publique et la hausse des coûts de l’énergie pour l’opérateur.

9,2 millions sont prévus au titre du financement du renouvellement du supercalculateur de l’opérateur. Cet investissement a des implications très importantes sur la capacité de l’opérateur à progresser dans l’anticipation et la localisation des phénomènes dangereux, dans le contexte actuel du changement climatique, avec des évènements météorologiques extrêmes qui deviennent plus fréquents et plus intenses. Le renouvellement du supercalculateur de Météo-France à horizon 2025 aura un coût total de 345,7 millions d’euros.

Par ailleurs, après les orages mortels survenus en Corse le 18 août 2022, le Gouvernement a décidé l’acquisition et le déploiement de cinq bouées météorologiques ancrées en Méditerranée afin de mieux anticiper les évènements pluvio-orageux intenses. Cet investissement représente un volume de dépenses supplémentaires de 2,5 millions d’euros, ventilées sur les exercices 2023 (0,5 million d’euros) et 2024.

Les ressources de l’établissement sont également constituées de recettes propres, de l’ordre de 130 millions d’euros par an, qui découlent des redevances aériennes et des recettes commerciales de l’opérateur.

III.   Le programme 181 : la politique de prÉvention des risques n’est pas assez ambitieuse pour faire face au changement climatique

Dans le contexte du changement climatique, l’exposition aux risques du territoire français, en métropole et en outre-mer, ne va faire qu’augmenter. Les principaux risques liés au réchauffement climatique en Europe sont les suivants :

– la multiplication et l’intensification des vagues de chaleur, et en particulier des vagues de chaleur marines ;

– la sécheresse et les pénuries d’eau, qui auront un impact sur la consommation des particuliers et sur la production agricole ;

– les effets délétères des aléas climatiques, et en particulier des vagues de chaleur, sur la santé humaine.

Face à ces risques, les enjeux sont multiples. Il s’agit d’abord de mieux les connaître, afin d’améliorer les réponses que peuvent y apporter les pouvoirs publics. Ensuite, il faut construire une véritable culture du risque, en sensibilisant la population aux risques liés au changement climatique. Enfin, il faut élaborer des politiques de prévention pertinentes, sur la base de scénarios suffisamment pessimistes afin de prendre en compte les marges d’erreur et les hypothèses les plus défavorables en matière de réchauffement climatique. À ce titre, le rapport publié par les chercheurs du CNRS et de Météo-France nous donne un scénario de réchauffement du territoire français qui devrait bouleverser nos politiques d’adaptation.

A.   Le Budget du programme 181 n’augmente pas suffisamment pour entraÎner un vÉritable tournant dans la politique de prÉvention des risques

Le programme 181 Prévention des risques élabore et met en œuvre les politiques publiques de prévention des risques industriels, miniers et naturels, de lutte contre les pollutions, de sûreté nucléaire et de radioprotection. Il finance également l’Agence de la transition écologique (ADEME) et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS).

En 2023, les crédits du programme 181 s’élèvent à 1,14 milliard d’euros en AE et en CP, en augmentation de 76 millions d’euros (+ 7,13 %).

Évolution des crÉdits du programme 181 en 2023 Par rapport À 2022

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

(en %)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

(en %)

Action 01 – Prévention des risques technologiques et des pollutions

61,36

60,77

– 0,96 %

63,30

62,71

– 0,93 %

Action 09 – Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

63,60

66,92

+ 5,22%

68,30

71,62

+ 4,86%

Action 10 – Prévention des risques naturels et hydrauliques

37,15

37,50

+ 0,94%

37,15

37,50

+ 0,94%

Action 11 – Gestion de l’après-mine et travaux de sécurité, indemnisations et expropriations sur les sites

40,28

41,25

+ 2,42%

40,28

41,25

+ 2,42%

Action 12 – Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie

598,35

700,00

+ 16,99%

598,35

700,00

+ 16,99%

Action 13 – Institut national de l'environnement industriel et des risques

29,82

30,07

+ 0,81%

29,82

30,07

+ 0,81%

Action 14 – Fonds de prévention des risques naturels majeurs

235,00

205,00

– 12,77 %

235,00

200,00

– 14,89 %

181 - Prévention des risques

1 065,56

1 141,51

+ 7,13%

1 072,20

1 143,15

+ 6,62%

Source : MTE.

Cette progression s’explique principalement par :

– une augmentation de 3,3 millions d’euros des crédits alloués à l’action 9, qui finance l’Autorité de sûreté nucléaire, notamment afin de prendre en compte la revalorisation du point d’indice de la fonction publique ;

– l’augmentation de 101,6 millions d’euros de la subvention pour charges de service public de l’ADEME ;

– la diminution de l’ordre de 30 millions d’euros des crédits de financement du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, en raison de la disparition des crédits complémentaires qui y avaient été inscrits en 2022 pour couvrir les dépenses consécutives à la tempête Alex.

