—  1  —

N° 1873

______

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME  LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 novembre 2023.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT,
 

visant à réduire les inégalités territoriales
pour les ouvertures de casinos

 

PAR Mmes Laetitia SAINT-PAUL et Frédérique MEUNIER

Députées

——

 

 

 

 

 

 

 

 

Voir les numéros :

                        Sénat :  363, 584, 585 et T.A. 109 (2022-2023).

Assemblée nationale : 1239.

 


—  1  —

 

SOMMAIRE

 

___

Pages

introduction................................................ 5

Examen de l’article unique DE LA PROPOSITION DE LOI

Article unique (Art. L. 321-1 du code de la sécurité intérieure) Élargissement des conditions d’ouverture de casinos dans certaines communes

Examen en commission

Personnes entendues

 


—  1  —

 

 

Mesdames, Messieurs,

Adoptée par le Sénat le 16 mai 2023, la proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos comporte un article unique. Son objectif est simple : autoriser l’implantation d’un casino dans deux communes qui accueillent des événements équestres de grande envergure : d’une part, Saumur – site historique du Cadre noir – et, d’autre part, Arnac-Pompadour, qui abrite le siège administratif de l’Institut Français du Cheval et de l’Équitation (IFCE). Concrètement, il s’agit d’ajouter une dérogation supplémentaire à l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure qui énumère les communes sur le territoire desquelles un casino peut être ouvert.

Le Sénat a fait le choix d’étendre de manière très limitée le champ d’application du texte, afin de rendre possible, sous certaines conditions cumulatives, l’ouverture d’un casino dans les départements frontaliers qui en sont jusqu’à présent dépourvus. En pratique, cette extension pourrait aboutir à l’implantation de deux casinos, l’un dans le département des Ardennes, et l’autre en Meurthe-et-Moselle.

L’évolution législative ainsi proposée ne remet donc pas en cause le principe général de prohibition des jeux d’argent et de hasard qui découle des impératifs liés à la protection, d’une part, de l’ordre public et, d’autre part, de l’équilibre territorial et financier de la filière des casinos. Au cours de l’année 2024, le Gouvernement tirera un bilan de l’expérimentation lancée en 2018 des cercles de jeux à Paris. Il s’agira alors de réfléchir à réformer, si cela s’avère nécessaire, le cadre législatif applicable à l’implantation et à l’activité des casinos sur l’ensemble du territoire.

La présente proposition de loi poursuit une ambition résolument transpartisane : défendre avec acharnement l’intérêt de nos territoires, en facilitant leur développement touristique et économique. Fondée sur une réflexion partagée depuis de nombreuses années par les communes de Saumur et d’Arnac-Pompadour, l’ouverture d’un casino représente une source majeure d’emplois et de revenus, à l’image des stations balnéaires, thermales ou climatiques qui perçoivent en moyenne chaque année plus d’un million d’euros tirés des prélèvements portant sur le produit brut des jeux.

Saumur et Arnac-Pompadour ne relèvent pas des critères actuellement fixés par la loi, étant situées dans des zones rurales ou à proximité des grands bassins de populations. Pour autant, elles accueillent des évènements à fort potentiel touristique, attirant annuellement plusieurs dizaines de milliers de visiteurs grâce à l’univers du cheval. Les infrastructures qu’elles abritent nécessitent des investissements réguliers qui représentent des coûts non-négligeables pour les pouvoirs publics.

L’ouverture d’un casino à Saumur et Arnac-Pompadour correspond d’ailleurs, s’agissant de Saumur, à un engagement présidentiel pris dans le cadre du grand débat national en mars 2019. Ayant déposé deux propositions de loi identiques il y a près d’un an afin de concrétiser ces projets communaux, vos rapporteures se félicitent de l’adoption sans modification de la proposition de loi par la commission des lois. Elles forment le vœu que celle-ci soit désormais approuvée par l’ensemble de la représentation nationale, marquant ainsi l’aboutissement d’une démarche initiée et soutenue de longue date par les collectivités locales concernées.

 

 

 


—  1  —

Examen de l’article unique DE LA PROPOSITION DE LOI

Article unique
(Art. L. 321-1 du code de la sécurité intérieure)
Élargissement des conditions d’ouverture de casinos dans certaines communes

Adopté par la commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Dans sa rédaction initiale, la proposition de loi prévoyait d’étendre le champ des dérogations à l’interdiction des jeux d’argent et de hasard, dont les casinos font partie, aux communes accueillant des sites historiques du Cadre noir ([1]) et des haras nationaux qui ont organisé annuellement au moins dix évènements hippiques au rayonnement national ou international au cours de cinq années précédant le 1er janvier 2023.

       Dernières modifications législatives intervenues

Le chapitre 1er du titre II du livre III du code de la sécurité intérieure régissant les conditions d’ouverture et l’activité des casinos a été modifié par l’ordonnance n° 2019-1015 du 2 octobre 2019 réformant la régulation des jeux d’argent et de hasard.

       Modifications apportées par le Sénat

À l’initiative de son rapporteur M. François Bonhomme (Les Républicains), la commission des lois du Sénat a adopté un amendement afin de rendre alternative, et non plus cumulative, la condition requise d’accueillir le site historique du Cadre noir ou un haras national. S’il exige que le siège d’une société de courses hippiques soit situé sur le territoire des communes susceptibles d’accueillir un casino, l’amendement adopté assouplit les critères d’éligibilité en mentionnant l’organisation d’événements « équestres », relatifs à l’ensemble des activités liées à l’équitation, au-delà des seules courses « hippiques ».

Lors de l’examen en séance publique, le Sénat a adopté un amendement de Mme Else Joseph (Les Républicains) afin d’autoriser l’ouverture d’un casino dans une ville classée commune touristique et membre d’une intercommunalité à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants située dans un département frontalier jusqu’alors dépourvu de casino.

       Position de la Commission

La Commission a adopté la proposition de loi sans modification.

1.   L’état du droit

a.   Un principe général d’interdiction d’implantation des casinos tempéré par des dérogations limitativement énumérées

Le code de la sécurité intérieure prévoit un principe général de prohibition des jeux d’argent et de hasard ([2]) motivé, historiquement, par la protection de l’ordre public et social à laquelle concourent la prévention des comportements addictifs, la lutte contre les activités frauduleuses et l’équilibre économique de ce secteur d’activité.

Extraits du rapport de la Cour des comptes, Les jeux d’argent et de hasard : un secteur en mutation, des enjeux de régulation, septembre 2023, p. 7

Depuis l’interdiction des loteries en 1836, les jeux « d’argent et de hasard » font l’objet d’une prohibition de principe, sauf dérogations législatives.

De telles dérogations ont été décidées au fil du temps, pour des motifs sociaux, budgétaires ou économiques. Elles couvrent les loteries (jeux de grattage ou de tirage), les paris hippiques, les jeux de casinos (ou « de table »), les machines à sous et les paris sportifs. L’encadrement législatif de ces jeux vise à préserver l’ordre public, notamment en veillant à la protection des joueurs et à la prévention des activités frauduleuses ou criminelles et en soumettant leurs opérateurs à un droit et une fiscalité d’exception, pour une activité qui n’est « ni un commerce ordinaire, ni un service ordinaire » selon l’article L. 320-2 du code de la sécurité intérieure.

