N° 1929

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 novembre 2023.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LA PROPOSITION DE LOI,
portant mesures d’urgence pour remédier à la crise du logement (n° 1793)

PAR M. Thibault BAZIN

Député

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 Voir le numéro : 1793.


SOMMAIRE

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Pages

avant-propos

commentaire DES ARTICLES

Article 1er (article 6 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs) Suspension du critère de décence énergétique pour les logements d’une copropriété ayant adopté un plan pluriannuel de travaux

A. les difficultés propres aux copropriétés pour engager des travaux de rénovation

B. la suspension de l’indécence énergétique à l’adoption d’un ppt visant l’amélioration de la performance énergétique

Article 2 (article 6 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs) Report du calendrier de mise en œuvre des obligations de décence énergétique

Article 3 (article 200 quater AB [nouveau] du code général des impôts) Création d’un crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des logements

Article 4 (article 5 de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement) Modification des dispositions relatives au droit au maintien dans les lieux pour les héritiers de titulaires d’un bail soumis au régime de la loi de 1948

Article 5 (article 11-2 [abrogé] de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs) Restriction du droit à la prorogation du bail dans le cas de la mise en copropriété d’un immeuble

Article 6 (article 200 quindecies [nouveau] du code général des impôts) Création d’un crédit d’impôt au titre des annuités de remboursement des emprunts immobiliers pour l’achat d’un logement affecté à la résidence principale

Article 7 (article 793 du code général des impôts) Exonération des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour la transmission d’un immeuble acquis neuf ou en état futur d’achèvement et destiné à être affecté la résidence principale.

Article 8 (articles L. 31-10-2, L. 31-10-3, L. 31-10-4, L. 31-10-9 et L. 31-10-10 du code de la construction et de l’habitation et article 90 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011) Dézonage du PTZ et augmentation des plafonds du coût total de l’opération et des ressources déterminant l’éligibilité des ménages

Article 9 (article 199 novovicies du code général des impôts) Prolongation du dispositif « Denormandie »

Article 10 (article 199 novovicies du code général des impôts) Généralisation du dispositif du « Pinel breton »

Article 11 (article 199 novovicies du code général des impôts) Rétablissement des taux du dispositif « Pinel »

Article 12 (article L. 831-2 [abrogé] du code de la construction et de l’habitation) Rétablissement du volet accession des aides personnelles au logement

Article 13 Gage

examen en commission

Liste des personnes auditionnées

 


 

   avant-propos

 

Le secteur du logement connaît actuellement une crise sans précédent à laquelle le Gouvernement n’a apporté, jusqu’à présent, aucune réponse satisfaisante.

Cette crise est d’abord une crise de la demande avec la hausse brutale des taux d’intérêt : le taux d’intérêt moyen pour un crédit immobilier d’une durée de 20 ans est ainsi passé de 0,99 % en décembre à 2021 à 4,19 % en octobre 2023 ([1]). Cette hausse des taux n’est pas compensée aujourd’hui par une baisse suffisante des prix de l’immobilier. En conséquence, le pouvoir d’achat immobilier des Français s’est sensiblement affaibli et le nombre de prêts immobiliers a chuté à 9,2 milliards d’euros en septembre 2023 contre 16,5 milliards d’euros en septembre 2022.

évolution du pouvoir d’achat immobilier et variation des facteurs par rapport à décembre 2007 et décembre 2021 pour un ménage disposant d’un revenu médian et empruntant au maximum de sa capacité

Source : Banque de France.

La Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) prévoit un nombre de ventes de 885 000 logements en 2023 soit une baisse d’environ 20 % par rapport à 2022. La production de crédits à l’habitat s’érode : elle est passée de 10 % du PIB en 2021 à seulement 6 % du PIB en 2022. Cette crise du financement et de la demande est non seulement une crise de l’accession à la propriété – des dizaines de milliers de Français abandonnent leur projet d’acheter leur résidence principale ce qui n’est pas sans conséquence sur le marché locatif ([2]) – mais aussi une crise de l’investissement locatif : si le nombre de ventes de logements neufs s’effondre de plus de 30 % entre le troisième trimestre 2022 et le troisième trimestre 2023 selon les données de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), ce chiffre est de plus de 50 % pour les investisseurs particuliers.

Plus inquiétant encore, cet effondrement conjoncturel du secteur se conjugue à une crise de l’offre plus structurelle qui résulte de la mise en œuvre du « zéro artificialisation nette », qui entrave les territoires ruraux dans leurs projets de développement, et de la réticence des élus locaux à densifier les centres urbains. Le nombre d’autorisations de logements diminue en septembre 2023 de près de 25 % en dessous du niveau moyen des douze derniers mois précédant le premier confinement selon les données du Service des données et études statistiques (SDES) des ministères chargés de l’environnement, de l’énergie, de la construction, du logement. Cette baisse de l’offre risque d’avoir des conséquences majeures pour les Français dans les cinq prochaines années alors que les besoins en logements dans les zones tendues, mais aussi dans certains territoires périurbains et ruraux attractifs, sont toujours aussi reconnus comme importants.

Les Français sont directement touchés par cette crise. Mais c’est aussi tout un secteur qui est en souffrance. La Fédération française du bâtiment (FFB) estimait, en septembre 2023, à 150 000 le nombre de destructions de postes qui pourrait être enregistré à l’horizon 2025 si la crise du logement neuf s’installe durablement. Et ce chiffre n’inclut pas les emplois qui seront supprimés dans les agences immobilières ou chez les promoteurs immobiliers.

On aurait pu penser que la rénovation énergétique constituerait un relais de croissance substantiel. Il n’en est rien. Les dépenses d’amélioration-entretien devraient faiblement augmenter en 2023. Le nombre d’entreprises certifiées RGE (« reconnues garant de l’environnement »), certification nécessaire pour permettre aux particuliers de bénéficier des aides publiques, pourrait accuser une nouvelle baisse en 2023 alors que moins de 10 % des entreprises du bâtiment avaient la certification RGE en 2022. Le nombre de rénovations globales soutenues par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) au 31 décembre 2023 pourrait même être en diminution par rapport à 2022.

Crise de l’investissement, crise de l’accession, crise de l’offre, panne de la rénovation énergétique, mais aussi crise du marché locatif avec un calendrier de sortie des « passoires énergétiques » qui paraît intenable pour les professionnels et risque d’aggraver le manque de logements à louer, la crise du logement est protéiforme et les réponses du Gouvernement l’aggravent : rabotement du dispositif « Pinel », recentrage du prêt à taux zéro (PTZ) qui ne pourra plus bénéficier aux zones rurales, maintien d’un calendrier de sortie des passoires énergétiques qui aggravent les tensions du marché locatif, etc.

Cette proposition de loi part d’un présupposé opposé : la crise du logement exige des mesures d’urgence fortes et immédiates pour le secteur dans son ensemble, sans opposer la production neuve à la rénovation, le logement collectif à la maison individuelle, ou encore l’investisseur à l’accédant à la propriété.

Les articles du titre III visant à favoriser le secteur de la construction et l’achat de logements. Certaines mesures visent directement à soutenir les accédants à la propriété : le dézonage du PTZ et l’augmentation de son montant (article 8), le rétablissement du volet accession des aides personnelles au logement (article 12). D’autres soutiennent plus spécifiquement les investisseurs comme la prolongation du dispositif « Denormandie » (article 9), le rétablissement des taux du dispositif « Pinel » et la généralisation de l’expérimentation du « Pinel breton » (articles 10 et 11). Enfin, deux mesures soutiennent la demande de logements neufs par la solvabilisation des acquéreurs (crédit d’impôt sur les annuités d’emprunt proposé à l’article 6) ou le fléchage d’une partie de l’épargne vers l’achat de logements neufs (exonération de droits de mutation à titre gratuit proposée à l’article 7).

La facilitation des opérations de rénovation (titre Ier) prend la forme d’un nouveau crédit d’impôt pour renforcer le soutien de l’État aux particuliers au regard des échecs des dispositifs de l’ANAH (article 3). Dans ce cadre, les articles 1er et 2 visent à éviter d’approfondir les tensions sur le marché locatif : la sortie annoncée du marché locatif de centaines de milliers de logements en raison des critères d’indécence énergétique instaurés par la loi dite « Climat et résilience » ([3]) doit conduire aujourd’hui à revoir le calendrier fixé et à donner les outils aux propriétaires pour planifier les travaux nécessaires.

Enfin, les articles du titre II visent à fluidifier le marché en encadrant le droit au maintien dans les logements réglementés par la loi dite « de 1948 » ([4]) (article 4) et en supprimant la prolongation du bail en cas de mise en copropriété (article 5).

 


   commentaire DES ARTICLES

Article 1er
(article 6 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs)
Suspension du critère de décence énergétique pour les logements d’une copropriété ayant adopté un plan pluriannuel de travaux

Article supprimé par la commission

 

Le présent article suspend, pour les logements faisant partie d’un immeuble soumis au statut de la copropriété, l’application des critères de décence énergétique en cas d’adoption d’un plan pluriannuel de travaux.

Cette suspension vaut durant la durée d’exécution du plan pluriannuel de travaux.

Le plan pluriannuel de travaux doit prévoir des travaux qui, une fois réalisés, permettraient d’atteindre une classe énergétique justifiant un niveau de performance décent.

I.   L’absence de cohérence entre le calendrier de mise en œuvre des critères de décence énergétique et celui d’élaboration des plans pluriannuels de travaux

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (loi dite « Climat et résilience ») prévoit un calendrier ambitieux de résorption des logements peu efficients du point de vue énergétique (classes E, F ou G) sur le marché locatif : en l’absence de rénovation, ces logements seront progressivement frappés d’indécence énergétique à partir du 1er janvier 2025.

Ce calendrier de rénovation très ambitieux n’est pas adapté à la temporalité du plan pluriannuel de travaux (PPT) qui constitue l’outil à disposition des copropriétés pour identifier, planifier et financer les travaux de rénovation énergétique pour une durée de dix ans.

A.   les critères d’indécence énergétique instaurés par la loi dite « climat et résilience »

L’article 160 de la loi « Climat et résilience » a renforcé l’exigence de décence énergétique, prévue à l’article 6 de loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, en prévoyant qu’un bailleur doit mettre à la disposition du locataire un logement décent devant respecter « un niveau de performance minimal ».

Ce niveau de performance renvoie aux classes de performance énergétique et thermique définies à l’article L. 173-1-1 du code de la construction et de l’habitation (CCH). Il existe sept classes allant des lettres A (logement extrêmement performant) à G (logement extrêmement peu performant) selon l’ordre alphabétique. Le niveau de performance est exprimé en kilowattheures d’énergie primaire par mètre carré et par an, s’agissant de la consommation énergétique, et en kilogramme de dioxyde de carbone par mètre carré et par an, s’agissant des émissions de gaz à effet de serre. Les étiquettes de performance énergétique et thermique sont établies par le diagnostic de performance énergétique (DPE), réalisé par un diagnostiqueur.

L’article 160 de la loi « Climat et résilience » prévoit que les logements de métropole ([5]) soient frappés d’indécence énergétique lorsqu’ils atteignent :

 la classe énergétique « G », à compter du 1er janvier 2025 ;

 la classe énergétique « F » ou « G » à compter du 1er janvier 2028 ;

 la classe énergétique « E », « F » ou « G » à compter du 1er janvier 2034.

Des exceptions sont prévues lorsque le propriétaire est capable de montrer que les travaux nécessaires pour atteindre une performance énergétique suffisante n’ont pas été réalisés en raison de l’absence de décision du syndicat de copropriétaires « malgré ses diligences en vue de l’examen de résolutions tendant à la réalisation de travaux relevant des parties communes ou d’équipements communs », et en dépit de la réalisation de l’ensemble des travaux nécessaires dans les parties privatives du logement. Des exceptions sont également prévues en cas de contraintes patrimoniales et architecturales spécifiques.

Au-delà de la possibilité pour un locataire d’exiger la réalisation de travaux permettant de rendre décent un logement qui ne l’est pas, un propriétaire ne peut pas signer ou renouveler un bail lorsque ce dernier arrive à échéance, si le logement est considéré comme étant indécent. Selon la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, les articles 1214 et 1215 du code civil conduiraient à ne pas remettre en cause les baux en cours pour les logements d’étiquette énergétique « G » au 1er janvier 2025.

B.   le plan pluriannuel de travaux

Le plan pluriannuel de travaux est défini à l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

1.   Le PPT une obligation qui se met progressivement en place

Prévu pour une durée de 10 ans pour les copropriétés dont le bâti date d’il y a au moins 15 ans, le syndicat de copropriétaires est dispensé de cette mise en place si le diagnostic technique global (DTG) ne fait apparaître aucun besoin de travaux au cours des 10 années qui suivent son élaboration. Conformément à l’article 171 de la loi dite « Climat et résilience », le PPT est obligatoire pour les syndicats de copropriétaires :

 comprenant plus de 200 lots depuis le 1er janvier 2023 ;

 comprenant un nombre de lots entre 51 et 200 lots à partir du 1er janvier 2024 ;

 comprenant 50 lots maximum à partir du 1er janvier 2025.

Le syndic est tenu d’inscrire à l’ordre du jour de l’assemblée générale les modalités d’élaboration du projet de PPT votées à la majorité simple. Le projet élaboré est présenté à la première assemblée qui suit son élaboration. Son adoption en tout ou en partie relève d’un vote à la majorité absolue.

S’il a été adopté, le syndic doit inscrire à chaque assemblée annuelle approuvant les comptes les décisions de mise en œuvre de l’échéancier des travaux.

Le projet de PPT doit être établi par un professionnel dont les compétences, la formation et les garanties professionnelles et de déontologie sont déterminées par le décret n° 2022-663 du 25 avril 2022.

2.   Le PPT prévoit notamment les travaux nécessaires pour améliorer la performance énergétique ainsi que la classe énergétique pouvant être atteinte par la réalisation des travaux prévus

Le PPT doit comprendre une analyse du bâti et des équipements de l’immeuble ainsi que le DPE collectif de l’îlot ([6]). Le diagnostic de performance énergétique collectif inclut notamment :

– la quantité d’énergie effectivement consommée ou estimée et les émissions de gaz à effet de serre induits par cette consommation ;

– une information sur les conditions d’aération ou de ventilation ;

– des recommandations destinées à améliorer les performances du bâti et du montant des dépenses théoriques de l’ensemble des usages énumérés dans le diagnostic.

Outre la liste des travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble, à la préservation de la santé et de la sécurité des occupants, le PPT comporte la liste des travaux nécessaires à la réalisation d’économies d’énergie et l’estimation des classes en matière de consommation énergétique d’un côté et d’émissions de gaz à effet de serre de l’autre, qui pourraient être atteintes en cas de réalisation des travaux. Il estime le coût des travaux à réaliser et propose enfin un échéancier de travaux sur la totalité de la durée du PPT.

3.   La constitution d’un fonds de travaux pour financer les opérations prévues par le PPT

L’article 14-2-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis prévoit pour chaque copropriété la constitution d’un fonds de travaux alimenté par les contributions annuelles obligatoires des différents copropriétaires pour faire face aux travaux concernant les parties communes. Chaque copropriétaire contribue au fonds selon les mêmes modalités que celles décidées par l’assemblée générale pour le versement des provisions du budget prévisionnel.

Ce fonds de travaux permet notamment de financer l’élaboration du PPT ainsi que les travaux prévus par le PPT. Ainsi, si le PPT n’emporte pas le vote des travaux de rénovation énergétique, qui doit être réalisé plus tard, sur la base de la présentation de devis rassemblés par le syndic ou le conseil syndical, il prévoit bien, de façon obligatoire, les financements nécessaires pour la poursuite des travaux.

II.   les logements dans une copropriété dont le syndicat a adopté un plan pluriannuel de travaux prévoyant d’atteindre un niveau de performance suffisant devraient pouvoir être réputés décents durant la période d’exécution du plan pluriannuel de travaux

De nombreux handicaps empêchent aujourd’hui les propriétaires de logements au sein d’une copropriété de réaliser les travaux à temps pour respecter le calendrier fixé par la loi dite « Climat et résilience ».

A.   les difficultés propres aux copropriétés pour engager des travaux de rénovation

Entre la décision de faire les travaux et leur réalisation effective, plusieurs mois voire plusieurs années peuvent s’écouler. En janvier 2022, la FNAIM a ainsi interrogé ses membres sur les difficultés à trouver des artisans qualifiés RGE (« reconnus garant de l’environnement ») pour réaliser les travaux de rénovation : 48 % des syndics constataient que les travaux mettaient 1 à 2 ans à être réalisés et, 21 % d’entre eux, plus de 2 ans à compter de la prise de décision d’engager les travaux. De nombreuses copropriétés commencent seulement à appréhender les enjeux de rénovation. L’échéance du 1er janvier 2025 fixant la sortie théorique du parc locatif des logements d’étiquette énergétique « G » en métropole ne pourrait pas être respectée par les copropriétés qui décideraient aujourd’hui d’entreprendre des travaux de rénovation globale.

Par ailleurs, la prise de décision pour réaliser les travaux de rénovation énergétique dans les assemblées générales de copropriété peut elle-même prendre du temps au regard des règles de majorité régies par la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Les copropriétaires n’ont pas nécessairement d’intérêt commun au regard des différences de DPE existants parfois au sein d’un même immeuble collectif.

Enfin, les difficultés de financement propres aux copropriétés privées et l’insuffisance du soutien budgétaire de l’ANAH (le dispositif « MaPrimeRénov’ Copropriétés » étant conditionné à la réalisation d’au moins 35 % d’économies d’énergie soit un niveau élevé à atteindre) ont jusqu’à aujourd’hui fortement ralenti le rythme de rénovation au sein des copropriétés.

B.   la suspension de l’indécence énergétique à l’adoption d’un ppt visant l’amélioration de la performance énergétique

Dans ces conditions, l’article 1er suspend le critère d’indécence lorsque la copropriété a adopté un plan pluriannuel de travaux permettant d’atteindre une classe énergétique pour l’immeuble suffisante, à la date de fin de mise en œuvre du PPT. Si le PPT ne prévoit pas la classe énergétique individuelle de chaque logement de la copropriété, le rapporteur a proposé par amendement que la classe énergétique établie par le DPE collectif s’applique au logement lorsque l’ensemble des travaux dans les parties privatives du lot, nécessaires pour l’obtention de ladite classe énergétique en complément des travaux prévus par le PPT dans les parties collectives, ont été réalisés.

Le rapporteur a également proposé par amendement que la suspension des critères de décence énergétique ne soit effective que pour le premier PPT adopté conformément aux délais prévus par l’article 171 de la loi « Climat et résilience », afin d’éviter tout effet d’aubaine.

Réalisé par un professionnel et prévoyant le DPE collectif pouvant être obtenu après la réalisation des travaux qu’il mentionne, le PPT constitue l’outil de planification idoine pour garantir les rénovations énergétiques. Il est à la fois le garant d’une ambition réelle de rénovation tout en offrant la visibilité calendaire suffisante pour mettre en œuvre les travaux nécessaires.

III.   la position de la commission

La commission a supprimé l’article 1er.

 

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Article 2
(article 6 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs)
Report du calendrier de mise en œuvre des obligations de décence énergétique

Article supprimé par la commission

 

Le présent article reporte la mise en œuvre des obligations de décence énergétique.

Il prévoit qu’un décret fixe le calendrier de mise en œuvre échelonnée de ces obligations à partir de 2030 alors que le calendrier instauré par l’article 160 de la loi « Climat et résilience » prévoit que les logements de classe « G », à partir du 1er janvier 2025, de classe « F », à partir du 1er janvier 2028, et de classe « E », à partir du 1er janvier 2034, soient frappés d’indécence énergétique.

I.   un calendrier intenable

Les organisations représentatives (FNAIM, Union nationale des propriétaires immobiliers – UNPI –) sont explicites : le calendrier de mise en œuvre des conditions de décence énergétique n’est pas tenable. Ce constat doit conduire à aller au-delà de la simple réponse apportée pour les copropriétés à l’article 1er.

Sur les 30 millions de résidences principales au 1er janvier 2023, environ 4,8 millions de logements (soit 15,7 % du parc de résidences principales) seraient des « passoires énergétiques » (étiquettes F ou G) selon la nouvelle estimation de l’Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE). Ces chiffres en baisse par rapport au 1er janvier 2022 pourraient refléter des effets de comportement tant des diagnostiqueurs immobiliers que des propriétaires.

répartition du parc de logements par classe énergétique au 1er janvier 2022

Statut d’occupation / Nombre de logements

(en milliers)

A

B

C

D

E

F

G

Total général

Passoires

Locataire (parc privé)

83

196

1 705

2 544

1 851

906

673

7 958

1 579

Locataire (parc social)

33

141

1 628

1 595

998

323

139

4 857

462

Propriétaire occupant

386

624

3 706

5 568

3 737

1 925

1 220

17 166

3 145

(en centaines de milliers)

Source : « Le parc de logements par classe de performance énergétique au 1er janvier 2022 », CGDD/SDES, juillet 2022.