1.   Les moyens alloués à la réglementation et au contrôle des installations classées pour la protection de l’environnement doivent encore être renforcés

L’action 1 Prévention des risques technologiques et des pollutions du programme 181 porte les crédits alloués à la lutte contre les pollutions générées par les installations industrielles et agricoles et à la phase opérationnelles des plans de préventions des risques technologiques (PPRT), avec notamment l’exécution de mesures foncières, de mesures alternatives ou de mesures supplémentaires de réduction des risques et d’accompagnement des riverains pour la réalisation des travaux de renforcement.

Les installations industrielles ou agricoles qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients, soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité ou la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, sont des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), et sont de fait soumises à une réglementation stricte. L’inspection des installations classées instruit les demandes d’autorisation et d’enregistrement des ICPE, puis contrôle et suit l’ensemble des installations.

Les personnels travaillant dans le champ du programme 181 sont portés par l’action n° 16 Personnels œuvrant pour la politique de prévention des risques du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables. 1 272 ETPT sont ainsi affectés au contrôle des ICPE.

Dans le cadre de la démarche « Action publique 2022 », et compte tenu des enseignements tirés de l’accident dit de « Lubrizol – Normandie Logistique » du 26 septembre 2019, il a été décidé d’accroître la présence sur le terrain des inspecteurs d’ICPE pour assurer une meilleure application de la réglementation, tout en tenant compte des enjeux environnementaux de chaque installation pour adapter la fréquence des visites. L’objectif fixé est d’atteindre une augmentation de 50 % du nombre de contrôles annuels.

Le PLF 2023 poursuit le renforcement des effectifs de l’inspection des ICPE avec la création de 25 postes supplémentaires, après 20 postes supplémentaires en 2022, et 30 postes supplémentaires en 2021. Les rapporteurs spéciaux considèrent que ces moyens supplémentaires sont insuffisants pour atteindre les objectifs fixés, mais aussi pour prendre en considération le fait que les accidents sur des installations classées vont devenir de plus en plus fréquents avec l’accélération du changement climatique et l’intensification des aléas météorologiques. Malgré les gains en efficacité des contrôles des ICPE, il est mathématiquement impossible d’en augmenter le nombre à hauteur de 50 % si les effectifs, eux, ne progressent que de 2 %.

2.   L’augmentation des moyens de l’Autorité de sûreté nucléaire doit être anticipée dans les années à venir

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est une autorité administrative indépendante créée par la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire ([15]). Ses missions sont de cinq ordres :

– l’ASN contribue à l’élaboration de la réglementation en donnant son avis au Gouvernement sur les projets de décrets et d’arrêtés ministériels et en prenant des décisions réglementaires à caractère technique ;

– l’ASN instruit l’ensemble des demandes d’autorisation individuelles des installations nucléaires, et accorde ces autorisations, à l’exception des autorisations majeures des installations nucléaires de base telles que la création et le démantèlement ;

– l’ASN vérifie le respect des règles et des prescriptions auxquelles sont soumises les installations et activités entrant dans son champ de compétence, notamment au travers de son activité d’inspection ;

– l’ASN informe le public, les parties prenantes et le Parlement de son activité et de l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France ;

– en cas de situation d’urgence, l’ASN contrôle les opérations de mise en sûreté de l’installation prises par l’exploitant et adresse des recommandations aux autorités compétentes.

L’action 9 Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection du programme 181 porte les effectifs et les crédits de personnel de l’ASN, ainsi que ses dépenses de fonctionnement, d’investissement et d’intervention engagées au titre de la réalisation de ses cinq missions fondamentales. Néanmoins, une partie des moyens en termes d’appui d’expertise pour l’ASN provient de l’action 11 Recherche dans le domaine des risques du programme 190 Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables et sont affectés à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

● En 2023, le plafond d’emplois de l’ASN s’élève à 457 ETPT. Le schéma d’emplois pour 2023 est positif, avec + 6 ETP valorisés pour 2023 à + 4 ETPT, et en conséquence une extension en année pleine de +2 ETPT à prévoir pour 2024. Les personnels de l’ASN bénéficient de la revalorisation du point d’indice de la fonction publique, qui se traduit par une augmentation de 1,6 million d’euros de son budget.

L’ASN demande des créations de postes depuis 2018, qui n’ont pas été entièrement satisfaites. Elle a récemment réexaminé ses besoins et a sollicité la création de 21 ETP sur la période 2023-2027. Or, selon les informations communiquées aux rapporteurs spéciaux, les effectifs demandés pour l’année 2023 lui ont été accordés, mais pas la totalité des ETP dont l’Autorité a estimé avoir besoin dans les années à venir. Ainsi, elle n’obtiendrait à ce stade que 14 ETP au lieu des 21 demandés.