Régulé par les services du ministère de l’intérieur ([3]), le fonctionnement des casinos ([4]) est encadré par l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure qui énumère les conditions dans lesquelles ces derniers peuvent être autorisés à ouvrir sur le territoire de communes relevant de catégories limitativement énumérées, telles que :

– les communes classées stations balnéaires, thermales ou climatiques antérieurement au 3 mars 2009 ;

– les communes classées stations de tourisme et les villes ou stations classées de tourisme qui constituent la ville principale d’une agglomération de plus de 500 000 habitants et participent pour plus de 40 %, le cas échéant avec d’autres collectivités territoriales, au fonctionnement d’un centre dramatique national ou d’une scène nationale, d’un orchestre national et d’un théâtre d’opéra présentant en saison une activité régulière d’au moins vingt représentations lyriques ([5]) ;

– les villes ou stations classées de tourisme du département de la Guyane ;

– les communes dans lesquelles un casino est régulièrement exploité au 3 mars 2009 ;

– les communes qui, étant en cours de classement comme station balnéaire, thermale ou climatique avant le 14 avril 2006, sont classées stations de tourisme avant le 3 mars 2014.

À l’exception du casino d’Enghien-les-Bains ([6]), il est interdit d’exploiter un casino à moins de 100 kilomètres ([7]) de la ville de Paris ([8]). Au total, la Cour des comptes recense 202 casinos en fonctionnement en 2023, essentiellement situés dans les départements littoraux.

b.   Le double niveau d’autorisation municipal et ministériel

L’ouverture d’un casino sur le territoire d’une commune requiert une double autorisation municipale et ministérielle, sur le fondement de l’article L. 321-2 du code de la sécurité intérieure.

D’une part, le conseil municipal de la commune concernée doit délivrer un avis conforme à l’implantation du casino et au contrat de délégation de service public conclu entre celle-ci et la société commerciale exploitant le casino.

D’autre part, le casinotier est tenu de déposer une demande d’autorisation d’exploitation au préfet du département dans lequel le casino est susceptible d’ouvrir. À l’issue d’une enquête administrative menée par ses services et éclairé par l’avis du préfet ainsi que par celui de la commission consultative des établissements de jeux ([9]), le ministre de l’intérieur prononce ou non la décision d’autoriser l’ouverture du casino, laquelle peut faire l’objet d’un recours devant le juge administratif.

c.   Une source de revenus non-négligeable pour les communes, marquée par des inégalités territoriales au détriment des territoires ruraux

Les communes qui accueillent des casinos perçoivent une manne financière tirée des prélèvements portant sur le produit brut des jeux (PBJ), soit le chiffre d’affaires réalisé par le casino implanté sur leur territoire. L’article L. 2333-54 du code général des collectivités territoriales précise que les communes précitées bénéficient d’un revenu fiscal direct compris entre 0 et 15 % du PBJ, selon les clauses contractuelles de la délégation de service public conclu avec le casinotier. L’article L. 2333-55 dispose également que la commune perçoit 10 % du montant prélevé par l’État sur le PBJ.

Dans son rapport publié en septembre 2023, la Cour des comptes souligne que les recettes fiscales du bloc communal des communes concernées dépendent à plus de 80 % des prélèvements sur les casinos, soit 281 millions d’euros en 2019. Leur chute en 2020-2021 en raison de la crise sanitaire, atteignant 155 millions d’euros, a été compensée par des dotations exceptionnelles de l’État ([10]). La Cour observe que l’année 2021-2022 atteste de la résilience des casinos, « grâce à l’effet conjugué de la probable hausse des mises individuelles et de la reprise progressive de la fréquentation. » ([11])

Selon les chiffres communiqués par la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l’intérieur, les communes sur le territoire desquelles un ou plusieurs casinos sont implantés perçoivent en moyenne chaque année 1,4 million d’euros du fait de l’activité de ces derniers.

Non-négligeable, cette source de revenus contribue pleinement au développement des communes touristiques dont l’attractivité est pourtant favorisée par un emplacement géographique avantageux ([12]). Vos rapporteures soulignent l’existence d’un certain paradoxe : bien que légitime, l’encadrement très strict des conditions d’ouverture des casinos aboutit à privilégier des communes qui bénéficient d’ores et déjà d’un dynamisme culturel et économique solidement établi, alors même que des communes éloignées des grands bassins de population, disposant d’un potentiel touristique moindre mais bien réel, sont exclues du dispositif ([13]). C’est notamment le cas de communes accueillant des activités équestres de renommée nationale voire internationale, telles que Saumur et Arnac-Pompadour.

Les auteurs de la proposition de loi adoptée par le Sénat déplorent ainsi que « la législation actuelle sur l’implantation des casinos [soit] à l’origine d’inégalités territoriales non justifiées » ([14]), ce qui rend par conséquent nécessaire l’assouplissement des règles d’ouverture des casinos fixées par l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure.

2.   Le dispositif proposé

Adoptée par le Sénat le 16 mai 2023, la présente proposition de loi autorisait, dans sa rédaction initiale, l’implantation de casinos dans les communes considérées comme étant des « sites historiques du Cadre noir et des haras nationaux » qui ont organisé chaque année au moins dix évènements hippiques de rayonnement national ou international, pendant au moins cinq ans avant le 1er janvier 2023. L’évolution proposée complète la liste de dérogations à l’interdiction d’ouvrir un casino établie par l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure.

Cette proposition de loi s’inscrit dans le prolongement de celles déposées à l’Assemblée nationale le 29 novembre 2022 par vos rapporteures ([15]). L’objectif poursuivi par ces initiatives législatives vise à autoriser la création de casinos dans les communes d’Arnac-Pompadour et de Saumur, conformément, s’agissant de la seconde, à l’engagement présidentiel pris en mars 2019 ([16]) à l’occasion du grand débat national, puis réitéré en décembre 2022 ([17]).

Fondée sur les liens existant entre l’activité équestre, notamment les courses hippiques, et les jeux d’argents et de paris, l’ouverture de casinos a pour but, d’une part, d’accroître l’attractivité touristique de ces communes ([18]) et, d’autre part, de consolider le financement de l’activité équestre qui représente l’un des leviers majeurs de leur développement culturel et économique. Lors de leur audition par vos rapporteures, les maires des communes de Saumur et d’Arnac-Pompadour ont considéré que l’implantation de casinos engendrerait des recettes fiscales nettes annuelles estimées respectivement à 1,2 million d’euros et 400 000 euros. Ces sommes pourraient utilement pallier les difficultés de financement affectant spécifiquement l’investissement nécessaire au bon fonctionnement des infrastructures équestres situées sur leur territoire.

3.   Les modifications apportées par le Sénat

a.   L’examen en commission des lois

À l’initiative de son rapporteur M. François Bonhomme, la commission des lois a adopté un amendement ([19]) tendant, d’une part, à « assurer l’opérationnalité » ([20]) du dispositif de la proposition de loi, et d’autre part, à « étendre de manière très restreinte » ([21]) son champ d’application.

Premièrement, l’amendement rend alternative, et non plus cumulative, la condition relative à l’implantation du site historique du Cadre noir ou des haras nationaux. La formulation initiale de l’article imposait la conjonction d’un site historique du Cadre noir et d’un haras national afin d’obtenir l’autorisation d’ouvrir un casino sur le territoire de la commune : rédigée ainsi, cette exigence cumulative n’était satisfaite ni par la commune de Saumur, ni par celle d’Arnac-Pompadour.

Deuxièmement, si l’organisation annuelle de dix événements au rayonnement national ou international au cours des cinq années précédant le 1er janvier 2023 est maintenue ([22]), ces derniers doivent revêtir un caractère « équestre », relatif à l’ensemble des activités d’équitation, et non plus seulement « hippique ». Selon le rapporteur du Sénat, la notion d’hippisme renvoie aux seules courses de chevaux, qui se déroulent par ailleurs dans des hippodromes situés sur le territoire de communes limitrophes à Saumur et Arnac-Pompadour.