Si l’on reprend les chiffres de 2022, il est peu probable que d’ici 2028, le 1,578 million de logements du parc locatif privé fassent l’objet d’une rénovation permettant d’envisager le saut d’une, voire de deux, classes énergétiques alors que le Gouvernement ne table lui-même que sur 200 000 rénovations globales par an soutenues par l’ANAH à partir de 2024 (soit 800 000 rénovations globales du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2027), concernant autant les propriétaires bailleurs que les propriétaires occupants.

Les nombreux freins qui ralentissent le rythme de rénovation des logements sont connus :

– la faible disponibilité des entreprises du bâtiment, moins de 63 000 entreprises étant certifiées RGE (« reconnues garant de l’environnement ») au 31 décembre 2022, alors que cette certification est nécessaire pour permettre aux particuliers de bénéficier des aides publiques à la rénovation énergétique ;

– un accompagnement insuffisant des ménages confrontés à la conduite de travaux complexes réunissant plusieurs corps de métiers ;

– les incertitudes concernant la fiabilité des DPE réalisés et l’absence de garantie de saut d’étiquette malgré la réalisation de travaux ;

– le risque de fraude ;

– la complexité des aides « MaPrimeRénov’ » de l’ANAH et un niveau de reste à charge trop élevé.

Il convient d’abord de lever ces freins avant d’envisager d’imposer un calendrier plus qu’exigeant pour les propriétaires bailleurs.

II.   l’article 2 propose de repousser à partir de 2030 la mise en œuvre des critères d’indécence énergétique afin de donner suffisamment de temps aux propriétaires bailleurs pour réaliser les travaux nécessaires

La dernière phrase du premier alinéa de l’article 6 de loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs prévoit qu’un décret en Conseil d’État définit le niveau de performance minimal à respecter, au sens de l’article L. 173-1-1 du CCH, et un calendrier de mise en œuvre échelonnée.

Deux décrets ont ainsi été publiés à ce titre :

– le décret n° 2021-19 du 11 janvier 2021 relatif au critère de performance énergétique dans la définition du logement décent en France métropolitaine, a ainsi prévu que les logements ayant une consommation supérieure à 450 kilowattheures d’énergie finale par mètre carré de surface habitable et par an étaient considérés comme indécents dès le 1er janvier 2023 ;

– le décret n° 2023-796 du 18 août 2023, pris pour l’application de l’article 6 et de l’article 20-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et adaptant les dispositions des contrats types de location de logement à usage de résidence principale, rappelle le calendrier de mise en œuvre fixé par l’article 160 de la loi « Climat et résilience ».

L’article 2 vise à proposer un calendrier de mise en œuvre des critères de performance énergétique pour les logements de classe G, F et E à partir du 1er janvier 2030 au lieu du 1er janvier 2025 aujourd’hui. 2030 est l’année où sera évalué pour la première fois, le niveau de la baisse des émissions de gaz à effet de serre de la France, au regard de ses engagements européens.

III.   la position de la commission

La commission a supprimé l’article 2.

 

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Article 3
(article 200 quater AB [nouveau] du code général des impôts)
Création d’un crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des logements

Le présent article vise à créer un crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des logements.

Article supprimé par la commission

 

Le présent article crée un crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des logements, à destination des propriétaires bailleurs comme des propriétaires occupants.

I.   les difficultés à accélérer les rénovations énergétiques

L’ensemble des évaluations récentes ([7]) ont montré l’insuffisance du nombre de rénovations permettant d’atteindre l’objectif que la France s’est fixé dans le cadre de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), soit un parc neutre en carbone en 2050 composé essentiellement de logements de classe A ou B. À ce titre, 370 000 logements devraient ainsi être rénovés chaque année d’ici 2030. Or, moins de 66 000 logements ont fait l’objet d’une rénovation globale soutenue par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) en 2022 ([8]). Le nouvel objectif de 200 000 rénovations globales par an affiché par le Gouvernement, bien qu’insuffisant par rapport à la trajectoire fixée, paraît d’ores et déjà très ambitieux.

Le nouveau système d’aides qui doit être déployé par l’ANAH à partir du 1er janvier 2024 ([9]) ne va pas dans le sens de la simplification attendue en contraignant encore plus la rénovation par geste (le pilier dit « efficacité ») dont le soutien est dorénavant conditionné au remplacement du système de chauffage fossile par un système de chauffage renouvelable.

II.   la proposition d’un crédit d’impôt

L’article 3 propose l’instauration d’un nouveau crédit d’impôt au bénéfice aussi bien des propriétaires bailleurs que des propriétaires occupants pour la rénovation énergétique des logements. Le bénéfice du crédit d’impôt est soumis à la réalisation d’un audit énergétique. Il se distingue du crédit d’impôt pour la transition énergétique, défini à l’article 200 quater du code général des impôts, en vigueur pour les dépenses réalisées du 1er septembre 2014 au 31 décembre 2020 : ce dernier ne s’appliquait qu’aux propriétaires occupants et ne nécessitait pas la réalisation d’un audit énergétique.

L’article renvoie aujourd’hui à des décrets d’application pour définir la liste des dépenses éligibles, le taux du crédit d’impôt et le plafond des dépenses prises en compte, paramètres qui doivent tous être définis par la loi conformément à l’article 34 de la Constitution. L’article prévoit également la majoration du taux et du plafond des dépenses éligibles en cas de rénovation globale, afin de favoriser les actes les plus performants permettant une baisse effective de la consommation d’énergie. Comme le CITE, il prévoit la publication d’un arrêté conjoint des ministres chargés de l’énergie, du logement et du budget fixant la liste des équipements, matériaux et appareils qui ouvrent droit au crédit d’impôt ainsi que les caractéristiques techniques et les critères de performances minimales attendues.

Ce crédit d’impôt pourrait avoir comme objectif de compléter le soutien aux classes moyennes et supérieures qui sont peu soutenues par les dispositifs de l’ANAH. Ainsi la Fédération française du bâtiment souligne la nécessité de renforcer le soutien pour les ménages appartenant aux catégories « intermédiaire » ou « aisée » au titre de l’ANAH afin d’encourager réellement les rénovations. Par ailleurs, cet article souligne la nécessité de revoir les dispositifs « MaPrimeRénov’ » de l’ANAH, considérés comme étant beaucoup trop complexes par les propriétaires.

Le rapporteur a proposé par amendement de préciser l’assiette du crédit d’impôt et d’établir son taux à 50 % (75 % en cas de rénovation performante), pour un plafond de dépenses éligibles, pour un même logement, de 50 000 euros. Il a proposé également qu’un arrêté fixe les plafonds de dépenses pour chaque type d’opérations éligibles au crédit d’impôt.

III.   la position de la commission

La commission a supprimé l’article 3.

 

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Article 4
(article 5 de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement)
Modification des dispositions relatives au droit au maintien dans les lieux pour les héritiers de titulaires d’un bail soumis au régime de la loi de 1948

Article adopté sans modification

 

Le présent article limite le droit au maintien dans les logements faisant l’objet de baux encadrés par la loi du 1er septembre 1948. Il exclut du bénéfice de ce droit les enfants mineurs du titulaire du bail, en cas de décès ou d’abandon de domicile de ce dernier.

La loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948, portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement (dite « loi de 1948 »), offre un régime très protecteur pour les locataires. Ce régime peut aujourd’hui conduire à certains abus qu’il convient de corriger. Les baux de 1948 n’ont plus de justification dans le contexte actuel.

I.   les avantages des baux de la loi de 1948

Le champ d’application de la loi de 1948 est restreint :

– les logements éligibles doivent avoir été construits avant le 1er septembre 1948 (article 3) ; 

– le locataire doit être entré dans le logement avant le 23 décembre 1986 ou avant le 1er janvier 1959 lorsque le logement est situé dans une commune dont le nombre d’habitants est inférieur à 10 000 (article 3 bis) ;

– les logements doivent être situés à Paris ou dans un rayon de cinquante kilomètres, dans les communes de plus de quatre mille habitants ou dans les communes limitrophes de communes dont la population municipale totale est au moins de dix mille habitants. Les logements situés dans les communes de quatre mille habitants au maximum et dont la population municipale totale s’est accrue de plus 5 % à l’occasion des recensements généraux conduits en 1954, 1962 et 1968 sont également éligibles (article 1).

D’après l’enquête Logement de l’Insee de 2013, 131 400 logements seraient encore loués selon la loi de 1948 contre 246 000 en 2002 et 442 000 en 1992.

La catégorie du logement, qui dépend de ses équipements et de son confort (article 30), détermine le loyer maximum qui peut être appliqué. La révision annuelle du loyer au 1er juillet est plafonnée. Le locataire bénéficie ainsi d’un loyer sensiblement inférieur aux prix du marché. Le locataire bénéficie également d’un droit au maintien sans limite dans les lieux dès que le bail atteint son terme si le propriétaire n’a pas donné préalablement congé à son locataire (article 4).

II.   une transmission du droit du maintien dans les lieux à restreindre

Conformément à l’article 5 de la « loi de 1948 », en cas d’abandon de domicile ou de décès de l’occupant de bonne foi, le droit au maintien dans les lieux est transféré au conjoint ou au partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité. Peuvent également bénéficier de ce droit au maintien les ascendants, les personnes handicapées.

Les enfants mineurs jusqu’à leur majorité, lorsqu’ils vivaient depuis plus d’un an avec le titulaire du contrat de louage, peuvent également bénéficier du maintien dans les lieux. L’article 27 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière, a exclu le bénéfice du maintien dans les lieux pour les enfants majeurs.

L’article 85 de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (dite « loi ENL ») a permis de restreindre le droit au maintien au regard de la jurisprudence extensive de la Cour de cassation. La Cour de cassation avait distingué le transfert du droit au bail et le transfert du droit au maintien dans les lieux : dans le cas du transfert du droit au bail, les règles de l’article 1742 du code civil qui s’appliquent ([10]) : ces dernières prévoient que « le contrat de louage n’est point résolu par la mort du bailleur ni par celle du preneur ». Alors même que l’article 5 ne vise que le droit au maintien dans les lieux, la Cour de cassation a également fait primer en 1998 l’application de l’article 1742 du code civil dans ce domaine sur l’article 5 de la loi de 1948, en prévoyant que le droit au maintien est transmissible aux enfants, y compris lorsqu’ils sont majeurs ([11]). La nouvelle rédaction de la loi ENL ([12]) permet ainsi de préciser que le décès du locataire marque la résiliation du bail empêchant de transmettre le bénéfice du maintien dans les lieux pour les enfants majeurs.

Afin d’accélérer la sortie progressive du régime de 1948, le 1° de l’article 4 de la présente proposition de loi vise à exclure les enfants mineurs du bénéfice du maintien dans les lieux. Le 2° permet de réaffirmer que les dispositions de l’article 1742 du code civil ne s’appliquent pas aux baux de la loi de 1948.

Il est à noter que le 1° concerne également les locataires des logements conventionnés en vertu des dispositions des articles L. 353-15 et L. 442-6 du CCH : il priverait donc aussi l’enfant mineur d’un locataire HLM du droit au maintien dans les lieux.

Le rapporteur a proposé par amendement de rendre les dispositions actuelles du premier alinéa de l’article 5 de la loi de 1948 applicables à tous les décès ou abandons de domicile survenus après le 1er septembre 1948. En rendant les dispositions actuelles rétroactives, l’objectif est de revenir sur la jurisprudence de la Cour de cassation qui applique le droit en vigueur au moment de l’élément déclencheur (décès, abandon du domicile) et ne prend pas en compte les différentes révisions de l’article 5 de la loi de 1948 :

– la modification apportée par la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, qui exclut le droit au maintien des enfants majeurs ;

– la modification apportée par la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement qui précise que l’article 5 de la loi de 1948 s’applique nonobstant les dispositions de l’article 1742 du code civil.

III.   la position de la commission

La commission a adopté l’article 4 sans modification.

 

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Article 5
(article 11-2 [abrogé] de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs)
Restriction du droit à la prorogation du bail dans le cas de la mise en copropriété d’un immeuble

Le présent article propose l’abrogation de l’article 11-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

Article supprimé par la commission

 

Le présent article supprime la prolongation spécifique du bail dont bénéficie un locataire en cas de vente du logement occupé, lorsque cette dernière donne lieu à une mise en copropriété.

Il prévoit ainsi que les garanties apportées au locataire soient identiques à celles de droit commun qui s’appliquent en cas de vente d’un logement occupé, soit une prolongation du bail au moins égale à deux ans.

I.   les garanties offertes par l’article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989…

L’article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989 crée un droit de prorogation du bail lorsqu’un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel d’au moins cinq logements est mis en copropriété. La mise en copropriété correspond à la division d’un immeuble appartenant à un unique propriétaire (monopropriété) en plusieurs lots vendus à plusieurs propriétaires.

Des dispositifs spécifiques ont été mis en œuvre pour protéger les locataires d’un immeuble mis en copropriété notamment en cas de « vente à la découpe », qui consiste pour des investisseurs à réaliser d’importantes plus-values en revendant à l’unité différents lots achetés en bloc.

L’article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989 impose une prolongation minimale du bail permettant au locataire de bénéficier d’un maintien dans les lieux allant de trois à six ans à partir de la mise en copropriété :

 si le terme du bail intervient moins de trois ans après la date de mise en copropriété, il est prorogé de plein droit d’une durée de trois ans ;

– si le terme du bail intervient plus de trois ans après la date de mise en copropriété, les baux en cours sont prorogés d’une durée qui permet aux locataires d’occuper le logement pendant six ans à compter de la mise en copropriété.

Cette prorogation automatique n’est valable que pour les immeubles situés dans les zones tendues définies à l’article 17 de la loi précitée, à savoir les zones d’urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants dans lesquelles il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements. La DHUP précise que les cas de ventes à la découpe « peuvent être observés dans certaines zones tendues – à Paris ou d’autres grandes villes en particulier – où le phénomène de rachat d’immeubles en monopropriété par des investisseurs pour les revendre en lots dans une démarche spéculative peut prendre parfois une ampleur particulière : dans ces cas de figure, il est apparu nécessaire de protéger les locataires concernés par ce phénomène, en instaurant des règles allant au-delà du cas "classique" de vente en cours de bail d’un logement occupé par le locataire. »

II.   … ne sont pas nécessaires au regard des garanties offertes par les dispositifs de droit commun

Le rapporteur considère que ce cadre n’est pas nécessaire au regard des garanties de droit commun apportées aux locataires en cas de vente de leur logement.

A.   la garantie de bénéficier du maintien dans le logement pendant au moins deux ans

Des dispositions spécifiques sont prévues dans le cadre d’une vente de plus de cinq logements par un bailleur institutionnel ([13]). L’article 11-1 de la loi du 6 juillet 1989 permet aux locataires de disposer, dans tous les cas, de leur logement pour une durée minimale de deux ans à compter de la notification du congé pour vente : la reconduction du bail est de droit pour les locataires lorsque le congé pour vente intervient moins de deux ans avant le terme de leur bail.

En droit commun, sont prévues des dispositions spécifiques lorsqu’un bailleur décide de donner congé à son locataire aux fins de reprendre ou de vendre le logement occupé. L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 distingue trois situations :

  si le terme du contrat de location en cours intervient plus de trois ans après la date d’acquisition, le bailleur peut donner congé au locataire afin de vendre son logement au terme du contrat de location en cours. Dans ce premier cas, le locataire bénéficie de plus de trois ans pour trouver un autre lieu d’habitation ;

– si le terme du contrat de location en cours intervient moins de trois ans après la date d’acquisition, le bailleur ne peut donner congé à son locataire qu’au terme d’un premier renouvellement du contrat. Le locataire pourra donc rester dans son logement jusqu’au terme du premier renouvellement de son contrat de location, la durée de celui-ci étant au moins égale à trois ans pour les bailleurs personnes physiques et de six ans pour les bailleurs personnes morales ([14]) ;

– si le terme du contrat en cours intervient moins de deux ans après l’acquisition, le congé pour reprise ne prend effet qu’à l’expiration d’une durée de deux ans à compter de la date d’acquisition.

Autrement dit, les locataires peuvent rester dans leur logement pendant une période allant de deux à six ans à compter de la vente de leur logement.

B.   un droit de préemption

Par ailleurs, les locataires dont l’immeuble est mis en copropriété disposent également, sous certaines conditions, d’un droit de préemption tel que prévu par les dispositions de l’article 10-1 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation. Dans le cadre de la vente d’un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel de plus de cinq logements, l’acquéreur qui ne souhaite pas proroger les contrats de bail en cours, doit notifier aux locataires les conditions de la vente et cette notification vaut offre de vente. Elle est valable pendant quatre mois à compter de sa réception.

La suppression de l’article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989 permettra de simplifier le droit en vigueur. Le rapporteur considère qu’elle ne signifie aucunement une perte de garantie pour les locataires dont les baux sont en cours au moment de la vente, eu égard aux dispositions susmentionnées : garantie d’un droit de maintien dans les lieux d’au moins deux ans après l’acte de vente et droit de préemption.

III.   La position de la commission

La commission a supprimé l’article 5.

 

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Article 6
(article 200 quindecies [nouveau] du code général des impôts)
Création d’un crédit d’impôt au titre des annuités de remboursement des emprunts immobiliers pour l’achat d’un logement affecté à la résidence principale

Article supprimé par la commission

 

Le présent article crée un crédit d’impôt au titre des annuités de remboursement des prêts contractés pour l’achat ou la construction d’un logement neuf affecté à la résidence principale. Le crédit d’impôt est accordé au titre des cinq premières années de remboursement de l’emprunt. Le taux est de 15 %. Les plafonds de dépenses éligibles sont de 5 000 euros pour une personne seule et de 10 000 euros pour un couple.

La forte hausse des taux d’intérêt pour les crédits nouveaux à l’habitat – ils atteignaient en moyenne 3,94 % en septembre 2023 selon les données de la Banque de France ([15]) – n’est pas compensée par la diminution franche des prix de l’immobilier, au demeurant impossible au regard du niveau élevé du prix de revient dans le logement neuf (coût du foncier, hausse du prix des matériaux, réglementation en vigueur) : selon les données de la Banque de France, les Français ont perdu l’équivalent de 10 mètres carrés de pouvoir d’achat immobilier entre janvier 2022 et juin 2023.

évolution du pouvoir d’achat immobilier et variation des facteurs
par rapport à décembre 2007 et décembre 2021

Source : Banque de France.

Le présent article instaure un crédit d’impôt au titre des annuités de remboursement des prêts contractés pour l’achat ou la construction d’un logement neuf affecté à la résidence principale, afin de resolvabiliser les ménages et de soutenir la demande de logements neufs.

I.   Le crédit d’impôt proposé s’inspire du crédit d’impôt au titre des intérêts d’emprunt mis en œuvre de 2007 à 2011

Le crédit d’impôt au titre des intérêts d’emprunt supportés pour l’acquisition ou la construction de l’habitation principale (article 200 quaterdecies du code général des impôts), mesure phare du candidat Nicolas Sarkozy lors de la campagne de l’élection présidentielle en 2007, a bénéficié aux contribuables acquérant ou faisant construire leur résidence principale entre le 6 mai 2007 et le 30 septembre 2011 (pour les offres de prêt émises avant le 1er janvier 2011).

Les intérêts ouvrant droit à ce crédit d’impôt étaient ceux payés au titre des cinq premières annuités (sept annuités pour les logements ayant un niveau élevé de performance énergétique). Le taux d’intérêt de ce crédit d’impôt était de 40 % la première année (30 % pour les logements acquis ou construits en 2011 et 25 % pour les logements acquis ou construits en 2012) et 20 % les quatre années suivantes (15 % pour les logements acquis ou construits en 2011 et 10 % pour les logements acquis ou construits en 2012). Le plafond du montant des intérêts pris en compte était fixé à 3 750 euros pour une personne célibataire et 7 500 euros pour un couple soumis à imposition commune. Le crédit d’impôt pouvait également s’appliquer lorsque le prêt était contracté par une société pas soumise à l’impôt sur les sociétés dont le contribuable était membre et qui lui met à disposition de celui-ci le logement à titre gratuit, à proportion de la quote-part des droits du contribuable dans la société.

Le crédit d’impôt a représenté une dépense fiscale atteignant un maximum de 1,995 milliard d’euros en 2012 bénéficiant à 2 080 900 ménages (coût en année pleine pour cinq générations de prêts).

II.   les différences proposées par ce crédit d’impôt viseNT à améliorer l’effet solvabilisateur du dispositif

Le crédit d’impôt proposé varie légèrement par rapport au précédent dispositif :

– il est destiné aussi bien aux propriétaires accédants qu’aux propriétaires bailleurs s’engageant à louer le logement nu à usage d’habitation principale, là où le précédent dispositif n’était ouvert qu’aux propriétaires accédants ;

– l’assiette du crédit d’impôt correspond à l’annuité, soit principalement le remboursement des intérêts d’emprunt et du capital là où le précédent dispositif ne portait que sur les intérêts d’emprunt ;

– les plafonds sont rehaussés à 5 000 euros pour une personne seule et 10 000 euros pour un couple soumis à imposition commune (contre 3 750 euros et 7 500 euros pour le précédent dispositif) ;

– le crédit d’impôt est limité à 15 % contre 20 % pour le précédent dispositif.

Limité aux offres de prêt émises avant le 1er janvier 2025 (pour une acquisition au plus tard du 30 septembre 2025), le dispositif a vocation à soutenir la production de logements neufs à court terme. S’il n’est pas possible d’établir un chiffrage de la mesure, le crédit d’impôt précité mis en œuvre de 2007 à 2011 a coûté 249 millions en 2008 pour sa première année de mise en œuvre. Le coût du dispositif, s’il n’était mis en œuvre que pour la seule année 2024, devrait donc avoisiner ce montant. En outre, les achats de logements neufs affectés à la résidence principale seront multipliés par ce dispositif et génèreront des recettes fiscales supplémentaires pour l’État. Par ailleurs, le dispositif vise à compenser en partie le surcoût de la réglementation « RE2020 » ([16]) entrée en vigueur au 1er janvier 2022, estimé à 7 % selon la FFB.

III.   La position de la commission

Le rapporteur a proposé par amendements :

–  de fixer la durée d’engagement minimale d’affectation à la résidence principale à 5 ans ;

– de borner le bénéfice du crédit d’impôt aux offres de prêt émises entre le 1er novembre 2023 et le 1er janvier 2025 ;

– de conditionner le bénéfice du crédit d’impôt au respect de la RE2020.

La commission a supprimé l’article 6.

 

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Article 7
(article 793 du code général des impôts)
Exonération des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour la transmission d’un immeuble acquis neuf ou en état futur d’achèvement et destiné à être affecté la résidence principale.

Article supprimé par la commission

 

Le présent article propose d’exonérer de droits de mutation à titre gratuit lors de la première transmission d’un logement acquis neuf ou en état futur d’achèvement, pour les logements achevés avant le 1er octobre 2024 et ayant été acquis entre le 1er septembre 2023 et le 1er novembre 2024.

 

La France est un des pays où le taux d’épargne des ménages est le plus élevé (17,4 % en 2022 selon les données de l’Insee, pour une moyenne d’environ 14 % dans l’Union européenne). L’encours de l’épargne des Français atteint ainsi près de 5 956 milliards d’euros au premier trimestre 2023 selon les données de la Banque de France. Une partie de cette épargne est liquide (2 047 milliards d’euros correspondent aux dépôts bancaires rémunérés et aux dépôts à vue ainsi qu’à la monnaie en circulation). Dans cette perspective, tout dispositif qui encourage les Français à orienter une partie de leur épargne vers l’immobilier doit être encouragé pour permettre notamment la vente d’un certain nombre de logements neufs, nécessaires pour le marché de la location et pour soutenir la filière de la promotion et de la construction.

Le présent article propose ainsi d’exonérer de DMTG pour la première transmission à titre gratuit d’un logement acquis neuf ou en état futur d’achèvement, pour les logements achevés avant le 1er octobre 2024 et ayant été acquis entre le 1er septembre 2023 et le 3 novembre 2024

I.   un dispositif similaire mis en œuvre de 1993 à 1994

La construction neuve connaît une crise au début des années 1990 avec l’augmentation rapide du stock de logements neufs invendus. Cette hausse est liée à un effondrement de la demande causé par la hausse des taux d’intérêt dans le contexte de la guerre du Golfe et l’incapacité de l’offre à ajuster ses prix compte tenu de ses coûts de revient.

L’article 21 de la loi n° 93-859 du 22 juin 1993 de finances rectificative pour 1993 a instauré un dispositif d’exonération de DMTG au titre de la première transmission d’un logement acquis neuf, en état futur d’achèvement ou ayant fait l’objet d’une rénovation lourde ou de réhabilitation exceptionnelle, achevé avant le 1er juillet 1994 et par acte authentique signé entre le 1er juin 1993 et le 31 décembre 1994 (amendement dit « Balladur »), aujourd’hui codifié au 4° du 2 de l’article 793 du code général des impôts. Ce dispositif visait à réduire le stock de logements neufs invendus en ciblant les immeubles déjà achevés ou dont la commercialisation avait déjà débuté. Il concernait essentiellement le secteur de la promotion immobilière puisqu’il excluait les particuliers achetant un terrain et signant un contrat de construction d’une maison individuelle.

Dans le cadre du présent article, l’exonération est subordonnée à l’affectation du logement à l’habitation principale pendant une durée minimale de cinq ans (à compter de l’acquisition ou de l’achèvement s’il est postérieur) sauf en cas de décès. L’article 294 E de l’annexe II au code général des impôts précise les modalités d’application de ces textes, notamment les obligations déclaratives incombant aux redevables et les pièces justificatives à fournir lors de l’enregistrement des transmissions.

L’exonération était plafonnée initialement à 300 000 francs (46 000 euros aujourd’hui conformément à l’article 793 ter du CGI) par part reçue par chacun des donataire ou héritier. Pour l’appréciation de cette limite de 46 000 euros, il serait tenu compte de l’ensemble des transmissions à titre gratuit consenties par la même personne. L’exonération est illimitée dans le temps quel que soit le moment de la donation.

II.   l’exonération de DMTG : un dispositif qui ne coûte rien

Rétablir un dispositif similaire, qui nécessite une réécriture de l’article proposé ([17]), pourrait avoir un effet massif sur les ventes de logements neufs qui se sont effondrées. Il pourrait faire l’objet de quelques adaptations (augmentation du plafond de l’exonération pour prendre en compte l’augmentation des prix de l’immobilier depuis 1993, instauration d’une contrainte d’intérêt général par l’instauration d’un plafond de revenu et d’un plafond de ressources en cas de mise en location du logement, instauration de critères de performance énergétique).

Par ailleurs, une telle exonération ne coûte rien pour les finances publiques à court et à moyen terme : ce n’est qu’au moment des donations et successions effectives qu’il existe un manque à gagner pour l’État, étalé sur des dizaines d’années, tandis que l’État enregistre des rentrées budgétaires immédiates (TVA, prélèvements sociaux) par les ventes supplémentaires que le dispositif déclenche.

III.   La position de la commission

Le rapporteur a proposé par amendement une nouvelle rédaction du dispositif permettant de créer l’exonération de DMTG sans affecter celle prévue pour les acquisitions ayant eu lieu entre le 1er juin 1993 et le 31 décembre 1994. Il actualise les paramètres de l’exonération :

– en fixant son plafond à hauteur de 150 000 euros ;

– en conditionnant son bénéfice au respect de la RE2020.

La commission a supprimé l’article 7.

 

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Article 8
(articles L. 31-10-2, L. 31-10-3, L. 31-10-4, L. 31-10-9 et L. 31-10-10 du code de la construction et de l’habitation et article 90 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011)
Dézonage du PTZ et augmentation des plafonds du coût total de l’opération et des ressources déterminant l’éligibilité des ménages

Article adopté par la commission avec modification

 

L’article 8 proposait, dans sa rédaction initiale, de dézoner le PTZ en supprimant les différences d’éligibilité et de calcul qui existent aujourd’hui entre les territoires tendus et non tendus. Il réhaussait également les plafonds de ressources et les plafonds du coût total de l’opération pris en compte pour le calcul du prêt. Il indexait enfin les plafonds de ressources sur l’indice national des prix à la consommation.

La nouvelle rédaction du dispositif, introduite par l’adoption de l’amendement CE22, supprime les modifications proposées initialement, augmente les plafonds de ressources et crée une quotité de 50 % pour les ménages modestes.

Le prêt à taux zéro (« PTZ ») a été instauré par l’article 90 de la loi n° 2010‑1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011. Il est destiné à soutenir les ménages modestes qui souhaitent acquérir ou construire leur résidence principale en première accession à la propriété. L’article 87 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a prolongé le dispositif jusqu’au 31 décembre 2023.

I.   Le ptz : un dispositif progressivement affaibli

Les conditions d’octroi du PTZ sont fixées par les articles L. 31-10-1 à L. 31‑10-14 du code de la construction et de l’habitation (CCH). Le montant du PTZ et les conditions de son remboursement dépendent du coût de l’opération, de la composition du foyer, de ses ressources, de la localisation géographique du bien et du caractère neuf ou ancien du logement concerné. Le coût du PTZ est supporté par l’État via un crédit d’impôt dont bénéficient les banques qui commercialisent le PTZ, pour compenser l’absence d’intérêts dont bénéficient les ménages qui contractent un PTZ ([18]).

A.   la territorialisation du dispositif

Les paramètres et conditions d’éligibilité dépendent et varient aujourd’hui en fonction du zonage A-B-C. Initialement accessible dans l’ensemble du territoire et pour l’acquisition d’un logement neuf, le PTZ a été progressivement restreint à compter de 2015 :

– premièrement, le PTZ a été ouvert à l’achat d’un logement ancien sous condition de travaux pour les offres de prêt émises à compter du 1er janvier 2015 ([19]). L’article 83 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 (LFI 2018), restreint le dispositif du PTZ dans l’ancien sous condition de travaux ([20]) pour les offres de prêts émises à compter du 1er janvier 2018 aux communes classées dans les zones B2 et C.

– deuxièmement, le PTZ dans le neuf a fait l’objet de plusieurs tentatives de resserrement en zone tendue. La LFI 2018 abaisse la quotité à 20 % dans les zones B2 et C en 2018 et 2019 tout en prévoyant l’exclusion de ces deux zones à partir de 2020. La LFI 2020 abroge l’extinction du PTZ dans le neuf en zones B2 et C en maintenant la quotité de 20 % contre 40 % en zone tendue (zones A et B1). Mais l’article 6 du projet de loi de finances pour 2024, actuellement en discussion, prévoit à nouveau l’exclusion du PTZ dans le neuf dans les zones détendues (hors opération d’accessions dans le cadre d’un bail réel solidaire ou d’un prêt social location-accession) tout en restreignant le bénéfice du dispositif dans le neuf en zone tendue aux immeubles collectifs.

B.   des paramètres qui n’ont pas été revus depuis plusieurs années

Les plafonds de ressources conditionnant l’octroi du PTZ, les plafonds du montant opérations pris en compte dans le calcul du prêt ainsi que les quotités (part de l’opération financée par le PTZ) sont encadrés par le CCH et fixés par décret. Ils varient selon les zones.

Les plafonds des opérations et plafonds de revenus n’ont pas été revus, respectivement, depuis 2014 ([21]) et 2016 ([22]), sans prise en compte de l’inflation ni de l’évolution du prix de l’immobilier.

plafonds de revenus conditionnant l’éligibilité au PTZ

(en euros)

Nombre de personnes destinées à occuper le logement

zone A

zone B1

zone B2

zone C

1

37 000  

30 000

27 000

24 000

2

51 800  

42 000

37 800

33 600

3

62 900  

51 000  

45 900  

40 800  

4

74 000  

60 000  

54 000  

48 000  

5

85 100  

69 000  

62 100  

55 200  

6

96 200  

78 000  

70 200  

62 400  

7

107 300  

87 000  

78 300  

69 600  

8 et plus

118 400  

96 000  

86 400  

76 800  

Source : Article D31-10-3-1 du CCH.

plafonds des montants pris en compte pour le calcul du ptz

(en euros)

Nombre de personnes destinées à occuper le logement

zone A

zone B1

zone B2

zone C

1

150 000  

135 000  

110 000  

100 000  

2

210 000  

189 000  

154 000  

140 000  

3

255 000  

230 000  

187 000  

170 000  

4

300 000  

270 000  

220 000  

200 000  

5 et plus

345 000  

311 000  

253 000  

230 000  

Source : D31-10-10 du CCH.

 

Quotité du PTZ

 

zone A

zone B1

zone B2

zone C

Logement neuf

40 %

40 %

20 %

20 %

Logement ancien faisant l’objet de travaux d’amélioration

Exclu

Exclu

40 %

40 %

Logement ancien

acquis dans le cadre de la vente du parc social à ses occupants

10 %

10 %

10 %

10 %

Source : D31-10-9 du CCH.

II.   un dispositif à dézoner en faveur des territoires ruraux

Le présent article propose :

 de « déterritorialiser » le PTZ en supprimant les différences d’éligibilité et de calcul du PTZ entre les zones tendues et les zones détendues ;

 de rehausser les plafonds de ressources et les plafonds du coût de l’opération, tout en proposant l’indexation du plafond de ressources sur l’indice national des prix à la consommation.

A.   la déterritorialisation du ptz

L’exclusion prévue par l’article 6 du PLF 2024 des zones B2 et C du PTZ dans le neuf (hors accession sociale) réduit à peau de chagrin un dispositif qui est aujourd’hui massivement utilisé pour le neuf dans les zones rurales. Le PTZ dans l’ancien ne représentait que 22 % de l’ensemble des PTZ émis en 2022 (20,5 % en 2021, 24,4 % en 2020 et 24,9 % en 2021) alors que les émissions de PTZ dans le neuf en zones B2 et C représentaient 53 % du total des PTZ dans le neuf en 2022 et 56,7 % en 2021.

répartition des effectifs de PTZ par zonage géographique
en France métropolitaine

Source : Société de gestion des financements et de la garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS) selon les déclarations arrêtées en métropole au 31 mars de l’année n + 1.

En proposant de « dézoner » intégralement le dispositif du PTZ, le présent article permet non seulement de revenir sur l’exclusion du PTZ dans le neuf dans les zones rurales et d’élargir le PTZ dans l’ancien à l’ensemble du territoire, mais plus généralement d’harmoniser à la hausse l’ensemble des paramètres (plafonds de ressources, plafonds des opérations, quotités) afin de garantir une égalité de traitement entre les différents territoires.

Il est à noter que la réforme proposée par le Gouvernement permet de tabler sur une émission de 40 000 PTZ en 2024 selon les propos du ministre chargé du logement. C’est un montant sensiblement inférieur à la moyenne des dernières années. Preuve que le Gouvernement fait des économies sur le PTZ malgré quelques améliorations (éligibilité supplémentaire de 6 millions de ménages, augmentation de la quotité à 50 % pour les ménages aux revenus les plus modestes, revalorisation du coefficient familial ce qui permettra une hausse du plafond des opérations pour les ménages composés de plus de deux personnes) il prévoit une dépense d’environ 800 millions d’euros en 2024 contre 1,33 milliard d’euros en 2023 (pour un nombre de prêts estimé à 65 000).

Inversement, l’article 8 de la proposition de loi permettrait de garantir à un nombre sensiblement supérieur de ménages le bénéfice du PTZ en rendant le dispositif beaucoup plus attractif.

nombre de ptz émis chaque année

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

PTZ émis

286 256

351 932

79 116

43 167

47 192

58 800

114 943

121 639

87 834

92 890

66 677

73 153

62 504

Source : SGFGAS d’après les déclarations reçues au 31 mars de l’année n + 1 en France métropolitaine.

B.   l’augmentation du plafond de ressources et du plafond du montant de l’opération

En proposant d’augmenter de 37 000 euros à 47 000 euros le maximum du plafond de ressources pour une personne seule, le rapporteur vise in fine une augmentation de l’ensemble des plafonds de ressources d’environ 25 %. Prenant acte de la proposition du Gouvernement de rehausser ce plafond à 49 000 euros, le rapporteur a proposé par amendement de s’aligner sur cette proposition.

En proposant d’augmenter le plafond du montant de l’opération pour une personne seule de 156 000 euros à 171 000 euros, l’auteur de la proposition de loi préconise une augmentation homogène de l’ensemble des plafonds d’environ 10 %. Seuls les décrets d’application pourront permettre de rehausser l’ensemble des plafonds. Cette augmentation est indispensable pour prendre en compte l’évolution du prix de l’immobilier depuis 2014 (pour le plafond du montant de l’opération) et de l’inflation depuis 2016 (pour le plafond des ressources conditionnant l’éligibilité) : entre janvier 2015 et octobre 2023, l’indice des prix à la consommation a augmenté de près de 20 points tandis que l’indice des prix des logements a augmenté d’environ 32 points. À ce titre, l’article 8 prévoit également une indexation du plafond de ressources sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation (IPC).

évolution de l’indice des prix à la consommation en France (base 2015)

Source : Insee.

évolution de l’indice des prix immobiliers en France (base 2015)

Source : Insee.

III.   la position de la commission

La commission a adopté l’article 8 modifié par l’amendement CE22 de Lionel Causse proposant une rédaction globale de l’article.

L’amendement CE22 revient sur :

– l’augmentation du plafond du coût de l’opération pris en compte pour le calcul du PTZ ;

–   l’indexation des plafonds de ressources sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation ;

– le dézonage « intégral » des différents paramètres (quotité, plafonds de ressources, plafonds des opérations) et de l’éligibilité au dispositif.

A contrario, il relève la quotité maximale de l’opération pouvant être financée par le PTZ à hauteur de 50 %, en prévoyant que le niveau de la quotité est déterminé en fonction des ressources des emprunteurs. La quotité de 50 % devrait ainsi être réservée aux ménages les plus modestes conformément au projet de réforme du PTZ annoncé par le Gouvernement et inscrit à l’article 6 du projet de loi de finances pour 2024, actuellement examiné par le Parlement. Il relève également le plafond de ressources pour une personne seule à 49 000 euros.

*

*     *

Article 9
(article 199 novovicies du code général des impôts)
Prolongation du dispositif « Denormandie »

Article adopté par la commission

 

L’article 9 prolonge jusqu’en 31 décembre 2027 le dispositif « Denormandie », qui arrive à échéance au 31 décembre 2023.

L’article 226 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a adossé au dispositif « Pinel », défini à l’article 199 novovicies du code général des impôts, le dispositif dit « Denormandie » (5° du B du I de l’article 199 novovicies du code général des impôts). Entré en vigueur le 1er janvier 2019 pour une durée de 4 ans, le dispositif a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2023 par l’article 75 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

I.   Un dispositif pertinent en théorie

Adossé au dispositif « Pinel » décrit plus bas, la réduction d’impôt dite « Denormandie » permet aux contribuables, qui investissent dans la rénovation de logements anciens ou transforment des locaux en logements, de bénéficier d’une réduction d’impôt.

Le logement doit être situé en centre-ville d’une commune faisant l’objet d’une opération de revitalisation de territoire (ORT) ou « dont le besoin de réhabilitation de l’habitat en centre-ville est particulièrement marqué ». Ce champ couvre notamment les communes qui ont signé des conventions « Cœur de ville ». Le critère de localisation dans le centre-ville, défini comme « zone de bâti continue », et s’appuyant sur les critères de l’Insee, est abandonné en vertu de l’article 115 de la LFI pour 2020.

Les travaux entrepris doivent représenter au moins 25 % du coût total de l’opération ([23]). Il s’agit de tous travaux, ayant pour objet la modernisation, l’assainissement ou l’aménagement des surfaces habitables, la réalisation d’économies d’énergie ainsi que la création de surfaces habitables à partir de l’aménagement des surfaces annexes. Ces travaux doivent améliorer la performance énergétique du logement d’au moins 20 % (pour les immeubles en copropriété) ou 30 %, créer une nouvelle surface habitable ou correspondre à deux types de travaux parmi les suivants : la rénovation des murs, la rénovation des toitures, la rénovation des fenêtres, le changement de chaudière et le changement de production d’eau chaude. ([24])  Les travaux doivent être terminés le 31 décembre de la deuxième année suivant l’acquisition du logement au plus tard.

Les autres caractéristiques (plafonds du coût de l’opération en valeur absolue et par mètre de surface habitable, durée d’engagement de location, taux de la réduction d’impôt, plafonds de ressources et de loyers) sont identiques à ceux du dispositif « Pinel » (voir infra). La réduction des taux s’appliquant au dispositif « Pinel » à partir du 1er janvier 2023 n’est cependant pas étendue au dispositif « Denormandie ». Le taux de la réduction d’impôt est de 12 % en cas d’engagement de location pendant 6 ans, de 18 % en cas de location pendant 9 ans et de 21 % en cas de location pendant 12 ans.

II.   … mais qui peine à décoller

Le projet annuel de performances de la mission Cohésion des territoires prévoit une dépense fiscale de 10 millions d’euros pour le dispositif en 2024 contre 8 millions d’euros en 2023. Ce montant modeste montre que le dispositif n’a pas encore réussi à trouver son public. Seuls 881 bénéficiaires du dispositif sont décomptés en 2022.

Plusieurs raisons sont avancées par les professionnels de l’immobilier :

– le coût élevé des rénovations pour une rentabilité locative souvent plus faible qu’en zone tendue ;

– la complexité inhérente à la réalisation de travaux (formalisation du besoin, sélection et pilotage des artisans, acceptation des travaux par la copropriété, etc.) ;

– le risque de vacance locative ;

– la complexité et la technicité du dispositif, peu commercialisé par les intermédiaires, renforcées par les restrictions du dispositif originaire (limitation au centre-ville notamment).

Le dispositif « Denormandie » a subi jusqu’en 2022 la concurrence du dispositif « Pinel » qui bénéficiait des mêmes réductions d’impôt pour un risque locatif plus faible et une gestion plus aisée. Le renforcement des aides à la rénovation énergétique, le déploiement à une plus grande échelle du mécanisme d’accompagnement « France Rénov’ » et les taux de la réduction d’impôt comparativement plus avantageux que ceux du dispositif « Pinel », pourraient conduire à donner plus d’ampleur au « Denormandie » dans les prochaines années.

Une prolongation jusqu’au 31 décembre 2024 a été proposée par le Gouvernement dans le cadre de l’examen du PLF pour 2024. Cette prolongation est insuffisante pour encourager les professionnels à investir dans la commercialisation de tels dispositifs. Le présent article propose ainsi de prolonger jusqu’au 31 décembre 2027 le dispositif « Denormandie ».

III.   La position de la commission

La commission a adopté sans modification l’article 9.

 

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*     *

Article 10
(article 199 novovicies du code général des impôts)
Généralisation du dispositif du « Pinel breton »

Article supprimé par la commission

 

L’article 10 généralise l’expérimentation de la déconcentration du dispositif « Pinel » ayant  lieu en Bretagne depuis le 1er avril 2020.

Le « Pinel breton » consiste à confier au préfet de région, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement (CRHH) et du président du conseil régional, la responsabilité de déterminer les zones géographiques éligibles au dispositif, au niveau communal ou infra-communal, ainsi que la fixation des plafonds de loyer et de ressources du locataire.

I.   la réduction d’impôt « pinel » : Un dispositif territorialisé qui ne répond pas toujours aux spécificités locales

La réduction d’impôt sur le revenu en faveur de l’investissement locatif intermédiaire, dite « Pinel », a été instaurée par l’article 5 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, en remplacement du dispositif « Duflot ». Prorogée à plusieurs reprises, elle doit entrer en extinction à partir du 31 décembre 2024.

A.   Le dispositif « Pinel »

Le dispositif « Pinel » permet aux contribuables qui acquièrent un logement neuf ou en l’état futur d’achèvement ([25]) et s’engagent à le louer nu pendant une durée minimale de six, neuf ans ou douze ans, de bénéficier d’une réduction d’impôt s’appliquant sur le prix de revient logement et étalée sur la durée d’engagement (dans la limite de 300 000 euros par contribuable et de 5 500 euros par mètre carré de surface habitable ([26])).

Pour être éligibles à la réduction d’impôt, les logements doivent atteindre un certain niveau de performance énergétique. La réduction d’impôt a pour contrepartie le respect par le propriétaire bailleur d’un plafond de ressources pour le locataire et d’un plafond de loyer fixé par arrêté. Ces loyers plafonds sont fixés de sorte à proposer des loyers inférieurs entre 10 % et 20 % de ceux du marché libre.

Il est à noter que l’article 199 novovicies du CGI permet au préfet de région de moduler à la baisse les loyers plafonds, en fonction des réalités locales du marché locatif. De facto, il a été demandé aux préfets de région ne pas engager de procédure de modulation des plafonds de loyer dans une circulaire du 19 décembre 2013 afin de donner suffisamment de visibilité aux promoteurs et aux investisseurs.

B.   Un rétrécissement des territoires éligibles à partir de 2019

Comme le dispositif « Duflot », le dispositif est réservé aux zones tendues, marquées par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (zones A et B1([27])). Le dispositif s’applique également dans les communes caractérisées « par des besoins particuliers en logement locatif » ayant reçu un agrément dérogatoire des préfets de région après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement en zone B2 et, du 1er janvier au 31 décembre 2017, en zone C ([28]). Au 1er juillet 2017, 905 agréments au profit de communes de zones B2 et C étaient actifs, soit environ un quart du total des communes et 60 % de la population de ces zones. L’article 68 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 a mis fin à ces dérogations, pour des motifs budgétaires, en excluant les logements situés en zone B2 et C (sous réserve des logements situés dans les communes dont le territoire est couvert par un contrat de redynamisation de site de défense).

Le Gouvernement a alors pris prétexte des observations lapidaires de la Cour des comptes dans son rapport de juin 2017 sur La situation et les perspectives des finances publiques, pointant le risque de vacance locative pour les investisseurs particuliers sans que le dispositif « Pinel » ait fait l’objet d’une véritable évaluation sur l’ensemble du territoire.

Si le zonage A-B-C repose sur des critères objectifs (dynamiques de bassins de vie, évolutions démographiques, prix immobiliers, niveau des loyers d’habitation), ce dernier ne permet pas toujours de prendre en compte les dynamiques territoriales récentes si l’on s’en réfère à son actualisation sporadique ([29]) mais aussi les écarts infra-communaux pouvant exister sur le marché locatif à l’échelle locale.

localisation des investissements « pinel » de 2014 à 2016
en France métropolitaine

Source : Inspection générale des finances (IGF) et conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), Évaluation du dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif Pinel, novembre 2019.

L’article 164 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 (LFI 2020) prévoit d’expérimenter la déconcentration du dispositif « Pinel », en confiant au préfet de région, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement (CRHH) et du président du conseil régional, la responsabilité de déterminer les zones géographiques éligibles au niveau communal ou infra-communal, ainsi que la fixation des plafonds de loyer et de ressources du locataire.

Cette expérimentation, proposée initialement jusqu’au 31 décembre 2021 et prolongée jusqu’au 31 décembre 2024 ([30]), est une réponse conjoncturelle aux défis auxquels la région Bretagne, seule à bénéficier de l’expérimentation, est confrontée, notamment les besoins d’un meilleur rééquilibrage entre l’est qui concentre les zones éligibles et l’ouest connaissant une dynamique importante. Mais elle constitue plus largement une tentative de réponse à un constat de plus en plus partagé : l’imperfection du zonage national pour prendre en compte les réalités locales.

II.   une évaluation de mi-parcours qui plaide pour une généralisation du dispositif

L’arrêté du 19 mars 2020, pris par la préfète de la région Bretagne détermine le zonage communal et infracommunal et acte l’entrée en vigueur de l’expérimentation pour les acquisitions effectuées à partir du 1er avril 2020. Pour les communes qui ne sont que partiellement éligibles au dispositif, le zonage a été défini selon les IRIS (îlots regroupés pour l’information statistique) et à la maille de carreaux de 200 mètres sur 200 mètres. L’arrêté prévoit également les plafonds de loyer spécifiques au niveau communal, abaissés de 2 % à 12 % par rapport aux plafonds nationaux (hors Rennes, Saint-Malo et Dinard). Les plafonds de ressources applicables demeurent en revanche inchangés par rapport au droit commun.

Le dispositif fonctionne selon un principe d’économie qui visait dans la théorie à compenser l’entrée de territoires de zone B2 ou C dans le dispositif par la sortie de territoires en zone A et B1 de population équivalente. Cinq communes insulaires sont sorties du dispositif, tandis que Rennes, Saint-Malo et Dinard ont perdu l’éligibilité d’une partie de leur territoire. En sens contraire, 30 communes de zone B2 et C sont rendues partiellement éligibles.

Le rapport d’évaluation remis au Parlement au printemps 2022, conformément à l’article 164 de la LFI 2020, souligne plusieurs aspects très positifs de l’expérimentation :

– les communes éligibles au dispositif Pinel sont caractérisées par un niveau de loyer supérieur à celui constaté dans les autres communes de zone B2 et C et une dynamique de construction de logements collectifs plus prononcée ;

 le ciblage effectué à l’échelle de l’IRIS semble aller dans un sens vertueux de rééquilibrage au bénéfice du centre-ville. La définition du zonage à l’échelle infra-communale permet de favoriser la densité de l’habitat en centre-ville ainsi que sa rénovation, tout en limitant a contrario l’étalement urbain et l’artificialisation des sols en périphérie.

Tout confirme a priori le bien-fondé de laisser aux acteurs locaux la possibilité d’identifier les territoires nécessitant le plus de bénéficier du dispositif « Pinel » dans une logique de responsabilité. Si le rapport souligne les difficultés d’envisager un zonage pérenne à l’échelle infra-communale, le rapporteur estime qu’il devrait être possible au contraire de modifier les zones éligibles au sein d’une commune après une période donnée afin de donner la possibilité d’un pilotage actif de la politique de développement urbain par les maires des communes concernées.

Par ailleurs, le rapport relève les actions pertinentes mises en œuvre grâce à l’éligibilité des territoires au dispositif « Pinel » : reconversions de zone artisanale ou commerciale, projets urbains avec la conservation d’une partie du patrimoine existant, densification d’habitat déjà existant. En outre, le dispositif semble avoir des effets positifs sur la construction avec une augmentation significative du nombre de logements autorisés dans les territoires nouvellement entrants dans le dispositif « Pinel » sans que cela ne semble affecter l’évolution du nombre de logements autorisés dans les communes bretonnes non concernées par le dispositif même si le rapport note qu’il est trop tôt pour tirer des conclusions tangibles à ce stade concernant l’expérimentation.

Un nouveau rapport devra être transmis au Parlement en septembre 2024 mais au regard des éléments positifs d’évaluation transmis en 2022, le rapporteur propose d’ores et déjà de généraliser le dispositif de déconcentration du dispositif « Pinel » à l’ensemble des régions de France, en confiant la responsabilité au préfet de région de déterminer le zonage des communes et parties de communes éligibles au dispositif. Cette généralisation va dans le sens d’une déconcentration et d’une décentralisation de la politique du logement appelée de leurs vœux par de nombreux acteurs.

III.   la position de la commission

La commission a supprimé l’article 10.

 

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Article 11
(article 199 novovicies du code général des impôts)
Rétablissement des taux du dispositif « Pinel »

Article supprimé par la commission

 

Le présent article rétablit les taux de la réduction d’impôt « Pinel » en vigueur jusqu’au 31 décembre 2022 : 12 % du prix de revient pour une durée d’engagement de location de six ans, 18 % du prix de revient pour une durée d’engagement de location de neuf ans et 21 % du prix de revient pour une durée d’engagement de location de douze ans.

 

I.   Le dispositif « pinel » largement raboté

La réduction d’impôt dont bénéficie le contribuable au titre du dispositif « Pinel », est de 12 % (pour un engagement de location de six ans) et de 18 % (pour un engagement de location de 9 ans) durant toute la période d’engagement ([31]). L’engagement de location peut être prorogé au-delà de la période initiale de six ou neuf ans, le contribuable bénéficiant dans ce cas d’un complément de réduction d’impôt égal à 6 % pour une première période triennale de prorogation et à 3 % pour la seconde période triennale (engagement initial de 6 ans) et de 3 % pour la seule période triennale de prorogation autorisée (engagement initial de neuf ans).

Le dispositif « Pinel » a été fortement amoindri par l’article 168 de la de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, qui prolonge le dispositif jusqu’au 31 décembre 2024 : les taux de la réduction d’impôt s’appliquant à partir du 1er janvier 2023 subissent une première baisse. Ils en subiront une seconde à partir du 1er janvier 2024, sauf pour les logements situés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ou qui respectent un niveau de qualité, en particulier en matière de performance énergétique et environnementale, supérieur à la réglementation, définis pour le territoire hexagonal par le décret n° 2022-384 du 17 mars 2022 (dispositif dit « Pinel + »).

 

 

évolution des taux de la réduction d’impôt

 

Investissements réalisés en 2021-2022

Investissements réalisés en 2023

Investissements réalisés en 2024

Engagement de location de six ans

Première prorogation de 3 ans

Seconde prorogation de 3 ans

12 %

6 %

3 %

10,5 %

4,5 %

2,5 %

9 %

3 %

2 %

Engagement de location de 9 ans

Prorogation de 3 ans

18 %

3 %

15 %

2,5 %

12 %

2 %

Engagement de location de 6 ans (OM)

Engagement de location de 9 ans (OM)

23 %

29 %

21,5 %

26 %

20 %

23 %

Source : Article 199 novovicies du code général des impôts.

II.   Il convient de rétablir les taux de la réduction d’impôt en vigueur avant 2023

Le soutien à l’investissement locatif privé est primordial pour permettre aux opérations de promotion de pouvoir bénéficier d’un nombre suffisant de réservations. Ainsi entre 2014 et 2017, les logements achetés avec le bénéfice d’avantages fiscaux représentent près de 48 % des réservations de logements (195 000 logements acquis destinés à bénéficier de la réduction d’impôt Pinel).

nombre de logements réservés en investissement locatifs chaque année

Années

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Nombre de logements en investissement locatif

(réservations brutes avant désistements)

36 336

52 939

67 140

69 800

63 792

63 737

47 246

56 636                   

43 878

Source : Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), « Les chiffres du logement neuf 1er trimestre 2023 – 25 mai 2023 ».

Une baisse des taux de la réduction d’impôt peut avoir des conséquences immédiates sur la production de logements : la FPI indique qu’une baisse de 30 000 logements par an a été enregistrée entre 2010 et 2012 lorsque le taux de la réduction d’impôt du dispositif dit « Scellier », précédant le dispositif dit « Duflot » a été ramené de 25 % à 13 %. La baisse des taux du dispositif Pinel ne peut qu’encourager la désertion des investisseurs particuliers du marché du logement neuf (baisse de plus de la moitié des ventes au troisième trimestre 2023 par rapport au deuxième trimestre 2022).

Par ailleurs, s’il est trop tôt pour l’objectiver, il apparaît clairement que le dispositif « Pinel + » pour les logements performants n’a pas été correctement calibré et connaîtra un succès modeste (5 % des réservations des promoteurs immobiliers selon la FPI) : le décret susmentionné n° 2022-384 du 17 mars 2022 prévoit que les logements faisant l’objet d’une opération de construction sont éligibles au « Pinel + » si leur niveau de performance énergétique correspond à la classe « A » et si le logement respecte les exigences de la réglementation RE2020 qui entreront en vigueur au 1er janvier 2025. Or, il semblerait que les exigences de la réglementation (RE2020) en vigueur à partir du 1er janvier 2025 ne garantissent pas aux promoteurs immobiliers que le bien corresponde à la classe « A ». Faute de certitude quant au DPE du logement qui sera obtenu lors de la livraison du logement, les promoteurs sont dans l’impossibilité de commercialiser des logements en « Pinel + ». En conséquence, le rapporteur a proposé, par un amendement de repli portant article additionnel à l’article 11, que le respect de la réglementation RE2020, telle qu’elle doit s’appliquer à partir du 1er janvier 2025, suffise pour rendre éligible un logement au dispositif « Pinel +».

Le présent article propose de revenir aux taux « historiques » de la réduction d’impôt « Pinel » en vigueur avant le 1er janvier 2023, aussi bien dans l’hexagone que dans les territoires ultramarins.

III.   La position de la commission

La commission a supprimé l’article 11.

 

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Article 12
(article L. 831-2 [abrogé] du code de la construction et de l’habitation)
Rétablissement du volet accession des aides personnelles au logement

Article supprimé par la commission

 

Le présent article vise à rétablir le volet accession des aides personnelles au logement, qui ont été mises en extinction à partir du 1er janvier 2018.

I.   La suppression des APL accession en 2018…

Les aides personnelles au logement ont pour objectif de garantir l’accès à un logement décent et le maintien dans le logement des ménages à revenus modestes. Elles sont calculées en fonction des ressources des ménages et du coût du logement (loyer ou annuité, charges) selon des paramètres qui varient selon les territoires (I, II et III).

Les aides personnelles au logement sont de deux types ([32]) : l’aide personnalisée au logement (APL) et les allocations de logement (AL) composées de l’allocation de logement familiale (ALF) et de l’allocation de logement sociale (ALS). Financées par le Fonds national d’aide au logement (FNAL), les aides personnelles au logement représentaient en 2022 un coût de 15,565 milliards d’euros (hors frais de gestion) pour 5,797 millions de ménages bénéficiaires.

Les aides personnelles au logement ont un volet locatif et un volet accession. Le volet accession permet à des ménages modestes de bénéficier d’une aide prenant en charge une partie des mensualités de remboursement des emprunts contractés pour acquérir un logement neuf ou ancien. Pour l’aide personnalisée au logement (APL), le champ d’application du volet accession comprend les logements financés avec des prêts aidés par l’État (prêts d’accession à la propriété, prêts conventionnés, prêts à l’accession sociale) ainsi que les logements faisant l’objet d’un contrat de location-accession (logements financés par un prêt social de location-accession – PSLA – détenus par le bailleur dans un premier temps avant d’être transféré à l’accédant). L’APL accession est directement versée à la banque prêteuse et réduit donc la mensualité du crédit payée par l’emprunteur. Le barème des aides personnelles à l’accession dépend des revenus des propriétaires, de leur situation matrimoniale, du nombre d’enfants dans le ménage et du niveau de la mensualité du crédit immobilier. Les mensualités plafonds varient en fonction de la date de l’opération, de la nature du prêt et de la nature de l’opération. Les AL (ALS et ALF) bénéficient également d’un volet accession : contrairement aux conditions d’obtention de l’APL, il n’est pas nécessaire que le logement soit conventionné si le logement respecte les obligations de décence.

L’article 126 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 (LFI pour 2018) a acté la mise en extinction du volet accession de l’ensemble des aides personnelles au logement ([33]).

Le même 1° du I de l’article 126 de la LFI pour 2018 prolonge cependant le dispositif jusqu’au 1er janvier 2020 pour l’APL accession dans le cas de l’achat d’un logement ancien en zone détendue (zone 3). La loi de finances pour 2019 a ouvert une seconde dérogation, couvrant la même période, pour les projets d’accession en outre-mer. Depuis le 1er janvier 2020, il n’y a plus aucun nouveau bénéficiaire du volet accession des aides personnelles au logement, seules les personnes ayant bénéficié de l’aide avant le 31 décembre 2019 continuent à la percevoir.

II.   … a été une décision néfaste sur laquelle il faut revenir

En 2022, seuls 183 000 ménages bénéficient encore du volet accession des aides personnelles au logement pour un montant de 360 millions d’euros. Le Gouvernement avait argué de la baisse du nombre de bénéficiaires (passés de 616 000 en 2008 à 435 000 en 2016) pour supprimer ce dispositif dont le coût est maîtrisé (780 millions d’euros en 2017 avant la mise en œuvre de la réforme).

évolution du nombre des bénéficiaires et du coût du volet accession des trois aides personnelles au logement

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

524

494

483

460

435

411

382

347

303

236

183

Coût du volet accession des aides personnelles au logement (en millions d’euros)

930

910

890

870

830

780

710

640

550

410

360

Source : Commission des affaires économiques d’après les réponses au questionnaire budgétaire.

Or, ce raisonnement pourrait être inversé. La baisse du nombre de bénéficiaires est moins due à une inadéquation du dispositif qu’aux difficultés croissantes pour les personnes de classes moyenne et modeste ([34]) d’accéder à la propriété en raison notamment de la hausse du coût du foncier et des prix immobiliers. La suppression des APL accession a d’ailleurs pu contribuer à la détérioration de la situation : la production de prêts conventionnés (PC) et de prêts à l’accession sociale (PAS) a ainsi baissé de 43 % entre 2017 et 2021. Par ailleurs, la part des ménages modestes parmi les primo-accédants a baissé de 7,4 points en trois ans, passant de 27 % en janvier 2020 à 19,6 % en mars 2023 selon les données de la Banque de France.

Part des primo-accÉdants dans la production de crÉdits à l’habitat pour l’acquisition d’une rÉsidence principale

Source : Banque de France.

En prenant acte des difficultés croissantes pour les plus modestes d’accéder à la propriété, le raisonnement doit aujourd’hui être inversé.

Le coût annuel en « régime de croisière » du rétablissement du volet accession des aides personnelles serait d’environ 800 millions d’euros par an. Le présent article propose ainsi de rétablir le volet accession des APL. Le rapporteur a proposé par amendement de    compléter son par la suppression de l’article L. 841-4 du CCH, afin d’élargir son champ aux allocations de logement (AL) pour l’accession.

III.   La position de la commission

La commission a supprimé l’article 12.

 

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Article 13
Gage

L’article 13 crée un gage formel permettant de garantir la recevabilité de la proposition de loi, condition nécessaire à son dépôt. L’article crée une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Il a été adopté sans modification par la commission.


   examen en commission

Au cours de sa réunion du mercredi 29 novembre 2023, la commission des affaires économiques a examiné la proposition de loi portant mesures d’urgence pour remédier à la crise du logement (n° 1793) (M. Thibault Bazin, rapporteur).

M. le président Guillaume Kasbarian. La commission des affaires économiques examine ce matin la proposition de loi portant mesures d’urgence pour remédier à la crise du logement. Je souhaite la bienvenue à M. Thibault Bazin, son rapporteur, qui a rejoint notre commission à cette occasion.

Ce texte est inscrit à l’ordre du jour des séances réservées au groupe Les Républicains, le jeudi 7 décembre.

Trente-quatre amendements ont été déposés. Deux d’entre eux constituaient des charges financières contraires à l’article 40 de la Constitution et j’ai déclaré irrecevables quatorze amendements au titre de l’article 45, car ils n’avaient aucun lien avec les dispositions du texte soumis à notre examen. Il nous reste donc dix-huit amendements à examiner.

M. Thibault Bazin, rapporteur. « Nous vivons une triple crise de l’immobilier : une crise de l’offre de logements, une crise de la demande de logements, et une crise de l’accès au logement. » Ces mots, recueillis par L’Express le 26 novembre dernier, ne sont ni les miens, ni ceux du président de la commission des affaires économiques, ni ceux des professionnels de la filière : ce sont ceux du ministre chargé du logement.

Nous connaissons les raisons de cette crise, parmi lesquelles l’augmentation rapide des taux d’intérêt, passés de moins de 1 % en décembre 2021 à près de 4 % en octobre 2023. La baisse du pouvoir d’achat immobilier qui en résulte est à mettre en miroir avec les prix qui baissent peu, notamment dans le neuf, qui subit la hausse du coût des matériaux, le niveau élevé des prix du foncier, ainsi que les surcoûts liés à l’instauration incessante de nouvelles normes. À cette crise de la demande, s’ajoute une crise de l’offre plus structurelle, due à la mise en œuvre de l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) dans les territoires et à la densification moins bien acceptée dans les centres urbains.

Cet affaissement du marché de la vente, notamment pour le neuf qui est pourtant le plus performant du point de vue énergétique, a des conséquences en cascade sur le marché de la location. Nos étudiants et nos jeunes actifs ne trouvent plus d’appartements à louer. Les files d’attente pour obtenir un logement social ne cessent d’augmenter. Les propriétaires, inquiets face au risque de ne plus pouvoir louer leur logement en raison du calendrier de mise en œuvre des critères de décence énergétique, sont de plus en plus nombreux à jeter l’éponge.

Le diagnostic est posé et nous sommes tous conscients de cette réalité. Mais dans ce cas, comment comprendre que les principales mesures du Gouvernement ne font qu’aggraver la crise ? Comment comprendre l’extinction programmée du dispositif Pinel, accusé de tous les maux, alors que la crise du neuf s’explique pour une majeure partie par la disparition des investisseurs particuliers ? Comment comprendre le recentrage du prêt à taux zéro (PTZ) et la fin de l’éligibilité des maisons individuelles pour le neuf qui excluront des centaines de milliers de ménages dans les zones rurales et périurbaines ? Cela conduira selon les prévisions de la SGFGAS, Société de gestion des financements et de la garantie de l’accession sociale à la propriété, à une émission de seulement 40 000 prêts en 2024, contre 122 000 en 2017. Comment comprendre que le Gouvernement refuse le rétablissement des aides personnelles au logement pour l’accession, pourtant soutenu majoritairement par notre assemblée ? Comment comprendre que le Gouvernement maintienne un calendrier d’application des critères de décence énergétique alors que les propriétaires, notamment dans les copropriétés, sont dans l’impossibilité d’effectuer des travaux de rénovation et que le marché locatif n’a jamais été aussi tendu ?

Mes chers collègues, cette proposition de loi (PPL) propose un chemin diamétralement opposé à celui proposé par le Gouvernement : en temps de crise, on soutient un secteur, on ne l’enfonce pas. On n’adopte pas des mesures procycliques qui aggravent la crise. Il ne s’agit pas seulement de soutenir des entreprises du bâtiment, dans la promotion, dans les études notariales ou dans les agences immobilières – quoique plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d’emplois soient en jeu – mais, plus fondamentalement, de répondre aux aspirations légitimes et fondamentales des Français dont le parcours résidentiel a été interrompu brutalement. Dans ce contexte, ma PPL n’a pas vocation à transformer la politique du logement de fond en comble, alors qu’un projet de loi est annoncé en 2024. Elle vise à apporter des solutions de court terme, afin de ne pas voir s’effondrer tout un secteur et anéantir les espérances des Français qui veulent pouvoir se loger facilement et, pour certains d’entre eux, accéder à la propriété.

Faciliter les opérations de rénovation, fluidifier le marché locatif, favoriser la construction et l’achat de logements : voilà plusieurs mesures d’urgence. J’espère que nous en retiendrons certaines.

Les trois premiers articles de ma PPL ont trait à la rénovation énergétique.

L’article 1er part d’un présupposé simple : les copropriétés ne parviendront pas à respecter le calendrier fixé par la loi Climat et résilience. On en connaît les raisons : des aides de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) illisibles et insuffisantes pour les copropriétés, le fonctionnement propre des copropriétés qui induit un certain temps pour effectuer les travaux, l’absence de solidarité entre copropriétaires qui n’ont pas tous la même classe de performance énergétique. De deux choses l’une : soit on fonce dans le mur, et des dizaines de milliers de logements sortiront du marché locatif à partir du 1er janvier 2025, en attendant qu’ils soient rachetés par des fonds d’investissement – j’ai l’impression que c’est ce que souhaite le Gouvernement ; soit on abandonne toute ambition en matière de rénovation énergétique.

En proposant de suspendre le caractère d’indécence énergétique en cas d’adoption d’un plan pluriannuel de travaux (PPT) suffisamment performant, nous pouvons faire le choix de l’ambition et du réalisme. Les propriétaires doivent s’engager dans un calendrier de rénovation, mais il faut leur donner du temps. J’entends déjà certains dire que ce n’est pas assez exigeant, que l’adoption d’un PPT n’entraîne pas nécessairement la réalisation des travaux. Je ferai remarquer que les copropriétaires sont tenus de financer les travaux prévus par le PPT par un fonds de travaux, lorsqu’un PPT est adopté. Se doter d’un PPT, c’est donc se doter d’un plan de financement pour mener à bien des travaux complexes. Libre à vous, chers collègues, de renforcer le dispositif s’il le faut. Le tout est de donner un temps suffisant.

L’article 2 propose de repousser à 2030 l’application du calendrier de rénovation énergétique. Là encore, il ne s’agit pas de repousser pour repousser, mais de prendre acte de la situation actuelle, au-delà de la seule situation des copropriétés. Rien n’est fait pour que les propriétaires puissent engager sereinement des travaux de rénovation. Le système d’aide de l’Anah est illisible et l’Agence connaît des difficultés récurrentes de gestion. La fraude de faux artisans fait la une des journaux. Les diagnostics de performance énergétique (DPE) ne sont pas fiables. Rien ne garantit la classe énergétique du logement une fois les travaux effectués. Les entreprises ayant le label « Reconnu garant de l’environnement » (RGE) sont peu nombreuses. Ce sont autant de problèmes auxquels il faut s’atteler avant d’exiger l’impossible pour les propriétaires.

Par ailleurs, je remarque la tendance typiquement française à la surtransposition. La première échéance de nos engagements dans le cadre des objectifs européens est 2030 : pourquoi imposer à nos concitoyens une échéance préalable, alors que rien ne l’exige ?

L’article 3 propose l’instauration d’un crédit d’impôt sur les dépenses de rénovation énergétique. Il souligne l’insuffisance des aides de l’Anah et leur caractère illisible.

J’en viens au titre II, qui vise à fluidifier le marché locatif.

L’article 4 permet de revenir sur la loi de 1948. Même si les cas sont peu nombreux, des familles sont présentes depuis plusieurs dizaines d’années dans un même logement en se transmettant de génération en génération le droit de maintien dans les lieux, pour un loyer totalement dérisoire. Cette situation inique envers les propriétaires doit être corrigée, d’autant qu’elle empêche souvent d’effectuer des travaux de rénovation énergétique ambitieux, qui ne peuvent se faire qu’avec des revenus locatifs suffisants et dans un logement vide.

L’article 5 est un article de simplification qui permet d’harmoniser les règles de prolongation du bail en cas de mise en copropriété, avec le droit commun qui s’applique au locataire en cas de vente du logement dans lequel il habite.

Le titre III, enfin, concentre les principaux dispositifs de la PPL.

L’article 6 propose d’instaurer un crédit d’impôt sur les annuités des emprunts immobiliers des logements neufs soumis à la réglementation environnementale 2020 (RE2020), afin de soutenir non seulement les contribuables, mais aussi les professionnels du logement. Si le dispositif n’est ouvert que pour une année, son coût sera limité et, surtout, compensé par les recettes fiscales générées par les ventes supplémentaires. Encore plus économe, l’article 7 vise à exonérer de frais notaires les premières transmissions à titre gratuit – donation ou héritage – d’un logement acheté de l’automne 2023 à la fin de l’année 2024. À court terme, les recettes fiscales augmentent avec l’achat de logements neufs. La dépense ne se matérialise souvent que des dizaines d’années plus tard, au moment de la transmission du bien – si l’on y pense encore. C’est une mesure très efficace pour relancer la vente de logements neufs, qui est en train de s’effondrer, et dont le coût est très faible.

L’article 8 propose deux mesures : le dézonage du PTZ et l’indexation de ses paramètres. Cela va dans le sens inverse du détricotage proposé par le Gouvernement. En excluant les zones dites détendues du PTZ dans le neuf et les maisons individuelles, le Gouvernement souhaite une baisse importante du nombre de prêts émis. Disons la vérité : les effets de manche de la communication gouvernementale ne trompent personne ! La majorité souhaite tout simplement réduire à portion de congrue le nombre de PTZ, avec moins de 40 000 prêts émis en 2024, selon les prévisions qui nous ont été transmises. Sous la présidence de Nicolas Sarkozy, plus de 350 000 prêts avaient été émis en 2011. À l’époque, on pouvait parler d’une ambition pour l’accession à la propriété.

L’article 9 propose de prolonger jusqu’en 2027 le dispositif Denormandie. S’il devrait sans doute être simplifié compte tenu du faible nombre de projets menés chaque année, la finalité est la bonne puisqu’il s’agit de rénover un bien existant. Je regrette, encore une fois, le manque de transparence du Gouvernement qui a refusé de nous transmettre le rapport d’évaluation du dispositif, lequel devait être communiqué au Parlement avant le 30 septembre. Ce rapport existe, pourtant, j’en ai eu confirmation. Pouvez-vous appuyer cette demande, Monsieur le président ?

L’article 10 propose de généraliser l’expérimentation du « Pinel breton », dont tous les acteurs s’accordent à souligner la réussite. Tous ! Laisser la possibilité aux préfets de région, en accord avec les élus locaux, de choisir les territoires éligibles permet de maximiser le niveau de construction de logements en luttant contre l’étalement urbain, tout en proposant des loyers moins élevés aux locataires. L’évaluation de mi-parcours transmise au Parlement en 2022 est claire. Le « Pinel breton » constitue un vrai succès. Alors que le ministre chargé du logement ne cesse d’appeler de ses vœux une décentralisation de la politique du logement – encore hier soir –, n’allons pas chercher très loin. Nous avons là un outil qui fonctionne. La déconcentration du dispositif Pinel constitue une mesure de bon sens, qui a fait ses preuves.

L’article 11 propose de rétablir les taux du « Pinel » en vigueur jusqu’en 2022. La baisse de 30 % du nombre de ventes de logements neufs reflète une baisse bien plus importante du nombre de ventes aux investisseurs particuliers – celle-ci est de 50 %. Les taux proposés ne sont plus incitatifs. Et surtout, le « Pinel + » censé maintenir les taux précédents pour les constructions les plus performantes du point de vue énergétique n’est pas du tout opérant. Le respect de la RE2020 dans sa version en vigueur à partir du 1er janvier 2025 ne permet pas nécessairement d’atteindre la classe de performance énergétique « A », condition nécessaire pour bénéficier des taux bonifiés du « Pinel + ». Résultat, aucun promoteur ne souhaite commercialiser des logements dans l’incertitude du DPE qui sera réalisé au moment de la livraison du logement, c’est trop risqué. C’est un flop !

Le dernier article, l’article 12, permet de rétablir les APL accession. Des amendements ont été adoptés à plusieurs reprises, lors de l’examen du projet de loi de finances (PLF), pour les rétablir. Nous pouvons nous retrouver, sur les bancs de cette commission : les ménages modestes qui travaillent mais ne gagnent pas de très hauts revenus ne doivent pas être exclus de la propriété. La suppression des APL accession en 2018 a été une grande erreur de cette majorité. La part des ménages modestes au sein des primo-accédants n’a pas cessé de baisser depuis quatre ans, selon la Banque de France. Il n’est pas trop tard pour s’en rendre compte.

J’espère que nombre des mesures proposées seront retenues par la commission.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Lionel Causse (RE). On ne parlera jamais assez du logement, qui connaît sa plus grande crise depuis la seconde guerre mondiale. Je partage donc en tout point le constat général dressé par Thibault Bazin. Toute la chaîne du logement est atteinte : grippage de l’offre, de la demande, de l’accession, de l’investissement immobilier, du financement – et ce, dans tous les départements. Il sera difficile d’en dresser un bilan exhaustif en quelques minutes.

Toutefois, si l’intention est honorable, je ne pense pas que cette proposition de loi soit le véhicule législatif adéquat pour tenter d’enrayer la crise, tant celle-ci est profonde et complexe.

En effet, cette proposition de loi décline treize mesures qui, prises ensemble, n’affichent que très peu de cohérence. Des mesures relatives au diagnostic de performance énergétique en côtoient d’autres sur le prêt à taux zéro. En alliant des thématiques diverses, de la fiscalité à l’énergie, ce texte reprend aussi des mesures déjà adoptées par le Gouvernement, ou déterre des dispositifs délaissés depuis de nombreuses années.

S’agissant du report de l’interdiction de la mise en location des logements considérés comme des passoires thermiques, nous devons maintenir le cap fixé par le Gouvernement dans la loi Climat et résilience. L’article 2 de la PPL prévoit qu’aucune interdiction de louer relative au DPE ne peut être appliquée avant 2030, repoussant alors l’interdiction des locations classées « G » qui doit s’appliquer à partir du 1er janvier 2025. Or si nous voulons efficacement lutter contre les ravages du réchauffement climatique, nous devons respecter les prescriptions de cette loi exigeante mais nécessaire.

L’article 3 instaure un crédit d’impôt sur la rénovation énergétique des logements. Dès le départ, le Gouvernement a fait le choix très clair de fonder MaPrimeRénov’ sur un système de subventionnement et non pas de crédit d’impôt. Il est inutile d’y revenir, le dispositif étant de plus en plus utilisé par les Français.

Enfin, si je partage l’extension du champ du PTZ, qui vise à relancer l’accession à la propriété, l’article 8 de cette PPL ne trouvera pas à s’appliquer. J’ai d’ailleurs déposé des amendements en ce sens dans le cadre du PLF pour 2024. Un débat est cependant en cours au Sénat et arrivera prochainement à l’Assemblée nationale.

Alors qu’il importe d’adopter une approche globale en matière de logement, cette PPL ne fera que poser du sparadrap sur des plaies bien trop profondes. En outre, elle serait très coûteuse pour l’État. Ces dépenses devraient être évaluées dans le cadre d’un PLF.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Je vous remercie d’avoir partagé le constat sur la crise. Vous dites qu’une PPL n’est pas le véhicule législatif adapté. Je considère quant à moi qu’il faut saisir les opportunités lorsqu’elles se présentent.

Tous les articles ne vous conviennent peut-être pas, et vous dénoncez un manque de cohérence entre eux. C’est simplement que je n’ai pas voulu opposer le neuf et l’ancien, ou l’accédant et l’investisseur. Nous avons besoin de tout, car la crise est protéiforme.

Vous dites aussi que je déterre des dispositifs. Mais pourquoi vouloir faire preuve d’innovation quand des dispositifs ont fonctionné ? Il faut les reprendre quand ils ont été pertinents. Certains sont venus des acteurs eux-mêmes.

Vous dites qu’il faut lutter contre les ravages du réchauffement climatique. Je suis d’accord. Mais il faut surtout écrire comment on le fait.

M. Frédéric Falcon (RN). Après le bilan catastrophique de la majorité d’Emmanuel Macron, les délires d’une écologie punitive conceptualisée par une technocratie hors sol, nous étudions – enfin ! – une proposition de loi qui va dans le bon sens. Ce texte, qui ne comporte pas moins de treize articles, apporte des solutions d’urgence à la crise du logement. Nous nous félicitons que nos collègues du groupe Les Républicains prennent des positions claires contre les excès idéologiques de la majorité.

Vous proposez un allongement du calendrier de mise en application des normes énergétiques appliquées aux logements destinés à la location. Si le Rassemblement national souhaite supprimer purement et simplement cette mesure, qui déstabilise profondément le marché locatif par une augmentation de la vacance et une chute du stock de logements disponibles, nous accueillons volontiers cette souplesse que vous proposez aux Français dans un contexte inflationniste touchant les travaux d’isolation et de rénovation.

Nous accueillons aussi favorablement votre proposition de ressusciter le dispositif fiscal exceptionnel de 1993, qui propose un abattement sur les donations fléchées vers l’acquisition d’un logement neuf, afin d’aider les promoteurs à écouler leurs stocks et de les sauver de la faillite massive qui les menace. Notons que notre collègue Philippe Lottiaux a proposé un amendement allant dans ce sens dans le PLF pour 2024.

Nous validons également le retour de l’APL accession, que nous appelons de nos vœux face à Emmanuel Macron qui ne souhaite décidément plus que les Français soient propriétaires. Vous auriez également pu ajouter la déductibilité des intérêts face à la remontée des taux.

Si nous sommes globalement favorables aux mesures que vous proposez, permettez‑moi cependant de pointer votre manque de vision quant à l’aménagement de notre territoire. Nous pensons que toutes ces dispositions seront vaines sans une réelle politique de rééquilibrage entre les grandes métropoles, les zones littorales et les espaces jugés les moins attractifs. Nous ne parviendrons pas à faire baisser la tension foncière sans un coup d’arrêt net à la métropolisation qui, depuis des décennies, attire dans quelques villes à l’espace limité les capitaux, le développement économique, l’activité et les hommes. Nous sommes au bout de ce modèle, au bord de l’asphyxie, qui pénalise la croissance économique, reste néfaste à la qualité de vie des Français et accentue la dégradation de notre environnement. Faute de logements, les jeunes renoncent à leurs études et les salariés à l’emploi. Faute de foncier, les entreprises renoncent à se développer comme chez moi, à Narbonne, où la rareté des terrains disponibles freine le développement économique du territoire.

Chers collègues Les Républicains, même si c’est un bon début, les mesures que vous avancez ne pourront suffire à elles seules à sortir les Français de la crise du logement. Pour le Rassemblement national, les politiques du logement et d’aménagement du territoire sont indissociables. Nous préparons dès à présent ce projet qui sera, je le crois, porté favorablement au lendemain de l’alternance en 2027.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Je comprends mal que vous me reprochiez un manque de vision d’aménagement du territoire alors, précisément, que le texte prévoit d’ouvrir le prêt à taux zéro à l’ensemble du territoire, pour donner à tous une chance d’accéder à la propriété, et de généraliser l’expérimentation du « Pinel breton ». La PPL ne fait aucune impasse en la matière.

Avec mon collègue Jean-Claude Leclabart, nous avions mené pour la délégation aux collectivités locales une mission flash sur l’équilibre entre les territoires urbains et ruraux. Nous avions pu constater que la situation était complexe, en France, avec des territoires ruraux qui vont parfois très bien et des métropoles qui vont parfois très mal. Il faut donc pouvoir adapter les dispositions en fonction des régions. En tout état de cause, on ne peut pas attendre 2027 pour prendre des mesures d’urgence. Tel est l’objet de cette proposition de loi, qui ne vise pas à revoir l’ensemble de la politique du logement.

M. Sébastien Delogu (LFI-NUPES). Alors que nous traversons une crise du logement sans précédent avec, je le rappelle ; plus de 300 000 sans domicile fixe, avec plus d’un Français sur six concerné par le mal-logement et avec, entre autres, des loyers et des charges qui explosent tous les jours pour les plus pauvres, le groupe Les Républicains nous propose une nouvelle loi qui, sous prétexte d’urgence, vise à écraser le droit au logement digne des locataires au profit de la rentabilité économique des multipropriétaires et des marchands de sommeil qui se gavent et vivent de la misère.

Pour Les Républicains, acheter le toit de quelqu’un d’autre est avant tout un investissement qui, comme tout investissement, doit rapporter de l’argent. Et qu’importe si le prix des loyers est multiplié par deux en quarante ans au bénéfice unique des propriétaires ! Et qu’importe si les 10 % les plus modestes dépensent presque la moitié de leurs revenus pour ne pas dormir dehors ! Et qu’importe si des logements loués sont des passoires thermiques, s’ils ne protègent ni du froid, ni de la chaleur, ni de l’humidité ! N’en déplaise au LR, au RN et aux macronistes qui partagent sur ce sujet, et sur d’autres, une vision commune : le logement n’est pas un investissement comme un autre. Face à la financiarisation du marché du logement, il devient d’autant plus urgent de garantir le droit au logement en l’inscrivant dans la Constitution.

La crise à laquelle nous faisons face ne se résume pas à une crise du marché. C’est avant tout une crise sociale, une crise humaine qui, loin des préoccupations de la droite, a des conséquences concrètes pour nos concitoyens les plus pauvres – croyez-moi, car j’en ai fait les frais personnellement. Ces conséquences sont malheureusement bien loin d’une dégradation passagère des taux de rentabilité jusque-là particulièrement élevés.

À l’inverse de tout ce que propose ce texte, face à l’explosion des coûts du logement, nous devons de toute urgence geler les loyers, mieux les encadrer et interdire les expulsions sans relogement pour éviter de nouveaux drames. Face à la pénurie du logement social, nous devons construire plus, augmenter de 30 % les taux de logements sociaux pour les communes en zone tendue, notamment dans les quartiers qui en sont le plus dépourvus.

Face à la crise climatique que nous subissons et qui touche en premier lieu et inégalement les plus pauvres d’entre nous, il est nécessaire de rendre obligatoire et de planifier la rénovation globale des logements.

Puisque ce texte passe à côté de la plupart des urgences liées à la crise du logement et qu’elle rétropédale dans la totalité du peu de ce qu’elle traite, le groupe La France insoumise votera contre.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Cher collègue Delogu, votre vision est un peu caricaturale. On ne peut pas résumer les mesures de cette proposition de loi au seul objectif d’acheter le toit de quelqu’un d’autre. Je n’ai pas soutenu toutes les mesures qui ont été prises durant le dernier quinquennat mais force est de constater qu’en matière d’hébergement d’urgence, on est passé de moins de 1 milliard à 3 milliards d’euros. Certes, il y a encore beaucoup à faire, je ne le nie pas. Mais les dispositifs mis en œuvre ont permis de réelles améliorations dans la prise en charge.

Sur l’encadrement des loyers, là où il a été pratiqué, il y a eu des externalités négatives. Vous semblez aussi oublier qu’il existe déjà un encadrement de l’indexation des loyers. Si l’on veut procéder à des rénovations, il faut pouvoir les financer. Si l’on fait l’impasse sur cette question, soit il n’y aura pas de rénovation, soit il y aura des logements vacants.

M. Vincent Rolland (LR). Merci, Monsieur le rapporteur, de venir présenter vos propositions en matière de logement devant notre commission. Nous les faisons nôtres. Ce texte de treize articles est construit autour de trois grands axes : faciliter les opérations de rénovation des logements, fluidifier le marché locatif et favoriser la construction et l’achat de logements. Bien que nous soyons nombreux à déplorer la crise actuelle du logement, les solutions divergent très largement selon les groupes de notre assemblée. Pour nous, certaines vont même jusqu’à aggraver la crise du logement. Il en est ainsi des DPE pour les propriétaires-bailleurs qui, souvent, se retrouvent devant un mur pour effectuer les travaux. Des dizaines de milliers de logements menacent de sortir du marché – rien que cela ! Cette proposition de loi répond à la problématique. Elle ne nie sûrement pas l’intérêt environnemental de la mesure, mais elle est davantage pragmatique et consciente que nos entreprises et artisans ne peuvent pas satisfaire cette demande dans les délais imposés.

S’agissant de la fluidité du marché locatif, l’encadrement des loyers est aussi le symbole de la fausse bonne idée. Une personne qui souhaite investir dans la pierre pour rénover un logement et le mettre sur le marché de la location ne pourra, la plupart du temps, réaliser son projet, car l’encadrement des loyers l’empêchera d’équilibrer son opération – d’autant que des taux d’intérêt extrêmement élevés pénalisent les opérations d’emprunt.

Quant à la construction et à l’achat de logements, l’incitation reste de mise avec le déploiement plus large et plus équitable du prêt à taux zéro à l’ensemble du territoire et pour toutes les familles, tout comme la prolongation du dispositif Denormandie jusqu’au 31 décembre 2027, ainsi qu’une aide visant à encourager la rénovation de logements anciens, notamment dans les programmes Action Cœur de ville et Petites Villes de demain.

Notre groupe est force de proposition pour faire face à la crise du logement. Nous espérons pouvoir compter sur toutes les bonnes volontés pour faire adopter ces solutions de bon sens. La crise du logement, aujourd’hui, c’est d’abord un défaut d’offre.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Merci pour vos propos et votre soutien. Le DPE est un sujet majeur de cette proposition de loi. Il s’agit non pas de renoncer à l’ambition de lutter contre le réchauffement climatique ou à celle de procéder à la rénovation énergétique – il faut le faire –, mais de savoir comment on le fait, et de le prévoir avec réalisme. Comment finance‑t‑on cet objectif et comment l’accompagne-t-on ? C’est la question essentielle. Travailler sur le comment, c’est un peu le SAV, le service après vote de ce qui a été imaginé. Il y a des solutions de financement. Il faut aussi des solutions de calendrier.

S’agissant des programmes Action Cœur de ville, lancés par le Gouvernement et sa majorité, il faut aussi pouvoir écrire le « comment ». Cela passe par la prolongation du dispositif Denormandie.

M. Romain Daubié (Dem). Je vous remercie pour cette proposition de loi, qui permet d’aborder un problème important parce que oui, il y a une vraie crise s’agissant tant de la transaction, que de la construction et du marché de la location et ce, partout en France. On assiste objectivement à une chute des crédits immobiliers et, malgré l’infléchissement récent du marché immobilier, l’accession à la propriété reste difficile pour beaucoup. Quant au nombre de constructions, on note une baisse de 27 % par rapport à 2022.

J’ai moi-même déposé une proposition de loi visant à transformer plus facilement des bureaux en logements qui a été cosignée par des dizaines de députés de différents groupes. Nous le savons, les enjeux sont réels. Peut-être pourrait-on s’appuyer sur des missions en cours, par exemple celle consacrée au logement digne ou celle de Marina Ferrari portant sur la fiscalité locative. Nous ne disposons pas encore de tous les éléments pour nous forger une opinion.

Le principal reproche que je pourrais faire à cette proposition de loi est qu’elle s’appuie essentiellement sur des crédits d’impôt. En dépit de tout le respect que j’ai pour vous et de notre histoire commune, je m’interroge sur la cohérence à critiquer le déficit de l’État tout en proposant de nouvelles dépenses.

S’agissant des passoires thermiques, votre proposition occulte les 5 milliards d’euros dédiés à MaPrimeRénov’ pour 2024, qui doivent permettre aux Français de payer des factures moins élevées, de vivre mieux en rénovant leur logement et de contribuer au grand défi de la transition climatique.

Concernant le « Pinel breton », je vous renvoie au rapport de la Cour des comptes, qui est plus critique concernant ses résultats.

Nous aurons peut-être des points de convergence sur le PTZ. Élu d’une circonscription périurbaine et rurale proche d’une très grande agglomération, j’ai vu arriver de nouveaux habitants quittant les ultracentres-villes dans mon secteur, et j’ai pu en mesurer les conséquences. Je vous rejoins pour considérer que la décision du Gouvernement de recentrer très fortement les prêts à taux zéro n’est pas adaptée – avec le groupe Démocrate, j’avais signé un amendement à cet égard.

Par ailleurs, certes, le rôle des banques ne peut pas être traité dans une proposition de loi. Mais il reste que les banquiers ne font pas leur travail en matière de financement de l’immobilier et de l’accession à la propriété : je profite de cette tribune pour le dire.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Merci de partager mon diagnostic. Cette PPL n’a pas vocation à apporter toutes les mesures qu’il faudrait prendre pour le logement. Les missions en cours pourront en proposer d’autres. Il s’agit, ici, de quelques mesures d’urgence.

Par ailleurs, les douze articles ne prévoient pas tous des crédits d’impôt – heureusement ! Il y en a même qui ne coûtent rien, et d’autres qui rapporteront à l’État plus qu’ils ne lui coûteront, grâce aux recettes fiscales et sociales du logement. En effet, la construction d’un logement engendre parfois près de deux emplois. La cohérence, c’est aussi de pouvoir apporter une réponse pour le neuf, pour l’ancien, pour l’investissement et pour l’accession.

M. Inaki Echaniz (SOC). Les jours se suivent et se ressemblent, dans notre commission, alors que nous abordons ce troisième texte sur le logement en une semaine. C’est la traduction de l’urgence dans ce domaine. Monsieur le rapporteur, ne prenez pas personnellement cette critique, car je connais votre engagement en la matière, mais on ne peut pas dire que le groupe LR partage cette urgence au-delà du titre de cette PPL, qui a été placée en neuvième position de votre niche, après une urgence certainement plus écrasante : la lutte contre l’écriture inclusive.

Pourtant, votre texte aurait dû bénéficier d’un véritable débat, car au-delà de nos divergences, il a le mérite de tenter une approche globale de la crise du logement. Il pose certaines questions qu’il nous faudra traiter, comme la sortie du régime des baux de 1948, qui n’ont certes plus de sens mais permettent à leurs bénéficiaires, souvent très modestes, de se loger correctement.

Il comporte aussi plusieurs mesures qui posent des difficultés majeures. En premier lieu, vous proposez plusieurs dispositions de desserrement des objectifs fixés dans la loi Climat et résilience en matière de performance énergétique des logements. Le fait de donner de la latitude dans le cadre du plan pluriannuel des travaux fait sens, mais cette proposition est insuffisamment exigeante dans son contenu et prévoit une dérogation trop longue en se calant sur le délai de dix ans. Plus grave, vous proposez un report de cinq ans du délai pour les passoires thermiques, auquel nous ne pouvons souscrire.

Vous proposez par ailleurs des mesures traditionnelles de la droite : faire payer aux contribuables la constitution du patrimoine. C’est en particulier le cas de l’article 6, qui prévoit un crédit d’impôt pour financer l’amortissement des emprunts contractés en vue de l’acquisition d’un logement neuf répondant aux normes environnementales RE2020. Franchement, Monsieur le rapporteur, faire payer à la collectivité l’évolution des prix des matières premières pour la construction, indépendamment du niveau de revenus et de patrimoine des acheteurs, ce n’est pas sérieux !

De la même manière, la proposition qui consiste à offrir les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ou à titre gratuit (DMTG) pour les acquisitions des logements neufs ou en vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) dans l’année qui vient constitue un cadeau fiscal indu, car il ne prend pas en compte le patrimoine ou les revenus du bénéficiaire au moment de l’opération. Ce dispositif est insuffisamment cadré.

Enfin, si nous partageons la nécessité de renforcer le PTZ, les rapports successifs de la Cour des comptes ont démontré que l’outil Pinel était insatisfaisant et qu’il devait laisser place à des mécanismes plus efficients pour répondre à la demande de logement là où existe la tension, et à un coût plus raisonnable pour les comptes publics.

Par respect pour l’initiative parlementaire lors des niches, nous ne présentons pas d’amendement de suppression. Mais vous aurez compris que plusieurs dispositions nous posent difficulté.

Pour le reste, le positionnement de ce texte à la fin de votre niche ne nous a pas incités à proposer des améliorations au fond. Nous ne pourrons donc pas voter cette proposition de loi déséquilibrée.

M. Thibault Bazin, rapporteur. L’espoir fait vivre et parfois, les premiers sont les derniers. L’ordre des textes dépendra de ce qui sortira de notre commission. Peut-être le groupe LR aura-t-il envie de retenir ce texte en première place si des mesures pour tous les Français étaient retenues.

Vous évoquez la question du calendrier relatif aux passoires thermiques, en disant qu’on ne pouvait pas le reporter. Faisons alors en sorte de donner les moyens d’atteindre ces objectifs.

S’agissant de votre remarque selon laquelle on ferait payer à la collectivité la construction pour des particuliers, il n’y a pas que des particuliers qui construisent. En outre, si la crise dure, il n’y aura pas de construction, pas d’achat et donc pas de recettes pour l’État, pas de TVA, pas de DMTO… En réalité, nous serons tous perdants. Si l’on ne relance pas de manière efficace la construction et l’acquisition, on va dans le mur.

M. Luc Lamirault (HOR). Cette proposition de loi dépasse largement l’ambition d’un texte pouvant être adopté dans le cadre d’une niche parlementaire, compte tenu de la grande variété de ses articles, des sujets qu’elle entend traiter et de son impact budgétaire potentiellement massif et sans étude d’impact dans un contexte où nous devons, au contraire, porter une attention particulière sur l’état de nos finances publiques.

Concernant la proposition d’un plan pluriannuel de travaux pour les copropriétés, le pragmatisme ne correspond pas à l’urgence climatique et risquerait de maintenir les locataires dans des logements coûteux et non vertueux pendant dix ans ou plus, car les PTT ne constituent pas un engagement formel des propriétaires.

La rénovation thermique est avant tout une mesure sociale. En effet, dans les passoires thermiques, les charges de chauffage génèrent des dépenses de plus en plus insupportables pour les locataires. Je ne suis donc pas favorable à un report de la mise en application de cette mesure. Je suis, cependant, conscient et soucieux de l’impact du coût de ces travaux sur les finances des propriétaires. Je proposerai donc, pour la séance, un amendement visant à prévoir que les travaux seront réalisés à l’occasion d’un changement de locataire, et pas au plus tard deux ans après l’échéance de 2025.

La PPL souhaite aussi rétablir un ensemble de dispositifs tendant à soutenir et à dynamiser le marché du logement. Or ces mesures sont très coûteuses, et ne peuvent s’ajouter à la politique d’aides ciblées que nous avons mise en œuvre. Avec MaPrimeRénov’, nous privilégions des aides directes et nous favorisons l’emploi. Néanmoins, je vous rejoins quant à la nécessité de proroger le prêt à taux zéro et le dispositif Denormandie jusqu’en 2027 – évolution que nous avons actée lors de l’examen du budget pour 2024.

Comme je l’ai souligné la semaine dernière, nous avons tous conscience que le marché du logement est en tension et que nos concitoyens rencontrent des difficultés pour se loger à un prix abordable C’est pourquoi le Gouvernement et cette majorité sont pleinement mobilisés : ils ont engagé un soutien à la production de logements abordables, une accélération de l’adaptation du parc de logements aux transitions énergétique et démographique – avec les dispositifs MaPrimeRénov’ et MaPrimeAdapt’ – et un effort particulier, qui s’amplifiera dans les prochains mois, pour la protection des plus vulnérables et les politiques locales de l’habitat.

Pour ces raisons, le groupe Horizons et apparentés ne votera pas cette proposition de loi.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Avant de vous prononcer sur l’ensemble du texte, attendez de voir ce qui sortira de son examen en commission !

Sur le PPT, quand vous êtes copropriétaire et que vous devez provisionner des montants très importants pour effectuer des travaux, il s’agit bel et bien d’un engagement financier.

S’agissant du coût des mesures, tous les articles ne sont pas coûteux – certains ne coûtent rien. Je dirais même qu’ils pourront avoir un effet sur la perte de recettes pour l’État qu’on risque d’observer si rien n’est fait.

Enfin, vous proposerez que les travaux soient réalisés au changement de locataire. Mais les locataires ne partent pas tous en même temps dans les copropriétés qui ont besoin de travaux d’ensemble.

Mme Delphine Batho (Écolo-NUPES). Je croyais que Les Républicains voulaient changer. J’avais lu dans le journal que ce parti organisait désormais des « nuits de l’écologie » et qu’il voulait montrer à quel point il était en train de prendre à bras-le-corps les enjeux vitaux, qui sont aussi des enjeux sociaux majeurs, parmi lesquels celui des passoires énergétiques.

Il est faux et même scandaleux de mettre sur le dos de politiques écologiques qui n’ont jamais été conduites la situation actuelle de la crise du logement, laquelle est bien davantage liée à l’augmentation des taux d’intérêt. Si vous aviez abordé la question de la lutte contre les passoires thermiques de façon volontariste et concrète, on aurait pu discuter d’un certain nombre de points, comme la suppression du reste à charge pour les familles modestes dans le cadre de MaPrimeRénov’, la situation des petits propriétaires qu’il faut aider et accompagner pour qu’ils puissent satisfaire leurs obligations, les filières du bâtiment qu’il faut soutenir, les recrutements qu’il fautaccélérer. Mais telle n’est pas la philosophie de votre texte, qui consiste au contraire à défaire le peu qu’il y avait dans la loi Climat et résilience. Surtout, ce texte est dans la continuité des politiques publiques du logement qui nous ont conduits là où nous en sommes – des politiques de soutien à la construction neuve sous perfusion d’argent public, au détriment de la rénovation et de l’entretien de l’ancien. Nous ne pouvons pas soutenir ces orientations.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Des mesures permettent cette transition écologique. Je ne suis pas contre la rénovation énergétique, au contraire. Je ne fais pas partie de ceux qui nient ce défi. La question est de savoir comment on le relève. Travailler au comment, décrire des étapes réalistes et se donner les moyens de pouvoir le faire est important. J’essaie d’être pragmatique, tout en étant ambitieux.

Quand on va dans le mur, c’est compliqué. On a mené des auditions, au cours desquelles on nous a expliqué que les normes instaurées ont un coût qui pose problème. Je ne parle pas que de la construction neuve. Je prévois aussi des moyens pour la rénovation, notamment le Denormandie dans l’ancien. On ne peut pas résumer à la construction neuve cette proposition de loi.

Mme Delphine Batho (Écolo-NUPES). Il serait temps que la France se bouge au sujet des taux d’intérêt différenciés. On doit être lucide quant au caractère durable de la hausse des taux d’intérêt, et des taux d’intérêt différenciés pour les investissements écologiques. Sinon, tout bascule dans une forme d’inertie. Si l’on n’était pas dans la caricature de défaire ce qui a été fait, avec un législateur qui s’appelle Pénélope, on pourrait discuter concrètement des problèmes et la façon de les régler. Mais la philosophie de ce texte, qui va encore nourrir la bulle spéculative de la construction neuve, n’est pas la bonne orientation.

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Je vais vous faire une concession, j’ai lu en diagonale la PPL de notre collègue, tant j’ai pris conscience qu’il n’y croyait pas lui-même ! Le niveau de classement de ce texte dans la niche LR en est l’illustration.

Certes, cette PPL a le mérite de souligner l’ardente urgence qu’il y a à définir une politique publique de logement globale, cohérente et volontariste. Mais c’est vraiment son seul mérite. Pour le reste, elle additionne des recettes de droite à des propositions de droite pour le logement.

Concernant le DPE, il y a une urgence non seulement écologique, mais sociale pour les personnes concernées. Ce sont les pauvres qui sont logés dans des passoires thermiques. Les bourges ont les moyens d’être dans des maisons rénovées et correctement isolées. C’est la double peine pour les classes populaires ! Lorsqu’on décale l’ardente obligation de la rénovation thermique, on décale aussi, pour les populations concernées, une baisse du coût que représente l’énergie. Il faudrait doper, par exemple au travers de l’Anah, les mécanismes de financement public, pour faire de la rénovation dans les cœurs de ville les plus dégradés.

Vous évoquez le cadeau des DMTO pour doper l’offre de logements. Mais quelles conséquences pour les collectivités locales qui touchent ces DMTO ? Avez‑vous parlé à vos élus de la perte de recettes que cela générerait ?

Enfin, en milieu rural notamment, lorsque les maires ont des programmes de logements – par exemple, lorsqu’ils ont des friches –, ils sont confrontés à la mobilisation de fonds friches, de fonds vert, à l’ingénierie dont ne disposent pas les petites communes pour porter le foncier et faire des études de réhabilitation et de reconstruction de nature à augmenter l’offre de logements, notamment dans les bassins de vie dans lesquels les questions du logement sont prégnantes. Ce sont ces solutions qu’il faudrait avancer.

Je partage l’analyse de Delphine Batho. Le problème, c’est qu’on ne prête qu’aux riches. D’ailleurs, l’addition de vos mesures de défiscalisation renforce le fait que plus on est riche, plus on a les moyens d’investir pour se faire du blé sur le dos de ceux qui cherchent un logement. Mais il faudrait prêter, avec des taux différenciés, à ceux qui veulent accéder au droit fondamental au logement, inscrit dans le préambule à la Constitution de 1946, avec des financements croisés adaptés.

Voilà ce que m’inspire cette PPL de droite. Depuis Adam Smith, on sait qu’il ne suffit pas d’agir sur l’offre pour satisfaire la demande. C’est un peu plus compliqué que cela !

M. Thibault Bazin, rapporteur. Cher collègue Sébastien Jumel, vous m’avez au moins reconnu un mérite ! Le logement n’est ni un sujet de droite, ni un sujet de gauche : c’est un sujet pour les Français.

Le PTZ et l’APL accession ne sont pas que pour les « bourges ». Quand on aide un propriétaire à rénover, d’une certaine manière on aide le locataire de demain à avoir des factures énergétiques qui ont baissé.

Vous évoquez les DMTO, mais la PPL concerne les DMTG – qui ne vont pas aux collectivités locales, mais à l’État.

S’agissant du financement de mesures écologiques, des dispositifs existent déjà, même s’il faut sûrement les améliorer. Je pense notamment à l’éco-PTZ.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). « Gouverner c’est d’abord loger son peuple », nous disait l’Abbé Pierre. Malgré les mises en garde, il est dommage que la crise du logement se soit installée du fait de choix parfois contestables. Nous avons tous rappelé l’insuffisance de logements neufs, la flambée des prix à la location et à l’acquisition. Dans un contexte d’inflation et d’envolée des taux, les budgets de nos concitoyens sont très contraints. Il faut aussi certainement se préoccuper du caractère durable de la situation. Faute de pré-réservations, les programmes neufs ne démarrent plus et inscrivent cette crise pour quelques années encore. Cette situation devrait nous inciter à l’humilité, à la sortie du dogmatisme et à l’écoute de toutes les bonnes volontés.

L’examen du projet de loi de finances ne nous aura pas permis d’acter le choc nécessaire. Des propositions visant à soutenir le logement social, contre la suppression de la réduction de loyer de solidarité (RLS) et des taux réduits de TVA, ont été repoussées – c’était des amendements de la majorité. Il y va de même pour l’accession à la propriété. Le PTZ a été balayé, et il n’y a toujours rien en vue pour l’APL accession. Depuis hier, la question de la fiscalité des meublés de tourisme a pu avancer et aujourd’hui, nous entamons de nouveaux débats avec des propositions que nous ne partageons pas dans leur globalité mais qui ont le mérite d’exister et d’être débattues. C’est aussi une occasion, pour le Gouvernement, de réagir par rapport au texte qui nous sera présenté.

S’agissant des passoires thermiques, nous avons une vision radicalement opposée avec ce qui est proposé.

Concernant la création d’un crédit d’impôt rénovation, nous avons la conviction que cela ne permettra pas d’aider les ménages les plus modestes.

En revanche, nous soutenons la réhabilitation des APL accession, qui permettaient aux foyers modestes d’accéder à la propriété et de fluidifier le parc de logements sociaux aujourd’hui complètement grippé. De la même façon, nous pouvons certainement converger au sujet du prêt taux zéro, dont les nouveaux contours excluent du logement neuf la majorité du territoire. Comme vous, nous défendons l’accès à la propriété pour l’ensemble du territoire national.

Enfin, vous proposez la pérennisation des dispositifs Pinel et Denormandie. Cela va dans le sens d’incitations fortes à la construction et à la rénovation.

Nous le voyons, l’absence de politique de logement cohérente grippe l’économie française, en même temps qu’elle fragilise nos concitoyens. De nombreuses idées sont sur la table et dans des propositions de loi. Mais c’est au pied du mur qu’on voit le maçon. Nous attendons les actes du Gouvernement. Nous espérons qu’il entendra enfin quelque peu raison.

M. Thibault Bazin, rapporteur. J’apprécie votre humilité, que nous devrions tous partager face à la situation. Il y a une forme de frustration pour tous ceux qui sont passionnés par ce sujet : pour la deuxième année consécutive, en effet, nous n’avons pas pu examiner la mission budgétaire Cohésion des territoires dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, qui est toujours une occasion de débattre des différentes solutions et de parler de logement avec le ministre.

On peut se rejoindre autour de mesures consensuelles. Vous avez évoqué les APL accession. La fluidité du parcours pour permettre l’accession sociale à la propriété libérerait le parc social – qui fait l’objet de listes d’attente importantes –, à un coût modique, puisque les APL accession représentaient, avant la réforme de 2018, environ 700 millions d’euros chaque année. Par ailleurs, je le dis pour ceux qui, comme moi, sont attachés aux finances publiques, certaines personnes perçoivent des APL toute leur vie tandis que les APL accession sont limitées à quinze ans.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux interventions des autres députés.

Mme Florence Goulet (RN). Votre proposition de loi, en ses articles 6 et 7, aborde la problématique du logement neuf, en favorisant les acheteurs et les propriétaires avec un crédit d’impôt et une exonération des droits de mutation. C’est un sujet majeur pour les acheteurs et les propriétaires, mais aussi pour les entreprises du secteur, puisque la construction de logements neufs représente la moitié de l’activité de la profession du bâtiment. Une relance de la demande pourrait améliorer la situation, mais il y a un angle mort : la multiplication des lois et des réglementations, leur changement constant et, parfois, leur contradiction entre elles – bref, la complexité du régime normatif. Entre 2017 et 2021, les entreprises françaises se sont vu imposer 502 obligations et 3 670 pages de réglementation. La priorité, pour remédier à la crise du logement, n’aurait-elle pas consisté à favoriser la simplification et la sécurisation juridique pour les professionnels ?

M. René Pilato (LFI-NUPES). Avec votre PPL, vous essayez de sauvegarder un monde en perdition. Tout a explosé, les prix des matières premières, les devis des artisans et des entreprises, les factures des collectivités territoriales et des particuliers, les taux d’intérêt. Le reste à vivre ou le solde des budgets des collectivités s’est amoindri. Et tout ce qui a trait au logement se trouve grippé. En persistant à envisager des mesures pour sauvegarder ce système, nous allons en effet dans le mur. Un autre monde est possible.

M. Jean-Pierre Vigier (LR). Monsieur le rapporteur, cher Thibault, bravo pour cette excellente PPL ! La crise du logement exige des mesures d’urgence fortes et immédiates pour le secteur dans son ensemble. Les classes moyennes et modestes rencontrent des difficultés croissantes pour accéder à la propriété, d’une part en raison de la hausse du coût des matériaux, d’autre part en raison de la hausse des taux d’intérêt. À cet égard, et c’est une bonne chose, vous proposez de dézoner intégralement le dispositif du prêt à taux zéro, ce fameux PTZ, afin de l’élargir aux territoires ruraux. Il s’agit d’un outil important, alors que l’accès au crédit immobilier est de plus en plus difficile. Avez-vous évalué l’impact de cette mesure pour le secteur du bâtiment, qui souffre et dont l’activité dépend aussi des aides à la construction ?

M. William Martinet (LFI-NUPES). Cette proposition de loi est intéressante, en ce qu’elle est représentative de quelque chose. Face à cette grave crise du logement, qui est également sociale et économique, trois chemins sont possibles : celui de l’inaction, qui semble être la feuille de route du Gouvernement ; celui de la bifurcation, que propose mon groupe parlementaire, puisque nous considérons qu’il faut restructurer en profondeur le monde du logement pour atteindre des objectifs sociaux et écologiques ; celui de la nostalgie de l’ancien monde, que vous incarnez parfaitement, collègue Bazin, en proposant de rétablir les anciens dispositifs fiscaux qui font pleuvoir l’argent sur les multipropriétaires, de préserver la rente et des intérêts économiques qui ont gagné beaucoup d’argent et qui doivent, selon vous, continuer à en gagner. Tout cela sent bon la nostalgie. Mais vous comprendrez que nous soyons politiquement en désaccord avec ces orientations.

M. Jean-Luc Bourgeaux (LR). Comme je l’ai fait hier soir s’agissant des meublés de tourisme, je veux à nouveau soulever la question des impayés de loyer et la difficulté à faire partir les mauvais payeurs. Beaucoup de propriétaires ne veulent plus louer à l’année et vont jusqu’à préférer garder leurs locaux vides. Avez-vous des solutions ?

M. le président Guillaume Kasbarian. S’agissant des impayés, nous avons voté une proposition de loi visant à diviser par trois les délais. On a d’ailleurs été durement attaqué sur le sujet. Une énorme avancée a été obtenue, coconstruite avec le groupe LR, notamment avec Annie Genevard et avec les sénateurs, et les délais ont fortement diminué. Et ce, pour la raison que vous évoquez, en l’occurrence la crainte de ne pas pouvoir reprendre son bien et d’avoir des impayés pendant longtemps. Je n’ai pas vu d’accroche, dans le texte de M. le rapporteur, concernant cette question.

S’agissant par ailleurs de la rénovation thermique, je ne comprends pas pourquoi il faudrait envoyer aujourd’hui un signal de retrait total du calendrier, alors que des propriétaires sont engagés dans des travaux et qu’on peut y arriver d’ici au 31 décembre 2024. Pourquoi le 29 novembre 2023, alors qu’il reste un an pour atteindre l’objectif, faudrait-il lever le crayon et dire aux propriétaires de ne pas faire de travaux ? Ne serait-il pas plus pertinent de faire un point d’étape l’année prochaine, pour savoir exactement qui ne peut pas faire les travaux, si des copropriétés sont vraiment empêchées de le faire, ce qui bloque et ce qu’il faudrait revoir ? Ne peut-on pas imaginer une autre approche que la vôtre, Monsieur le rapporteur ?

Mon autre question porte sur le coût de votre proposition de loi. De nombreux articles proposent en effet des crédits d’impôt, des APL accession ou du « Pinel + ». Cela semble être une PPL à plusieurs milliards d’euros. Avez-vous chiffré son coût pour les finances publiques ? Je sais que vous êtes sensible à la question de l’argent public.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Florence Goulet, vous évoquez un grand blocage législatif. Mais plus on travaille le sujet, et plus cela relève du réglementaire. Et ce sont les mesures réglementaires, qui ont engendré des coûts. Mais je ne peux pas toutes les balayer, parce que certaines répondent à de bonnes intentions. Réglementation incendie, accessibilité, performance énergétique : à chaque fois, on a essayé de répondre à une demande légitime des Français. Il faut pouvoir conjuguer ces mesures en y remettant du bon sens.

René Pilato, vos remarques rejoignent d’ailleurs celles de William Martinet – mais vous êtes dans le même groupe ! J’ai le sentiment non pas d’être dans l’ancien monde mais de proposer des mesures d’accompagnement du changement. D’ailleurs, je ne supprime par la RE2025 avec la mesure « Pinel + ». Je dis juste qu’il y a deux critères, le DPE « A » et RE2025, le premier posant un problème. Gardons l’ambition d’être au-delà de la réglementation actuelle. Enfin, je ne conteste pas l’augmentation des étiquettes énergétiques. Je propose simplement d’écrire un chemin du techniquement, du financièrement et de l’humainement possible.

Monsieur Vigier, après nos auditions, nous estimons que le PTZ, avec le dézonage et une quotité finançable intéressante pour l’ensemble du territoire aura un effet volume, en multipliant par deux le nombre de prêts émis sur le territoire.

Sur les impayés et les mauvais payeurs, Monsieur Bourgeaux, sujet souvent évoqué, notamment par l’UNPI, l’Union nationale des propriétaires immobiliers, il faut voir comment sont appliquées les mesures déjà adoptées. Je pense en particulier à la PPL Kasbarian.

J’en viens aux questions du président. Concernant la rénovation thermique, pourquoi enverrait-on un signal aujourd’hui ? Parce que nous n’arriverons pas à atteindre la trajectoire d’ici à la date butoir : le Gouvernement prévoit 200 000 rénovations globales chaque année, il y en a eu 60 000 l’an dernier et il existe 1,5 million de passoires énergétiques F et G. N’oublions pas que les acteurs immobiliers anticipent. Si le calendrier est réaliste, ils feront ces travaux. N’attendons pas neuf mois et proposons-leur un calendrier tenable pour les inciter à faire la démarche au lieu d’abandonner avant même d’avoir essayé de commencer.

Avons-nous chiffré la PPL ? Oui ! Comme vous l’avez dit la semaine dernière, les APL accession coûtent quelques dizaines de millions d’euros la première année. Avec la montée en puissance, on atteindrait environ 800 millions d’euros en régime de croisière. Les DMTG ne coûtent rien. Pour le « Pinel », les évaluations ont été présentées dans les débats du projet de loi de finances. Certes, ces mesures ont un coût, mais il faut mettre en face les recettes qu’elles génèreront. Rappelons-le, les recettes de DMTO sont en baisse de 20 % en un an ! Si cela continue ainsi la situation va devenir dramatique, notamment pour les départements. Si certaines mesures sont trop coûteuses, mettons-les de côté, mais ne jetons pas l’ensemble de la PPL car elle en comprend d’autres qui iraient dans le bon sens pour remédier à la crise.

Article 1er (article 6 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs) Suspension du critère de décence énergétique pour les logements d’une copropriété ayant adopté un plan pluriannuel de travaux

 

Amendements CE35 de M. Thibault Bazin, CE2 de M. Frédéric Falcon et CE21 de M. Lionel Causse (discussion commune)

M. Thibault Bazin, rapporteur. L’amendement CE35 tient compte des différentes critiques que j’avais anticipées, notamment celle de Luc Lamirault sur l’absence de caractère contraignant du programme pluriannuel de travaux (PPT). Il vise donc à mieux encadrer et à renforcer le dispositif, en précisant que les logements peuvent être considérés comme décents uniquement pendant la durée d’exécution du premier PPT, adopté un an au plus tard après les délais impartis par la loi Climat et résilience. Ainsi, les copropriétés qui n’auront pas réalisé les travaux inscrits dans le premier PPT ne pourront pas en prévoir d’autres dans le seul but de bénéficier indéfiniment de l’exemption de décence énergétique.

M. Frédéric Falcon (RN). L’amendement CE2 vise à lever l’interdiction de location d’un logement dont le diagnostic de performance énergétique (DPE) ne répond pas au niveau de performance minimal requis. Au regard de l’urgence climatique, la France représente 0,9 % des émissions de CO2 dans le monde et l’immobilier résidentiel à peine 12 % des émissions de CO2 en France, soit 0,1 % des émissions de CO2 au niveau mondial. Les efforts imposés aux propriétaires sont donc très lourds.

Par ailleurs, les DPE contribuent à créer de grosses difficultés sur le marché locatif, notamment en Île-de-France, où un logement sur deux ne sera plus louable en l’absence de travaux. L’utilisation du DPE comme critère de décence énergétique des logements pose beaucoup de difficultés, puisque de nombreux immeubles ou logements sont classés F ou G, notamment les immeubles haussmanniens à Paris, sans qu’ils ne puissent pour autant être qualifiés d’indécents.

M. Lionel Causse (RE). L’amendement CE21 vise à demander un rapport au Gouvernement sur les mécanismes d’incitation à l’adoption d’un plan pluriannuel de travaux, dans la mesure où le calendrier de la loi « climat et résilience » ne correspond pas toujours au rythme de la copropriété. Au cours de l’année 2024, il nous faudra en effet faire un point sur l’avancée des travaux de rénovation, globale ou partielle, afin de sortir éventuellement certains logements des catégories F et G.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Je suis bien évidemment favorable à l’amendement que j’ai déposé. Je m’interroge d’ailleurs sur un point : que se passera-t-il si, dans cinq ou dix ans, l’ensemble des travaux réalisés dans un PPT ne permettent pas d’atteindre l’étiquette énergétique visée, ou en cas de force majeure liée à des éléments conjoncturels ?

J’émets un avis défavorable à l’amendement CE2. En effet, la France a des engagements à honorer : nous ne saurions donc proposer un calendrier de sortie des passoires énergétiques qui ne les anticipe pas. Il faut inciter les propriétaires à rénover leur bien, tant pour les locataires, dont la facture diminue, que pour les propriétaires, qui valorisent ainsi leur bien. Je ne suis pas favorable à la suppression pure et simple de tout objectif en matière de performance énergétique

Quant à l’amendement CE21, il a pour mérite d’envoyer un message au Gouvernement. Le rapport qu’il sollicite n’est cependant pas utile, dans la mesure où nous connaissons les mécanismes d’incitation à l’adoption d’un PPT. De plus, l’opportunité de suspendre le mécanisme de l’indécence énergétique en cas d’adoption d’un PPT n’est pas à démontrer : le PPT prévoit les travaux à réaliser pour permettre la rénovation énergétique de l’immeuble, la classe énergétique à atteindre, ainsi qu’un échéancier et le financement des travaux à réaliser, grâce à un fonds alimenté par les contributions annuelles des copropriétaires. Avis défavorable.

M. Lionel Causse (RE). Une dynamique est actuellement à l’œuvre : tous les acteurs de la filière sont en ordre de marche pour accélérer les travaux, tout comme l’est le Gouvernement – le dispositif France Rénov’ est en place et des augmentations budgétaires sont prévues. Donner le signal d’une décélération de cette dynamique, en ne respectant pas le calendrier prévisionnel, serait donc risqué. Il faut, au contraire, faire un point d’étape courant 2024, pour évaluer les mesures d’ajustement nécessaires.

M. Frédéric Falcon (RN). Monsieur le rapporteur, vous avez mis l’accent sur l’une de nos craintes, celle que tous les efforts déployés pour atteindre des objectifs de performance énergétique ne soient vains ou partiels. Nous sommes convaincus qu’il faut sortir les DPE des critères de décence des logements. Nous sommes, en revanche, favorables à une généralisation du permis de louer.

M. Thibault Bazin, rapporteur. La question est stratégique : la menace de l’échéance du 1er janvier 2025 se traduira-t-elle par l’exécution du volume de travaux attendu ? Nous constatons que certaines personnes renoncent à leur projet de travaux, en se disant qu’elles n’y arriveront pas. En outre, même si les crédits sont à la hausse, ils ne sont pas tous consommés, comme l’ont montré les annulations de crédits lors de l’examen du projet de loi de finances de fin de gestion. Je crains fortement qu’au 1er janvier 2025, des dizaines de milliers de logements cessent d’être mis en location, exacerbant davantage les tensions sur le marché locatif et empêchant les locataires d’accéder à un logement. Enfin, la généralisation du permis de louer n’est pas souhaitable parce que c’est très lourd à mettre en œuvre et pas forcément adapté.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Elle rejette l’article 1er.

 

Après l’article 1er

 

Amendement CE1 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). De même que nous sommes opposés à la généralisation des DPE comme conditions locatives, nous souhaitons mettre fin à l’obligation de réaliser un audit énergétique pour les ventes de logements classés F ou G.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Vous proposez de supprimer l’obligation de réaliser un audit énergétique en cas de vente d’une passoire thermique. Or, un tel audit est bénéfique en cas de vente d’un logement peu isolé, puisqu’il permet d’objectiver la valeur du bien et les travaux réalisés. Il participe à la transparence de la transaction entre l’acheteur et le vendeur. Par ailleurs, le dispositif Mon accompagnateur Rénov’, qui permet de bénéficier d’une aide de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) en cas de rénovation globale performante, comprendra obligatoirement un audit énergétique, à partir du 1er janvier. L’audit énergétique sera donc réalisé dans tous les cas, puisque les ménages qui achètent une passoire thermique voudront effectuer des travaux de rénovation au moment de l’acquisition. Avec votre amendement, l’obligation de faire un audit énergétique pèsera sur les épaules de l’acquéreur, ce qui n’est pas forcément une bonne chose. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout. Je suis choqué par les propositions du groupe du Rassemblement national, qui se soucie peu de la qualité des logements dans lesquels sont accueillis les locataires. Certains d’entre nous ont été maires et ont effectué des contrôles des conditions d’hygiène et de sécurité des logements, dans le cadre des règlements sanitaires départementaux. Il n’était cependant pas possible d’intervenir sur la qualité énergétique du bâtiment et de préconiser la réalisation de travaux, car le DPE n’était pas opposable. Il est donc bienvenu que des dispositions permettent d’avancer sur cette question.

M. Frédéric Falcon (RN). C’est le caractère obligatoire de ces nouvelles normes qui nous pose problème. Leur coût équivaut à 700 euros pour chaque intervention, ce qui n’est pas négligeable, surtout dans des milieux ruraux, où le montant des transactions est faible. Trop de normes risquent de tuer le secteur de l’immobilier. Il est bon de vouloir améliorer le confort, la qualité et la performance énergétique des logements, mais là, c’est devenu excessif.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE4 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). Il vise à demander un rapport sur l’efficience des DPE. La question est celle de la pérennité des travaux effectués. Nous ne sommes pas opposés à la rénovation énergétique des logements, mais nous constatons que l’on en attend beaucoup, alors que la réalité est souvent très différente. À cet égard, la Cour des comptes a relevé certains dysfonctionnements : 60 % des logements où des travaux ont été réalisés restent classés F, G ou D. Un rapport de l’université de Cambridge démontre quant à lui le caractère éphémère de la performance – deux ans pour l’isolation des combles et quatre ans pour une isolation par l’extérieur (ITE).

M. Thibault Bazin, rapporteur. Votre amendement propose un rapport sur la fiabilité des DPE. Il faut en effet améliorer le dispositif. Il n’est pas possible qu’un même logement fasse l’objet de classes énergétiques différentes, selon les diagnostiqueurs qui réalisent le DPE. J’émets donc un avis favorable à cet amendement, de façon à éclairer la représentation nationale – a fortiori, Monsieur le président, si nous faisons un point d’étape au milieu de l’année prochaine.

M. Lionel Causse (RE). Il faut effectivement des outils fiables pour rassurer les Françaises et les Français sur la qualité des travaux et sur l’état de leur logement. À cet égard, les mesures prises par le Gouvernement – France Rénov’, les accompagnateurs Rénov’, le label RGE – constituent des signaux positifs, malgré les abus qui peuvent exister. Je vous invite à lire le rapport du Conseil national de l’habitat (CNH) sur la filière des DPE, qui sera rendu public prochainement.

M. Vincent Rolland (LR). J’émets un avis favorable à cet amendement. Les DPE engagent des dizaines, voire des centaines de milliers de propriétaires à faire des travaux dont on ignore s’ils sont réellement justifiés.

La commission rejette l’amendement.

 

Article 2 (article 6 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs) Report du calendrier de mise en œuvre des obligations de décence énergétique

 

La commission rejette l’amendement rédactionnel CE33 de M. Thibault Bazin.

 

Elle rejette l’article 2.

 

Article 3 (article 200 quater AB [nouveau] du code général des impôts) Création d’un crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des logements

 

Amendement CE32 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin, rapporteur. J’ai entendu les nombreuses critiques sur le coût des mesures prévues par cette proposition de loi. Cet amendement vise donc à mieux encadrer le crédit d’impôt au titre des dépenses en faveur de la rénovation énergétique des logements, pour limiter le reste à charge après le paiement des différentes aides publiques. Il précise la liste des dépenses éligibles et prévoit un taux majoré en cas de rénovation globale performante. Il est donc très incitatif et prévoit un plafond élevé, permettant de limiter le niveau du reste à charge. Le bénéfice du crédit d’impôt est exclusif du doublement du déficit foncier dont peut bénéficier un propriétaire bailleur en cas de location nue. Le système des aides de l’Anah ne permet pas de répondre à toutes les situations. Il s’agit d’aller encore plus loin, avec plus de rénovation et un système plus efficace, plus lisible et plus incitatif.

M. Lionel Causse (RE). Nous sommes défavorables à cet amendement, qui vise à réintroduire des mesures supprimées il y a de nombreuses années, alors que nous disposons de suffisamment d’outils : MaPrimeRénov, un taux de TVA à 5,5 % pour les rénovations énergétiques, un prêt à taux zéro – l’éco-PTZ –, un prêt avance rénovation. Mieux vaut travailler à les optimiser.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Il faut réussir à passer de 60 000 rénovations globales l’année dernière, à 200 000, soit plus qu’un triplement. En outre, serait-ce suffisant pour traiter les 1,5 million de passoires énergétiques, qui risquent de sortir du marché ? Non, car nous ne tiendrons pas les délais. Des outils sont donc nécessaires, pour faire encore plus de rénovations et pour lutter contre les ravages du réchauffement climatique.

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette l’article 3.

 

Article 4 (article 5 de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement) Modification des dispositions relatives au droit au maintien dans les lieux pour les héritiers de titulaires d’un bail soumis au régime de la loi de 1948

 

Amendement CE36 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin, rapporteur. Nous en arrivons au titre II de la proposition de loi, qui vise à fluidifier le marché locatif. Cet amendement est le fruit des auditions que nous avons menées. Il vise à rendre les dispositions du premier alinéa de l’article 5 de la loi de 1948 applicables à tous les décès ou abandons de domicile survenus après le 1er septembre 1948. En substance, quelle que soit la date de décès ou de l’abandon de domicile du titulaire du contrat de location, le transfert du droit au maintien dans les lieux ne pourra se faire qu’au bénéfice des personnes visées à l’alinéa précité.

En rendant cette disposition rétroactive, l’objectif est de revenir sur la jurisprudence de la Cour de cassation, qui applique le droit en vigueur au moment de l’élément déclencheur – décès, abandon du domicile –, avant les différentes révisions de l’article 5 de la loi de 1948, notamment en 1986 – exclusion du droit au maintien des enfants majeurs – et en 2006 – non application de l’article 1742 du code civil.

Cette jurisprudence extensive confère un droit de transmission du bail de génération en génération, ce qui repousse d’autant la sortie des loyers de 1948 et la possibilité pour les propriétaires des logements concernés de récupérer leur logement et de le rénover.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 4 non modifié.

 

Article 5 (article 11-2 [abrogé] de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs) Restriction du droit à la prorogation du bail dans le cas de la mise en copropriété d’un immeuble

 

La commission rejette l’article 5.

 

Article 6 (article 200 quindecies [nouveau] du code général des impôts) Création d’un crédit d’impôt au titre des annuités de remboursement des emprunts immobiliers pour l’achat d’un logement affecté à la résidence principale

 

Amendement CE5 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). Il vise à remplacer le crédit d’impôt de 15 % des annuités d’emprunt sur cinq ans, que vous avez proposé, par un crédit d’impôt des intérêts d’emprunt sur dix ans. Cette adaptation, lissée dans un temps plus long, atténuera les effets de ce dispositif fiscal sur les finances publiques.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Vous êtes plus sarkozyste que moi ! L’objectif du dispositif que je vous propose est de resolvabiliser les classes moyennes. Ainsi, un couple dont la mensualité est de 835 euros maximiserait le bénéfice du crédit d’impôt. Or, le vôtre profitera davantage aux ménages plus aisés, car il est bien plus rare d’arriver à 8 000 euros d’intérêts par an pour un couple, soit une mensualité supérieure à 2 000 euros : les ménages aisés bénéficieraient davantage du crédit d’impôt que les ménages des classes moyennes. Il ne faut pas avoir la nostalgie de l’ancien temps, mais aider les Français en 2023.

M. Lionel Causse (RE). Une remarque rédactionnelle, la réglementation environnementale 2020 (RE2020) est déjà opérationnelle depuis le 1er janvier 2022. Par ailleurs, nous débattons déjà, dans le cadre du projet de loi de finances, du prêt à taux zéro, prolongé jusqu’en 2027, et du Pinel+. Travaillons sur les outils existants, plutôt que d’inventer un crédit d’impôt.

M. Frédéric Falcon (RN). Je ne partage pas votre avis, Monsieur le rapporteur. Nous avons fait une simulation : un prêt de 300 000 euros sur vingt ans, avec un taux d’intérêt à 5 %, revient à 8 758 euros par an avec le dispositif que vous proposez, et à 3 500 euros par an avec le nôtre. Dans cette affaire, nous ne sommes donc pas forcément les plus sarkozystes !

M. Thibault Bazin, rapporteur. Monsieur Causse, la RE2020 s’applique déjà, mais elle comporte quatre seuils, dont chacun renchérit les coûts.

Monsieur Falcon, les emprunts des classes moyennes sont de montant inférieur – plutôt 200 000 euros en moyenne –, surtout dans les territoires ruraux.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE31 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin, rapporteur. Il fixe à cinq ans la durée minimale d’affectation à la résidence principale du logement acquis par un prêt dont les annuités font l’objet du crédit d’impôt. Cinq ans, cela correspond à la durée du bénéfice du crédit d’impôt : c’est cohérent.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE30 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin, rapporteur. Il précise que, pour bénéficier du crédit d’impôt sur les annuités de remboursement d’un prêt immobilier, le logement acquis ou construit doit respecter la réglementation RE2020, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2022.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE29 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin, rapporteur. Je suis soucieux des finances publiques, comme vous, Monsieur le président. Dans cette logique, mon amendement vise à éviter tout effet d’aubaine en restreignant le bénéfice du crédit d’impôt aux offres de prêt émises à partir du 1er novembre 2023, jusqu’au 1er janvier 2025. Il s’agit d’une mesure d’urgence, limitée à la période où les taux d’intérêt sont les plus élevés. Le dispositif cible ainsi les ménages confrontés à la perte de pouvoir d’achat immobilier la plus importante.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle rejette l’article 6.

 

Article 7 (article 793 du code général des impôts) : Exonération des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour la transmission d’un immeuble acquis neuf ou en état futur d’achèvement et destiné à être affecté à la résidence principale

 

Amendement CE23 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin, rapporteur. À la lumière de nos auditions, il s’agit d’exonérer de DMTG (droits de mutation à titre gratuit) les logements acquis entre le 1er septembre 2023 et le 31 novembre 2024 en ciblant les constructions les plus performantes du point de vue énergétique et les résidences principales et en rehaussant à 150 000 euros le plafond de l’exonération pour tenir compte de l’augmentation des prix de l’immobilier depuis trente ans.

La nouvelle rédaction de l’article 7 que nous proposons ici résulte de l’expertise juridique qui nous a alertés sur le risque de supprimer l’exonération applicable aux biens acquis entre 1993 et 1994.

M. Lionel Causse (RE). Nous voterons contre l’article 7, qui crée un effet d’aubaine au détriment d’autres types d’investissement. En outre, sa portée serait très limitée : les constructions prévues pour le 1er octobre 2024 sont déjà en cours et, pour la quasi-totalité d’entre elles, vendues.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Vous vous concentrez sur la construction, mais l’acquisition fait elle aussi partie du parcours résidentiel. Il faut la faciliter si nous ne voulons pas de logements vacants, qui restent parfois en vente pendant des mois dans nos centres-villes ou centres-villages. Or le nombre d’acquisitions a très fortement baissé. Notre proposition a aussi pour but de la relancer.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle rejette l’article 7.

 

Article 8 (articles L. 31-10-2, L. 31-10-3, L. 31-10-4, L. 31-10-9 et L. 31‑10-10 du code de la construction et de l’habitation et article 90 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011) : Dézonage du PTZ et augmentation des plafonds du coût total de l’opération et des ressources déterminant l’éligibilité des ménages

 

Amendement CE22 de M. Lionel Causse

M. Lionel Causse (RE). Il s’agit de prendre en compte les avancées réalisées en première lecture du PLF concernant les seuils du PTZ (prêt à taux zéro), conformément à des amendements déposés par la majorité et acceptés par le Gouvernement.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Vous ne nous présentez que les aspects positifs de la réforme du PTZ. En réalité, avec votre amendement, 94 % du territoire restera exclu du bénéfice de ce dispositif – disons peut-être 93 % si l’on tient compte de son extension à un plus grand nombre de communes.

Il y a eu 66 000 PTZ en 2022 ; vous en prévoyez 20 000 de moins en 2024, encore moins qu’en 2023. Soyez plus ambitieux, demandez au Gouvernement d’aller plus loin ! Les sénateurs ont adopté un amendement allant dans ce sens. Il faut suivre cette démarche, pour l’égalité des chances dans l’ensemble du territoire.

M. Lionel Causse (RE). L’amendement sénatorial dont vous parlez correspond à celui que j’avais déposé à l’Assemblée nationale : j’ai bien conscience de ces enjeux. Mais je répète qu’ils relèvent du PLF et non d’une proposition de loi. Fondons-nous pour l’instant sur ce qui est acté dans le cadre du PLF et débattons au Sénat et à l’Assemblée sur l’évolution du PTZ ; je ne doute pas qu’il y aura des avancées en la matière.

M. Thierry Benoit (HOR). J’aimerais que l’on réfléchisse à un PTZ applicable aux opérations de démolition-reconstruction, destiné aux jeunes et aux primo-accédants dans les villes moyennes et les territoires ruraux. Il s’agit de se préoccuper de la consommation de foncier et de permettre à des jeunes de revenir dans ces territoires en accédant à la propriété, une perspective que le pays devrait pouvoir offrir à sa jeunesse.

M. Thibault Bazin, rapporteur. C’est votre bon sens de terrain qui parle. Dans nos villages, il y a des friches rurales en plein centre, avec parfois des corps de ferme de 25 mètres de profondeur que l’on ne peut pas réhabiliter pour en faire un logement de qualité et qui restent à l’abandon, quelquefois sans toiture. Vous lancez un bel appel dont j’espère qu’il sera entendu par le Gouvernement.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 8 est ainsi rédigé et les amendements CE24, CE25 et CE26 de M. Thibault Bazin tombent.

 

Article 9 (article 199 novovicies du code général des impôts) Prolongation du dispositif Denormandie

 

La commission adopte l’article 9 non modifié.

 

Article 10 : (article 199 novovicies du code général des impôts) Généralisation du dispositif Pinel breton

 

La commission rejette l’article 10.

 

Article 11 (article 199 novovicies du code général des impôts) Rétablissement des taux du dispositif Pinel

 

La commission rejette l’article 11.

 

Après l’article 11

 

Amendement CE27 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin, rapporteur. Cet amendement de bon sens vise à rendre plus incitatif le dispositif Pinel +. Sans renoncer à nos ambitions, il s’agit de stimuler les investissements vertueux. Ainsi, l’investisseur pourrait bénéficier du Pinel + si le logement respecte la RE2025, avec les surcoûts qui lui sont liés. Actuellement, pour y prétendre, il lui faut en outre obtenir une classe énergétique A lors du diagnostic. Or on n’est jamais sûr de l’étiquette énergétique après travaux, ce qui décourage les investisseurs potentiels. Les opérateurs nous ont même dit qu’ils ne proposaient pas de Pinel + de peur de décevoir leurs clients.

Nous avons besoin d’un dispositif puissant pour relancer l’investissement. Si nous voulons redensifier au moyen d’immeubles collectifs, il faudra des dispositifs pour les investisseurs bailleurs : il est nécessaire de vendre certains logements plus vite pour lancer la commercialisation afin que les autres logements aillent à des propriétaires accédants.

La commission rejette l’amendement.

 

Article 12 (article L. 831-2 [abrogé] du code de la construction et de l’habitation) : Rétablissement du volet accession des aides personnelles au logement

 

La commission rejette l’article 12.

 

 

Article 13 : Gage

 

M. le président Guillaume Kasbarian. Je vous demande de maintenir le gage, puisque nous avons adopté les articles 4, 8 et 9.

 

La commission adopte l’article 13 non modifié.

 

 

Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

 


—  1  —

   Liste des personnes auditionnées

Par ordre chronologique

Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) *

M. Sylvain Grataloup, président

Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) *

M. Pascal Boulanger, président

Mme Anne Peyricot, directrice de cabinet et des relations institutionnelles

Fédération française du bâtiment (FFB) *

M. Loïc Chapeaux, directeur des affaires économiques

Mme Léa Lignières, chargée d’études aux relations parlementaires

Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) *

M. Loic Cantin, président adjoint

Mme Nathalie Ezerzer, directrice juridique

Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) *

M. David Morales, vice-président en charge des affaires économiques

M. Thibaut Bousquet, responsable des relations institutionnelles

Mme Florence Cannesson, chargée de mission à la direction des affaires économiques

Fédération française bancaire *

M. Pierre Bocquet, directeur de la banque de détail et à distance

M. Antoine Barthélémy, chargé de mission relations institutionnelles France

Audition commune :

Direction de la législation fiscale (DLF)

M. Aulne Abeille, pour la sous-direction de la fiscalité directe des entreprises MM. Nicolas Chayvialle et Frédéric Parrenin pour le Bureau C2 de la sous‑direction de la fiscalité des personnes

Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP)

Mme Amélie Renaud, adjointe au DHUP, accompagnée de trois sous‑directions

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.


([1]) Données de l’Observatoire Crédit Logement/ CSA.

([2]) Dans le parc social, l’Union sociale pour l’habitat recensait fin 2022 un total de 2 423 000 ménages en demande d’un logement social, soit une hausse de 7 % par rapport à 2021. Les agents immobiliers interrogés par la FNAIM constatent une chute de près d’un tiers du nombre de biens mis en location en 2023 par rapport à 2022.

([3]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([4]) Loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement.

([5]) Les territoires ultramarins (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte) bénéficient d’un calendrier adapté. Le niveau de performance d’un logement décent doit atteindre au moins la catégorie F au 1er janvier 2028 et la classe E au 1erjanvier 2031.

([6]) Article L 126-26 du CCH.

([7]) Voir par exemple : Rapport n°811 de M. Guillaume Gontard au nom de la commission d’enquête du Sénat sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique, juin 2023.

([8]) Rapport (n°1242, seizième législature) de M. François Jolivet au nom de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur les dispositifs de soutien à la rénovation énergétique de l’ANAH, mai 2023.

([9]) Cf. article 50 du projet de loi de finances pour 2024.

([10]) Cass. 3e civ., 8 décembre 1999, n° 98-13.416.

([11]) Cass., 3e civ., 23 juin 1998, n° 96-12.872.

([12]) I bis de l’article 5 de la loi de 1948 : « Nonobstant les dispositions de l'article 1742 du code civil, même en l'absence de délivrance d'un congé au locataire, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire. Le contrat de bail est également résilié de plein droit en cas d'abandon du domicile par le locataire, même en l'absence de délivrance d'un congé ».

([13]) La liste des bailleurs institutionnels est fixée à l’article 41 ter de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière.

([14]) Article 10 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

([15]) https://www.banque-france.fr/fr/publications-et-statistiques/statistiques/panorama-des-prets-lhabitat-des-menages

([16]) Cf. arrêté du 4 août 2021 relatif aux exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiments en France métropolitaine et portant approbation de la méthode de calcul prévue à l'article R. 172-6 du code de la construction et de l’habitation.

([17]) En l’état, l’article 7 écraserait l’exonération prévue pour les acquisitions ayant eu lieu du 1er juin 1993 au 31 décembre 1994.

([18]) Articles 244 quater V, 199 ter T, 220 Z ter du code général des impôts.

([19]) Article 59 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015. Par exception, l’achat d’un logement social existant peut être financé par un PTZ sans réalisation de travaux.

([20]) Les travaux d’amélioration ou d’économies d’énergie doivent représenter au moins 25 % du coût total de l’opération.

([21]) Décret n° 2014-889 du 1er août 2014 relatif aux prêts ne portant pas intérêt consentis pour financer la primo-accession à la propriété.

([22]) Décret n° 2015-1813 du 29 décembre 2015 relatif aux prêts ne portant pas intérêt consentis pour financer la primo-accession à la propriété.

([23]) Le coût total de l’opération comprend le coût des travaux, le prix d’acquisition, les honoraires de notaire, les commissions versées aux intermédiaires, les droits d'enregistrement ainsi que la taxe de publicité foncière.

([24])Cf. article 46 AZA octies-0 A du code général des impôts et arrêté du 26 mars 2019 relatif à la réduction d’impôt sur le revenu au titre de l'investissement locatif prévue à l'article 199 novovicies du code général des impôts, pris pour l'application du 3° de l'article 46 AZA octies-0 A de l'annexe III, du même code.

([25]) Le dispositif s’applique également aux logements anciens indécents faisant l’objet de travaux de réhabilitation permettant d’obtenir des performances techniques voisines d’un logement neuf ainsi qu’aux locaux affectés à un usage autre que l’habitation et faisant l’objet de travaux de transformation en logement.

([26]) Ces deux plafonds préexistants au dispositif « Pinel » n’ont pas été revus depuis son instauration.

([27]) Cf. arrêté du 1er août 2014 pris en application de l'article R. 304-1 du code de la construction et de l’habitation.

([28]) Cf. article 68 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([29]) L’arrêté du 1er août 2014 pris en application de l'article D. 304-1 du code de la construction et de l’habitation a été modifié à quatre reprises : le 30 septembre 2014, le 4 juillet 2019, le 16 février 2022 et le 2 octobre 2023.

([30]) Article 92 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

([31]) Les taux de la réduction d’impôt sont respectivement de 23 % (engagement de location de six ans), 29 % (engagement de location de neuf ans) et 32 % (engagement de location de 12 ans) dans les Outre-mer.

([32]) Article L. 821-1 du code de la construction et de l’habitation.

([33]) Le 1° du I dudit article concerne le volet accession des APL (modification de l’article L. 351-2 du code de la construction abrogé et remplacé par les articles L. 831-1 et L. 831-2 du code de la construction et de l’habitation du fait de l’ordonnance n° 2019-770 du 17 juillet 2019), le 1° et le 2° du II dudit article concernant le volet accession de l’ALF et de l’ALS (modification de l’articles L. 542-2 du code de la sécurité sociale aujourd’hui abrogé et remplacé par l’article L. 841-4 du code de la construction et de l’habitation du fait de l’ordonnance n° 2019-770 du 17 juillet 2019).

([34]) Les revenus des ménages bénéficiaires des aides personnelles à l’accession atteignaient en moyenne 1,05 SMIC en 2013, soit un niveau supérieur aux bénéficiaires en secteur locatif (0,55 SMIC en 2023).