● Pourtant, les rapporteurs spéciaux estiment que les enjeux majeurs liés à la sûreté nucléaire ne devraient pas conduire le Gouvernement à négliger les demandes de l’ASN, d’autant plus que celui-ci affiche une volonté de relancer la construction d’installations nucléaires

En effet, l’ASN considère que la qualité d’exploitation des installations se maintient à un niveau satisfaisant, mais que les performances de certaines centrales nucléaires apparaissent durablement en retrait en matière de sûreté, notamment celles de Dampierre‑en‑Burly, de Chinon et de Cruas-Meysse.

Par ailleurs, la fin de l’année 2021 a été marquée par la découverte de fissures sur des circuits raccordés aux tuyauteries principales du circuit primaire de plusieurs réacteurs (phénomène de corrosion sous contrainte). EDF a engagé un programme approfondi de contrôle et d’expertise pour faire progresser sa connaissance du phénomène et de ses implications à l’échelle du parc. L’ASN estime que la stratégie présentée par EDF le 13 juillet 2022 est appropriée, mais que l’arrêt actuel de nombreux réacteurs nucléaires, et les difficultés en termes d’approvisionnement énergétique que cela génère, doivent interroger les autorités politiques sur la place que doit prendre l’anticipation dans la construction de la stratégie énergétique de la France.

Les enjeux liés au vieillissement des centrales nucléaires françaises sont à cet égard majeurs. Une majorité de réacteurs français ont été construits entre 1977 et 1984. L’apparition de défauts génériques graves sur des matériels irremplaçables (notamment la cuve du réacteur et l’enceinte de confinement) pourrait causer l’arrêt en chaîne de nombreuses centrales dans un temps relativement court. L’arrêt de la fabrication de certains composants remplaçables, ou la disparition de leur construction pourrait également conduire à des difficultés.

L’ASN a alerté les rapporteurs spéciaux sur les enjeux qui entourent les décisions prises aujourd’hui en matière de politique énergétique et sur leurs conséquences pour la sûreté nucléaire. Les prochains réacteurs de type EPR (Evolutionary Power Reactor), s’ils sont construits, ne seront pas opérationnels avant le milieu de la décennie 2030. Or, cela correspond à la période au-delà de laquelle ni les exploitants, ni l’ASN ne sont en capacité de confirmer qu’il est possible d’exploiter les centrales construites au cours des années 1970 et 1980 pendant plus de 50 ans. Pour l’ASN, cette difficulté doit être anticipée afin que le besoin en électricité, qui va être grandissant au cours des prochaines années, n’emporte pas la priorité sur la sûreté nucléaire. En d’autres termes, les rapporteurs spéciaux considèrent qu’il est impératif de progresser en matière d’économies d’énergie et de développer de manière massive les énergies renouvelables dans les prochaines années.

Il est très probable que l’ASN sera extrêmement sollicitée par les autorités politiques en appui à la prise de décision. Les rapporteurs estiment que les moyens qu’elle demande pour les prochaines années doivent absolument lui être accordés, afin de garantir sa pleine capacité à exercer efficacement ses missions. Ils rappellent que le Parlement lui-même s’appuie sur les contrôles et les recommandations de l’ASN pour prendre des décisions majeures sur la politique énergétique de la France.

3.   Les crédits du Fonds de prévention des risques naturels majeurs sont en retrait, alors même que les besoins d’adaptation augmentent

Le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit « Fonds Barnier » a été créé par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement ([16]). Il permet de soutenir des mesures de prévention ou de protection des personnes et des biens exposés aux risques naturels majeurs. Il peut être mobilisé par les collectivités territoriales, les petites entreprises, les particuliers, les établissements publics fonciers et les services de l’État afin de garantir la préservation des vies humaines et de mettre en place des démarches de prévention des dommages selon un cadre fixé par le code de l’environnement.

Jusqu’à son intégration au budget général de l’État au 1er janvier 2021, le FPRNM était abondé par un prélèvement obligatoire de 12 % sur la prime payée par les assurés au titre de la garantie contre les catastrophes naturelles (garantie dite « CatNat »). Les recettes nettes comptabilisées sur le compte FPRNM, géré par la Caisse centrale de réassurance (CCR), étaient plafonnées depuis 2018 à 131,5 millions d’euros par an, une fois les frais de gestion prélevés. La différence avec le montant total du prélèvement sur les primes des contrats d’assurance était reversée au budget général de l’État.

Avec la budgétisation du FPRNM, le prélèvement affecté au FPRNM a été supprimé et remplacé par un prélèvement annuel d’un taux identique au profit du budget général de l’État. Lors de l’intégration du FPRNM au budget général de l’État, les ressources du fonds ont été portées à 205 millions d’euros par an en AE et en CP. À titre exceptionnel, 30 millions d’euros supplémentaires avaient été inscrits sur le FPRNM en LFI 2022 pour prendre en charge les conséquences de la tempête Alex dans les Alpes-Maritimes.

