N° 1745

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2023.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024 (n° 1680),

 

PAR M. Jean-René CAZENEUVE,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 8

 

 

COHéSION DES TERRITOIRES

 

POLITIQUE DES TERRITOIRES

 

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Nicolas SANSU

 

Député

____



SOMMAIRE

___

Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. Le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’amÉnagement du territoire : un programme en hausse mais un financement de l’ANCT toujours insuffisant

A. les nouvelles mesures : le déploiement du plan « France ruralités » et la hausse de la dotation aux France services

1. Le plan « France ruralités » (+21,6 millions d’euros)

2. La politique en faveur du développement des tiers-lieux (+ 11 millions d’euros)

3. L’augmentation de la dotation au réseau France services (+36,3 millions d’euros)

B. le doublement des crédits d’ingéniErie de l’anct ne doit pas être le cache-misère d’un établissement public sous-doté

1. Le doublement des crédits d’ingénierie au bénéfice des collectivités territoriales : un sujet d’attention

2. L’ANCT : le risque d’une coquille vide

II. le programme 147 Politique de la ville : des coupes budgétaires incompréhensibles et un financement de l’ANRU insuffisant

A. L’action 01  La généralisation bienvenue des cités éducatives financée par l’arrêt absurde des bataillons de la prévention

1. La généralisation bienvenue des Cités éducatives

2. La suppression des bataillons de la prévention : une erreur impardonnable

B. une contribution à l’anru toujours insuffisante

1. L’état d’avancée du NPNRU

2. Une contribution de l’État au NPNRU sans cesse repoussée

III. le programme 162 Programme des interventions territoriales de l’État : une deuxième année successive de baisse traduiSANt les difficultés d’exécution des plans d’investissement pour la corse et l’absence d’ambition pour L’OUTRE-MER

A. Le plan de transformation, d’innovation et d’investissement (PTIC) pour la corse en souffrance

1. Un montant ouvert en CP qui interroge

2. Le PTIC connaît un déploiement difficile

B. Le plan de lutte contre les algues vertes : une réaction s’impose après la nouvelle condamnation de l’état

1. L’État appelé à renforcer les contraintes pour limiter les rejets azotés

2. Le durcissement du cadre réglementaire doit conduire à renforcer l’accompagnement des agriculteurs

C. le plan chlordécone : une action inaudible de l’état

1. Des annonces supplémentaires annoncées par le ministre en charge des Outre-mer le 27 juin 2023 dont il conviendra de suivre la réalisation

2. Un changement de philosophie est nécessaire

D. la lutte contre les sargasses : il faut maintenant passer à l’échelle

1. Des actions pertinentes

2. Des innovations à renforcer et une meilleure coopération des collectivités attendue

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

 

 

 

 

 

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 85 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances.

 


   PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl

L’évolution des crédits des trois programmes de la mission Cohésion des territoires couverts par le rapport Politique des territoires ne peut être analysée sans être remise dans son contexte : celui de profondes fractures et inégalités territoriales que toute la bonne volonté des élus locaux, des services de l’État et des habitants n’ont pas réussi à corriger. Force est de constater l’échec de la République à honorer l’exigence d’égalité territoriale, aussi bien dans les territoires ruraux que dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Les crédits dédiés aux territoires désavantagés ou confrontés à des difficultés propres ne peuvent compenser qu’à la marge ces inégalités fondamentales creusées par des politiques de droit commun qui ne remplissent pas leur office. Dans ce contexte, l’augmentation d’environ 9 % des crédits des trois programmes 112, 147 et 162 est à nuancer. Elle traduit en réalité des réalités très distinctes.

Le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire bénéficie d’une hausse réelle de ses crédits au bénéfice des mesures du programme France Ruralités, des tiers lieux, de l’augmentation de la dotation allouée aux structures France Services ainsi que du doublement des crédits de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) destinés aux prestations d’ingénierie sur mesure pour les collectivités. Une lacune majeure demeure : l’insuffisance du budget de fonctionnement de l’ANCT qui risque de se limiter à un guichet de prestations d’ingénierie qu’elle n’assure même pas en propre.

La dotation du programme 147 Politique de la ville est insuffisante. Malgré les annonces du conseil interministériel des villes (CIV) qui vient enfin de se tenir après des annulations successives au mépris des acteurs locaux et des habitants des QPV, la généralisation des cités éducatives ne peut compenser la suppression des bataillons de la prévention, les économies réalisées sur les Cités de l’emploi ni la trajectoire de financement plus qu’inquiétante de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

L’évolution erratique du programme 162 Intervention territoriale de l’État, s’annonçant en forte baisse en 2024 pour la deuxième année consécutive, peut s’expliquer en partie par des effets de concurrence entre l’action du PITE et les crédits du plan de relance pour les programmes d’investissement pour la Corse. Les relations difficiles entre la Collectivité de Corse et les services de l’État n’ont pas aidé au démarrage rapide des projets d’infrastructures. Le « coup de rabot » réalisé sur la totalité des actions est totalement dérisoire au regard des économies réalisées et peu glorieux vis-à-vis de territoires qui connaissent de véritables besoins, alors même que des augmentations de crédits sont annoncées par ailleurs. L’absence d’ambition pour répondre aux défis environnementaux que représente la lutte contre la prolifération des algues vertes en Bretagne et des sargasses dans les Antilles est regrettable. Le plan chlordécone doit aujourd’hui changer de dimension ; à défaut, l’État approfondira encore la méfiance des populations antillaises.


   DONNÉES CLÉS

évolution des crédits

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programmes de la mission

LFI 2023

PLF 2024

Évolution (en %)

LFI 2023

PLF 2024

Évolution (en %)

112 – Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

329,4

387,9

+ 17,8 %

262,4

338,5

+ 29 %

162- Intervention territoriale de l’État

85,8

80,6

- 6,1 %

61,6

33,2

- 46,1 %

147 – Politique de la ville

597,5

634,5

+ 6,2 %

597,5

634,5

+ 6,2 %

Totaux

1 012,7

1 103

+ 8,9 %

921,5

1 006,2

+ 9,2 %

Source : projet annuel de performances.

 

Hypothèse centrale de trajectoire d’engagement et de décaissement des crédits du npnru de 2016 à 2033

(en euros)

Source : ANRU.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


   INTRODUCTION

Le présent rapport spécial Politique des territoires couvre les trois programmes 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire, 162 Interventions territoriales de l’État et 147 Politique de la ville de la mission Cohésion des territoires. Le total de leurs dotations demandées pour 2024 atteint 1 103 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 1 006,2 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

Politique des territoires : crÉdits demandÉs pour 2024

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programmes de la mission

LFI 2023

PLF 2024

Évolution (en %)

LFI 2023

PLF 2024

Évolution (en %)

112 – Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

329,4

387,9

+ 17,8 %

262,4

338,5

+ 29 %

162- Intervention territoriale de l’État

85,8

80,6

- 6,1 %

61,6

33,2

- 46,1 %

147 – Politique de la ville

597,5

634,5

+ 6,2 %

597,5

634,5

+ 6,2 %

Totaux

1 012,7

1 103

+ 8,9 %

921,5

1 006,2

+ 9,2 %

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.

Le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire bénéficie de la mise en œuvre du programme France Ruralités (+21,6 millions d’euros), du soutien renouvelé aux tiers lieux (+11 millions d’euros), de l’augmentation de la dotation aux structures France Services (+20,6 millions d’euros) ainsi que du doublement des crédits de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) destinés aux prestations d’ingénierie sur mesure pour les collectivités (+ 20 millions d’euros). Cette hausse est pour partie financée par la baisse des crédits dédiés aux dispositifs en extinction de l’action 14 (prime d’aménagement du territoire, CP couvrant les AE de 2017 et 2018 des contrats de ruralité, CP couvrant les AE de 2017 du pacte État-métropoles).

Sur le programme 147 Politique de la ville, l’État augmenterait sa contribution au nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) – 50 millions d’euros en 2024 contre 15 millions d’euros en 2023. Le coût de la généralisation des cités éducatives (+ 28 millions d’euros) serait partiellement compensé par l’arrêt du dispositif des bataillons de la prévention qui finançait la présence de près de 600 éducateurs spécialisés et médiateurs dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (– 16 millions d’euros) ainsi que par diverses autres mesures d’économie (– 8 millions d’euros) principalement portées par la fin du financement des Cités de l’emploi.

Sur le programme 162 Intervention territoriale de l’État (PITE), une baisse significative des crédits est prévue pour la deuxième année consécutive concernant les plans d’investissement pour la Corse. L’ensemble des autres actions à l’exception de l’action 11 subiraient un coup de rabot d’environ 5 % par rapport aux crédits initiaux ouverts en 2023.

Les dispositifs zonés rattachés aux programmes 112 et 147 doivent faire l’objet d’une refonte en profondeur. Le nouveau zonage « France Ruralités Revitalisation » (FRR) fusionne ainsi les zones de revitalisation rurale (ZRR) avec les bassins d’emplois à redynamiser (BER) et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZORCOMIR). Ce nouveau zonage, qui entre en vigueur en remplacement des régimes actuels ZRR, BER et ZORCOMIR à partir du 1er juillet 2024, se décline en deux niveaux :

– un niveau socle fondé sur les critères de densité et de revenu disponible par unité de consommation évalué à l’échelle de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ou, par dérogation, des bassins de vie. Par ailleurs, est également classée d’office en zone FRR l’intégralité des communes de six départements dont la densité de population est inférieure à 35 habitants/km² et dont la population a baissé d’au moins 4 % sur la période 1999-2019 ;

– un niveau renforcé « FFR plus », pour les communes classées en FFR membres d’un EPCI confronté à des difficultés particulières, appréciées en fonction d’un indice synthétique (revenu, population, emploi).

Par ailleurs sont prorogés jusqu’en 2026 les dispositifs des bassins urbains à dynamiser, des zones de revitalisation du commerce en centre-ville, des zones de développement prioritaire (dépense fiscale inférieure à 2 millions d’euros). Le dispositif de zones d’aide à finalité régionale (AFR) est prolongé jusqu’en 2027.

Enfin, les dispositifs en faveur de la politique de la ville de zone franche urbaine-territoire entrepreneur (ZFU-TE) et les dispositions fiscales associées aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) sont prolongés jusqu’au 31 décembre 2024, afin d’envisager leur révision une fois achevée la délimitation de la nouvelle géographie prioritaire, et de permettre la signature des nouveaux contrats de ville, qui doivent être finalisés au plus tard le 31 mars 2024. Le bénéfice de l’abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements sociaux dans les QPV devrait être prolongé jusqu’en 2030.

Le rapporteur spécial ne peut que répéter ses critiques émises l’an dernier. Les dispositifs zonés, contrairement aux subventions, qui sont ciblées, génèrent automatiquement des effets d’aubaine et des effets de bord contreproductifs et coûteux pour le contribuable. Le nouveau zonage FRR ne déroge pas à la règle en la matière : le classement d’office de l’intégralité des communes de six départements (Haute‑Marne, Nièvre, Creuse, Indre, Meuse et Cantal) en FRR risque de favoriser les villes moyennes de ces départements qui pourraient ainsi attirer les acteurs économiques installés dans les zones rurales mais aussi ceux aujourd’hui présents dans les pôles urbains de départements adjacents, dans une situation économique pourtant guère plus florissante pour certains d’entre eux.

évolution du montant des cinq principales dépenses fiscales
prises en charge par l’état rattachées aux programmes
du rapport politique des territoires

(en millions d’euros)

 

Programme concerné

2022 (actualisé)

2023

2024

Exonération d'impôt pour les entreprises créées ou reprises dans les ZRR

112

326

335

335

Taux de TVA applicables à divers produits et services en Corse

112

139

130

140

Exonération pour les entreprises qui s’implantent en ZFU

147

146

118

118

Abattement de 30 % de TFPB pour les immeubles en QPV (et ex-ZUS)

147

111

121

121

Crédit d'impôt pour investissement en Corse

112

104

105

105

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.

I.   Le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’amÉnagement du territoire : un programme en hausse mais un financement de l’ANCT toujours insuffisant

Le programme 112 comprend différentes actions :

– l’action 11 retrace les crédits de la section locale du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire – FNADT. Ces crédits sont mis à la disposition des représentants de l’État dans les territoires pour financer des dispositifs contractualisés avec les collectivités territoriales : CPER-CPIER, contrats de convergence et de transformation (CCT), pactes de développement territorial ;

– l’action 12 porte les crédits de la section générale du FNADT qui financent : le soutien aux maisons France services, une partie des crédits de l’agenda rural et du nouveau plan « France Ruralités », les fabriques de territoire, les contrats de redynamisation des sites de défense, le soutien aux associations nationales intervenant dans le domaine de l’aménagement du territoire ainsi que les subventions pour charges de service public de Business France et de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) ;

– l’action 13 regroupe des crédits de soutien aux opérateurs ;

– l’action 14 est relative à des reliquats de CP de dispositifs anciens : prime d’aménagement du territoire en voie d’extinction ainsi que des contrats de ruralité (pour les AE de 2017 et 2018) et du Pacte État-métropoles (pour les AE de 2017).

Sa dotation demandée pour 2024 atteint 387,9 millions d’euros en AE (+58,5 millions d’euros par rapport à la LFI 2023) et 338,5 millions d’euros en CP (+76,1 millions d’euros par rapport à la LFI 2023).

Des crédits de paiement qui, en régime de croisière, pourraient relever du budget opérationnel du programme 112 sont par ailleurs encore ouverts dans le présent projet sur le programme 364 Cohésion de la mission Plan de relance : 35 millions d’euros pour le plan « Avenir Montagne », 30,5 millions d’euros pour les annuités des contrats de plan État-régions (CPER) et des contrats de plan interrégionaux État-régions (CPIER), 4 millions d’euros pour les programmes de l’ANCT.

 

 

 

évolution des crédits du programme 112
Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

(en millions d’euros)

Actions et sous-actions

Exécution 2022 (112 + plan de relance)

LFI 2023 (programme 112)

LFI 2023 (112 + Plan de relance)

PLF 2024

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 11 : FNADT section locale

204

125,5

202,0

118,8

202,0

171,2

190,5

130,8

Contrat de projets État-Régions

154,4

103,8

148,1

83,4

148,1

135,8

148,1

96,5

Contrat de convergence et de transformation

5,4

2,9

5,5

4,3

5,5

4,3

5,5

4,2

Pactes territoriaux

44,3

18,9

48,4

31,1

48,4

31,1

36,9

30,0

Action 12 : FNADT section générale

136,6

126,5

59,4

63,4

59,4

63,4

107,3

110,3

Restructuration des sites de défense

0,8

2,5

0

2,4

0

2,4

0

1,6

France services

61,6

59,9

36,3

36,3

36,3

36,3

55,7

55,7

Fabrique des territoires

16,4

16,5

0

0

0

0

11

11

Petites villes de demain

23,3

21,7

19

19

19

19

13

13

Volontariat territorial en administration

3,8

3,9

0

0

0

0

6

6

Autres * (section générale, politique de la montagne, partenariat national, études, agenda rural)

30,7

22,0

4,1

5,6

4,1

5,6

21,6

23,1

Action 13 : Soutien aux opérateurs

69,8

69,8

68

68

68

68,0

90,1

90,1

Total ANCT

65,1

65,1

63,2

63,2

63,2

63,2

85,3

85,3

Dont ingénierie

20

20

20

20

20

20

40

40

Dont ANCT fonctionnement et T2

45,1

45,1

43,2

43,2

43,2

43,2

45,3

45,3

Business France

4,7

4,7

4,8

4,8

4,8

4,8

4,8

4,8

Action 14 : PAT, Pacte État-métropoles et contrats de ruralité

0

16,3

0

12,3

0

2,3

0

7,3

Prime d'aménagement du territoire

0

8,3

0

7,8

0

7,8

0

5

Contrats de ruralité

0

6,2

0

3,6

0

3,6

0

1,7

Pacte État-Métropoles

0

1,8

0

0,9

0

0,9

0

0,6

TOTAL

410,3

338,0

329,4

262,4

329,4

314,8

387,9

338,5

Source : Réponses au questionnaire budgétaire.

Les crédits en extinction de l’action 14 et les crédits des dispositifs contractualisés de l’action 11 (CPER-CPIER et contrats de convergence et de transformation), qui ont été sanctuarisés dans le présent projet, n’appellent pas de remarques particulières du rapporteur spécial.

A.   les nouvelles mesures : le déploiement du plan « France ruralités » et la hausse de la dotation aux France services

Plusieurs mesures nouvelles sont financées sur le programme 112.

1.   Le plan « France ruralités » (+21,6 millions d’euros)

Outre les enveloppes de 2 millions d’euros et de 7,6 millions d’euros qui permettront respectivement à des préfets d’accompagner plus fortement quelques projets de tiers lieux et la bonification du financement des France services dans les territoires ruraux à hauteur de 10 000 euros par structure et par an en sus de l’augmentation de droit commun prévue pour 2024 (voir infra), plusieurs mesures du plan France ruralités sont inscrites sur le programme :

– la poursuite du volontariat territorial en administration (VTA) avec une aide de 20 000 euros de l’État accordée aux collectivités territoriales pour des missions, devant durer de 12 à 18 mois, confiées à des jeunes de 18 à 30 ans. Lancé en avril 2021, le dispositif aurait permis de recruter 560 VTA à date. La DGCL reconnaît que de trop nombreuses collectivités territoriales n’ont pas connaissance de la possibilité de recourir au dispositif. Le statut précaire des VTA peut également expliquer l’engouement très relatif des collectivités locales qui ont besoin de continuité. Les missions confiées relèvent principalement de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, de l’ingénierie et de l’environnement ;

– le recrutement de 100 chefs de projets au titre du programme « villages d’avenir » auxquels s’ajoutent 20 chefs de projets recrutés par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) financés en dehors du programme 112. Les secteurs les plus ruraux ont été privilégiés dans le cadre de la répartition de ces postes et les préfets communiqueront le 15 novembre les grappes et communes retenues pour le programme. Tous les départements bénéficieront d’au moins un chef de projet sauf en Île-de-France où seule l’Essonne est concernée. Les procédures de recrutement de ces chefs de projets sont d’ores et déjà en cours. Sont visés des cadres A, administratifs ou techniques, experts en ingénierie provenant du secteur public comme privé. L’enveloppe de 6 millions d’euros est calculée sur la base d’un coût annuel moyen de 60 000 euros par chef de projets.

2.   La politique en faveur du développement des tiers-lieux (+ 11 millions d’euros)

L’« Observatoire des Tiers-Lieux », présente un panorama des 3 500 tiers-lieux identifiés en 2023. Très souvent nés de l’initiative citoyenne, 62 % des tiers-lieux ont été créés en dehors des métropoles, 34 % en milieu rural et 28 % dans des villes moyennes. Bureaux partagés, actions culturelles, espaces du faire, ateliers artisanaux partagés, laboratoires d’innovation sociale ou tiers-lieux nourriciers et cuisines partagées, les tiers lieux couvrent des champs variés d’espaces et d’actions, et suscitent une attention croissante de la part des collectivités territoriales pour leur « capacité à créer du lien ».

La poursuite du programme « Nouveaux lieux, nouveaux liens », qui a permis de labelliser près de 100 manufactures de proximité visant des tiers-lieux de production distribués et 300 fabriques de territoires couvrant 189 arrondissements depuis le lancement du programme en 2021, fait l’objet d’une nouvelle vague de labellisation qui devrait permettre de labelliser 80 structures supplémentaires sur les 144 arrondissements non couverts. Cette dernière vague est financée grâce à un reliquat de 4 millions d’euros des enveloppes dédiées précédemment ouvertes. Il est cependant regrettable que la labellisation à venir n’ouvre le droit à la subvention de 50 000 euros que pour une seule année là où les structures labellisées les précédentes années bénéficient de ce financement pour trois années.

L’enveloppe de 11 millions d’euros proposée dans le présent projet doit permettre d’assurer le financement de l’enveloppe annuelle de 150 fabriques labellisées les précédentes années (7,1 millions d’euros). Le programme 112 porte également les crédits relatifs au groupement d’intérêt public (GIP) « France Tiers Lieux », soit 1,5 million d’euros pour appuyer le développement, la professionnalisation et la pérennisation des tiers-lieux en France. Des évolutions sont envisagées pour 2024. Parmi elles est évoqué l’objectif de renforcer le soutien aux tiers-lieux axés sur la résilience sociale, alimentaire, productive et économique. Il est à noter que les manufactures de proximité qui ont bénéficié d’une enveloppe de 30 millions d’euros dans le cadre du plan de relance ne font l’objet d’aucun financement nouveau sur le programme 112, ce qui a donné lieu à des amendements adoptés à l’unanimité lors de l’examen en commission.

3.   L’augmentation de la dotation au réseau France services (+36,3 millions d’euros)

La dotation destinée aux quelque 2 750 espaces France services opérationnels en 2024 augmenterait de 36,3 millions d’euros en LFI 2023 à 55,7 millions d’euros dans le présent projet. Cette enveloppe permettrait :

– de maintenir le forfait annuel du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT) à 20 000 euros pour chaque structure non postale (contre 15 000 euros en 2022). Le Fonds national France services (FNFS) doit abonder à hauteur de 20 000 euros les structures France services (contre 15 000 en 2023). Au total, chaque espace France services devrait bénéficier d’un financement de l’État et des opérateurs de l’État de 40 000 euros par an (50 000 euros pour les structures en zone rurale, voir supra). Cette enveloppe devrait être abondée de 10 000 euros en 2025 afin de se rapprocher d’un financement paritaire entre l’État et les collectivités territoriales ;

– de doubler les moyens alloués à l’animation départementale du réseau (qui passerait de 25 000 euros à 50 000 euros par animateur départemental) comme annoncé lors du dernier comité interministériel de la transformation publique (CITP).

Le rapporteur spécial se félicite de cette augmentation : si les maisons France services justifient trop souvent la disparition des services dans les territoires, le dispositif a le mérite d’exister et d’accompagner, par une présence humaine, des dizaines de milliers de Français dans leurs démarches chaque année. Les collectivités territoriales continueront cependant en 2024 à supporter un coût de fonctionnement des structures trop élevé. Le transfert du coût de l’accès à des services publics nationaux de l’État vers les collectivités territoriales aurait dû faire l’objet d’une compensation à l’euro près, ce qui n’est pas le cas : seuls 40 % des coûts sont en moyenne compensés. Il faudra être extrêmement vigilant à ce que l’État tienne sa parole concernant l’augmentation progressive de son soutien financier en 2025 et 2026.

Les points d’amélioration sont connus : une meilleure formation initiale et continue des agents (la formation initiale doit passer de 5,5 à 11 jours, des outils doivent être créés par les opérateurs), une relation plus fluide avec le service de soutien – back-office  (une charte de relation est en cours d’élaboration et devrait être communiquée au premier trimestre 2024. Elle vise à fournir une assistance via un référent expert pour chaque opérateur dans chaque département), la correction d’un déficit de notoriété auprès de nombreux habitants (campagne d’affichage prévue en octobre 2023).

Outre les partenaires déjà existants (la CNAF, la CNAV, la CNAM, la MSA, Pôle Emploi, La Poste, la DGFiP, le ministère de l’intérieur et le ministère de la justice), le programme devrait accueillir à partir du 1er janvier 2024 deux nouveaux acteurs : le ministère de la transition énergétique et l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). S’agissant de celle-ci, il s’agira d’étoffer le bouquet de services offert en France services pour y adjoindre un accompagnement administratif relatif aux démarches de MaPrimeAdapt’ et de MaPrimeRenov’.

B.   le doublement des crédits d’ingéniErie de l’anct ne doit pas être le cache-misère d’un établissement public sous-doté

L’année 2023 a constitué une année charnière pour l’ANCT. Afin de rendre plus visible l’offre d’ingénierie, de trouver de nouvelles synergies et de clarifier les domaines d’intervention, une refonte des conventions de partenariat avec les cinq établissements partenaires (Ademe, CEREMA, ANAH, ANRU, Banque des territoires) a été opérée. Son conseil d’administration a été renouvelé et une feuille de route 2023-2026 a été établie autour de trois axes : proximité avec le terrain, renforcement de l’accompagnement sur mesure, amélioration de la notoriété et de l’implantation de l’Agence auprès des élus et des services de l’État.

L’ANCT est dotée dans le présent projet d’une subvention pour charges de service public de 81,5 millions d’euros et d’une subvention pour charges d’investissement de 3,8 millions d’euros. Au total, les dotations publiques de l’établissement seraient en hausse de 22,1 millions d’euros, correspondant :

– au doublement des crédits d’ingénierie (+ 20 millions d’euros soit 40 millions d’euros) ;

– au transfert de crédits en provenance du programme 147 pour les dépenses relatives à l’animation des cités éducatives (+ 1,3 million d’euros) et en provenance du programme 343 Plan France Très haut débit pour la gestion administrative et financière du plan (+0,8 million d’euros).

À l’exception d’une hausse du plafond d’emplois de 4 ETP, relevé à 371 ETP pour 2024, les moyens de fonctionnement et d’animation des programmes de l’ANCT seraient stables.

