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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 juin 2023.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE, SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives à l’outre-mer (n° 1226),
PAR M. Charles SITZENSTUHL
Député
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Voir les numéros :
Sénat : 540, 572, 573 et T.A. 106 (2022‑2023).
Assemblée nationale : 1226.
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SOMMAIRE
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Pages
Chapitre Ier Ratification d’ordonnances
Article 1er Ratification d’ordonnances
Chapitre II Modifications du livre VII du code monétaire et financier
Article 2 Application de certaines dispositions du code monétaire et financier en outre-mer
Article 5 Tarification des retraits d’espèce dans un distributeur automatique
Article 6 Corrections d’erreurs de numérotation et de renvois de référence
Articles 7 et 8 Nouvelles compétences pour l’IEDOM et l’IEOM
Chapitre V Le fichier des comptes outre-mer
Chapitre 6 Dispositions transitoires et finales
Article 11 Entrée en vigueur différée de certaines dispositions
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
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Ce texte présente des dispositions essentiellement techniques, relatives au titre VII du code monétaire et financier, qui porte les dispositions relatives à l’outre-mer qui s’inscrivent pour la plupart dans le cadre de l’habilitation donnée au Gouvernement de procéder par ordonnance à la recodification du livre VII par l’article 218 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises.
Le rapporteur rappelle que le droit monétaire, bancaire et financier relève de la compétence de l’État dans toutes les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie. Les dispositions du code monétaire et financier s’appliquent sur mention expresse dans ces territoires, conformément à la décision « Élections municipales du Lifou » ([1]) et sont précisément portées par le livre VII.
Suivant la recommandation du Conseil d’État du 7 janvier 2016 au Gouvernement, la plupart des articles réécrits à l’occasion de la recodification du titre VII du code monétaire et financier, l’ont été sous la forme de tableaux appelés « compteur Lifou », dans un souci de lisibilité et de simplification. C’est également le cas des dispositions du présent projet de loi qui rend applicables en outre-mer des dispositions adoptées par le Parlement après l’habilitation donnée au Gouvernement.
Saisissant l’opportunité de la présence dans le texte d’une ordonnance non spécifique à l’outre-mer, mais soumise également à ratification, présente par cohérence, le Sénat, à l’initiative du rapporteur de la commission des finances, a adopté en première lecture un article additionnel relatif au prolongement d’une expérimentation relative aux nouvelles possibilités d’accès pour les collectivités territoriales au financement participatif.
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Douze articles sont soumis à l’Assemblée nationale.
L’article premier ratifie trois ordonnances.
Deux concernent spécifiquement les outre-mer et ont recodifié les dispositions du livre VII portant les dispositions relatives à l’outre-mer : l’ordonnance du 15 septembre 2021 relative aux titres Ier et II du livre VII du code monétaire et financier et l’ordonnance 2022-230 du 15 février 2022 relatives aux titres III à VIII.
L’ordonnance du 14 septembre 2022, soumise à ratification au présent article par cohérence, modifie quant à elle l’ordonnance du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif et les dispositions les rendant en applicables en outre-mer portées par l’ordonnance du 15 février 2022 précitée.
Le rapporteur précise que l’ordonnance 2022-230 du 15 février 2022, prise en application de l’article 74-1 de la Constitution, doit impérativement être ratifiée dans un délai de dix-huit mois à compter de sa publication aux termes de l’article 74-1 de la Constitution, sous peine de caducité, avant le 26 août 2023.
L’article premier bis, issu d’un amendement du rapporteur de la commission des finances du Sénat, prolonge de deux ans l’expérimentation prévue à l’article 48 de la loi du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances : cette expérimentation ouvre aux collectivités territoriales la possibilité de bénéficier, dès le 1er janvier 2022, de revenus tirés d’un projet de financement participatif obligataire, au profit de tout service public à l’exception des missions de police et de maintien de l’ordre public.
L’article 2 rend applicable de façon expresse en outre-mer les modifications de certains articles relatifs à l’Hexagone du code monétaire et financier par des textes publiés postérieurement aux ordonnances précitées.
L’article 3 supprime une adaptation générique qui était prévue au 8° de l’article L. 711-5 relatif à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française et au 6° de l’article L. 711-6 concernant Wallis-et-Futuna. Elle consistait à remplacer systématiquement les références relatives à la Banque de France par celles à l’Institut d’émission d’outre-mer.
L’article 4 procède à des rectifications au titre II du nouveau livre VII du code monétaire et financier, en particulier à l’article L. 722-3. Celui intègre au titre II la définition de la notion d’argent liquide selon le règlement UE/1672 du 23 octobre 2018.
L’article 5 modifie le 14° des articles L. 752-3 et L. 753-3 pour borner la gratuité des retraits d’espèces dans un distributeur automatique en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française aux seuls retraits aux distributeurs de l’établissement bancaire où le client a domicilié ses comptes.
L’article 6 corrige des erreurs de numérotation des articles de renvoi aux articles L. 773-45 et L. 774-45 relatifs aux dispositions applicables en cas de méconnaissance par les Offices des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française de leurs obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme, de gel des avoirs, d’interdiction de mise à disposition, de jeux et de loteries prohibées.
Les dispositions relatives à la modernisation des missions de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer (IEDOM) et les missions de l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) aux articles 7 et 8 concernent les échanges de données statistiques, l’extension des échanges d’information sur les comptes bancaires aux comptes de toute nature et aux comptes d’épargne réglementée, comme en Hexagone. Il est prévu de réduire le nombre de commissaires aux comptes de l’IEDOM à un. Par parallélisme avec la Banque de France, l’IEOM, pourra également noter la situation financière des entreprises et groupements professionnels volontaires. Ces dispositions n’ont pu être portées par la refonte du livre VII du code monétaire et financier, car la recodification ne s’effectue qu’à droit constant.
L’article 9, supprimé par le Sénat, insère un nouvel article L. 721-28, créé dans une nouvelle sous-section, de manière à préciser le fondement législatif du fichier des comptes outre-mer (FICOM) qui centralise les données sur les comptes de toute nature émanant des deux Instituts d’émission. L’accès à ses données est renvoyé à un arrêté commun des ministres des intérieurs et des outre-mer.
L’article 10 procède à la mise à jour de références à l’article 18 de l’ordonnance n° 2020-115 du 12 février 2020 renforçant le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
L’article 11 prévoit une entrée en vigueur différée des articles L. 721-14 et L. 721-15, ainsi que des articles L. 721-24 et L.721-26 concernant les comptes d’épargne réglementée, la déclaration des coffres-forts, les mandataires et les bénéficiaires effectifs de personnes morales, à l’image des dispositions prévues pour les organismes homologues dans l’Hexagone.
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Suivant le choix fait par le Sénat pour son examen du projet de loi en première lecture, la conférence des présidents, saisie par le président de la commission des finances, a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure de législation en commission.
Cette procédure, régie par les articles 107-1 à 107-3 du règlement de l’Assemblée nationale, prévoit de mettre en valeur l’exercice du droit d’amendement à l’occasion de l’examen en commission, et de ne le limiter en séance publique qu’en vue d’assurer le respect de la Constitution, d’opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, d’autres textes en cours d’examen ou les textes en vigueur ou de corriger une erreur matérielle.
Le recours à cette procédure, particulièrement adaptée aux textes ne nécessitant que peu d’aménagements, essentiellement techniques, pour lesquels le travail en commission est bien adapté, revient à la conférence des présidents, à l’initiative du président de la commission saisie au fond, du président d’un groupe ou du Gouvernement.
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Lors de sa réunion du mercredi 14 juin 2023, la commission a examiné le projet de loi adopté par le Sénat, ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives à l’outre-mer (n° 1226).
M. le président Éric Coquerel. Nous examinons ce matin le projet de loi adopté par le Sénat ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, pour lequel nous avons nommé M. Charles Sitzenstuhl rapporteur.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, nous fait l’honneur de participer à l’examen de ce texte.
Je vous rappelle que, sur ce projet de loi, j’ai proposé que s’applique la procédure de législation en commission (Plec), comme l’avait demandé le rapporteur et comme cela avait été le cas lors de l’examen du texte au Sénat.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme. Je ne vous cacherai pas mon plaisir et mon émotion d’être ce matin à vos côtés en commission, là où j’ai passé plusieurs années, notamment mes mercredis matins. Je regrette sincèrement de devoir vous quitter dans une heure pour me rendre au Conseil des ministres, où je dois présenter une ordonnance.
Je serai donc brève sur cette question pourtant majeure. Depuis la crise financière de 2008, de très nombreuses règles se sont développées en matière de régulation financière, principalement adoptées au niveau européen. À l’instar des dispositions métropolitaines du code monétaire et financier, les dispositions relatives à l’outre-mer se sont multipliées, ce qui rendait absolument nécessaires une réorganisation et une clarification.
Dans un premier temps, le choix d’un code spécifique à l’outre-mer a été envisagé. Dans un souci de simplification et d’intelligibilité des règles juridiques, nous avons finalement préféré opter pour une nouvelle présentation, partant pour une réécriture de la quasi-totalité des articles, afin de rendre le nouveau livre VII du code monétaire et financier, relatif aux outre-mer, plus accessible tant du point de vue de l’État que pour répondre aux besoins des usagers, en particulier ultramarins, et faciliter l’activité des opérateurs financiers et des entreprises. Ce projet de loi est applicable de plein droit aux départements, aux régions, aux collectivités ultramarines relevant de l’article 73 de la Constitution – Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion et Mayotte –, régies par le principe d’identité législative, ainsi qu’aux collectivités d’outre-mer relevant de l’article 74 de la Constitution, dont les statuts prévoient que les lois et règlements y sont applicables de plein droit – Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon. Pour les collectivités du Pacifique, soumises au principe de spécialité législative relevant de l’article 74 de la Constitution – la Polynésie française et les îles Wallis-et-Futuna –et pour la Nouvelle-Calédonie, les lois et règlements ne sont applicables que dans les matières relevant statutairement de la compétence de l’État et sur mention expresse. C’est le cas en matière bancaire et financière : le projet de loi y est donc applicable sans mention expresse.
Ce projet de loi achève plus de trois années de travaux de codification. Il ratifie notamment les ordonnances relatives à la partie législative du code monétaire et financier. L’une d’elles, celle du 15 février 2022, est prise sur le fondement de l’article 74-1 de la Constitution, qui prévoit une habilitation permanente à étendre en outre-mer les dispositions législatives déjà existantes qui ressortissent à l’État, sous condition de ratification effective impliquant un vote au Parlement dans les dix-huit mois après publication. La loi doit donc impérativement être ratifiée, sous peine de caducité, avant le 26 août 2023. C’est pourquoi une procédure accélérée a été demandée pour l’examen de cette loi devant le Parlement et c’est la raison pour laquelle je me trouve devant vous, après adoption de ce texte, moyennant quelques modifications, par le Sénat. Certains articles ont fait l’objet d’une consultation des collectivités concernées, notamment l’article 5, relatif au retrait des billets aux distributeurs automatiques, et les articles 7 et 8, relatifs à la modernisation des missions de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer (Iedom) et de l’Institut d’émission d’outre-mer (Ieom).
Enfin, ce projet de loi qui ratifie les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et porte diverses dispositions relatives à l’outre-mer doit permettre, une fois adopté, d’achever la refonte du livre VII du code monétaire et financier. Derrière cet intitulé quelque peu austère se trouve un objectif essentiel pour les territoires d’outre-mer, dont je ne doute pas qu’il trouvera un écho favorable dans votre commission pour rendre plus lisible le droit bancaire et financier et en améliorer enfin l’intelligibilité.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. Le projet de loi qui nous est soumis ratifie les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier, relatif à l’outre-mer, et porte diverse dispositions relatives à l’outre-mer. Comme Mme la ministre déléguée vient de le rappeler, il a été adopté par le Sénat en procédure de législation en commission le 10 mai dernier. Ce texte présente des dispositions essentiellement techniques relatives au livre VII du code monétaire et financier. C’est le fruit d’un travail de trois années accompli par les services du ministère de l’économie et des finances – que je remercie – pour refondre et rendre plus intelligible le code monétaire et financier en outre-mer.
L’article 1er a pour objet de ratifier deux ordonnances ayant recodifié ce livre VII dans le cadre de l’habilitation donnée au Gouvernement par l’article 218 de la loi du 22 mai 2009 relative à la croissance et la transformation des entreprises, ou loi Pacte. Je saisis cette occasion de rappeler que le droit monétaire, bancaire et financier relève de la compétence de l’État dans toutes les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie. Je signale, à cet égard, la présence dans le texte d’une ordonnance fondée sur l’article 74-1 de la Constitution, qui demande une ratification expresse, et non pas le simple dépôt d’un projet de loi d’habilitation.
L’ampleur du travail de recodification pour lequel le Gouvernement était habilité à légiférer était telle qu’une première ordonnance, prise sur le fondement de l’article 38 de la Constitution – c’est-à-dire au titre des ordonnances du cadre général – a été suivie d’une deuxième, prise cette fois sur le fondement de l’article 74-1 de la Constitution, c’est-à-dire une ordonnance relative aux collectivités d’outre-mer. Cette disposition autorise le Gouvernement, dans les collectivités d’outre-mer visées à l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie, à étendre par ordonnances, dans les matières qui demeurent de la compétence de l’État, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole ou à adapter des dispositions de nature législative en vigueur à l’organisation de la collectivité concernée.
Or les ordonnances relevant de l’article 74-1 doivent faire l’objet d’une ratification expresse, dans un délai de dix-huit mois. Ce délai expirant le 26 août 2023, nous devons aller vite. Par cohérence, le projet de loi prévoit la ratification de deux ordonnances ayant recodifié le livre VII du code monétaire et financier, que vient d’évoquer Mme la ministre déléguée.
Le texte traite également, au troisième alinéa de son article 1er, d’une ordonnance relative au financement participatif. Je ne vous cache pas que cette troisième ordonnance m’a d’abord laissé perplexe, durant les auditions auxquelles j’ai procédé, au vu du texte qui nous est arrivé du Sénat. Il se trouve que l’ordonnance prise sur le fondement de l’article 74-1 de la Constitution a aussi rendu applicable en outre-mer l’ordonnance du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif. Je précise en outre que, les délais transitoires ayant été prolongés d’un an, ces deux ordonnances ont été prolongées par une ordonnance prise en 2022 dont la ratification, demandée elle aussi par cohérence, figure également à l’article 1er.
Les autres articles du projet de loi déposé au Sénat sont relatifs au livre VII et concernent tous les outre-mer.
L’article 2 rend applicables de façon expresse en outre-mer les modifications de certains articles relatifs à la France hexagonale du code monétaire et financier par des textes publiés postérieurement aux ordonnances précitées.
L’article 5 corrige une disposition relative au retrait d’espèces aux distributeurs en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.
Les articles 7 et 8 modernisent les missions de l’Iedom, et de l’Ieom, l’Ieom étant en quelque sorte la banque centrale qui gère les émissions dans les territoires ultramarins du Pacifique.
L’article 9, supprimé par le Sénat, insère un nouvel article créé dans une nouvelle section, afin de préciser le fondement législatif du fichier des comptes d’outre-mer, le Ficom, équivalent ultramarin du Ficoba, le fichier des comptes bancaires et assimilés, qui centralise les données sur les comptes de toute nature émanant des deux instituts d’émission. L’accès à ces données est renvoyé un arrêté commun des ministres de l’intérieur et des outre-mer. Je vous propose de rétablir cet article, notamment pour suivre les recommandations du Conseil d’État.
Les articles 3, 4, 6 et 10 sont rédactionnels.
L’article 11 prévoit certaines mises en vigueur différées.
Enfin, je proposerai deux amendements visant, pour l’un, à rendre applicable en outre-mer un règlement européen et, pour l’autre, à procéder à des corrections à propos de l’encaissement des chèques.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Comme vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, le projet de loi qui nous est soumis est essentiellement technique et concerne principalement les dispositions rendant applicables en outre-mer, en tenant compte des spécificités ultramarines, les titres I à VI du code monétaire et financier. Il convient cependant que notre commission examine avec attention ce texte, dans le contexte de la procédure de législation en commission décidée par la conférence des présidents.
Je formulerai deux remarques et deux questions. Première remarque : le rapporteur du Sénat a saisi la rectification par ricochet d’une ordonnance relative au financement participatif pour défendre une prolongation de l’expérimentation ouverte aux collectivités territoriales en la matière – c’est l’article 1er bis du texte que nous examinons. Après la publication, en janvier 2023, de l’arrêté définissant les critères d’éligibilité à l’expérimentation, il est peut-être bon, en effet, de laisser aux collectivités le temps de s’en saisir. Madame la ministre déléguée, monsieur le rapporteur, savez-vous combien de collectivités ont demandé, à ce jour, de participer à cette expérimentation ?
Seconde remarque : un article du projet de loi a disparu : l’article 9, supprimé par le Sénat, qui concerne le Ficom, équivalent du Ficoba en France métropolitaine. Vous proposez, monsieur le rapporteur, avec votre amendement CF17, de rétablir cet article, et je vous soutiendrai dans cette démarche. Je crois comprendre que notre collègue rapporteur au Sénat, M. Hervé Maurey, y verrait des difficultés juridiques. J’entends cependant que cet article a été rédigé sous couvert de l’expertise du Conseil d’État et qu’il est essentiel à la stabilité du Ficom.
Monsieur le rapporteur, quel est votre point de vue sur la portée et le rétablissement de l’article 9 ? Pouvez-vous, à cette occasion, nous rappeler en quelques mots et d’une manière un peu plus détaillée le fonctionnement du Ficom ?
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Philippe Dunoyer (RE). Le présent projet de loi, examiné selon la procédure de législation en commission, affiche une technicité qui peut rendre sa lecture un peu austère, mais son ambition revêt une importance particulière pour les collectivités d’outre-mer face à la multiplication, ces dernières années, des dispositions du code monétaire et financier (CMF) qui s’y appliquent. Il nous est proposé de ratifier trois ordonnances relatives au livre VII du code monétaire et financier, qui s’inscrivent elles-mêmes dans un travail de codification de longue haleine qui, comme l’a rappelé Mme la ministre déléguée, a débuté en 2021 à l’occasion de la loi Pacte. Cette ratification devrait permettre de clarifier, de simplifier et de corriger des dispositions ultramarines devenues souvent illisibles et parfois obsolètes, compte tenu de l’évolution des contextes locaux et des réglementations européennes.
L’un des progrès apportés par ce projet de loi, pour ce qui concerne notamment la modernisation des missions de l’Iedom et de l’Ieom, pour en améliorer le rôle de véritable banque centrale des collectivités du Pacifique, permet de dépasser l’objectif de simplification du CMF. Ces progrès ont notamment été salués par la Commission supérieure de codification et le Conseil d’État.
Parmi les améliorations apportées, je tiens à saluer celle de l’article 5, dont M. le rapporteur a fait état et qui instaure en Nouvelle-Calédonie le principe d’une gratuité obligatoire des retraits d’espèces aux distributeurs automatiques dans le réseau de la banque dont on est client.
Madame la ministre déléguée, je saisis cette occasion pour faire état d’une situation un peu particulière en Nouvelle-Calédonie où prévaut, depuis un peu plus d’une dizaine d’années, par convention, un accord de modération des quatorze principales opérations bancaires conclu, entre M. le haut-commissaire et les établissements bancaires, sous l’égide de l’Ieom. Ces opérations font ainsi l’objet de discussions, mais force est de constater, au bout de plus de dix ans, que pour deux d’entre elles, et non des moindres – l’abonnement à distance pour les services de banque et les frais de mise en place d’un prélèvement –, les prix restent encore très supérieurs à ceux pratiqués dans l’Hexagone – jusqu’à quinze fois pour la deuxième de ces opérations. Je vous prie donc d’intervenir auprès de M. le haut-commissaire afin que nous finissions de modérer ces tarifs bancaires.
Le travail de simplification permet d’atteindre l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Notre groupe votera donc ce texte et les amendements proposés par le rapporteur.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Nous sommes amenés à nous prononcer sur un dossier très technique, et je commencerai par indiquer ce qui nous plaît dans ce texte. C’est, d’abord, un effort appréciable de lisibilité. En outre-mer, comme du reste en métropole, les règles en matière de régulation financière se sont multipliées depuis la crise financière de 2008. Le code monétaire et financier en outre-mer était devenu illisible et ce texte le clarifie – je pense qu’il y a consensus à ce propos.
D’autres dispositions, en revanche, nous plaisent moins. C’est d’abord le cas de l’article 1er bis, qui réintroduit et prolonge l’expérimentation du financement participatif des collectivités locales. On ne comprend pas bien, d’abord, ce que cette disposition vient faire dans cette discussion, car il s’agit d’une question à part entière, qui ne concerne pas spécifiquement l’outre-mer. C’est en outre une mesure discutable, qui peut induire un mélange des genres entre les collectivités publiques et les entreprises, voire avec des intérêts privés.
Le deuxième élément qui ne nous plaît pas dans ce texte tient aux ajouts du rapporteur sur des points peut-être techniques, mais insuffisamment expliqués. Des articles additionnels, très peu motivés, sont ainsi ajoutés au texte soumis à notre commission sans que nous en connaissions les tenants et aboutissants. Cette manière de faire, qui permet d’échapper aux études d’impact, devrait être proscrite, pour la bonne information des parlementaires.
Enfin, c’est pour de bonnes raisons que l’article 9 a été supprimé au Sénat. En effet, l’accès aux données bancaires est un sujet sensible, en métropole comme en outre-mer. On ne voit pas bien pourquoi le projet de loi prévoit un régime juridique différent entre métropole et outre-mer. Le Sénat a jugé cette disposition inutile et contre-productive, et c’est également notre position.
Forts de ces constats mitigés, nous réservons notre position de vote en fonction de la teneur des débats.
M. Perceval Gaillard (LFI-NUPES). Ce texte est une illustration parfaite des difficultés des gouvernements successifs à prendre en compte les réalités spécifiques des territoires d’outre-mer. Il n’est évidemment pas question d’en dénoncer ici le caractère technique, mais il faut souligner que le toilettage des textes relatifs aux outre-mer est une nécessité. Ainsi, le caractère illisible du texte qui nous occupe et son inadaptation aux réalités d’aujourd’hui sont tellement évidents qu’il ne pouvait rester en l’état.
Autre constat : on nous demande une fois encore de ratifier des ordonnances déjà prises, ou pire, comme ici, de réparer un oubli du Gouvernement – rien de moins que celui de prendre des ordonnances dans les délais fixés. Cette méthode a été dénoncée par l’Assemblée de Polynésie, qui a été très critique envers le Gouvernement à propos de ce travail, déplorant que ce dernier ait procédé à des saisines multiples et en urgence alors que les travaux de recodification ont duré plus de trois ans – preuve du peu d’intérêt que portent aux outre-mer les gouvernements successifs. C’est ce qui explique l’Assemblée de Polynésie ait émis un avis défavorable sur l’un des projets d’ordonnance, en raison de « la méthodologie employée par l’État [qui] continue de nuire gravement à l’intelligibilité du droit en matière monétaire et financière car elle rend impossible, faute de temps et de concertation, d’évaluer les effets des modifications proposées ».
Autre constat encore : le Gouvernement veut nous faire croire qu’il prend des dispositions correspondant aux réalités spécifiques des outre-mer. C’est le cas par exemple de l’ordonnance de septembre 2022 qui veut moderniser le cadre du financement participatif. Or ce dispositif n’est pas spécifique aux outre-mer, pas plus que ne l’est la disposition prise par l’article 1er bis, qui vise à porter de trois à cinq ans la durée de l’expérimentation permettant aux collectivités de recourir au financement participatif obligataire pour leurs projets non commerciaux.
En tout état de cause, toutefois, la modification des missions de l’Ieom est une vraie avancée.
Mme Véronique Louwagie (LR). Je salue tout d’abord la procédure accélérée retenue pour l’examen d’un tel texte, auquel elle est particulièrement adaptée. Ce projet de loi adopté par le Sénat est une mise à jour législative européenne du code monétaire et financier, en particulier pour ses dispositions applicables outre-mer, à la suite notamment des ordonnances visées de 2021 et 2022, dont la ratification doit intervenir, comme cela a été rappelé, avant le 26 août 2023. Cette ratification ne souffre pas de difficultés particulières et participe, comme vous l’avez dit, madame la ministre déléguée, d’un processus de simplification pour des normes plus accessibles. C’est, comme l’a relevé le rapporteur, un projet de loi facilitateur.