Les rapporteurs spéciaux déplorent qu’en PLF 2023, les crédits alloués au FPRNM retrouvent leur niveau initial de 2021, c’est-à-dire 205 millions d’euros en AE et 200 millions d’euros en CP. Bien que les 30 millions d’euros de crédits alloués à la gestion des suites de la tempête Alex n’aient eu qu’un caractère temporaire, il est certain que les besoins ne vont faire qu’augmenter dans les années à venir. De plus, le Fonds Barnier ayant pour objectif de mettre en œuvre des politiques de prévention des risques naturels majeurs, il est regrettable que l’investissement de l’État en la matière ne soit pas croissant.

B.   Les moyens financiers allouÉs aux opÉrateurs du programme continuent de progresser

1.   L’ADEME est aujourd’hui un opérateur sur-mobilisé après avoir été fragilisé pendant plusieurs années

L’Agence de la transition écologique (ADEME) est un établissement public qui a pour missions principales l’amplification du déploiement de la transition écologique, la contribution à l’expertise collective, et l’innovation et la préparation de l’avenir. Elle agit dans neuf grands domaines d’activité : le changement climatique, l’air et les mobilités, les énergies, la production durable, l’urbanisme durable, l’agriculture et les forêts, l’économie circulaire, les bâtiments, et le changement des comportements et la mobilisation.

Progressivement, cet opérateur s’est vu confier par l’État un nombre croissant de missions dans tous les domaines de la transition écologique. Il a été particulièrement sollicité lors de la mise en œuvre du plan de relance.

Le budget de l’ADEME est piloté sur trois grands segments :

– un budget incitatif, de l’ordre de 970 millions d’euros en 2022 ;

– un budget « plan de relance », qui s’élevait à 385 millions d’euros en 2022 ;

– un budget de moyens, à hauteur de 119 millions d’euros en 2022.

● Le Fonds Chaleur, mis en place en 2008, est l’un des programmes phares de l’ADEME. Il vise à soutenir la production de chaleur à partir de sources d’énergie renouvelables. Il encourage le développement de la biomasse, de la géothermie, du solaire thermique, des énergies de récupération, ainsi que des réseaux de chaleur utilisant ces énergies.

Sur la période 2009-2021, l’ADEME a engagé 2,9 milliards d’euros au titre du Fonds Chaleur pour soutenir près de 6 600 opérations, qui ont généré un montant d’investissements de près de 11 milliards d’euros. L’effet levier du Fonds Chaleur est donc très important. En 2021, les émissions évitées grâce aux nouvelles installations soutenues par le Fonds Chaleur sont estimées à environ 700 000 tonnes de CO2 par an.

Le budget du Fonds Chaleur en début d’année 2022 s’élevait à 370 millions d’euros, en hausse de 6 % par rapport à 2021. En mars 2022, dans le cadre du plan de résilience pour faire face aux conséquences de la crise générée par la guerre en Ukraine, le budget 2022 alloué au Fonds Chaleur a connu une augmentation de 150 millions d’euros (+ 40 %) pour atteindre 520 millions d’euros.

Depuis 2009, l’ADEME a également élaboré un dispositif de soutien financier, le fonds « Économie circulaire et déchets », destiné à accompagner la politique nationale de gestion des déchets, en intégrant un fort degré de priorité à la prévention et au recyclage, en particulier des déchets plastiques et organiques. L’accompagnement de la mise en place du tri à la source des biodéchets par les communes ou les intercommunalités est un des chantiers majeurs de l’ADEME pour l’année 2023.

Dans le cadre du plan de relance, l’ADEME s’est vue confier en 2020 des moyens supplémentaires pour accompagner et déployer des projets de transition écologique. Au total, ce sont 535 millions d’euros que l’agence a pu engager au titre des mesures de relance, notamment en matière d’économie circulaire. La majeure partie de ces crédits devrait être engagée à la fin de l’année 2022, même si des reports de crédits sont d’ores et déjà envisagés en raison d’un trop grand nombre de dossiers à instruire et à contractualiser au même moment.

● En 2023, la SCSP de l’ADEME sera d’un montant de 700 millions d’euros, en progression de plus de 100 millions d’euros par rapport à 2022. Cette augmentation, en dehors des mesures financées par le plan de relance et le plan Investir pour la France de 2030, vise à maintenir le niveau de crédits du Fonds Chaleur à hauteur de 520 millions d’euros, et de porter les moyens alloués au programme « Économie circulaire et déchets » à 200 millions d’euros en 2023.

● En 2023, le schéma d’emplois de l’ADEME sera positif, avec une augmentation prévue à hauteur de 90 ETP. Cette progression résulte en premier lieu de décisions prises en 2022 : afin d’assurer la bonne mise en œuvre des actions du plan de relance et du plan Investir pour la France de 2030, un renforcement des effectifs de l’agence à hauteur de 65 ETP a été octroyé en cours d’année. Le plafond d’emplois prévu en 2022 a ainsi augmenté de 42 ETPT par rapport à la prévision en LFI 2022. À la fin de l’année 2022, il s’établit à 918 ETPT. Par ailleurs, pour 2023, l’évolution des effectifs sous plafond prévoit l’extension en année pleine de 23 ETPT liée aux 65 renforts de 2022, ainsi que l’intégration de 25 ETPT supplémentaires pour pérenniser des moyens humains recrutés en intérim en 2022.