1.   Le doublement des crédits d’ingénierie au bénéfice des collectivités territoriales : un sujet d’attention

Plusieurs sujets d’interrogation subsistent pour le rapporteur spécial concernant le doublement des crédits d’ingénierie au bénéfice des collectivités.

prestations sur mesure pour les collectivités territoRIALes
assurées par l’anct

Modalité d’accompagnement

2021

2022

2023

Total

Expertise interne ou d’un opérateur partenaire de l’ANCT

237

130

27

394

Mise à disposition d'un prestataire externe

310

185

124

619

Subvention directe

153

44

6

203

Total général

700

359

157

1 216

Source : ANCT

Du 1er janvier 2021 au 1er septembre 2023, 1 216 prestations ont été accordées aux collectivités. Ces prestations peuvent être réalisées par l’ANCT elle-même (4 % des accompagnements de l’Agence), un partenaire de l’établissement (le CEREMA assure un tiers des accompagnements), un prestataire extérieur issu le plus souvent du marché à bons de commande, ou une subvention directe utilisée notamment lors de l’élaboration des contrats de relance et de transition écologique (CRTE). En 2023, le nombre de prestations réalisées devrait être sensiblement inférieur à celui de 2022, notamment en raison d’une forte baisse des prestations réalisées en interne ou par l’un des partenaires de l’ANCT.

Source : DGCL

La déconcentration du marché d’ingénierie prévue en 2024 vise à permettre que les accompagnements en ingénierie des collectivités soient initiés par les services locaux de l’État avec, le cas échéant, l’appui technique des chargés de mission territoriaux de l’ANCT. Elle a pour objectif premier de fluidifier le processus de validation des projets d’accompagnement des collectivités en matière d’ingénierie. Cette déconcentration devrait être mise en œuvre début 2024. Parallèlement, le marché à bons de commande mis en place en 2021 court jusqu’en 2024.

Le rapporteur spécial prend note du doublement des crédits d’ingénierie (+20 millions d’euros soit 40 millions d’euros). Ce doublement contribuera à augmenter le nombre de projets accompagnés « en propre » et sur mesure par l’ANCT (800 prestations dont 500 impliquant un prestataire issu du contrat-cadre). Plusieurs points peuvent être soulignés :

 l’Agence n’est pas en mesure de spécifier précisément les besoins des collectivités territoriales. En effet, l’ANCT n’agit qu’en subsidiarité dès lors qu’il n’existe pas d’ingénierie locale disponible et à même de répondre au besoin selon l’estimation du préfet. Dès lors, il n’est pas possible d’objectiver au niveau national le nombre réel de prestations dont les collectivités territoriales auraient aujourd’hui besoin ;

 la procédure d’évaluation des prestataires semble relativement succincte et peu systématisée. Le rapporteur spécial remarque ainsi que de « manière ponctuelle, un questionnaire d’évaluation est adressé aux interlocuteurs de la délégation territoriale ou aux collectivités en fin d’accompagnement, avant le paiement du solde ». Il faudra être attentif à mettre en œuvre une vraie procédure d’évaluation qui prenne en compte le retour des collectivités locales : plusieurs élus ont souligné le caractère stéréotypé des livrables de certains prestataires, ainsi qu’une méconnaissance des enjeux locaux.

2.   L’ANCT : le risque d’une coquille vide

Les difficultés de notoriété de l’ANCT dans les territoires sont connues. Elles ne sont pas seulement liées à un déficit de communication mais surtout à un manque de moyens propres de fonctionnement. Le doublement des crédits d’ingénierie, avec un niveau très faible de prestations assurées par les effectifs de l’Agence elle-même, risque de faire de l’Agence un simple « guichet », au mieux capable d’aiguiller les collectivités vers les acteurs compétents ou de financer une prestation utile, au pire constituant un acteur supplémentaire parmi une myriade d’autres déjà existants. Il ne rendra pas son rôle plus clair pour les élus et ne la mettra pas en mesure d’animer les nombreux programmes nationaux dont elle a la charge, faute de moyens suffisants.

les moyens humains de l’ANCT en 2023

(en ETP)

Source : ANCT (MAD signifie « mises à disposition »).

Le doublement des chargés de mission territoriaux (moins d’une dizaine d’agents prévus en 2024) semble bien dérisoire au regard des besoins des collectivités territoriales et de la nécessité d’un réel maillage du territoire. Les dépenses consacrées aux programmes nationaux sont en baisse significative (12,9 millions d’euros en 2022 contre 7,5 millions d’euros dans le dernier budget rectificatif de 2023) tout comme les dépenses dédiées à l’observation et à la prospective. Faute de crédits, aucune opération nouvelle immobilière n’a été décidée ni mise en œuvre durant le premier semestre 2023 au détriment des espaces commerciaux de territoires en difficulté.

S’il est prévu en 2024 de trouver de nouvelles économies dans les fonctions support (une mission de l’Inspection générale de l’administration est menée actuellement pour identifier les synergies possibles entre les plateformes, applications et dispositifs d’information de l’établissement), les moyens accordés à l’ANCT sont largement insuffisants et risquent in fine de décevoir les nombreux espoirs qui avaient été placés en elle lors de sa création, sachant que de plus en plus de programmes nationaux et de politiques publiques sont adossés à l’établissement (Action cœur de ville, Petites villes de demain, accompagnement des contrats de relance et de transition énergétique, plan France très haut débit et, dorénavant, le programme France Ruralités).

Enfin, le rapporteur spécial rappelle que se doter d’un outil capable d’assurer une réelle cohésion des territoires nécessiterait de disposer de financements pluriannuels comme ceux mis en œuvre par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine au titre des nouveaux programmes de renouvellement urbain.

II.   le programme 147 Politique de la ville : des coupes budgétaires incompréhensibles et un financement de l’ANRU insuffisant

Après de multiples reports, le Conseil interministériel de la ville (CIV) vient enfin de se tenir le vendredi 27 octobre 2023. Il a annoncé plusieurs mesures nouvelles au bénéfice des 1 514 quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) :

– l’ajout de 24 nouveaux quartiers retenus dans le programme « quartiers résilients » ;

– le doublement de la part du fonds vert investie dans les quartiers (objectif de 15 %) ;

– la réalisation d’un grand plan de réhabilitation des copropriétés dégradées ;

– le développement du programme « Entrepreneuriat Quartiers 2023 » ;

– le développement d’un fonds en faveur des associations pour mobiliser les publics les plus éloignés de l’emploi (300 millions d’euros en 2023) ;

– le développement d’une politique de testing pour lutter contre les discriminations ;

– la généralisation des cités éducatives (portée par le programme 147) ;

– l’extension des horaires et périodes d’ouverture des établissements scolaires et bibliothèques ;

– le déploiement de 1 000 éducateurs sportifs ;

– le déploiement des premières forces d’action républicaine.

Si le rapporteur spécial ne dispose pas du recul nécessaire pour juger de la pertinence des mesures, du caractère réellement nouveau de l’ensemble des dispositifs proposés et de l’effort budgétaire réel correspondant ([1]), la plupart de ces mesures semblent aller dans le bon sens. La limitation annoncée de l’attribution de logements sociaux aux ménages les plus précaires peut être pertinente d’un point de vue théorique. Mais faute d’attribution de logements sociaux hors QPV et au regard de l’incapacité du Gouvernement à soutenir les bailleurs sociaux pour produire suffisamment de logements sociaux (près de 85 000 agréments attendus en 2023 soit 25 000 de moins que les objectifs qui avaient été fixés et 40 000 de moins par rapport aux besoins estimés), elle risque de se révéler contreproductive et de produire davantage encore d’inégalités face au logement.

Surtout, la politique de la ville ne peut pas constituer une succession de mesures sectorielles. Elle doit proposer une méthode pour s’assurer de l’attribution effective des moyens de droit commun dans les quartiers et ce, de manière prioritaire par rapport aux crédits supplémentaires de la politique de la ville.

L’information relative à la mobilisation des crédits de droit commun est aujourd’hui largement lacunaire. Le document de politique transversale Ville ne permet que très insuffisamment de mesurer les politiques de droit commun au bénéfice des QPV. Il souligne que « les ministères ne retiennent pas systématiquement une approche territorialisée de leurs politiques publiques et les systèmes d’information financière ministériels ne sont pas toujours en mesure d’identifier la part des crédits alloués, pour chaque programme, dans les QPV. Parfois, la seule possibilité de chiffrage est de réaliser une proratisation, relevant souvent de méthodes de calcul assez hétérogènes. Dans certains cas, il n’est pas possible de retracer la part des crédits affectés aux territoires de la politique de la ville. ». Les rares rapports ayant abordé de près la question battent en brèche l’idée qu’un « pognon de dingue » soit dépensé en faveur des QPV et montrent l’inverse : bien souvent, les habitants des QPV ont moins accès aux services publics fondamentaux que les habitants des autres quartiers ([2]).

Dans ce contexte, l’enveloppe budgétaire prévue pour le programme 147 suscite de fortes inquiétudes alors que l’élaboration des nouveaux contrats de ville 2024-2030([3]) doit être achevée d’ici le 31 mars 2024 et que le décret fixant la nouvelle géographie des quartiers prioritaires de la politique de la ville est attendu d’ici le 31 décembre 2023.

programme 147 Politique de la ville :
évolution des crédits entre la LFI 2023 et le PLF 2024

(en millions d’euros)

 

LFI 2023

PLF 2024

Évolution crédits 2022- PLF 2023

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 01 : Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville

522,8

522,8

525,5

525,5

2,7

2,7

Action n° 02 : Revitalisation économique et emploi

40,9

40,9

40,2

40,2

-0,7

-0,7

Action n° 03 : Stratégie, ressources et évaluation

18,9

18,9

18,9

18,9

0

0

Action n° 04 : Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie

15

15

50

50

35

35

Total programme 147

597,6

597,6

634,5

634,5

36,9

36,9

Source : projet annuel de performances.

Les actions 02 et 03 qui correspondent respectivement à la subvention de l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi et à la compensation des exonérations de charges sociales en zones franches urbaines (ZFU) d’un côté (action 02), et la compensation pour les structures d’origine des agents occupant la fonction de délégué du préfet de l’autre (action 03), n’appellent pas de commentaire particulier du rapporteur spécial.

A.   L’action 01 – La généralisation bienvenue des cités éducatives financée par l’arrêt absurde des bataillons de la prévention

L’action 01, qui serait dotée en 2024 de 525,5 millions d’euros, regroupe les crédits liés aux actions contractualisées des contrats de ville délégués aux responsables de budget opérationnel de programme (370,4 millions d’euros en 2022). Elle comporte aussi les crédits de dispositifs spécifiques, hors contrats de ville, fléchés vers certains programmes nationaux : les cités éducatives, les quartiers d’été, les adultes-relais et les bataillons de la prévention, etc.

La stabilisation des crédits sur un an résulte de mouvements contradictoires :

– la généralisation des cités éducatives avec une enveloppe supplémentaire de 28 millions d’euros ;

– la suppression du dispositif des bataillons de la prévention (16,3 millions d’euros en loi de finances pour 2023) ;

– diverses mesures d’économie supplémentaires par la suppression des crédits destinés aux cités de l’emploi (- 5,5 millions d’euros de crédits fléchés vers le pilier « Développement de l’activité économique et de l’emploi ») et la baisse des crédits affectés au lien social et à la participation citoyenne (113,3 millions d’euros pour 2024 contre 119,4 millions d’euros votés pour 2023).

1.   La généralisation bienvenue des Cités éducatives

Alors que les craintes exprimées dans le courant de l’année 2023 par les élus locaux et les membres du Conseil national d’orientation et d’évaluation des cités éducatives ([4]) concernant la volonté de pérenniser l’expérimentation et le portage politique du dispositif, notamment par le ministère de l’éducation nationale, ont laissé présager le pire, le rapporteur spécial se félicite de la prolongation de l’expérimentation des cités éducatives et de leur généralisation. Grâce à l’engagement des acteurs locaux, l’enveloppe proposée pour 2024 permettrait d’initier une centaine de nouvelles Cités éducatives. L’enveloppe de 105,8 millions demandée pour 2024 devrait permettre de financer près de 300 Cités éducatives. 208 d’entre elles sont aujourd’hui opérationnelles : elles recouvrent 370 QPV, soit 25 % de l’ensemble des QPV. Les Cités éducatives bénéficient d’un financement moyen de 350 000 euros par an ([5]).

Le dispositif des « Cités éducatives » est inédit : il ne constitue pas un dispositif vertical de soutien aux jeunes élèves des QPV comme il en existe par ailleurs : il s’agit de proposer un cadre de coordination globale entre l’ensemble des acteurs de la communauté éducative autour d’enjeux éducatifs partagés, afin de dépasser la logique en silo qui prédomine le plus souvent dans les dispositifs d’accompagnement social des jeunes des quartiers populaires.

Chaque cité est pilotée localement par un trio d’acteurs issus de l’État déconcentré, de la commune et de l’éducation nationale. Dans la plupart des cités, cette troïka est constituée par le principal du collège chef de file, le directeur général adjoint de la commune et le représentant du préfet. Aux côtés du principal de collège, un chef de projet est désigné par le recteur.

Les actions menées par les Cités éducatives sont variées. Les thématiques les plus représentées sont, par ordre de priorité, la culture (sorties culturelles, voyages à l’étranger, activités d’éducation artistique et culturelle), les relations avec les familles (avec pour objectif de rendre les familles actrices du parcours socio-éducatif de leurs enfants, de lever les barrières de la langue pour les familles allophones, etc.), la citoyenneté, le sport (avec pour objectif de favoriser l’activité sportive des enfants et jeunes, de faire du sport un outil en faveur de la lutte contre les discriminations et favorisant l’autonomie et l’épanouissement des enfants et jeunes) et la santé (sensibilisation des publics, actions de dépistage mises en place).

Le rapporteur spécial insiste sur la nécessité de conserver un engagement fort de l’éducation nationale dans le dispositif tout en maintenant les collectivités territoriales au cœur de son pilotage.

2.   La suppression des bataillons de la prévention : une erreur impardonnable

Bien avant les violences de l’été, les élus de terrain ont plusieurs fois alerté par voie de presse sur la situation dégradée dans les quartiers. Ce constat doit amener à s’interroger sur l’encadrement des plus jeunes dans les QPV. De nombreux observateurs soulignent que la présence d’adultes référents a parfois permis de limiter les dégradations et violences commises dans les quartiers populaires.

Dans ce contexte, la suppression des bataillons de la prévention va à rebours du sens de l’histoire : davantage de présence humaine dans les quartiers, qui ne passe pas uniquement pas un renforcement des effectifs de police, quoiqu’au demeurant nécessaire.

Le rapporteur spécial comprend qu’une évolution du dispositif est actuellement en cours. Le dispositif pourrait basculer progressivement vers un dispositif de médiation sociale professionnelle. Ce projet de réforme conduirait donc à une substitution graduelle de médiateurs sociaux professionnels aux adultes-relais.

Les bataillons de la prévention

Le CIV du 29 janvier 2021 a décidé la création de « bataillons de la prévention ». Le recrutement de 300 éducateurs spécialisés et 300 médiateurs sociaux dans 45 quartiers prioritaires dénommés « Quartiers de reconquête républicaine » vise à prévenir la délinquance juvénile et à renforcer les liens sociaux entre habitants ainsi qu’entre habitants et institutions. Le dispositif des « bataillons de la prévention » a été pérennisé pour l’année 2023 suites aux annonces du CIV du 29 janvier 2022.

Les 300 médiateurs ont été puisés parmi le contingent des adultes-relais, en plus des postes d’éducateurs spécialisés.

RÉPARTITION DES BATAILLONS DE LA PRÉVENTION EN 2023

Ce dispositif a permis de remplir plusieurs types de missions, et notamment :

– assurer une présence sociale dans les QPV ;

– apporter un soutien pour renforcer l’autorité parentale ;

– assurer un accompagnement éducatif auprès des jeunes ;

– travailler en partenariat avec les services de l’éducation nationale pour éviter les exclusions scolaires ;

– effectuer un travail de fluidification des actions et des mesures sociales et médico-sociales.

Source : Direction générale des collectivités locales et Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité

Si une montée en compétences des adultes-relais dans les bataillons de la prévention est nécessaire, si leur substitution par des médiateurs formés et plus expérimentés peut être souhaitable, il est étrange de supprimer le financement d’un dispositif dont les conclusions de l’évaluation sont encore attendues. Quel que soit le dispositif, il est urgent de sanctuariser des crédits suffisants en faveur de la médiation sociale dans les quartiers prioritaires. Le rapporteur spécial relaie le souhait des collectivités locales de voir prolonger le dispositif des bataillons de la prévention avec une prise en charge complète par l’État. Le financement de la médiation sociale pourrait être intégré au volet sécurité et prévention des prochains contrats de ville des communes concernées.

Le rapporteur spécial souligne par ailleurs que l’enveloppe de 96 millions d’euros allouée aux dispositifs des adultes-relais, maintenue dans le PLF 2024 à son niveau de 2023 sans prendre en compte l’augmentation du coût des postes, est insuffisante pour financer en année pleine les 6 514 postes ouverts. L’aide de l’État, versée par l’Agence de service et de paiement (ASP) atteignant 22 555,73 euros par an depuis le 1er juillet 2023 (le montant de l’aide de l’État est indexé chaque année sur la hausse du SMIC), l’enveloppe totale ne peut financer que 4 256 adultes-relais actifs à temps complet pendant douze mois. Au 31 juillet 2023, seules 5 020 conventions signées entre l’État et un employeur pour le financement d’un adulte relais étaient actives.

B.   une contribution à l’anru toujours insuffisante

Lancé en 2014 pour poursuivre l’action de transformation des quartiers prioritaires, le Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) concerne 200 quartiers présentant de très graves dysfonctionnements urbains et sociaux, dits « d’intérêt national » (concentrant plus de 82 % de financements du programme), ainsi qu’un peu plus de 250 quartiers dits « d’intérêt régional ». Ce programme couvre ainsi près du tiers des QPV existants.

Les premiers engagements juridiques ont été exécutés en 2017, les AE pouvant être exécutées jusqu’en 2026. Doté initialement de 5 milliards d’euros d’équivalent-subvention, le montant du NPNRU a été doublé en juin 2018 puis a été finalement porté à 12 milliards d’euros d’équivalent-subvention après les annonces du CIV du 29 janvier 2021.

Sur les 480 QPV éligibles au NPNRU, 453 QPV disposent d’un projet validé au 30 juin 2023. Pour un montant total prévisionnel de 13,678 milliards d’euros de concours financiers, ces projets prévoient de traiter 249 000 logements (105 000 en démolition et 144 000 en réhabilitation), de produire 86 700 logements locatifs sociaux neufs au titre de la reconstitution de l’offre supprimée et près de 83 000 logements en diversification sur le foncier libéré par les démolitions, ainsi que de construire 1 033 équipements de proximité et plus de 268 équipements immobiliers à vocation économique.

1.   L’état d’avancée du NPNRU

Au premier trimestre 2023, 1 272 opérations étaient livrées (contre 811 au 1er mars 2022) pour 1,038 milliard d’euros de concours financiers programmés. Par ailleurs, 6,547 milliards d’euros de concours financiers étaient programmés comprenant notamment :

– 1 764 opérations déclarées en cours de travaux (+ 398 par rapport au premier trimestre 2022) ;

– 2 738 opérations au stade des études pré-opérationnelles (+ 526 par rapport au premier trimestre 2022) ;

– 546 opérations de relogement en cours (+ 87 par rapport au premier trimestre 2022).

Après avoir connu un retard au démarrage en 2017, comparé au PNRU (Programme national de rénovation urbaine), le NPNRU est en voie d’atteindre sa vitesse de croisière du point de vue financier avec une accélération franche des dépenses prévues en 2024 et 2025 pour atteindre un maximum de 1,2 milliard d’euros de décaissements attendus en 2027.

Hypothèse centrale de trajectoire d’engagement et de décaissement
des crédits du npnru de 2016 à 2033

(en euros)

Source : ANRU.

 

2.   Une contribution de l’État au NPNRU sans cesse repoussée

Le niveau de participation des différents financeurs au NPNRU après les annonces du CIV du 29 janvier 2021 est le suivant :

– 1,2 milliard d’euros de subventions pour l’État ;

– 2,768 milliards d’euros de subventions pour les bailleurs sociaux, via la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), par un versement annuel de 184 millions d’euros prévu de 2019 à 2033 ;

– 8 milliards d’euros en équivalent subvention pour Action Logement, soit 10,1 milliards d’euros de concours financiers (6,8 milliards d’euros de subventions et 3,3 milliards d’euros de prêts bonifiés).

Cette enveloppe fermée ne permet pas de prendre en compte la hausse importante du coût de la construction et conduit bien souvent les porteurs de projet à revoir l’ambition de leurs projets à la baisse. L’inflation devrait conduire à pouvoir renégocier les conventions entre l’ANRU et les maîtres d’ouvrage, afin de ne pas avoir à rabattre des exigences et des ambitions notamment en matière de protection de l’environnement. Une enveloppe complémentaire pour le NPNRU devrait être envisagée dans cette perspective.

Plus inquiétant encore, l’État ne cesse de reporter l’effort budgétaire sur les années suivantes, l’État ne cesse de reporter l’effort budgétaire sur les années suivantes. Au 31 décembre 2023, l’État devrait n’avoir versé que 9 % de sa contribution pour l’ensemble du plan, contre 24 % pour Action Logement et 33 % pour la Caisse de garantie du logement locatif social. L’enveloppe budgétaire de 50 millions d’euros en 2024 est certes supérieure de 35 millions d’euros à celle prévue par la loi de finances 2023. Mais elle reste inférieure au montant théorique devant être versé par l’État eu égard à la clé de répartition des financements du NPNRU entre les différents contributeurs : avec une enveloppe prévue de 1,2 milliard d’euros, l’État contribue à hauteur de 10 % au financement du programme. Alors que l’ANRU prévoit de dépenser 1 milliard d’euros en 2024, l’État ne contribuerait à financer que 5 % du programme l’année prochaine.

trajectoire (réelle et projetée) des décaissements
en CP par l’État au titre du npnru transmise en 2022

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires et les informations transmises par la DGCL et l’ANRU.

À nouveau, l’effort sera principalement porté par Action Logement au détriment d’un partage équitable de la charge entre les différents contributeurs. Ce déséquilibre pourrait finir par fragiliser la gouvernance et le pilotage du programme. Pour l’État, la haie à franchir va être de plus en plus élevée. La trajectoire de financement présentée l’année dernière prévoit qu’en 2027, soit un an après l’exécution des dernières autorisations d’engagement, l’État n’aura assumé que le quart de sa contribution financière au NPNRU.

Dès 2025, la trésorerie de l’ANRU pourrait être insuffisante pour répondre aux appels de crédits des maîtres d’ouvrages. Il est urgent de disposer d’une nouvelle convention tripartite liant l’État, l’ANRU et Action Logement en vue d’équilibrer l’effort des différents partenaires contributeurs sur l’ensemble de la durée du plan et de garantir que l’État soit à la hauteur de ses engagements. Cette nouvelle convention devrait acter une participation de l’État à hauteur de 100 millions d’euros dès 2024 en vue de rattraper le retard et de tenir les engagements pris par le Président de la République. Cela permettrait également de progressivement mettre en œuvre un programme de renouvellement urbain « au fil de l’eau » à partir de projets établis en fonction des besoins des territoires et non dans le cadre d’un programme national lancé toutes les décennies.

 

III.   le programme 162 Programme des interventions territoriales de l’État : une deuxième année successive de baisse traduiSANt les difficultés d’exécution des plans d’investissement pour la corse et l’absence d’ambition pour L’OUTRE-MER

Le programme 162 est composé de différentes actions territorialisées dont les crédits sont déconcentrés aux services de l’État en régions. L’intérêt du Programme des interventions territoriales de l’État (PITE) est de rendre fongibles des enveloppes budgétaires provenant de différentes administrations et établissements publics (par des crédits ouverts en loi de finances ou via des transferts en gestion et des fonds de concours). Il permet de simplifier le pilotage financier d’actions multiples, aux temporalités diverses et engageant des partenaires nombreux.

La dotation (noyau budgétaire du programme 162) atteint 80,6 millions d’euros en AE et 33,2 millions d’euros en CP. Au-delà de la baisse très significative des CP liée aux plans d’investissement pour la Corse, les AE sont également en retrait pour la deuxième année consécutive. À l’exception des CP de l’action 04 et des AE de l’action 09 dont la baisse est encore plus marquée, l’ensemble des actions connaissent une baisse uniforme de 4,2 % en AE et de 5 % en CP : si les montants en jeu sont assez anecdotiques, cette baisse ressemble fortement à un « coup de rabot » dérisoire au regard des économies réalisées. Le signal envoyé est très négatif notamment pour les territoires ultramarins alors même que des augmentations de budget sont annoncées.

évolution des crédits du programme 162
Programme des interventions territoriales de l’État

(en millions d’euros)

 

LFI 2023 (hors fonds de concours)

PLF 2024 (hors fonds de concours)

Évolution LFI 2023-PLF 2024 en valeur absolue

Évolution LFI 2023-PLF 2024 en pourcentage*

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

02 Eau-Agriculture en Bretagne

2

2

1,9

1,9

– 0,1

– 0,1

 4 %

 5 %

04 Plans d'investissement pour la Corse

50

30,7

47,9

3,8

– 2,1

– 26,9

  4 %

 88 %

08 Plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe

4,5

4,5

4,3

4,2

– 0,2

– 0,3

 4 %

 5 %

09 Plan littoral 21

10

4,4

8

4,2

– 2

– 0,2

 20 %

  5 %

10 Fonds interministériel de transformation de la Guyane

12,1

12,1

11,6

11,5

– 0,5

– 0,6

 4 %

 5 %

11 Reconquête de la qualité des cours d’eau en Pays de la Loire

0,1

0,7

0,1

0,7

0

0

 4 %

 5 %

12 Service d’incendie et de secours à Wallis-et-Futuna

2,2

2,2

2,1

2

– 0,1

– 0,2

 4 %

 5 %

13 Plan Sargasses II

5,1

5,1

4,8

4,8

– 0,3

– 0,3

 4 %

 5 %

Total programme 162

85,8

61,6

80,6

33,2

 5,2

 28,4

 6%

 46 %

Source : projet annuel de performances.

* L’évolution en pourcentage est calculée à partir du montant des crédits inscrits dans le PLF à l’euro près pour éviter les écarts importants qui auraient été constatés en la calculant à partir des arrondis en raison des faibles montants en jeu.

A.   Le plan de transformation, d’innovation et d’investissement (PTIC) pour la corse en souffrance

L’action 04 – Plans d’investissement pour la Corse porte les derniers CP du programme exceptionnel d’investissements pour la Corse (PEI) ayant vocation à être décaissés jusqu’en 2026, ainsi que les AE et CP du plan de transformation et d’investissement pour la Corse (PTIC) lancé en 2021. En 2023 et 2024, l’État devrait financer le PTIC à 75 % contre 25 % pris en charge par les collectivités territoriales.

1.   Un montant ouvert en CP qui interroge

La baisse brutale des CP (3,2 millions d’euros inscrits dans le présent projet contre 30,7 millions d’euros en loi de finances pour 2023) est expliquée selon le projet annuel de performances par la priorité donnée aux crédits du plan de relance, 26,4 millions d’euros du PTIC non consommés étant situés sur le programme 364 Cohésion de la mission de Plan de relance : une enveloppe de 11,4 millions d’euros est prévue sur le programme 364 dans le PLF 2024 et 5 millions d’euros ouverts en 2023 devraient être reportés en 2024.

Plus étonnant est le faible niveau de CP ouverts pour les dernières opérations du PEI (2,8 millions d’euros en CP sur l’enveloppe de 3,8 millions inscrite sur le programme 162). Ce niveau ne correspond pas à l’échéancier de décaissement de crédits, transmis en réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, qui prévoit la consommation de 20 millions d’euros en 2024 notamment en faveur de l’eau (5 millions d’euros), des nouvelles technologies (4,9 millions d’euros) et des sports (4,6 millions d’euros).

échéancier de décaissement des crédits budgétaires de l’état et des restes à payer du pei corse en 2022, 2023 et 2024

(en millions d’euros

AE exécutées 2022

CP exécutés 2022

Restes à payer 2022

CP exécutées 2023 (prév.)

Restes à payer 2023 (prév.)

CP à exécuter 2024 (prév.)

Restes à payer 2024

22,9

19,7

70,9

24,5

46,5

20,0

26,5

Source : réponses au questionnaire budgétaire.

2.   Le PTIC connaît un déploiement difficile

Les retards de déploiement du PTIC s’expliquent pour partie par la mésentente, notamment en 2021, entre les services de l’État et la collectivité de Corse concernant les modalités de sélection des projets et la gouvernance du plan. Le PTIC étant financé à enveloppe fermée, le niveau élevé d’inflation nécessite également de réévaluer l’ambition de certains projets.

La Cour des comptes, dans son rapport public thématique de juin 2023 Les enseignements du programme exceptionnel d’investissements en faveur de la Corse, souligne les insuffisances de la préparation du PTIC : « l’orientation esquissée par l’État dans les premiers mois de mise en œuvre du PTIC et consistant à privilégier la négociation avec le seul bloc communal ne peut suffire pour permettre la mise en œuvre d’une stratégie globale et partagée pour l’ensemble du territoire insulaire. » Selon la Cour des comptes, il n’existe pas aujourd’hui de diagnostic et de stratégie partagés entre l’État et l’ensemble des collectivités territoriales. Les investissements les plus structurants à l’échelle de l’île (eau et assainissement, gestion des déchets, mobilité, énergie, formation professionnelle) ont été relégués derrière les projets locaux. La Cour des comptes appelle à retrouver un dispositif souple en s’appuyant sur un mécanisme de codécision entre l’État et la collectivité de Corse.

B.   Le plan de lutte contre les algues vertes : une réaction s’impose après la nouvelle condamnation de l’état

L’action 02 du programme 162 comporte les crédits de lutte contre la prolifération des algues vertes provenant de l’élevage intensif sur les côtes bretonnes. L’actuel troisième plan de lutte contre les algues vertes 2022-2027 est financé par l’État, l’Agence de l’eau Loire-Bretagne ainsi que les collectivités territoriales. Il comporte un volet préventif (incitation au changement des pratiques agricoles, maintien et renaturation des zones humides et des bocages, réorganisation foncière) et un volet curatif (ramassage des algues, contrôle des émissions de gaz). Une enveloppe de 130 millions d’euros est prévue pour l’ensemble des contributeurs sur la totalité de la durée du plan. L’action 02 doit bénéficier comme chaque année d’un transfert en gestion de 5 millions d’euros en provenance du ministère de l’agriculture (programme 149 Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture).

1.   L’État appelé à renforcer les contraintes pour limiter les rejets azotés

L’État a été condamné une nouvelle fois par le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 18 juillet 2023. Ce dernier a annulé l’arrêt modificatif du plan d’actions régionales nitrates (PAR 6) à compter du 18 novembre 2023 et « enjoint au préfet des Côtes-d'Armor de prévoir, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement, des prescriptions, applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement à l’origine des fuites d’azote dans le milieu naturel, propres à limiter l’apport azoté total dû aux engrais aux besoins des cultures afin de permettre une réduction effective du phénomène d’eutrophisation, selon des seuils conformes aux préconisations scientifiques, et de programmer un contrôle périodique de l’ensemble des exploitations agricoles situées sur le territoire de la réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc. »

Alors que la teneur en nitrate dans les cours d’eau ne baisse quasiment plus depuis plusieurs années, il est logique d’exiger de l’État d’assumer son pouvoir réglementaire et d’obliger les agriculteurs à un changement de pratiques. La mise en œuvre de zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE) étant insuffisante, l’heure n’est plus aux demi-mesures.


Source : Direction du management de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES).

2.   Le durcissement du cadre réglementaire doit conduire à renforcer l’accompagnement des agriculteurs

Le durcissement des mesures de limitation de la fertilisation azotée ne peut être accepté sans engager un renforcement substantiel des mesures d’accompagnement des agriculteurs bretons.

Le soutien spécifique aux agriculteurs bretons s’étant engagés dans une approche contractuelle est aujourd’hui assuré par les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), les paiements pour services environnementaux, le financement d’animation par les collectivités locales et de conseils ou diagnostics pour les agriculteurs, ces derniers étant pris en charge.

L’ensemble de ces dispositifs ne seront pas substantiellement abondés en 2024. Au titre des MAEC, il est prévu de maintenir un financement de 3,1 millions d’euros comme en 2023 (2,5 millions d’euros du FEADER complétés à hauteur de 0,6 million d’euros par l’État) et une enveloppe de 2 millions d’euros pour les mesures d’accompagnement des ZSCE. Or il paraît urgent de renforcer cet accompagnement parallèlement à un renforcement des contraintes.

évolution des crédits de l’action 02 Eau-Agriculture en Bretagne

 

2021

2022

2023
(état de la consommation des crédits fin juillet)

2024
(prévisions)

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Axe 1

Recherche-développement

266 640

411 985

310 097

290 104

118 000

114 000

151 000

231 117

Initiatives innovantes

256 658

153 142

152 536

182 726

115 000

170 000

200 000

232 203

Mesures agro-environnementales (MAE)

400 368

855 426

 

633 933

 

 

 

 

Axe 2

Connaissance des milieux

182 636

173 039

146 916

140 070

150 000

120 000

150 100

150 100

Fonctionnement de la police de l’eau

309 141

287 258

27 207

272 263

231 000

146 000

276 000

275 946

Contrôles renforcés

54 615

51 415

498 491

114 720

285 000

247 000

514 131

725 384

Police de l’eau-équipement

3 368

 

21 300

23 166

 

1 000

23 000

23 000

Police de l’eau-formation

6 367

9 367

26 699

21 715

 

5 000

27 500

27 500

Police ICPE-fonctionnement

35 609

36 957

18 235

19 290

6 000

6 000

14 200

14 200

Axe 3

Étude santé et environnement

100 000

100 000

130 000

130 000

130 000

104 000

130 000

130 000

Suivi et évaluation

120 707

116 610

39 178

97 933

30 000

37 000

56 815

56 815

Axe 5 PLAV

Ramassage algues

1 678 800

1 678 800

1 748 402

1 748 078

143 000

32 000

1 600 000

1 600 000

Analyse des reliquats

166 489

102 302

174 924

130 505

 

117 000

345 628

336 253

Projets de territoires hors Agence de services et de paiement (ASP)

1 836 083

1 266 855

3 078 530

2 382 296

944 000

435 000

3 382 872

2 873 723

Projets de territoire - ASP

778 752

1 357 876

287 000

740 823

46 000

 

 

 

Fonctionnement du comité scientifique

656 500

264 350

 

88 950

 

 

13 875

190 025

Total

6 852 733

6 865 382

6 919 515

7 016 572

2 198 000

1 534 000

6 885 122

6 866 266

Source : Réponse au questionnaire budgétaire

C.   le plan chlordécone : une action inaudible de l’état

L’ordonnance de non-lieu prononcée au sujet de l’enquête sur le chlordécone début janvier 2023 a été vécue comme une gifle par les habitants de Guadeloupe et de Martinique. Or, sans une profonde refonte de l’action de l’État, les efforts des pouvoirs publics, qui tout en étant réels sont insuffisants, resteront lettre morte pour les habitants des Outre-mer.

La dotation du plan chlordécone 2024 est de 4,26 millions d’euros en AE et 4,23 millions d’euros en CP. Ce plan prévoit un budget total de 92 millions d’euros sur la période 2021-2027 dont 31 millions d’euros mobilisés par le PITE.

Le PITE finance la mise en œuvre des actions territoriales du plan : information de la population, fonctionnement des instances de gouvernance de la recherche, programmes de prévention des expositions, accompagnement des professionnels agricoles, sécurité alimentaire des productions, accompagnement des victimes de pesticides dans leur démarche de reconnaissance en maladie professionnelle.

1.   Des annonces supplémentaires annoncées par le ministre en charge des Outre-mer le 27 juin 2023 dont il conviendra de suivre la réalisation

Le ministre Jean-François Carenco, alors en fonction, a présenté le 27 juin 2023 un plan pour vivre « sans risque chlordécone et réparer par l’action ». Ce plan contient plusieurs mesures :

– prévenir et réduire l’exposition des femmes et des enfants au chlordécone grâce à une information renforcée et un suivi personnalisé ;

– financer l’aide aux éleveurs bovins touchés par la pollution au chlordécone (360 000 euros par an) ;

– proposer l’analyse gratuite des œufs, dans le cadre du programme Jardins familiaux (140 000 euros par an) ;

– amplifier le recours aux analyses de sols pour réduire le risque de contamination des aliments sensibles au chlordécone ;

– simplifier et prolonger l’aide financière aux pêcheurs jusqu’à fin 2027 ;

– prendre en charge, de façon dérogatoire, le surcoût du traitement de l’eau potable engendré par la pollution au chlordécone là où ce traitement est nécessaire (1,8 million d’euros par an) ;

– amplifier et faciliter le recours au fonds d’indemnisation des victimes de pesticides ;

– doubler l’effort sur la recherche et l’innovation à horizon 2030, dans tous les domaines, notamment sur la santé de la femme et des enfants, la dépollution des sols et l’expérimentation en grandeur nature des découvertes des chercheurs ;

– porter collectivement avec les collectivités territoriales et les associations des initiatives pour « aller vers » les personnes les plus vulnérables (200 000 euros par an).

Ces mesures, qui doivent être saluées, devraient se traduire par une augmentation de 2,5 millions d’euros par an sur le PITE sur la période 20232027 permettant le financement de quatre des huit mesures. D’autres sources de financement sont prévues : France 2030, programme et équipements prioritaires « Exposome ».

2.   Un changement de philosophie est nécessaire

Selon les pouvoirs publics, le PITE a permis en 2023 de mieux accompagner la population (tests de chlordéconomie et accompagnement des personnes surexposées), se rapprocher du « zéro risque chlordécone » dans l’alimentation (élaboration d’un outil d’aide à la décision pour décontaminer les animaux d’élevage), prendre en charge les impacts de la pollution (accompagnement des victimes de pesticides dans leur démarche pour bénéficier du fonds d’indemnisation, reconnaissance du cancer de la prostate comme maladie professionnelle, aide aux marins pêcheurs pour compenser les pertes de revenus en raison des zones polluées) et améliorer les connaissances pour agir (organisation du colloque de décembre 2022).

L’année 2024 doit être l’occasion de poursuivre l’action notamment en vue des agriculteurs, par l’instauration d’une prime de 200 euros par animal pour lutter contre l’abattage clandestin en incitant les éleveurs à s’inscrire dans les circuits officiels et à bénéficier ainsi des dispositifs d’accompagnement dispensés par les groupements professionnels (analyses de sol, fourrage, eau d’abreuvement et éventuel chlordéconémie des bovins).

Mais au-delà de l’insuffisance de l’action de l’État concernant certains aspects du plan, par exemple en matière de cartographie des teneurs des sols, certains efforts paraissent vains : la stratégie de communication, qui constitue un axe important du plan chlordécone, est confrontée à la profonde méfiance des populations ultramarines pour qui la parole de l’État est durablement décrédibilisée.

Le rapporteur spécial appelle de ses vœux une refonte de la politique de l’État en matière de lutte contre le chlordécone. Lors de la future niche parlementaire du groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES devrait être examinée une proposition de loi tendant à la reconnaissance, à l’étude et à l’indemnisation des victimes du chlordécone ainsi qu’à la création d’un établissement public indépendant chargé de cette mission. Un lien de confiance doit aujourd’hui être retissé entre la population, les élus locaux et l’État au sujet du chlordécone.

D.   la lutte contre les sargasses : il faut maintenant passer à l’échelle

Apparu en 2011 et initialement limité dans le temps, le phénomène d’échouements massifs de sargasses aux Antilles françaises se caractérise par sa pérennité et l’augmentation, depuis 2018, de la fréquence de ses épisodes. L’enveloppe de 4,8 millions d’euros prévue pour 2024 dans le présent projet doit permettre de financer les actions du plan Sargasse II au titre des axes de l’action préventive (axe 1), de la réponse opérationnelle (axe 2) et de la gouvernance (axe 3). En sus des crédits du PITE, les financements complémentaires du FEDER et de l’ADEME doivent permettre d’atteindre une enveloppe annuelle de près de 6 millions d’euros

1.   Des actions pertinentes

Les crédits du programme 162 en 2023 ont été répartis entre les trois unités opérationnelles selon la clé de répartition suivante :

– 43 % pour la Guadeloupe et la Martinique, soit 2 049 294 euros en AE = CP pour chacune des deux îles ;

– 14 % pour Saint-Martin et Saint-Barthélémy, soit 667 212 euros en AE = CP.

L’exemple de la Martinique présenté ci-dessous permet de montrer l’ensemble des actions mises en œuvre au titre du PITE.

actions devant être financées par le pite en martinique en 2023

Source : Préfecture de Martinique.

D’autres actions en Martinique ont été prises en charge hors PITE : le financement du réseau de capteur H2S/NH3 (110 000 euros), le soutien à l’acquisition d’une barge à grue pour la collecte en mer (122 500 euros) et le soutien à la collecte manuelle (2 millions d’euros).

2.   Des innovations à renforcer et une meilleure coopération des collectivités attendue

L’ensemble des dispositifs nécessaires (stockage, surveillance, barrages, collecte en mer) sont aujourd’hui mis en œuvre. D’année en année les acteurs locaux appréhendent mieux les échouages : il faut aujourd’hui « passer à l’échelle » et renforcer les actions déjà mises en œuvre en augmentant par exemple le nombre de barrages et d’espace de stockage ainsi que la flottille de collecte en mer. Les crédits de l’État doivent être en ce sens sensiblement abondés.

En Martinique, les représentants de l’État attendent un engagement plus fort des collectivités locales : un renforcement des efforts de collecte, un meilleur reporting permettant d’évaluer les quantités d’algues collectées à terre, une mutualisation du parc d’engins de ramassage entre les communes concernées. Il est important que les communes puissent s’engager dans la gouvernance du groupement d’intérêt public (GIP).

Enfin, toutes les pistes de valorisation des sargasses doivent être envisagées : productions de biomatériaux (matériaux de construction, bioplastiques, biochar et charbons actifs, savons, cellulose moulée), de biocides ou biostimulants pour l’agriculture, biogaz (méthanisation), biocarburants (bioéthanol), molécules d’intérêts à usage industriel (lubrifiants).

Si cette valorisation paraît aujourd’hui très complexe, un effort important de recherche et de développement doit être consenti pour transformer ce qui ressemble de plus en plus à une catastrophe environnementale pérenne en levier de développement économique : au regard des incertitudes, cet effort de recherche ne peut pas être assumé seulement par les pouvoirs publics.

 


   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 27 octobre 2023 de 9 heures, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Cohésion des territoires.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Après avoir examiné les amendements de crédits et adopté 42 d’entre eux (II-CF233, II-CF691, II-CF1144, II-CF2232, II-CF2255, II-CF2267 et II-CF1401 (identiques), II-CF2268 et II-CF1395 (identiques), II-CF2269, II-CF2279, II-CF2280, II-CF2297, II-CF2298, II-CF2304 et II-CF2371 (identiques), II-CF2328 et II-CF3056 (identiques), II-CF2330 et II-CF3057 (identiques), II-CF2332 et II-CF3059 (identiques), II-CF2335 et II-CF1401 (identiques), II-CF2342 et II-CF1395, II-CF2345, II-CF2365 et II-CF3051 (identiques), II-CF2372 et II-CF3062 (identiques), II-CF2380, II-CF2384 et II-CF3068 (identiques), II-CF2385, II-CF2424, II-CF2430, II-CF2618, II-CF2625, II-CF3069, II-CF3215, II-CF3216,et ne suivant pas les avis du rapporteur spécial Politique des territoires et du rapporteur spécial Logement et hébergement (qui se sont abstenus l’un et l’autre), la commission a adopté les crédits de la mission Cohésion des territoires ainsi modifiés.

La commission a ensuite adopté les amendements II-CF418, II-CF2279 portant articles additionnels rattachés.

 

M. François Jolivet, rapporteur spécial sur les crédits de la mission Cohésion des territoires - logement et hébergement d’urgence. J’ai l’honneur de vous présenter les budgets des programmes 135, 109 et 177 qui recouvrent les politiques d’hébergement, d’aide au logement et de soutien aux politiques d’urbanisme et de la construction. Cette présentation intervient dans un contexte difficile puisque la production de logements neufs, du fait de la remontée des taux d'intérêt, est aujourd’hui en panne sur notre territoire faute de demande. Cela aura des conséquences immédiates sur la production de logements sociaux car 54 % de la production de logements sociaux se fait dans des opérations complexes ou mixtes de promotion. L’équation de la politique du logement est difficile à résoudre, dans la mesure où l’État est responsable de la politique du logement alors que tous les documents programmatiques, que ce soit le schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire (Straddet), le programme local de l’habitat (PLH), le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) ou le schéma de cohérence territoriale (SCoT), sont sous l’autorité des collectivités territoriales et que les permis de construire sont délivrés par les maires.

Que trouve-t-on dans ce budget ? Il est en très forte hausse et atteint 18,3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 18,4 milliards en crédits de paiement. Le parc d’hébergement d’urgence est maintenu à un niveau historique sur le programme 177, à hauteur de 203 000 places en moyenne et tout au long de l’année. Il n’y a pas là matière à se réjouir, mais la politique d’hébergement, bien qu’elle rencontre des difficultés, est saluée par les acteurs chargés de sa mise en place et notamment par le secteur associatif. La priorité reste donnée au service public de la rue au logement avec le dispositif « logement d’abord ». La création de 10 000 places en pension de famille et 30 000 places en intermédiation locative constitue un effort conséquent sur l’ensemble de la durée du second plan « Logement d’abord » 2023-2027 Les services intégrés de l’accueil et de l’orientation (SIAO) sont au cœur du service public de la rue au logement et doivent renforcer leur accompagnement.

Les aides au logement portées par le programme 109 ont été revalorisées de 3,5 %, à la hauteur de l’indice de référence des loyers (IRL) au 1er octobre de cette année. Je souhaite alerter la commission des finances quant à l’impossibilité pour les Caisses d’allocations familiales (CAF), dans leur plan de lutte contre la fraude, de mener les contrôles sur pièce et sur place qui s’imposent tant vis-à-vis des personnes occupant frauduleusement des logements que vis-à-vis des locataires victimes de propriétaires bailleurs peu recommandables qui louent des logements indécents.

Le budget du programme 135 explose en 2024, pour ainsi dire. Une enveloppe de plus de 1,1 milliard d’euros est allouée à l’Agence nationale de l’habitat (Anah), principalement en vue de la rénovation énergétique. Le Gouvernement s’est inspiré des travaux de votre commission concernant le rapport que j’ai présenté lors du Printemps de l’évaluation, ce dont je me félicite. Il a en effet décidé de réordonnancer les gestes et de s’attacher à l’isolation du patrimoine, et pas seulement au remplacement des chaudières au fuel ou au gaz par des pompes à chaleur. Une enveloppe budgétaire de 1,2 milliard d’euros sur trois ans pour les bailleurs sociaux a été également annoncée par le ministre du logement. Qui a connu les enveloppes de prime à l’amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale (Palulos) pour les bailleurs HLM sourira sans doute en constatant que nous y revenons. Cela signifie que l’aide à la pierre revient pour les opérations de réhabilitation menées par les Organismes d’habitations à loyer modéré (OHLM).

Le budget du programme 135 est à mes yeux un bon budget pour la rénovation. En revanche, comme je l’ai signalé, nous sommes en panne sur la construction neuve. Seuls les outils fiscaux discutés en première partie de l’examen du projet de loi de finances (PLF) pourraient permettre de relancer un peu la construction. Les études de la Caisse des dépôts et consignations montrent que les organismes HLM, confrontés à l’enjeu de rénovation énergétique du parc, seraient limités à une production de 60 000 logements HLM par an. Ce nombre serait insuffisant, et c’est la raison pour laquelle une enveloppe de 1,2 milliard d’euros sur trois ans est créée pour aider à la rénovation. Nous avons obtenu aussi quelques victoires, par exemple l’élargissement du logement locatif intermédiaire (LLI), notamment aux sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) des particuliers, afin d’aider les promoteurs à boucler leurs opérations dites complexes ou mixtes. J’avais quant à moi proposé des mesures plus fermes, telles que le dispositif Balladur permettant à des particuliers d’acquérir immédiatement des bâtiments non vendus lorsque la partie privée des opérations complexes, souhaitables dans la mesure où elles sont la traduction de la mixité sociale, ne peuvent pas s’effectuer. Mon souhait reste que la production de logements sociaux ne s’affaisse pas.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial sur les crédits de la mission Cohésion des territoires - Politique des territoires. Les programmes 112, 147 et 162 qu’il me revient de présenter interviennent dans un contexte de profondes inégalités territoriales que les politiques publiques, malgré toutes les bonnes volontés des élus locaux, des services de l’État, des associations et des habitants, n’ont pas réussi à contrecarrer. Les récentes émeutes urbaines, qui ne sont excusables en aucune façon, traduisent aussi un échec de la République dans l’exigence d’égalité territoriale. Les auditions que j’ai menées ont laissé apparaître, notamment de la part des représentants d’associations d’élus, la volonté d’être traités non pas à part, pour ce qui concerne les quartiers populaires ou la ruralité, mais bien à égalité. Si l’on considère l’apport global de l’État, c’est-à-dire le salaire des enseignants, les sorties, l’accès aux documentations, etc., un lycéen du lycée Louis-le-Grand à Paris est mieux doté par l’État qu’un lycéen du lycée Édouard Vaillant de Vierzon ou du lycée Maurice Utrillo de Stains. Parfois le droit commun est le meilleur garant de la République et de l’égalité, et ceci doit demeurer notre ligne de conduite. Je ne doute pas que ces sujets sont au cœur des discussions du comité interministériel de la ville (CIV), qui se tient aujourd’hui enfin après de multiples reculs et ne saurait se limiter à des préoccupations strictement sécuritaires.

J’en viens aux programmes proprement dits. L’augmentation de 9 % en crédits de paiement de l’enveloppe globale traduit des réalités bien différentes selon les programmes. Pour le programme 112, les annuités des contrats de plan État-région (CPER) et des contrats de plan interrégionaux État-régions (CPIER) sont sanctuarisées, ce qui représente une bonne nouvelle. L’augmentation du soutien financier de l’État aux France Services est enclenchée, conformément à ce que nous avions demandé l’an passé. Mais nous serons vigilants quant à sa trajectoire et, surtout, cette augmentation ne résout pas toutes les difficultés puisque plus des deux tiers restent à la charge des collectivités locales. La mise en œuvre du programme « France Ruralités » devrait attirer notre attention sur l’articulation entre les chefs de projet du programme « Villages d’avenir » qui s’inscrit dans « France Ruralités » et les chefs de projet « Petites villes de demain » (PVD), qui n’est pas actée dans le budget. Une enveloppe de 11 millions d’euros est annoncée pour renforcer le maillage territorial des tiers-lieux. Le principal défaut du programme 112 reste, à mon sens, l’insuffisance des crédits alloués à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pour des missions qui nécessitent de plus en plus de liens avec les élus territoriaux. Dans ces conditions, je considère que l’ANCT ne sera pas en mesure de remplir toutes ses missions.