Troisièmement, l’amendement insère un critère supplémentaire imposant la présence du siège d’une société de courses hippiques ([23]) sur le territoire de la commune dans laquelle un casino pourrait être autorisé à ouvrir.

b.   L’examen en séance publique

À l’initiative de Mme Else Joseph (Les Républicain), le Sénat a adopté un amendement ([24]) ayant recueilli un avis défavorable de la commission et de sagesse du Gouvernement afin de rendre possible l’ouverture d’un casino dans les départements frontaliers qui en seraient jusqu’alors dépourvus. Le rapporteur s’est opposé à l’adoption de cet amendement en soulignant la nécessité d’attendre la fin de l’expérimentation des cercles de jeux à Paris en 2024 ([25]) avant d’envisager une refonte globale des règles applicables à l’implantation des casinos sur l’ensemble du territoire ([26]).

Complétant l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure, l’alinéa 3 de la proposition de loi précise qu’une autorisation d’ouverture d’un casino peut ainsi être attribuée sur le territoire d’une commune touristique par département frontalier, dès lors qu’aucun casino n’est implanté dans le département et que la commune précitée est membre d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants. Motivées par le renforcement de l’attractivité des territoires ruraux et la lutte contre la fuite de capitaux au profit du Luxembourg ou de la Belgique, ces dispositions présentent une portée concrète très limitée. Selon la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l’intérieur auditionnée par vos rapporteures, seuls deux départements ([27]) sont, à ce jour, susceptibles de satisfaire l’ensemble des conditions cumulatives susmentionnées : les Ardennes ([28]) et la Meurthe-et-Moselle.

4.   La position de la Commission

La Commission a adopté la proposition de loi sans modification.

*

*     *



—  1  —

   Examen en commission

Lors de sa réunion du lundi 20 novembre 2023, la Commission examine, selon la procédure de législation en commission, la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos (n° 1239) (Mmes Laetitia Saint-Paul et Frédérique Meunier, rapporteures).

Lien vidéo : https://assnat.fr/gSSBZN

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, présidente. La proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos a été déposée le 17 février 2023 par la sénatrice Catherine Deroche et adoptée par le Sénat le 16 mai dernier.

Le texte a été inscrit par la conférence des présidents sur l’ordre du jour transpartisan, ce qui explique que nous ayons désigné deux rapporteures : Mme Laetitia Saint-Paul, du groupe Renaissance, et Mme Frédérique Meunier, du groupe Les Républicains.

Ce texte est examiné selon la procédure de législation en commission, ce qui signifie que, sauf opposition dans les quarante-huit heures suivant la diffusion du texte de la commission, aucun amendement ne pourra être déposé lors de la séance publique, qui aura lieu le 4 décembre.

Mme Frédérique Meunier, rapporteure. Nous sommes réunis ce soir afin d’examiner une proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos. Nous vous remercions, madame la présidente, de nous accueillir temporairement au sein de la commission des lois pour discuter d’un sujet que le Parlement n’a pas souvent l’occasion d’aborder dans l’exercice de ses missions législatives.

Le texte soumis à notre examen a été adopté par le Sénat le 16 mai dernier. Il comporte un article unique dont l’objectif est simple : dans sa rédaction initiale, la proposition de loi prévoyait uniquement d’autoriser l’implantation d’un casino dans deux communes qui accueillent des événements équestres de grande envergure. Il s’agit, d’une part, de Saumur, site historique du Cadre noir, et d’autre part d’Arnac-Pompadour, qui abrite le siège administratif de l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE).

Concrètement, il s’agit d’ajouter une dérogation supplémentaire à l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure, qui énumère les communes sur le territoire desquelles un casino peut être ouvert.

Le Sénat a fait le choix d’étendre de manière très limitée le champ d’application du texte, afin de rendre possible, sous certaines conditions cumulatives, l’ouverture d’un casino dans les départements frontaliers qui en seraient jusqu’à présent dépourvus. En pratique, comme nous l’ont confirmé les services du ministère de l’intérieur auditionnés vendredi dernier, cette extension autoriserait l’implantation de deux casinos, l’un dans le département des Ardennes, dans la ville de Sedan, qui serait intéressée, et l’autre en Meurthe-et-Moselle.

Comme vous le voyez, le périmètre du texte adopté par le Sénat est bien circonscrit. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de l’adopter sans modification, afin qu’il soit voté conforme par nos deux assemblées et entre en vigueur dans les meilleurs délais.

Au-delà de ce contexte sénatorial, la proposition de loi procède d’un constat simple tiré de nos territoires ruraux, trop souvent abandonnés. Cet espace rural mérite une véritable ambition, or qui mieux que les élus locaux peut en connaître les besoins et les ambitions ?

Voilà un an, nous avions déposé, chacune de notre côté mais sur la base d’un travail conjoint, une proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos, mais le Sénat a été plus rapide et a dégainé le premier – et c’est peut-être tant mieux. Il s’agissait d’un travail commun avec le maire de Pompadour et, depuis lors, je souhaite à la fois sauver mon territoire et sauver la filière cheval qui, comme à Saumur, est une composante importante du développement du territoire, créatrice d’emplois et génératrice d’activités sportives, sociales et culturelles.

La Corrèze compte un site historique de la filière équestre avec le haras national d’Arnac-Pompadour, véritable emblème d’un territoire, mais la filière est malheureusement en train de se déliter au fil du temps. Demain, l’État s’en désengagera certainement pour se concentrer sur des missions régaliennes : pour maintenir en vie tout une filière économique locale, l’ouverture d’un casino permettrait d’assurer des retombées économiques à un territoire qui se meurt.

Comme vous l’avez compris, nous aimons toutes les deux nos territoires et nous nous battons aujourd’hui pour qu’ils puissent demain continuer à vivre.

Mme Laëtitia Saint-Paul, rapporteure. Merci, madame la présidente, pour votre accueil chaleureux. Ce texte transpartisan nous est, vous l’avez compris, très cher, et je tiens à dire ma fierté d’être pionnière pour soutenir son adoption, fruit d’une œuvre commune. Je tiens aussi à remercier Frédérique Meunier pour l’accueil qui m’a été réservé lorsque je me suis rendu en Corrèze, lors d’une période de suspension des travaux parlementaires, pour voir les déclinaisons locales de cette proposition de loi, dont nous avions déposé une version similaire toutes deux en 2022.

Notre ambition n’a pas varié, car elle se fonde sur une réflexion partagée de longue date par les communes de Saumur et d’Arnac-Pompadour : l’ouverture d’un casino est un facteur de développement touristique et économique majeur, en ce qu’il représente une source d’emplois et de revenus pour les communes qui en bénéficient. C’est, bien sûr, déjà le cas depuis plusieurs décennies dans de nombreuses stations balnéaires, thermales ou climatiques qui perçoivent en moyenne chaque année près de 1,4 million d’euros tirés des prélèvements sur le produit brut des jeux.

Saumur et Arnac-Pompadour ne relèvent pas des critères actuellement fixés par la loi, étant situées dans des zones rurales ou à proximité des grands bassins de population. Elles accueillent cependant des événements à fort potentiel touristique, attirant annuellement plusieurs dizaines de milliers de visiteurs grâce à l’univers du cheval. Les infrastructures qu’elles abritent nécessitent des investissements réguliers, qui représentent des coûts non négligeables pour les pouvoirs publics.

Je remercie vivement Mme Dominique Faure, ministre déléguée, d’accompagner comme elle le fait cet engagement présidentiel. L’ouverture d’un casino correspond en effet, pour Saumur, à un engagement pris par le Président de la République dans le cadre du grand débat national en mars 2019. La concrétisation de cette promesse me paraît pleinement légitime.

D’une part, en effet, les projections financières réalisées par les deux communes concernées indiquent qu’elles dégageront chaque année des recettes de l’ordre de 1 million d’euros pour Saumur et de 400 000 euros pour Arnac-Pompadour, tirées essentiellement des prélèvements réalisés sur le produit des casinos. D’autre part, le monde hippique entretient depuis près d’un siècle – le Pari mutuel urbain, ou PMU, est né en 1930 – des relations évidentes avec les jeux d’argent et de hasard. L’implantation d’un casino dans des communes touristiques spécialisées dans les événements équestres n’a donc rien d’artificiel.

Les dérogations à la prohibition générale des jeux d’argent et de hasard doivent rester strictement encadrées, compte tenu tant des impératifs d’ordre public et social que de l’équilibre territorial et financier de la filière économique des casinos.

Le Gouvernement tirera l’année prochaine un bilan de l’expérimentation lancée en 2018 des cercles de jeux à Paris. Donc, 2024 sera le moment pour réfléchir, si nécessaire, à une réforme du cadre législatif applicable à l’implantation et à l’activité des casinos sur l’ensemble du territoire. Nous aurons ainsi l’occasion de nous pencher sur la pertinence des critères fixés par la loi et de les réviser si besoin.

En attendant cette échéance, la proposition de loi que nous vous proposons de voter ne vient pas révolutionner la cartographie des casinos en France, mais simplement concrétiser des projets communaux issus de longue date du terrain et qui nécessitent aujourd’hui l’approbation de la représentation nationale.

J’en profite pour remercier le Sénat en général et, plus particulièrement, les sénateurs du Maine-et-Loire, Mme Catherine Deroche et M. Stéphane Piednoir, du groupe Les Républicains, M. Emmanuel Capus, du groupe Horizons, et M. Joël Bigot, socialiste, qui illustrent le soutien que ce projet reçoit depuis longtemps sur le terrain de la part de toutes les forces politiques.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Avec plus de 200 établissements sur son territoire, la France concentre 40 % des casinos de l’Union européenne et jouit ainsi d’une offre ludique considérable, qui est un véritable atout pour l’attractivité de nos territoires. Pour les 196 communes accueillant un casino, au-delà des revenus fiscaux directs perçus, cette exploitation participe au développement de l’économie locale et de l’attractivité du territoire en créant des emplois en son sein et dans son environnement direct.

Toutefois, compte tenu de ces critères d’implantation, l’offre de casinos est inégalement répartie sur le territoire national. Elle se concentre en effet majoritairement sur les bords de mer ou dans les départements les plus urbanisés. D’autres zones, moins dynamiques, sont quant à elles non couvertes – c’est le cas de 38 départements français.

Ces critères d’implantation sont le fruit de près de deux siècles d’encadrement strict, mais nécessaire, des jeux d’argent et de hasard par l’État. Actuellement, et conformément au code de sécurité intérieure, les communes pouvant accueillir un casino de manière dérogatoire sont les communes classées stations balnéaires, thermales, climatiques ou de tourisme, ainsi que les villes principales d’agglomérations de plus de 500 000 habitants dotées d’établissements culturels spécifiques.

La multiplication de démarches émanant aussi bien d’élus locaux que de parlementaires témoigne d’une volonté qui s’exprime sur le terrain de faire évoluer les conditions d’implantation de ces établissements. Cependant, il est essentiel de penser cette évolution avec prudence et sagesse. Il est fondamental qu’une réforme du cadre juridique de l’implantation des casinos assure une évolution maîtrisable de leur nombre.

Compte tenu des enjeux de sécurité et de santé publique liés à leurs activités, les casinos font l’objet d’une très grande vigilance et d’une très grande attention de la part des services du ministère de l’intérieur et des outre-mer, que je représente ce soir. C’est dans cet objectif que la direction des libertés publiques et des affaires juridiques procède aux interdictions administratives de jeux et agrée les employés des casinos. De même, le service central des courses et jeux de la direction centrale de la police judiciaire réalise des audits périodiques des établissements pour veiller au respect de la réglementation, réalise également des enquêtes administratives sur les employés et mobilise un réseau de correspondants territoriaux. Préserver la capacité du ministère de l’intérieur et des outre-mer d’assurer ses missions, à moyens constants, est fondamental pour la sécurité de tous.

Nous devons également penser cette évolution avec précaution et discernement, pour ne pas fragiliser le réseau de casinos existant et garantir une aire de chalandise suffisante pour ces établissements. Si une remise à plat des critères d’implantation des casinos devait avoir lieu, elle mériterait également une large concertation avec les acteurs de ce secteur économique si singulier.

Afin d’étendre le maillage actuel de l’implantation des casinos en France, et de permettre à des communes rurales d’en bénéficier, cette proposition de loi étend la possibilité d’installation des casinos à un nouveau cas de figure : il est en effet proposé d’autoriser l’implantation d’un casino dans les communes sur le territoire desquelles sont implantés, au 1er janvier 2023, le siège d’une société de courses hippiques, ainsi que le site historique du Cadre noir ou un haras national où ont été organisés chaque année au moins dix événements équestres au rayonnement national ou international entre le 1er janvier 2018 le 1er janvier 2023. La rédaction conduit ainsi à étendre l’autorisation à un nombre limité de communes.

Par ailleurs, un amendement adopté en séance au Sénat ouvre plus largement cette même autorisation. Si vous votez cette proposition de loi, les communes membres d’une intercommunalité à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants, à raison d’une par département frontalier, pourront prétendre à ouvrir un casino.

Si donc elle n’est pas une fin en soi, cette proposition de loi permet de faire évoluer les conditions d’implantation de nos casinos, ce qui répond à une attente forte de certains territoires concernés. Pour ces raisons, le Gouvernement donne un avis favorable sur ce texte.

Un casino est un atout pour l’attractivité d’un territoire et pour le développement local. Toutefois, son implantation ne peut guère faire l’économie des moyens de vigilance accrue que ces établissements mobilisent face aux enjeux de sécurité et de santé publique intrinsèquement liés à leurs activités.

Je remercie les parlementaires qui se sont saisis de cet enjeu qui touche au cœur de nos territoires et aux loisirs de nos concitoyens.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, présidente. Nous en venons aux orateurs des groupes.

M. Lionel Vuibert (RE). Je suis ravi d’ouvrir la discussion générale sur cette initiative présentée au Sénat avec le soutien d’un large éventail de parlementaires et qui mérite notre examen attentif en raison de ses implications significatives, tout d’abord pour les villes équestres, puis pour les territoires frontaliers. Notre pays, riche en diversité patrimoniale et environnementale, est amené à chercher des moyens innovants pour favoriser un développement équilibré de ces territoires, et cette proposition de loi offre une opportunité de répondre à certaines considérations trop anachroniques en permettant l’ouverture de casinos dans des régions actuellement dépourvues de cette activité.

Pour ce qui concerne, tout d’abord, les villes équestres, les impacts économiques s’annoncent considérables pour les prochaines collectivités hôtes. Ces établissements peuvent devenir des moteurs économiques générant des emplois dans les secteurs de l’hôtellerie, de la restauration, du tourisme et, bien sûr, au sein même des casinos. Dans une continuité évidente, l’attractivité touristique de ces villes sera renforcée, attirant un public diversifié allant des passionnés de sports équestres aux amateurs de jeux.

Deux villes sont tout particulièrement concernées par cette réforme : Saumur, dans le Maine-et-Loire, et Arnac-Pompadour, en Corrèze, joyaux de notre patrimoine réputés pour leur tradition équestre séculaire.

Cette mesure offre une opportunité unique de dynamiser l’économie locale, de renforcer le tissu local et culturel et de créer des synergies entre le secteur équestre et celui du divertissement. Je tiens donc à saluer les travaux des deux corapporteures, et tout particulièrement les efforts accomplis sans relâche par ma collègues Laetitia Saint-Paul en vue d’inscrire cette proposition de loi à notre ordre du jour.

Toujours dans un souci de rééquilibrage géographique des opportunités de jeux, les échanges menés au Sénat ont permis, par le biais d’un amendement, d’élargir le champ d’application de ce texte aux communes ou établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de plus de 100 000 habitants, à raison d’un casino par département frontalier. Élu de l’un de ces départements – les Ardennes –, je ne peux que me féliciter de cette évolution législative, qui pourra, à terme, représenter un levier puissant pour notre territoire, offrant des opportunités économiques, touristiques et d’emploi, et évitant aux habitants de traverser les frontières à la recherche d’un divertissement qui connaît en France une forte croissance – 130 % en 2022 –, est source d’un produit brut de 2,5 milliards d’euros et emploie plus de 13 000 salariés. Aussi les retombées financières pour les collectivités territoriales devraient-elles également être considérables grâce aux recettes fiscales générées par cette nouvelle activité. Ces fonds pourraient être réinvestis dans des projets locaux, renforçant ainsi les infrastructures, l’éducation, la santé et d’autres secteurs clés.

Je vous invite donc, chers collègues, à voter unanimement en faveur de cette proposition de loi, qui est pour notre pays une opportunité de promouvoir l’égalité territoriale, de valoriser nos villes équestres et de soutenir le développement des territoires frontaliers.

Mme Marie-France Lorho (RN). S’il est une contravention à la qualité impersonnelle et générale de notre droit, c’est bien le dispositif de la dérogation inscrit dans la loi. En l’occurrence, la dérogation induite par cette proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos n’est audible que parce qu’elle offre une réponse salutaire aux deux communes de Saumur et d’Arnac-Pompadour visées par cette extension, et parce que cette exemption ciblée permettra d’appuyer les activités équestres qui les caractérisent.

En qualité de vice-présidente du groupe d’études sur le cheval, je tiens à saluer l’initiative qui aspire à appuyer le financement des activités et les infrastructures équestres de ces cités, à l’heure où celles-ci rencontrent tant de difficultés. L’audition de l’Institut français du cheval et de l’équitation, vendredi dernier, a achevé de me convaincre de la légitimité d’un fléchage du produit des jeux vers des activités qui non seulement participent à l’identité de ces communes, mais qui assurent également la sûreté de la filière sur le territoire. Le président du conseil d’administration de l’IFCE nous affirmait d’ailleurs que cette source de financement assurerait sa survie et permettrait même d’en développer les activités.

Pour cette raison, le groupe Rassemblement national souscrit au deuxième alinéa de cet article unique, qui vise tout spécialement les communes précitées.

Deux réserves, portant sur le troisième alinéa, ajouté par le Sénat, nous viennent cependant à l’esprit à la lecture de ce texte.

L’ouverture de la dérogation aux communes touristiques de départements frontaliers appartenant aux intercommunalités de plus de 100 000 habitants soulève quelques interrogations. En premier lieu, nous nous inquiétons à l’idée que l’installation d’un casino pourrait être un prétexte opportun pour l’État de se désengager des communes où s’établissent ces temples du jeu. Le prélèvement sur le produit brut des jeux au profit des collectivités territoriales, perçu par les communes, ne doit pas être une manne financière monopolistique, qui risquerait de créer une dépendance trop forte de l’échelon local envers son casino.

Dans l’éventualité où l’établissement viendrait à disparaître, qu’adviendra-t-il de la ville et de ses infrastructures ? Cette relation n’est d’ailleurs pas sans risques et les intérêts des collectivités doivent se voir mieux protégés à l’occasion de la délégation de service public. Dans son rapport public annuel de 2021, la Cour des comptes nous expliquait ainsi que, dans nombre de cas examinés, les collectivités ne disposaient pas de l’expertise juridique nécessaire pour l’élaboration de clauses qui, bien que non précisées aujourd’hui dans le code général des collectivités territoriales, paraissent pourtant essentielles pour cette délégation de service public. C’est là notre deuxième réserve sur ce texte.

Ces deux éléments doivent, selon nous, faire l’objet de la plus grande attention de la part des rapporteurs, notamment dans la perspective de la réflexion plus globale sur les critères permettant l’installation des casinos dans une commune que les rapporteurs du Sénat appellent de leurs vœux. Si cette proposition de loi constitue la première étape d’une telle ambition, il semble opportun de mettre en évidence dès à présent les risques inhérents à de telles installations qui, en dépit de la manne financière qu’elles semblent garantir, ne doivent pas être le lieu de nouvelles inquiétudes pour les communes.

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). Comme vous l’avez rappelé en introduction de votre rapport, il s’agit ici d’un engagement présidentiel, donc sacré. On voit concrètement comment le président Macron compte sauver les communes de leurs besoins de financement : par les jeux d’argent et de hasard. Le Sénat et l’Assemblée nationale sont mobilisés autour d’une loi de circonstance pour satisfaire les sponsors de la Macronie et pallier les défaillances de l’État en matière de financement des collectivités locales. Il s’agit aujourd’hui d’une dérogation pour les hippodromes, mais pourquoi pas, demain, pour les communes productrices de nougat ou de boules de pétanque ?

Aujourd’hui, Saumur et Arnac-Pompadour – ça ne s’invente pas ! –, et demain tous les chefs-lieux de canton seront candidats à votre politique d’État corrompu, qui consiste, à défaut de politique fiscale de redistribution juste, à offrir du pain rassis et des jeux.

Non, madame la ministre déléguée, nous ne voulons pas convertir nos territoires en tripots et en dealers d’espoirs de gains à la petite semaine. L’addiction aux jeux, comme l’addiction aux stupéfiants et à l’alcool et comme tout autre comportement addictif, est un enjeu de santé publique et de cohésion sociale. En 2020, Santé publique France estimait que le nombre de Français fortement dépendants au jeu avait doublé en cinq ans.

C’est dans ce contexte d’asservissement aux jeux d’argent que les sénateurs Les Républicains ont proposé une loi pour permettre l’ouverture de nouveaux casinos. Rappelons que l’existence de casinos est une exception au principe de prohibition des jeux d’argent et de hasard, notamment avec la loi Évin, en raison précisément de la nécessaire protection de la santé, et en particulier de celle des mineurs. L’ouverture de casinos est donc aujourd’hui limitée à certaines communes.

Nous avons aujourd’hui en France 203 casinos sur le territoire, ce qui représente déjà 40 % du parc européen. Ainsi, les auteurs de cette proposition de loi considèrent que la législation actuelle serait à l'origine d'inégalités territoriales non justifiées. C'est prétendument pour pallier ces inégalités qu'ils souhaitent étendre la possibilité d'implanter des casinos dans des départements ruraux du centre de la France qui ont développé une activité touristique en lien avec l'équitation, ce qui concerne seulement deux communes. Par coïncidence, en 2019, l'une d'elles avait déjà reçu la promesse de la part de Macron de permettre la création d'un casino. Durant son examen au Sénat, son champ d'application a été opportunément élargi, ouvrant donc la voie à la multiplication des dérogations et à la libéralisation totale des conditions d'ouverture de casinos.

Premièrement, l'argument des inégalités territoriales est fallacieux, puisque celles-ci perdureraient dans bien d'autres domaines, avec de plus grands impacts sur les personnes et l'accès aux services publics, par exemple, pour les communes qui ne remplissent pas les conditions de cette proposition de loi.

Deuxièmement, il y a un réel enjeu en termes de santé publique, puisque les joueurs dépendants au jeu représentent 76 % du chiffre d'affaires des casinos, selon l'association Addictions France, qui considère que, si une telle loi était adoptée, elle augmenterait automatiquement le nombre de joueurs problématiques, au détriment de la santé publique et des familles, qui endurent jusqu'à l'explosion les effets de la dépendance de l’un de leurs membres.

Troisièmement, les rédacteurs du texte usent de l'argument du financement des communes, ce qui est d'une profonde mauvaise foi. Il est inacceptable de compenser la baisse des dotations aux collectivités par le développement de casinos représentant un danger de santé publique et encourageant les pratiques addictives. Il serait obscène, pour un parti qui a refusé d'indexer la dotation globale de fonctionnement sur l'inflation, de soutenir une telle logique par l’argument du financement des communes.

Nous espérons, madame la ministre déléguée, que la santé publique passera pour une fois avant cet ultralibéralisme de votre politique qui veut faire de la France un casino géant, et nous proposerons à cet effet un amendement de suppression pour nous débarrasser de cette loi complètement inadaptée aux besoins des collectivités territoriales.

Mme Anne-Laure Blin (LR). Le texte que nous examinons ce soir vise à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos. On peut bien parler d'inégalités territoriales, car seules quelques configurations permettent aujourd'hui l'ouverture de tels établissements. En effet, depuis 1836 sont prohibés les jeux de hasard et de loterie, et l'activité des jeux d'argent et des casinos est strictement encadrée, circonscrite aux stations thermales, balnéaires et climatiques ou aux villes principales d'agglomérations de plus de 500 000 habitants ayant des activités touristiques et culturelles particulières.

Cette proposition de loi vise donc à permettre une autre possibilité d'installation dans les communes disposant d'une infrastructure équestre et d'événements hippiques, et comptant dans leur périmètre un ou plusieurs éléments du patrimoine matériel ou immatériel propriétés de l’Institut français du cheval et de l'équitation.

S'il n’est évidemment pas question de remettre en cause le bien-fondé d’un encadrement strict qui répond à la nécessité de lutter contre les risques d'atteinte à l'ordre public et à l'ordre social, ainsi qu’aux conduites addictives, le dispositif proposé vise à accompagner de vrais projets structurants de nos territoires en lien étroit avec la filière équestre.

C'est la raison pour laquelle le Sénat a adopté ce texte, à l'initiative de nos deux collègues Les Républicains du Maine-et-Loire. Cette proposition arrive ainsi devant nous grâce à la mobilisation de notre collègue Frédérique Meunier et au groupe Les Républicains, qui a souhaité la faire inscrire à l'ordre du jour de notre assemblée.

Députée de Saumur, je sais que, depuis près de trente ans ses élus ont tenté en vain de permettre à la ville d'être dotée d'un casino. Dans les années 2000, cette idée de Jean-Paul Hugot, sénateur maire RPR de la commune, a été largement soutenue, mais s'est heurtée aux difficultés réglementaires. Le flambeau a ensuite été repris par la majorité du maire Michel Apchin, qui a obtenu pour la commune le cadre juridique de station classée de tourisme.

Pouvoir développer un projet de casino est un atout indéniable pour un territoire touristique et, évidemment, une source de ressources financières importantes dans une période où les budgets sont de plus en plus réduits pour nos collectivités. Nous avons la chance d'avoir sur le territoire national plusieurs sites disposant d'une activité équestre importante. C'est notamment le cas de Saumur qui, depuis plus de deux cents ans, avec le Cadre noir, participe au rayonnement international de l'art équestre français.

L'acteur principal du tourisme est l’IFCE, organe public au service de la filière équine française, qui assure la gestion du Cadre noir de Saumur et d'une vingtaine de haras nationaux, et est dépositaire d’un patrimoine matériel et immatériel équestre unique qu’il lui appartient de valoriser.

Cette proposition de loi accompagne ainsi un projet structurant de territoire tout en soutenant activement une filière dont l'État s'est désengagé depuis plusieurs années. La filière équestre a en effet besoin de nouvelles ressources, faute de quoi ses activités et ses infrastructures seraient en péril. Il ne peut être en effet envisagé de laisser les collectivités territoriales entretenir et financer seules ses activités et ses infrastructures.

Il est urgent, pour la filière équestre comme pour nos territoires, de trouver de nouvelles sources de financement, et ce texte législatif y contribue. Lors de son examen au Sénat, les recettes fiscales nettes ont été estimées à près de 1,2 million pour Saumur et 400 000 euros pour Arnac-Pompadour. Ces finances permettront indéniablement de soutenir des filières hippiques. L'implantation de nouvelles structures de casinos sera inévitablement source de nombreux emplois directs et indirects, véritables atouts pour toute une agglomération.

Dans les pays de la Loire, et particulièrement en Anjou, nos filières équestres font notre fierté. Elles sont une composante importante du développement de nos territoires ruraux. Par notre vote de ce soir, le législateur démontrera sa volonté d'accompagner nos territoires et ceux qui œuvrent à leur développement depuis plusieurs années. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains appelle à soutenir ce texte avec conviction.

M. Gérard Leseul (SOC). Nos collègues sénateurs du Maine-et-Loire et de la Corrèze ont fait adopter une proposition de loi permettant l'ouverture, dans leurs départements et dans seulement deux communes, de nouveaux casinos. Vouloir réduire des inégalités territoriales, comme l’annonce le titre du texte, en étendant le régime d'autorisation à 0,006 % des communes, si mes calculs sont bons, interroge sur les motivations réelles de ce texte.

Ces motivations seraient d'abord économiques, à en croire un exposé des motifs largement centré sur la création d'emplois. Pourtant, une étude très intéressante sur le secteur de jeux publiée en 2022 dans la Revue d'économie politique bat en brèche cet argumentaire. En effet, l'analyse macroéconomique de l'emploi tend à démontrer que la dépense de consommation dans les jeux génère significativement moins d'emplois dans l'économie que la dépense de consommation dans les autres secteurs domestiques. À niveau égal, le secteur génère deux fois moins d'emplois directs que le reste de l'économie et, même si certaines collectivités locales auraient tout intérêt à l'ouverture de casinos, chaque unité de dépenses des ménages dans les autres secteurs domestiques génère significativement plus d'emplois que la même dépense dans le secteur des jeux. C'est donc finalement l'un des secteurs les moins intéressants dans lesquels investir si l'objectif réel est la création d'emplois.

La même étude démontre que ce secteur crée plus d'emplois indirects non locaux que d’emplois directs en lien avec les territoires ainsi défendus. La motivation de ce texte est donc peut-être plutôt du côté des retombées fiscales locales que généreraient de tels projets – mais avec très peu de bénéficiaires.