Entre 2013 et 2020, le plafond d’emplois de l’ADEME avait diminué de manière continue, de près de 200 ETPT. Depuis 2020, l’ADEME a été identifiée comme un opérateur central pour la transition écologique, et ses effectifs en 2023 dépasseront le niveau qu’ils ont connu jusqu’en 2013. Les rapporteurs spéciaux regrettent que les gouvernements successifs n’aient pas su anticiper l’importance de cet opérateur, ce qui a conduit à des réductions d’effectifs inutiles durant 7 ans. Ils souhaitent alerter sur cette situation qu’ont subie la quasi-totalité des opérateurs qui agissent dans le champ environnemental, dont le caractère essentiel commence progressivement à être pris en compte par les autorités politiques. Certes, il sera toujours possible d’élever à nouveau les plafonds d’emplois, mais cela se fait au prix d’une perte de compétences et d’expertise au sein des services de l’État sur laquelle il sera difficile de revenir dans un laps de temps très court.

2.   L’Institut national de l’environnement industriel et des risques

L’institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) est un établissement public, expert public de référence pour la maîtrise des risques technologiques, hors risques nucléaire et biologique. Ses activités de recherche, d’appui aux politiques publiques et ses prestations de soutien aux entreprises contribuent à évaluer et prévenir les risques que les activités économiques font peser sur l’environnement, la santé, la sécurité des personnes et des biens.

Le contrat d’objectif et de performance de l’INERIS, qui couvre la période 2021-2025, a recentré l’action de l’INERIS sur son cœur de compétence, en raison de la réduction significative du plafond d’emplois qu’a connue l’opérateur depuis dix ans. Il structure ses actions selon trois thématiques :

– maîtriser les risques liés à la transition énergétique et à l’économie circulaire ;

– comprendre et maîtriser les risques à l’échelle d’un site industriel et d’un territoire ;

– caractériser les dangers des substances et leurs impacts sur l’homme et la biodiversité.

Dans le cadre de sa mission d’appui aux situations d’urgence et de crises environnementales, l’INERIS intervient en appui aux pouvoirs publics en cas d’accident industriel, avec environ 50 sollicitations par an ou en cas de pic de pollution de l’air. L’institut est intervenu en 2019 sur l’incendie des usines de Lubrizol et Normandie Logistique à Rouen via sa cellule opérationnelle 24/24 d’appui aux situations d’urgence (CASU). En 2020, il a été mobilisé après l’explosion sur le port de Beyrouth. Plus récemment, l’INERIS a été mobilisé lors des incendies de forêts de l’été 2022 en Gironde, dans la mesure où un site Seveso a été menacé.

● Le modèle économique de l’INERIS repose sur des dotations publiques, qui représentent environ 55 % de son budget, sur des recettes issues de son activité de services aux entreprises ou de recherche partenariale, et sur des subventions obtenues à la suite d’appels à projets de l’Union européenne ou d’agences nationales (ADEME, Agence nationale de la recherche).

En 2023, sa SCSP est en hausse, à hauteur de 30 millions d’euros, et son plafond d’emplois augmente de 2 ETPT.

IV.   Le programme 217 : une stabilisation des effectifs qui ne donne pas à l’État les capacitÉs de piloter la transition Écologique

Le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables est le programme support des politiques publiques du pôle ministériel qui regroupe le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le ministère de la transition énergétique et les cinq ministères délégués et secrétariats d'État qui leur sont associés, ainsi que le secrétariat d’État chargé de la mer.

La majorité des crédits est constituée par les crédits de rémunération des effectifs du pôle ministériel, dont la répartition par politique publique est fixée dans les actions du programme. Les crédits de fonctionnement et d’investissement de l’administration centrale sont également pilotés par le secrétariat général. Le programme supporte enfin les emplois et crédits de trois autorités administratives indépendantes : la Commission nationale du débat public (CNDP), l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) et la Commission de régulation de l’énergie (CRE).

Évolution des crÉdits du programme 217 en 2023 Par rapport À 2022

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

(en %)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

(en %)

07 – Pilotage, support, audit et évaluations

785,82

831,97

+ 5,87 %

825,84

846,55

+ 2,51 %

08 – Personnels œuvrant pour les politiques de transport

572,60

593,40

+ 3,63 %

572,60

593,40

+ 3,63 %

11 – Personnels œuvrant pour les politiques du programme "Affaires maritimes"

191,82

206,10

+ 7,44 %

191,82

206,10

+ 7,44 %

13 – Personnels œuvrant pour la politique de l'eau et de la biodiversité

266,89

266,54

– 0,13 %

266,89

266,54

– 0,13 %

15 – Personnels œuvrant pour les politiques du programme Urbanisme, territoires et aménagement de l'habitat

655,63

676,46

+ 3,18 %

655,63

676,46

+ 3,18 %

16 – Personnels œuvrant pour la politique de la prévention des risques

255,43

267,85

+ 4,86 %

255,43

267,85

+ 4,86 %

22 – Personnels transférés aux collectivités territoriales

10,21

17,72

+ 73,61 %

10,21

17,72

+ 73,61 %

23 – Personnels œuvrant pour les politiques de l'énergie et du climat

61,15

66,19

+ 8,24 %

61,15

66,19

+ 8,24 %

25 – Commission nationale du débat public

3,53

4,07

+ 15,28 %

3,53

4,07

+ 15,28 %

26 – Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA)

1,96

2,01

+ 2,37 %

1,96

2,01

+ 2,37 %

27 – Commission de régulation de l'énergie (CRE)

18,78

20,07

+ 6,90 %

21,34

22,63

+ 6,07 %

28 – Personnels œuvrant dans le domaine de la stratégie et de la connaissance des politiques de transition écologique

50,36

52,08

+ 3,42 %

50,36

52,08

+ 3,42 %

217 - Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables

2 874,18

3 004,46

+ 4,53 %

2 916,77

3 021,61

+ 3,59 %

Source : MTE.

A.   Les dÉpenses de personnel se stabilisent

Le ministère de l’environnement fait partie des ministères qui ont été le plus mis à contribution pour réaliser des réductions d’effectifs dans l’administration de l’État depuis 10 ans. En incluant les mesures de transferts d’effectifs vers les opérateurs ou les collectivités territoriales, c’est une diminution à hauteur de 30 000 ETPT du plafond d’emplois que l’on peut constater aujourd’hui.

Évolution du plafond d’emplois des programmes 217 et 337 entre 2010 et 2023

(en ETPT)

Source : MTECT

● En 2023, pour la première fois depuis 10 ans, les effectifs du pôle ministériel sont quasiment stabilisés. L’effort de réduction des effectifs qui était demandé au programme 217 (– 2 % par an) a été réduit en 2022 (– 0,6 %), et se présente comme nul en 2023. Le plafond d’emplois du programme 217, programme support des effectifs du ministère de la transition écologique, s’élève à 35 162 ETPT en 2023, soit une baisse de 62 ETPT. Toutefois, cette apparente diminution résulte de mesures de périmètre et de transferts (– 66 ETPT) car à périmètre constant, le plafond d’emplois du programme 217 augmente en réalité de 4 ETPT, après prise en compte des effets des schémas d’emplois en année pleine et en année courante.

Selon les informations communiquées aux rapporteurs spéciaux par le ministère, une revue des missions a été engagée en 2020 afin d’assurer, au regard des priorités gouvernementales, l’adéquation entre les moyens et les objectifs du pôle ministériel, corrélée à des schémas d’emplois exigeants. Cette revue des missions a permis d’identifier plus de 120 chantiers à mener pour le pôle ministériel. Ces derniers impliquent notamment le transfert de missions à d’autres acteurs, la rationalisation de l’organisation des missions à l’échelle territoriale, des mesures de simplification, ainsi que l’allègement de missions d’instruction au niveau départemental, notamment en accélérant la transformation numérique des services.

Les rapporteurs spéciaux ne peuvent que déplorer les réductions d’effectifs subies par le ministère chargé de l’environnement depuis une dizaine d’années. Il est évident que ces coupes budgétaires ont conduit à une perte de compétences pour les services de l’État, compétences qui manqueront dans les années à venir pour mener à bien la transition écologique et l’adaptation au changement climatique. C’est un constat que les rapporteurs spéciaux peuvent déjà observer dans leurs circonscriptions respectives : les collectivités territoriales ne trouvent plus d’interlocuteur, au sein des services de l’État, pour répondre à leurs besoins d’ingénierie, d’expertise, et de soutien technique en matière environnementale.

● Concernant les dépenses de personnel (titre 2), elles s’élèvent à 2,78 milliards en 2023, en progression de 77 millions d’euros par rapport à 2022, hors CAS Pensions (+ 4,2 %). Cette progression s’explique principalement par :

– la revalorisation du point d’indice de la fonction publique à hauteur de 3,5 %, dont l’impact en 2023 sur le programme 217 est de 47,8 millions d’euros (hors CAS Pensions) ;

– le financement du GVT, pour 9 millions d’euros ;

– des mesures de revalorisation catégorielle, pour 8 millions d’euros.