Pour ce qui est du programme 147, je ne reviens pas sur la gifle que fut l’annulation du CIV du 9 octobre dernier. Il est essentiel de battre en brèche la petite musique du « pognon de dingue » qui serait dépensé dans les quartiers. M. François Cornut-Gentille, député de cette même commission lors de la précédente législature et auteur d’un rapport d’information, déclarait, en évoquant le département de la Seine-Saint-Denis, que « les moyens de la politique de la ville ne peuvent combler le déficit des services publics ». Quand l’éducation, les services de santé, les services de tranquillité publique ou de l’emploi fonctionnent au mieux, les quartiers populaires de nos villes et de nos métropoles constituent une formidable source de réussite. Mais il faut pour cela choisir les bonnes priorités. La généralisation des cités éducatives portée par le programme 147 est une initiative positive. En revanche, arrêter, pour financer cette généralisation, les bataillons de la prévention, avant même d’avoir procédé à une évaluation fiable et une éventuelle réorientation, me semble être une décision injustifiable et incompréhensible que je vous inviterai à reconsidérer.

L’autre difficulté majeure du programme 147 repose sur le financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU). Ce financement reste très en-deçà des engagements pris lors du CIV du 29 janvier 2021  annonçant une  enveloppe supplémentaire de l’Etat de 200 millions d’euros. L’État, qui s’est engagé à verser 1,2 milliard d’euros sur l’ensemble de la durée du NPNRU , n’aura déboursé que 200 millions de 2018 à 2024. La marche risque d’être haute les prochaines années, d’autant que les décaissements vont croissant et que la trésorerie de l’ANRU risque de se trouver en difficulté d’ici douze à quinze mois. Nous plaidons pour le respect des engagements.

J’en terminerai avec le programme 162. La plupart des constats réalisés l’année dernière restent d’actualité. Le renforcement des contraintes sur les agriculteurs bretons pour lutter contre les algues vertes passe aussi par des aides incitatives qu’il convient d’augmenter. Le plan de lutte contre les sargasses est intéressant, mais, faute de moyens suffisants, demeure trop artisanal. Quant au chlordécone, tant dans le cadre de la semaine de contrôle le 27 novembre que lors de la niche parlementaire du groupe GDR, ce groupe, auquel j’appartiens, portera l’idée de la création d’un établissement public chargé de l’observation, de la prévention et de l’indemnisation des populations confrontées à cette pollution dans les Antilles. Nous proposerons de ne pas supprimer de crédits dans ce budget pour la lutte contre le chlordécone. Enfin, concernant la Guyane, la hausse de 50 millions d’euros annoncée par M. Philippe Vigier au titre du contrat de convergence et de transformation, ministre délégué chargé des Outre-mer, ne se traduit pas dans le programme 162 et nous n’en trouvons nulle part la trace.

Mme Sylvie Ferrer, rapporteure pour avis pour la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Le 18 octobre, j’ai présenté un rapport traitant de la mission Cohésion des territoires. Quatre sujets principaux prévalent dans ce rapport, la lutte contre les algues vertes en Bretagne, le dysfonctionnement de l’ANCT, la mise en œuvre des espaces France Services et la lutte contre l’intoxication au chlordécone aux Antilles. Sur la base de témoignages d’élus, d’experts, de citoyens, mon rapport émet plusieurs conclusions.

La lutte contre les algues vertes en Bretagne ne sera efficace qu’à la condition de s’attaquer aux causes du problème, c’est-à-dire à l’élevage intensif. Le système agricole doit effectuer sa transition vers un modèle respectueux de l’environnement, des agriculteurs et des consommateurs. Un soutien massif de la puissance publique est nécessaire pour que nos paysans puissent surmonter le défi majeur qui se présente à eux.

L’Agence nationale de cohésion des territoires est une coquille vide, pour reprendre les termes d’un maire des Hautes-Pyrénées. Les crédits qui lui sont octroyés financent des cabinets privés et ne répondent pas aux besoins des territoires en termes d’ingénierie. Il convient de renforcer et de soutenir les structures existantes, et je pense à titre d’exemple au Centre d’études et d’expertise sur les risques, la mobilité et l’aménagement (Cerema).

Les espaces France Services sont une bonne initiative, qui remettent du service public sur des cendres encore chaudes. Toutefois, une véritable prise en charge de l’État est nécessaire afin de donner une bouffée d’oxygène à nos élus locaux. Malgré un dispositif pertinent, les collectivités territoriales sont asphyxiées.

Le plan national d’action chlordécone (PNAC) est très insuffisant et très insuffisamment doté. Les actions menées actuellement doivent être soutenues, mais il convient aussi de financer véritablement l’indemnisation des victimes et la recherche scientifique. Sur la base de ces constats, le groupe LFI proposera plusieurs amendements d’importance pour nos élus locaux, nos agriculteurs, et nos concitoyens et concitoyennes des Antilles.

M. le président Éric Coquerel. Comme vous le savez, nous avons de nombreux amendements à examiner, et je ferai en sorte d’aborder toutes les missions. Pour cela, je vous demande chers collègues de ne pas dépasser le temps imparti à vos prises de parole, d’éviter les relances et d’annoncer autant que possible les amendements défendus. J’appliquerai ces règles de manière totalement impartiale.

Amendement II-CF2269 de Mme Marie-Charlotte Garin.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). De l’enquête nationale sur les maraudes, menée en 2022 par la Fédération nationale des SAMU sociaux (FNSS), il ressort le constat partagé que le sans-abrisme ne recule pas. Cette enquête fait apparaître également que les problématiques des personnes à la rue sont de plus en plus profondes et imbriquées entre elles, ce qui nécessite de renforcer les équipes de maraudes qui secourent, accompagnent et orientent les personnes à la rue. Cet effort suppose d’accroître les équipes sur le terrain pour améliorer la couverture territoriale, mais aussi de renforcer leur équipement technique. Cet amendement est proposé par le collectif Alerte, qui réunit 34 associations et fédérations de solidarité, dont la Fondation Abbé Pierre ou le Secours catholique. Commencer l’étude de cette mission en relayant la parole des associations et les appels des acteurs de terrain me semble symbolique. Les points centraux soulevés dans les amendements à venir et dans la discussion porteront souvent sur la question des moyens, ceux alloués aux personnels qui sont en souffrance et éprouvent une perte de sens par rapport à leur travail, ceux destinés pour les personnes prises en charge, et bien entendu les moyens dédiés aux personnes qui ne sont pas prises en charge puisque les collectifs nous alertent quant au non-recours.

M. François Jolivet, rapporteur. Je comprends le sens de votre amendement. J’ai moi-même rencontré des acteurs locaux sur ce sujet. Je rappelle que 500 équivalents temps plein (ETP) seront créés dans les  deux ans au sein des SIAO. Par ailleurs, le budget 2024 dédié à l’accompagnement des personnes de la rue à l’hébergement ou de la rue au logement a été augmenté de manière colossale. J’émets un avis défavorable ou une demande de retrait parce que les acteurs que j’ai pu rencontrer ne m’ont pas formulé les mêmes demandes. Ils attendent des actions sur d’autres sujets bien plus importants à mon avis.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). Nous relayons la parole de collectifs dont les demandes sont multiples. Vous dites, monsieur le rapporteur, qu’un certain nombre d’entre elles sont satisfaites. Je le salue, mais j’estime que ces réponses restent insuffisantes.

La commission adopte l’amendement II-CF2269.

Amendement II-CF2385 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à renforcer les moyens des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions (CCAPEX) et des équipes mobiles de prévention des expulsions locatives. Nous proposons de les porter à 10 millions d’euros en prévision de la hausse sensible des besoins due à la mise en œuvre des dispositions de la loi Kasbarian de lutte contre les occupations sans droit ni titre des logements et autres locaux. Outre les effets délétères de cette loi sur la charge de travail de ces commissions et des équipes mobiles, il s’agit également d’assurer un rattrapage tenant compte de leur charge de travail et de la nécessité de raccourcir les délais de traitement et de prise en charge.

M. François Jolivet, rapporteur. J’entends le fond de votre amendement, mais vous savez que les CCAPEX sont administréespar des agents publics du département, des services de l’Etat  de la caisse d’allocations familiales. Vous proposez une augmentation des moyens, mais à quelle fin, dans quelle perspective et pour financer quelle administration ? En l’absence de réponses, mon avis est défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES).  Monsieur le rapporteur n’est pas sans savoir que les CCAPEX sont soutenues par une administration, en l’occurrence la direction régionale et interdépartementale de l’Hébergement et du Logement (Drihl). Elles sont en capacité de traiter en amont les dossiers en lien avec les travailleurs sociaux accompagnant les personnes aux prises avec une procédure d’expulsion. Cela demande du temps et des moyens humains, et ce d’autant plus que la loi Kasbarian, en réduisant les délais des procédures d’expulsion, presse davantage encore les CCAPEX qui disposent ainsi de moins de temps pour prévenir ce type d’expulsions.

La commission adopte l’amendement II-CF2385.

Amendement II-CF2268 de Mme Marie-Charlotte Garin.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). Cet amendement propose l’ouverture de 10 000 places d’hébergement supplémentaires, ainsi que la prise en compte de l’augmentation des coûts de fonctionnement des structures de l’hébergement. Ces 10 000 places supplémentaires, évidemment, ne recouvrent pas les besoins réellement nécessaires, notamment les besoins liés au non-recours. Je rappelle que l’année passée, nous avons dû nous battre pour maintenir le parc existant et empêcher la suppression de 14 000 places. Aujourd’hui, la création de ces 10 000 places est fondamentale, en particulier pour accueillir ceux qui se voient refuser l’hébergement. À Lyon, 151 enfants vivent dans la rue, donc vingt enfants de moins de 3 ans. Faute de places d’hébergement, les travailleurs sociaux en sont réduits à opérer une priorisation par le pire, ce qui est inacceptable. Les moyens ne sont pas à la hauteur. Je salue le travail transpartisan sur cet amendement, qui est également porté par nos collègues de la majorité.

Amendement II-CF2342 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Jamais dans l’histoire récente de notre pays autant d’hommes, de femmes et d’enfants se sont trouvés à la rue. Cette situation implique une tâche absolument inhumaine de priorisation de la part des SAMU sociaux. En fin de journée, lorsque tous les appels ont été recueillis, les travailleurs sociaux du 115 doivent décider qui sera mis à l’abri et qui dormira dehors. Face à cette situation terrible, nous ne pouvons pas entendre qu’un « pognon de dingue » est donné à l’hébergement d’urgence. Les politiques du logement et de l’hébergement doivent être considérées ensemble et de façon globale. Les économies réalisées sur le logement social sont bien supérieures à l’argent investi dans l’hébergement d’urgence. L’État, sur ce sujet, a une obligation de résultat. Il doit mettre les moyens afin qu’aucun enfant, aucune femme, aucun homme ne vive dans les rues de notre pays. Il ne s’agit là que de respecter la loi, en l’occurrence le code de l’action sociale et des familles, et nos engagements internationaux, comme ceux pris, par exemple, vis-à-vis de la Convention internationale des droits de l’enfant.

M. François Jolivet, rapporteur. Mes chers collègues, je ne prétends pas qu’un « pognon de dingue » est dépensé dans l’hébergement. J’observe simplement que les sommes investies sont élevées et en forte augmentation depuis 2018. Nous avons désormais la possibilité de ne plus fermer de places d’hébergement et toute l’année, 365 jours par an, des personnes sont hébergées. Y en a-t-il encore à la rue ? La réponse est oui. Vous réclamez 160 millions d’euros sans expliquer les raisons de cette requête. Cela me semble décorrélé des besoins réels, c’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement, ou bien j’émettrai un avis défavorable.

Mme Stella Dupont (RE). Les moyens consacrés à l’hébergement d’urgence sont très importants, et de fait ils ont fortement augmenté ces dernières années. Malheureusement, je constate chaque jour à Angers que des femmes et des enfants sont à la rue. Malgré les engagements pris, il est nécessaire de débloquer davantage de moyens d’urgence et de réfléchir plus globalement au sujet de l’hébergement d’urgence.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Je me trouvais hier à l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis. Parmi les 54 lits de la maternité, 14 sont fermés faute de personnel, et 18 sont occupés depuis plus de 70 jours par des femmes en attente d’une solution d’hébergement d’urgence. La baisse de 5 % subie par les services d’hébergement d’urgence s’est traduite par la fermeture de la seule structure accueillant des femmes en sortie de maternité en Seine-Saint-Denis. Cet exemple a pour but d’appuyer cette demande urgente.

La commission adopte les amendements II-CF2268 et II-CF2342.

Amendement II-CF686 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à maintenir les crédits alloués aux places d’hébergement d’urgence au niveau de leur exécution budgétaire de 2022, augmentée de l’inflation 2023 et 2024. Vous annoncez le maintien de 203 000 places, monsieur le rapporteur, mais les budgets ne suivent pas. 137,3 millions d’euros constituent le minimum pour maintenir les moyens de 2022 et ces 203 000 places. Le contexte inflationniste pèse lourdement sur les charges des associations et crée des situations de déficit structurel. Les acteurs de terrain constatent une augmentation de la précarité et des besoins d’accompagnement des personnes en situation de précarité. À ce titre, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a dénombré, en octobre 2023, 8 351 demandes d’hébergement d’urgence non pourvues, contre 6 351 en octobre 2022. Deux tiers de ces demandes non pourvues sont le fait de familles. Il est par conséquent urgent d’allouer les moyens nécessaires à l’hébergement d’urgence et, à tout le moins, de maintenir les moyens de 2022 augmentés de l’inflation mesurée les années suivantes.

Amendement II-CF2370 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement, travaillé avec la Fédération des acteurs de la solidarité, propose une hausse de 6 % des crédits proposés par le gouvernement, afin d’augmenter les moyens de l’hébergement d’urgence et du logement adapté. Ce taux correspond à l’inflation prévisionnelle pour 2023 telle qu’estimée par la Banque de France.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable ou demande de retrait.

L’amendement II-CF2370 est retiré.

Mme Perrine Goulet (Dem). Je rappelle que les amendements adoptés risquent d’empêcher, par le mécanisme du gage, les discussions que nous aurons plus tard sur certaines lignes budgétaires. Je pense qu’il est nécessaire de garder cette logique à l’esprit, et qu’il convient de ne pas oublier que les gages seront automatiquement déduits. En doublant le nombre de crédits, vous risquez de n’avoir aucune marge sur des discussions à venir.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Je compte maintenir cet amendement, parce qu’il s’agit d’une question de principe. La requête ne consiste en rien d’autre que le maintien des moyens de l’hébergement d’urgence à hauteur de l’inflation.

M. Inaki Echaniz (SOC). Les 13 milliards d’euros de l’aide personnalisée au logement (APL) nous laissent une certaine marge de manœuvre pour de futures discussions.

La commission rejette l’amendement II-CF686.

Amendement II-CF2422 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). Cet amendement d’appel alerte sur la situation des SIAO en France, et en particulier celle de leurs salariés. Ceux-ci sont en première ligne lorsque survient une crise. Ils ont répondu présents lors du Covid-19, lors des déplacements massifs de population, des plans grand froid ou des plans canicule. Pourtant ils sont relégués au deuxième plan. La politique actuelle du gouvernement en matière de solidarité est un échec total, puisque le nombre de sans-abri et de mal-logés bat des records chaque année. Par cet amendement, nous souhaitons impulser une augmentation drastique des moyens dédiés à l’ensemble de la filière médico-sociale, c’est-à-dire aux agents d’accueil et de restauration, aux écoutants, aux travailleurs sociaux, aux régulateurs, aux coordinateurs et tant d’autres qui prennent soin des plus précaires.

M. François Jolivet, rapporteur. Je considère que cet amendement est déjà satisfait, étant donné qu’un amendement allant dans le même sens a été adopté tout à l’heure. J’émets par conséquent un avis défavorable ou une demande de retrait.

La commission rejette l’amendement II-CF2422.

Amendement II-CF2423 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à dédier des moyens à l’aide à la domiciliation. Le nombre de personnes sans domicile fixe augmente de manière alarmante. Ces personnes ne disposant pas d’adresse ne peuvent accéder à leurs droits ni satisfaire un certain nombre de procédures. Cette situation freine fortement l’accès au droit, à l’emploi et à la réinsertion. La domiciliation est un premier pas dans une démarche vers l’insertion, or les centres sociaux ne sont pas en capacité de prendre en charge toutes ces procédures. Il convient donc d’augmenter les moyens, tout en portant une attention particulière à leur répartition sur le territoire, afin que chaque commune s’engage sur la domiciliation et l’accompagnement des personnes en situation de détresse et de fragilité.

M. François Jolivet, rapporteur. Je suis d’accord avec vous, madame Chatelain, toutefois je précise que ces crédits ne sont pas portés par le budget 177, mais par le programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes de la mission Solidarité. 16 millions d’euros ont été ajoutés dans le budget du programme 304 pour satisfaire la demande que vous exprimez. Aussi j’estime que celle-ci n’a pas sa place dans la présente discussion. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF2423.

Amendement II-CF2304 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement a pour objectif de compenser auprès des employeurs le versement d’une prime à destination des salariés des SIAO, représentant pour 2024 un coût total de 8 millions d’euros. Cette mesure vise à soutenir l’engagement quotidien des salariés des SIAO, à accompagner les transformations en cours et à éviter des départs de professionnels qualifiés vers d’autres postes.

Amendement II-CF2371 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Les salariés des SIAO sont des acteurs centraux de la régulation du dispositif d’hébergement et de logement adapté, ils sont la cheville ouvrière de la politique publique de l’État en matière de résorption du sans-abrisme. Cette augmentation reprend l’engagement du gouvernement de Mme Élisabeth Borne et du ministre délégué alors en charge du logement, M. Olivier Klein, qui l’avait formulé devant le Sénat et réitéré en mars 2022.

M. François Jolivet, rapporteur. Notre commission a adopté en début de séance un amendement de dépenses de 160 millions d’euros. Vous proposez à présent des amendements à 8 millions d’euros. J’estime qu’ils ont été satisfaits par nos votes précédents. J’émettrai donc un avis défavorable ou une demande de retrait.

La commission adopte les amendements II-CF2304 et II-CF2371.

Amendement II-CF2424 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). L’objectif de cet amendement est d’augmenter les moyens dédiés aux hôtels sociaux pour en améliorer les conditions d’accueil et les conditions de travail.

M. François Jolivet, rapporteur. J’émets un avis défavorable sur votre amendement. Le sujet aujourd’hui ne me paraît plus être celui des hôtels sociaux. Vous vous souvenez que notre commission avait soulevé le problème de l’éventuelle incidence des Jeux olympiques et paralympiques sur les hôtels dédiés à l’accueil de l’hébergement d’urgence, notamment en région parisienne. Ces craintes se sont avérées infondées, et pourtant vous souhaitez ajouter 100 millions d’euros aux 160 millions d’euros déjà deux fois votés.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Il n’est pas encore certain que toutes les craintes liées aux Jeux olympiques soient injustifiées. Des difficultés se présentent lors de grands événements, par exemple à l’occasion de la fête des Lumières à Lyon, où des personnes sont expulsées de leur lieu d’hébergement. Les conditions de vie, les problèmes d’hygiène, de punaises de lit ou de cuisine témoignent de la nécessité d’obtenir des moyens tant qu’il sera fait recours à l’hôtel comme solution d’hébergement. Ou bien, si l’on souhaite se passer des hôtels, il faudra augmenter en conséquence les moyens dédiés à l’hébergement et à la création de logements.

La commission adopte l’amendement II-CF2424.

Amendement II-CF2338 de M. William Martinet.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Je me permets de commencer mon propos par une citation : « Je ne me résignerai pas à laisser dormir cette famille dans un local à poubelles ». Voilà ce que disait une enseignante en Haute-Garonne. En Haute-Garonne, 300 enfants vivent dans la rue, dont la plupart à Toulouse. Existe-t-il une seule école à Toulouse sans aucun élève sans domicile fixe ? Cette question se pose partout en France. Aussi, relayant une demande de la FAS, nous demandons par cet amendement la garantie du maintien des 203 000 places d’hébergement d’urgence, et l’abondement d’un fonds de 80 millions d’euros relatif à une inflation mesurée à plus de 6 %.

M. François Jolivet, rapporteur. J’entends votre proposition, mais nous venons de voter deux rallonges budgétaires de 160 millions d’euros de crédits supplémentaires, une autre de 100 millions d’euros, une autre de 8 millions d’euros, et maintenant vous proposez un nouvel ajout de 80 millions d’euros sur la mission hébergement. J’estime que l’addition de toutes les demandes satisfait la vôtre, dont je comprends le fondement mais qui n’est plus pertinent à ce stade de la discussion. Avis défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur, chaque amendement a des objectifs politiques différents. Nous avons fait adopter des amendements visant à augmenter le nombre de places d’hébergement d’urgence. L’amendement dont nous discutons maintenant propose de prendre en compte le coût de l’inflation pour les associations qui gèrent des places d’hébergement. Le prix de l’énergie a augmenté, le prix de l’alimentation a augmenté. Si le budget des associations n’augmente pas, il faudra leur indiquer quel repas sera supprimé et à quel moment de l’année elles devront couper le chauffage.

La commission rejette l’amendement II-CF2338.

Amendement II-CF2449 de Mme Stella Dupont.

Mme Stella Dupont (RE). Les moyens budgétaires mis en place sont exceptionnels. La politique du logement d’abord s’inscrit dans cette logique de mise à l’abri des plus fragiles. Mais si l’engagement de notre majorité est fort, des failles sont constatées sur le terrain. Dans mon département du Maine-et-Loire, des personnes sont mises à l’abri par des bénévoles tous les jours. Aussi la politique d’hébergement d’urgence reste une préoccupation majeure et devrait être étudiée et évaluée attentivement en commission des finances. Chaque année, des moyens importants y sont consacrés, et pourtant chacun constate que des personnes dorment toujours dans la rue. Cette politique est complexe, elle concerne des personnes aux statuts très différents, des Français, des étrangers, des primo-arrivants ou encore des personnes déboutées de leur demande d’asile. Il convient d’approfondir ce sujet pour identifier d’autres perspectives.

M. François Jolivet, rapporteur. Je connais votre engagement sur ce sujet, madame Dupont, et je le respecte. Les associations dont certains parlementaires se font ici les porte-paroles souffrent essentiellement du manque d’espaces bâtis pour accueillir les personnes en détresse, puisque les demandes de fonctionnement sont quant à elles systématiquement acceptées. Je m’étonne d’ailleurs que certaines collectivités territoriales s’autorisent à dresser des constats de grandes difficultés sur l’accueil et l’hébergement d’urgence, alors qu’elles ne se portent pas candidates lorsque des appels à projets sont lancés par la Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal) pour construire de nouveaux  centres d’hébergement. Je pense que certains verrous doivent sauter sur l’aide à l’investissement et pour convaincre les acteurs locaux de l’habitat d’y participer, puisque l’habitat et l’hébergement font partie du parcours résidentiel. J’émets donc un avis défavorable, mais je me tiens prêt à participer à un débat de fond sur ces questions.

Mme Stella Dupont (RE). Ma proposition consiste à revenir aux moyens consacrés au nombre de places de 2021. Cette demande n’est donc pas déraisonnable. Toutefois, au vu des crédits déjà consommés pour cette mission, je retire mon amendement en espérant, de même, la tenue d’un débat sur le sujet.

L’amendement II-CF2449 est retiré.

Amendement II-CF691 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à accroître les moyens alloués à l’hébergement d’urgence en suivant les recommandations de la Cour des comptes, qui préconise d’appliquer un taux de mise en réserve identique à celui appliqué aux programmes portant sur les prestations sociales, c’est-à-dire 0,5 %. Cette mise en réserve revêt une importance cruciale pour atteindre un objectif que partageait l’ancien ministre délégué au logement M. Olivier Klein, lorsqu’il avait déclaré en octobre 2022 « aucun enfant ne doit dormir dans la rue cet hiver ». Malheureusement, moins d’un an plus tard de nombreuses personnes, dont des enfants, ont été expulsées de leurs lieux d’hébergement dans toute la France. Je souhaite également soutenir la demande de madame Dupont pour une approche globale et approfondie de la question de l’hébergement d’urgence. Enfin, j’anticipe l’objection de monsieur le rapporteur en maintenant mon amendement dans la mesure où, si par malheur les amendements précédemment votés n’étaient pas retenus dans le cadre du recours à l’article 49.3, cet amendement à 6,6 millions d’euros l’est quant à lui.

M. François Jolivet, rapporteur. Vous vous trompez, madame Sas, quant à l’avis que je m’apprête à émettre. Il sera de sagesse puisque cet amendement suit une recommandation de la Cour des comptes, et favorable puisque le montant évoqué est faible.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Je remercie monsieur le rapporteur pour cet avis de sagesse. Je souscris par ailleurs à la demande de tenue d’un débat de fond sur le financement et le fonctionnement de l’aide à l’hébergement d’urgence, sur l’allocation des moyens au regard du niveau de l’inflation et sur la visibilité offerte aux acteurs de terrain, qui tous nous font part des difficultés dues à l’instabilité des moyens selon les années. Vous avez également raison, monsieur le rapporteur, sur les collectivités territoriales, mais je rappelle qu’elles se trouvent souvent en difficulté du fait de l’absence d’aide à l’investissement.

La commission adopte l’amendement II-CF691.

Amendement II-CF2368 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement, issu des travaux du Conseil national de la refondation pour le volet Logement (CNR logement), vise à renforcer les moyens dévolus au nouveau plan quinquennal « Logement d’abord » 2023-2027 de 60 millions d’euros. Le dispositif logement d’abord est salué par les professionnels, mais il doit désormais s’accompagner d’une augmentation continue de ses moyens afin de généraliser les pratiques, d’accompagner au mieux les bénéficiaires, de doter les acteurs associatifs et autres structures des moyens permettant cet accompagnement. C’est la condition pour réussir un changement de paradigme et de faire du CNR une légère réussite en reprenant une de ces mesures.

M. François Jolivet, rapporteur. Les moyens du dispositif logement  sont reconduits chaque année et permettent d’accompagner la création de nouvelles places. Je comprends la demande de moyens, mais par rapport à quel objectif de logement faudrait-il ajouter 60 millions d’euros, alors que la création de 10 000 places  supplémentaire en pensions de famille et de 30 000 places en intermédiation locative est prévue sur l’ensemble de la durée du plan  et que cet accompagnement se déroule bien ? Les associations n’abordent pas le sujet de l’intermédiation locative fonctionnant avec les baux glissants, avec les bailleurs HLM, parce que ces dispositions remplissent leur rôle. Bien sûr, il est toujours possible de faire plus, toujours plus. Cependant, j’émets un avis défavorable parce que ces demandes ne sont pas celles qui m’ont été adressées lors des auditions.

M. William Martinet (LFI-NUPES). L’intermédiation locative et les beaux glissants ne résument pas à eux seuls tout le plan logement d’abord. Ce plan fonctionne, mais reste de l’ordre de l’expérimentation. L’allongement budgétaire proposé par l’amendement de monsieur Echaniz permettrait de changer d’échelle et de ne pas se contenter de démonstrations locales visant à prouver qu’une volonté politique peut aider les sans-abri à accéder au logement, mais plutôt de montrer qu’une véritable politique nationale est à l’œuvre.

M. François Jolivet, rapporteur. Vous estimez que 10 000 places  en pensions de famille et de 30 000 places en intermédiation locative supplémentaires  représentent peu. Ce n’est pas mon avis.

La commission rejette l’amendement II-CF2368.

Amendement II-CF1084 de Mme Caroline Parmentier.

M. Philippe Lottiaux (RN). Le PLF prévoit la création de 1 000 places pour les femmes victimes de violences. Nous partageons pleinement le souhait d’aider ces femmes que traduit cette décision. Pourtant, selon un certain nombre d’associations, ces 1 000 places sont sensiblement insuffisantes au regard des besoins réels. C’est pourquoi nous proposons par cet amendement de créer 3 000 places supplémentaires. Le coût de ces 3 000 places est estimé par un calcul basé sur le rapport sur le financement de la lutte contre les violences faites aux femmes. Je signale que l’amendement II-CF1085 est un amendement de repli réduisant la demande à 2 000 places pour des questions budgétaires, et l’amendement II-CF1086 est un second amendement de repli abaissant la demande à 1 000 places, toujours pour des questions budgétaires. Je défends ces trois amendements en même temps.

Amendement II-CF2255 de Mme Marie-Charlotte Garin.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). L’enquête de victimation « Genèse » de 2021 indique que 270 000 femmes ont déclaré des violences cette année-là. Ces chiffres sont en hausse. Le nombre de plaintes a augmenté de 83 % entre 2018 et 2023. Pour ces femmes, la décohabitation est souvent la seule solution pour mettre fin aux violences. Selon les associations, environ 17 % des femmes victimes de violence, éventuellement accompagnées de leurs enfants, ont besoin de bénéficier d’un hébergement pour une durée moyenne de neuf mois. Le rapport intitulé « Où est l’argent pour l’hébergement des femmes victimes de violences ? » de la Fondation des femmes publié en 2021 recommandait la mise à disposition de 13 530 places d’hébergement pour ces femmes. Des moyens ont été débloqués à la faveur du Grenelle des violences faites aux femmes. Cet amendement est porté par la Fondation des femmes, le planning familial, la Fédération nationale solidarité femme (FNSF), la Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (FNCIDFF). Il propose la création de 2 000 nouvelles places afin de répondre aux besoins toujours en hausse des femmes victimes de violences conjugales.

M. François Jolivet, rapporteur. Je répondrai pour l’ensemble des amendements présentés sur ce sujet. Aujourd’hui, environ 10 000 places d’hébergement sont dédiées aux femmes victimes de violences conjugales. Le PLF 2024 prévoit la création de 1 000 places supplémentaires, et j’ignore si vos amendements ont été rédigés en tenant compte de ces nouvelles dispositions. J’ai rencontré un certain nombre de gestionnaires sur ce sujet. Ils ne se battent pas tant sur le nombre de places disponibles que sur l’accompagnement des femmes victimes de violences vers le logement, puisque, paradoxalement, ce n’est pas toujours l’auteur des violences qui quitte le logement. Tenant compte de la création de ces 1 000 places, j’émets un avis défavorable sur vos amendements.

Amendement II-CF2326 de M. William Martinet.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur affirme que le problème n’est pas tant le nombre de places que le manque de moyens. Voilà à mes yeux une manière de tourner autour du pot. Le 6 juillet, à Toulouse, 33 femmes victimes de violences ont été remises à la rue par le préfet, qui ainsi rompait avec le principe de continuité de l’hébergement d’urgence. Voici un exemple concret, où 33 femmes ont été mises en danger par le manque de places. Cet amendement, dans la continuité du précédent, demande de concert avec des associations, dont la Fondation des femmes, la création de 2 000 places supplémentaires, c’est-à-dire une mesure d’urgence et de bon sens.

La commission rejette les amendements II-CF1084 et II-CF1085.

La commission adopte l’amendement II-CF2255, en conséquence les amendements IICF2326 et II-CF1086 tombent.

La commission rejette l’amendements II-CF2420.

Amendement II-CF2267 de Mme Marie-Charlotte Garin.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). Par cet amendement, nous demandons des moyens spécifiques pour la mise à l’abri des enfants à la rue et de leurs familles. Chaque jour, les acteurs du terrain sont contraints d’opérer un tri sur le critère du pire. Concrètement, cela signifie que dans le département du Rhône, où je suis élu, un enfant de moins d’un an sera pris en charge avec sa mère. Mais s’il a un an et un jour, il ne sera pas pris en charge. Ce tri par le pire, par la vulnérabilité, est catastrophique. C’est pourquoi nous proposons de donner un peu plus de moyens spécifiquement pour les enfants à la rue et leurs familles. À Lyon, sept écoles sont occupées par des parents et des enseignants pour mettre à l’abri ces familles. Cette situation est anormale. L’école ne devrait pas servir de refuge pour des mal-logés. Des moyens sont nécessaires pour que les collectifs et les associations puissent accompagner correctement ces personnes.

Amendement II-CF2335 de M. William Martinet.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Le 115 a toujours rencontré des difficultés pour mettre à l’abri tous ceux qui en ont besoin. Mais jusqu’à récemment les associations et les services de la préfecture parvenaient à mettre à l’abri les femmes avec des enfants. Grâce à la mobilisation de tous, les enfants ne dormaient pas sur les trottoirs de nos villes. Malheureusement, cette digue a cédé depuis quelques années. Les associations nous indiquent que plus de 2 000 enfants dorment dans la rue et nous sommes profondément inquiets parce que cette situation tend à devenir une banalité, à s’imposer comme une norme. Ne nous y résignons pas. Donnons-nous les moyens afin que chaque enfant dorme avec un toit au-dessus de la tête.

M. François Jolivet, rapporteur. Je vous fais part de mon étonnement quant à la situation que vous présentez, madame Garin. J’ignorais le critère d’âge dont vous parlez, entre enfants de moins d’un an et enfants de plus d’un an. Cette règle me paraît contredire la loi et le principe de l’accueil universel. J’aimerais obtenir davantage d’informations et en parler avec vous en dehors de cette commission. Par ailleurs, le directeur de la Dihal considère que le chiffre avancé sur le nombre d’enfants qui dorment dans la rue est très surestimé et, connaissant son engagement sur le sujet de l’hébergement d’urgence, on ne saurait imaginer qu’il se trompe ou qu’il mente. Mais naturellement, un enfant qui dort dans la rue, c’est déjà un de trop. Et pour répondre à monsieur Piquemal à propos des femmes victimes de violences conjugales, il me semble qu’un préfet qui les sortirait d’un centre pour les remettre à la rue commettrait une illégalité. Le vrai sujet, je le répète, est celui du logement durable pour ces personnes qui, parfois, sont en situation irrégulière et ne peuvent pas bénéficier du logement social. J’émets un avis défavorable sur les amendements.

M. Inaki Echaniz (SOC). Je précise à l’attention de nos collègues de la majorité que cet amendement est également déposé par certains députés de la majorité parmi lesquels M. Lionel Causse, qui est tout de même président du Conseil national de l’habitat (CNH). Je vous invite en conséquence à voter cet amendement, comme le fera le groupe socialiste.

La commission adopte les amendements II-CF2267 et II-CF2335.

Amendement II-CF2376 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement, proposé et travaillé avec la Fondation Abbé Pierre, vise à renforcer les moyens dévolus au deuxième plan logement d’abord de 22 millions d’euros. Ces fonds seraient destinés au financement des actions en matière de production nouvelle, de places en pension de famille, d’intermédiation locative, de résorption des bidonvilles et d’actions en faveur des gens du voyage. Les objectifs du plan logement 2 risquent de se heurter aux difficultés générées par la hausse de l’inflation. Je précise que le groupe socialiste n’a pas voté certains amendements plus ou moins similaires à celui-ci.

Amendement II-CF2456 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement, lui aussi soutenu par la Fondation Abbé Pierre, a pour objectif de renforcer à hauteur de 22 millions d’euros les dispositifs de type pension de famille. Ces pensions de famille peuvent enclencher une chaîne conduisant des personnes en difficulté de l’hébergement d’urgence à un logement stable. Nous soutenons les objectifs du plan logement d’abord, mais ses moyens doivent être renforcés.

M. François Jolivet, rapporteur. Vous savez mon attachement au dispositif des pensions de famille puisque j’ai, modestement, participé à sa création. Aujourd’hui, on dénombre 22 700 places en pension de famille, 150 500 places en résidence familiale et près de 30 000 places en foyer. Les véritables difficultés des pensions de famille sont similaires à celles que rencontrent les centres d’hébergement d’urgence, elles consistent à trouver des maîtres d’ouvrage pour construire et des élus locaux acceptant ces équipements sur leur territoire. En revanche, lorsqu’une demande d’accompagnement de création de pension de famille est formulée auprès de l’État, elle est acceptée sur un budget ouvert. Dès lors, la demande est satisfaite puisque tous les vœux de création de pensions de famille sont exaucés. J’émets par conséquent un avis défavorable.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur nous répète que les services de l’État ne refusent jamais à une association la création d’une place en centre d’hébergement d’urgence ou en pension de famille. Mais le problème n’est pas celui-ci. La difficulté réside dans les appels à projets, dans lesquels le prix à la place, c’est-à-dire le financement proposé par l’État, est insuffisant. C’est la raison pour laquelle les associations ne candidatent pas et que très peu de projets sont mis en place. L’allocation de moyens supplémentaires reste nécessaire afin que les services de l’État puissent faire des appels à projets mieux dotés.

M. François Jolivet, rapporteur. Je m’inscris complètement en faux par rapport à vos propos, monsieur Martinet. Le financement des pensions de famille est mieux assuré par les organismes HLM, dont c’est le métier. Je ne crois pas à la maîtrise d’ouvrages associative pour le financement de ces opérations de construction. Il n’y a donc aucun blocage, je le répète, pour les financements de Centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), de Centre d’hébergement d’urgence (CHU) et de pensions de famille. Il suffit de trouver un bailleur professionnel et surtout un territoire qui accepte la construction de ces équipements.

La commission rejette les amendements II-CF2376 et II-CF2456.

Amendement II-CF2621 de M. Mathieu Lefèvre.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement d’appel a pour objectif l’augmentation du nombre de places en CHRS et surtout d’attirer l’attention du gouvernement sur la répartition de ces places, notamment en Île-de-France. Le déficit des places est extrêmement important, et le versement tardif des allocations empêche la réalisation de projets. En outre, les places en centres d’hébergement d’urgence ne sont pas décomptées en un pour un dans le cadre de la loi solidarité et renouvellement urbain (SRU). Elles sont décomptées en un pour trois, ce qui, dans des zones tendues où le foncier est limité, s’oppose parfois aux décisions des maires souhaitant créer de tels types de places.

M. François Jolivet, rapporteur. Je pense que ce point devrait être intégré au débat plus large sur la répartition géographique des CHRS et leur mode de financement. Dans l’espoir d’une discussion prochaine avec le gouvernement sur ce sujet, je vous invite à retirer votre amendement.

L’amendement II-CF2621 est retiré.

Amendement II-CF2369 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à augmenter les moyens dédiés à la prestation d’alimentation dans les CHU et les CHRS en mobilisant 10 millions d’euros de crédits supplémentaires. L’inflation sur les denrées alimentaires a atteint 14 % depuis le début de l’année après une hausse de 22 % en 2022.

M. François Jolivet, rapporteur. Nous venons d’augmenter le budget d’hébergement de 570 millions d’euros et vous proposez d’ajouter 10 millions d’euros. Je considère que la demande était déjà satisfaite, aussi mon avis sera défavorable.

M. Inaki Echaniz (SOC). Je précise que cet amendement porte sur des crédits dédiés à l’alimentation, qui est essentielle à une bonne prise en charge. Étant donné que le gouvernement risque de recourir à l’article 49-3, il nous faut au moins voter cette rallonge budgétaire consacrée à l’alimentation.

Mme Stella Dupont (RE). Nous tournons en rond sur ces sujets. Une mission de notre propre commission sur le volet hébergement d’urgence serait peut-être utile pour nous rassembler, partager un diagnostic et formuler des recommandations communes.

La commission rejette l’amendement II-CF2369, ainsi que l’amendement II-CF2379 sur lequel le rapporteur a émis un avis défavorable.

Amendement II-CF2421 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les moyens destinés à la création de places d’hébergement pour les personnes à mobilité réduite. Je rappelle que 14 % des personnes accueillies sont porteuses de handicap ou en situation d’invalidité. Dès lors, il convient de les recevoir dans de bonnes conditions. Des personnes pourtant prioritaires n’accèdent pas à un hébergement faute de place adaptée à leur handicap. Par conséquent, il nous semble important d’obtenir des moyens spécifiques afin d’adapter des espaces d’hébergement aux situations de handicap, sans quoi certaines personnes extrêmement vulnérables se retrouvent à la rue.

M. François Jolivet, rapporteur. Durant le plan de relance, 10 millions d’euros ont été débloqués pour l’humanisation des centres d’accueil destinés aux personnes à mobilité réduite. La réponse la plus techniquement adaptée à cette problématique reste la production de CHRS neufs répondant à tous les impératifs d’accueil pour ces personnes. Ce sujet est une priorité, et j’espère qu’il sera mis à l’ordre du jour de la future mission évoquée à l’instant par madame Dupont. Il y sera nécessaire de préciser les responsabilités de chacun et d’aborder la question de la répartition géographique, inexistante à ce stade, des places d’hébergement d’urgence. J’émets un avis défavorable à votre amendement en raison des 10 millions d’euros déjà mis à disposition sur ce sujet.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Je partage votre point de vue sur la nécessité de constituer cette mission, sur l’importance de la construction de places neuves et sur la nécessité de réfléchir à leur répartition géographique, qui est un enjeu de solidarité des territoires. Néanmoins, il convient également de réhabiliter l’hébergement déjà construit afin d’en améliorer l’accès. Ces deux impératifs ne me semblant pas contradictoires, je maintiens mon amendement.

La commission rejette l’amendement II-CF2421.

Amendement II-CF1458 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Cet amendement vise à rectifier une disposition du Ségur de la santé qui prive de la prime Ségur 600 accompagnants et écoutants du 115 au motif, indu à mon sens, que leur accueil téléphonique, et non physique, les assimile à du personnel administratif. Or il est évident qu’une lourde charge mentale pèse sur les accueillants du 115 et les chargés d’orientation, souvent obligés d’écouter longuement les familles, de les orienter vers d’autres systèmes, d’émettre de douloureux refus face à des situations de détresse extrêmement lourdes. Ces métiers sont peu rémunérés et peinent à recruter. C’est la raison pour laquelle nous proposons de corriger cette situation et de les faire bénéficier de la prime Ségur.

Amendement II-CF2322 de Mme Marie-Charlotte Garin.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). Cet amendement propose également l’accès des écoutants du 115 et des chargés d’orientation et de régulation à la prime Ségur. Ces personnels assurent l’accueil et l’orientation de l’ensemble des demandes d’hébergement et de logements formulées par des personnes ou des familles en difficulté. Cet accueil et cet accompagnement certes s’effectuent par téléphone, néanmoins gérer constamment un public en situation de détresse génère des situations de fragilité mentale et professionnelle, et une vulnérabilité accrue. La FAS nous alerte sur le manque de revalorisation et la perte d’attractivité de ces métiers qui sont les premiers maillons de la chaîne de lutte contre le sans-abrisme. Leur donner la possibilité de bénéficier de la prime nous semble dès lors être un minimum.

Amendement II-CF2340 de M. François Piquemal.

M. William Martinet (LFI-NUPES). La prime Ségur, reconnaissant le caractère essentiel de ces professions en première ligne durant la crise sanitaire, a été versée d’abord au personnel du secteur médical et ensuite au personnel du secteur social. Mais une règle bureaucratique, stipulant qu’un contact physique est requis pour bénéficier de cette prime, exclut mécaniquement les écoutants du 115. Cette disposition génère d’aberrantes discriminations puisque, au sein d’un même SIAO, l’agent qui participe aux maraudes bénéficie de la prime, contrairement à l’agent qui accueille au téléphone des personnes en détresse. Les écoutants méritent d’être soutenus. Leur métier est aussi pénible qu’indispensable, parce qu’ils orientent et soutiennent les familles en difficulté.

M. François Jolivet, rapporteur. Notre projet de loi de finances prévoit 24 millions d’euros de financements supplémentaires à destination des SIAO. Or il n’est pas de notre ressort de cibler la répartition des primes entre les collaborateurs d’associations, lesquelles sont fortement autonomes. La convention collective en cours de négociation entre les employeurs et les partenaires sociaux devrait singulièrement transformer les perspectives de carrière des salariés des SIAO. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable à votre amendement.

M. Inaki Echaniz (SOC). Depuis tout à l’heure, nous traitons des moyens nécessaires à la protection de nos concitoyens les plus précaires, les plus à la marge de la société, et du soutien qu’il convient d’apporter à ceux qui les accompagnent. Dès lors, je m’étonne de l’attitude du Rassemblement national, qui se prétend le défenseur des classes populaires, et dont les membres, ici, ne prennent jamais la parole et se contentent de voter systématiquement contre tout amendement qui ambitionne de donner davantage de moyens pour réinsérer les plus précaires d’entre nous.

Mme Perrine Goulet (Dem). Permettez-moi, mes chers collègues, d’attirer votre attention sur un point. Vous pouvez voter ces crédits, ils n’arriveront pas jusqu’aux écoutants du 115, parce que les personnes éligibles à cette prime sont référencées dans un décret. Tant que le décret d’application ne sera pas modifié, les écoutants du 115 n’obtiendront pas la prime, même si vous votez ces crédits. Vous mettez la charrue avant les bœufs. Il conviendrait dans un premier temps d’essayer de modifier ces décrets plutôt que d’ajouter des crédits qui ne seront pas opérants.

M. Philippe Lottiaux (RN). Concernant cet amendement, madame Goulet vient d’expliquer clairement que les crédits votés n’arriveront pas à destination. Nous ne pouvons pas, ici, faire évoluer le régime du personnel associatif. Plus globalement, et pour répondre à monsieur Echaniz, nous partageons bien sûr le constat établi sur les situations dramatiques liées à l’hébergement. Notre groupe a soutenu un certain nombre d’amendements sur les femmes victimes de violences, notamment. Nous proposons également des avancées concernant les étudiants. En revanche, nous considérons qu’en matière d’hébergement d’urgence, certaines dispositions ressemblent à un tonneau des Danaïdes. Tant que le problème de l’immigration incontrôlée ne sera pas résolu, l’hébergement d’urgence sera confronté à des problèmes majeurs. Il convient de régler des causes avant de se pencher sur les conséquences.

La commission rejette les amendements II-CF1458, II-CF2322 et II-CF2340.

Amendement II-CF2430 de Mme Stella Dupont.

Mme Stella Dupont (RE). Ne pas avoir intégré dans les décrets d’application de la prime Ségur les écoutants du 115 me semble être une erreur. Ces personnels sont en première ligne, au contact, certes téléphonique, des plus précaires. Je persiste à dire qu’il est nécessaire de corriger cette situation de façon à ce qu’ils soient, eux aussi, bénéficiaires du dispositif, quand bien même la négociation de convention collective permettra, je l’espère, d’augmenter leur rémunération.

M. François Jolivet, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission adopte l’amendement II-CF2430.

Amendement II-CF2419 de Mme Sabrina Sebaihi.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les crédits de l’hébergement d’urgence sur le public spécifique hébergement maître animal. On le sait, de nombreuses personnes vivant à la rue ont pour compagnon un chien ou un chat. Cet animal est plus qu’un animal de compagnie, c’est un véritable compagnon de route qui apporte une aide émotionnelle et psychologique. Pour ces personnes, se séparer de son animal pour accéder à l’hébergement est une condition impossible à remplir. Afin qu’elles puissent être hébergées dignement et n’aient pas à choisir entre se séparer de leur compagnon et dormir dehors, nous souhaitons l’aménagement de places spécifiques, parce que nous comprenons bien que dans certains centres l’accueil des animaux est impossible.

M. François Jolivet, rapporteur. Votre demande représente 500 000 euros de crédits supplémentaires et je considère que les augmentations de crédits adoptées précédemment contiennent cette somme. Aussi, j’émets un avis défavorable au regard des 570 millions d’euros déjà ajoutés. Je rappelle également que les centres d’hébergement en construction prévoient l’accueil des animaux et que les centres existants sont eux aussi adaptés pour cette prise en charge.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Monsieur le rapporteur m’a convaincue. Nous restons attentifs à l’évolution des places dédiées aux personnes accompagnées d’un animal, néanmoins, eu égard aux crédits supplémentaires déjà adoptés, nous retirons notre amendement.

L’amendement II-CF2419 est retiré.

Amendement II-CF973 de M. Lionel Tivoli.

M. Philippe Lottiaux (RN). Cet amendement propose de dédier des crédits supplémentaires à la relance de la construction de logements étudiants, qui régresse depuis quelques années.

M. François Jolivet, rapporteur. Aussi étonnant que cela puisse paraître, cette question ne concerne pas la mission Cohésion des territoires, mais le programme 231 Vie étudiante. Nous n’avons par conséquent pas à en discuter ici. Je vous invite donc à retirer votre amendement, ou bien j’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF973.

Amendements identiques II-CF2332 de M. William Martinet et II-CF3059 de la commission des affaires économiques.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cet amendement vise à supprimer la réduction du loyer de solidarité (RLS) qui représente une coupe de 1,3 milliard d’euros par an du budget des bailleurs sociaux. La réforme de la RLS de 2017 est le péché originel de la macronie. Elle a gravement fragilisé les bailleurs, et les conséquences s’en font ressentir aujourd’hui en termes de faiblesse de la construction de logements sociaux et de difficultés à engager des projets de rénovation. Cette réforme est intervenue dans un contexte économique très différent pour les bailleurs sociaux. Depuis, le taux du livret A a été multiplié par trois, ce qui représente un coût de trois RLS supplémentaires pour les bailleurs. Il convient de revenir sur la RLS afin de donner aux bailleurs sociaux des marges de manœuvre budgétaires nécessaires aux défis sociaux et environnementaux qu’ils affrontent.

M. François Jolivet, rapporteur. Je pourrais faire mienne la deuxième partie de votre intervention, monsieur Martinet. La réforme de la RLS, que j’avais essayé de modifier, est intervenue dans un contexte où les taux étaient très faibles. En revanche, je vous invite à considérer les chiffres de l’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS), de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) ou de la Caisse des dépôts et consignations, qui montrent que les conditions financières des OHLM se sont améliorées. Depuis 2022, la situation économique a changé, les taux sont plus élevés, et le premier handicap de l’organisme HLM est le paiement de la taxe foncière, qui représente sa quatrième dépense. Les opérateurs HLM gèrent des logements à plafond de ressources et à loyers réglementés. Aujourd’hui, des opérateurs font la même chose avec du logement locatif intermédiaire et sont soumis à l’impôt sur les sociétés. En 2017, j’avais défendu l’idée de soumettre les organismes HLM à l’impôt sur les sociétés plutôt que mettre en place la RLS. J’émets un avis défavorable sur votre amendement, mais je continue à penser qu’un autre chemin est possible, en supprimant de la RLS et en soumettant les OHLM à l’impôt sur les sociétés.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Vous soulignez, monsieur le rapporteur, la bonne santé des OHLM. Mais elle n’est due qu’à leur prudence. La RLS et autres mesures agressives contre les bailleurs sociaux ont eu pour conséquence de sacrifier l’investissement, c’est-à-dire la construction et la rénovation. La Banque des Territoires nous le dit à travers ses projections. Elle montre que les bailleurs sociaux pourront, dans les années à venir, construire 80 000 logements par an et en rénover 60 000. Or pour ne s’en tenir qu’aux objectifs de construction, le gouvernement en prévoyait 120 000.

La commission adopte les amendement identiques II-CF2332 et II-CF3059 sur lesquels le rapporteur a émis un avis défavorable.

Amendements identiques II-CF2330 de M. William Martinet et II-CF3057 de la commission des affaires économiques, amendements II-CF1156 de M. Stéphane Peu et II-CF2383 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cet amendement a pour objectif de doubler le forfait charges de l’APL. Depuis plusieurs années, le forfait charges de l’APL est resté particulièrement stable, alors que les prix de l’énergie, eux, ont explosé. En outre, le bouclier tarifaire est moins efficace qu’auparavant. Ces deux faits génèrent des situations de détresse. Certains locataires subissent des régularisations de charges s’élevant parfois jusqu’à 1 000 euros, et des augmentations de provisions pour charges jusqu’à 200 euros par mois, autant de dépenses que l’APL ne permet pas de compenser.

M. François Jolivet, rapporteur. Je comprends votre demande, toutefois vous omettez d’évoquer les chèques énergie qui compensent au moins en partie les aides de logement. Nous estimons à plus de 2 milliards d’euros l’augmentation que vous proposez.. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Chers collègues de La France Insoumise, vous accumulez des amendements qui représentent chacun plusieurs milliards d’euros de dépenses supplémentaires pour un budget déjà en hausse de 7,8 %. Comme hier lors de l’examen des crédits de la mission Enseignement scolaire, le total des dépenses que vous proposez va se chiffrer à 60, 70, 80 ou 90 milliards d’euros supplémentaires. Cela n’est pas notre conception de la politique.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Vous employez, monsieur le rapporteur général, la même rhétorique que celle de M. Guillaume Kasbarian, qui en commission des affaires économiques évaluait, calculatrice en main, le montant total de nos amendements. Ce que les calculatrices ne mesurent pas, monsieur Cazeneuve, c’est que beaucoup de gens ne se chauffent plus à cause de l’inflation. Et quand on ne se chauffe plus, on tombe malade. Et quand on tombe malade, on va à l’hôpital. Et quand on est à l’hôpital, cela engendre des dépenses de sécurité sociale. L’investissement à long terme prévient de beaucoup de dépenses futures.

Mme Marina Ferrari (Dem). Je pense que les crédits seront finalement refusés malgré les modifications du budget. Nous venons d’adopter un amendement représentant 1,3 milliard d’euros retranchés de l’hébergement d’urgence, sur lequel nous venons par ailleurs d’ajouter 1 milliard d’euros. Il me semble qu’il est nécessaire de se montrer davantage cohérent.

M. le président Éric Coquerel. Ce que vous dites n’est pas vrai, madame Ferrari. Le budget de l’Outre-mer, par exemple, a été profondément modifié et a été voté, y compris par l’opposition. De même, l’an dernier, le budget de rénovation thermique avait été modifié profondément par l’opposition et voté par elle, alors que la majorité s’était prononcée contre. Quand l’opposition estime qu’un budget est modifié de manière satisfaisante, elle le vote. 

La commission adopte les amendements identiques II-CF2330 et II-CF3057, sur lesquels le rapporteur a émis un avis défavorable. En conséquence, les amendements IICF1156 et II-CF2383 tombent.

Amendement II-CF2380 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement suggéré par l’Union sociale pour l’habitat (USH) appelle à revenir sur certaines économies réalisées sur l’APL par le gouvernement. Il propose de majorer de 250 millions d’euros les crédits des aides au logement pour supprimer le mois de carence pour l’ouverture de ce droit. La mesure de contemporanéisation des ressources représente à la fois une modernisation et une économie importante. Il serait parfaitement justifié dans le cadre d’une simplification et d’une modernisation du dispositif, et par souci d’équité, de supprimer une mesure qui est source d’incompréhension et de colère de la part des ménages modestes s’installant dans un nouveau logement. Certes, cette mesure représente un coût supplémentaire, mais il est largement inférieur à l’économie permise par la mesure de contemporanéisation.

M. François Jolivet, rapporteur. Depuis toujours, les aides au logement sont calculées sur la base de mois complets. Pour éviter des charges de gestion et des contentieux, il me semble nécessaire de maintenir ces dispositions. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement II-CF2380, en conséquence l’amendement IICF1099 tombe.

Amendement II-CF2298 de Mme Sandra Regol.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Cet amendement me semble particulièrement important. Il ambitionne de financer la possibilité de ne pas expulser des campements en milieu d’année scolaire. Aujourd’hui, environ 100 000 enfants en France ne sont pas scolarisés, ce qui est considérable. Ce sont 100 000 enfants privés du droit fondamental à l’éducation. En Seine-Saint-Denis notamment, en Occitanie, à Mayotte, en Guyane, les expulsions des habitations de fortune, des bidonvilles, mais aussi potentiellement des hôtels sociaux, des aires d’accueil, des foyers pour mineurs en plein milieu d’année scolaire sont l’une des premières causes de cette exclusion scolaire. Ces expulsions sont violentes et dispersent les habitants. Une trêve est nécessaire pour assurer une continuité éducative.

M. François Jolivet, rapporteur. Si je comprends le sens de cet amendement, je n’en comprends pas le montant proposé de 210 millions d’euros. J’ai cru comprendre que des efforts avaient été produits par rapport aux expulsions des bidonvilles, y compris à Mayotte où des personnes expulsées ont retrouvé un logement. Avis défavorable.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Aujourd’hui, quand des bidonvilles ou des campements de fortune sont démantelés, il n’y a pas de solution d’hébergement proposée au-delà de deux ou trois nuits. Ensuite, les personnes expulsées se retrouvent à la rue. Et naturellement d’autres squats et d’autres bidonvilles naissent ailleurs. À chaque fois les personnes sont contraintes de se déplacer, de trouver une nouvelle commune, de convaincre la mairie que les enfants doivent être scolarisés, même s’ils vivent dehors dans des conditions difficiles. Telle est la réalité du terrain.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Un maire ne peut pas refuser la scolarisation d’un enfant, et vous le savez bien. L’école est obligatoire. Accueillir les enfants est absolument obligatoire. Dire que les mairies ne le font pas est faux. Je défends ici les élus locaux, qui respectent leurs obligations.

La commission adopte l’amendement II-CF2298.

Amendements identiques II-CF3068 de la commission des affaires économiques et II-CF2384 de M. Inaki Echaniz et  II-CF1159 de M. Stéphane Peu (discussion commune)

M. Inaki Echaniz (SOC). La loi de finances pour 2018 avait supprimé l’APL accession pour le logement neuf et l’avait maintenue temporairement jusqu’au 31 décembre 2019 pour les logements anciens situés en zone détendue. Avec une enveloppe de près de 600 millions d’euros, l’APL accession avait permis à près de 300 000 ménages modestes d’acquitter une partie de leur mensualité afin d’acquérir leur logement. Outre-mer, elle a été rétablie partiellement par la loi de finances pour 2019, mais ce n’est pas suffisant pour l’ensemble du pays. Les projets d’accession remis en cause par l’absence de cette aide sont très nombreux. Cette aide permet à ces ménages répondant à des critères réglementaires de réaliser leur parcours résidentiel, que ce soit par l’achat ou la construction de leur logement, y compris dans le cadre d’un bail réel solidaire ou par la conclusion d’un contrat de location-accession agréé. Le versement de l’APL accession est une condition de réussite de leur projet d’accession dont le financement est ainsi obtenu et sécurisé grâce à cet apport complémentaire. Compte tenu des difficultés d’accès au financement bancaire des ménages accédants, ce versement est d’autant plus nécessaire pour permettre de les solvabiliser.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Jamais notre pays n’a aussi peu produit de logements. C’est une véritable bombe sociale. Mais cette réalité représente également une crise économique pour les secteurs du bâtiment et de la promotion immobilière. Revenir sur la suppression de l’APL accession dans un contexte de taux élevés, c’est permettre à des ménages modestes de réaliser leur projet d’accession. Cette mesure peu coûteuse pour les finances publiques serait efficace sur le plan économique et social.

M. François Jolivet, rapporteur. Je suis partagé sur la question de l’APL accession. Mais en cette période de hausse des taux, je rappelle que le prêt à taux zéro a été singulièrement modifié, notamment par la hausse des plafonds qui n’avaient pas été réévalués depuis 2016. Avis défavorable.

La commission adopte les amendement identiques II-CF3068 et II-CF2384, en conséquence  l’amendement  et II-CF1159 tombe.

La commission rejette II-CF2329, sur lequel le rapporteur a émis un avis défavorable.

Amendements identiques II-CF3056 de la commission des affaires économiques et II-CF2328 de M. William Martinet

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cet amendement vise à financer à hauteur de 300 millions d’euros le Fonds national des aides à la pierre (Fnap), qui n’est plus alimenté par l’État depuis plusieurs années. Le Fnap est devenu uniquement un outil de mutualisation des moyens entre bailleurs. La dernière trouvaille du gouvernement pour alimenter ce Fnap a consisté à ponctionner Action Logement pour le financer, ce qui a déclenché une véritable guerre entre les différentes familles du logement social. Nous proposons plutôt que l’État assume ses responsabilités et soutienne l’aide à la pierre.

M. le président Éric Coquerel. Il y a une petite erreur de numéro d’amendement. Vous n’avez pas défendu le bon amendement, monsieur Martinet.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Nous avons adopté en commission des affaires économiques le rétablissement des 5 euros d’APL. Cela a dû faire plaisir au Président de la République qui avait déclaré que toucher aux APL était, je cite « une connerie sans nom ». Calculatrice toujours en main, M. Kasbarian lui-même semblait soulagé. Par conséquent, j’espère que nous voterons ici cet amendement.

M. François Jolivet, rapporteur. J’ai bien compris que vous faisiez de la politique, chers collègues. J’espère que vous retrouverez toutes les personnes qui étaient en 2017 locataires de HLM et de propriétaires bailleurs privés, afin de leur restituer ces 5 euros. En attendant, j’émets un avis défavorable.

La commission adopte les amendement identiques II-CF3056 et II-CF2328.

Amendements II-CF1144 de M. Stéphane Peu et II CF2381 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Les 5 euros ont vécu, mais il reste toujours le seuil des 15 euros en deçà duquel on ne verse pas l’APL parce que les coûts de gestion sont considérés trop élevés. Nous proposons donc de supprimer ce seuil, ce que la contemporanisation des APL rend possible. Les coûts de gestion n’ont pas été considérés comme trop élevés lorsqu’il s’est agi de changer de système parce que cela était vu comme une modernisation. Supprimer le seuil de versement des APL serait une manière d’aller au bout de cette modernisation, d’autant que ces sommes de 5, 10 ou 14 euros comptent pour les ménages concernés.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement II-CF1144, en conséquence l’amendement IICF2381 tombe.

Amendements II-CF3069 de la commission des affaires économiques, IICF1150 de M. Stéphane Peu, II-CF3067 de la commission des affaires économiques et II-CF2382 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

Amendement II-CF2382 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement, qui a été adopté en commission des affaires économiques, est proposé par l’USH. Il vise à éviter que la mise en œuvre de la RLS entraîne une perte de transmission des données entre la CAF ou la caisse de mutualité sociale agricole (CMSA) et le bailleur social pour les ménages dont l’APL est peu élevée. Il s’agit d’un amendement modeste à 100 000 euros.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement II-CF3069, en conséquence les amendements IICF1150, II-CF2382 et II-CF3067 tombent.

Amendement II-CF1083 de Mme Cyrielle Chatelain.

M. François Jolivet, rapporteur. Je souhaite commenter d’un mot cet amendement défendu et qui concerne le FNAP. Je rappelle simplement que les fonds des aides à la pierre aujourd’hui ne sont pas consommés. Dès lors, je ne vois pas l’intérêt de les augmenter. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF1083.

Amendements identiques II-CF2062 de Mme Julie Laernoes et II-CF3066 de la commission des affaires économiques.

Mme Julie Laernoes (Écolo-NUPES). Cet amendement adopté en commission des affaires économiques demande 1,5 milliard d’euros supplémentaires pour le fonds de rénovation du parc social. Au congrès de l’USH, au début du mois, M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement, a annoncé la création d’un fonds dédié à la rénovation nécessaire, mais dont le montant est notoirement insuffisant. D’après les estimations de l’USH, environ 9 milliards d’euros par an devraient être dégagés pour soutenir la rénovation sur un rythme de 150 000 logements par an en moyenne. Je voudrais souligner ici l’effectivité des aides publiques directes, puisque le parc social a estimé les besoins nécessaires, il connaît son patrimoine et il sait quels travaux effectuer. Il détient la capacité technique de procéder à ces rénovations, mais se heurte au mur de l’investissement. La rénovation permettrait de réduire de manière significative et structurelle la précarité énergétique, de baisser structurellement notre consommation d’énergie et nos émissions de CO2, et aussi de structurer la filière du Bâtiment et travaux publics (BTP). Procéder à des rénovations de manière performante et globale, en particulier des rénovations de collectifs, représente un véritable défi.

M. François Jolivet, rapporteur. Je rappelle que l’USH salue l’effort produit à hauteur de 1,2 milliard d’euros destinés à permettre aux organismes HLM d’atteindre les objectifs de production et de réhabilitation qui leur sont fixés. Une augmentation de ce budget de 1,5 milliard d’euros ne serait pas consommée cette année, puisque constituer un dossier de réhabilitation représente un an et demi d’études. Et les organismes HLM n’en possèdent pas assez en réserve. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. La rénovation des logements sociaux est une catastrophe. En Seine-Saint-Denis et sans doute ailleurs en France, des gens vivent dans des logements sociaux dignes de Dickens et Zola réunis. Cela se vérifie davantage encore dans les immeubles en instance de destruction. La rénovation des logements sociaux est un problème aussi grave que celui de la construction de logements sociaux. On ne saurait se satisfaire de la situation et des crédits déjà en cours. Je rappelle que l’aide publique de l’État en termes de logement a baissé de 10,8 % en cinq ans. C’est la réalité.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Je souligne que le 1,2 milliard d’euros dont parle monsieur le rapporteur n’est pas financé sur des crédits supplémentaires pour l’instant. Le ministère du logement devra donc peut-être puiser dans ses crédits,. Il convient de rester vigilant quant à la possibilité d’obtenir des crédits supplémentaires qui ne seront pas ponctionnés sur d’autres politiques publiques permettant la rénovation thermique.

Mme Julie Laernoes (Écolo-NUPES). 1,5 milliard d’euros par an sont nécessaires pour la prévisibilité des bailleurs sociaux. Ces montants leur permettraient de ne pas se contenter de progresser d’un petit pas sur le diagnostic de performance énergétique (DPE), mais de réaliser un bond qu’à ce jour, ils n’ont pas les moyens de faire. Ce serait une manière plus efficace d’utiliser les deniers publics.

M. le président Éric Coquerel. Je voterais pour un amendement d’appel. Mais si votre amendement est adopté, madame Laernoes, alors plus aucun crédit ne sera disponible sur le programme 177 de la mission Cohésion des territoires, ce qui empêchera d’examiner certains amendements. .

La séance est suspendue.

M. le président Éric Coquerel. Quel est votre choix ?

Mme Julie Laernoes (Écolo-NUPES). Je retire l’amendement pour ne pas bloquer le débat, et en faire un amendement d’appel. Dans notre rapport, nous avons indiqué que 1,5 milliard d’euros étaient nécessaires tous les ans pour les bailleurs sociaux. Nous espérons que cette mention figurera dans le PLF 2025.

M. le président Éric Coquerel. Il reste environ un milliard d’euros sur le programme 177.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Le retrait de cet amendement témoigne de l’incurie de votre position. Vous avez déposé des amendements qui excèdent les crédits disponibles et vous retirez cet amendement afin de permettre la poursuite du débat. Ce n’est pas sérieux. Il serait bon, pour le moins, en amont que vous vous informiez des crédits disponibles et sur le fonctionnement de la commission. Vous ne pouvez pas croire à vos amendements uniquement jusqu’au CF2341.

Les amendements identiques sont retirés.

Amendements identiques II-CF2341 de M. William Martinet et II-CF2353 de Mme Marie-Charlotte Garin, amendement II-CF2448 de Mme Eva Sas (discussion commune).

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement de bon sens, qui plaira au rapporteur, qui indiquait que nous avions besoin de plus de logements de transition et notamment de logements sociaux. Telle est la proposition de la Fondation Abbé Pierre, avec cet amendement qui porte sur la construction de 150 000 logements sociaux tous les ans, de 2024 à 2028, en France métropolitaine, et sur la construction de 15 000 logements sociaux dans les territoires d’outre-mer. Le nombre de sans-abri est deux fois plus élevé qu’il y a dix ans. Les personnes mal logées sont de plus en plus nombreuses. Nous atteignons le nombre record de 2,4 millions de demandeurs de logements HLM. Nous devons répondre à cette demande et cet amendement constitue une partie de la solution.

La commission rejette les amendement identiques II-CF2353 et II-CF2341.

Amendement II-CF2448 de Mme Éva Sas.

Mme Éva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement est soutenu par la Fondation Abbé Pierre et vise également à augmenter la production de logements locatifs sociaux, c’est-à-dire ceux qui manquent le plus. Nous sommes cohérents sur toute la chaîne du logement : nous défendons l’hébergement d’urgence, les pensions de famille et les logements très sociaux. Il convient de produire 150 000 logements par an relevant du prêt locatif à usage social (PLUS) et du prêt locatif aidé d’intégration (PLAI). Pour cela, l’État doit abonder le fonds national des aides à la pierre à hauteur d’un milliard d’euros par an. Cette somme est énorme mais la situation du logement est catastrophique. Toutes les semaines, au sein de ma permanence, je reçois des citoyens dans des situations désespérées, hébergés par des tiers, qui partagent des appartements exigus à quatre ou cinq, ou qui sont dans des logements insalubres. Le gouvernement ne prend pas du tout la mesure de la gravité de la situation. Pour répondre à M. Lefèvre, nous appelons évidemment à la levée du gage car nous estimons que le besoin est d’un milliard supplémentaire.

M. François Jolivet, rapporteur. Ma chère collègue, si vous avez connaissance de logements insalubres qui sont occupés, je vous invite à saisir le procureur de la République au titre de l’article 40 du code de procédure pénale. Par ailleurs, vous proposez d’ajouter un milliard d’euros au Fonds national des aides à la pierre, sachant que 540 millions ne sont pas consommés. Je ne comprends pas cette logique. Enfin, l’une des raisons pour lesquelles la production de logements s’est effondrée, en dehors de l’augmentation des taux, est la nouvelle théorie apparue, dans certaines métropoles, du permis de construire accepté que les autorités locales demandent de retirer. Cette pratique est scandaleuse et, sans généraliser, tout le monde devrait étudier les pratiques en cours sur son territoire. Il n’est pas possible de tenir certains propos dans certaines instances et agir à l’opposé par ailleurs.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Au nom du groupe Les Républicains, je ne prendrai plus part au vote. La situation est délirante : que nous soyons présents ou pas, vous menez la commission tous seuls, en lisant tous vos amendements, sans aucun respect des autres missions qui seront entendues jusqu’à minuit ce soir. Comme l’a indiqué M. Lefèvre, vous n’avez ni vision ni organisation. Je ne prendrai plus part à cette mascarade.

M. le président Éric Coquerel. Je vous propose de passer au vote.

Mme Éva Sas (Écolo-NUPES). Comme l’amendement II-CF2448 porte sur un montant d’un milliard, je le retire pour permettre la poursuite des débats.

M. le président Éric Coquerel. Il ne porte pas sur le même programme. Vous le maintenez. Nous passons au vote et je vous invite à éviter les interpellations, qui nous font perdre encore plus de temps.

La commission rejette les amendements II-CF2341 et II-CF2448.

M. le président Éric Coquerel. Je suis absolument en désaccord avec la position selon laquelle la commission serait dévoyée parce que des amendements sont déposés. Tel est le fonctionnement habituel : les groupes déposent des amendements et ne sont pas obligés de se coordonner entre eux en la matière. De plus, je fais remarquer que si les rangs de la majorité étaient plus fournis ce matin, de nombreux amendements ne seraient pas adoptés. Vous pouvez estimer que ces amendements ne sont pas réalistes mais le fonctionnement de la commission n’est pas dévoyé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur le président, les faits vous dérangent mais les faits sont là. De fait, pour la première fois, des milliers d’amendements sont déposés et des dizaines de milliards d’euros sont déplacés en quelques minutes d’un programme à l’autre. Cette logique relève de l’embolie. De plus, les membres de la majorité sont présents en proportion. Toutefois, comme nous sommes une majorité relative, les oppositions remportent les votes.

M. le président Éric Coquerel. Le règlement permet à chaque groupe de remplacer des membres d’une commission par des membres d’autres commissions. Ne remettons pas ce règlement en question. Je vous rappelle que dès l’an dernier, des milliards d’euros ont été votés dans le cadre de différentes missions. En revanche, c’était moins le cas en commission car la majorité était plus mobilisée qu’elle ne l’est aujourd’hui, en raison de la future application de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution .

M. Marc Le Fur (LR). Chacun doit assumer ses responsabilités, y compris la majorité. Cette embolie de nos commissions résulte en raison de la future application de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution. Puisque nous anticipons une absence de débat au sein de l’hémicycle, nous tenons ce débat ici, et chacun défend ses idées. Il s’agit d’une dérive qui résulte du choix systématique effectué par ce gouvernement et par cette majorité de recourir à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution.

Amendements identiques II-CF3062 de de la commission des affaires économiques et II-CF2372 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Je partage entièrement les propos de M. Le Fur. Si nous étions sûrs de pouvoir débattre en séance, nous n’aurions pas eu ces débats ce matin. Les seuls responsables sont la majorité et le gouvernement. Si la majorité estime qu’il s’agit d’une mascarade, il lui revient de convaincre le gouvernement de ne pas recourir à l’article 49 alinéa 3.

L’amendement vise à favoriser la production de 60 000 logements sociaux, financés en PLAI, en augmentant de 20 % le montant moyen de subvention apporté par l’État, pour aider à l’équilibrage des opérations et au maintien des loyers accessibles au plus grand nombre des demandeurs les plus modestes.

M. François Jolivet, rapporteur. Je comprends votre demande de doter le FNAP de ressources supplémentaires. Toutefois, les crédits actuels ne sont pas consommés. Pourquoi faudrait-il stocker une ressource publique, en la prélevant des politiques publiques ? L’avis est défavorable.

M. Philippe Lottiaux (RN). En effet, il convient de renforcer la construction de logements sociaux et, en effet, la baisse du nombre de logements sociaux construits est assez catastrophique. Toutefois, la situation est due à une crise d’ensemble de la construction : une majorité des logements sociaux est construite dans le cadre d’opérations mixtes, privées et publiques. En l’absence du privé, le public ne peut plus intervenir. Au-delà, le problème n’est pas celui de l’argent mais celui de la constructibilité, du foncier, du permis de construire et de la réalisation des logements. Tout en étant conscients que nous avons besoin de plus de logements sociaux, nous ne voterons pas ces amendements.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Il n’est pas de bonne politique que de déposer des amendements qui coûtent plus que les crédits qui prévalent dans ces missions. Au gré de ces dernières, vous retirer donc vos amendements pour les débattre ou pas. Le fait de débattre de 15 milliards d’euros pour une politique de 13 milliards ne fait beaucoup de sens et ne fait pas progresser la démocratie parlementaire. Nous gagnerions toutes et tous à mener un débat beaucoup plus responsable et apaisé.

M. le président Éric Coquerel. Je pense que tous les arguments ont été entendus. Si nous votons cet amendement, le programme 147 Politique de la ville n’aura plus de crédit. De plus, quelles que soient les raisons pour lesquelles les amendements sont nombreux, nous n’en avons examiné que 70. Nous devons avoir traité les autres textes en une heure.

La commission adopte l’amendement II-CF3062.

Amendement II-CF2320 de Mme Éva Sas.

L’amendement II-CF2320 a été défendu.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Je propose que cet amendement soit retiré.

L’amendement II-CF2320 est retiré.

Amendements identiques II-CF2337 de M. William Martinet et II-CF3061 de la commission des affaires économiques.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Certains propos tenus par le rapporteur et d’autres membres de la majorité me paraissent absolument hors-sol. Vous nous expliquez que l’argent public disponible pour le logement social est trop important et que nous ne réussissons pas à tout dépenser. Ce constat est totalement déconnecté de la réalité. Le niveau de subventions publiques des projets de construction de logements sociaux n’est pas suffisant, notamment en raison de la rareté du foncier, des exigences des maires qui renchérissent le coût de la construction. Au final, tout l’argent du FNAP n’est donc pas utilisé. Pour autant, nous avons besoin d’affecter plus d’argent et d’augmenter le taux de subvention. Ainsi, les projets pourront voir le jour, les logements pourront être construits et les maires seront d’accord.

M. le président Éric Coquerel. Maintenez-vous votre amendement ?

M. William Martinet (LFI-NUPES). Je retire l’amendement.

L’amendement II-CF2337 est retiré ainsi que l’amendement II-CF3061identique

L’amendement II-CF2406 est retiré.

Amendements identiques II-CF3065 de la commission des affaires économiques et II-CF2375 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Il s’agit de financer 5 000 logements étudiants supplémentaires en PLAI. Nous connaissons la précarité qui touche les étudiants et la difficulté, pour ces derniers, d’accéder à un logement. De plus, le logement représente le premier poste de dépense des étudiants : en moyenne 60 % de leur budget en 2022. Au sein de la jeunesse étudiante est structurelle : près de 20 % des étudiants vivent sous le seuil de pauvreté, 46 % travaillent durant l’année scolaire et plus de la moitié des étudiants travailleurs estiment que leur emploi est indispensable pour vivre. Nous demandons la création de 5 000 logements étudiants pour pallier le non-respect de l’engagement du Président de la République de créer des logements Crous.

M. François Jolivet, rapporteur. Je vous invite à retirer cet amendement à 121 millions d’euros car il est plutôt du ressort du budget du programme 231 Vie étudiante. L’avis est défavorable.

M. Inaki Echaniz (SOC). Puisque les étudiants qui seront exclus du Crous recevront 100 euros et deux places aux Jeux olympiques, je retire l’amendement.

M. le président Éric Coquerel. Pour information, il reste 969 millions d’euros pour le programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables, 16 milliards pour le programme 109Aide à l’accès au logement, 939 millions d’euros pour le programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat, 287 millions d’euros pour le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire,   0 euro pour le programme 147  Politique de la ville, 80 millions d’euros pour le programme 1162 des Interventions territoriales de l’État.

Les amendements II-CF3065 et II-CF2375 sont retirés.

Amendements identiques II-CF3058 de la commission des affaires économiques  et II-CF2331 de M. François Piquemal.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Nous avions présenté cet amendement également en commission des affaires économiques et il prend tout son sens au regard de la façon dont seront traités les étudiants dans le cadre des Jeux olympiques. Aujourd’hui, 60 % du budget des étudiants est consacré aux dépenses liées au logement. Nous proposons donc la création de 15 000 logements étudiants, tous les ans, entre 2024 et 2028.

M. François Jolivet, rapporteur. Cet amendement est plutôt du ressort du programme 231 qui porte les crédits du logement étudiant. J’émets un avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF3058 et II-CF2331.

Amendements identiques II-CF3050 de la commission des affaires économiques et II-CF930 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à financer une prime bas carbone de 20 000 euros par foyer pour les familles les plus modestes en parcours d’accession sociale à la propriété. Aujourd’hui, l’écart de prix entre une construction traditionnelle et une construction respectant la réglementation environnementale RE2020 est de l’ordre de 15 %. Cet amendement répond à la nécessité d’encourager l’utilisation de matériaux de l’écoconstruction et le bilan bas carbone des constructions neuves pour les ménages modestes en accession sociale à la propriété. Cette prime pourrait ainsi bénéficier à 5 000 logements neufs en accession sociale par an, pendant cinq ans. En outre, cette aide, plus pertinente qu’une baisse de TVA, dont l’effectivité sur la baisse des prix peut être aléatoire, pourrait encourager la structuration d’une filière de matériaux d’écoconstruction, et, à terme, faire baisser leur coût. Cet amendement a été travaillé avec le Comité ouvrier du logement (COL), qui est très impliqué dans la vie des territoires et la ruralité.

M. François Jolivet, rapporteur. Je suis prêt à rencontrer ce comité. Je vous rappelle que la RE2020 s’applique pour toute la production neuve, et qu’il s’agit d’une conquête environnementale portée par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Par ailleurs, pour faciliter l’acquisition des ménages modestes, le prêt à taux zéro (PTZ) est singulièrement renforcé, avec la juste et forte hausse des plafonds d’éligibilité. J’exprime donc un avis défavorable ou une demande de retrait.

La commission rejette les amendements II-CF3050 et II-CF930

Amendement II-CF2336 de M. William Martinet.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Cet amendement avait pour objet de présenter un grand plan de lutte contre les punaises de lit. Malheureusement, comme il prendrait des crédits sur la politique de la ville, nous le retirons.

L’amendement II-CF2336 est retiré.

Amendement II-CF2324 de M. William Martinet.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Lorsque les amendements déposés dépassent la somme disponible, ne tombent-ils pas de fait ? De mon point de vue, ils ne peuvent pas être défendus.

M. le président Éric Coquerel. C’est une bonne remarque. Cet amendement ne sera donc pas défendu.

L’amendement II-CF2324 est tombé.

Amendement II-CF2327 de M. François Piquemal.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Il s’agit d’une proposition de plan pour lutter contre l’habitat indique, avec un objectif de mise aux normes de 60 000 logements insalubres par an, entre 2024 et 2028.

M. François Jolivet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement à 1,5 milliard d’euros. Vous souhaitez que la puissance publique rénove 60 000 logements insalubres. Les propriétaires, qui sont peut-être des marchands de sommeil, seront heureux que leurs logements soient remis aux normes. Vous ne faites pas de différence entre le propriétaire bailleur et le propriétaire occupant. Vous enrichissez ceux qui, peut-être, gagnent de l’argent en n’assumant pas leur rôle de bailleur. Je ne comprends ni le fond ni le sens de cet amendement et je ne vois pas quels sont les publics ciblés. Mon avis est défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF2327.

Les amendements II-CF2325 et II-CF2378 en discussion commune ont été défendus.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF2325 et II-CF2378.

Amendements identiques II-CF3055 de la commission des affaires économiques et II-CF2323 de Mme Clémence Guetté.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF3055 et II-CF2323.

Amendement II-CF3215 de M. François Jolivet.

M. François Jolivet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement d’appel. Nous disposons d’établissements publics fonciers installés en France, qui ont des missions d’aménagement d’État, et d’autres établissements publics d’État qui sont aménageurs et qui font des réserves foncières. L’État cible des financements publics sur ces établissements publics, dans des territoires où les contribuables de l’Indre et du Gers ne sont pas concernés. De plus, comme des opérations d’aménagement et de ZAC qui ont été stoppées avec l’arrivée d’autres majorités lors des dernières élections municipales, des terrains sont disponibles et pourtant, il n’est plus possible de mener des projets. Je considère que c’est scandaleux et il serait logique que les élus aient la gouvernance de ces établissements publics, avec les ressources actuelles, à charge pour eux d’assumer les conséquences à l’avenir. L’avis est favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF3215.

Amendement II-CF243 de M. Pierre Meurin.

Mme Mathilde Paris (RN). Il s’agit d’affecter davantage de moyens sur le programme France Ruralités. En effet, il a été proposé de mettre des chefs de projets à disposition des collectivités rurales. Malheureusement, il ne s’agit que d’un chef de projets par département, ce qui est trop peu pour nos petites communes, notamment en matière de soutien à l’ingénierie. Un effort doit être fourni pour les communes rurales, qui subissent une rupture d’égalité par rapport aux communes qui disposent de services leur permettant de mener à bien des projets.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. J’entends votre volonté d’augmenter de 20 ETP le nombre de chefs de projets France Ruralités. Ce programme se met en place et 100 chefs de projets ont déjà été nommés. Nous prendrons le temps de constater le fonctionnement du dispositif, notamment son articulation avec les chefs de projets Petites villes de demain (PVD). J’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF243.

Amendement II-CF2295 de Mme Lisa Belluco.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). L’objet de cet amendement est de renforcer les moyens fournis aux communes, et notamment aux communes rurales, pour entretenir et préserver les chemins et sentiers. Il a été travaillé avec l’association Randonneurs Cavaliers Nature. En effet, en 40 ans, près de 200 000 km de chemins auraient disparu. Ils constituent un patrimoine commun, héritier d’une histoire locale. Ils garantissent aux Français une facilité d’accès à la nature, aux randonneurs, cyclistes, cavaliers... Ils sont aussi des espaces de transit et de frontières, entre des réservoirs de biodiversité et des espaces de vie. Malheureusement, faute de moyens d’entretien, ces chemins disparaissent trop souvent.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Le problème de cet amendement pertinent est qu’il n’intègre pas les programmes de la mission du jour et qu’il doit plutôt être présenté sur la mission Relation avec les collectivités territoriales en abondant certaines dotations comme la DSR ou la DSU, dans le cadre du prélèvement sur recettes. Je vous invite donc à retirer cet amendement.

L’amendement II-CF2295 est retiré.

Amendement II-CF2280 de M. William Martinet.

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NUPES). Cet amendement propose d’augmenter la dotation au réseau France Services pour abaisser le reste à charge des collectivités. Ce réseau permet le rassemblement, dans un lieu unique, des services de l’État et de ses opérateurs. La participation financière de l’État, via l’ANCT, au financement des maisons France Services atteint aujourd’hui 35 000 euros par an pour chaque maison, pour un coût de fonctionnement par structure d’environ 110 000 euros. Le reste à charge est trop important pour de nombreuses collectivités.

Récemment, j’ai reçu un courrier du président de la communauté de communes du Val d’Arros, qui m’alerte sur la pérennité budgétaire de l’espace France Services local. Par cet amendement, nous demandons au minimum à l’État d’améliorer la prise en charge du financement de ces maisons France Services.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Cet amendement vise à accélérer la prise en charge un peu plus forte, par l’État, des maisons France Services. Il se situe normalement dans la trajectoire mais j’y suis très favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF2280.

Amendement II-CF2232 de M. David Amiel.

M. David Amiel (RE). Les tiers lieux connaissent un véritable envol depuis quelques années. Cet amendement porte sur les tiers lieux de production, aussi appelés manufactures de proximité, qui génèrent de l’activité sur tout le territoire, en relocalisant des activités artisanales ou entrepreneuriales, qui sont favorables à la transition écologique, avec des modèles qui reposent beaucoup sur l’économie circulaire et de proximité. Le chiffre d’affaires de ces tiers lieux a plus que triplé depuis 2021. Il existe un réel besoin d’assurer la continuité de la politique de soutien public et nous souhaitons donc que le financement permettant l’essor des tiers lieux de production soit reconduit pour l’année 2024, et que de nouveaux projets puissent être soutenus. Tel est le sens de cet amendement à 10 millions d’euros.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Ces tiers lieux, de production notamment, ont été boostés dans le cadre du plan de relance. Il semble que 33 millions d’euros soient encore disponibles dans ce cadre. De plus, 11 millions sont prévus en 2024 sur le programme 112 au titre des fabriques de territoire dans leur ensemble et je constate que la question de moyens supplémentaires pourrait être posée pour l’année 2025. Je comprends la demande et je m’en remets à l’avis de sagesse des commissaires.

La commission adopte l’amendement II-CF2232.

Amendement II-CF3214 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Dans le cadre des crédits disponibles, notamment pour créer de nouvelles cités éducatives, ont été supprimés les crédits pour les bataillons de prévention, qui concernent les médiateurs au sein des quartiers. Il me semble que suite à ce que nous avons vécu et en raison de la nécessité d’assurer la médiation et la prévention dans les quartiers prioritaires, il serait de mauvais aloi de supprimer ces crédits, même s’il faut faire évoluer la formation et les compétences des agents qui interviennent. Je propose de rouvrir les 16 millions d’euros pour ce dispositif, comme en 2023.

La commission rejette l’amendement II-CF3214.

Amendements II-CF2297 de Mme Sandra Regol et II-CF2363 de M. Gérard Leseul (discussion commune).

L’amendement II-CF2297 a été défendu.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement proposé par ESS France vise à augmenter l’unité Fonjep (Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire) de 7 164 euros par an et par poste à 10 000 euros par an. Le Fonjep assure le versement de subventions d’appui au secteur associatif destinées à la rémunération d’un personnel qualifié chargé de la mise en œuvre de l’action associative ou de l’animation du projet associatif. Il permet donc aux associations d’être accompagnées financièrement pour accueillir de nouvelles ressources humaines, mais aussi, à de nombreux jeunes de s’insérer professionnellement dans le secteur de la vie associative par ce type de contrat. Nous portons la nécessité que le montant de l’aide au poste soit significativement revalorisé.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Il s’agit uniquement d’un rattrapage de l’aide au poste, qui n’a pas été assuré depuis très longtemps. Je suis favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF2297et l’amendement II-CF2363 tombe.

L’amendement II-CF2627 a été défendu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Je suis favorable mais je souhaite que l’exposé des motifs soit modifié en séance. Nous ne sollicitons pas plus de postes d’adultes-relais uniquement pour la Martinique mais pour tout le monde.

La commission rejette l’amendement II-CF2627.

L’amendement II-CF2583 a été défendu.

La commission rejette l’amendement II-CF2583.

Amendement II-CF2618 de M. Charles Fournier.

L’amendement II-CF2618 a été défendu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Je suis favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF2618.

Amendement II-CF3217 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Il s’agit d’un amendement très important, qui vise à augmenter la dotation de l’État à l’ANRU. La trajectoire prévoyait  un décaissement de 1,2 milliard d’euros pour payer les engagements de l’État à l’ANRU sur le programme 147 jusqu’en 2028. Or, aujourd’hui, le décaissement se fait au compte-gouttes puisque seuls 50 millions d’euros sont prévus en 2024, ce qui porte le total de la contribution de l’État  200 millions d’euros entre 2018 et 2024. Je pense que l’ANRU rencontrera des problèmes de trésorerie très bientôt et que nous devons soutenir l’agence.

La commission rejette l’amendement II-CF3217.

L’amendement II-CF1372 a été défendu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Il est déjà possible de faire financer des dépenses d’ingénierie par l’ANRU dans le cadre des programmes de rénovation urbaine. Je vous invite à la sagesse.

La commission rejette l’amendement II-CF1372.

Amendements identiques II-CF2278 de M. François Piquemal et II-CF2554 de M. Jean-Claude Raux.

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NUPES). Par cet amendement, nous proposons de doubler les crédits pour la lutte contre les algues vertes en Bretagne. La diminution des crédits est en totale contradiction avec la décision du tribunal administratif de Rennes, le travail de l’association Eaux et Rivières de Bretagne mais aussi de la Cour des comptes et de la Chambre régionale des comptes, qui critiquent ouvertement l’inefficacité et le manque d’ambition des politiques de lutte contre les algues au regard des enjeux environnementaux, sanitaires et économiques. Je rappelle que les algues vertes sont la conséquence d’un recours massif aux nitrates pour satisfaire à un modèle agricole productiviste. Il est donc essentiel de renforcer les moyens apportés aux communes pour le ramassage, le transport, le traitement des algues vertes échouées, au titre du volet curatif du plan.

Par ailleurs, je tiens à réaffirmer que la lutte durable contre les algues vertes passe par un soutien à une agriculture paysanne, écologique et soutenable, qui nourrit la population, et celles et ceux qui en vivent.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Le modèle agro-industriel breton conduit à une impasse environnementale, sanitaire et économique. Le fléau des marées vertes qui dévaste la Bretagne depuis des décennies est inacceptable. Il fait porter un danger en termes sanitaires. C’est pourquoi nous vous invitons très fortement à voter ces amendements.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de bon sens et extrêmement important, qui vise à soutenir les agriculteurs bretons pour sortir du mode de production actuel et les aider à lutter contre les algues vertes. Des aides incitatives doivent être octroyées et les doubler correspond à l’avis des différents organismes qui se sont penchés sur la question. Je suis très favorable.

La commission rejette les amendements II-CF2278 et II-CF2554.

Amendement II-CF935 de M. Elie Califer.

M. Christian Baptiste (SOC). Cet amendement vise à allouer des crédits supplémentaires au plan chlordécone, qui manque de moyens au vu des impacts sanitaires, économiques et sociaux constatés aux Antilles. Il est particulièrement surprenant et inquiétant de constater que le volet territorialisé du plan national d’action chlordécone est en baisse de plus de 4 % dans ce projet de loi de finances pour 2024. D’après une étude réalisée par Santé publique France en 2018, la quasi-totalité des Antillais (92 % en Martinique et 95 % en Guadeloupe) est contaminée au chlordécone. La terre, l’eau, les rivières, la mer, les poissons, les cheptels, les fruits et légumes : tout l’environnement est empreint du chlordécone en Guadeloupe et en Martinique. Dans de nombreuses rivières de Martinique et de Guadeloupe, la concentration en chlordécone atteint des niveaux 50 fois supérieurs à la norme européenne. Dès lors, les actions de sensibilisation et de dépistage, la dépollution des eaux et des sols, ainsi que l’adaptation des activités économiques à cette pollution massive impliquent de prévoir des moyens financiers conséquents.

Par ailleurs, il apparaît également urgent de poser la question de l’indemnisation des victimes du chlordécone. C’est le sens de la proposition de loi n° 1576 visant à reconnaître les responsabilités de l’État, à indemniser les victimes du chlordécone et à renforcer notre arsenal juridique par la création d’un crime d’écocide du 20 juillet dernier, et cosignée par de nombreux députés ultramarins. 

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Je vous propose de répondre sur la question du chlordécone pour tous les amendements qui suivent. J’ai déposé un amendement qui vise à maintenir les crédits chlordécone. Un établissement public devrait être créé et se charger de la cartographie, de la recherche, de l’indemnisation ainsi que de l’observation de tout ce qui se passe autour du chlordécone. De plus, il se pose un problème de programme. En effet, l’indemnisation dépend normalement du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), dans le cadre du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, ce qui ne renvoie pas au programme 162. Affecter 20 millions d’euros supplémentaires est positif mais cette somme ne sera utilisée que pour la cartographie, l’observation, la recherche et les tests. Je suis favorable à l’alimentation du programme chlordécone dans le programme 162 mais je suis aussi favorable à l’adoption de mon propre amendement en tant que rapporteur spécial, afin que nous puissions travailler de façon plus globale.

M. Christian Baptiste (SOC). Si un autre programme est prévu pour l’indemnisation, nous sommes favorables à l’affectation de 20 millions d’euros.

Les amendement II-CF935 et II-CF936 sont retirés.

Amendement II-CF242 de M. Pierre Meurin.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je défendrai les deux amendements sur ce sujet en même temps. Comme vous le savez, Marine Le Pen a été l’une des premières dirigeantes politiques à alerter la représentation nationale, notre Parlement, sur les effets de ce pesticide très toxique, cancérigène, le chlordécone, qui a empoisonné empoisonne toujours les sols de la Martinique et de la Guadeloupe, et qui menace directement la santé de nos concitoyens. Dans la ligne de ce que nous avons toujours défendu, nous pensons qu’il faut mieux indemniser nos compatriotes de Martinique et de Guadeloupe, et nous proposons un abondement pour entamer cette grande dépollution et l’indemnisation de populations qui ont été humiliées par les mensonges de l’État et des différents gouvernements sur ce grave sujet.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Je pense qu’il faut abonder les crédits du plan chlordécone. Toutefois, dans l’attente de créer cet établissement public sur lequel nous allons travailler tout au long de l’année, je vous propose de suivre l’amendement II-CF3216 du rapporteur.

Amendement II-CF2282 de M. William Martinet.

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NUPES). Par cet amendement, nous proposons de doubler les crédits de l’action volet territorialisé du plan national d’action chlordécone. La monoculture hyper-productiviste de la banane destinée à l’exportation en Martinique et en Guadeloupe a conduit à l’épandage massif de produits phytosanitaires sur ces territoires, ce qui a des effets désastreux sur la santé des ouvriers et ouvrières agricoles mais également sur l’ensemble de la population. Selon Santé publique France, plus de 90 % de la population adulte en Guadeloupe et en Martinique est actuellement contaminée par le chlordécone. De plus, 25 % de la population adulte en Martinique dépasse la valeur toxicologique de référence, comme l’ont démontré les auditions réalisées dans le cadre de mon rapport auprès des acteurs institutionnels : délégué interministériel, Santé publique France, Anses, acteurs associatifs locaux (Collectif des ouvriers agricoles empoisonnés par les pesticides). Je vous invite donc à voter cet amendement.

L’amendement II-CF2321 a été défendu.

L’amendement II-CF2510 a été défendu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Je vous propose de nous accorder sur l’amendement II-CF3216, à 4,3 millions.

La commission rejette l’amendement II-CF242.

La commission adopte l’amendement II-CF3216.

Les autres amendements sur ce thème tombent.

Amendement II-CF2345 de M. Jean-Claude Raux.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Nous demandons la reconduction du plan Reconquête de la qualité de l’eau en Pays de la Loire. Plusieurs signaux alarmants justifient cet amendement. Seuls 11 % des masses d’eau des Pays de la Loire sont de bonne qualité, et seulement 1 % en Loire-Atlantique, mon département. En juin, un nouveau captage d’eau potable – venant s’ajouter à une longue liste – était fermé d’urgence à cause de la pollution liée à un pesticide pourtant interdit depuis 2010 et dont les taux étaient 26 fois supérieurs à la norme admise. Ces données sont relevées alors que le plan Reconquête de la qualité de l’eau est mis en œuvre depuis 2020 et que l’État a investi 3,5 millions d’euros. Pourtant, ce PLF consacre l’extinction du plan, ce que je dénonce fermement. Je demande à la fois le renforcement de ce plan pour 2024 et sa reconduction pour les quatre années à venir.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Vous avez raison, l’extinction de l’action est annoncée. De plus, il n’a pas été assuré d’évaluation de ce programme, qui devrait se terminer à la fin 2024. Je propose une reconduction de ce plan en attendant une évaluation fiable sur la reconquête de la qualité de l’eau en Pays de la Loire. L’avis est favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF2345.

L’amendement II-CF2625 a été défendu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. L’avis est favorable, afin d’aider à la lutte contre les sargasses.

La commission adopte l’amendement II-CF2625.

Amendements identiques II-CF2366 de M. Inaki Echaniz et II-CF3052 de la commission des affaires économiques.

M. Inaki Echaniz (SOC). Le présent amendement vise à remettre en œuvre un plan d’urgence de relance du logement locatif social en fléchant le 1,3 milliard d’euros d’économies réalisées par le gouvernement sur le dos des bailleurs sociaux et de leurs locataires via la réduction de loyer de solidarité (RLS), sur la production de nouveaux logements sociaux. Depuis 2018, le gouvernement a réalisé 6 milliards d’euros d’économies sur le dos des bailleurs sociaux. Complétée par des mesures fiscales défavorables, notamment sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) réduite, cette mesure budgétaire a entraîné l’effondrement de la production de logements sociaux, avec 30 000 logements produits en moins sur les trois premières années du dispositif en comparaison des trois années précédentes. Afin de retrouver le niveau de production de logements sociaux antérieur et conforme aux objectifs que le gouvernement s’est lui-même fixés de 125 000 par an, notre groupe propose plusieurs mesures de soutien, dont le retour d’un taux de TVA réduit à 5,5 % intégral pour l’ensemble des opérations.

M. François Jolivet, rapporteur. Je me suis déjà exprimé sur le sujet. Cet amendement est victime d’une erreur de classement. J’émets un avis défavorable et je ne serai favorable que si les organismes HLM sont soumis à l’impôt sur les sociétés.

La commission rejette les amendements identiques II-CF2366 et II-CF3052.

Les amendements II-CF2603, II-CF3060 et II-CF2334 tombent.

Amendement II-CF2377 de M. Inaki Echaniz.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF2377.

Amendements identiques II-CF3051 de la commission des affaires économiques et II-CF2365 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). Le présent amendement vise à rétablir une aide aux maires bâtisseurs dotée de 175 millions d’euros de crédits, soit le même montant que le dispositif d’aide à la relance de la construction durable qui était prévu dans France Relance. S’il est un domaine où l’échec de la politique d’Emmanuel Macron et de sa majorité est patent, c’est celui du logement. D’août 2022 à juillet 2023, 397 600 logements ont été autorisés à la construction, soit 117 300 de moins que lors des douze mois précédents. Entre le troisième trimestre 2022 et le troisième trimestre 2023, les ventes de logements neufs aux particuliers ont chuté de 44 %. Ce sont ainsi au moins 100 000 logements privés de moins qui devraient être produits en 2023 par rapport à 2017. C’est une catastrophe pour les accédants, les locataires, les acteurs économiques du secteur, et l’emploi. Près de 30 000 emplois pourraient être détruits en 2024 dans le BTP et la promotion immobilière.

M. François Jolivet, rapporteur. L’échec dont vous parlez est d’abord celui des maires qui ne souhaitent plus construire et il s’explique aussi par l’augmentation des taux d’intérêt. Vous proposez de réabonder l’aide aux maires bâtisseurs mais je vous rappelle que nous avions mis en place ce dispositif en 2021 et 2022, doté de 350 millions d’euros sur les deux nnées. Au final, nous constatons que ces enveloppes ne sont pas entièrement consommées car les maires candidats sont de moins en moins nombreux. L’objectif est positif mais les voies et moyens choisis ne sont pas les bons. L’avis est défavorable.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). De nombreux maires essayent de présenter des projets de construction, alors qu’une partie de la population assure qu’elle n’en peut plus de vivre dans des villes bétonnées, sans accès à la nature, sans parc. Ces moyens visent à permettre à des maires de construire de manière qualitative. Si nous ne réfléchissons pas à la qualité de l’habitat, afin de contribuer au bien-vivre de tous, nous nous heurterons légitimement à la désapprobation de toute une partie de la population. Nous devons soutenir les maires qui essayent de construire.