Surtout, le texte fait totalement abstraction de l’impact social de tels projets. Il y a dix ans, la première évaluation de l’impact socio-économique des jeux d’argent et de hasard en France estimait le nombre de chômeurs lié aux jeux problématiques à 39 342, soit à peu près 6,5 % des joueurs problématiques, ce qui induirait un coût de 2,6 milliards pour les comptes sociaux. Dix ans après, et alors que ce nombre a sans doute explosé du fait du développement des jeux en ligne, le secteur ne compte qu’un peu plus de 46 000 emplois directs et indirects. Il est donc fort probable que ce secteur détruise plus d’emplois qu’il n’en crée.

Enfin, cette activité engendre de nombreux autres coûts pour la société. Ainsi, les dépenses sociales liées à la prise en charge du surendettement, d’éventuelles violences domestiques, une moindre productivité professionnelle et scolaire, un déséquilibre du sommeil et de l’alimentation ou d’autres souffrances psychiques peuvent prendre des proportions considérables. De même, la lutte contre les activités de blanchiment et de fraude fiscale liées à la nature du secteur présente un coût élevé.

Selon nous, cette proposition de loi ne réduira aucune inégalité territoriale et a plus de chances de détruire des emplois que d’en créer. Les territoires concernés pourraient créer plus d’emplois au moyen de n’importe quelle autre activité économique domestique. Elle ne ferait qu’accroître le nombre de nos concitoyens concernés par les addictions aux jeux, qui détruisent les familles. Le groupe Socialistes votera donc contre ce texte.

M. Jean-Luc Warsmann (LIOT). Notre groupe est favorable à cette proposition de loi, qui réduira les inégalités entre les territoires. Pour ma part, je mène depuis de nombreuses années le combat pour obtenir l’autorisation d’ouvrir un casino à Sedan. Cette ouverture était prévue par le plan de relance dit « pacte Ardennes » signé le 15 mars 2019 par M. Lecornu et Mme Buzyn, qui représentaient le Gouvernement. Toutefois, cela impliquait de modifier la loi. Depuis lors, la situation a peu avancé. Le Premier ministre de l’époque, Édouard Philippe, avait demandé à l’Inspection générale de l’administration (IGA) de conduire une mission sur la législation sur les casinos. Celle-ci avait constaté que les casinos, en France, se trouvaient quasiment tous dans des zones riches, et qu’il n’y en avait quasiment aucun dans la diagonale du vide. Par ailleurs, elle avait relevé que l’on n’a jamais considéré un casino, en France, comme un outil de développement du territoire.

Lors de la précédente législature, j’avais déposé des amendements à ce sujet qui ont tous été considérés comme des cavaliers budgétaires. Lorsque j’ai appris l’initiative très heureuse du Sénat, j’ai donc travaillé avec Else Joseph, sénatrice des Ardennes, qui a introduit l’amendement relatif à l’ouverture de casinos dans les communes classées communes historiques dans un département frontalier. Avec cette proposition de loi, nous allons offrir l’occasion à quatre territoires de trouver une nouvelle source de développement, nous réduirons les inégalités et favoriserons le tourisme, l’économie et la culture. Je suis heureux d’avoir pu contribuer à ce texte et le voterai avec enthousiasme. Je remercie les rapporteures, ainsi que le Gouvernement, pour son appui.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, présidente. Le groupe Horizons est favorable à ce texte. C’est une très bonne nouvelle pour ceux de nos collègues qui soutiennent ce projet depuis des années, mais également pour les maires concernés, qui doivent se dire, à la veille de l’ouverture de leur Congrès, que nous allons leur offrir un bien joli cadeau. Même s’il n’est pas simple de négocier des délégations de service public pour l’implantation des casinos et qu’il faut être très vigilant, je me réjouis de cette possibilité ouverte aux communes.

Mme Frédérique Meunier, rapporteure. Je suis surprise que le groupe Socialistes soit opposé au texte au sein de notre assemblée alors qu’il l’a voté au Sénat. Il est question ici de territoires qui, comme Saumur et Arnac-Pompadour, vont mal, se battent depuis des années pour trouver des solutions, obtenir des compensations. La filière du cheval se délite peu à peu. À Pompadour, le Club Med a fermé il y a une dizaine d’années. Il nous appartient aussi, en notre qualité de député, de voter des lois pour accompagner nos territoires. Je regrette que vous soyez restés dans vos a priori et que vous ne nous ayez pas écoutées. Je regrette que le groupe Socialistes ne nous accompagne pas dans cette démarche sociale, que l’on pourrait presque qualifier d’humanitaire eu égard au risque que certaines régions, demain, disparaissent.

Mme Laëtitia Saint-Paul, rapporteure. Tout a été pensé, en la matière, avant l’avènement du jeu en ligne. L’actualité nous le rappelle, puisque le groupe Barrière vient de porter plainte pour usage illégal de son nom et usage frauduleux du jeu d’argent en ligne. Les communes concernées par le texte constitueront peut-être un laboratoire avant la refonte du jeu d’argent, en lien avec les salles de jeux parisiennes. Comme nous l’ont dit les syndicats de casinos, l’aménagement du territoire terrestre assèche l’offre illégale. Dans le monde réel, on ne peut entrer dans un casino que si l’on est en mesure de prouver que l’on est majeur. Il faut prendre en compte les évolutions intervenues au cours des trente dernières années dans le domaine des jeux en ligne et donner sa chance au monde réel.

Il a été dit que l’ouverture de casinos visait à compenser le désengagement de l’État. À cet égard, je tiens à rappeler que le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 prévoit une hausse de 220 millions des crédits affectés à la dotation globale de fonctionnement (DGF). Il consent un effort particulier en faveur des zones rurales : je pense notamment à l’abondement de 100 millions du plan France ruralités.

Nous avons opéré un fléchage sur la filière du cheval. Le directeur de l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE) nous a indiqué que les crédits injectés à Pompadour dans la filière du cheval ne bénéficieraient pas, par exemple, au château de Pompadour. C’est plus compliqué qu’il n’y paraît. Le travail fin d’analyse du terrain est de nature à lever les inquiétudes. Je vous demande de nous faire confiance. Je le dis en particulier à notre collègue socialiste, Joël Bigot ayant voté le texte au Sénat.

Mme Frédérique Meunier, rapporteure. J’ajoute que les casinos sont les premiers employeurs des intermittents du spectacle. Cela représente 20 000 emplois par an.

Article unique (Art. L. 321-1 du code de la sécurité intérieure) : Élargissement des conditions d’ouverture de casinos dans certaines communes

Amendement de suppression CL2 de M. Jean-François Coulomme

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). Nous sommes absolument opposés à ce texte, à plusieurs titres. D’abord, les jeux d’argent et de hasard entraînent des addictions et de terribles dégâts au sein des familles. Ensuite, on a le sentiment que vous proposez une loi ad hoc, qui s’inscrit dans une logique de clientélisme total. Les élus de certains territoires ont certainement fait l’objet de pressions. Si on me proposait, dans ma ville de Chambéry, d’ouvrir un casino, je m’y opposerais. Le fait que nous ayons des spécialités – par exemple, la tomme de Savoie – ne justifie pas l’ouverture d’un casino ! Pourquoi ferait-on une exception pour l’art équestre ? Il faudrait alors en ouvrir partout !

Les collectivités territoriales souffrent en effet d’un manque de financements et ne savent plus à quel saint se vouer. Les 200 millions que vous évoquez s’apparentent un peu à une arnaque lorsqu’on voit l’effet de l’inflation sur la main-d’œuvre et les matériaux. Alors oui, lorsqu’on met tout le monde au pain sec et à l’eau, on offre en échange du pain rassis et des jeux. La politique de ce gouvernement consiste à affaiblir l’État pour enrichir des intérêts privés et des copains. Nous sommes opposés à la France start-up, qui plus est dans le domaine des jeux de hasard. En conséquence, nous demandons la suppression pure et simple de l’article.

Mme Laëtitia Saint-Paul, rapporteure. Avis défavorable. En l’occurrence, c’est le terrain qui commande : nous ne faisons qu’accompagner des projets des collectivités territoriales. À Saumur, le premier conseil municipal à avoir délibéré sur le sujet remonte à 1992. Voilà plus de trente ans que la question est sur la table. Je ne peux que remercier le Gouvernement d’avoir accompagné les projets locaux. Plus de 150 communes ont le droit d’ouvrir un casino mais ne souhaitent pas le faire. En l’occurrence, une poignée de collectivités le souhaitent mais, jusqu’alors, n’en avaient pas le droit.

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). Nous continuerons à nous opposer au principe de substitution du financement sain des collectivités locales par ce type de mécanisme. Je n’en veux pas aux députés qui se laissent séduire par le chant des sirènes, par les promesses d’animation et de création d’emplois. Vous faites preuve d’honnêteté vis-à-vis des gens qui vous ont consultées dans vos territoires, mais peut-on définir une politique applicable à l’ensemble de notre pays à partir de ces cas particuliers ? Il y a quelque chose qui, d’un point de vue moral, ne va pas.

Mme Frédérique Meunier, rapporteure. Il ne vous a pas échappé que l’organisation des courses constitue un jeu d’argent ; pour autant, ce n’est pas un fromage. Il en va de même des casinos. En outre, on parle ici de territoires en grande difficulté, ce qui n’est pas le cas, me semble-t-il, du vôtre. Par ailleurs, je rappelle que des contraintes considérables sont imposées aux casinos : pour ne citer que deux exemples, les mineurs et les personnes souffrant d’addiction aux jeux n’y ont pas accès.

Le risque vient des jeux en ligne. À l’approche des Jeux olympiques, en Seine-Saint-Denis et dans d’autres départements voisins, où vous êtes fortement implantés, des millions d’euros ont été dépensés : des jeux parallèles en ligne, addictifs, s’y tiendront mais, curieusement, je ne vous ai pas beaucoup entendu vous exprimer sur ce sujet. C’est un peu trop facile de critiquer les départements qui éprouvent de vraies difficultés, alors que vous laissez faire dans vos départements.

Mme Laëtitia Saint-Paul, rapporteure. Mieux vaut réguler que prohiber. Les pouvoirs publics ne prennent pas la question de l’addiction à la légère. Les opérateurs, casinos et clubs de jeux soumettent chaque année à l’Autorité nationale des jeux (ANJ) leur plan d’action en vue de prévenir le jeu excessif, le jeu des mineurs et de favoriser une pratique raisonnable du jeu. Les casinos font l’objet de contrôles réguliers et très approfondis. Lorsque nous venons à Paris, nous avons à cœur, comme vous tous, d’être à la hauteur de l’espoir que les gens placent en nous. C’est un projet qui remonte à trente ans et que je porte, de cavalier législatif en cavalier législatif, de proposition de loi en proposition de loi... Je suis fière de défendre ce texte, d’être allée sur le terrain, d’avoir analysé les choses dans le détail, d’avoir mené beaucoup d’auditions. Je vous demande de placer votre confiance en nous.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article unique non modifié.

L’ensemble de la proposition de loi est ainsi adopté.

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos (n° 1239) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 

 


—  1  —

 

   Personnes entendues

 

   M. Alain Tisseuil, maire d’Arnac-Pompadour

   M. Jackie Goulet, maire de Saumur

   M. Vincent Ploquin-Duchefdelaville, adjoint de la directrice des libertés publiques et des affaires juridiques

   M. Éric Ferri, sous-directeur des polices administratives

   M. Stéphane Piallat, chef du service central courses et jeux de la direction nationale de la police judiciaire

   M. Olivier Raineau, président de Casinos de France

   M. Philippe Bon, délégué général de Casinos de France

   M. Luc Le Borgne, président de l’Association des Casinos Indépendants Français

   M. Jean-Roch Gaillet, directeur général

   Mme Florence Méa, directrice générale adjointe

 

 


([1]) Créé le 10 mars 1825 par l’ordonnance royale de Charles X, le Cadre noir est un corps de cavaliers d’élite situé à Saumur. Il représente l’équitation de tradition française inscrite en 2011 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).

([2]) Articles L. 320-1, L. 324-3 et L. 324-4 du code de la sécurité intérieure.

([3]) Direction des libertés publiques et des affaires juridiques et service central des courses et jeux de la direction nationale de la police judiciaire.

([4]) Les autres jeux d’argent et de hasard, dont la vente est proposée dans des points fixes ou de façon dématérialisée, sont régulés par l’Autorité nationale des jeux créée par l’ordonnance n° 2019-1015 du 2 octobre 2023.

([5]) Amendement dit « Chaban-Delmas » à la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 ciblant la ville de Bordeaux.

([6]) Article 24 de la loi du 31 mars 1931.

([7]) Article 82 de la loi du 31 juillet 1920 portant fixation du budget général.

([8]) La loi n° 2017-257 du 28 février 2017 autorise cependant l’expérimentation du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2024 de l’exploitation de clubs de jeux à Paris.

([9]) Régie par les articles R. 321-8 à R. 321-12 du code de la sécurité intérieure.

([10]) Cour des comptes, Les jeux d’argent et de hasard : un secteur en mutation, des enjeux de régulation, septembre 2023, p. 13.

([11]) Ibid, p. 28.

([12]) Les casinos étant essentiellement situés dans des stations balnéaires ou thermales.

([13]) En 2023, 38 départements sont dépourvus de casinos.

([14]) Exposé des motifs de la proposition de loi.

([15]) Propositions de loi n° 545 et n° 552 enregistrées à la présidence de l’Assemblée nationale le 29 novembre 2022.

([16]) https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/saumur-49400/saumur-emmanuel-macron-soutient-le-projet-de-casino-6286009

([17]) https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/saumur-49400/saumur-aura-son-casino-pendant-ce-quinquennat-l-engagement-d-emmanuel-macron-5813440c-821e-11ed-b3eb-6d22061597a4

([18]) Lors de son audition par vos rapporteures, le maire d’Arnac-Pompadour a indiqué que les événements équestres organisés sur la commune accueillent annuellement près de 40 000 visiteurs.

([19]) Amendement n° COM-2.

([20]) Exposé sommaire de l’amendement n° COM-2.

([21]) Ibid.

([22]) L’amendement n° COM-2 précise que l’organisation d’au moins dix évènements annuels à rayonnement national ou international doit avoir eu lieu entre le 1er janvier 2018 et le 1er janvier 2023.

([23]) Association à but non-lucratif chargée d’organiser des courses dans un hippodrome.

([24]) Amendement n° 2.

([25]) Un rapport d’évaluation de l’expérimentation est actuellement conduit par l’inspection générale de l’administration.

([26]) Sénat, compte rendu intégral de la séance du 16 mai 2023.

([27]) Si cinq départements frontaliers sont dépourvus de casinos (la Meurthe-et-Moselle, les Ardennes, le Territoire de Belfort, l’Aisne et la Meuse), seuls les départements des Ardennes et de la Meurthe-et-Moselle respectent le critère démographique relatif à l’existence d’une intercommunalité de plus de 100 000 habitants.

([28]) Lors de l’examen de la proposition de loi en séance publique le 16 mai 2023, le sénateur M. Marc Laménie (Les Républicains) a expressément mentionné la ville de Sedan comme étant susceptible d’accueillir un casino.