B.   Les dÉpenses de fonctionnement augmentent

Les dépenses de fonctionnement du programme 217 s’élèvent en 2023 à 208,5 millions d’euros en AE et à 187,7 millions d’euros en CP, soit une progression de 36,5 millions d’euros en AE et de 9 millions d’euros en CP. Cette augmentation résulte pour l’essentiel :

– de l’augmentation de la subvention pour charges de service public des deux écoles rattachées au programme à hauteur de 3,09 millions d’euros en AE et en CP, dont 1,4 million pour compenser la revalorisation du point d’indice de la fonction publique ;

– de l’augmentation des dépenses de fonctionnement en lien avec la sphère immobilière à hauteur de 23,7 millions d’euros en AE et de 4,14 millions d’euros en CP, avec notamment 12,4 millions d’euros en AE pour l’énergie et les fluides et 9,8 millions d’euros en AE pour le gardiennage.

– d’une enveloppe de 2,64 millions d’euros en AE pour engager les marchés d’impression et de reprographie ;

– d’une enveloppe de 4,25 millions d’euros en AE pour engager des marchés pluriannuels en matière numérique.

C.   Les dÉpenses d’investissement se maintiennent

En 2023, les dépenses d’investissement du programme 217 s’élèvent à 3,83 millions d’euros en AE et à 41,8 millions d’euros en CP.

Pour l’essentiel, elles visent à financer l’annuité du volet « investissement » du bail emphytéotique administratif de rénovation de la Grande Arche de la Défense (11,23 millions d’euros en 2022) et du crédit-bail pour l’acquisition de la Tour Séquoia (26,31 millions d’euros en 2023).

V.   Le programme 380 crÉe un fonds d’accÉlÉration de la transition Écologique des territoires

Pour accompagner l’effort des collectivités territoriales en matière de transition écologique, le PLF 2023 prévoit la création d’un fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, financé par 1,5 milliard d’euros en AE et 375 millions d’euros en CP. La secrétaire d’État chargée de l’écologie, Bérangère Couillard, a néanmoins annoncé que ce fonds serait finalement abondé à hauteur de 2 milliards d’euros en AE dès 2023.

Les crÉdits allouÉs au programme 380 en 2023

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2022

PLF 2023

LFI 2022

PLF 2023

01 – Performance environnementale

0

505,00

0

126,25

02 – Adaptation des territoires au changement climatique

0

525,00

0

131,25

03 – Amélioration du cadre de vie

0

470,00

0

117,50

380 – Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires

0

1 500,00

0

375,00

Source : MTECT.

Ce nouveau fonds doit permettre d’accélérer la transition écologique selon trois axes, qui correspondent aux trois actions du programme :

– l’action 1 Performance environnementale vise à encourager les actions de performance énergétique en offrant aux collectivités territoriales la possibilité d’accélérer la rénovation énergétique de leurs bâtiments, ou en finançant des projets relatifs à la valorisation énergétique des bio déchets et à la modernisation de l’éclairage public ;

– l’action 2 Adaptation des territoires au changement climatique doit permettre de financer des mesures de prévention des risques naturels, comme les inondations, les risques émergents en montagne, le recul du trait de côte sur le littoral, ou les risques cycloniques en outre-mer, et de concrétiser le financement de la renaturation des villes pour lutter contre les îlots de chaleur urbains, annoncé par la Première ministre le 14 juin 2022 ;

– l’action 3 Amélioration du cadre de vie vise à soutenir des projets de sobriété en matière de mobilité (parking-relais, covoiturage) et de sobriété foncière (fonds friche), à accompagner les collectivités territoriales dans le déploiement des zones à faibles émissions (ZFE), et à financer des actions de préservation de la biodiversité.

Selon les informations communiquées aux rapporteurs spéciaux par la DGALN, les mesures recensées dans le projet annuel de performances ne constituent que des illustrations des types de projets susceptibles d’être financés par le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires.

Il sera demandé aux préfets de région et de département en charge de sélectionner les projets à financer de faire preuve de souplesse, afin d’identifier et de répondre au mieux aux besoins de chaque territoire. Par ailleurs, de manière transversale, les trois actions comporteront des aides au diagnostic et à l’ingénierie afin de soutenir les collectivités qui en ont le plus besoin, soit en amont, dans la définition de leurs besoins, soit en aval, en identifiant les mesures de transition les plus adaptées pour répondre à ces besoins.

Les rapporteurs spéciaux émettent des réserves quant aux modalités de financement et de fonctionnement de ce fonds, car le ministère de la transition écologique n’a pas été en mesure de leur fournir plus de précisions concernant les catégories de collectivités qui pourraient bénéficier du fonds, ni les caractéristiques des projets financés À ce stade, la part du financement étatique dans le financement total des projets n’est pas encore déterminée. Les rapporteurs spéciaux souhaitent que le niveau des crédits proposés en 2023 progresse dans les années à venir, et que l’accès des collectivités territoriales à ces financements reste suffisamment souple afin que toutes, y compris les plus petites communes, puissent en bénéficier.


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   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de ses réunions de 15 heures et 21 heures, le jeudi 20 octobre 2022, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables et entendu Mme Alma Dufour et M. Sébastien Rome, rapporteurs spéciaux des crédits des programmes 113 Paysages, eau et biodiversité, 159 Expertise, information géographique et météorologie, 181 Prévention des risques, 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables et 380 Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires.

L’enregistrement audiovisuel de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu est consultable en ligne.

Après avoir examiné les amendements de crédits et adopté l’amendement II-CF224 (amendement II-1509) et les amendements identiques II-CF770 et II-CF1301 (amendement II-1510), la commission a, contrairement à l’avis défavorable des rapporteurs spéciaux, adopté les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables ainsi modifiés.

La commission a également adopté les amendements II-CF642 (amendement II-1511), II-CF643 (amendement II-1512) et II-CF1301 (amendement II-1514) portant modification de l’état G pour la mission Écologie, développement et mobilité durables.

Elle a enfin adopté plusieurs amendements portant article additionnel rattaché à la mission :

 les amendements identiques II-CF824 et II-CF1299 (amendement II-1516) ;

 les amendements identiques II-CF825 et II-CF1297 (amendement II-1515).

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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

 

France Nature Environnement *

– M. Jean-David Abel, pilote du réseau biodiversité

– Mme Chloé Godefroy, chargée de plaidoyer

 

Le collectif « La déroute des routes »

– Mme Hélène Ibert Mas de Gentil, chercheuse associée en économie internationale au CIHEAM de Montpellier

– Mme Bruno Dalpra, technicien en reconversion

– Mme Enora Chopard

– Mme Joëlle Fesquier

– Mme Audrey Boehly

– M. Marcel Jacquot

 

CLER - Réseau pour la transition énergétique *

– M. Danyel Dubreuil, coordinateur du plaidoyer

 

FNEE-CGT

– M. Philippe Garcia, secrétaire général

– Mme Isabelle Robert, représentante du personnel

 

SNE-FSU

– M. Daniel Gascard, secrétaire général adjoint

– M. Patrick Saint-Léger, secrétaire général adjoint

 

FEETS-FO

– M. François Deneux, secrétaire général du SNP2E-FO

– Mme Cécile Bouvet, déléguée fonctionnelle SNITPECT-FO Cerema

 

GIEC

– M. Gonéri Le Cozannet, chercheur au Bureau des recherches géologiques et minières

 

Office français de la Biodiversité

– M. Denis Charissoux, directeur général délégué Ressources

 

Commissariat général au développement durable

– M. Thomas Lesueur, commissaire général au Développement durable

 

ADEME

– M. Baptiste Perrissin-Fabert, directeur général délégué par intérim

 

CEREMA

– M. Pascal Berteaud, directeur général

 

Association Nationale des Elus du Littoral

– Mme Anne-Sophie Leclère, déléguée générale

 

Secrétariat général du Ministère de la Transition écologique

– M. Guillaume Leforestier, secrétaire général

– M. Vincent Moreau, directeur des affaires financières

– M. Jacques Clement, directeur des ressources humaines

Autorité de sûreté nucléaire

– M. Bernard Doroszczuk, président,

– M. Olivier Gupta, directeur-général

– M. Daniel Delalande, directeur-général adjoint

 

Météo-France

– Mme Virginie Schwarz, présidente directrice générale

– M. Philippe Gonzalez, secrétaire général

 

Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature

– Mme Stéphanie Dupuy-Lyon, directrice générale

– M. Brice Huet, adjoint à la directrice générale

– Mme Sylvie Escande-Vilbois, cheffe de la Mission Performance

– M. Timothée Asensio-Frery, conseiller suivi parlementaire & associations élus locaux

 

Direction Générale de la Prévention des Risques

– M. Cédric Bourillet, directeur général

– M. Patrick Soulé, directeur adjoint

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.


([1]) I4CE, « Se donner les moyens de s’adapter aux conséquences du changement climatique : de combien parle-t-on ? »

([2]) Aurélien Ribes et al, « An updated assessment of past and future warming over France based on a regional observational constraint », 4 octobre 2022

([3]) Rapport d’Emmanuel Delannoy, réalisé à la demande de la Ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, La biodiversité, une opportunité pour le développement économique et la création d’emplois

([4]) Le programme LIFE est un instrument financier de la Commission européenne, dédié au soutien de projets innovants, privés ou publics, dans les domaines de l’environnement et du climat.

([5])  Par la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution.

([6])  Loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques.

([7])  Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

([8]) Aurélien Ribes et al, « An updated assessment of past and future warming over France based on a regional observational constraint », 4 octobre 2022

([9]) Loi n° 75-602 du 10 juillet 1975 portant création du conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres.

([10]) Aurélien Ribes et al, « An updated assessment of past and future warming over France based on a regional observational constraint », 4 octobre 2022.

([11])  Loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 portant création de l’Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement.

([12]) Loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur.

([13]) Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

([14]) Décret n° 2022-897 du 16 juin 2022 modifiant le statut du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

([15]) Loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.

([16]) Loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement.