N° 1507

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 juillet 2023

 

 

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur l’octroi de l’autorisation d’exercer une activité professionnelle aux personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 7 septembre 2021, et de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique socialiste de Sri Lanka relatif à l’autorisation d’exercice d’une activité professionnelle salariée par les membres de la famille des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 23 février 2022

 

PAR M. Alain DAVID,

Député

——

 

AVEC

 

EN ANNEXE

LE TEXTE DE LA COMMISSION
DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1276.

Sénat : 115, 371, 591 et 592 (2022‑2023).


 


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SOMMAIRE

 

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 Pages

introduction

I. Des accords visant à adapter et à moderniser le cadre d’expatriation des agents membres des missions officielles et de leurs familles

A. La nécessité d’adapter le cadre juridique régissant l’accès à l’emploi des membres de la famille des agents de missions officielles

B. Une volonté d’améliorer et de moderniser le cadre d’expatriation des agents

C. Des accords concernant un nombre modeste de personnes mais favorables à l’attractivité des États parties

1. La population couverte par l’accord du 7 septembre 2021 avec le Sénégal

2. Le petit nombre de bénéficiaires de l’accord du 23 février 2022 avec le Sri Lanka

II. Des accords au contenu et à la portée très comparables

A. L’accord franco Sénégalais

1. Un champ relativement classique pour un accord de ce type

2. Des clauses plutôt génériques

a. Les procédures applicables

b. Les immunités civiles, administratives et pénales

c. Le régime fiscal et de sécurité sociale

Les dispositions finales et l’entrée en vigueur

B. L’accord franco-sri lankais

1. Un objet similaire

2. Un contenu assez semblable

a. Les procédures applicables

b. Les immunités civiles, administratives et pénales

c. Le régime fiscal et de sécurité sociale

d. Les dispositions finales et l’entrée en vigueur

Travaux de la commission

Annexe N° 1 : texte adopté par la commission

Annexe N° 2 : carte de l’accès au marché du travail pour les personnes à charge des membres des missions officielles

Annexe N° 3 : liste des contributions écrites

 


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   introduction

 

La commission des affaires étrangères est saisie d’un projet de loi adopté par le Sénat le 24 mai 2023 ([1]), autorisant l’approbation de deux accords qui partagent un objectif commun :

– d’une part, l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur l’octroi de l’autorisation d’exercer une activité professionnelle aux personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 7 septembre 2021 ;

– d’autre part, l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique socialiste de Sri Lanka relatif à l’autorisation d'exercice d’une activité professionnelle salariée par les membres de la famille des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 23 février 2022.

Ces deux accords visent à faciliter l’accès aux marchés locaux de l’emploi pour les personnes à charge des membres de missions officielles françaises à l’étranger, et inversement pour les familles des diplomates dans deux pays concernés vis-à-vis du marché du travail en France.

L’élaboration et la mise en œuvre de ces accords bilatéraux, qui reposent sur un modèle commun, s’inscrivent dans un objectif de modernisation du cadre d’expatriation des agents de missions officielles, fixé dès 2015 avec le projet « Ministère des Affaires étrangères du XXIe siècle » et poursuivi aujourd’hui dans le cadre du plan d’action du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. Les accords conclus avec le Sénégal et avec le Sri Lanka s’inscrivent ainsi dans une longue lignée d’accords similaires, dont les premiers ont été négociés dès les années 1990.

L’application de ces accords permettra aux membres des familles des agents des missions officielles de solliciter une autorisation de travail pendant le temps d’affectation des agents diplomatiques ou consulaires dans les États parties, sans perdre le statut spécial qui leur est conféré par les conventions de Vienne de 1961 et de 1963 sur les relations diplomatiques et sur les relations consulaires.

Le nombre de personnes concernées par ces accords est modeste mais leur entrée en vigueur sera également utile pour le recrutement du réseau diplomatique, consulaire et culturel français dans les pays concernés.


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I.   Des accords visant à adapter et à moderniser le cadre d’expatriation des agents membres des missions officielles et de leurs familles

A.   La nécessité d’adapter le cadre juridique régissant l’accès à l’emploi des membres de la famille des agents de missions officielles

En l’absence d’accord spécifique et en dehors du cadre de l’Espace économique européen et de la Suisse, les membres de la famille des agents de missions officielles disposent d’un statut qui peut empêcher l’accès au marché du travail local.

Si les conventions de Vienne du 18 avril 1961 et du 24 avril 1963 portant sur les relations diplomatiques et sur les relations consulaires, n’interdisent pas le travail rémunéré des personnes à charge des agents de missions officielles –essentiellement les conjoints – et prévoient des exceptions à certains privilèges et immunités en cas d’exercice d’une activité professionnelle salariée, elles n’en confèrent pas moins un statut spécial susceptible de faire obstacle à l’exercice d’une activité salariée. En effet, les employeurs peuvent être réticents à employer des personnes qui bénéficient d’une immunité, notamment pénale.

En outre, les dispositions juridiques nationales font parfois obstacle à l’accession des conjoints aux marchés locaux du travail. En France, les titres de séjour délivrés aux agents diplomatiques et consulaires étrangers, ainsi qu'aux membres de leur famille par le service du protocole du MEAE, ne font pas partie des titres de séjour accordant de droit une autorisation de travailler en France au sens du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Dans ce contexte, la conclusion d’accords permettant à l’État d’accueil de délivrer des autorisations de travail aux personnes à charge permet d’éviter ces contraintes juridiques, en créant la possibilité d’exercer une activité salariée tout en conservant un statut diplomatique. Une procédure administrative simplifiée est également créée, passant en France par la direction générale des étrangers du ministère de l’intérieur et des outre-mer.

B.   Une volonté d’améliorer et de moderniser le cadre d’expatriation des agents

La conclusion des accords du 7 septembre 2021 et du 23 février 2022 répond à une ambition réformatrice du MEAE, selon un projet lancé en 2015. Au plan administratif, une délégation aux familles a également été créée au sein du ministère, afin d’informer les agents de l’existence d’accords facilitant la poursuite de l’activité professionnelle des conjoints expatriés.

Les accords conclus dans ce cadre ont des conséquences concrètes importantes pour les agents et leurs familles, en leur offrant de meilleures conditions de vie familiale et professionnelle et en permettant une meilleure insertion sociale des conjoints d’agents. Ils répondent à une nécessaire modernisation du cadre d’expatriation des agents, dont les conjoints acceptent de moins en moins d’interrompre leur parcours professionnel. La promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes s’en trouve ainsi favorisée, en cohérence avec les objectifs de réforme de la diplomatie française.

En outre, le cadre facilitateur porté par les deux accords est également susceptible de bénéficier au réseau diplomatique, consulaire et culturel français en lui permettant de disposer de compétences qui peuvent faire défaut sur place. En effet, environ un tiers des autorisations de travail octroyées dans le cadre de l’ensemble des accords conclus pour favoriser l’accès des membres de famille d’agents aux marchés locaux du travail ont permis aux personnes concernées d’exercer leur activité dans le réseau diplomatique, consulaire et culturel français ou dans un établissement d’enseignement français à l’étranger homologué par le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse (MENJ).

Les conjoints d’agents diplomatiques et consulaires en poste à l’étranger peuvent actuellement accéder au marché du travail dans plus de 80 pays sans avoir à renoncer intégralement à la spécificité de leur statut, en comptant les 31 pays de l’Espace économique européen et la Suisse. La France est liée par des accords bilatéraux avec 28 États : Canada, Argentine, Australie, Brésil, Nouvelle-Zélande, Roumanie, Costa-Rica, Uruguay, Venezuela, Chili, Bolivie, Congo, Équateur, Pérou, Moldavie, Bénin, Serbie, Albanie, Arménie, République dominicaine, Nicaragua, Burkina Faso, Paraguay, Turkménistan, États-Unis, Kosovo, Andorre et Panama ([2]). En outre, des négociations avec la Bosnie-Herzégovine et le Guatemala sont actuellement en cours de finalisation.

À ces accords s’ajoute l’échange de notes verbales, par lesquelles les États s’engagent à accorder une attention bienveillante aux demandes d’autorisation de travail qui seraient présentées par la mission diplomatique de l’autre État, dans le respect de sa législation. Cela concerne les pays suivants : Singapour, Afrique du Sud, Israël, Colombie, Cap Vert, Gabon, Guinée, Honduras, Inde, Japon, Salvador, Zimbabwe, Cambodge, Maurice, Ouganda, Malaisie, Mexique, Namibie, Émirats arabes unis et Taïwan. Par ailleurs, certains pays permettent un accès conditionné à l’emploi en l’absence d’accord ([3]).

Ainsi, l’objectif de 80 États permettant aux conjoints d’agents de missions officielles d’accéder au marché du travail local, fixé en 2015 par le MEAE, a été atteint.

Dans certains pays ([4]), les démarches engagées ont conduit au constat de l’impossibilité de signature d’un accord bilatéral ou d’un cadre d’accès à l’emploi local insuffisamment sécurisant.

Si les pays qui connaissent le plus fort taux d’emploi de conjoints d’agents français sont les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui peuvent offrir des conditions d’emploi comparables à celles prévalant en France, l’effort de facilitation des conditions d’accès aux marchés de l’emploi s’est donc étendu au-delà du champ de l’OCDE.

Selon les données fournies par le MEAE dans l’étude d’impact du projet de loi, les accords conclus depuis près de quinze ans pour organiser l’emploi des personnes à charge des agents de missions officielles ont davantage bénéficié aux familles françaises qu’à celles des autres États. Selon une étude réalisée au dernier trimestre 2017 et à laquelle 63 postes diplomatiques et consulaires ont répondu, plus de 250 conjoints d’agents français résidant dans le pays d’affectation ont obtenu une autorisation de travail ou travaillent sans avoir besoin d’autorisation (cas dans les pays de l’EEE). Le nombre de conjoints d’agents étrangers bénéficiant d’une autorisation provisoire de travail en France est plus modeste. Ainsi, 28 autorisations ont été délivrées en 2019, 20 en 2021 et 47 en 2021.

Il faut toutefois rappeler que les conventions de Vienne ne définissent pas la notion de famille, qui dépend du droit national de chaque État. En conséquence, dans les pays ne reconnaissant pas les unions civiles entre personnes de même sexe, l’octroi d’un titre de séjour spécial en tant que conjoint d’agent de mission officielle n’est pas garanti pour les conjoints de même sexe.

Au Sénégal, le mariage est le seul lien d’union et l’union entre deux personnes de même sexe est prohibée. Les conjoints de même sexe ne peuvent pas dans ce contexte bénéficier de titre de séjour en qualité de conjoint (ni se prévaloir cette qualité). Pour rappel, le Sénégal a été retiré en 2021 de la liste des pays d’origine sûrs par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) en raison des risques liés à l’orientation sexuelle. Néanmoins, dans la mesure où les ressortissants français peuvent rentrer sans visa préalable sur le territoire sénégalais et bénéficier d’un séjour de 90 jours et obtenir, sur présentation d’un contrat de travail dûment visé par l’inspection du travail, une carte de résident (carte d’identité d’étranger) auprès de la police des étrangers sénégalaise, l’accès au marché du travail demeure ouvert à tous les conjoints d’agents.

De même, les conjoints français de même sexe ne peuvent pas bénéficier de titre de séjour en qualité de conjoint au Sri Lanka. Il leur est néanmoins possible de demander un titre de séjour de droit commun séparément, sans préciser le lien matrimonial unissant les deux personnes. Ce titre de séjour permet un accès au marché du travail ordinaire.

C.   Des accords concernant un nombre modeste de personnes mais favorables à l’attractivité des États parties

1.   La population couverte par l’accord du 7 septembre 2021 avec le Sénégal

Pour rappel, la communauté française résidente au Sénégal est évaluée entre 30 000 et 35 000 personnes, dont 22 104 sont inscrites au registre des Français établis hors de France. 70 % d’entre eux vivent à Dakar, 38 % des inscrits consulaires se déclarent binationaux (55 % estimés) et 34 % sont mineurs. La communauté sénégalaise en France est estimée entre 200 000 à 300 000 personnes.

Le dispositif diplomatique sénégalais en France est constitué d’une ambassade, de quatre consulats généraux (Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux) et de deux agences consulaires (Le Havre et Mantes-la-Jolie), auxquels s’ajoutent quatre consuls honoraires de nationalité française en poste dans quatre villes (Lille, Nancy, Nantes, Rouen). L’effectif total des agents sénégalais est de 165 personnes, accompagnées de 185 membres de leurs familles. 50 personnes au maximum seraient susceptibles de pouvoir bénéficier d’un emploi salarié dans le cadre du présent accord.

Au Sénégal le dispositif des missions officielles au sens de l’accord est composé de l’ambassade de France, du consulat général (Dakar), de l’institut français du Sénégal, des bureaux locaux de l’office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), de l’institut de recherche et de développement (IRD), de l’agence française de développement (AFD) du centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) et de l’Institut Pasteur, ainsi que des « Éléments français du Sénégal » qui relèvent du ministère des armées, et du lycée homologué Jean Mermoz.

L’emploi de conjoints mariés au Sénégal, jusqu’à présent, a été possible sans difficulté particulière ni nécessité de faire valoir formellement ce dispositif. Dans le cercle de gestion du poste (ambassade + consulat général), 12 conjoints bénéficiant d’un titre de séjour spécial sont employés soit au sein du poste, soit par un employeur externe sans autre formalité que l’enregistrement préalable et la validation du contrat de travail à l’inspection du travail. Du fait de cette facilité, et de l’absence d’intervention du poste diplomatique, il n’y a pas eu de recensement particulier des besoins au-delà des personnels directement gérés par le secrétariat général de l’ambassade.

Les bénéficiaires des dispositions de l’accord, à savoir les personnes vivant au foyer du membre de la mission officielle et qui disposent d’un titre de séjour spécial délivré par le ministère des affaires étrangères de l’État sénégalais, pourront exercer toute activité professionnelle salariée ou non salariée. Ces personnes sont ainsi susceptibles de travailler pour des entreprises françaises implantées au Sénégal.

Pour rappel, la France est le premier investisseur au Sénégal, avec 40 % du stock d’investissements directs étrangers (IDE) et près de 250 entreprises implantées dans le pays, générant environ 30 000 emplois directs et environ 25 % des recettes fiscales. Elles sont présentes dans de nombreux secteurs, notamment les infrastructures, les énergies, l’agroalimentaire, l’eau et la distribution. La France est également le premier partenaire commercial du Sénégal, avec une part de marché de 12 % en 2021.

En revanche, il convient de souligner qu’au sein des entreprises sénégalaises, les salaires sont très faibles à l’aune des niveaux de salaire français et que la maîtrise du wolof est souvent indispensable. Au sein des entreprises françaises et étrangères, peu de postes sont en pratique accessibles aux conjoints d’expatriés ([5]). Au sein des institutions multilatérales, les seuls postes accessibles sont les postes d’agents de droit local, avec là encore des niveaux de salaire faibles et une maîtrise du wolof utile et souvent indispensable.

2.   Le petit nombre de bénéficiaires de l’accord du 23 février 2022 avec le Sri Lanka

Pour rappel, la communauté française au Sri Lanka s’élève à 609 personnes inscrites sur le registre des Français établis hors de France. La communauté sri lankaise résidant dans l’Hexagone est estimée entre 80 000 et 100 000 personnes, en 2022.

Le Sri Lanka dispose en France d’une ambassade composée de 25 agents et d’un délégué permanent auprès de l’organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, l’UNESCO. Seuls 6 ayants droit sri-lankais pourraient en l’état actuel des choses recourir à l’accord signé le 23 février 2022 pour occuper un emploi.

Côté français, l’ambassade de France au Sri Lanka, le service économique et l’Agence française de développement (AFD) regroupent 22 agents expatriés (titulaires ou contractuels). Une quinzaine de conjoints pourrait ainsi bénéficier de l’accord ; 3 épouses de diplomates ont à ce jour manifesté leur intérêt, dans le but de travailler dans le secteur du tourisme.

En l’absence d’accord en vigueur, le MEAE ne reçoit pas de demande formelle d’autorisation de travail et n’a donc pu être saisi qu’informellement de questions sur la possibilité de travail de conjoints, ce qui ne permet pas d’indiquer avec précision le nombre de personnes potentiellement intéressées ou les secteurs d’intérêt.

II.   Des accords au contenu et à la portée très comparables

A.   L’accord franco Sénégalais

À l’issue de négociations proposées par le Sénégal en 2020, l’accord franco sénégalais a été signé à Paris le 7 septembre 2021. Si une tolérance était appliquée à l’égard des conjoints d’agents de missions officielles françaises sur la base de la preuve de leur résidence au Sénégal, elle ne s’appuyait sur aucun cadre juridique ; l’accord bilatéral remédie à cette absence.

1.   Un champ relativement classique pour un accord de ce type

Selon l’article 1er et l’article 2, l’accord du 7 septembre 2021 vise à autoriser les personnes à charge des agents de missions officielles à exercer « toute forme d’activité professionnelle » dans l’État d’accueil, à condition qu’elles remplissent les conditions législatives et réglementaires exigées pour l’exercice de l’activité souhaitée.

Les missions officielles désignent « les missions diplomatiques régies par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961, les postes consulaires régis par la Convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963, et les représentations permanentes de chacun des deux États auprès des organisations internationales ayant conclu un accord de siège avec l’autre État ».

Les agents désignent les membres du personnel des missions diplomatiques et des postes consulaires et les membres du personnel des représentations permanentes bénéficiant du titre de séjour spécial délivré par le ministère des affaires étrangères concerné. Par ailleurs, les attachés de défense et les personnels militaires ([6]) sont, pendant la durée de leurs fonctions au sein des ambassades, considérés comme des membres de mission officielle.

Les personnes à charge sont définies comme les personnes qui vivent au foyer du membre de la mission officielle et qui disposent d’un titre de séjour spécial délivré par le ministère des affaires étrangères concerné. Cela peut concerner les conjoints mais aussi les enfants à partir de 18 ans et jusqu’à 21 ans.

Enfin, une activité professionnelle désigne « toute activité professionnelle salariée, impliquant la perception d’un salaire résultant d’un contrat de travail régi par la législation de l’État d’accueil ou non salariée impliquant l’obtention d’un bénéfice économique ».

Selon l’article 12, les dispositions de l’accord s’appliquent aux personnes à charge des agents des missions officielles implantées dans les départements métropolitains et dans les collectivités territoriales d’outre-mer mentionnées en annexe (Guadeloupe, Martinique, Réunion, Guyane et Mayotte).

2.   Des clauses plutôt génériques

a.   Les procédures applicables

L’article 3 de l’accord définit la procédure à suivre pour pouvoir exercer une activité professionnelle dans l’État d’accueil. La demande, qui s’effectue au moyen d’une note verbale adressée à la direction du protocole du ministère des affaires étrangères concerné, doit être renouvelée lorsque la personne à charge souhaite changer d’activité.

L’article 4 rappelle que l’obtention d’une autorisation ne dispense pas la personne à charge de satisfaire aux « procédures ou obligations requises pour occuper cet emploi », ce qui vaut également pour les exigences spéciales appliquées aux professions réglementées.

Enfin, l’article 10 définit les situations dans lesquelles l’autorisation accordée à une personne à charge pour exercer une activité professionnelle peut prendre fin.

b.   Les immunités civiles, administratives et pénales

Les articles 5, 6 et 8 de l’accord définissent l’articulation entre les immunités accordées par les conventions de Vienne susmentionnées et le régime juridique des autorisations de travail.

c.   Le régime fiscal et de sécurité sociale

Selon l’article 7, sous réserve des dispositions de conventions destinées à éviter les doubles impositions et d’accords particuliers portant sur la sécurité sociale, la personne à charge exerçant une activité professionnelle est soumise à la législation applicable en matière d’imposition et de sécurité sociale en ce qui concerne ses activités. En vertu de l’article 9, la personne à charge peut transférer ses revenus et indemnités accessoires dans les mêmes conditions que celles prévues pour les travailleurs étrangers par la réglementation de l’État d’accueil.

Les dispositions finales et l’entrée en vigueur

L’article 11 stipule que tout doute ou différend concernant l’interprétation ou l’application de l’accord est résolu par négociations directes, par voie diplomatique. En vertu de l’article 13, l’accord peut être modifié ou amendé par consentement mutuel des deux parties.

Le Sénégal n’a pas encore effectué les procédures internes requises pour l’entrée en vigueur de l’accord.

B.   L’accord franco-sri lankais

L’accord avec la République démocratique socialiste du Sri Lanka a été signé le 23 février 2022 à Paris.

1.   Un objet similaire

Selon l’article 1er l’accord du 23 février 2022 vise à autoriser les « membres de famille des agents des missions officielles de chaque État » à exercer toute forme d’activité professionnelle salariée dans l’autre État, « à condition qu’ils remplissent les conditions législatives et réglementaires requises pour l’exercice de la profession envisagée et que des considérations d’ordre public ou de sécurité nationale ne s’y opposent pas ».

L’article 2 énonce les définitions des termes employés.

Les missions officielles désignent « les missions diplomatiques régies par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961, les postes consulaires régis par la Convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963, et les délégations permanentes de chacun des deux États auprès d’organisations internationales ayant conclu un accord de siège avec l’autre État ».

Les agents désignent les membres du personnel des missions diplomatiques et des postes consulaires et les membres du personnel des délégations permanentes susmentionnées, bénéficiant du permis de séjour spécial délivré par le ministère des affaires étrangères concerné. Par ailleurs, les attachés de défense et les personnels militaires ([7]) sont, pendant la durée de leurs fonctions au sein des ambassades, considérés comme des membres de mission officielle.

Les membres de famille sont définis comme le conjoint d’agent marié, le partenaire lié par un contrat d’union légale, les enfants célibataires présentant un handicap physique ou mental et vivant à la charge de leurs parents mais pouvant travailler, les enfants célibataires de moins de 21 ans.

Enfin, une activité professionnelle salariée désigne « toute activité emportant salaire découlant d’un contrat de travail régi par la législation de l’Etat d’accueil ».

Selon l’article 13, les dispositions de l’accord s’appliquent aux personnes à charge des agents des missions officielles implantées dans les départements métropolitains et dans les collectivités territoriales d’outre-mer mentionnées en annexe (Guadeloupe, Martinique, Réunion, Guyane et Mayotte).

2.   Un contenu assez semblable

a.   Les procédures applicables

L’article 3 définit la procédure à suivre pour pouvoir exercer une activité professionnelle dans l’État d’accueil. La demande, qui s’effectue au moyen d’une note verbale adressée à la direction du protocole du ministère des affaires étrangères concerné, doit être renouvelée lorsque la personne à charge souhaite changer d’activité.

L’article 4 rappelle que l’obtention d’une autorisation ne dispense pas la personne à charge de satisfaire aux « procédures ou obligations requises pour occuper cet emploi », ce qui vaut également pour les exigences spéciales appliquées aux professions réglementées.

L’article 11 précise les conditions dans lesquelles l’autorisation accordée prend fin.

b.   Les immunités civiles, administratives et pénales

Les articles 5 à 7 définissent l’articulation entre les immunités accordées par les conventions de Vienne susmentionnées et le régime juridique des autorisations de travail.

c.   Le régime fiscal et de sécurité sociale

Selon l’article 8, sous réserve des dispositions pertinentes de conventions visant à éviter la double imposition et d’accords spécifiques, les revenus que le membre de famille tire de son activité professionnelle salariée dans l’Etat d’accueil sont imposables dans cet Etat, conformément à sa législation fiscale. L’article 9 stipule que le membre de famille exerçant une activité professionnelle est soumis au régime de sécurité sociale applicable dans l’Etat d’accueil. Enfin, l’article 10 indique que le membre de famille peut transférer ses revenus et indemnités accessoires dans les mêmes conditions que celles prévues pour les travailleurs étrangers par la réglementation de l’État d’accueil.

d.   Les dispositions finales et l’entrée en vigueur

L’article 14 stipule que tout doute ou différend concernant l’interprétation ou l’application de l’accord est résolu par négociations directes, par voie diplomatique, et que l’accord peut être modifié ou amendé par consentement mutuel des deux parties.

Le Sri Lanka a signalé à la France avoir accompli les procédures exigées par son ordre juridique interne au 13 avril 2022.


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   Travaux de la commission

Le mercredi 5 juillet 2023, à 11 heures, la commission examine le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur l’octroi de l’autorisation d’exercer une activité professionnelle aux personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 7 septembre 2021, et de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique socialiste de Sri Lanka relatif à l’autorisation d’exercice d’une activité professionnelle salariée par les membres de la famille des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 23 février 2022.

 

Mme Mireille Clapot, présidente. Notre ordre du jour appelle l’examen du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de deux accords avec le Sénégal et le Sri Lanka, respectivement signés les 7 septembre 2021 et 23 février 2022, sur l’octroi de l’autorisation d’exercer une activité professionnelle aux personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre.

À l’instar d’accords similaires avec le Kosovo et Andorre, dont nous avons autorisé l’approbation cette année, ces deux accords s’inscrivent dans la stratégie engagée en 2015 par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères et visant à permettre aux conjoints des agents affectés à l’étranger de travailler sur place sans préjudice de leur statut diplomatique ou consulaire ou de certaines immunités associées. Il s’agit donc de faciliter la vie quotidienne des familles de diplomates français, sénégalais et sri-lankais.

À la différence des accords dont nous avons précédemment débattu, le nombre de personnes concernées ne sera pas négligeable : les diplomates français en poste au Sénégal ont soixante-huit conjoints et quatre-vingt-neuf enfants à charge et leurs homologues sénégalais en France vingt-huit conjoints et soixante-neuf enfants et ascendants ; au Sri Lanka, les diplomates français ont quatorze conjoints et leurs homologues sri-lankais en France ont dix conjoints et huit enfants enregistrés.

Le projet de loi dont nous sommes saisis a été adopté par le Sénat le 24 mai dernier.

M. Alain David, rapporteur. Ces deux accords visent un même objectif : faciliter l’accès au marché du travail local des membres des familles des agents des missions officielles. En pratique, il s’agit essentiellement des conjoints d’agents, même si les enfants âgés de 18 à 21 ans sont également couverts par les deux accords.

Il faut replacer ces accords dans le contexte du projet de réforme du ministère de l’Europe et des affaires étrangères lancé en 2015 pour moderniser le cadre d’expatriation des agents et du plan d’action du ministère en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. Notre commission a été saisie de plusieurs projets de loi autorisant l’approbation d’accords similaires : avec le Kosovo et avec la principauté d’Andorre au cours de cette législature, avec une dizaine d’autres États sous la législature précédente. La France est, au total, liée par des accords bilatéraux de ce type avec vingt-huit États, auxquels s’ajoute l’échange de notes verbales avec une dizaine de pays.

En l’absence d’accord et en dehors de l’Espace économique européen et de la Suisse, les membres des familles de diplomates disposent d’un statut qui peut constituer un obstacle à l’exercice d’une activité rémunérée. Si les conventions de Vienne de 1961 et de 1963 sur les relations diplomatiques et sur les relations consulaires n’interdisent pas le travail rémunéré des personnes à charge des agents des missions officielles et prévoient des exceptions à certains privilèges et immunités en cas d’exercice d’une activité professionnelle salariée, elles n’en confèrent pas moins un statut spécial susceptible de faire obstacle à celle-ci. L’entrée en vigueur des accords que nous examinons permettra donc une adaptation juridique, qui a été complétée en France par la mise en place d’une procédure administrative simplifiée.

Cette modernisation du cadre d’expatriation des agents est indispensable face à des évolutions sociales déterminantes telles que la progression du taux d’emploi féminin, au sein du corps diplomatique comme de façon plus globale.

Ni le Sénégal ni le Sri Lanka ne reconnaissent d’union légale entre conjoints de même sexe. En conséquence, les conjoints français de même sexe ne peuvent pas obtenir dans ces pays de titre de séjour en qualité de conjoint, ni se prévaloir de cette qualité. Ils ne sont donc pas couverts par le champ des accords, comme c’est le cas dans plusieurs autres pays, mais peuvent néanmoins obtenir des titres de séjour de droit commun et accéder de cette façon au marché du travail local.

Les accords bilatéraux avec le Sénégal et avec le Sri Lanka concerneront directement un nombre modeste de personnes – une dizaine de conjoints ont manifesté leur intérêt dans chacun de ces deux pays –, mais il faut donc les resituer dans un cadre plus global.

En outre, ces accords pourront faciliter le recrutement d’un personnel de qualité par le réseau diplomatique, consulaire et culturel français, tandis que 250 entreprises françaises sont implantées au Sénégal et sont susceptibles d’embaucher des ressortissants français présents sur place.

Le processus de ratification interne est achevé au Sri Lanka ; il est encore en cours côté sénégalais.

Je vous invite à voter sans réserve en faveur de l’approbation de ces deux accords.

M. Florent Boudié (RE). Ce processus de facilitation, par voie conventionnelle, du travail salarié des membres des familles de diplomates a été lancé par François Hollande et Jean-Yves Le Drian. Il est important car les conditions d’emploi sont souvent difficiles et peu sûres juridiquement.

Nos relations avec le Sénégal, grand pays de 16 millions d’habitants, sont fortes. La coopération culturelle est particulièrement étroite et la France est le premier investisseur dans ce pays. Les nouvelles politiques sont par ailleurs plutôt rassurantes, puisque le président Macky Sall a annoncé il y a quarante-huit heures sa volonté de ne pas briguer un troisième mandat.

Le processus de négociation avec le Sri Lanka a été plus long, puisqu’il a été entamé en 2005. Nous disposons de quatre alliances françaises sur place.

Ce sont là de bons accords, qui s’inscrivent dans la continuité de nombreux autres. Je ne doute pas qu’ils seront adoptés à l’unanimité.

M. Alain David, rapporteur. Comme vient de le dire à l’instant le président du groupe d’amitié France-Sénégal, dont je salue la présence parmi nous ce matin, la situation politique au Sénégal n’est pas encore tout à fait clarifiée mais nous pouvons espérer que les élections renouvelleront la classe politique. Nous nous sommes inquiétés, lorsque le président Macky Sall s’est rendu à Saint-Pétersbourg pour rencontrer Vladimir Poutine, de l’éventuelle conclusion d’accords entre certains pays africains et la Russie. L’avenir nous dira comment nos relations peuvent se stabiliser.

Pour les conjoints qui envisagent de travailler, le problème du niveau du salaire minimum se pose : les rémunérations ne sont pas forcément très incitatives pour l’époux ou l’épouse d’un ou d’une diplomate mais des entreprises françaises peuvent proposer des débouchés plus intéressants.

Ces accords représentent une avancée sociale. Ils concernent plutôt des femmes de diplomates mais le vieux modèle de la diplomatie est en pleine évolution et nous assistons à un rééquilibrage entre hommes et femmes. Nous allons très nettement vers l’égalité.

Mme Stéphanie Kochert (HOR). Ces accords sont importants. L’expatriation des familles de diplomates peut être difficile quand le manque d’attaches personnelles, la barrière linguistique et la situation économique et sociale de la région rendent complexe l’insertion sociale. Il est nécessaire de favoriser l’accès des familles à l’emploi, afin de renforcer le lien social et de les rendre plus indépendantes. Or, aux termes des conventions de Vienne de 1961 et 1963, les membres des familles de diplomates ne peuvent exercer une activité lucrative dans le pays d’accueil sans risquer de perdre certaines immunités pénales, civiles ou administratives. Il convient donc de signer des accords avec les pays d’accueil. Nous en avons déjà examiné plusieurs.

Au Sri Lanka, certains conjoints d’agents diplomatiques ont exprimé leur désir de travailler dans le domaine du tourisme. Au Sénégal, d’autres pourraient profiter de ces dispositions à la faveur de l’étroite coopération qui existe entre nos deux pays.

Nos partenariats sont nombreux. La France est ainsi le premier bailleur d’aide publique au développement au Sénégal et les engagements de l’Agence française de développement s’élèvent à plus de 700 millions d’euros au Sri Lanka pour le financement de projets dans les domaines de l’énergie, de l’eau, de l’assainissement, de l’aménagement urbain, de l’irrigation, du transport, de la santé et de la protection sociale.

Le groupe Horizons et apparentés votera ce projet de loi.

M. Alain David, rapporteur. Nous sommes d’accord.

S’agissant des conjoints de même sexe, je précise que nous allons poursuivre notre travail pour convaincre les pays en question d’accepter de changer leur législation, ou à tout le moins leur façon d’envisager les évolutions de nos sociétés. C’est un processus de longue haleine, comme celui qui peut se dérouler dans le domaine de la justice, par exemple.

M. Jean-Paul Lecoq (GDR-NUPES). Concernant la question des couples de personnes de même genre, j’espère que les choses vont évoluer. Après tout, la France, elle, ne reconnaît pas la polygamie et ne l’accepterait pas de la part de diplomates. C’est un aspect qui aurait pu nous faire nous opposer à l’accord ou nous abstenir de prendre part au vote mais nous voterons tout de même pour le projet de loi, vu ses enjeux.

La situation politique est très tendue au Sénégal comme au Sri Lanka. Au Sénégal, la tension pourrait retomber d’un cran après que le président Macky Sall a annoncé avant-hier qu’il ne briguerait pas de troisième mandat présidentiel, tout en précisant que la Constitution l’y aurait autorisé – ce que nous contestons. Nous resterons vigilants et solidaires de tous les élus et les militants sénégalais que nous avons rencontrés. La communauté internationale devra surveiller le déroulement du scrutin et s’assurer que tous les candidats puissent se présenter.

Au Sri Lanka, c’est tout l’édifice étatique qui menace de s’effondrer. Cela vient d’abord d’une crise économique très brutale, que le Fonds monétaire international utilise pour appliquer des réformes ultralibérales en échange d’un prêt indispensable à la survie de l’État. Mais la crise est devenue politique l’été dernier et a aggravé la situation du peuple, en particulier, une fois de plus, des Tamouls, déjà très opprimés. Le Sri Lanka doit panser les terribles plaies de la guerre civile, qui s’est terminée dans un bain de sang en 2009. Les diverses résolutions du Conseil des droits de l’Homme de l’Organisation des Nations Unies, comme la résolution 40/1 visant à favoriser la réconciliation et l’établissement des responsabilités et à promouvoir les droits de l’Homme au Sri Lanka, insistent sur le non-respect par le gouvernement central d’une partie de ses obligations en matière de justice transitionnelle et de restitution aux Tamouls des terres dont ils ont été spoliés et dénoncent les violations régulières des droits humains et religieux des Tamouls.

Ces derniers subissent encore des destructions de monuments religieux et des violences. En France, dans la diaspora tamoule, et sur place, l’absence d’évolution de la situation provoque une forte colère des associations. À la faveur de cette crise, l’exécutif du Sri Lanka tente quelques pas envers les Tamouls des diasporas pour qu’ils réinvestissent dans l’île, sans toutefois faire des gestes suffisants dans le domaine de la justice.

Nous espérons que ce type d’accord diplomatique entre nos deux pays et la présence de diplomates fera progresser le respect du droit des peuples dans ces États.

M. Alain David, rapporteur. Nous devons bien sûr tenir compte de la situation politique et sociale dans les pays avec lesquels nous passons des accords. Toutefois, le fond du problème, ce sont les droits des conjoints et conjointes de nos diplomates, et de ceux des diplomates de ces pays présents sur notre territoire. L’amélioration des conditions de vie dans ces deux pays et la modification de certains aspects de la situation politique sont recherchées mais c’est un travail de très longue haleine mené avec eux.

Compte tenu de notre proximité avec le Sénégal, j’espère que nous réussirons à améliorer nos relations, ou du moins à poursuivre les relations normalisées que nous avons eues jusqu’à présent avec le pays.

M. Arnaud Le Gall (LFI-NUPES). Même si ce texte n’est pas parfait, nous le voterons car il représente de réelles avancées. Il est important de tenir compte de l’évolution de la diplomatie : il est fini depuis longtemps, le temps où l’ambassadeur ou, plus rarement, l’ambassadrice partait en poste sans que l’on ait à se soucier de son environnement familial. Ce sujet était récurrent pendant le débat sur la réforme du corps diplomatique – à laquelle je rappelle que nous nous sommes opposés. Il est judicieux que cette évolution aille dans les deux sens, comme c’est le cas dans le texte qui nous est soumis ; c’est une question de réciprocité des droits mais il en va aussi de l’image de notre pays. Il est essentiel que les familles de diplomates, qui sont aussi des influenceurs, reçoivent le meilleur accueil en France.

On ne peut pas ne pas évoquer la situation de chacun des deux pays, même si ce n’est pas l’objet du texte : celui-ci ne saurait être réduit à sa dimension technique.

Au Sénégal, l’annonce du président Sall a été accueillie avec un relatif soulagement. S’il s’était représenté, cela aurait tout simplement mis le pays à feu et à sang. Nous restons vigilants sur deux points : premièrement, le fait qu’il ne revienne pas sur sa décision – il a prétendu que la Constitution l’y autorisait – ; deuxièmement, ceux qui auront le droit de se présenter.

Au Sri Lanka, sans revenir sur les décennies de guerre civile et de cruauté extrême, la France aurait tout intérêt à appuyer les demandes onusiennes d’une enquête en vue d’une réconciliation dans le pays.

M. Alain David, rapporteur. Je suis tout à fait d’accord au sujet de la considération que nous devons avoir pour ces deux pays, de la prudence dont nous devons faire preuve et de la nécessité de surveiller très étroitement leur évolution démocratique. L’entourage du président sénégalais actuel a eu tendance à dire que sa décision avait été mûrement réfléchie et que la nouvelle Constitution lui donnait la possibilité de remettre les pendules à zéro. Cette interprétation n’est pas tout à fait la nôtre non plus. Le pays va se stabiliser mais, en effet, qui aura le droit de se présenter ? D’autant que l’un des principaux opposants a des problèmes avec la justice.

M. Alexis Jolly (RN). Les deux accords ont pour objectif de pérenniser la présence de nos diplomates au Sri Lanka et au Sénégal et d’y optimiser leur cadre de vie. Le Sénégal étant un pays francophone et notre présence diplomatique étant fortement contestée en Afrique du fait de l’influence croissante dont y jouissent la Russie et la Chine, tout accord visant à améliorer les conditions d’exercice du mandat de nos représentants dans ce pays est une bonne nouvelle, même s’il ne s’agit pas d’un texte majeur qui permettrait de renforcer notre diplomatie de manière décisive.

Le cadre juridique très protecteur de la fonction diplomatique a pour revers d’empêcher parfois les ambassadeurs et leur famille d’intégrer véritablement la société des pays dans lesquels ils sont affectés : le statut et l’immunité qui leur sont accordés sont parfois considérés comme un danger pour les locaux souhaitant conclure des contrats et des accords avec eux, notamment lorsqu’il s’agit d’établir des relations entre employeur et employé. Cette protection est ainsi vue comme une source d’insécurité juridique pour les tiers. Il est nécessaire de corriger cette contrepartie des privilèges diplomatiques par des dispositions dérogeant aux règles communes du droit international dans le cadre d’accords bilatéraux entre les pays concernés.

Ce texte, qui n’est pas le premier du genre, permettra aux membres des familles des diplomates en mission dans ces deux pays d’exercer une activité salariée tout en conservant leur statut. Le cadre d’exercice de la fonction diplomatique évolue en même temps que l’ensemble de la société : il devient difficile pour les membres des familles des ambassadeurs de se contenter d’exister à travers la prestigieuse fonction de leur proche. Les conjoints, notamment, veulent et doivent pouvoir exercer une activité professionnelle. De ce point de vue, le texte va dans le bon sens. Notre groupe lui apportera tout son soutien.

M. Alain David, rapporteur. Il n’est pas toujours facile de trouver un emploi dans ces pays, surtout compte tenu de la faiblesse des revenus du travail, alors que les Sénégalais ou les Sri-Lankais venant travailler en France y bénéficient de conditions bien meilleures que chez eux. De plus, l’immunité diplomatique peut en effet poser d’énormes problèmes dans les relations de travail ; cela empêchait jusqu’à présent beaucoup de conjoints ou conjointes de diplomates d’accéder à l’emploi. Ce texte représente donc une avancée significative ; il convient de poursuivre la démarche et de signer des accords avec d’autres pays. C’est en cours, et la sollicitation en ce sens est forte.

M. Fabien Lainé (DEM). Dans le droit-fil des projets « Ministère du XXIe siècle » et « Action publique 2022 », lancés respectivement en 2015 et 2017, les accords que nous examinons participent à la modernisation du cadre d’expatriation des personnels du ministère de l’Europe et des affaires étrangères en poste à l’étranger. Nous avons déjà examiné cette année un accord similaire avec le Kosovo, et le Gouvernement a récemment présenté un texte identique concernant le Panama. Mon groupe se réjouit que nous avancions vers l’objectif de quatre-vingts pays où les membres des familles des agents des missions officielles pourront accéder au marché du travail sans perdre intégralement la spécificité de leur statut.

La mission de nos diplomates est exigeante et l’on ne saurait oublier les importants efforts familiaux qu’elle demande. C’est donc un progrès notable que cette prise de conscience par les États du fait que de tels accords peuvent faciliter la vie de ceux qui les représentent partout dans le monde. Cela étant, si certains conjoints ont fait part de leur souhait de profiter des avancées du texte, les emplois dans les pays concernés sont souvent peu rémunérés et nécessitent la maîtrise de la langue locale.

En outre, il ne faut pas seulement retenir de ces avancées leurs implications pour les expatriés français : le coût de la vie étant élevé en France, elles sont aussi un progrès très significatif pour ceux qui y accompagnent leur conjoint, d’autant que notre pays offre un cadre international de travail très développé.

Le groupe Démocrate soutiendra donc le projet de loi.

Si nous sommes amenés à autoriser l’approbation de nombreux accords, l’opération consistant à en réunir plusieurs dans un seul projet de loi devra selon nous être renouvelée.

M. Alain David, rapporteur. Nous partageons le constat et le sentiment qu’il est nécessaire de poursuivre les négociations avec de nombreux pays pour améliorer les conditions de vie de tous nos diplomates et de leurs familles, où qu’ils soient.

Mme Mireille Clapot, présidente. Cette discussion nous a permis de parler de la diplomatie française à hauteur d’homme et de femme et de rendre hommage au travail des diplomates, ainsi qu’à leur engagement au service de la France. Nous aurons également évoqué l’actualité au Sénégal et au Sri Lanka, la féminisation des postes, que nous soutenons tous, la situation des droits humains et les différences culturelles. J’y vois la preuve que les échanges sur ce type de textes sont toujours utiles.

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Article 1er (approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur l’octroi de l’autorisation d’exercer une activité professionnelle aux personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 7 septembre 2021)

La commission adopte l’article 1er non modifié.

Article 2 (approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique socialiste de Sri Lanka relatif à l’autorisation d’exercice d’une activité professionnelle salariée par les membres de la famille des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 23 février 2022)

La commission adopte l’article 2 non modifié.

Elle adopte ensuite l’ensemble du projet de loi sans modification.


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   Annexe N° 1 : texte adopté par la commission

 

Article 1er

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur l’octroi de l’autorisation d’exercer une activité professionnelle aux personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 7 septembre 2021, et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

Article 2

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique socialiste de Sri Lanka relatif à l’autorisation d’exercice d’une activité professionnelle salariée par les membres de la famille des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 23 février 2022, et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                

N.B. : Le texte des accords figure en annexe au projet de loi (n° 1276)


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   Annexe N° 2 : carte de l’accès au marché du travail pour les personnes à charge des membres des missions officielles

 

 

 

 

 


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   Annexe N° 3 : liste des contributions écrites

 

 

 


([1]) Rapport n° 591 (2022-2023) de Mme Gisèle Jourda, déposé le 10 mai 2023 : https://www.senat.fr/rap/l22-591/l22-591.html

([2]) Les accords conclus avec les trois derniers pays mentionnés, le 7 juillet 2020, le 4 mai 2021 et le 7 juillet 2022, ne sont pas encore entrés en vigueur.

([3])  Corée du Sud (cadre bilatéral), Djibouti (cadre formel non nécessaire), Géorgie (cadre formel non nécessaire), Hong Kong (cadre formel non nécessaire), Maroc (pas d’objection à un emploi dans le réseau), Mexique (existence de dispositions facilitant l’emploi des conjoints, sans exigence de réciprocité), Russie (cadre formel non nécessaire).

([4])  Afghanistan, Angola, Arabie saoudite, Birmanie, Cuba, Guinée équatoriale, Irak, Iran, Jordanie, Liberia, Libye, Niger, Ouzbékistan, Russie, Seychelles, Soudan, Thaïlande, Yémen.

([5])  Le wolof est souvent utile pour communiquer avec les employés et les clients/fournisseurs, les salaires sont au niveau local et il existe une offre de main-d’œuvre locale bien formée qui peut assumer les postes.

([6])  En dehors de la catégorie EM (enseignant ou militaire), qui n’entre pas dans le champ d’application de ce type d’accord.

([7])  En dehors de la catégorie EM (enseignant ou militaire), qui n’entre pas dans le champ d’application de ce type d’accord.