La commission adopte les amendements II-CF2365 et II-CF3051.

L’amendement II-CF227 a été défendu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. L’amendement vise à doubler les crédits d’ingénierie, qui sont déjà doublés pour l’ANCT. Je vous invite donc à le retirer. Par ailleurs, les personnels de l’Agence étant insuffisants, les crédits sont orientés vers les cabinets d’études privés, ce qui suscite des interrogations.

L’amendement II-CF227 est retiré.

Amendement II-CF2484 de M. Karim Ben Cheikh.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à attirer l’attention sur le fait qu’aujourd’hui, dans les fonds débloqués pour rénover les bâtiments scolaires, ne sont pas prises en compte les écoles des Français de l’étranger. Ces écoles sont pourtant indispensables à l’éducation des enfants des Français vivant à l’étranger mais elles sont aussi une vitrine de la France dans ces pays. Il est donc important que des moyens spécifiques de rénovation puissent être dégagés.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Il s’agit d’un sujet important et il existe deux solutions : soit un fonds vert spécifique fléché, soit un budget du ministère de l’éducation nationale, du ministère de l’Europe et des affaires étrangères ou du ministère de l’environnement. Je ne suis pas sûr que la direction générale des collectivités locales (DGCL), qui s’occupe de ce programme, doive traiter des écoles à l’étranger. Je vous invite à déposer cet amendement dans la bonne mission.

L’amendement II-CF2484 est retiré.

Amendement II-CF233 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Il s’agit d’un amendement d’appel qui vise à conforter le plan Avenir Montagnes mis en place suite à la crise du covid. Ce plan devait accompagner nos stations de montagne dans des projets de diversification touristique. Il a bien fonctionné et je souhaiterais qu’il puisse cibler également des projets d’enneigement via la neige de culture. En effet, ces projets permettent de sécuriser l’essentiel de l’activité économique de nos stations. Nous ne nous posons jamais la question de l’avenir d’une industrie dans 10, 15 ou 20 ans et nous ne supprimons pas l’accompagnement des entreprises concernées parce que l’aide actuellement indispensable ne serait pas adaptée aux enjeux des prochaines années. Je souhaiterais que nous adoptions la même position avec les stations de montagne, qui font vivre des milliers de familles et qui méritent d’être accompagnées. Je ne connais aucun maire qui utilise des enneigeurs lorsque la neige est absente, notamment dans les petites stations de très moyenne montagne. En revanche, pour sécuriser les domaines sur les liaisons, les fronts de neige, pour permettre à nos enfants d’apprendre à faire du ski, ces projets sont indispensables.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Il s’agit d’un amendement à 150 millions. D’habitude, les députés du groupe Les Républicains sont davantage soucieux des deniers publics. Je comprends la volonté de faire perdurer le plan Avenir Montagnes, qui dispose encore de crédits de paiement à décaisser. J’invite à la sagesse pour voter cet amendement et, éventuellement, travailler le plan ensuite avec le gouvernement, afin qu’il perdure.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Aujourd’hui, nous devons faire face au réchauffement climatique, c’est-à-dire une diminution de la pluie et de la neige, et une raréfaction de nos ressources en eau, notamment dans les territoires de montagne, qui se réchauffent plus vite. Si nous souhaitons accompagner la montagne, nous devons évoluer vers une montagne des quatre saisons (tourisme d’été, respect de notre environnement, restauration de la biodiversité) et ne pas pomper dans les nappes phréatiques pour faire perdurer un modèle qui, malheureusement, ne pourra pas être maintenu dans les conditions que nous connaissons.

Mme Marina Ferrari (Dem). Je soutiens cet amendement présenté par ma collègue Émilie Bonnivard. Nous avons besoin d’aider notre modèle économique en montagne à se projeter vers l’avenir. Effectivement, il reste des crédits au sein du plan Avenir Montagnes mais beaucoup de projets sont déjà lancés. Il est important d’accompagner nos territoires.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Je suis très attentive à écouter les collègues de tous les bancs, dès lors qu’ils ont une compétence particulière sur certains sujets complexes, qui engagent la vie de nos concitoyens. Je regrette que des positions de principe soient adoptées par des députés qui ne connaissent pas le territoire, qui ne sont pas des spécialistes et qui apportent des réponses idéologiques. Le plan Avenir Montagnes comprend aussi des projets de diversification. Nous ne pourrons pas sauver les emplois avec le tourisme des quatre saisons. Je vis en montagne depuis 30 ans : nous avons tout essayé et ce principe ne fonctionne pas.

M. le président Éric Coquerel. Il me semble que Mme Chatelain est de l’Isère.

La commission adopte l’amendement II-CF233.

Amendement II-CF1661 de Mme Sophie Mette.

M. François Jolivet, rapporteur. Avis défavorable.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Je souhaite répondre à l’interprétation de ma collègue, qui remet en cause les compétences. Nous pouvons avoir un désaccord fondamental sur ce que sont les besoins de la montagne sans remettre en cause la pertinence des analyses. Je vous rappelle que je suis élue de l’Isère et que j’ai suivi, dans mon cadre professionnel, des questions d’aménagement du territoire, de montagne et en matière agricole. Nous sommes en désaccord. Vous souhaitez sauver les emplois : l’emploi est important dans la montagne. Pour ma part, je souhaite préserver les conditions de vie. En effet, la raréfaction de la ressource en eau, la question de la stabilisation des masses d’eau et la question de la raréfaction des nappes phréatiques sont réelles dans nos montagnes et ailleurs.

La commission rejette l’amendement II-CF1661.

M. le président Éric Coquerel. Nous avons fini d’examiner les amendements de crédits. Les rapporteurs peuvent-ils nous donner leur avis sur cette mission, ainsi modifiée ?

M. François Jolivet, rapporteur. Notre commission a bouleversé les trois missions que je rapporte. Si j’envisage la situation de manière très positive, je me dis que comme le budget des aides aux logements a baissé, mais qu’il n’est pas épuisé, je vous inviterais bien à voter favorablement. En revanche, comme nous allons tellement réduire les aides aux logements, politiquement, je vous inviterais à voter défavorablement. En effet, l’évolution sera bien pire que la baisse des 5 euros. Je vous invite à voter contre les missions que je vous ai présentées, afin que nous revenions à leur version initiale plus tard.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. L’exercice est difficile puisque les programmes présentés par François Jolivet ont évolué dans le bon sens. Toutefois, nous devons prendre les fonds sur des missions existantes, ce qui est un problème puisque tous les crédits de la politique de la ville ont ainsi disparu. Pour ma part, je regrette que des crédits n’aient pas été affectés à l’ANRU et que les crédits des bataillons de la prévention n’aient pas été réinstitués dans les quartiers. Je suis très peu satisfait des trois programmes de la mission que je rapportent dans la version qui sort de cette mission. Je voterai contre les crédits de ces trois programmes , et donc contre le budget de la mission.

M. le président Éric Coquerel. Les chiffres sont les suivants : 1,2 milliard pour l’hébergement, 16,7 milliards pour l’aide au logement, 1,25 milliard pour l’urbanisme, 340 millions pour l’aménagement du territoire, -170 millions pour la politique de la ville, 74 millions pour l’intervention territoriale de l’État.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Les explications de vote sont difficiles à apporter tant les mouvements ont été nombreux. Les rapporteurs votent eux-mêmes contre leurs propres crédits : nous pouvons les comprendre et regretter de ne pas avoir eu un débat plus serein. Nous soutenions un budget très positif pour l’hébergement d’urgence, avec le maintien d’un niveau historiquement haut, un budget qui revalorisait les APL, qui soutenait massivement la rénovation thermique des logements, qui relevait les crédits de la politique de la ville, qui apportait un soutien important à la cohésion territoriale. Ce que nous avons vu ce matin n’est plus très cohérent. Au-delà des mesures et de leurs montants, la question est celle des politiques publiques, qui nécessitent de la cohérence et non des mouvements aussi brusques qui disqualifient leurs auteurs. Compte tenu de l’adoption du très bon amendement de notre collègue Amiel sur les tiers lieux, le groupe Renaissance s’abstiendra majoritairement sur ces crédits.

M. Philippe Lottiaux (RN). Nous saluons le travail des rapporteurs. L’hébergement d’urgence pourrait devenir un tonneau des Danaïdes si nous ne réglons pas le problème majeur qui est le laisser-aller total en matière d’immigration. En effet, à ce rythme, les crédits ne seront jamais suffisants. En matière de logement, l’ANAH est complètement débordée et il conviendrait de décentraliser les aides. De plus, sur le fond, les travaux sont pris en compte ou non, ce qui est toujours discutable, et il se pose un problème de fiabilité du diagnostic. La crise sans précédent nécessite des mesures conjoncturelles sur le prêt à taux zéro, pour les maires bâtisseurs, pour permettre des déductions fiscales, pour créer un choc, ainsi que des mesures structurelles, qui n’apparaissent pas dans ce budget. Enfin, malgré les signes positifs en faveur de la ruralité, la cohésion territoriale reste la grande oubliée, par rapport à une politique de la ville qui n’a, malheureusement, pas fait ses preuves. Nous voterons contre le budget.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Ce budget n’est pas parfait. Néanmoins, des votes ont permis de répondre à des urgences : 10 000 places d’hébergement supplémentaires, prise en compte de l’augmentation des coûts de fonctionnement pour les structures d’hébergement, ouverture de 6 000 places d’hébergement d’urgence pour accueillir les enfants à la rue, hausse de 29 millions d’euros pour dénoncer la coupe de 5 euros des APL sous le précédent quinquennat de M. Macron, le doublement du forfait charges des APL. Le secteur HLM sera lui aussi satisfait – sachant qu’il s’agit d’un parent pauvre de la politique de M. Macron – avec la suppression de la réduction du loyer solidarité qui porte si mal son nom et qui a profondément affaibli les bailleurs sociaux pour rénover leur parc ou investir. Enfin, pour les services publics, le reste à charge des collectivités dans le financement des maisons France Services a été abaissé. Évidemment, il apparaît un manque à gagner pour la politique de la ville, qui nous tient à cœur, mais je suis certain que Mme Élisabeth Borne fera des annonces en ce sens aujourd’hui, pour répondre aux maires qui l’ont interpellée il y a quelques jours. Nous voterons favorablement.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Nous voterons contre ce budget, essentiellement en raison de la politique défaillante du gouvernement depuis six ans sur la question du logement. Ce problème n’est absolument pas réglé par ce budget, alors qu’il s’agit d’une cause de la crise sociale majeure qui se dessine. La tentative d’élargissement du PTZ n’a pas été retenue lors de la première partie. Interdire la location des passoires thermiques est une fausse bonne idée car nous aggraverons la crise du logement. Le zéro artificialisation nette (ZAN) continue à raréfier l’immobilier et à faire exploser le prix du foncier. Pour la politique de la ville, nous n’avons pas réussi à inverser la ségrégation spatiale. Nous pensons qu’un virage à 180 degrés doit être pris en matière de politique du logement, première source de dépense des ménages, afin de permettre aux Français de se loger dans des conditions correctes et à un prix accessible.

Mme Marina Ferrari (Dem). Dans le même esprit que mon collègue Lefèvre, nous nous apprêtions à voter ces crédits qui nous semblaient équilibrés et qui allaient dans le bon sens sur de nombreuses missions. Malheureusement, les échanges de ce matin ont manqué de sérieux. Les crédits de la politique de la ville sont en négatif, alors qu’il s’agit d’un véritable sujet. Pour l’aménagement, il ne reste quasiment plus rien. Pour toutes ces raisons, le mouvement Démocrate s’abstiendra.

M. Inaki Echaniz (SOC). La mission Cohésion des territoires du PLF 2024 s’inscrit dans un contexte particulièrement alarmant pour le secteur du logement. L’inertie du gouvernement, malgré les alertes émises à l’issue de plusieurs concertations, dont le Conseil national de la refondation (CNR), a aujourd’hui des lourdes conséquences sur le quotidien des Français. Elle va même à l’encontre des objectifs affichés de l’exécutif, d’amélioration du pouvoir d’achat ou de plein emploi. Comme le rappelle le rapporteur, le manque de logements freine le développement économique des territoires et la création d’emplois. Si nous devons remédier aux difficultés des salariés à se loger, il en va de même pour toute la population. Le gouvernement souffre d’un manque de vision et d’ambition sur le sujet. Il est indispensable de réagir rapidement pour éloigner le risque de bombe sociale dont nous avons tous conscience.

Le groupe Socialiste a ainsi proposé un certain nombre d’amendements pour l’amélioration de la lutte contre le mal-logement et le développement de l’hébergement d’urgence, pour mieux accompagner les locataires modestes et les étudiants, dont 12 % renoncent à leurs études faute de logement, pour soutenir les bailleurs sociaux particulièrement fragilisés, pour augmenter le nombre de logements neufs, alors qu’il faudrait en construire 500 000 par an, pour favoriser l’accession sociale à la propriété, pour rétablir une aide aux maires bâtisseurs. Pour toutes ces raisons et au vu des crédits amendés, nous voterons pour.

M. François Jolivet (HOR). Le groupe Horizons s’abstiendra.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Le manque de sérieux est ce dont cette majorité fait preuve depuis maintenant plus de six ans : d’abord, des baisses drastiques sur le logement social puis une politique qui se résume à couper des budgets. Nous n’étions pas pour le dispositif  « Pinel »mais nous constatons qu’après que le logement social a été touché en premier, c’est l’ensemble de la politique du logement dans son ensemble qui subit des baisses de budget. Nous avons défendu et obtenu la hausse des crédits sur l’hébergement, la hausse des moyens pour les bailleurs sociaux. C’est pourquoi nous voterons positivement. Ces éléments sont essentiels à une politique du logement. Nous regrettons que le fait de ne pas avoir eu un débat sur la première partie, permettant d’augmenter les moyens de l’État et de financer une véritable politique du logement, nous oblige à réfléchir dans un cadre contraint et à prendre des financements au sein de la politique de la ville, dont le budget est pourtant indispensable. Nous appelons solennellement la Première ministre à adopter ce budget et à lever les gages sur la politique de la ville.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Depuis six ans, la politique du logement a connu de nombreuses mauvaises décisions budgétaires qui nous amènent dans la situation actuelle. Il se cumule à la fois une crise des taux et les effets délétères de toutes les mesures qui ont été prises depuis six ans : jamais notre pays n’a compté autant de demandeurs de logements et jamais notre pays n’a construit aussi peu de logements. Cet effet de ciseaux aura des impacts sociaux et économiques très graves sur notre pays. Comme mes collègues, je me félicite que nous ayons pu faire voter des amendements qui ne changent pas totalement la donne mais qui améliorent la situation et suppriment certaines mauvaises mesures, notamment celle sur la RLS. Ces constats s’entendent alors qu’on constate la disparition des crédits de la politique de la ville suite à l’examen de la mission budgétaire. Je rejoins ma collègue Chatelain : je demande au gouvernement de lever le gage sur la politique de la ville, surtout le jour où se tient, après des mois de tergiversation, le comité interministériel à la ville. Dans les conditions où le gage serait levé sur les crédits de la politique de la ville, nous voterons favorablement.

M. le président Éric Coquerel. Je considère que le débat a été serein, même si nous avons connu deux ou trois moments plus animés. Les arguments ont été défendus. De plus, alors même que le gouvernement a validé le fait que le logement devenait une bombe sociale, le budget n’en tient pas compte. En effet, de nombreux membres de la majorité nous indiquent qu’une loi sera votée sur le sujet. Je pense que l’urgence est telle qu’il convenait d’apporter des réponses sans attendre. D’ailleurs, de nombreux amendements ont été adoptés car ils répondent à une situation qui n’est plus tenable.

Sur la forme, je relève deux raisons principales pour lesquelles de nombreux amendements manquent de coordination. La première est celle du 49.3 : la raison avancée par Marc Le Fur est une raison véritable. La deuxième est celle des délais prévus pour déposer les amendements dans les cadres. En effet, les amendements sont déposés rapidement, s’accumulent, et il est alors difficile d’assurer la coordination, notamment entre les différents groupes, afin de rendre ces amendements plus rationnels.

Enfin, en effet, le budget de la politique de la ville a été ponctionné, en raison des exigences en matière de recevabilité. Il peut être rétabli en cas de levée des gages. Je rappelle qu’en termes de recettes, le gouvernement a rejeté des amendements votés en commission qui auraient apporté environ 20 milliards de recettes supplémentaires.

Je propose de passer aux voix les crédits de la mission.

La commission adopte les crédits de la mission.

Article 38 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

Je vous propose d’examiner les amendements rattachés. Je vous invite à indiquer au maximum que ces amendements ont été défendus.

Amendement II-CF2346 de M. Jean-Claude Raux.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Cet amendement s’inscrit dans la lignée de celui qui a été adopté un peu plus tôt. Nous manquons singulièrement d’indicateurs et il n’est accolé aucun objectif à l’action 11 du programme 162 : un plan est mis en œuvre depuis 2020 et l’État a investi 3,5 millions d’euros sans que les lois de finances ne mesurent la performance budgétaire de ce plan. Alors que l’action arrive à échéance, il me semble important de corriger cette anomalie. C’est pourquoi je propose de créer un objectif et un indicateur sur le coût de la dépollution de l’eau en Pays de la Loire. Des sommes faramineuses sont englouties chaque année pour cette dépollution. Si les chiffres sont établis à l’échelle nationale, ils ne le sont pas à l’échelle territoriale. L’efficacité du plan Reconquête de la qualité de l’eau en Pays de la Loire peut être mesurée en analysant l’évolution des coûts de dépollution de l’eau dans ce territoire.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Je suis favorable, dans le cadre d’une coordination avec l’amendement précédent de M. Raux qui a été adopté et les crédits de la mission qui ont été adoptés.

La commission rejette l’amendement II-CF2346.

M. le président Éric Coquerel. Je vous demande de condenser la présentation de vos amendements.

Avant l’article 50

Amendements II-CF2283, II-CF2284 et II-CF2285 de M. François Piquemal.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Le premier des amendements a pour but de rappeler que face au dérèglement climatique, nous devons privilégier les programmes ANRU qui sont les mieux-disants du point de vue écologique. Ce n’est pas du tout le cas actuellement : des milliers de logements doivent être démolis pour que d’autres soient reconstruits, dans le cadre de règles comme le zéro artificialisation nette. Or certains logements démolis sont viables d’un point de vue architectural et correspondent à des typologies de logements qui manquent dans certaines villes (logements familiaux et d’accession à la propriété).

Le deuxième amendement plaide pour que soit assurée l’égalité entre les logements sociaux démolis et reconstruits. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, notamment pour le PLAI : des logements sont démolis, dans lesquels vivent des personnes qui n’ont ensuite plus les moyens d’avoir accès au logement dans le parc privé notamment, ou à qui sont proposés des logements trop petits ou trop onéreux.

Le dernier amendement porte sur la contribution de l’État au financement des projets soutenus par l’ANRU, contribution qui doit être conditionnée au respect de la loi SRU. De fait, il existe beaucoup de maires voyous, à Nice, à Cannes, qui ne respectent pas cette loi et il serait temps de remettre de l’ordre et de l’autorité à ce niveau.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Nous partageons la nécessité de construction écoresponsable, dans la limite de l’enveloppe budgétaire. En effet, en tant qu’ancien maire, je sais que de tels projets sont toujours beaucoup plus compliqués à porter. Au regard de la hausse de tous les coûts de construction, ce sujet devrait être traité dans le cadre d’une enveloppe supplémentaire.

Je considère que le deuxième amendement, dont je comprends l’objet, est très rigide. En effet, le principe n’est pas applicable à tous les territoires. Il convient que tout le monde participe à l’effort en matière de logement social et non pas les seules communes qui souhaitent en accueillir. Je demande le retrait de cet amendement.

Sur le conditionnement de l’ANRU au respect de la loi SRU, je vous rappelle que, dans certains territoires, il existe des programmes ANRU et la loi SRU n’est pas forcément opérante. Cet amendement doit être retravaillé.

M. le président Éric Coquerel. Ces amendements ont le mérite de pointer un véritable problème. Dans le cadre des projets ANRU – dans ma circonscription et aussi, je le crains, de façon plus globale –, j’ai compris que le président de la Caisse des dépôts souhaitait plutôt abandonner les destructions pour favoriser les rénovations. Actuellement, sur le périmètre des projets ANRU, certaines personnes ne peuvent plus se reloger en logement social et doivent partir toujours plus loin. Cette situation n’est pas tenable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous ne pouvez pas insulter le président de l’Association des maires de France en disant que c’est un voyou. M. Lisnard est un adversaire politique mais en aucune manière vous ne pouvez traiter les gens de cette façon. Ne considérez-vous pas que la violence est déjà suffisante contre les élus de manière générale ? Avez-vous besoin d’ajouter des insultes, alors que vous êtes député, vis-à-vis des représentants de nos concitoyens ? C’est absolument inacceptable.

M. le président Éric Coquerel. De manière générale, je préfère que, dans cette commission, nous évitions les insultes.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Le plus violent est de ne pas avoir de logement, ce qui est le cas pour des millions de nos concitoyens. Les maires qui, sciemment, décident de ne pas construire suffisamment de logements sociaux, contrairement à ce qui est prévu dans la loi, je les appelle des voyous et j’assume mes propos.

Par ailleurs, j’entends l’argument du rapporteur sur la rigidité. Toutefois, dans certains lieux, les opérations de rénovation urbaine visent à conduire des populations trop modestes en quatrième ou cinquième couronne. Nous maintenons notre amendement.

La commission rejette les amendements II-CF2283, II-CF2284 et II-CF2285.

Amendement II-CF2279 de M. François Piquemal.

M. François Piquemal (LFI-NUPES). Très peu d’élus locaux connaissent l’existence de l’ANCT, qui est pourtant censée les accompagner dans leurs projets. Nous avons constaté qu’un tiers du budget de cette agence était attribué à des cabinets de conseil, dont la mission est de quitter Paris pour montrer des présentations de power point à des provinciaux. Nous nous interrogeons sur l’efficacité de la démarche.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Établir un rapport sur la façon dont l’ANCT a recours à des cabinets de conseil me semble très pertinent, même si de nombreuses études sont conduites par la Caisse des dépôts-Banque des territoires, qui dispose de nombreux  cabinets d’études et qui travaille en lien avec l’ANCT. Au-delà, les élus qui en ont besoin connaissent l’ANCT, même si tout dépend de la façon dont le sujet est porté par les services de l’État localement.

La commission adopte l’amendement II-CF2279.

L’amendement II-CF418 a été défendu.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. Il serait bon de déterminer exactement quels sont les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) en outre-mer et savoir comment le fonctionnement peut être meilleur.

La commission adopte l’amendement II-CF418.

 

 

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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

Audition commune

 Association des Maires de France et des présidents d'Intercommunalités (AMF) : Mme Catherine Arenou, maire de Chanteloup‑les‑Vignes et co-présidente de la commission politique de la ville de l’AMF ;

– Association des maires de France Villes et Banlieues (AMFVB) : Mme Anne-Claire Boux, trésorière adjointe, à la maire de Paris et M. Damien Allouch, secrétaire général, maire d’Épinay‑sous‑Sénart.

 

Audition commune

 Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) : Mme Anne‑Claire Mialot, directrice générale et M. Maxance Barré, directeur de cabinet ;

 Agence Nationale de Cohésion des Territoires (ANCT) : M. Stanislas Bourron, directeur général.

 

– M. Marcellin Nadeau, député de Martinique.

– Préfecture de la Martinique : M. Jean-Christophe Bouvier, préfet de Martinique.

– Direction générale des collectivités locales (DGCL) : Mme Cécile Raquin, directrice générale

 

 

 


([1]) Une partie des crédits mis en réserve en 2023 pourraient financer les nouvelles annonces de la Première ministre pour ce qui relève des crédits du programme 147.

([2]) Cf. Rapport n°1014 sur l’évaluation de l’action de l’État dans l’exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis, Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale, mai 2018.

([3]) La circulaire du 31 août 2023 relative à l’élaboration des contrats de ville 2024-2030 dans les départements métropolitains fixe au 31 mars 2024 au plus tard la conclusion des contrats de ville. Cette circulaire prévoit que les contrats de ville soient davantage adaptés aux enjeux locaux, qu’ils intègrent un volet investissement, qu’ils identifient les acteurs privés susceptibles de s’investir dans les quartiers. Les financements des contrats de ville devront être pluriannualisés (objectif de 50 % de conventions conclues sous forme de conventions pluriannuelles d’objectifs).

([4]) Cf. https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/03/14/cites-educatives-les-approches-ministerielles-non-coordonnees-remettent-en-cause-la-coherence-recherchee_6165350_3224.html

([5]) Outre le recrutement d’un chef de projet, diverses dépenses peuvent être engagées au titre du dispositif au bénéfice des jeunes des établissements scolaires. L’enveloppe attribuée à chaque cité dépend des projets menés.