Pour le groupe Les Républicains, il serait plus pertinent de maintenir la suppression par le Sénat de l’article 9, que vous proposez, monsieur le rapporteur, de réintroduire. Cet article prévoit en effet de donner une base législative à l’existence du fichier des comptes outre-mer, ou Ficom, qui repose aujourd’hui sur un fondement réglementaire. Il prévoit en outre qu’un arrêté fixera la liste des destinataires habilités à recevoir communication des données figurant dans ce fichier. Ces dispositions ne nous semblent pas satisfaisantes, en particulier par comparaison avec celles qui sont prévues pour le fichier des comptes bancaires et assimilés, ou Ficoba, tenu par la direction générale des finances publiques (DGFIP) pour la métropole et les cinq départements d’outre-mer. En effet, il est proposé pour le Ficom l’inverse de ce qui est prévu pour le Ficoba, car ce dernier a un fondement réglementaire et son accès est encadré par la loi, tandis que le Ficom aurait un fondement législatif et son accès relèverait du domaine réglementaire. Cette divergence ne semble pas justifiée, compte tenu notamment des exigences en matière d’accès aux données, dont l’encadrement est l’aspect le plus sensible de ce dispositif. Je crois d’ailleurs que la Cnil, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, a émis une réserve quant à la mise en place d’un tel fichier. Nous nous opposerons donc à la réintroduction de cet article.
M. Luc Geismar (Dem). Notre groupe salue le travail de codification effectué par le Gouvernement en vue de clarifier et de rendre plus lisibles les dispositions applicables en outre-mer. Ce travail de recodification, entamé voilà trois ans, a permis de réorganiser thématiquement et de réécrire un livre qui était devenu illisible et inadapté aux évolutions normatives intervenues depuis la crise financière de 2008. Nous soutenons pleinement cet effort de simplification et de clarification du droit. Il est donc essentiel de ratifier les ordonnances correspondantes, de leur donner valeur législative et d’éviter qu’elles ne deviennent caduques. Nous devons parachever ce travail de requalification en adoptant ce projet de loi.
Le texte prévoit aussi la modernisation des instituts Iedom et Ieom, qui joueront un rôle crucial dans la mise à niveau des services financiers en outre-mer. En particulier, l’article 7 permettra d’établir des échanges de données statistiques entre l’Iedom et l’Insee, ce qui renforcera la qualité des analyses économiques et financières dans ces territoires.
En outre, l’article 8 est particulièrement notable, car il contribuera à prévenir les faillites d’entreprises en accordant à l’Ieom la possibilité de noter la situation financière des entreprises volontaires et de partager ces informations avec les acteurs impliqués dans la prévention et le traitement des difficultés des entreprises. Nous pourrons ainsi renforcer la vigilance et l’accompagnement des entreprises en difficulté.
En conclusion, notre groupe soutient pleinement ce projet de loi et invite l’ensemble des députés à le voter afin de soutenir les mesures importantes qu’il contient pour l’outre-mer.
M. Christian Baptiste (SOC). Ce texte révèle une triste réalité : la différence de tarification des services bancaires entre les outre-mer et la France, ainsi que ses conséquences sur le coût de la vie dans les territoires dits d’outre-mer. À titre d’exemple, les Français d’outre-mer doivent payer leur banque 10 % de plus par rapport au tarif appliqué en France hexagonale. Cette disparité crée une inégalité financière qui aggrave la vie chère que connaissent déjà ces régions. Nous avons déjà eu l’occasion de l’évoquer à maintes reprises, mais il est bon de le rappeler encore une fois.
Nos concitoyens ultramarins doivent faire face à un coût de la vie plus élevé que dans l’Hexagone en raison de la géographie, de l’insularité et de l’éloignement. Les produits de première nécessité tels que l’alimentation, les produits de consommation courante et les services sont souvent plus chers dans les outre-mer qu’en France hexagonale. Dans ce contexte, les frais bancaires excessifs exercent une pression supplémentaire sur les budgets déjà restreints des familles ultramarines. Les frais de tenue de compte, de retrait ou de virement, par exemple, sont souvent plus élevés dans les outre-mer. Ces frais non justifiés pèsent lourdement sur les dépenses courantes des ménages, réduisant ainsi leur pouvoir d’achat et leur capacité à épargner pour l’avenir.
Les conséquences directes de cette différence de tarification sont une détérioration du niveau de vie et une augmentation des difficultés financières pour nos concitoyens ultramarins, ce qui constitue une injustice flagrante. L’Iedom et l’Ieom jouent un rôle crucial dans les politiques tarifaires des banques opérant dans les outre-mer, car ils ont la responsabilité de s’assurer que les tarifs bancaires soient adaptés aux réalités économiques locales et tiennent compte des spécificités de chaque territoire.
Nous voterons évidemment ce texte. Néanmoins, dans un souci d’équité et de justice sociale, nous défendrons, au nom du groupe Socialistes et apparentés, deux amendements visant respectivement à lutter contre le montant des frais bancaires excessifs appliqués dans les territoires en outre-mer et à étendre le dispositif autorisant le plafonnement des tarifs des services bancaires en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, ainsi que dans l’ensemble des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution.
Mme Lise Magnier (HOR). Comme cela a déjà été dit, ce projet de loi ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financière et pourtant également diverses dispositions relatives à l’outre-mer est un texte certes technique, mais indispensable pour améliorer l’intelligibilité du droit bancaire et financier pour les acteurs établis dans nos outre-mer. Par ailleurs, il permet une mise à jour de dispositions obsolètes et l’introduction de dispositions relevant de la compétence de l’État, sans pour autant les élargir. C’est également l’occasion de corriger des erreurs techniques, ce qui est un gage de sérieux et correspond à notre volonté de parlementaires. Les députés du groupe Horizons et apparentés voteront donc évidemment en faveur de ce projet de loi.
M. Stéphane Lenormand (LIOT). La refonte du livre VII du code monétaire et financier qui adapte aux territoires ultramarins des dispositions en matière d’émission de monnaie et d’activités bancaires et financières est bienvenue et nécessaire. Ce texte technique nous inspire à la fois une inquiétude, un regret et une satisfaction.
L’inquiétude porte sur l’article 1er, présenté comme une simple et banale ratification d’ordonnance, donne selon nous trop de poids au Gouvernement et peu d’informations à la représentation nationale. Ainsi, les ordonnances du 15 septembre 2021 et du 15 février 2022 ont réorganisé le livre VII du code monétaire et financier, mais elles en ont également réécrit certaines dispositions, or l’étude d’impact est muette à propos de ces modifications.
Madame la ministre déléguée, monsieur le rapporteur, au-delà des déplacements d’articles et des corrections rédactionnelles, pouvez-vous nous confirmer qu’aucune réécriture de fond n’a été opérée ?
Le regret tient au fait que le Gouvernement revienne sur le principe de gratuité des retraits d’argent aux distributeurs automatiques en outre-mer, car cette mesure soutenait le pouvoir d’achat et assurait une meilleure accessibilité des services bancaires dans les îles.
Quant à la satisfaction, elle tient à l’extension bienvenue des missions de l’Iedom et de l’Ieom, qui renforce l’information économique et le contrôle prudentiel dans les territoires ultramarins, tout en permettant à l’Inspection générale des finances (IGF) de s’assurer que la mission de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme est menée à bien. La question se pose toutefois de savoir pourquoi cette mission revient historiquement à l’IGF plutôt qu’à la Banque de France.
Le groupe LIOT proposera quelques amendements sur ce texte, sur lequel il a néanmoins un a priori favorable.
M. le président Éric Coquerel. M. Seo souhaite lui aussi prendre la parole pour une brève intervention.
M. Mikaele Seo (RE). Nous sommes appelés à nous prononcer sur un texte qui conforte, sur le plan technique et sur le plan légal, les moyens des services de l’État et ceux des banques pour surveiller l’activité des entreprises et des particuliers. Quel contraste avec ce que vivent nos concitoyens à Wallis-et-Futuna ! Le fait de parler du prix des retraits à un distributeur automatique de billets (DAB) leur semblera ironique, car il n’en reste qu’un seul dans l’archipel, et les coffres-forts sont inexistants.
J’ai eu souvent l’occasion d’appeler l’attention du Gouvernement sur la difficulté d’avoir un compte dans notre archipel : le Trésor public ferme des comptes et la Banque de Wallis-et-Futuna (BWF), qui est en situation de monopole, rejette des clients. Nous attendons toujours ce service demandé par les particuliers et les entreprises, mais rien ne bouge. La population se tourne donc vers les comptes en ligne ou bien décide d’en ouvrir en Nouvelle-Calédonie, voire en métropole.
L’examen de ce projet de loi est donc pour moi l’occasion de lancer un cri d’alarme : cette situation ne peut plus durer.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Monsieur le rapporteur général, selon les services du ministère de l’intérieur, aucune collectivité n’a pour l’instant déposé de dossier dans le cadre de l’expérimentation concernant le financement participatif.
Monsieur Dunoyer, le Gouvernement prête la plus grande attention à la question des frais bancaires en Nouvelle-Calédonie. D’une part, il convient de protéger les consommateurs ; de l’autre, il faut tenir compte du fait que certains coûts de gestion sont importants sur de longues distances. Nous essayons de trouver un équilibre entre ces deux exigences. Des travaux avec le haut-commissaire sont en cours ; nous relayerons auprès de lui vos préoccupations.
Madame Louwagie, nous comprenons votre attention à la protection des données personnelles et la partageons, mais la compétence législative pour définir la liste relève en partie des assemblées des collectivités du Pacifique. Nous ne pouvons donc pas l’inscrire dans le texte. En revanche, la liste finale sera soumise à la Cnil, de façon que nous nous assurions du strict respect de la protection des données personnelles.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. En ce qui concerne le financement participatif, monsieur le rapporteur général, aucune collectivité n’a déposé sa candidature. La direction générale des collectivités locales va donc relancer la communication autour du dispositif. Il convient de laisser encore un peu de temps à ce dernier.
Nous estimons qu’il est important de rétablir l’article 9 car le fondement législatif du Ficom doit être renforcé, dans un souci de sécurité juridique. Le Conseil d’État juge nécessaire l’existence d’une base législative générale pour trois raisons principales. Premièrement, l’inclusion des données relatives aux comptes de toute nature centralisées par l’Iedom et l’Ieom est demandée par ces deux instituts. Deuxièmement, les deux organismes ont des personnalités juridiques distinctes ; ils exercent leurs compétences de manière indépendante en ce qui concerne leurs zones géographiques d’intervention respectives. Enfin, les dispositions existantes pourraient être interprétées comme ouvrant à chaque institut la possibilité de gérer son propre système.
Madame Louwagie, il y a peut-être eu une méprise lors de la discussion au Sénat ; je m’en expliquerai avec mon homologue. Le Ficoba a des fondements législatifs tout à fait clairs : ils se trouvent à la fois dans une loi de finances datant d’il y a plus de quarante ans et dans le code général des impôts. Il n’en va pas de même pour le Ficom : c’est pour cette raison qu’il nous a été demandé de clarifier les choses, ce que nous nous proposons de faire en inscrivant ces dispositions dans le code monétaire et financier.
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Chapitre Ier
Ratification d’ordonnances
Article 1er
Ratification d’ordonnances
Adopté par la commission sans modification
Le présent article ratifie trois ordonnances, dont deux concernent spécifiquement les outre-mer : l’ordonnance n° 2021-1200 du 15 septembre 2021 relative aux titres Ier et II du livre VII du code monétaire et financier et l’ordonnance n° 2022-230 du 15 février 2022 relatives aux titres III à VIII.
Prise en application de l’article 74-1 de la Constitution, l’ordonnance n° 2022-230 doit impérativement être ratifiée dans un délai de dix-huit mois à compter de sa publication aux termes de l’article 74-1 de la Constitution, sous peine de caducité, avant le 26 août 2023.
L’ordonnance du 14 septembre 2022, soumise à ratification au présent article par cohérence, modifie quant à elle l’ordonnance du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif et les dispositions les rendant en applicables en outre-mer portées par l’ordonnance du 15 février 2022.
A. Le constat de l’illisibilité des normes applicables en outre-mer
Le droit applicable aux activités bancaires et financières a évolué de manière accélérée après la crise financière de 2008. On peut parler d’inflation des normes législatives et réglementaires, qui résulte principalement de plusieurs réformes du droit européen, concernant tant les dispositions hexagonales du code monétaire et financier que les dispositions applicables en outre-mer. Parallèlement aux livres I à VI du code monétaire et financier spécifiques au territoire hexagonal, les dispositions du livre VII du code monétaire et financier relatives à l’outre-mer se sont considérablement développées, impliquant une nécessaire réorganisation et une clarification.
B. Une première habilitation non utilisée
L’habilitation prévue à l’article 169 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la croissance, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique autorisait le gouvernement à procéder « par ordonnance, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi, à l’adoption d’un code monétaire et financier applicable en outre-mer, se substituant aux dispositions du code monétaire et financier relatives à l’outre-mer. »
Cette habilitation n’a pas été utilisée par le Gouvernement. Interrogée par le rapporteur, la direction générale du Trésor (DG Trésor) lui a fait savoir que le principe d’un nouveau code se heurtait à des difficultés pratiques et techniques relevées par le ministère des outre-mer et le secrétariat général du Gouvernement. ([2])
II. les modifications apportÉes par les ordonnances
A. Les ordonnances relatives à la codification du titre VII du code monétaire et financier
Le III de l’article 218 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises a habilité le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la publication de la loi, toute mesure relevant du domaine de la loi pour modifier le livre VII du code monétaire et financier pour le rendre plus accessible, pour répondre aux besoins des usagers, en particulier ultramarins, et pour faciliter l’activité des opérateurs financiers et des entreprises, pour les raisons évoquées supra. Ce délai d’habilitation a été prolongé de quatre mois par l’article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence sanitaire. Il s’est achevé le 21 septembre 2021.
Suivant la recommandation du Conseil d’État du 7 janvier 2016 au Gouvernement, la plupart des articles ont été réécrits sous la forme de tableaux dits « compteur Lifou », dans un souci de lisibilité et de simplification.
● L’ordonnance n° 2021-1200 du 15 septembre 2021 relative aux titres Ier et II du livre VII du code monétaire et financier a été prise sur son fondement. Elle fixe le cadre et un plan général thématique pour le livre VII qui suit le plan des livres I à VI spécifiques à l’Hexagone et dans le respect des différences statutaires entre territoires.
– Le titre Ier fixe les conditions générales d’application du code monétaire et financier dans les collectivités ultramarines des articles 73 et 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie. Ces conditions précisent, tout d’abord, les adaptations nécessaires du droit métropolitain au regard des dispositions relevant de la compétence des différentes collectivités d’outre-mer.
– Le titre II porte les dispositions spécifiques relatives à la monnaie en outre-mer, c’est-à-dire les signes monétaires, les missions des Instituts qui exercent les missions de la Banque de France (l’Institut d’émission des départements d’outre-mer et l’Institut d’émission d’outre-mer) et les règles relatives aux opérations de paiement et aux transferts de fonds.
Selon le 2° du IV de l’article 218 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, le délai pour déposer le projet de loi ratifiant cette ordonnance était fixé à six mois à compter de sa publication. Après un dépôt initial à l’Assemblée Nationale le 7 mars 2022 et un retrait le 15 juin 2022, un nouveau dépôt au Sénat a eu lieu le 15 juin 2022 avec un nouveau décret de dépôt.
Le rapporteur rappelle que les ordonnances prises sur le fondement de l’article 38 ne deviennent caduques que si un projet de loi de ratification n’a pas été déposé dans le délai fixé par la loi d’habilitation. Il apparaît que la date faisant foi dans le cas présent est celle du premier dépôt, constat étant fait qu’il a eu lieu dans le délai fixé par la loi d’habilitation, si on se réfère à la jurisprudence du Conseil d’État. ([3])
L’article 1er ratifie cette ordonnance sans aucune modification. Cette ratification expresse, qui ne s’inscrit pas dans un cadre contraignant s’inscrit en cohérence avec la ratification nécessaire de l’ordonnance °2022-230 du 15 février 2022 présentée infra.
● L’ordonnance n° 2022-230 du 15 février 2022, prise sur le fondement de l’article 74-1 de la Constitution, a pour objet également de réécrire les dispositions applicables en outre-mer du code monétaire et financier, dans la continuité de l’ordonnance du 15 septembre 2021.
D’après la DG Trésor, c’est l’importance et la complexité du travail de recodification, au regard du délai d’habilitation donnée par la loi du 22 mai 2019, qui a conduit à la préparation d’une ordonnance séparée pour la recodification des titres III à VIII du livre VII du code monétaire et financier, sur le fondement l’article 74-1 de la Constitution. Cet article, introduit lors de la révision constitutionnelle du 28 mars 2023, donne la faculté au Gouvernement, dans les collectivités d’outre-mer visées à l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie, d’étendre par ordonnances « dans les matières qui demeurent de la compétence de l’État (…) avec les adaptations nécessaires, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole ou adapter les dispositions de nature législative en vigueur à l’organisation particulière de la collectivité concernée, sous réserve que la loi n’ait pas expressément exclu, pour les dispositions en cause, le recours à cette procédure. »
Les titres III à VIII, comme les titres I à II, ont été refondus selon un plan thématique, suivant pour leur part le plan des livres I à VI métropolitains, et dans le respect des différences statutaires entre territoires ultramarins.
– Le titre III étend en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, les dispositions du livre Ier sur la monnaie.
– Le titre IV rend applicables les dispositions du livre II sur les produits financiers aux collectivités d’outre-mer de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie (instruments financiers et produits d’épargne).
– Le titre V étend, de façon expresse, les dispositions du livre III sur les services bancaires et financiers.
– Le titre VI étend les dispositions du livre IV sur les marchés en outre-mer, notamment les négociations sur instruments financiers, la protection des investisseurs et les dispositions pénales.
– Le titre VII étend le livre V sur les prestataires de services en précisant au préalable les conditions d’adaptation du droit de l’Union européenne et du droit national dans les collectivités d’outre-mer de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie. Ces règles portent notamment sur les prestataires de services bancaires, les obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, le gel des avoirs, les jeux et loteries prohibés, ainsi que les dispositions pénales.
– Enfin, le titre VIII rend applicables les dispositions du livre VI sur les institutions en matière bancaire et financière. Après avoir établi les conditions d’adaptation spécifiques du droit de l’Union et du droit national, ce titre étend les dispositions concernant l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’Autorité des marchés financiers, la surveillance du système financier, la coopération, les échanges d’informations et les dispositions pénales.
Cette ordonnance, aux termes de l’article 74-1, doit impérativement être ratifiée dans un délai de dix-huit mois à compter de sa publication, sous peine de caducité, soit avant le 26 août 2023.
L’article 1er ratifie cette ordonnance sans aucune modification.
Les deux ordonnances sont entrées en vigueur le 26 février 2022, en application du décret n° 2022-231 du 24 février 2022.
L’article 1er prévoit également la ratification de l’ordonnance n° 2022-1229 du 14 septembre 2022 modifiant l’ordonnance n° 2021-1735 du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif et l’ordonnance précitée n° 2022-230 du 15 février 2022.
L’ordonnance n° 2021-1735 modernisant le cadre relatif au financement participatif du 22 décembre 2021 a été prise pour mettre en conformité le droit national avec le nouveau cadre européen, en particulier avec le règlement européen (UE) 2020/1503 du 7 octobre 2020 qui a créé un cadre européen harmonisé en matière de financement participatif.
Une habilitation a été donnée au Gouvernement par l’article 48 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution. L’ordonnance précitée n° 2022-230 du 15 février 2022 a étendu ses dispositions à l’outre-mer.
Présentation du règlement européen (UE) 2020/1503 du 7 octobre 2020
• Ce règlement renforce les possibilités de recours au financement participatif : les plateformes de financement peuvent désormais proposer leurs services dans l’ensemble de l’Union européenne et aider à des levées de fonds plus élevées (5 millions d’euros contre 1 million d’euros auparavant pour les prêts), et auprès d’un public plus large (les personnes morales peuvent être prêteurs).
• Il encadre les pratiques du marché avec des exigences de protection du consommateur : pour exercer, les plateformes de financement mettant en relation les porteurs de projet et les contributeurs sont dotées d’un nouveau statut de « prestataire de services de financement participatif » (PSFP), agrément délivré en France par l’Autorité des marchés financiers, avec le concours de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution lorsque le programme d’activité de la plateforme comprend la facilitation d’octroi de prêt.
Source : réponse de la DG Trésor au rapporteur.
Les adaptations portées par les ordonnances sont présentées dans l’encart ci-dessous.
• Pour les activités de financement participatif couvertes par le champ d’application du règlement européen, le nouveau statut unique de « prestataire de services de financement participatif » (PSFP) se substitue au statut de CIP (conseiller en investissement participatif) et au statut d’intermédiaires en financement participatif (IFP) pour les prêts couverts par le règlement.
• Pour les activités de financement participatif non couvertes par le règlement européen, c’est-à-dire les prêts à titre gratuit, les dons ou les financements de projets non commerciaux :
o Le statut national existant d’IFP est maintenu pour les prêts à titre gratuit, les dons ou les financements par prêts de projets non commerciaux ;
o S’agissant des financements par titres de projets non commerciaux (a priori hors du champ du règlement 2020/1503 d’octobre 2020), le statut national existant de PSI s’applique.
Selon le projet considéré, le financement proposé à un même porteur de projet personne morale, par exemple une collectivité territoriale, pourra donc relever du régime des PSFP, des IFP ou des PSI.
Source : réponse de la DG Trésor au rapporteur.
La période transitoire d’un an qui avait été fixée par le règlement européen (UE) 2020/1503 du 7 octobre 2020 a été prolongée d’une année, son terme reculant du 10 novembre 2022 au 10 novembre 2023.
Il était impératif de mettre en conformité le droit national grâce à cette prolongation : c’est le motif des modifications aux deux ordonnances précitées par l’ordonnance du 14 septembre 2022.
Le délai d’habilitation de cette ordonnance était d’un an à compter de sa publication par le IV de l’article 48 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021. Le projet de loi de ratification dont le délai de dépôt a été fixé à trois mois aux termes du V de l’article 48 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021, a été déposé au Sénat le 7 décembre 2022.
L’article 1er ratifie cette ordonnance sans aucune modification.
III. les modifications apportÉes par le sénat
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
IV. les modifications apportÉes par la commission
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté cet article sans modification.
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La commission adopte l’article 1er non modifié.
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Article 1er bis
Prolongation de deux ans de l’expérimentation visant à permettre aux collectivités territoriales de recourir au financement participatif obligataire
Adopté par la commission sans modification
Le présent article, issu d’un amendement du rapporteur de la commission des finances du Sénat, prolonge de deux ans l’expérimentation prévue à l’article 48 de la loi du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances : cette expérimentation ouvre aux collectivités territoriales la possibilité de bénéficier, dès le 1er janvier 2022, de revenus tirés d’un projet de financement participatif obligataire, au profit de tout service public à l’exception des missions de police et de maintien de l’ordre public.
I. Les premiÈres dispositions relatives au financement participatif
Le financement participatif est encadré juridiquement depuis 2014 : l’ordonnance n° 2014-559 du 30 mai 2014 et ses textes d’application soumettant les plateformes numériques de financement participatif à un statut différent selon le type de financement proposé par souscription de titres ou par octroi de prêts ou de dons. Il s’agit :
– des conseillers en investissements participatifs (CIP) pour les financements participatifs sous forme de titres (ou prestataire de services d’investissement (PSI) agréés pour fournir le service de conseil en investissement) ;
– des intermédiaires en financement participatif (IFP) pour les financements participatifs sous forme de prêts (à titre onéreux ou à titre gratuit) et de dons.
D’après la DG Trésor, « les collectivités territoriales pouvaient [en application de ces dispositions] souscrire un prêt ou une obligation sans restriction de champ, [et] faire cette démarche auprès d’établissements de crédit, ou auprès d’organismes bénéficiant de dérogations au monopole bancaire, par exemple un IFP. »
De plus, « par exception à l’obligation de constituer une régie de recettes en cas de financement participatif, l’article D.1611-32-9 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction issue du décret n° 2015-1670 du 14 décembre 2015 prévoyait qu’un recours au financement participatif par une collectivité territoriale pouvait être conduit sans régie de recette, mais avec une convention de mandat. Cette exception était limitée au seul financement de projet au profit d’un service public culturel, éducatif, social ou solidaire et à deux catégories d’instruments de financement participatif, les prêts et les dons. »
II. l’expÉrimentation prÉvue par l’article 48 de la loi du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’Économie et des finances
L’article 48 de la loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances (DDADUE) du 8 octobre 2021 étend le champ des projets pouvant faire l’objet d’un financement participatif à l’ensemble des services publics, à l’exception des missions de police et du maintien de l’ordre. Il rend également possible pour les personnes morales le fait d’accorder des prêts à des collectivités territoriales et à leurs groupements, dans la limite d’un prêt par projet.
Par ailleurs, et à titre expérimental pour une durée de trois ans à partir du 1er janvier 2022, selon une disposition adoptée en commission mixte paritaire, il dispose que les collectivités territoriales :
– peuvent recourir à des émissions obligataires à travers les plateformes de financement obligataire, les conditions de ce recours devant faire l’objet d’un projet d’arrêté interministériel ;
– peuvent confier l’encaissement du revenu tiré d’un projet de financement participatif à un organisme public ou privé sous forme de titre de créance par convention écrite, sans avoir l’obligation d’instaurer une régie de recette.
L’arrêté du 23 janvier 2023 définissant les critères d'éligibilité des collectivités territoriales ainsi que les modalités de mise en œuvre de l'expérimentation a fixé les critères d’éligibilité pour les collectivités territoriales et les établissements publics concernant le recours à des émissions obligataires. D’après la DG Trésor, il importait « que les décisions de recours à ce type de financement qui alourdissent par définition l’encours de la dette des collectivités, puissent être prises au regard de son impact sur leur capacité de désendettement, comme c’est le cas pour les autres sources de financement. L’enjeu a donc été de prévoir des modalités d’expérimentation qui sécurisent la participation des collectivités, notamment l’impact sur leur situation financière, à travers un contrôle opéré par les services de l’État et basé sur des critères objectifs. »
Les critères fixés par l’arrêté tendent, d’une part, à vérifier que le projet à financer ne concerne pas une mission de police et de maintien de l’ordre public comme proscrit par la loi et à s’assurer, d’autre part, que l’acceptation de cette participation à l’expérimentation ne conduit pas une collectivité à un niveau d’endettement qui excède un seuil prudentiel de solvabilité, mesuré au regard de sa capacité de désendettement.
III. les dispositions tendant à prolonger l’expÉrimentation de deux ans adoptÉe par le sÉnat
L’adoption d’un amendement du rapporteur de la commission des finances du Sénat portant, article additionnel, tend à prolonger la durée de l’expérimentation de deux ans, au motif d’un temps laissé aux collectivités territoriales pour se saisir du dispositif qualifié d’« insuffisant », l’arrêté d’application ayant été pris en janvier 2023, soit plus de quinze mois après la promulgation de la loi. Il fixe par ailleurs la date limite pour un dépôt de dossier de candidature au 31 mars 2024.
Le rapporteur du Sénat relève que « ces restrictions calendaires impliquent que les collectivités ne disposent de fait que d’un peu plus d’un an pour se saisir pleinement de cette expérimentation et de ce nouveau mode de financement, encore méconnu et, par conséquent, plus complexe à mettre en œuvre qu’un prêt contracté auprès d’un établissement bancaire. »
Le rapporteur partage le besoin identifié de prolonger la période d’expérimentation, d’autant que, d’après la DG Trésor, « la direction générale des collectivités locales (DGCL) n’a constaté aucune candidature effective à l’expérimentation et propose de relancer une communication sur le site internet collectivités-locales en parallèle des actions locales. »
IV. les modifications apportÉes par l’AssemblÉe nationale
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article.
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Amendement de suppression CF1 de M. Perceval Gaillard.
M. Perceval Gaillard (LFI-NUPES). Nous proposons de supprimer l’allongement de trois à cinq ans de la durée de l’expérimentation permettant aux collectivités de recourir au financement participatif obligataire.
Sur la forme, cet article ajouté au Sénat n’a rien de spécifique aux outre-mer et semble donc être un cavalier législatif.
Sur le fond, nous estimons que le financement participatif obligataire risque d’alourdir la dette des collectivités. Ce dispositif permet aux collectivités d’émettre des obligations. Les créanciers peuvent être des entreprises privées. Il est à craindre que les entreprises se retrouvent en position de force face aux collectivités. En outre, ces opérations impliquent des surcoûts pour ces dernières, liés à l’intermédiation ou au fait que les taux d’intérêt proposés pourront être supérieurs à ceux du marché.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. Le projet de loi ratifie aussi une ordonnance relative au financement participatif, qui concerne les outre-mer par ricochet. Il ne s’agit donc pas d’un cavalier.
Par ailleurs, il n’y a pas eu de candidat pour le moment. Accorder quelques années de plus au dispositif pour voir s’il fonctionne nous semble donc être une bonne idée. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 1er bis non modifié.
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Chapitre II
Modifications du livre VII du code monétaire et financier
Article 2
Application de certaines dispositions du code monétaire et financier
en outre-mer
Adopté par la commission avec modifications
Le présent article rend expressément applicable en outre-mer les modifications de certains articles métropolitains du code monétaire et financier par des textes publiés postérieurement aux ordonnances ayant procédé à la recodification du code monétaire et financier.
I. la nÉcessitÉ de rendre applicable aux collectivitÉs ultramarines du pacifique des dispositions introduites dans le code monétaire et financier postérieurement aux ordonnances ayant recodifiÉ son livre VII
L’article 2 tire la conséquence des modifications apportées aux dispositions des livres I, V et VI du code monétaire et financier par les dispositions de trois lois adoptées postérieurement aux ordonnances présentées à l’article 1er en les rendant applicables dans les collectivités ultramarines du Pacifique.
Il s’agit des dispositions de :
– la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte aux 1° à 4° du présent article (modifications apportées aux articles L. 773-4, L. 773-5, L. 773-28, L. 783-15, L. 774-4, L. 774-5, L. 774-28, L. 784-15, L. 775-4, L. 775-5, L. 755-22 et L. 785-14 du livre VII du code monétaire et financier) ;
– la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat au 5° du présent article (modifications apportées aux articles L. 732-3, L. 733-3 et L. 734-3 du livre VII du code monétaire et financier) ;
– la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023, aux 6° et 7° du présent article (modifications apportées aux articles L.742-11, L.743-11, L.744-11, L.783-2, L.784-2 et L.785-2 du livre VII du code monétaire et financier) ;
L’article prévoit, pour la transposition aux articles L.732-3, L.733-3 et L734-3 des dispositions de l’article L.133-23, dans sa rédaction issue de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022, relatives au plafonnement des frais de rejets, une entrée en vigueur différée au 1er janvier 2024, de manière à laisser aux établissements bancaires une période pour procéder aux développements informatiques nécessaires pour automatiser le traitement des demandes de paiement.
II. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté un amendement rédactionnel et de coordination.
III. les modifications apportÉes par la commission
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté cet article modifié par l’amendement rédactionnel CF9 du rapporteur.
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La commission adopte l’amendement rédactionnel CF9 de M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur.
Elle adopte l’article 2 modifié.
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Article 3
Suppression d’adaptations génériques dans certaines dispositions du code monétaire et financier applicables en outre-mer
Adopté par la commission sans modification
Le présent article supprime une adaptation générique qui était prévue au 8° de l’article L. 711-5 relatif à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française et au 6° de l’article L. 711-6 concernant Wallis-et-Futuna. Elle consistait à remplacer systématiquement les références relatives à la Banque de France par celles à l’Institut d’émission d’outre-mer.
I. la nÉcessitÉ de supprimer le remplacement systÉmatique des rÉférences à la banque de France par des rÉfÉrences à l’institut d’Émission d’outre-mer
Les articles L.711-5 et L.711-6 du code monétaire et financier présentent les adaptations génériques à effectuer au sein du livre VII du code monétaire et financier, le premier s’appliquant en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, le second s’appliquant à Wallis-et-Futuna.
Le présent article propose de supprimer le 8° de l’article L.711-5 et le 6° de l’article L.711-6 de manière à supprimer le remplacement systématique des références à la Banque de France (BdF) par les références à l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM), de manière à ne conserver que les adaptations équivalentes au cas par cas, ce que le rapporteur trouve approprié.
II. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
III. les modifications apportÉes par l’AssemblÉe nationale
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté cet article sans modification.
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La commission adopte l’article 3 non modifié.
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Article additionnel après l’article 3
Application à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna du règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022
Amendement CF10 du rapporteur adopté par la commission
Le présent article rend applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, Nouvelle-Calédonie, Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna les nouvelles dispositions du règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 relatives à l’expérimentation d’un régime, pour les infrastructures de marché, reposant sur la technologie des registres distribués.
I. La mise en cohÉrence du droit national avec le rÈglement (UE) 2022/858 portÉ par l’article 7 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union europÉenne dans les domaines de l’Économie, de la santÉ, du travail, des transports et de l’agriculture
L’article 7 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture, a mis le droit national en cohérence avec le régime pilote instauré par le règlement (UE) 2022/858 du 30 mai 2022 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués.
« Visant à promouvoir le développement du numérique dans le secteur financier tout en minimisant les risques que pourrait présenter ce développement, le règlement (UE) 2022/858, qui entre en vigueur le 23 mars 2023, crée un régime d’expérimentation d’une durée initiale de trois ans, pouvant être portée à six ans, qui doit permettre aux opérateurs d’infrastructures de marché d’acquérir une expérience de l’utilisation de la technologie des registres distribués », pour reprendre les mots du rapporteur pour avis de la commission des finances à l’occasion de l’examen du projet de loi en première en lecture à l’Assemblée nationale, M. Daniel Labaronne. ([4])
L’approfondissement de la technologie des registres distribués (Distributed Ledger Technology, ou DLT ; en français, dispositif d’enregistrement électronique partagé, ou DEEP), relative aux infrastructures de marché, paraissait, aux yeux du rapporteur pour avis, justifiée, au regard de ses avantages tels que la réduction du nombre d’intermédiaires et d’étapes nécessaires, des mécanismes de pré-négociation et post-négociation des titres plus rapides et plus efficaces, une meilleure gestion et un meilleur partage de données standardisées.
Celui-ci constatait que « le droit français des titres (…) ne [permettait] pas, en l’état actuel, de négocier des titres inscrits en DLT sur une plateforme de négociation.
II. l’adoption d’UN amendement rendant applicable ces dispositions À Saint-Pierre et-Miquelon, EN Nouvelle-CalÉdonie, EN Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté l’amendement CF 10 du rapporteur portant article additionnel qui tend à rendre applicable ces évolutions en outre-mer.
Il est en effet rappelé que les règlements européens ne sont pas d’applicabilité directe dans les pays et territoires d’outre-mer (PTOM) que sont Saint-Pierre-et-Miquelon, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis et Futuna.
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Amendement CF10 de M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. L’amendement vise à prévoir l’application à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna du règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués.
La commission adopte l’amendement.
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Article 4
Corrections rédactionnelles au titre II du livre VII du code monétaire et financier, insertion d’une définition de l’argent « liquide »
Adopté par la commission sans modification
Le présent article procède à des corrections au titre II du nouveau livre VII du code monétaire et financier, en particulier à l’article L. 722-3 et insère la définition de la notion d’argent liquide du règlement UE/1672 du 23 octobre 2018.
I. des corrections au titre II « organisation spÉcifique de la politique monÉtaire » du livre VII du code monÉtaire et financier et l’insertion d’une dÉfinition de l’argent liquide
Le titre II du livre VII du code monétaire et financier porte sur l’organisation spécifique de la politique monétaire, des opérations de paiement et des transferts de fonds en outre-mer. La section 2 du chapitre II, intitulée « Information sur le donneur d’ordre et le bénéficiaire accompagnant les transferts de fonds » recense les règles applicables à la matière à Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.
Le présent article procède à des rectifications matérielles et complète l’article L.722-3 du code monétaire et financier d’une définition de l’argent liquide, à savoir « les espèces, les instruments négociables au porteur, les marchandises servant de réserves de liquides et les cartes prépayées. Constituent des marchandises servant de réserves de liquides les pièces contenant au moins 90 % d’or et le métal non monnayé tel que lingots, pépites et autres agglomérats d’or natif contenant au moins 99,5 % d’or. »
Cette définition est celle du règlement européen UE/1672 du 23 octobre 2018 ([5]) . Ce règlement n’étant pas applicable dans les collectivités ultramarines du pacifique, un texte spécial était nécessaire pour que la définition puisse y être appliquée, en cohérence avec les dispositions applicables dans l’Hexagone et les territoires ultramarins hors Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.
II. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
III. les modifications apportÉes par l’AssemblÉe nationale
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté cet article sans modification.
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La commission adopte l’article 4 non modifié.
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Article additionnel après l’article 4
Dispositions relatives à l’encaissement des chèques en Polynésie française,
en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna
Amendement CF11 du rapporteur adopté par la commission
Le présent article corrige certaines erreurs de rédaction intervenues dans la transposition des dispositions relatives à l’encaissement des chèques en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna, lors de la recodification du titre VII du code monétaire et financier.
À l’initiative de son rapporteur, la commission des finances a adopté un amendement portant article additionnel qui corrige certaines erreurs de rédaction intervenues dans la transposition des dispositions relatives à l’encaissement des chèques en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna, lors de la recodification du titre VII du code monétaire et financier.
Il s’agit, aux articles L.732-2 pour la Nouvelle-Calédonie, L.733-2 en Polynésie française et L.734-2 pour Wallis-et-Futuna de :
– supprimer une mention qui ajoute systématiquement l’intervention de l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) à celle de la Banque de France, qui n’est pas adaptée ;
– supprimer des références à la France « hexagonale » qui n’ont pas lieu d’être ;
– corriger la transposition dans les collectivités du Pacifique de l’article L. 131-85 selon lequel la Banque de France informe les établissements bancaires des personnes nouvellement interdites bancaires et judiciaires avec l’aide du fichier central des chèques et du fichier des comptes bancaires et assimilés (FICOBA).
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Amendement CF11 de M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. Il s’agit pour l’essentiel d’un amendement rédactionnel, même s’il est long. L’objectif poursuivi est de mettre à jour diverses dispositions relatives à l’encaissement des chèques en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CF4 de M. Christian Baptiste.
M. Christian Baptiste (SOC). Les derniers rapports de l’Iedom ont montré que les frais bancaires avaient augmenté dans les territoires d’outre-mer, alors même qu’ils y étaient déjà excessifs. En moyenne, chaque service bancaire est facturé entre 5 et 6 euros de plus que dans l’Hexagone. La Guadeloupe et la Martinique sont particulièrement concernées. L’amendement vise à lutter contre ce phénomène.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. D’une part, il importe de consulter au préalable les collectivités d’outre-mer. En ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie, Mme la ministre déléguée a pris l’engagement qu’une discussion serait engagée avec le haut-commissariat sur cette question.
D’autre part, d’un point de vue juridique, l’amendement me semble manquer de solidité car il traite à la fois des territoires relevant de l’article 73 de la Constitution et de ceux régis par l’article 74. Or ces deux catégories de territoires sont soumises à des régimes distincts. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
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Article 5
Tarification des retraits d’espèce dans un distributeur automatique
Adopté par la commission sans modification
L’article 5 modifie le 14° des articles L.752-3 et L.753-3 pour borner la gratuité des retraits d’espèces dans un distributeur automatique en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française aux seuls retraits aux distributeurs de l’établissement bancaire où le client a domicilié ses comptes.
I. la gratuitÉ de tous les retraits d’espÈces par carte en polynÉsie française et en nouvelle-calÉdonie en application de l’ordonnance du 15 février 2022
Les articles L.752-3 et L.753-3, issus de l’ordonnance du 15 février 2022 ayant procédé à la recodification du livre VII du code monétaire et financier, listent les services bancaires pour lesquels le Gouvernement peut définir par décret les valeurs maximales que les établissements bancaires peuvent facturer aux personnes physiques respectivement en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Ils relèvent du titre V Conditions d’application en outre-mer des dispositions du Livre III relatif aux services.
Les 14° de ces deux articles prévoient un principe de gratuité des retraits d’espèces aux distributeurs, sans précision supplémentaire. Ce principe est donc général, qu’il s’agisse d’un client de la banque dont relève le distributeur automatique ou non.
Ces dispositions doivent être comparées aux dispositions du livre VII du code monétaire et financier dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 15 février 2022. Auparavant,
– en Nouvelle-Calédonie, tous les retraits d’espèces quel que soit le réseau, pouvaient être payants ; aucune gratuité de droit n’était prévue ([6]) ;
– en Polynésie-française, la formulation utilisée, à l’ancien article L. 753-2-1 ([7]) qualifiée par la DG Trésor d’« obscur », impliquait une gratuité de droit des retraits d’espèces dans les distributeurs automatiques appartenant à la banque dans laquelle le client a domicilié ses comptes, le Gouvernement pouvant prendre un décret pour limiter les tarifs des autres retraits d’espèces dans les distributeurs automatiques.
Le rapporteur rappelle que les livres I à VI du code monétaire et financier ne comportent aucune disposition sur la tarification des retraits d’espèces dans l’Hexagone, contrairement à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française. Comme le rappelle la DG Trésor, « en métropole, la tarification des opérations de retrait d’espèces dans un DAB est libre. La pratique bancaire est de ne pas faire payer les retraits dans un DAB de son réseau et de faire payer le retrait dans le DAB d’un autre réseau bancaire, selon des modalités variables (dans certaines banques dès le premier retrait, dans d’autres, au-delà d’un certain nombre de retraits par mois ; cela dépend aussi du type de carte) car le retrait dans un DAB par une personne qui n’est pas cliente de la banque gestionnaire du DAB est facturée par cette dernière à la banque de la personne qui a fait le retrait. »
Le présent article modifie le 14° des articles L.752-3 et L.753-3 en limitant le principe de gratuité totale des retraits d’espèces, par carte, aux seuls retraits d’espèces effectués dans un appareil appartenant au réseau de la banque auprès duquel le client a domicilié ses comptes. Dans les autres cas, dans la rédaction proposée, le Gouvernement conserverait la possibilité de définir par décret les valeurs maximales pouvant être facturées par les banques dans ces deux territoires.
D’après la DG Trésor, il s’agit de corriger une erreur intervenue durant le processus de codification et signalée par le comité des banques de Nouvelle-Calédonie.
Pour le Conseil d’État, « cette limitation » à « la liberté pour les établissements bancaires de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française de fixer librement les tarifs de ce service » « est justifiée par un motif général tenant à la situation économique particulière de ces territoires, où la concurrence est limitée et le niveau de revenu moins élevé qu’en métropole. » Il considère « qu’il ne résulte pas de cette limitation à la liberté d’entreprendre d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi. »
Le présent article ne modifie pas les autres dispositions relatives à la possibilité, aux articles L.752-3 et L.753-3, de plafonner en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, par décret, certains tarifs de services bancaires (ouverture, tenue et clôture de compte, moyens de consultation à distance du compte, carte de paiement, frais d’opposition sur chèque)
Le rapporteur qualifie le dispositif proposé d’équilibré.
III. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
IV. les modifications apportÉes par l’AssemblÉe nationale
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté cet article sans modification.
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Amendements de suppression CF2 de M. Perceval Gaillard et CF5 de M. Stéphane Lenormand.
M. Perceval Gaillard (LFI-NUPES). Cet article revient sur la gratuité de tous les retraits d’espèce dans les distributeurs automatiques de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française. À en croire le Gouvernement, l’introduction de cette gratuité serait une erreur, qu’il souhaite corriger ici. Or cette « erreur » bénéfice aux citoyens ultramarins concernés ; revenir dessus aurait des conséquences pour leur budget, alors même que les frais bancaires sont plus élevés dans ces collectivités que dans l’Hexagone. C’est particulièrement vrai en Polynésie française, malgré un accord entre le haut-commissaire et les banques visant à faire baisser ces frais de 5,5 % à partir du 1er avril.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. L’article vise effectivement à corriger une erreur intervenue durant le processus de codification. Par ailleurs, il répond à une demande des acteurs locaux, notamment les Néo-Calédoniens. Avis défavorable.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Même avis.
M. Antoine Léaument (LFI-NUPES). J’ai du mal à comprendre pourquoi les retraits d’espèces seraient payants. Il ne me semble pas que ce soit le cas dans l’Hexagone, en dehors des frais découlant de la possession d’une carte bancaire. Si d’aventure cela existait, je vous suggérerais d’interdire cette pratique. Retirer des espèces, cela revient à aller chercher à la banque l’argent qu’on y a déposé. Pourquoi faudrait-il payer pour cela ?
M. Jocelyn Dessigny (RN). Tous les retraits ne sont pas payants dans l’Hexagone : on ne paie que lorsqu’on effectue un retrait dans une autre banque que la sienne. Cela dit, nous sommes opposés par principe à ce que cette opération soit facturée, que ce soit outre-mer ou dans l’Hexagone. Nous voterons donc en faveur de l’adoption de ces amendements.
M. Philippe Dunoyer (RE). La Nouvelle-Calédonie ne bénéficiait pas de la gratuité pour les retraits d’espèces dans les distributeurs de la banque dont on est client. Ce texte sera donc une avancée pour notre territoire. C’est la raison pour laquelle le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, saisi de cette proposition, a émis un avis favorable. La question de savoir s’il est normal ou pas que cette opération soit facturée par d’autres banques n’entre pas dans le champ de la loi.
La commission rejette les amendements.
Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CF3 de M. Christian Baptiste.
Elle adopte l’article 5 non modifié.
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Amendement CF8 de Mme Nathalie Bassire.
M. Stéphane Lenormand (LIOT). Une diminution des frais bancaires et du montant des commissions dans les outre-mer représenterait sans nul doute un gain de pouvoir d’achat important. Il est donc nécessaire, particulièrement dans le contexte actuel, que le Gouvernement étudie la possibilité de prendre une telle disposition. Cet amendement vise à demander un rapport sur le sujet.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. Votre demande est en partie satisfaite : je vous renvoie aux travaux de l’Observatoire des tarifs bancaires de l’Iedom et aux rapports annuels de cet institut.
La commission rejette l’amendement.
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Article 6
Corrections d’erreurs de numérotation et de renvois de référence
Adopté par la commission sans modification
Le présent article corrige des erreurs de numérotation des articles de renvoi aux articles L. 773-45 et L. 774-45 relatifs aux dispositions applicables en cas de méconnaissance par les Offices des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française de leurs obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme, de gel des avoirs, d’interdiction de mise à disposition, de jeux et de loteries prohibées.
I. les modifications apportÉes par l’article
Les articles L.773-45 et L.774-45 relèvent, au livre VII du code monétaire et financier, de son titre VII, consacré aux « conditions d’application en outre-mer des dispositions du livre V relatives aux prestataires de services ».
Ces articles prévoient, en cas de méconnaissance de leurs obligations, respectivement par l’Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française, l’action possible de l’inspection générale des finances pour faire intervenir l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
La rectification porte sur la correction d’une erreur de renvoi pour étendre le contrôle aux obligations des deux offices en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme.
II. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
III. les modifications apportÉes par l’AssemblÉe nationale
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté cet article sans modification.
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La commission adopte l’article 6 non modifié.
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Chapitre III et chapitre IV
Modernisation des missions de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer et de l’Institut d’émission d’outre-mer
Articles 7 et 8
Nouvelles compétences pour l’IEDOM et l’IEOM
Adoptés par la commission avec modifications
Les dispositions relatives à la modernisation des missions de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer (IEDOM) et les missions de l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) aux articles 7 et 8 concernent les échanges de données statistiques, l’extension des échanges d’information sur les comptes bancaires aux comptes de toute nature et aux comptes d’épargne réglementée, comme dans l’Hexagone.
Il est prévu de réduire le nombre de commissaires aux comptes de l’IEDOM à un.
Par parallélisme avec la Banque de France, l’IEOM, pourra également noter la situation financière des entreprises et groupements professionnels volontaires.
Ces dispositions n’ont pu être portées par la refonte du livre VII du code monétaire et financier, car la recodification ne s’effectue qu’à droit constant.
La commission des finances a adopté trois amendements rédactionnels et de coordination, l’un à l’article 7 (CF12) et les autres à l’article 8 (CF13 et CF14).
I. prÉsentation de l’IEDOM et de l’IEOM
L’Institut d’émission des départements d’outre-mer (IEDOM) et l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) relèvent du titre II « Organisation spécifique de la politique monétaire, des opérations de paiement et des transferts de fonds en outre-mer » du livre VII du code monétaire et financier, et précisément de son chapitre Ier, « La politique monétaire en outre-mer ».
La première section intitulée « Les signes monétaires » du chapitre Ier distingue :
– les territoires ultramarins dont la monnaie est l’Euro (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion, ainsi que dans les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon), et où les missions de la Banque de France relèvent de l’Institut d’émission d’outre-mer (IEDOM), aux articles L.721-1 à L.721-3 ;
– les territoires ultramarins où circule le Franc pacifique (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna), dont « le service de l’émission monétaire (…) est assuré par l’Institut d’émission d’outre-mer », la banque de France n’intervenant pas dans ces collectivités, aux articles L.721-4 à L.721-6.
La seconde section porte les dispositions relatives aux deux instituts (aux articles L.721-7 à L.721-26).
A. L’Institut d’émission des départements d’outre-mer (IEDOM)
L’IEDOM est une filiale de la Banque de France, au statut de société par actions simplifiée, dont la Banque de France détient la totalité du capital.
Il est chargé d’exécuter les missions de la Banque de France dans les départements et collectivités d’outre-mer susmentionnés dont la monnaie est l’Euro. En pratique, il assure l’entretien et la bonne circulation de la monnaie fiduciaire, il traite les situations de surendettement et a un rôle d’observateur économique de la zone.
Les dispositions de l’IEDOM figurent aux articles L.721-7 à L.721-17 et R.721-3 à R.721-11 du code monétaire et financier.
B. L’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM)
L’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM), établissement public dont le siège est à Paris, est la banque centrale des collectivités d’outre-mer du Pacifique dont la monnaie est le franc Pacifique.
Il émet la monnaie et en assure la bonne circulation. Il met en œuvre la politique monétaire de l’État, établit la balance des paiements de la zone, tient le compte du Trésor public, surveille la sécurité des systèmes et des moyens de paiement, tient le fichier des comptes outre-mer, tient un observatoire des tarifs bancaires. Il a un rôle d’observateur économique de la zone. Il dispose de 3 agences localement, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.
Les dispositions de l’IEDOM figurent aux articles L.721-18 à L.721-26 et R.721-12 à R. 721-35 du code monétaire et financier.
II. une modernisation des missions des deux instituts
Les différentes dispositions des articles 7 et 8, qui « modernisent » les activités des deux instituts, n’ont pas pu être adoptées à l’occasion de la refonte du livre VII du code monétaire et financier, « car la recodification ne s’effectue qu’à droit constant », comme le rappelle l’étude d’impact fournie par le Gouvernement.
A. Des modifications comparables pour les deux instituts
1. L’échange de données statistiques
Il est prévu, pour les deux instituts, d’inscrire dans la loi la possibilité d’établir des échanges statistiques, à l’image de ce qui est prévu pour la Banque de France avec l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) :
– pour l’IEDOM, à l’article L.721-7, avec l’INSEE,
– pour l’IEOM, à l’article L.721-21, avec les instituts statistiques de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna.
D’après la DG Trésor, « il s’agit de donner un cadre juridique à [des] échanges qui existent déjà en pratique et sont régis par un partenariat entre l’IEOM, l’IEDOM, l’INSEE, l’ISPF (en Polynésie), l’ISEE (en Nouvelle-Calédonie) et l’AFD qui s’intitule « CEROM » (comptes économiques rapides pour l’outre-mer) qui repose sur une convention intitulée « accord-cadre de partenariat » signée le 1er juin 2021 pour une durée de cinq ans, remplaçant la précédente convention du 27 juillet 2017. Cette convention permet d’assurer une coopération entre les Instituts d’émission, l’INSEE, les agences locales de l’IEOM et les instituts statistiques locaux. »
Le rapporteur approuve cette disposition qui tend à améliorer l’information économique et la capacité d’analyse macro-économique des collectivités d’outre-mer.
2. L’élargissement de l’échange de données FICOM
L’IEDOM et l’IEOM participent à l’identification et à la centralisation des comptes détenus par les personnes physiques et morales dans leurs zones de compétences, en application respectivement des articles L.721-14 et L.721-24 du code monétaire et financier, au sein du fichier des comptes d’outre-mer (FICOM), qui existe depuis le début des années 1990.
territoires qui relèvent du FICOM
IEDOM |
IEOM |
L.721-14 |
L.721-24 |
Saint-Pierre Saint-Martin Saint-Barthélemy |
Nouvelle-Calédonie Polynésie Française Wallis-et-Futuna |
Les informations recensées dans ce fichier unique géré par l’IEOM et l’IEDOM sont l’équivalent du FICOBA (Fichier des comptes bancaires et assimilés), géré dans l’Hexagone et dans les territoires relevant de l’article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte) par la Direction générale des finances publiques.
Aux articles 7 et 8 du projet de loi, il est proposé de modifier les articles L.721-14 et L.721-24 pour compléter le recensement, aujourd’hui limité aux seuls comptes sur lesquels peuvent être tirés des chèques, aux comptes de toute nature ainsi qu’aux locations de coffres-forts, à l’image de ce qui est déjà prévu pour le FICOBA.
Pour le rapporteur, il est en effet nécessaire d’aligner les deux dispositifs, ce qui se traduira par la prise en compte, d’après la DG Trésor, « des comptes de paiement, des locations de coffres-forts, de la déclaration des bénéficiaires effectifs et de leurs mandataires, des comptes titres, des comptes d’épargne réglementée bénéficiant d’une fiscalité avantageuse dont le contrôle de la multi-détention a été institué par le décret n° 2021-277 du 12 mars 2021, des comptes d’épargne non réglementée et des comptes à terme. »
Sur la base des données du FICOM et des informations relatives aux incidents de paiement et interdits bancaires et judiciaires, transmises par la Banque de France, les instituts informent les banques concernées. À cet égard, les articles 7 et 8 du projet de loi prévoient, pour les deux instituts, du fait de l’élargissement des comptes concernés, une information « des établissements et [des] personnes habilitées à tenir les comptes et à ouvrir notamment des comptes d’épargne réglementée ».
L’encart ci-dessous présente le circuit d’information.
– Les déclarations d’incident de paiement et les levées d’interdiction bancaire sont déclarées par les banques au fichier central des chèques (FCC) tenu par la Banque de France (BdF) qui enregistre les déclarations d’incidents de paiement ; les interdictions judiciaires sont déclarées par les parquets des tribunaux.
– Lors d’une interdiction bancaire, celle-ci s’applique à l’heure actuelle à tous les comptes à partir desquels peuvent être tirés des chèques. Les banques qui ne sont pas à l’origine de la déclaration d’incident, doivent être informées, demander la restitution des formules de chèque et ne plus en délivrer tant que l’interdiction bancaire n’est pas levée.
– La BdF croise la liste des nouveaux interdits bancaires et judiciaires (ainsi que des levées) avec le FICOBA afin d’identifier tous les comptes desquels peuvent être tirés des chèques détenus par la personne fichée et informe les banques qui ne sont pas à l’origine de la déclaration d’incident de paiement. Pour les zones qui relèvent de l’IEDOM et l’IEOM, ceux-ci reçoivent chaque jour, de la BdF, le fichier des nouvelles interdictions bancaires et judiciaires et des levées et le croisent avec le FICOM.
– Les Instituts informent ensuite les banques qui seraient concernées.
L’IEDOM (art. L. 712-14, 2ème alinéa) et l’IEOM (art. L. 724-14, 2ème alinéa) transmettent aux établissements de crédit établis à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre et Miquelon (IEDOM) et dans les collectivités du Pacifique (IEOM), la liste des personnes qui sont interdites bancaires, judiciaires et qui sont titulaires d’un compte dans une banque située dans l’un de ces territoires ainsi que la liste des levées d’interdiction bancaire.
Source : DG Trésor, réponse au rapporteur.
B. Pour l’IEDOM, le passage à un commissaire aux comptes
L’article 7, relatif à l’IEDOM, prévoit la suppression de la disposition de l’article L.721-12 selon lequel « le contrôle de l’Institut est exercé par les commissaires aux comptes de la Banque de France. »
Cette suppression a pour conséquence de soumettre le contrôle des comptes de l’IEDOM au droit commun des sociétés par actions simplifiées, prévu aux articles D.227-1 et D.221-5 du code de commerce, à savoir un commissaire aux comptes, choisi par l’IEDOM.
La DG Trésor qualifie le recours actuel, par parallélisme avec les dispositions relatives à la Banque de France, à deux commissaires aux comptes, de disproportionné, du fait de son volume d’activité. Le rapporteur relève également qu’en application de l’ordonnance n° 2021-1200 du 15 septembre 2021 relative aux titres Ier et II de la partie législative du livre VII du code monétaire et financier, les comptes de l’institut ne sont plus consolidés avec les comptes de la Banque de France. De plus, les comptes de l’IEOM sont certifiés par un seul commissaire aux comptes.
Pour le rapporteur, cette disposition est adaptée au volume d’activité et au statut de l’IEDOM, avec une nécessité de vigilance.
C. Les modifications propres à l’IEOM
L’article 8 prévoit, pour l’IEOM, une protection contre les procédures collectives et les procédures civiles d’exécution des instruments financiers et créances nantis, cédés en propriété ou autrement constitués en garantie au profit de tiers par l’IEOM. Il s’agit d’une transposition d’une disposition qui existe déjà pour la Banque de France (I de l’article L.141-4 du code monétaire et financier). Pour le rapporteur, cette transposition à l’IEOM est bien justifiée par le rôle de banque centrale de l’Institut.
Est également prévue la formalisation d’une possibilité, pour l’institut, de noter la situation financière des entreprises volontaires et de communiquer les informations recueillies à certaines personnes morales.
III. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté aux articles 7 et 8 deux amendements de coordination avec la suppression de l’article 9.
IV. les modifications apportÉes par la commission
La commission des finances a adopté ces articles modifiés par les amendements CF12 et CF14 du rapporteur, relatifs à des coordinations avec le rétablissement de l’article 9, et par l’amendement rédactionnel CF13.
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La commission adopte l’amendement de coordination CF12 de M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur.
Elle adopte l’article 7 modifié.
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Amendement CF7 de M. Stéphane Lenormand.
M. Stéphane Lenormand (LIOT). Les comptes de l’Iedom sont contrôlés par deux commissaires aux comptes de la Banque de France. L’alinéa 4 de l’article 7 supprime cette disposition. Désormais, un seul commissaire aux comptes interviendra. Selon Hervé Maurey, rapporteur au Sénat, cette modification est justifiée par le volume limité des opérations de l’institut et par « la simplicité des comptes ». Toutefois, il estime que le Gouvernement devra s’assurer que cette nouvelle pratique « ne nuit pas à la qualité de ses comptes ».
Nous proposons donc que le Gouvernement s’assure de l’opportunité de cette disposition. Pour ce faire, un rapport serait remis au Parlement dans un délai de deux ans. L’Iedom et la Banque de France pourraient ainsi donner un avis sur la question après deux exercices comptables.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. Le contrôle par deux commissaires aux comptes est une règle dérogatoire qui vise trois catégories d’entreprises : celles qui émettent des titres sur un marché réglementé, celles qui établissent des comptes consolidés et certains types d’entreprises dont l’activité est très réglementée, comme les établissements de crédit, les sociétés de financement et les entreprises d’investissement sous conditions. L’Iedom, qui est une société par actions simplifiée, n’entre dans aucune de ces catégories. La question était plutôt de savoir pourquoi l’institut était soumis à une règle plus stricte. Nous proposons donc de passer à la règle de droit commun, à savoir le contrôle par un seul commissaire. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
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À l’article 8, la commission adopte successivement l’amendement rédactionnel CF13 et l’amendement de coordination CF14 de M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur.
Elle adopte l’article 8 modifié.
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Chapitre V
Le fichier des comptes outre-mer
Article 9
Fondement législatif du fichier des comptes outre-mer, fondement réglementaire pour l’accès à ses données
Rétabli par la commission
Le présent article insère un nouvel article L. 721-28, créé dans une nouvelle sous-section, de manière à préciser le fondement législatif du fichier des comptes outre-mer (FICOM), qui centralise les données sur les comptes de toute nature émanant des deux Instituts d’émission.
L’accès à ses données est renvoyé à un arrêté commun des ministres des intérieurs et des outre-mer.
La commission a adopté l’amendement CF15 de rétablissement du rapporteur.
L’article 9 insère un nouvel article à la section 2 « les Instituts » du chapitre Ier « La politique monétaire en outre-mer » du titre II « Organisation spécifique de la politique monétaire, des opérations de paiement et des transferts de fonds en outre-mer » du livre VII.
Ce nouvel article, L.721-28, est intégré au sein d’une nouvelle sous-section 3 intitulée « Le fichier des comptes outre-mer ». Comme présenté au commentaire précédent, l’IEDOM (art L.721-14) et l’IEOM (art L.721-24), assurent une centralisation des informations relative, en l’état du droit, aux comptes-chèques. Les articles 7 et 8 prévoient de l’étendre aux comptes de toute nature ainsi qu’aux locations de coffres-forts, à l’image de ce qui est déjà prévu pour le FICOBA.
L’article R.721-23 du code monétaire et financier prévoit par ailleurs que l’IEOM est responsable du traitement automatisé des déclarations qu’il centralise.
Les informations enregistrées dans le FICOM sont actuellement accessibles :
– en application du code monétaire et financier, aux comptables publics, « à leur demande, pour les opérations de recouvrement des créances publiques de toute nature » en application des articles L.721-15 et L.721-26, selon lesquels les deux instituts sont « délié[s] du secret professionnel pour l’application de cette disposition » ;
– ainsi qu’à d’autres personnes ou organismes en vertu d’un texte leur attribuant un droit de communication que ce soit dans le cadre d’une habilitation législative (magistrats et officiers de police judiciaire agissant dans le cadre d’une procédure pénale selon le code de procédure pénale, TRACFIN) ou de compétence locale (par exemple : articles 1009 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie, article 442-1 code des impôts de Polynésie).
À titre de comparaison, pour le FICOBA, les articles 1649A à 1649AC du code général des impôts et L.148 à L.151B du livre des procédures fiscales prévoient des habilitations législatives, en particulier pour les officiers ministériels, auxquelles s’ajoutent l’habilitation législative générale des magistrats et des officiers de police judiciaire selon le code de procédure pénale (à l’image du FICOM).
Le rapporteur fait remarquer que ces dispositions relatives à l’accès au FICOBA sont complétées par un arrêté du 14 juin 1982 relatif à l’extension d’un système automatisé de gestion du fichier des comptes bancaires, qui liste les personnes habilitées à accéder à ce fichier (agents des douanes, de la répression des fraudes, de l’Autorité des marchés financiers notamment).
I. La nÉcessitÉ de renforcer le fondement lÉgislatif Du fichier des comptes outre-mer, dans un souci de sÉcuritÉ juridique
Le présent article crée un nouvel article selon lequel « le fichier des comptes outre-mer rassemble les données centralisées par l’Institut d’émission des départements d’outre-mer et par l’Institut d’émission d’outre-mer en application des dispositions de l’article L.721-14 et des deux premiers alinéas de l’article L.721-24. »
D’après la DG Trésor, l’existence d’une base législative générale a été jugée nécessaire par le Conseil d’État, du fait :
– de l’extension des données échangées, en application du projet de loi, aux données relatives aux comptes de toute nature centralisées par les deux Instituts d’émission (IEDOM et IEOM)
– des deux personnalités juridiques distinctes des Instituts, leurs compétences étant exercées de manière indépendante chacun en ce qui concerne sa zone géographique d’intervention ;
– de l’interprétation possible des dispositions actuelles (articles L.721-14 et L. 721-24), qui pourraient être interprétées comme ouvrant à chaque institut la possibilité de gérer son propre système.
Le rapporteur estime que cette disposition renforce la lisibilité du droit.
L’article 9 renvoie à un arrêté conjoint du ministre de l’économie et du ministre des outre-mer la liste des personnes habilitées à accéder au FICOM.
En réponse à une demande de la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL), une disposition du projet initial qui prévoyait une ouverture de l’accès du FICOM à toutes personne pouvant accéder au FICOBA a été supprimée. Selon le rapporteur, s’il apparaît tout à fait légitime de chercher un parallélisme entre l’accès aux données du FICOM et celles du FICOBA, une ouverture de l’accès du FICOM à toutes personne pouvant accéder au FICOBA était en effet trop large.
Interrogée par le rapporteur sur les garanties données au respect de la protection des données personnelles, la DG Trésor lui a indiqué que la CNIL sera à nouveau consultée, cette fois-ci sur le projet d’arrêté conjoint (consultation obligatoire).
Le rapporteur qualifie ces dispositions d’adaptées et conformes au respect des données personnelles.
III. les modifications apportÉes par le sÉnat
Cet article a été supprimé par le Sénat au motif d’une volonté de parallélisme avec le FICOBA (fichier des comptes bancaires et assimilés), qui disposerait d’un fondement réglementaire et dont l’accès serait encadré par la loi.
IV. les modifications apportÉes par l’AssemblÉe nationale
La commission des finances a adopté l’amendement du rapporteur CF15 rétablissant cet article, dans le prolongement de l’argumentation du Conseil d’État.
Pour le rapporteur, suivi par la commission, le fondement réglementaire de l’accès au FICOM apparaît tout à fait fondé, et respectueux du respect des conditions d’accès aux données personnelles.
Pour lui, un parallélisme avec les dispositions relatives au FICOM existe bien au regard de l’arrêté du 14 juin 1982 susmentionné, dont relèvent une partie non négligeable des personnes habilitées à consulter le FICOBA.
De plus, le code de procédure pénale s’appliquant de plein droit aux collectivités d’outre-mer, les habilitations des magistrats et officiers de police judiciaire continueront à s’appliquer.
Il relève également que vu l’obligation faite aux organismes teneurs de comptes de les déclarer à l’administration fiscale créée par l’article 75 de la loi de finances n° 80-30 du 18 janvier 1980 ([8]) et les dispositions de l’article 1649 A du code général des impôts ([9]), on peut considérer que le FICOBA a un fondement légal.
Aller plus loin dans le parallélisme se heurterait aux spécificités ultramarines : des habilitations législatives plus larges seraient contraires aux statuts particuliers des collectivités d’outre-mer, notamment celles du Pacifique.
Pour le rapporteur, les dispositions de l’article 9 du projet de loi s’inspirent d’une recherche de parallélisme, dans les limites de ce que les statuts particuliers des collectivités d’outre-mer autorisent.
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Amendement CF15 de M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir l’article 9. Comme je le disais, il y a eu une mauvaise compréhension du dispositif du côté du Sénat. Je vous appelle à le rétablir, car il nous semble important pour clarifier le droit s’agissant des fichiers bancaires outre-mer.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Avis favorable.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Cela m’amuse toujours d’entendre que les sénateurs n’ont pas compris. Nous leur transmettrons le message…
Les sénateurs ont du bon sens, monsieur le rapporteur. L’article 9 créait un déséquilibre entre le Ficoba et le Ficom : le premier a un fondement réglementaire mais son accès est encadré par la loi, et vous vouliez faire exactement l’inverse pour le second ! Nous sommes farouchement opposés à la réintroduction de ce dispositif.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur. Le Ficoba a un fondement législatif clair. Nous proposons de clarifier celui du Ficom, ce qui mettrait ces deux fichiers au même niveau.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 9 est ainsi rétabli.
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Chapitre 6
Dispositions transitoires et finales
Article 10
Mise à jour de la numérotation de deux articles du code monétaire et financier applicables en outre-mer
Adopté par la commission sans modification
Le présent article procède à la mise à jour de références à l’article 18 de l’ordonnance n° 2020-115 du 12 février 2020 renforçant le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
L’article 10 met à jour des références au V de l’article 18 de l’ordonnance n° 2020-115 du 12 février 2020 renforçant le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, tenant compte d’une nouvelle numérotation du livre VII du code monétaire et financier.
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
La commission des finances a adopté cet article sans modification.
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La commission adopte l’article 10 non modifié.
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Article 11
Entrée en vigueur différée de certaines dispositions
Adopté par la commission sans modification
Le présent article prévoit une entrée en vigueur différée des articles L. 721-14 et L. 721-15, ainsi que des articles L. 721-24 et L.721-26 concernant les comptes d’épargne réglementée, la déclaration des coffres-forts, les mandataires et les bénéficiaires effectifs de personnes morales, à l’image des dispositions prévues pour les organismes homologues dans l’Hexagone.
L’article 11 prévoit une entrée en vigueur différée pour les L.721-14 et L.721-15, au 1er janvier 2024, ainsi que des articles L.721-24 et L.721-26 concernant la déclaration des coffres-forts, les mandataires et les bénéficiaires effectifs de personnes morales, au 1er janvier 2025. Il s’agit de permettre aux banques dont les comptes relèvent du FICOM de mettre à niveau leurs systèmes d’exploitation des comptes en outre-mer comme dans l’Hexagone.
Le rapporteur considère ces délais comme étant adaptés puisqu’identiques à ceux qui ont été donnés aux organismes homologues opérant dans l’Hexagone.
– les dispositions réglementaires relatives aux produits d’épargne réglementée issues du décret n° 2021-277 du 12 mars 2021 n’entreront en vigueur que le 1er janvier 2024 ;
– les dispositions législatives concernant la déclaration des coffres-forts, des mandataires et des bénéficiaires effectifs de personnes morales des comptes existants entreront en vigueur le 1er janvier 2025 aux termes de l’article 18 modifié de l’ordonnance n° 2020-115 du 12 février 2020.
I. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
II. les modifications apportÉes par l’AssemblÉe nationale
La commission des finances de l’économie générale et du contrôle budgétaire a adopté cet article sans modification.
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Amendement CF6 de M. Stéphane Lenormand.
M. Stéphane Lenormand (LIOT). Il s’agit de faire en sorte que les dispositions relatives à la location de coffres-forts entrent en vigueur le 1er janvier 2024 plutôt que le 1er janvier 2025.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 11 non modifié.
La commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.
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— 1 —
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM) et l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) :
– M. Yves Coquelin, conseiller juridique ;
– M. Paul Brac de la Perriere, chargé de mission à la Banque de France.
Direction générale du Trésor :
– Mme Evelyne Ahipeaud, cheffe du bureau « financement et développement économique des outre-mer » ;
– Mme Isabelle Nardot, adjointe à la cheffe du bureau « financement et développement économique des outre-mer » ;
– Mme Mélanie Thoinet, adjointe au chef du bureau « financement du logement et activités d’intérêt général » ;
M. Jean Vignaud, adjoint au chef du bureau « services bancaires et moyens de paiement ».
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([1]) Conseil d’État (Ass.), 9 février 1990, Élections municipales de Lifou, n° 107400.
([2]) « Ce code aurait été modifié aussi fréquemment que le code métropolitain et ces modifications auraient nécessité une parfaite coordination entre les bureaux sectoriels chargés de la législation en métropole et les bureaux chargés de la législation en outre-mer, coordination qui pouvait se révéler beaucoup plus difficile à mettre en œuvre avec deux codes séparés plutôt qu’avec un seul code. » réponse de la DG Trésor au rapporteur.
([3]) CE, arrêt du 27 avril 2011, 10e et 9e sous-sections réunies, Association La Demeure Historique et autres, 27 avril 2011, n° 309709. « Si le Gouvernement a, dans le délai de trois mois posé par l’article 92 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004, déposé devant le Parlement un projet de loi de ratification d’une ordonnance prise sur le fondement de l’article 38 de la Constitution après habilitation, la circonstance que, postérieurement à l’expiration de ce délai, il ait retiré le projet de loi de ratification de l’Assemblée nationale et l’ait déposé au Sénat n’est pas de nature à avoir rendu caduque l’ordonnance en question
([4]) Voir le commentaire de l’article 5 du projet de loi, devenu article 7 de la loi du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/rapports/cion-soc/l16b0748_rapport-fond.pdf
([5]) Règlement (UE) n° 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005
([6]) Le 15° de l’ancien article L. 743-2-1 prévoyait que le Gouvernement pouvait définir les valeurs maximales facturables pour « le retrait d’espèces, par carte, dans un distributeur automatique en Nouvelle-Calédonie ».
([7]) « Le retrait d’espèces dans un distributeur automatique d’un autre établissement bancaire et dans une commune sur le territoire de laquelle l’établissement bancaire concerné ne dispose d’aucun distributeur automatique ; les autres retraits d’espèces dans un distributeur automatique devant être gratuits ; » (9° de l’ancien article L. 753-2-1).
([8]) Article 75 de la loi de finances n° 80-30 du 18 janvier 1980 : « Les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative et toutes personnes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou espèces doivent déclarer à l'administration des impôts l'ouverture et la clôture des comptes de toute nature. »
([9]) Article 1679 A du code général des impôts : Les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative, les établissements bénéficiant des dispositions des articles L. 511-22 et L. 511-23 du code monétaire et financier pour leurs opérations avec des résidents français et toutes personnes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou fonds doivent déclarer à l'administration des impôts l'ouverture et la clôture des comptes de toute nature ainsi que la location de coffres-forts.
Les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, détenus, utilisés ou clos à l'étranger. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par décret.
Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables.