N° 468

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2024.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324),

 

PAR M. Charles de COURSON,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 25
 

 

gESTION DES FINANCES PUBLIQUES

 

 

 

 

Rapporteur spécial : M. JÉrÔme LEGAVRE

 

Député

 

___

 

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl

DoNNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. LE PROGRAMME 156 GESTION FISCALE ET FINANCIÈRE DE L’ÉTAT ET DU SECTEUR PUBLIC LOCAL

A. Le projet de loi de financeS pour 2025 maintient la dynamique de suppressions de postes au sein de la DGFIP qui prÉvaut depuis 2008

1. La DGFiP poursuit ses réductions d’effectifs, contredisant la trajectoire fixée par le contrat d’objectif 2023-2027

2. Un renforcement annoncé des moyens humains dédiés au contrôle fiscal qui ne produit pas encore ses effets

3. Les gains de productivité attendus du datamining et de l’IA par rapport au contrôle humain peinent encore à se concrétiser

B. La transformation du rÉseau comptable et fiscal de la DGFiP suscite des rÉserves alors que la modernisation de l’infrastructure informatique se poursuit

1. Une stagnation des dépenses de fonctionnement et d’investissement qui préserve cependant l’objectif de résorption de la dette informatique du ministère

a. L’objectif de rattrapage de la dette technique de la DGFiP demeure d’actualité pour le programme 156

b. Des projets immobiliers marqués par des engagements pluriannuels sur les marchés de fourniture d’énergie et la finalisation du nouveau réseau de proximité

2. L’unification du recouvrement fiscal au sein de la DGFiP connaît un coup d’arrêt avec le report du transfert de la TICPE

II. LE PROGRAMME 218 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES

A. Les activitÉs de lutte contre la fraude financiÈre et de contrÔle de la conformitÉ sous la tutelle du secrÉtariat gÉnÉral voient leurs moyens rÉduits

B. Les fonctions support immobiliÈres et informatiques des services centraux supportent l’essentiel des baisses de crÉdit du programme 218

1. Un budget informatique des services centraux en baisse en 2025

2. Les dépenses immobilières du SGMEF sont freinées par le report du projet de rénovation de l’immeuble Vincent Auriol

C. Les politiques d’action sociale visant À amÉliorer les conditions d’emploi des personnels bÉnÉficient de moyens relativement stables en 2025

III. LE PROGRAMME 302 FACILITATION ET SÉCURISATION DES ÉCHANGES

A. La DGDDI bÉnÉficie de moyens humains et budgÉtaires renforcÉs dans le PLF 2025

1. La douane maintient un schéma d’emplois positif à hauteur de 50 ETP

2. Les dépenses de fonctionnement de la DGDDI sont en hausse du fait du rattrapage de l’inflation et d’un effort d’investissement informatique notable

B. Un contrôle des flux de marchandises insuffisant et fragilisé par la discontinuitÉ de la cartographie douaniÈre

1. La lutte contre la fraude voit ses moyens renforcés au travers de la création d’une unité de renseignement fiscale

2. La réponse douanière aux trafics illicites voit toutefois dans l’ensemble ses moyens stagner

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

 

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 77,1 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances.


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   PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl

Les crédits de la mission s’élèveront en 2025 à 11,64 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 10,97 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), traduisant une augmentation de 253 millions d’euros (+ 2,35 %) pour les AE et de 72 millions d’euros (+ 0,66 %) pour les CP par rapport à 2024. Cette progression des moyens de la mission Gestion des finances publiques n’est toutefois que de façade.

Hors hausse du CAS Pensions et renouvellement périodique des marchés d’énergie, qui tirent à la hausse l’ensemble des crédits de la mission, les dépenses du programme 156 sont en baisse en AE comme en CP. Le PLF 2025 poursuit donc la politique de suppressions de postes qui a déjà conduit à retirer 34 500 ETP à la DGFiP depuis 2008, soit un tiers de ses effectifs en 15 ans. Les conséquences dramatiques de ces coupes sur les agents ont pourtant été constatées de façon répétée par l’Observatoire interne des ministères économiques et financiers depuis plusieurs années.

Le rapporteur spécial regrette en outre la poursuite par le PLF 2025 de la réforme du nouveau réseau de proximité (NRP). L’enquête de l’association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) sur les relations des communes et des intercommunalités avec la DGFiP ([1]) présentée en octobre 2024 démontre clairement le sentiment d’un « abandon » des collectivités par les services de la DGFiP ainsi qu’une dégradation de la qualité du service rendu, les usagers devant parfois « réaliser plusieurs dizaines de kilomètres afin d’obtenir un rendez-vous en présentiel, avec des horaires d’ouverture restreints ».

Malgré les annonces, le programme 218 voit ses crédits baisser dans deux postes de dépenses essentiels. D’abord, les services de lutte contre la fraude et la corruption voient leurs moyens s’éroder. Tracfin, qui est le service de renseignement chargé de la lutte contre la criminalité économique et financière et de la lutte contre la fraude aux finances publiques, perd près d’un cinquième de son budget par rapport à 2024 tandis que son activité ne cesse de se développer. Ensuite, les crédits informatiques de l’administration centrale chutent de 16 %, alors même que la résorption de la dette technique des ministères économiques et financiers est une priorité de la mission.

Le rapporteur spécial regrette en outre l’insuffisance des moyens supplémentaires accordés à la DGDDI. La douane a perdu un quart de ses effectifs depuis les années 1990, passant de 22 000 à 16 500 agents. Ce sont pourtant ces moyens fortement réduits qui doivent assurer le contrôle de la deuxième zone économique exclusive (ZEE) au monde (10 186 000 km2). La conséquence est que seules 0,1 % des marchandises sont contrôlées par la douane, avec des délais de contrôle manifestement insuffisants pour s’assurer de la conformité des marchandises internationales aux réglementations sanitaires et environnementales françaises et européennes, de l’absence de fraude fiscale ou de produits illégaux. Ce délai moyen était tombé à 4 minutes 48 secondes en 2024, soit l’un des plus bas d’Europe. S’agissant de l’actualité plus immédiate, le rapporteur spécial s’étonne que la douane n’ait pas participé aux opérations de contrôle antidopage sur les bagages introduits dans le village olympique au profit du CIO et des comités sportifs.

Le rapporteur spécial s’interroge enfin sur la pertinence des transferts de taxes de la DGDDI vers la DGFiP initiés depuis 2019. Le PLF 2025 a décidé un report du transfert de la TICPE et du maintien à terme des contrôles des produits par la douane qui seule dispose des compétences nécessaires aux enquêtes de flagrance dans les entrepôts et sur les carburants. Il y a lieu de ce fait de s’interroger sur la pertinence des transferts déjà réalisés pour lesquels les contrôles des produits sont tout aussi importants.

 

 


—  1  —

   DoNNÉES CLÉS

Évolution des crÉdits de la mission
Gestion des finances publiques (*)

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

2024-2025

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

2024-2025

Programme 156 

Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

8 080,62

8 255,48

+ 2,16 %

8 138,12

8 209,5

+ 0,88 %

Programme 218 

Conduite et pilotage des politiques

économiques et financières

991,37

999,27

+ 0,80 %

1 054,76

983,84

– 6,72 %

Programme 302 

Facilitation et sécurisation des échanges

1 739,39

1 810,19

+ 4,07 %

1 706,95

1 778,19

+ 4,17 %

Total mission

10 811,38

11 064,94

+ 2,35 %

10 899,84

10 971,51

+ 0,66 %

(*) Hors fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.

 

ÉVOLUTION DU SCHÉMA ET DES PLAFONDS D’EMPLOIS
DEMANDÉS EN 2025 PAR RAPPORT À 2024

(en ETP et ETPT)

 

Schéma d’emploi en 2025

par rapport à 2024

Évolution du plafond d’emplois en 2025

par rapport à 2024

Plafond d’emplois en 2025

156  Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

– 550

– 260

92 562

218  Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

– 5

+ 44

5 040

302  Facilitation et sécurisation des échanges

+ 50

+ 67

16 531

Total mission

 505

 149

114 133

Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.

 

 

 

 

ÉVOLUTION des effectifs de la DGFiP depuis 2008

Source : commission des finances, d’après les réponses aux questionnaires budgétaires.

 


—  1  —

 

   INTRODUCTION

● La mission Gestion des finances publiques porte les politiques publiques relatives au recouvrement des recettes et au paiement des dépenses de l’État, des fonctions de conseil, de contrôle et d’animation de politiques ministérielles et interministérielles, ainsi que les activités douanières :

– le programme 156 Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local, mis en œuvre par les services de la direction générale des finances publiques (DGFiP), retrace les moyens consacrés aux opérations de recettes de l’État et des collectivités territoriales, au paiement des dépenses publiques, à la tenue des comptes publics et à la conduite de la politique fiscale ;

– le programme 218 Conduite et pilotage des politiques économiques et financières concentre les crédits du secrétariat général des ministères économiques et financiers (SG MEF), des cabinets ministériels ainsi que de diverses directions et agences qui leur sont rattachées ;

– le programme 302 Facilitation et sécurisation des échanges regroupe l’ensemble des moyens de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI).

● Les crédits de la mission s’élèveront en 2025 à 11,64 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 10,97 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), traduisant une augmentation de 253 millions d’euros (+ 2,35 %) pour les AE et une augmentation de 72 millions d’euros (+ 0,66 %) pour les CP par rapport à 2024. Cette hausse des CP pourrait toutefois être neutralisée du fait de l’annonce d’une réduction de 75 millions d’euros de crédits en CP hors titre 2 par voie d’amendements gouvernementaux. Les dépenses de titre 2, qui s’élèvent à 8,74 milliards d’euros en AE et en CP, représentent 80 % des crédits de la mission.

Évolution des crÉdits de la mission Gestion des finances publiques (*)

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2024

PLF 2025

Évolution

2024-2025

LFI 2024

PLF 2025

Évolution

2024-2025

Programme 156  Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

8 080,62

8 255,48

+ 2,16 %

8 138,12

8 209,5

+ 0,88 %

Programme 218  Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

991,37

999,27

+ 0,80 %

1 054,76

983,84

– 6,72 %

Programme 302  Facilitation et

sécurisation des échanges

1 739,39

1 810,19

+ 4,07 %

1 706,95

1 778,19

+ 4,17 %

Total mission

10 811,38

11 064,94

+ 2,35 %

10 899,84

10 971,51

+ 0,66 %

(*) Hors fonds de concours et attributions de produits.

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.

 

Cette dynamique est à mettre en perspective en prenant en considération les annulations et gels de crédits survenus en 2024 :

– le programme 156 a vu 108,7 millions d’euros annulés par le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 dont 70 millions d’euros hors réserve de précaution. Un surgel de 51,8 millions d’euros d’AE et 18,8 millions d’euros de CP est en outre intervenu en juillet ;

– le programme 218 a connu une annulation à hauteur de 106,2 millions d’euros. En juillet, le gouvernement a décidé un surgel supplémentaire de crédits qui a conduit à une augmentation des crédits en réserve du programme 218 à hauteur de 52,9 millions d’euros en AE et 14,9 millions d’euros en CP ;

– le programme 302 a fait l’objet d’une annulation de crédit limitée à hauteur de 20 millions d’euros (AE=CP).

● Les plafonds d’emplois proposés pour 2025 s’élèvent respectivement à 93 562, 5 040 et 16 531 ETPT sur les trois programmes. Il s’agit d’une réduction globale de 149 ETPT en 2025, après une érosion de 169 ETPT en 2024. Le schéma d’emplois de la mission retrouve une trajectoire fortement négative avec – 505 ETP, après l’inflexion initiée par la LFI 2024 (– 44 ETP prévus qui devraient descendre à – 200 ETP en exécution) par rapport aux exercices précédents (– 1 048 ETP réalisés en 2023).

ÉVOLUTION DU SCHÉMA ET DES PLAFONDS D’EMPLOIS DEMANDÉS

(en ETP et ETPT)

 

Schéma d’emplois en 2025 par rapport à 2024

Évolution du plafond d’emplois en 2025 par rapport à 2024

Plafond d’emplois en 2025

156  Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

– 550

– 260

92 562

218  Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

– 5

+ 44

5 040

302  Facilitation et sécurisation des échanges

+ 50

+ 67

16 531

Total mission

 505

 149

114 133

Source : projet annuel de performances pour 2025.


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I.   LE PROGRAMME 156 GESTION FISCALE ET FINANCIÈRE DE L’ÉTAT ET DU SECTEUR PUBLIC LOCAL

Le programme 156 retrace les crédits de la DGFiP. Il regroupe les moyens consacrés aux opérations de recettes (assiette, recouvrement, contrôle) de l’État et des collectivités territoriales, au paiement des dépenses publiques, à la tenue des comptes publics et à la conduite de la politique fiscale du Gouvernement.

 Les demandes de crédits pour la DGFiP s’élèvent à 8,25 milliards d’euros en AE et à 8,21 milliards d’euros en CP en 2025, respectivement en hausse de + 2,16 % et de + 0,88 % par rapport aux crédits ouverts en 2024. La progression des AE résulte principalement de la forte revalorisation du taux du compte d’affection spéciale (CAS) Pensions et de la hausse des dépenses d’énergie et de fluides. Les CP progressent sous l’effet exclusif de la forte revalorisation du taux du CAS Pensions, les dépenses de T2 hors CAS Pensions étant en baisse et les dépenses HT2 stagnant.

Évolution en 2025 des crÉdits du programme 156 par rapport À 2024 (*)

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

Part

des crédits

01 – Fiscalité des grandes entreprises

121,63

132,68

+ 9,13 %

126,63

138,19

+ 9,09 %

1,6 %

02 – Fiscalité des PME

1 633,04

1 671,86

+ 2,28 %

1 640,21

1 677,61

+ 2,38 %

20,3 %

03 – Fiscalité des particuliers et fiscalité directe locale

2 132,05

2 079,39

 2,55 %

2 131,95

2 077,48

 2,47 %

25,2 %

05 – Gestion financière de l’État hors fiscalité

811,72

913,56

+ 12,53 %

811,86

913,54

+ 12,55 %

11,1 %

06 – Gestion des pensions

91,41

95,7

+ 4,68 %

91,2

94,46

+ 4,7 %

1,2 %

07 – Gestion financière du secteur public local hors fiscalité

1 328,8

1 340,29

+ 0,83 %

1 330

1 341

+ 0,87 %

16,2 %

08  – Gestion des fonds déposés

58,56

61,11

+ 4,09 %

58,51

60,91

+ 4,35 %

0,7 %

09 – Soutien

1 882,08

1 938,72

 2,25 %

1 926,44

1 833,13

+ 3,01 %

23,5 %

10 – Élaboration de la législation fiscale

21,34

22,15

+ 3,80 %

21,34

22,15

+ 3,8 %

0,3 %

156  Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

8 080,62

8 255,48

+ 0,88 %

8 138,12

8 209,48

+ 2,16 %

100 %

(*) Hors fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.

A.   Le projet de loi de financeS pour 2025 maintient la dynamique de suppressions de postes au sein de la DGFIP qui prÉvaut depuis 2008

1.   La DGFiP poursuit ses réductions d’effectifs, contredisant la trajectoire fixée par le contrat d’objectif 2023-2027

Les crédits de titre 2 représentent 6,97 milliards d’euros, soit 85 % des crédits du programme 156, dont 2,15 milliards d’euros pour le CAS Pensions et 4,82 milliards d’euros pour les rémunérations et les prestations sociales. Les crédits du titre 2 sont en hausse exclusivement en raison de l’augmentation de 4 points du taux du CAS Pensions qui progresse par conséquent de 86 millions d’euros par rapport à 2025 (+ 3 %). Dans le même temps, les dépenses de rémunération reculent de 18,4 millions d’euros (– 0,38 %) du fait des suppressions d’emplois programmées.

Les effectifs du programme 156 reculent de 550 ETP en 2025, contre une évolution prévisionnelle nulle initialement arbitrée dans le cadre d’objectifs et de moyens (COM) de la DGFiP pour la période 2023-2027. Cette baisse porte sur les services départementaux de la DGFiP (– 730 ETP), partiellement compensée par un schéma d’emplois positif pour l’administration centrale et les services hors réseau. La direction bénéficie toutefois du transfert de 235 ETP au titre des missions précédemment exercées par le ministère de la transition écologique et du partenariat avec les territoires (liquidation des taxes d’aménagement et d’urbanisme), ainsi que de la poursuite du déploiement des centres de gestion financière.

Les redéploiements au sein du ministère devraient répartir cette baisse des effectifs en fonction des besoins définis comme prioritaires par la DGFiP — renforcer certains métiers comme la lutte contre la fraude, l’accompagnement fiscal des entreprises, ou le recouvrement des amendes. Certains services bénéficieront de renforts permis par la suppression de certaines missions fiscales et la réduction des fonctions supports :

 L’action 9 Soutien connaît une forte réduction de ses effectifs (– 1 029 ETPT) ;

 L’action 3 Fiscalité des particuliers et fiscalité directe locale subit également une baisse importante (– 1 240 ETPT), en raison des différentes réformes mises en œuvre générant des gains de productivité (suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales et de la contribution à l’audiovisuel public) ;

 L’action 1 Fiscalité des grandes entreprises bénéficie de moyens supplémentaires (+ 98 ETPT) avec le renfort des services centraux et des directions nationales spécialisées au titre de la transformation numérique ainsi que du renforcement de son pilotage et de la sphère du contrôle fiscal ;

 L’action 7 Gestion financière de l’État hors fiscalité voit également ses moyens progresser (+ 1 191 ETPT) du fait du renforcement de la mission amende, des services de la DGFiP en charge du transfert de la liquidation des taxes d’urbanisme précédemment confiée au ministère de la transition écologique et du partenariat avec les territoires ainsi que de la poursuite des réassignations de paye en provenance d’autres administrations.

Ce schéma d’emplois négatif poursuit la réduction des effectifs de la DGFiP qui est passée de près de 126 000 agents en 2008 à 92 562 au PLF 2025, soit une réduction d’un tiers en 15 ans. Le recul des effectifs de la DGFiP est par ailleurs aggravé par la tendance à la sous exécution des schémas d’emplois votés.

programme 156 : Évolution pluriannuelle des EFFECTIFS

(en ETPT et en ETP)

 

2008

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

LFI

2024

PLF

2025

Plafond d’emplois

125 949

105 690

102 678

100 816

98 893

97 358

95 039

93 597

92 822

92 562

ETPT exécutés

125 541

103 473

101 394

99 257

96 991

95 221

93 025

91 797

Schéma d’emplois voté

– 2 385

– 1 630

– 1 600

– 2 130

– 1 500

– 1 800

– 1 506

– 850

– 200

– 550

Schéma d’emplois exécuté

– 2 699

– 1 630

– 2 038

– 2 203

– 1 860

– 1 778

– 1 515

– 1 228

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Le rapporteur spécial dénonce la poursuite d’une politique austéritaire utilisant la DGFiP comme premier réservoir de suppression de postes de fonctionnaires. Il estime en outre nécessaire une évaluation des effets des réformes conduites au sein de la DGFiP sur les emplois alors que 61 % des agents estiment que la DGFiP n’évolue pas dans le bon sens, soit l’un des plus hauts taux de la fonction publique d’État ([2]).

Des difficultés d’attractivité de la DGFiP révélatrices d’un mal-être des agents

Confrontée à des difficultés de recrutement, la DGFiP a engagé en 2021 un plan visant à renforcer son attractivité. Ce plan vise essentiellement au développement de la visibilité de la DGFiP et de ses métiers : campagnes de communication sur les réseaux sociaux, partenariat avec les établissements d’enseignement supérieur, amélioration de la présence des postes sur les plateformes PASS et Choisir le service public…

Pour pallier le déficit de recrutement, la DGFiP a dû toutefois développer le recours aux contractuels. Exceptionnels jusqu’en 2021, ils sont devenus une voie de recrutement complémentaire avec 1 418 contractuels entrants en 2023 et un objectif de 1 600 en 2024. Ces recrutements s’opèrent parfois selon des modalités souples. Les syndicats auditionnés ont ainsi donné comme exemple la DDFiP du Haut-Rhin qui a entrepris en 2023 un recrutement sans CV, en une journée, et sans entretien individuel.

Le rapporteur spécial estime toutefois que le déficit d’attractivité est à chercher dans les conditions de travail dégradées des agents plutôt que dans un manque de visibilité de la DGFiP. Les résultats de l’enquête de l’Observatoire interne de la DGFiP publiés en avril 2024 révèlent en effet un mal-être des agents des ministères économiques et financiers, et particulièrement de la DGFiP, dans leur travail. L’Observatoire constate que 38 % des agents des ministères décrivent leur état d’esprit comme désabusé et 35 % fatigué, tandis que seulement 5 % s’estiment heureux. À cet égard, l’annulation du fond pour l’amélioration du cadre de vie des agents au travail négocié avec les organisations syndicales par le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 est un mauvais signal pour les agents de la DGFiP.

2.   Un renforcement annoncé des moyens humains dédiés au contrôle fiscal qui ne produit pas encore ses effets

● Les effectifs de la DGFiP affectés aux missions de contrôle fiscal ont connu une baisse importante depuis 2014 (– 2 422 ETP entre 2014 et 2023), dans le cadre plus général de schémas d’emplois fortement négatifs liés aux transformations de la direction. Le COM 2023-2027 de la DGFiP prévoit d’infléchir l’évolution des effectifs au bénéfice du contrôle fiscal, dont les moyens humains ont été renforcés par le redéploiement de 171 ETP en gestion 2023 et de 256 ETP en 2024.

Évolution des effectifs de la DGFiP
dÉdiÉs au contrÔle fiscal de 2014 À 2023

 

2014

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Total

12 567

11 387

11 709

10 781

10 373

10 294

10 154

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

● Les prévisions de redéploiement de la DGFiP pour 2025 ne sont pas définitivement établies. La DGFiP a toutefois annoncé dans le cadre des travaux du rapporteur spécial poursuivre le renforcement des moyens alloués à la lutte contre la fraude fiscale conformément aux engagements pris dans le cadre du plan de lutte contre la fraude. Les nouveaux renforts alloués viseront notamment à amplifier le renseignement fiscal dans le cadre de la lutte contre les très grandes fraudes et tout particulièrement la fraude internationale.

Conformément aux engagements pris en vue du doublement d’ici 2025 du nombre d’officiers fiscaux judiciaires, 20 emplois supplémentaires seront accordés au bénéfice de l’Office national anti-fraude (ONAF), après les 20 accordés à l’occasion du PLF 2023, pour donner à cet organisme les moyens nécessaires pour lutter contre les cas de fraude complexe. Les moyens supplémentaires attribués pour la lutte contre l’évasion fiscale seront répartis entre tous les services de la DGFiP : les directions départementales et régionales des finances publiques (DDRFiP), les services centraux, les directions nationales et spécialisées (DNS), et les directions régionales du contrôle fiscal (DIRCOFI) en fonction des enjeux.

Le rapporteur spécial déplore la réduction des effectifs dédiés à la lutte contre la fraude fiscale que les redéploiements effectués au détriment des autres missions de la DGFiP ne parviennent pas à compenser. Il estime que l’enjeu financier de la fraude fiscal exige un véritable réarmement budgétaire et humain des services de contrôle, bien loin de la feuille de route présentée en mai 2023.

● Le PLF 2025 apporte également des évolutions au cadre juridique de la lutte contre la fraude fiscale.

L’article 14 du PLF 2025 transpose les obligations de déclaration applicables aux prestataires de services sur crypto-actifs, également appelés actifs numériques, conformément au règlement (UE) 2023/1114.

En outre, le projet introduit un nouvel article L. 80 R au livre des procédures fiscales pour encadrer la supervision par la DGFiP du respect des obligations de diligence.

Enfin, il transpose les dispositions permettant d’étendre l’utilisation des informations fiscales échangées entre les États européens à l’application de la législation sur les droits de douane et à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Mieux évaluer la fraude pour mieux la combattre, un chantier nécessaire qui doit être doté de moyens crédibles

Dans le cadre du plan de lutte contre toutes les fraudes, un Conseil d’évaluation des fraudes (CEF), présidé par le ministre des comptes publics, a été créé. Il rassemble les administrations compétentes, des personnalités qualifiées, des experts indépendants et des parlementaires afin d’objectiver le phénomène et d’assurer la fiabilité des estimations produites. Une première session de travail a été organisée le 10 octobre 2023. À l’issue de celle-ci, le Conseil a décidé d’actualiser les travaux disponibles sur la fraude à la TVA, d’avancer vers une évaluation de la fraude à l’impôt sur les sociétés et à l’impôt sur le revenu, d’approfondir les études sur le marché parallèle du tabac, d’actualiser les évaluations du travail dissimulé sur la base de contrôles aléatoires et de poursuivre les travaux d’extension des évaluations à toutes les formes de fraude aux dépenses d’assurance maladie. Le Conseil devait se réunir tous les trois mois et fournir un bilan de ses travaux d’ici le mois de juin 2024. Malgré cette feuille de route ambitieuse, aucune nouvelle réunion n’a eu lieu à ce jour et aucun rapport n’a été produit par le CEF.

À partir de la fin d’année 2024 et au cours de l’année 2025, les travaux d’évaluation devraient porter sur d’autres impôts, en commençant par l’impôt sur les sociétés. L’ambition à moyen terme est de disposer de chiffrages de la fraude qui couvrent les principaux impôts recouvrés par la DGFiP, qui soient établis selon les normes de la statistique publique (indépendance, rigueur, et transparence des méthodes) et qui puissent être mises à jour régulièrement pour pouvoir suivre l’évolution des comportements irréguliers (délibérés ou involontaires) et évaluer l’efficacité des dispositifs de lutte contre la fraude fiscale.

Si le rapporteur spécial salue sur le principe la création du Conseil d’évaluation des fraudes, il s’interroge sur la crédibilité de ses moyens et de ses ambitions alors que cet organisme n’a pour l’instant abouti à aucune publication significative. Il tient en outre à souligner la nécessité d’orienter ses travaux vers la fraude fiscale pour laquelle les estimations de manque à gagner pour l’État excèdent largement les fraudes dans la sphère sociale.

3.   Les gains de productivité attendus du datamining et de l’IA par rapport au contrôle humain peinent encore à se concrétiser

● Dans le cadre de la lutte contre la fraude fiscale, la DGFiP recourt aux méthodes d’analyse des données de masse mettant en œuvre des techniques statistiques ou d’apprentissage automatique (datamining, intelligence artificielle) pour améliorer le ciblage des opérations de contrôle.

Le développement de la programmation par l’intelligence artificielle et le datamining ont vocation à renforcer, par un meilleur ciblage, la capacité de la DGFiP à détecter et recouvrer les montants éludés. Ces contrôles ont permis de rappeler en 2023 plus de 2 milliards d’euros de droits et pénalités, contre 1,2 milliard d’euros en 2021. Les productions issues du bureau en charge des travaux d’IA représentent depuis 2022 plus de 50 % des contrôles fiscaux externes locaux conformément à la cible prévue par le PAP.

Auditionnés par le rapporteur spécial sur ce point, les syndicats de la DGFiP ont toutefois souligné que si le datamining et l’IA peuvent être des outils utiles pour renforcer le ciblage des contrôles, il apparaît dans les retours des équipes de programmation et de contrôle que leur systématisation n’offre pas de gains d’efficience observables. Le datamining constituerait un moyen de masquer les pertes d’informations résultant de la réorganisation des services de gestion en local.

Le constat d’une surestimation des gains attendus de l’IA est confirmé par la Cour des comptes dans son rapport L’intelligence artificielle dans les politiques publiques : l’exemple du ministère de l’économie et des finances publié en octobre 2024. Sur les quatre systèmes d’IA dont les données ont été transmises à la Cour, les économies réalisées en 2022 étaient estimées à 20,4 millions d’euros sur une cible de 36 millions d’euros, soit une cible atteinte à 56 %. La Cour relève les mêmes difficultés s’agissant des gains de recettes fiscales au titre du projet Foncier Innovant avec des hypothèses de gains estimés à 130 millions d’euros à l’horizon 2022 pour 11,1 millions d’euros constatés. Elle note par ailleurs des hypothèses de coûts humains largement surévaluées dans les scénarii comparatifs avancés par la DGFiP pour évaluer les effets budgétaires des systèmes d’IA. À titre d’exemple, le coût moyen des ETP économisés en lien avec le programme « Ciblage de la fraude et valorisation des requêtes » (CFVR) était estimé à 79 400 euros annuels lors de la présentation du projet tandis que le coût constaté était de 36 000 euros en 2022.

Le rapporteur spécial s’interroge dès lors sur la pertinence de l’objectif de performance de 50 % des contrôles fiscaux initiés sur la base de ce dispositif. Il estime nécessaire une évaluation des gains relatifs permis par le recours à cet outil. Il dénonce par ailleurs une instrumentalisation de gains d’efficiences fictifs pour justifier des suppressions de moyens humains au détriment de la bonne conduite des missions de la DGFiP.

B.   La transformation du rÉseau comptable et fiscal de la DGFiP suscite des rÉserves alors que la modernisation de l’infrastructure informatique se poursuit

1.   Une stagnation des dépenses de fonctionnement et d’investissement qui préserve cependant l’objectif de résorption de la dette informatique du ministère

Les dépenses de fonctionnement et d’investissement de la DGFiP en CP stagnent en 2025 avec 1 237 millions d’euros (+ 0,36 %). Cette trajectoire est tirée à la hausse par les dépenses informatiques qui doivent permettre la poursuite de la résorption de la dette technique de la direction. Les dépenses hors titre 2 connaissent en revanche une hausse significative en AE avec 1 284 millions d’euros en 2025 (+ 9,1 %) résultant du renouvellement périodique des marchés de fourniture d’énergie de la DGFiP.

a.   L’objectif de rattrapage de la dette technique de la DGFiP demeure d’actualité pour le programme 156

La trajectoire financière de la DGFiP, arrêtée dans le cadre du COM 20232027, garantit un niveau d’investissement et d’accompagnement significatif, en particulier en matière informatique. L’objectif est de poursuivre la résorption de la dette technique, c’est-à-dire de mettre à niveau les différents systèmes d’information de la DGFiP.

Les crédits de fonctionnement et d’investissement informatiques sont prévus pour 2025 à 496,9 millions d’euros en AE et 489,9 millions d’euros en CP, soit des hausses de respectivement + 5,9 % et + 4,4 % par rapport à la prévision 2024. Ces moyens nouveaux doivent permettre la poursuite de l’objectif de résorption de la dette technique et le financement des grands projets informatiques déjà lancés (facturation électronique, Ficoba3, GMBI, NARA, PILAT, RSP PART, URF) ou dont le lancement est prévu à partir de 2025 Il s’agit notamment de la modernisation des outils informatiques de publicité foncière, de la mise à disposition des collectivités locales de nouveaux services de gestion de la fiscalité locale et de la mise en place de l’imposition minimale mondiale des grandes entreprises.

BUDGET INFORMATIQUE HORS TITRE 2 DE LA DGFiP POUR 2024 et 2025

(en millions d’euros)

 

Exercice 2024 (prévision)

Exercice 2025 (prévision)

Crédits

AE

CP

AE

CP

Total dépenses informatiques (HT2) du P 156

469,2

469,2

496,92

489,89

Dont dépenses informatiques de Titre 3

367,27

367,27

392,64

378,45

Dont dépenses informatiques de Titre 5

101,95

101,95

104,28

111,45

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

b.   Des projets immobiliers marqués par des engagements pluriannuels sur les marchés de fourniture d’énergie et la finalisation du nouveau réseau de proximité

L’exercice 2025 sera marqué pour les dépenses de fonctionnement, par le renouvellement et l’engagement de neuf marchés interministériels de fourniture d’énergie de 170 millions d’euros en AE pour une exécution débutant au 1er janvier 2026. Ces marchés expliquent quasiment exclusivement la hausse des crédits en AE de l’action 09 Soutien.

La progression des dépenses d’investissement permettra la couverture des engagements des années antérieures liés à la construction de bâtiments ainsi que les réaménagements pour densification ou rénovation de locaux. Les évolutions de réseau se poursuivent, quoique de manière désormais marginale, exception faite du nouveau réseau de proximité parisien qui bénéficiera d’opérations importantes sur la période.

DÉpenses immobiliÈres DE LA DGFiP POUR 2024 et 2025

 (en millions d’euros)

 

2024 Prévision

2025 Prévision

AE

CP

AE

CP

Dépenses de fonctionnement

266,32

322,90

319,34

284,77

Dépenses d’investissement

30,30

27,30

35,70

35,70

Total

296,62

350,20

355,04

320,47

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

● Depuis 2020, la DGFiP conduit en effet une réorganisation de ses services déconcentrés afin de proposer un nouveau réseau de proximité (NRP), visant notamment à augmenter significativement les points de contacts physiques sur le territoire (missions de « front-office ») tout en redéployant les implantations afin de concentrer des tâches de gestion dans des services mieux dotés (missions de « backoffice »). Les trésoreries locales qui assurent la gestion budgétaire et comptable des collectivités locales et de leurs établissements publics, des hôpitaux et de certains offices publics de l’habitat ont donc été regroupées au sein de services de gestion comptable (SGC) plus étoffés. Bien que prévu pour 2026, le projet de NRP était déjà opérationnel à 97,2 % du réseau cible au 31 décembre 2023 ([3]).

La cartographie du NRP a fait l’objet de concertations menées à l’échelle nationale et locale avec les élus et organisations syndicales, qui ont permis la signature de chartes départementales couvrant 71 % de la population et 73 % des communes. Les concertations ont rendu possibles des évolutions substantielles des projets initiaux.

Néanmoins, la concertation ne vaut pas nécessairement acceptation. Seules 32 % des communes estiment que la nouvelle carte des implantations des services est pertinente ([4]). L’enquête de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) sur les relations des communes et des intercommunalités avec la DGFiP présentée en octobre 2024 évoque clairement la perte des liens personnalisés et de la proximité entre les collectivités et les anciennes trésoreries qui conduit à un sentiment de « désengagement de l’État » voire « d’abandon ». Les usagers, notamment les personnes âgées subissent une dégradation de leur accès aux services de la DGFiP du fait de l’éloignement géographique ; il est parfois nécessaire de « réaliser plusieurs dizaines de kilomètres afin d’obtenir un rendez-vous en présentiel, avec des horaires d’ouverture restreints ». Plus encore, l’enquête de l’AMF souligne que la réforme engendre une perte d’expertise et de prise en compte des spécificités territoriales, aggravée par une rotation fréquente des agents et un manque de personnel, limitant ainsi leur adaptation aux besoins locaux ([5]).

● Dans le cadre du NRP, des conseillers aux décideurs locaux (CDL) ont été mis en place afin d’apporter une offre de conseils budgétaires, financiers, fiscaux et comptables aux élus. Ils sont ainsi susceptibles de guider les collectivités dans des projets d’investissements ou d’aménagement du territoire qui étaient auparavant souvent confiés à des cabinets de conseil privés. Le regard porté par les communes rurales et non rurales sur les CDL est globalement positif. Les CDL ont réalisé 400 000 prestations en 2022, soit en moyenne 500 prestations par conseiller qui concernaient principalement le conseil budgétaire et comptable. Toutefois, l’enquête de l’AMF souligne que de nombreuses collectivités regrettent la disponibilité réduite des CDL pour fournir une expertise approfondie, notamment en matière d’analyse de la situation financière de la collectivité.

Le rapporteur spécial déplore que, malgré l’importance des CDL pour les petites collectivités et notamment les communes rurales, le nombre initialement prévu de 1 200 conseillers d’ici 2025 ait été revu à la baisse, avec un objectif réduit à 993 conseillers. Il s’inquiète par ailleurs des difficultés que posera le renouvellement des conseillers qui sont pour moitié d’anciens comptables de trésoreries mixtes, spécialisées ou de services de gestion comptable, ce qui constitue une garantie de leur compétence. La fermeture des trésoreries locales a de facto réduit le vivier de recrutement pour de tels profils.

Le paiement de proximité chez les buralistes : un service de proximité au coût élevé pour l’État

Généralisé en 2020, le paiement de proximité permet aux usagers de régler la majorité des factures et avis de la DGFiP directement chez les buralistes. Ce service vise à offrir une solution aux populations éloignées des options de paiements dématérialisées. Entre 2020 et 2022, le nombre d’encaissements a fortement augmenté, avec 2,3 millions de paiements pour un montant total de 187 millions d’euros. Ce développement s’explique par la densité de ce réseau des buralistes et leurs horaires bien plus larges que ceux de la DGFiP.

L’Association des maires de France rapporte que 56 % des communes souhaiteraient l’élargissement de ce dispositif afin d’augmenter le nombre de points de contact. Cependant, ce service représente un coût élevé pour l’État : chaque paiement est facturé entre quatre et cinq euros, quel que soit le montant de la transaction, alors qu’il s’agit souvent de paiements de faible montant (80,90 euros en moyenne en 2022) ([6]). Le coût de ce dispositif est estimé à 12,3 millions d’euros en 2023.

2.   L’unification du recouvrement fiscal au sein de la DGFiP connaît un coup d’arrêt avec le report du transfert de la TICPE

● Le recouvrement de nombreuses taxes et impositions, aujourd’hui réalisé par la DGDDI et certains opérateurs de l’État, est progressivement transféré à la DGFiP. Les opérations de transfert, engagées en 2019, se poursuivent jusqu’en 2027 afin de rationaliser les missions de la sphère fiscale et de simplifier les démarches des usagers. Le tableau ci-après présente le calendrier des transferts décidés en loi de finances ou par ordonnances, ainsi que les montants en jeu au moment du transfert. Une mission interministérielle nommée mission France Recouvrement a été créée pour piloter la réforme du recouvrement fiscal et social ([7]).

En 2024, la gestion, le contrôle et le recouvrement des taxes suivantes ont été transférés de la DGDDI à la DGFiP :

– Les droits et cotisations sur les alcools, les tabacs, à l’exception du recouvrement relatif aux opérations d’importation et des cas de régularisation qui continuent de relever de la compétence de la DGDDI ;

– La taxe sur les mélanges de boissons alcooliques et de boissons sucrées, dite « prémix » ;

– Les restes à recouvrer (RAR) relatifs aux droits de navigation, le droit annuel de francisation et de navigation et le droit de passeport.

Le transfert de l’accise sur les produits énergétiques (ex-TICPE) de la DGDDI à la DGFiP est reporté par l’article 21 du PLF 2025 selon un calendrier en deux phases. Dans un premier temps, le transfert de la gestion et du contrôle des remboursements d’accises au bénéfice des taxis et des transporteurs routiers interviendra au 1er janvier 2025. Dans un second temps, le transfert des déclarations, du contrôle et du recouvrement de l’accise interviendra à compter du 1er janvier 2027. La gestion et le contrôle des mesures de suivi et de gestion resteront de la compétence de la DGDDI, ce qui traduit une répartition des compétences entre les deux administrations analogue à celle existant pour la TVA à l’importation.

De la même manière, le transfert de la taxe incitative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports et de la rémunération due au titre du stockage stratégique des produits pétroliers qui devait intervenir au 1er janvier 2025 est reporté au 1er janvier 2027.

Cependant, le rapporteur spécial estime nécessaire la mise en place d’une évaluation préalable plus approfondie des transferts déjà réalisés avant de poursuivre les transferts restant au regard de l’importance des montants en jeu. L’audition des syndicats de la DGDDI a notamment fait apparaître la nécessité d’une réflexion préalable sur la capacité de la DGFiP à mener des contrôles sur les produits. La DGFiP a confirmé le besoin d’une préparation préalable de ses services, notamment s’agissant des modalités de répartition du contrôle entre la DGFiP et la DGDDI pour l’accise sur les produits énergétiques.

 

 

calendrier de transfert des taxes vers la dgfIp

Date

Taxes déjà transférées

Montants en jeu

1er janvier

2019

Les taxes sur les boissons non alcooliques (BNA)

496 millions d’euros (2018)

1er janvier

2020

Les composantes « hors déchet » de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)

165 millions d’euros (2019)

1er janvier

2021

La composante « déchets » de la TGAP

461 millions d’euros (2019)

La TVA assise sur les produits pétroliers

8 021 millions d’euros (2020)

La « taxe annuelle à l’essieu » (TAE), qui remplace la taxe spéciale sur les véhicules routiers (TSVR)

175 millions d’euros (2020)

1er janvier

2022

Les taxes intérieures de consommation sur l’électricité (TICFE), sur le gaz naturel (TICGN) et sur les charbons, les houilles, les lignites et les cokes (TICC) — renommées « accise sur les énergies »

TICFE : 2 377 millions d’euros (2021)

TICGN : 2 303 millions d’euros (2021)

TICC : 10 millions d’euros (2021)

La TVA à l’importation

6 875 millions d’euros (2021)

La taxe annuelle sur les engins maritimes de plaisance (TAEMUP), qui fusionne le droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) et le droit de passeport

La gestion et le contrôle des droits de navigations ont été transférés à la DGAMPA

DAFN (hors Corse) : 42,7 millions d’euros (2021)

Droit de passeport : 1,1 million d’euros (2021)

DAFN et droit de passeport (Corse) : 4,8 millions d’euros (2021)

La taxe sur les produits phytopharmaceutiques, affectée à l’ANSES 

4,3 millions d’euros (2021)

1er janvier

2023

La taxe acquittée par les employeurs de main-d’œuvre étrangère permanente, temporaire ou saisonnière

Entre 20 et 30 millions d’euros par an

1er avril

2023

Le produit des amendes douanières issues de décisions de justice

43,4 millions d’euros (2022)

1er janvier

2024

Les droits sur les alcools, les tabacs et la taxe « prémix »

 

Leurs taxes annexes, soit le droit de licence sur les tabacs, la cotisation de sécurité de sociale (CSS) et la cotisation finançant le régime d’allocations viagères des gérants de débits de tabac

Droits sur les alcools, les tabacs et taxe « prémix » : 18 704 millions d’euros (2022)

Droit de licence sur les tabacs : 369 millions d’euros (2022)

CSS : 752 millions d’euros (2022)

1er octobre

2024

Restes à recouvrer (RAR) des droits de navigation

5,98 millions d’euros (30.06.2024)

Date

Taxes à transférer

Montants en jeu

1er janvier

2025

Remboursement de l’accise sur les produits énergétiques hors charbon, gaz naturel et électricité (ex-TICPE et ex-TSC) des exploitants taxis, transporteurs collectifs de personnes et transporteurs de marchandises

Le prélèvement sur les contrats d’assurance de biens, affecté au fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI)

582 millions d’euros (2022)

1er janvier

2026

La taxe sur les passagers maritimes embarqués à destination d’espaces naturels protégés

3,6 millions d’euros (2022)

 

 

 

 

Date

Taxes à transférer

Montants en jeu

1er janvier

2027

Déclaration, contrôle et recouvrement de l’accise sur les produits énergétiques hors charbon, gaz naturel et électricité (ex-TICPE) à la DGFiP et traitement des autres demandes de remboursements de l’accise sur les énergies.

 

La taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans le transport (TIRUERT)

TICPE : 32 304 millions d’euros (2023)

 

TSC : 549 millions d’euros (2022)

 

TIRUERT : 543 millions d’euros (2023)

1er janvier

2028

Restes à recouvrer (RAR) relatifs aux accises sur les produits énergétiques.

Entre 400 et 500 millions d’euros (**) (2023)

(*) Hors RAR amendes.

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

II.   LE PROGRAMME 218 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES

Le programme 218, placé sous la responsabilité du secrétariat général des ministères économiques et financiers (SGMEF), rassemble les crédits destinés aux activités d’expertise, de régulation, de conseil et de contrôle, au soutien de l’administration centrale et à la mise en œuvre de politiques ministérielles transversales ou interministérielles. Il bénéficie de 999,3 millions d’euros en AE (+ 0,8 %) et de 983,8 millions d’euros en CP (– 6,7 %) en 2025.

Évolution en 2025 des crÉdits du programme 218 par rapport À 2024

(en millions d’euros)

 

Autorisations

d’engagement

Crédits de paiement

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

Part

des crédits

02 – Expertise, audit, évaluation et contrôle

203,35

201,63

 0,84 %

204,7

200,98

 1,82 %

20,2 %

05 – Prestations d’appui et support

399,99

433,69

+ 8,43 %

470,59

403,4

 14,27 %

43,4 %

07 – Pilotage des finances publiques et projets interministériels

182,57

172,74

 5,38 %

176,47

180,26

+ 2,15 %

17,3 %

08 – Accompagnement du changement de l’action publique

15,78

3,4

 78,46 %

13,31

11,36

 14,71 %

0,3 %

09 – Action sociale ministérielle

189,67

187,79

 0,99 %

189,67

187,79

 0,99 %

18,8 %

218 – Conduite et pilotage des politiques économiques

991,37

999,27

+ 0,80 %

1 054,76

983,84

 6,72 %

100 %

(*) Hors fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.

La réduction du budget en CP s’explique essentiellement par la baisse des crédits hors titre 2 qui bénéficient de 455,7 millions d’euros en 2025, soit un recul de – 13,2 % par rapport à la LFI 2024. Ce recul correspond à la mise en pause du projet de rénovation de l’immeuble parisien Vincent Auriol, à une baisse marquée des dépenses d’énergie par rapport à la LFI 2024, à une diminution des dépenses de prestations intellectuelles informatiques du fait de leur réinternalisation en 2023 et 2024 et à diverses mesures d’économie touchant notamment le fonds de transformation ministériel porté par l’action 8 Accompagnement du changement de l’action publique. Le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 avait déjà procédé à une annulation à hauteur de 106,2 millions d’euros sur ces postes de dépense.

A.   Les activitÉs de lutte contre la fraude financiÈre et de contrÔle de la conformitÉ sous la tutelle du secrÉtariat gÉnÉral voient leurs moyens rÉduits

L’action n° 2 Expertise, audit, évaluation et contrôle rassemble les crédits des structures de régulation, d’audit et de contrôle de l’utilisation des ressources publiques, mais également celles de lutte contre certaines infractions financières. Les crédits demandés au titre de cette action, tous titres confondus, sont en baisse. Ils s’élèvent à 201,6 millions d’euros (– 0,8 %) en AE et à 201 millions d’euros (– 1,8 %) en CP.

● Les moyens alloués à Tracfin, service de renseignement chargé de la lutte contre la criminalité économique et financière et de la lutte contre la fraude aux finances publiques, reculent de 2 millions d’euros en AE et de 1,7 millions d’euros en CP en 2025. Le budget de Tracfin est ainsi réduit à 10,3 millions d’euros en AE et en CP. Les dépenses d’investissement (3,33 millions d’euros) seront consacrées aux projets d’ampleur de Tracfin, intégrés pour la plupart à la feuille de route du plan de lutte contre la fraude, avec notamment la création d’un site informatique de secours ainsi qu’une montée en puissance capacitaire avec l’acquisition d’outils spécialisés d’investigation et d’analyse des données.

Tracfin bénéficie toutefois de la création de 10 ETP en 2025, dans le prolongement du schéma d’emplois positif de 2024 (+ 15 ETP) qui a porté les effectifs du service à 212,5 ETPT. Ces moyens nouveaux permettront de contribuer à la mise en œuvre du plan gouvernemental de lutte contre toutes les fraudes aux finances publiques de mai 2023 dans un contexte d’accroissement constant de son activité. Ils s’inscrivent dans une trajectoire pluriannuelle positive qui devrait conduire à la création de 70 ETP sur la période 2023-2027.

● L’Agence française anticorruption (AFA) est le service à compétence nationale chargée de porter la politique publique de prévention et de détection de la corruption, du trafic d’influence, de la malversation, de la prise illégale d’intérêts, du détournement de fonds publics et du favoritisme. Créée en 2017, elle bénéficiera d’un budget stable en 2025, à hauteur de 0,35 million d’euros en AE et en CP. Auditionnée par le rapporteur spécial, la directrice de l’AFA estime qu’à ce stade ces moyens budgétaires permettent une activité normale de l’agence. Toutefois, elle souligne qu’ils demeurent insuffisants pour permettre à l’AFA de réaliser pleinement sa mission de sensibilisation aux risques et de diffusion de la culture de la probité.

Le PLF pour 2025 prévoit un schéma d’emplois neutre pour l’AFA, avec un plafond d’emploi à 58 ETPT. Une réinternalisation des activités de contrôle des programmes de mise en conformité réalisés dans le cadre des conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP) prononcées par l’autorité judiciaire a été engagée depuis 2024. 4 ETPT devraient ainsi être financés par l’intermédiaire des dépenses d’expertise provisionnées par les entités contrôlées, alors que leurs missions étaient auparavant réalisées par des prestataires externes qualifiés ([8]).

Le rapporteur spécial regrette ce recul des moyens de Tracfin qui doit traiter un volume d’informations en croissance constante alimenté par les obligations déclaratives des banques et assurances. Il souhaite en outre que la mesure visant à créer au bénéfice de Tracfin un pouvoir administratif de suspension provisoire de certaines aides publiques en cas de suspicion forte de fraude aux finances publiques trouve un vecteur législatif dans les meilleurs délais. Le rapporteur spécial s’étonne par ailleurs que les 70 ETP programmés à la création de l’AFA ne semblent plus correspondre à la trajectoire cible de l’agence.

B.   Les fonctions support immobiliÈres et informatiques des services centraux supportent l’essentiel des baisses de crÉdit du programme 218

L’action n° 5 Prestations d’appui et de support finance notamment l’informatique, l’immobilier et la logistique des services centraux, ainsi que l’institut de la gestion publique et du développement économique (IGDPE). Les crédits demandés en 2025 progressent en AE, à 433,7 millions d’euros (+ 8,4 %), et reculent fortement en CP à 403,4 millions d’euros (– 14,3 %).

1.   Un budget informatique des services centraux en baisse en 2025

Les crédits informatiques de l’administration centrale, portés par le service du numérique (SNUM) du secrétariat général, s’élèveront à 39,13 millions d’euros en AE (– 3,84 millions d’euros) et à 36,70 millions d’euros en CP (– 6,99 millions d’euros). Ces CP doivent notamment couvrir l’engagement sur deux ans du nouveau marché d’exploitation des serveurs, des coûts de sécurisation plus élevés ainsi que le développement des applications RH.

Avec un montant de 28,73 millions d’euros, les dépenses de fonctionnement courant sont proches de la dotation en LFI 2024 qui s’élevait à 28,45 millions d’euros en AE. Elles sont en revanche prévues à la baisse, en CP avec 27,99 millions d’euros après 29,17 millions d’euros en LFI 2024.

Les crédits destinés aux projets informatiques sont prévus à la baisse, passant de 14,5 millions d’euros en AE et CP en LFI 2024 à 7,45 millions d’euros en AE et 6,36 millions d’euros en CP en PLF 2025. Ils financeront des nouvelles opérations en matière applicative, avec en particulier le développement des applications de ressources humaines, d’infrastructure consistant à déployer le recâblage et la téléphonie sur IP, de bureautique, dont notamment la rénovation des salles évènementielles du fait de la fragilité et du vieillissement des installations actuelles. Cette baisse retardera notamment le renforcement de la cyber sécurité du ministère.

Le rapporteur spécial déplore cette baisse de crédits, qui fait suite aux annulations et gels de 2024, et intervient alors que les conséquences de la dette technique sur les conditions de travail des agents et les risques de cyber sécurité ont été dénoncées unanimement par les syndicats des ministères financiers.

2.   Les dépenses immobilières du SGMEF sont freinées par le report du projet de rénovation de l’immeuble Vincent Auriol

Les crédits demandés pour 2025 au titre des dépenses immobilières pour le programme 218 s’élèvent à 135,9 millions d’euros en AE (+ 39,7 %) et à 109,9 millions d’euros en CP (– 50,8 %). Ces crédits correspondent uniquement à des dépenses de fonctionnement. Le haut niveau d’AE du programme s’explique essentiellement par :

– les dépenses de fluides (29,6 millions d’euros en AE et 26,4 millions d’euros en CP) ;

– la gestion locative marquée par le renouvellement du bail de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) (37,2 millions d’euros en AE et 29,6 millions d’euros en CP) ;

– l’exploitation, la maintenance et la sécurité (45,9 millions d’euros en AE et 42,3 millions d’euros en CP).

DÉpenses immobiliÈres du programme 218 (2023-2025)

(en millions d’euros)

 

2023

2024

2025

 

Prévision (LFI 2023)

Exécution (RAP 2023)

Prévision (LFI 2024)

Prévision (PLF 2025)

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dépenses de fonctionnement

114 583 294

109 330 877

109 977 289

110 281 450

97 227 172

128 110 743

135 822 486

109 958 892

Dépenses d’investissement

119 600 000

18 880 000

150 390

969 682

0

37 770 000

0

0

Total

234 183 294

128 210 877

110 127 679

111 251 132

97 227 172

165 880 743

135 822 486

109 958 892

Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.

Aucune ouverture d’AE et de CP n’est demandée en 2025 au titre des dépenses d’investissement immobilier, du fait du calendrier révisé du projet de rénovation du bâtiment Vincent Auriol qui a pour objectif la densification et l’amélioration de la qualité thermique du bâtiment. L’annulation des crédits associés à ce projet pour 37 millions d’euros a également absorbé une part des annulations de crédits en 2024 pour le programme 218.

Ces dépenses contraintes sont en cours d’arbitrage dans le cadre de la finalisation du nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) des ministères économiques et financiers sur la période 2024-2028 qui vise à adapter le parc immobilier aux enjeux de la transition écologique, à l’évolution des organisations de travail, dont le développement du télétravail, et aux nouvelles normes d’occupation édictées par la circulaire de la Première ministre du 8 février 2023. Ces opérations permettraient de restituer des espaces locatifs avec des économies attendues sur les loyers et charges de plusieurs bâtiments, pour un montant total de l’ordre de 10 millions d’euros par an et une réduction de plus de 12 000 m² de la surface utile nette (SUN), soit près de 7 % des surfaces utilisées par les services d’administration centrale.

C.   Les politiques d’action sociale visant À amÉliorer les conditions d’emploi des personnels bÉnÉficient de moyens relativement stables en 2025

Les crédits de l’action n° 9 Action sociale ministérielle sont en légère baisse. Ils s’établissent à 187,8 millions d’euros en AE comme en CP (–  1 %), dont 124,5 millions d’euros hors titre 2. Ce budget permet d’accorder des prestations d’accompagnement aux agents dans tous les domaines de l’action sociale, tels que le logement social, la restauration, les vacances et les loisirs, les activités culturelles et sportives ainsi que les aides à la parentalité. L’action sociale permet ainsi de soutenir l’attractivité du ministère et le bien-être des agents. Engagée en 2022, la réforme de l’action sociale se poursuit en 2024 avec la finalisation de la réorganisation du réseau déconcentré de l’action sociale ministérielle, sur une base régionale et non plus départementale.

Si le rapporteur spécial prend acte du fait que l’action sociale a échappé aux coupes massives qu’a connu le programme 218, ce qui révèle une certaine conscience de la gravité de la situation sociale du ministère au niveau du secrétariat général, il tient à souligner l’insuffisance manifeste des moyens mis en œuvre au regard du manque d’attractivité au recrutement des ministères économiques et financiers et des résultats désastreux des enquêtes de l’Observatoire interne des ministères économiques et financiers.


—  1  —

 

III.   LE PROGRAMME 302 FACILITATION ET SÉCURISATION DES ÉCHANGES

La DGDDI, dont les moyens sont regroupés au sein de ce programme, exerce principalement trois missions : la lutte contre la fraude et les grands trafics internationaux ; le soutien des opérateurs économiques dans le cadre de leurs opérations commerciales internationales en assurant la fluidité, la sécurité et la qualité des flux internationaux ; l’efficacité du contrôle douanier et de la perception de la fiscalité douanière. Sa trajectoire budgétaire est définie par le contrat d’objectifs et de moyens 2022-2025 qui arrive à son terme et sera remplacé par une feuille de route en cours d’élaboration.

Les crédits demandés pour la DGDDI progressent significativement en 2025 pour s’établir à 1,81 milliard d’euros en AE et 1,78 milliard d’euros en CP, soit une augmentation de respectivement + 4,1 % et + 4,2 % par rapport aux crédits inscrits en loi de finances pour 2024. Cette progression tient essentiellement à l’augmentation des dépenses de personnel du fait de la hausse du CAS Pensions et du schéma d’emplois positif, au rebasage des dépenses de fonctionnement actualisées pour tenir compte de l’inflation des dernières années et à la hausse des dépenses d’investissement informatique de la DGDDI.

Évolution en 2025 des crÉdits du programme 302 par rapport À 2024 (*)

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

LFI

2024

PLF

2025

Évolution

Part des crédits

01 – Surveillance douanière des flux de personnes et de marchandises et lutte contre la grande fraude douanière

593,83

599,5

+ 1,12 %

587,76

599

+ 1,92 %

33,1 %

03 – Préservation de la sécurité et de la sûreté de l’espace national et européen

204,80

167,4

 18,2 %

166,50

176,8

+ 6,9 %

9,2 %

04 – Promotion des échanges internationaux et qualité du dédouanement

245,99

259,2

+ 5,35 %

246,78

259,7

+ 5,2 %

14,3 %

05 – Fiscalité douanière, énergétique et environnementale

132,11

137,34

+ 4 %

132,74

137,01

+ 3,2 %

7,6 %

06 – Soutien des services opérationnels

476,21

560,99

+ 17,8 %

494,06

522,56

+ 5,8 %

31 %

08 – Soutien au réseau des débitants de tabac

59,1

59,1

59,1

59,1

3,3 %

09 – Mobilisation des outils du renseignement au service des missions douanières – nouvelle action

27,3

26,67

 2,43 %

20,0

24,01

+ 20 %

1,5 %

302 – Facilitation et sécurisation des échanges

1 739,39

1 810,19

+ 4,07 %

1 706,95

1 778,19

+ 4,17 %

100 %

(*) Hors fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.

 

A.   La DGDDI bÉnÉficie de moyens humains et budgÉtaires renforcÉs dans le PLF 2025

1.   La douane maintient un schéma d’emplois positif à hauteur de 50 ETP

Les crédits de titre 2 s’élèvent à 1 375,5 millions d’euros en 2025 contre 1 329,4 millions d’euros en 2024 (+ 3,5 %), expliquant l’essentiel de la hausse des crédits sur l’ensemble des actions du programme. Cette progression s’explique en partie par la hausse du CAS Pensions qui s’élève à 517,2 millions d’euros en 2025 contre 494,3 millions d’euros en 2024.

Les crédits de titre 2 (hors CAS Pensions) connaissent également une progression, passant de 926,3 millions d’euros en 2024 à 952,1 millions d’euros en 2025 (+ 2,8 %). Cette hausse des crédits s’explique principalement par le schéma d’emplois et les transferts d’emploi positifs, par le glissement vieillesse technicité (GVT), par l’indemnisation des jours de CET en raison des congés non pris lors des JOP 2024 et par les mesures de restructuration liées au transfert des missions fiscales des années précédentes.

PROGRAMME 302 : Évolution pluriannuelle des EFFECTIFS

(en ETPT et en ETP)

 

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

LFI

2024

PLF

2025

Plafond d’emplois

16 396

16 473

16 759

17 045

17 351

17 352

16 965

16 572

16 490

16 509

16 531

ETPT exécutés

16 216

16 258

16 641

16 776

16 964

16 905

16 644

16 243

16 243

Schéma d’emplois voté

– 250

+ 215

+ 250

+ 200

+ 250

– 63

– 178

+ 33

– 11

+ 48

+ 50

Schéma d’emplois exécuté

– 233

+ 285

+ 250

+ 201

+ 220

– 168

– 178

+ 19

– 11

Source : réponses au questionnaire budgétaire.

Pour 2025, le plafond d’emplois demandé s’établit à 16 531 ETPT, en progression par rapport aux 16 509 ETPT autorisés en 2024. Il est construit sur la base du schéma d’emplois pour 2025 et du transfert de 23 ETPT. Le solde des transferts correspond à 25 ETPT transférés de la DGFiP dans le cadre de la formation de l’unité de renseignement fiscal tandis que 2 ETPT rejoindront le ministère des armées pour l’armement d’une station radar aux Antilles. 

Le schéma d’emplois demandé s’élève à + 50 ETP à périmètre constant, c’est-à-dire hors transferts d’emplois, poursuivant la trajectoire de + 48 ETP votée en loi de finances pour 2024. Ce schéma d’emplois traduit la continuité de la mise en œuvre des mesures liées à la modernisation du traitement des flux de marchandises en frontière physique et numérique. La ventilation du schéma d’emplois par action n’a toutefois pas encore été arbitrée.

De même que la DGFiP, la DGDDI recourt de manière croissante à la contractualisation pour combler ses difficultés d’attractivité aux concours externes dont les principaux (inspecteurs, contrôleurs et agents de constatation) ont connu un recul de – 20 % de candidats en 5 ans. Ainsi, sur les 720 primo recrutements attendus en 2025, 11,4 % devraient intervenir par voie contractuelle. À Mayotte, il s’agit désormais de la voie de recrutement principale.

La réserve opérationnelle : le volontariat comme solution à une pénurie de spécialistes

La loi n° 2023-610 du 18 juillet 2023 visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces a créé une réserve opérationnelle, constituée de citoyens volontaires et de douaniers retraités, destinée à des missions de renfort temporaire.

Prévu déjà par la loi de finance pour 2024, le calendrier de recrutement de la réserve opérationnelle a été retardé par la préparation des textes d’applications destinés notamment à préciser les conditions de recrutement, de formation, d’habilitation, de port d’arme si nécessaire et d’indemnisation. La phase de consultation obligatoire préalable à la publication des textes réglementaires nécessaires intervient seulement cet automne. Il est prévu une montée en charge du dispositif entre 2025 et 2027 avec pour objectif la cible de 300 réservistes en 2027. En année pleine, le budget de titre 2 relatif à la rémunération de 300 agents des douanes réservistes s’élèvera à 3,1 millions d’euros.

Les réservistes volontaires ont vocation à assurer des missions de soutien sur l’ensemble des missions douanières, notamment en matière de garde-frontière, d’expertise aéromaritime ou d’appui logistique et technique.

Le rapporteur spécial demeure sceptique quant à ce dispositif.  Les syndicats de la DGDDI (CGT, FO, Solidaires) ont fait valoir au cours de leur audition le caractère inadapté du recours à des volontaires pour les missions de la douane qui impliquent des compétences spécialisées et la nécessité de disposer de formateurs. La réserve ne doit dans tous les cas pas avoir vocation à pallier un renforcement durable des effectifs.

Le rapporteur spécial prend acte des moyens supplémentaires accordés à la DGDDI tout en les estimant nettement insuffisants. La douane a perdu un quart de ses effectifs, passant de 22 000 à 16 500 agents, depuis les années 1990. Par comparaison, l’Allemagne dispose de 48 000 douaniers pour couvrir des frontières 3,9 fois plus réduites, sans tenir compte des frontières maritimes de la France qui sont sans commune mesure du fait des territoires d’outre-mer.

Par ailleurs, les mesures de transfert vers la DGFiP dans le cadre de l’unification du recouvrement fiscal (– 247 ETP entre 2022 et 2025) inversent la dynamique des schémas d’emploi positifs. Sur la période 2022-2025, les effectifs de la DGDDI devraient ainsi diminuer de – 141 ETP.

2.   Les dépenses de fonctionnement de la DGDDI sont en hausse du fait du rattrapage de l’inflation et d’un effort d’investissement informatique notable

Les crédits hors titre 2 s’élèvent en 2025 à 434,7 millions d’euros en AE (+ 6 %) et 402,7 millions d’euros en CP (+ 6,6 %). Cette progression tient essentiellement à un rebasage des moyens de fonctionnement, rendu nécessaire au regard du décalage entre la trajectoire financière prévue au contrat et les dépenses effectivement réalisées marquées par l’impact de la forte inflation intervenue. Les dépenses de fonctionnement du programme passent donc de 229,6 millions d’euros en 2024 à 248,3 millions d’euros en 2025 en CP (+ 8,1 %).

La hausse des dépenses de fonctionnement tient également à des mesures nouvelles en matière d’équipements de surveillance (scanner de basse intensité, renouvellement de la flotte aéromaritime vieillissante etc.), correspondant à la mise en œuvre d’une partie des mesures prévues au COM 2022-2025 et dans le plan de lutte contre la fraude aux finances publiques lancé en mai 2023 et à la poursuite des investissements en matière immobilière et de systèmes d’information. Cette progression des investissements, notamment informatiques, se traduit par une nette hausse des crédits dédiés de l’action 6 Soutien des services opérationnels qui passent de 35,5 millions d’euros en CP en 2024 à 49,8 millions d’euros en 2025 (+ 40,09 % CP) et de 84,8 millions d’euros en AE en 2024 à 109 millions d’euros en 2025 (+ 28,5 % AE). Ces investissements permettront par exemple de financer des actions de sécurisation des systèmes d’informations douaniers, dans un contexte de hausse des cyberattaques, et d’assurer la modernisation et la sécurisation du réseau de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED).

DÉpenses informatiques de la DGDDI (2024-2025)

 

 

2024

Prévision (PAP)

2025

Prévision (PAP)

AE

CP

AE

CP

Dépenses de fonctionnement

49,6

53,7

37,5

34,2

Dépenses d’investissement

19,9

23,9

48,2

46,7

Total

69,5

77,6

85,7

80,9

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

 

 

Le recours aux marchés mutualisés pour les dépenses d’équipements : un manque de prise en compte des spécificités des agents qui pose question

Les dépenses de fonctionnement permettent notamment l’achat des équipements des agents qui passe le plus fréquemment par des marchés mutualisés avec d’autres ministères. Ces marchés groupés répondent à quatre objectifs :

– un « effet volume » des commandes dont ne dispose pas la douane à elle seule, permettant une réduction des coûts grâce aux économies d’échelle réalisées ;

– une mutualisation de l’expertise technique nécessaire à l’expression des besoins ;

– la réalisation de tests en laboratoire, au cours de l’analyse des offres. Par exemple, le test de la qualité des poudres à munitions n’est pas réalisable en interne ;

– un gain de temps puisque le recours à ces marchés mutualisés permet de réduire le nombre de marchés passés par la douane.

À l’occasion des auditions conduites par le rapporteur spécial, les syndicats ont unanimement souligné les difficultés d’adaptation aux besoins des agents que posent ces marchés et les délais excessifs, parfois de plusieurs mois, pour recevoir des équipements essentiels. À titre d’exemple, les motocyclistes de la douane ne peuvent aujourd’hui pas superposer leur gilet airbag et leur gilet pare-balle, situation qui a conduit à la mort d’un agent en juillet 2024 dans un accident routier. Ces problématiques sont redoublées dans les territoires d’outre-mer par des délais de mise à disposition encore rallongés et un coût renchéri des matériels.

Afin d’optimiser le recours aux marchés mutualisés et de permettre une meilleure prise en compte de ses spécificités, la douane étudie un certain nombre de pistes d’amélioration pour une relation renforcée avec les autres administrations, telles la réintroduction d’instances de gouvernance et l’élaboration de conventions de groupement de commandes en amont des procédures d’achat qui auraient pour objectif de définir précisément le rôle de chacun dans la procédure et de déterminer les montants sur lesquels chaque entité s’engage afin de mieux piloter les contrats.

B.   Un contrôle des flux de marchandises insuffisant et fragilisé par la discontinuitÉ de la cartographie douaniÈre

1.   La lutte contre la fraude voit ses moyens renforcés au travers de la création d’une unité de renseignement fiscale

La principale implication du plan de lutte contre toutes les fraudes pour le programme 302 a été la création en 2024 de l’action n° 9 Mobilisation des outils du renseignement au service des missions douanières. Celle-ci regroupe les travaux informatiques, l’acquisition de matériels techniques et les opérations immobilières que la DNRED conduit pour conforter sa place au sein du premier cercle de la communauté du renseignement. Une nouvelle unité de renseignement fiscal (URF) rattachée à la DNRED a en outre été créée.

Cette unité a vocation à être mobilisée sur la recherche et la prévention des fraudes fiscales les plus complexes et les plus graves. Son action sera dirigée contre les situations dans lesquelles les outils actuels du contrôle fiscal sont freinés, notamment la dissimulation d’avoirs à l’étranger dans les paradis fiscaux et les entités opaques comme les trusts, le recours à des cabinets de défiscalisation et l’optimisation abusive des grandes multinationales. L’URF commencera à fonctionner en 2025. Afin de garantir la cohérence et l’efficacité de son action, la gouvernance de la mission de renseignement fiscal intégrera l’ensemble des parties contribuant à la production du renseignement en matière de fiscalité : DNRED, direction nationale des enquêtes fiscales rattachée (DNEF) à la DGFiP et Tracfin.

Les crédits demandés au titre de l’action n° 9 s’élèvent à 26,7 millions d’euros en AE (– 2,7 %) et 24 millions d’euros en CP (+ 20 %). La forte hausse des crédits de paiement s’explique par le transfert de 25 ETPT du programme 156 au titre de la nouvelle unité de renseignement fiscale.

2.   La réponse douanière aux trafics illicites voit toutefois dans l’ensemble ses moyens stagner

L’action n° 1 Surveillance douanière des flux de personnes et de marchandises et lutte contre la grande fraude douanière retrace les moyens consacrés à la lutte contre les trafics internationaux de produits prohibés, comme les stupéfiants, les cigarettes issues de la contrebande ou les armes, et au démantèlement des organisations criminelles qui pilotent ces trafics ou blanchissent des capitaux illicites. Les moyens et les effectifs de l’Office national anti-fraude (ONAF), créé le 1er mai 2024, qui constitue un service d’enquête judiciaire spécialisé dans la délinquance douanière, économique et financière ainsi que de la DNRED — à l’exception de sa direction technique (DT), rattachée à l’action n° 9 — émargent également sur l’action n° 1.

Du fait de leur positionnement au cœur de la circulation des marchandises, les services douaniers font face à l’aggravation, à la complexification, à l’internationalisation et à la digitalisation du crime organisé et des organisations terroristes liées aux trafics de marchandises illicites. La douane est ainsi à l’origine de la majorité des saisies de stupéfiants avec 60 à 75 % en moyenne de l’ensemble des saisies toutes administrations confondues. La douane est plus généralement chargée des contrôles visant à lutter contre les fraudes douanières — fausses déclarations d’origine, de valeur ou d’espèce visant à éluder des droits et taxes ou des mesures de restrictions —, et d’appliquer les réglementations sectorielles propres à certaines catégories de marchandises. La douane est de ce fait une administration clé pour la compétitivité des entreprises françaises et la sécurité des consommateurs.

Afin limiter au maximum le temps d’immobilisation des marchandises, la douane recourt à une analyse des risques pour cibler les flux les plus sensibles. La conséquence est que seules 0,12 % des marchandises sont contrôlées par la douane en 2024, avec un délai moyen tombé à 4 minutes 48 secondes, soit l’un des plus bas d’Europe. Cette proportion est vouée à se réduire à l’aune du volume exponentiel des flux de marchandises porté par l’essor du e-commerce, chaque marchandise de e-commerce correspondant à une déclaration en douane. Le nombre de déclarations traitées par la douane a ainsi été multiplié par cinq en quatre ans, passant de 35 millions en 2019 à près de 200 millions en 2023. Les flux illégaux connaissent la même dynamique qu’il s’agisse du tabac, des contrefaçons ou des stupéfiants, qui transitent à 80 % par les flux de marchandises ([9]).

Les syndicats de la DGDDI ont dénoncé le fait que ces délais de contrôle étaient manifestement insuffisants pour s’assurer de la conformité des marchandises internationales aux réglementations sanitaires et environnementales françaises et européennes, de l’absence de fraude fiscale ou de produits illégaux.

La situation est plus problématique encore s’agissant du contrôle des flux légaux et illégaux transitant par les DROM-COM. En Polynésie française et à La Réunion, la douane ne dispose pas de moyens aéromaritimes pour contrôler la ZEE française. À Mayotte, le dernier moyen naval disponible a été transféré à la police aux frontières en 2017. Ces moyens réduits sont d’autant plus alarmants qu’ils doivent permettre d’assurer le contrôle de la deuxième ZEE au monde (10 186 000 km2) avec des enjeux stratégiques considérables : préservation des ressources halieutiques, nodules métalliques, trafic de drogue en Guyane…

Le rapporteur spécial déplore cette situation à laquelle le PLF 2025 n’apporte pas de solution. L’action 1 rassemble 7 354 emplois en 2025, soit près de 45 % des effectifs du programme, contre 7 362 en 2024, soit une baisse de 8 ETP malgré la hausse globale des moyens du programme. Ses crédits hors titre 2 connaissent un recul important, passant de 39,8 millions d’euros en AE à 28,1 millions d’euros (– 30,6 %) et de 33,7 millions d’euros en CP en 2024 à 28,1 millions d’euros (– 18,1 %).

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 31 octobre 2024, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Gestion des finances publiques.

L’enregistrement audiovisuel de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Après avoir examiné les amendements de crédits et adopté onze d’entre eux (II-CF1110 ; II-CF1201 ; II-CF1207 ; II-CF1208 ; II-CF1210 ; II-CF1212 ; II-CF1216 ; II-CF1216 ; II-CF1219 ; II-CF1433 ; II-CF1834 ; II-CF2006) IICF1299, II-CF2641, II-CF2639 et II-CF1757), et suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission a adopté les crédits de la mission Gestion des finances publiques.

 

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. La mission Gestion des finances publiques rassemble les moyens de la direction générale des finances publiques (DGFIP), de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) ainsi que ceux du secrétariat général des ministères économiques et financiers. Ces administrations ont été parmi les plus affectées par la politique d’austérité des quinze dernières années.

Les crédits de la mission s’élèvent à 11,1 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 11 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse respectivement de 253 millions et de 72 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2024. Mais cette progression n’est que de façade.

Le programme 156, Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local, concentre les moyens de la DGFIP et réunit près des quatre cinquièmes des moyens de la mission. C’est lui qui porte la hausse des crédits, mais celle-ci est exclusivement liée au renouvellement des marchés interministériels de fourniture d’énergie et à l’augmentation du taux de cotisations sociales de la DGFIP. Toutes les dépenses structurelles du ministère sont en revanche en baisse. Rappelons que la DGFIP est utilisée comme premier réservoir de suppressions de postes de la fonction publique : depuis 2008, elle en a ainsi perdu 34 500. Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de supprimer 550 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, en contradiction avec le contrat d’objectifs et de moyens 2023-2027.

Cette politique a des conséquences dramatiques. Le nombre de contractuels et la charge de travail des personnels ont explosé, conduisant l’observatoire interne du ministère à dresser un constat alarmant de la situation. Celle-ci est aggravée par la réforme du nouveau réseau de proximité, qui revient à supprimer le réseau territorial de la DGFIP et qui sera poursuivie en 2025. L’enquête de l’Association des maires de France (AMF) d’octobre 2024 dénonce d’ailleurs une dégradation du service ; les usagers doivent parfois réaliser plusieurs dizaines de kilomètres pour un rendez-vous, et les horaires d’ouverture sont restreints. En définitive, toutes les missions de la DGFIP sont affectées par les politiques d’austérité.

Les budgets du programme 218, Conduite et pilotage des politiques économiques et financières, sont eux aussi en baisse, les crédits de paiement diminuant de 6,7 % par rapport à 2024. Pire encore, cette baisse affecte deux chantiers essentiels du ministère. D’une part, les services de lutte contre la fraude et la corruption voient leurs moyens s’éroder. Tracfin, le service chargé de la lutte contre la criminalité économique et financière et de la lutte contre la fraude aux finances publiques, perd près d’un cinquième de son budget par rapport à 2024 alors que son activité ne cesse d’augmenter. D’autre part, les crédits informatiques de l’administration centrale chutent de 16 %. Compte tenu de la dette technique abyssale des ministères économiques et financiers, sur laquelle l’Inspection générale des finances (IGF) comme la Cour de comptes ont plusieurs fois alerté, on est pour le moins atterré.

J’en viens enfin au programme 302, Facilitation et sécurisation des échanges. La DGDDI est la seule administration à enregistrer une légère augmentation de ses effectifs, qui gagnent cinquante ETP, ainsi qu’une hausse de 4 % de ses crédits. Depuis les années 1990 cependant, la douane a perdu un quart de ses effectifs, qui sont passés de 22 000 à 16 500 agents, alors même que la libéralisation des échanges massifiait les flux de marchandises. La conséquence est que le taux de marchandises contrôlées par la douane n’est que de 0,1 % aujourd’hui. Quant au délai moyen de traitement – consacré à la vérification de la conformité des marchandises internationales à nos réglementations sanitaires et environnementales, et de l’absence de fraude fiscale ou de produits illégaux –, il s’est effondré à 4 minutes et 48 secondes en 2024. C’est l’un des plus faibles d’Europe. Cinquante agents supplémentaires ne combleront pas 5 500 emplois supprimés, alors que les flux de marchandises explosent sous l’effet, notamment, du commerce en ligne.

À l’occasion du PLF pour 2025 a également été décidée la mise en place d’un moratoire sur le vaste mouvement de transfert des taxes des douanes vers la DGFIP initié en 2019. Le Gouvernement semble avoir compris que le contrôle de flagrance dans les entrepôts et sur les carburants est nécessaire à la bonne perception de l’impôt. Les contrôles relatifs à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) resteront effectués par la douane, qui seule dispose des compétences nécessaires, mais il y a lieu de s’interroger sur la pertinence des transferts déjà réalisés – et sans doute de les remettre en cause.

Au vu de la trajectoire désastreuse que propose ce PLF pour la mission Gestion des finances publiques, je ne peux que vous proposer de rejeter les crédits proposés.

 

Mission Gestion des finances publiques : Lutte contre l’évasion fiscale (Mme Mathilde FELD et M. Nicolas SANSU, rapporteurs spéciaux)

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Notre rapport concerne les seuls crédits du programme 156, alors que la lutte contre l’évasion fiscale devrait selon nous constituer une priorité gouvernementale à part entière – ce qui n’est absolument pas le cas, en dépit des effets d’annonce.

Premier point de vigilance : nous ne disposons que de données très partielles pour évaluer le volontarisme politique dont la lutte contre l’évasion fiscale fait l’objet. Ni le projet annuel de performances ni le document de politique transversale ne détaillent distinctement l’évolution du nombre d’emplois qui sont alloués à la lutte contre l’évasion fiscale au sein de la multitude de services concernés : la DGFIP, Tracfin, qui est un service de renseignement placé sous l’autorité du ministère de l’économie et des finances, le service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), spécialisé dans la répression de la délinquance douanière, financière et fiscale, la DGDDI et, enfin, la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), un service d’enquête placé au sein de la direction centrale de la police judiciaire et rattaché à la division nationale des investigations financières et fiscales. La lutte contre l’évasion fiscale est assurée par des services relevant de différents programmes et missions, sans que l’administration ne soit capable de fournir une présentation consolidée des crédits et des effectifs qui lui sont consacrés.

Second point d’alerte : le présent projet de loi de finances prévoit, à nouveau, de tailler dans les effectifs de la DGFIP alors même que la loi de finances pour 2024 promettait une année blanche en 2025. Ce n’est, hélas, pas une nouveauté pour notre administration fiscale qui est la plus sacrifiée de toute la fonction publique d’État : elle a déjà subi, en effet, 40 000 suppressions de postes depuis la fin des années 2000, dont 4 000 affectant le contrôle fiscal. On ne peut s’empêcher à ce stade de s’interroger sur le sort que réserve le gouvernement à ce service public qui est l’un des plus précieux de l’État, étant pratiquement le seul à générer des recettes.

Nous avons auditionné des économistes, des sociologues, des ONG ainsi que des représentants de la DGFIP, d’organisations syndicales et de Tracfin. Tous nous ont alertés sur une situation déjà désastreuse qui a fait s’effondrer les résultats du contrôle fiscal depuis 2017. Alors que l’administration fiscale avait notifié 21,2 milliards d’euros d’encaissements par l’État en redressements fiscaux et pénalités en 2015, ce montant n’était plus que de 15,2 milliards en 2023. L’utilisation massive de l’intelligence artificielle pour la programmation des contrôles est contestée par les agents en raison de son efficacité très modeste et de la perte de sens au travail qu’elle induit. L’évasion et la fraude fiscales représentent chaque année 100 milliards d’euros en moins dans les comptes de l’État.

Les créations de postes dans le contrôle fiscal annoncées par le gouvernement précédent ne sont que des redéploiements, or la hausse des moyens dévolus au contrôle fiscal ne peut se faire aux dépens des autres activités de la DGFiP. Les vérificateurs ne sont que les derniers maillons d’une longue chaîne faisant intervenir différents acteurs sans lesquels le contrôle ne peut se faire correctement. La programmation du contrôle s’appuie sur des données qu’il faut non seulement collecter mais aussi formaliser, ces deux étapes nécessitant des personnels sur le terrain mais aussi en gestion. Justifier les suppressions de postes par le recours aux méthodes de data mining est donc un contresens.

La lutte contre l’évasion fiscale n’est pas qu’une affaire de lignes dans des tableaux budgétaires. Elle est fondamentale pour notre cohésion sociale car elle permet notamment de garantir le consentement à l’impôt. Des auditions que nous avons menées auprès d’économistes, notamment, ressort une nécessité : celle de modifier notre législation pour la rendre moins perméable à l’optimisation fiscale agressive, et de faire enfin preuve de volonté politique. Nous devrions pouvoir nous retrouver largement autour de ces objectifs, la lutte contre l’évasion fiscale étant un combat transpartisan.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Plus qu’une simple revue d’effectifs – certes importante –, notre rapport aborde le sujet bien plus large du consentement à l’impôt. Des dizaines de milliards d’euros qui devraient abonder le budget de l’État échappent aujourd’hui à l’impôt. Pour réaliser les contrôles fiscaux, il est nécessaire de collecter des données fiables en s’appuyant sur un réseau maillé.

La frontière est très floue entre optimisation et fraude fiscales : face à cette dernière, l’État fait son devoir, opère des redressements et porte même en justice certaines affaires. Face à l’optimisation agressive en revanche – qui peut prendre la forme de CumEx, s’appuyer sur les règlements d’ensemble, reposer sur les cryptomonnaies ou utiliser les prix de transfert –, il est temps de se donner les moyens humains, mais aussi législatifs, de contrôler les montages complexes.

Article 42 et état B : Crédits du budget général

 

Amendements II-CF137 de M. Philippe Juvin et II-CF714 de M. Nicolas Ray (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie, présidente. L’amendement II-CF137 propose une diminution de 10 % du nombre d’emplois, soit 21 167 ETP, au sein des opérateurs de l’État hors recherche et enseignement supérieur ; il permettrait une baisse des crédits d’un peu plus de 317 millions d’euros. Le second, qui est un amendement de repli, propose une diminution de 2,5 % des emplois, ce qui permettrait un gain de 150 millions d’euros.

Les opérateurs de l’État ont vu leur coût augmenter de 30 milliards d’euros et ont gagné 30 000 ETP en l’espace de six ans. Peut-on considérer pour autant que la qualité des services rendus aux citoyens s’est améliorée ? En confiant aux opérateurs des missions qui de surcroît s’enchevêtrent, l’État s’est démuni. Faute de moyens, il n’est plus en mesure de faire évoluer les commandes au fur et à mesure, ni de les évaluer.

Les missions relevant de l’État doivent être mieux organisées, comme le montre l’exemple de la mission Travail, emploi et administration des ministères sociaux. Pour la formation professionnelle, on trouve ainsi l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), le Centre pour le développement de l’information sur la formation permanente (Centre Inffo), l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (Intefp), sans oublier les groupements d’intérêt public (GIP) « Les entreprises s’engagent » et « La plateforme de l’inclusion », France Travail et France Compétences – et cette liste n’est pas exhaustive. Nous considérons que l’on peut probablement faire des économies, tout en améliorant la qualité du service.

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. Vous ne serez pas étonnée que j’émette un avis défavorable à ces deux amendements. Après avoir conduit une dizaine d'auditions et parcouru l'ensemble des documents budgétaires relatifs à cette mission pour ce rapport spécial, il se trouve que je n’ai trouvé aucun opérateur au sein de celle-ci. Par conséquent, loin de réduire de 10 % le budget des opérateurs, vos amendements auraient pour effet de sabrer dans les effectifs de la DGFIP consacrés notamment à la lutte contre la fraude fiscale. Or ce n’est pas souhaitable, celle-ci ayant perdu un tiers de ses effectifs au cours des quinze dernières années.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Il est précisé dans l’exposé sommaire de chacun des amendements que l’économie proposée serait répartie sur l’ensemble des missions et ne serait pas intégralement imputée sur la mission Gestion des finances publiques.

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Vous proposez tout de même de diminuer les crédits du programme 156, Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local, ce qui est déplorable. Un agent travaillant dans la lutte contre l’évasion fiscale rapporte plus d’argent qu’il n’en coûte.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Vous aurez compris qu’il s’agit d’un amendement d’appel et que la diminution des crédits serait répartie sur différentes missions.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements II-CF1834 de M. Laurent Baumel, II-CF2005 de M. Jérôme Legavre, II-CF1215 de Mme Christine Pirès Beaune, II-CF1204 de Mme Mathilde Feld, II-CF1527 de Mme Christine Arrighi, II-CF1107 de M. Philippe Brun et II-CF1852 de Mme Danielle Simonnet (discussion commune)

Mme Dieynaba Diop (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés propose de renforcer les moyens de lutte contre la fraude fiscale en revenant sur la suppression de 550 ETP prévue par le PLF pour 2025 et en créant 4 000 postes d’inspecteurs des finances – soit le nombre de postes supprimés depuis 2010. Alors que le montant de la fraude fiscale est estimé entre 80 et 100 milliards d’euros par an en France, cet amendement permettrait, à terme, de générer des recettes significatives pour l’État, bien supérieures à son coût initial. En outre, il contribuerait de façon essentielle au renforcement de la justice fiscale dans notre pays.

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. Je propose moi aussi d’amorcer un plan massif de recrutement d’agents pour la DGFIP. Nous avons été frappés au cours de nos auditions de constater que les agents des finances publiques ne sont plus en mesure de remplir leurs missions faute d’effectifs suffisants. Ceux qui sont dédiés au contrôle fiscal ont baissé d’un cinquième depuis 2014. Il n’y a pas toutefois que la question du contrôle fiscal. André Laignel, président du Comité des finances locales, a expliqué devant notre commission il y a quelques semaines les conséquences pour les communes de la fermeture de nombreuses trésoreries. La tenue des bases cadastrales nécessaires à la perception des impôts locaux est ainsi jugée défaillante par 75 % des maires. Il importe donc de renforcer les moyens humains de la DGFIP.

M. Philippe Brun (SOC). Le PLF pour 2025 annonce un solde négatif de 730 emplois pour les services départementaux de la DGFIP, alors que le réseau avait déjà connu 2 000 suppressions nettes par an depuis 2010. Nous proposons de rétablir ces emplois pour un coût d’environ 55 millions d’euros, afin de renforcer la lutte contre la fraude fiscale sur le terrain, au plus près des contribuables. Pour ce faire, nous proposons d’abonder le programme 156 en prélevant sur les crédits de l’action 01, Expertise, audit, évaluation et contrôle du programme 218, Conduite et pilotage des politiques économiques et financières – sachant que nous demanderons évidemment au Gouvernement, le moment venu, de lever ce gage.

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. L’amendement II-CF1204 propose de maintenir les 550 emplois que le Gouvernement prévoit de supprimer, afin d’éviter que les moyens humains de la DGFiP, notamment ceux consacrés au contrôle fiscal, ne soient une nouvelle fois sacrifiés. Le recrutement et la formation d’agents sont essentiels à la création d’un service d’expertise dédié à l’étude des dernières innovations en matière de fraude, d’évasion fiscale ou d’optimisation agressive. Ce service doit alimenter les outils de data mining plutôt que d’en être tributaire. Face à la fraude complexe mise en place par une poignée de grandes entreprises et de grandes fortunes, l’intelligence artificielle ne peut remplacer le travail humain des agents de la DGFIP.

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous contestons la réduction du nombre de postes prévue en 2025 au sein de la DGFIP, qui va totalement à l’encontre de l’intérêt général : en affaiblissant la lutte contre l’évasion fiscale, elle diminue les recettes potentielles du contrôle. L’amendement II-CF1527 propose d’abonder de 30 millions d’euros l’action 01, Fiscalité des grandes entreprises, du programme 156. L’amendement de repli II-CF1852 vise à annuler au moins la suppression prévue de 260 postes. Je rappelle que 27 % des emplois ont été supprimés depuis 2008 et que le recours à l’intelligence artificielle ne saurait se substituer au contrôle exercé par des agents.

M. Philippe Brun (SOC). L’amendement II-CF1107 propose de revenir sur la suppression de 494 postes prévue au sein des effectifs de lutte contre la fraude. Nous sommes ainsi fidèles aux positions de notre groupe mais aussi à celles du Gouvernement. En tant que ministre délégué chargé des comptes publics, notre collègue Thomas Cazenave s’est en effet engagé avec force dans la lutte contre la fraude.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. J’émets un avis favorable à l’ensemble de ces amendements. Le premier, déposé par le groupe Socialistes, est le plus coûteux mais aussi le plus logique puisqu’il revient sur toutes les suppressions de postes depuis 2010. Il vise tant à abonder les moyens de lutte contre la fraude et l’optimisation fiscale agressive qu’à renforcer la collecte de données fiables au plus près du terrain, laquelle est indispensable.

On a eu tendance, de façon presque naturelle, à favoriser le data mining or celui-ci est aujourd’hui utilisé dans 56 % des contrôles mais n’est à l’origine que de 13 % des recettes : dans ces conditions, ne faudrait-il pas renforcer le nombre de contrôleurs spécialisés pour améliorer le rendement des contrôles ? Celui-ci s’élève aujourd’hui à 15 milliards d’euros, et l’on ne peut pas dire qu’il ait connu une augmentation conséquente au cours des dernières années.

Nous devons enfin nous interroger sur les règlements d’ensemble, pour lesquels le nombre de dossiers est passé de 128 à 320 en l’espace de trois ans : il nous faut regarder ce que contient ce qui s’apparente à une véritable boîte noire.

M. Thomas Cazenave (EPR). L’objectif du gouvernement précédent visant à augmenter de 1 500 le nombre d’ETP consacrés au contrôle fiscal n’est pas remis en cause, monsieur Brun. L’ensemble des orateurs ayant défendu les amendements semblent considérer que les suppressions d’emplois à la DGFiP concerneraient forcément le contrôle fiscal, comme s’il s’agissait-là de sa seule activité. Cette administration assure pourtant aussi la tenue de comptes des collectivités territoriales, le calcul de l’impôt ou encore sa collecte. Quoi qu’il en soit, je considère – c’est un point d’accord avec vous – qu’il faut maintenir la trajectoire visant à renforcer les effectifs dédiés au contrôle fiscal.

Quant à l’intelligence artificielle et au data mining, ils permettent de cibler la moitié des contrôles et contribuent ainsi à l’amélioration de l’efficacité et du rendement de ceux-ci. Grâce à ces outils très précieux, nous avons multiplié par deux, entre 2019 et 2023, le nombre de redressements touchant les particuliers les plus fortunés de notre pays.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je rejoins Thomas Cazenave. Avez-vous pris en compte, madame Feld, monsieur Sansu, le fait que la mise en place du prélèvement à la source a permis de redéployer du personnel sur le terrain et d’améliorer les recettes de l’impôt sur le revenu ? Vous considérez que les moyens ne sont jamais suffisants. Il me semble pourtant que des efforts sont faits et que 1 500 ETP, c’est toujours mieux que rien. Quant aux outils technologiques d’aide au contrôle, vos travaux vous ont-ils permis de mesurer leur efficacité ? Existe-t-il selon vous des pistes d’amélioration ? Je veux bien que vous ayez un œil critique, mais ne portez-vous pas aussi un regard positif sur les progrès réalisés ?

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Les auditions que nous avons menées ont effectivement démontré que l’intelligence artificielle était un outil très efficace pour traiter une multitude de données avec une rapidité inédite. Mais elles montrent aussi que cette technologie n’est pas la panacée. D’après les syndicats, le métier de vérificateurs – dont je sais évidemment qu’il n’est pas le seul métier de la DGFIP – a considérablement perdu de son sens. Les vérificateurs sont en effet contraints d’effectuer leurs contrôles sur la base des listes produites par l’intelligence artificielle, au détriment de leurs propres méthodes d’analyse et des observations qu’ils font sur le terrain.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. L’exploration des données est organisée selon des angles définis. Si les agents identifient un nouveau montage de fraude, ils doivent l’intégrer à la matrice pour ensuite avoir le droit de le contrôler ; ils n’étaient pas soumis à de telles obligations lorsque tout était fait à la main. L’outil a donc accéléré le travail mais les agents doivent en permanence mener des contrôles du même type, ce qui pose un problème. C’est pourquoi j’insistais sur la nécessité de progresser dans la lutte contre les montages complexes.

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. La Cour des comptes elle-même est assez critique : l’efficience de l’intelligence artificielle peut se révéler décevante. Le plus souvent, on fait état du recours à l’IA pour justifier l’application de plans de rigueur et de suppressions de postes.

Par ailleurs, je le répète : les nouveaux réseaux de proximité dégradent le service public et l’éloignent des usagers, et pas uniquement en milieu rural. Les maisons France Services n’assurent pas les missions qu’accomplissaient les services publics qu’elles sont censées remplacer.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Je salue l’installation des maisons France Services dans les territoires et l’engagement des collectivités territoriales dans ce domaine. Les maisons France Services sont très utiles.

La commission adopte l’amendement II-CF1834.

Les amendements suivants tombent.

 

Amendement II-CF1219 de M. Aurélien Le Coq

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). L’amendement vise à titulariser les agents contractuels de la DGFIP.

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial.  Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

L’amendement II-CF1207 du rapporteur spécial Jérôme Legavre est adopté.

 

Amendement II-CF1433 de M. Peio Dufau

Mme Dieynaba Diop (SOC). Le présent amendement vise à renforcer les moyens de la DGFiP pour lutter contre le fléau de la fraude à la résidence principale, massivement pratiquée par les propriétaires qui veulent échapper aux contributions obligatoires liées au statut de leur résidence – taxation de la plus-value immobilière et majoration sur la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) dans les communes en zone tendue notamment. Les remontées de terrain indiquent que le contrôle est insuffisant. Nous proposons donc de réorienter les crédits afin de déployer les moyens humains et techniques nécessaires pour mieux identifier les cas de fraude, ce qui servirait à la fois la justice fiscale et les recettes des collectivités.

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Avis favorable. Il est inacceptable que les multipropriétaires refusent de s’acquitter des taxes dont ils sont redevables.

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Vous laissez entendre que tout ne serait qu’un problème d’effectifs – plus les agents seraient nombreux, plus les services seraient efficaces. Ce n’est pas comme cela que cela marche, et la DGFiP l’illustre : le prélèvement à la source, qui nécessite moins d’agents, a amélioré le service rendu et significativement augmenté le rendement de l’impôt, de sorte que nous avons pu redéployer du personnel. Le principe est applicable dans de nombreux domaines.

Nous ne vous avons pas attendus pour mener la lutte contre la fraude fiscale. Nous avons engagé plusieurs plans pour en améliorer le rendement, avec des résultats. Il ne suffit pas d’augmenter les effectifs. Nous avons recouru à l’IA et à l’automatisation, conclu des accords avec les pays de l’OCDE pour lutter contre l’optimisation et nous avons imposé aux grandes entreprises des obligations de transparence.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF1110 de Mme Christine Pirès Beaune

M. Philippe Brun (SOC). Monsieur Cazeneuve, plus il y a de vendeurs de tupperwares, plus vous vendez de tupperwares ! Quand vous augmentez le nombre de contrôleurs, le rendement croît.

L’amendement II-CF1110 vise à allouer deux millions à la création d’une base de données commune aux différents services de lutte contre la fraude – service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), Tracfin, la DGFIP, la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) notamment. Il s’agit d’une recommandation issue du rapport d’information de Mme Pirès Beaune relatif aux aviseurs fiscaux.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Avis favorable.

Monsieur Cazeneuve, en 2015, le contrôle fiscal a permis de réaliser des recouvrements à hauteur de 19 milliards d’euros. Ce montant a chuté à 17 milliards en 2016, 16 milliards en 2017, 14 milliards en 2018, 12 milliards en 2019, 8 milliards en 2020, 13 milliards en 2021, 14 milliards en 2022 et 15 milliards en 2023. Certes, les sommes ne sont pas nulles, mais nous ne parvenons pas à passer un cap, dans la direction du montant total estimé de la fraude, à savoir 80 milliards d’euros. Sans espérer recouvrer 100 % des sommes, un saut qualitatif et quantitatif est nécessaire.

M. David Amiel (EPR). M. Brun n’a pas choisi le meilleur exemple : en septembre, l’entreprise Tupperware se déclarait en faillite ! (Sourires.)

Nous pouvons certainement améliorer la lutte contre la fraude, notamment en croisant les bases de données pour mieux cibler les contrôles. Thomas Cazenave a déposé une proposition de loi en ce sens.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CF1216 de Mme Mathilde Feld

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Le présent amendement vise à allouer des moyens à la formation des agents. Pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscale, il faut dispenser aux contrôleurs une formation de qualité. Cette dépense constitue un investissement car elle participera à augmenter le montant des recouvrements.

Mme Véronique Louwagie, présidente. L’augmentation du nombre d’agents ne garantit pas l’amélioration des résultats – nous devons sortir de cette logique.

La commission adopte l’amendement.

 

La commission adopte successivement les amendements II-CF1201 et II-CF1210 de la rapporteure spéciale Mathilde Feld.

 

Amendement II-CF1212 de M. Jérôme Legavre

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. L’amendement II-CF1212 tend à créer une direction interministérielle de lutte contre l’évasion fiscale associant les ministères chargés de l’intérieur, des finances et de la justice.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF2006 de M. Jérôme Legavre

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2006 tend à recruter 500 douaniers. Certes, vous n’aimez pas ouvrir des postes. Certains ici considèrent en effet que les soignants soignent mieux quand ils sont moins nombreux, que les professeurs enseignent mieux quand ils sont moins nombreux et que les agents de la DGFIP sont plus efficaces quand ils sont moins nombreux. Les représentants des douaniers que nous avons auditionnés nous ont néanmoins indiqué que seules 0,1 % des marchandises sont contrôlées. Des milliards échappent à l’État parce que quantité de contrôles, de flagrance en particulier, ne peuvent être effectués. Nous avons besoin de douaniers en plus, pour contrôler non les personnes mais les marchandises – c’est le cœur de leur mission.

Ces dernières années, certaines missions fiscales ont été transférées de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) vers la DGFIP. Il faut y revenir : c’est un fiasco.

M. Thomas Cazenave (EPR). Combien d’agents seraient nécessaires pour contrôler tous les containers qui entrent dans nos ports ? L’administration n’y suffira jamais, mais la technologie offre des solutions. On peut déployer des scanners intelligents pour cibler les contrôles. Il faut non pas toujours augmenter les effectifs mais s’assurer que les agents en poste disposent des outils techniques pour gagner en efficacité.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF327 de M. Matthias Renault

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. Je voudrais comprendre pourquoi la trajectoire budgétaire de l’Autorité nationale des jeux (ANJ) vous inquiète tant. Les crédits de paiement sont stables depuis 2022, malgré l’inflation ; quatre des dix membres du collège sont nommés directement par le Parlement ; la présidente est auditionnée par les commissions. On peut difficilement soutenir, comme vous le faites, que le contrôle parlementaire s’en trouve affaibli.

La commission rejette l’amendement.

 

Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous en venons aux explications de vote.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Il est logique de renforcer les effectifs de la DGFiP, pour améliorer le contrôle fiscal. Nous parlons de 4 000 postes sur un total de 90 000 agents dans la direction. Néanmoins, le nombre ne fait pas tout, il faut mener une réflexion globale. Le rapport spécial doit essentiellement déterminer comment identifier les montages complexes de fraude et d’évasion fiscales et d’optimisation agressive, pour ensuite adapter la législation. J’émets un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission.

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Il est vrai que le renforcement des effectifs ne peut constituer l’unique solution ; pour renforcer la lutte contre l’évasion fiscale, il faudra mener un travail qualitatif et un travail législatif.

M. Jérôme Legavre, rapporteur spécial. Le nombre d’agents n’est pas le seul élément de réponse, mais il est déterminant. Les services sont à l’os – même s’ils ne sont pas les seuls. Nous avons adopté deux amendements tendant à réaffecter des moyens supplémentaires à la DGFIP et aux douanes, ce qui inverse le cours destructeur tracé depuis des années par les gouvernements successifs. Je suis donc favorable à l’adoption des crédits.

Mme Claire Marais-Beuil (RN). Nous sommes d’accord sur la nécessité de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. Cependant, les nombreux amendements ont profondément modifié la trajectoire financière de la mission. Nous voterons contre les crédits.

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Je salue le travail des agents des finances publiques. Sur le terrain, la réorganisation est un succès : la DGFiP conseille davantage les citoyens et les élus sont satisfaits, ainsi que les usagers.

Depuis de nombreuses années, la lutte contre la fraude est une priorité pour notre majorité. Le problème ne peut se résumer aux effectifs : il faut prendre en considération les moyens informatiques, la collaboration internationale, l’augmentation des normes pour contrôler les grandes entreprises. Nous nous y employons.

Vous avez significativement augmenté les moyens, sans proportion avec les besoins. Dans le projet de loi de finances, les autorisations d’engagement ont été rehaussées de 2,35 %, ce qui correspond peu ou prou à l’inflation. Nous voterons contre les crédits de la mission, car ils ont été déformés.

M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Compte tenu des modifications apportées, nous voterons les crédits de la mission.

Beaucoup ont affirmé qu’il ne suffisait pas d’affecter des moyens supplémentaires pour renforcer la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Avec les crédits que nous avons votés, nous prouverons dans les faits que c’est le cas.

M. Arnaud Simion (SOC). Nous avons doté la mission de 500 millions d’euros supplémentaires et ainsi réarmé l’administration fiscale et les douanes. Nous voterons donc ces crédits.

M. Philippe Juvin (DR). La copie était sage, elle l’est beaucoup moins à présent. Nous avons largement débattu du lien entre les effectifs et l’efficacité de l’action publique. Il est parfois matériellement impossible de disposer du personnel nécessaire pour tout contrôler – voyez le nombre de containers qui entrent dans le port du Havre et les millions de tonnes de marchandises qui arrivent à l’aéroport de Roissy. L’inflation de la dépense est telle que nous ne pourrons pas voter ces crédits.

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Le texte initial ressemble au texte modifié comme le jour à la nuit ! Nous sommes à présent favorables à l’adoption des crédits. En effet, nous avons restauré tous les postes supprimés depuis 2008. Nous ne sommes pas contre l’intelligence artificielle ni contre les innovations mais soyons lucides : rien ne remplace le contrôle humain. La DGFiP a expérimenté un dispositif de détection des piscines utilisant un logiciel fourni par  Google et Capgemini : ce logiciel a identifié des places de parking pour personnes handicapées comme des piscines ! Vous exigez que plus de 50 % des contrôles soient ciblés par l’IA, or en augmentant la part des contrôles menés par l’IA, on fait croître mécaniquement le nombre de recouvrements qui aboutissent dans cette même catégorie. Cela ne prouve pas que l’IA soit plus efficace que les agents. S’agissant des douanes, je vous alerte sur l’importance des compétences et le risque qu’entraîne le fait de saucissonner les tâches. Pour mener efficacement la bataille contre la fraude fiscale, il nous fait des effectifs humains et un cap, résultat d’une volonté politique.

Mme Perrine Goulet (Dem). S’il fallait citer un contrôle réussi grâce à l’IA, ce serait précisément celui sur les piscines ! De manière générale, le recours à l’IA est efficace.

Il est dommage d’avoir modifié les crédits d’une mission qui était déjà bien dotée. Il n’est pas nécessaire d’augmenter les effectifs au-delà des 1 500 agents prévus, puisque la modernisation de l’État fonctionne très bien, qu’il s’agisse de la généralisation du compte financier unique, de la simplification de la chaîne comptable, de l’amélioration du recouvrement des recettes.

Ne vous en déplaise, les maisons France Services sont une réussite. Les gens s’y rendent pour un problème et s’aperçoivent qu’ils peuvent en résoudre d’autres. Lorsque l’on habite loin de la préfecture, il fallait parfois faire une heure de route pour se rendre à un guichet de la DGFiP. Désormais, les citoyens ont accès à tous les services publics, y compris la DGFiP, à vingt minutes de chez eux.

Une fois encore, les commissaires aux finances détériorent le travail accompli en surdimensionnant les besoins, et se ridiculisent. Nous aurions pu trouver des terrains d’entente mais toutes les modifications sont excessives, donc aucune ne sera retenue – c’est dommage. Nous ne pouvons que voter contre les crédits.

M. Christophe Plassard (HOR). Tout le monde doit participer à l’effort budgétaire. La réduction de 500 équivalents temps plein (ETP) dans cette mission donnait un bon signal et témoignait de la bonne volonté des services concernés. Notre groupe soutient le renforcement des moyens dédiés à la lutte contre la fraude fiscale, avec l’engagement d’y affecter 1 500 personnes supplémentaires. De même, le plan de protection des agents publics envoie un message très positif à tous ceux dont la vie est menacée parce qu’ils sont fonctionnaires. Enfin, nous saluons l’intensification de la lutte contre toutes les fraudes, en recourant à l’IA pour cibler les contrôles. La France se dote des meilleurs outils technologiques pour déjouer des montages de plus en plus sophistiqués.

Cependant, compte tenu des amendements adoptés, les membres du groupe Horizons & Indépendants voteront contre les crédits de la mission.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. On annonce 1 500 postes supplémentaires pour le contrôle fiscal mais le schéma d’emploi prévoit 550 ETP de moins. Il faut être cohérent, on ne peut pas toujours dépouiller le réseau local qui collecte les données. Nous sommes revenus sur des suppressions de poste qui s’accumulent depuis 2010 – c’est bien.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Je vous informe que les modifications que nous avons adoptées rehaussent les crédits de la mission de 590 millions d’euros.

 

La commission adopte les crédits de la mission Gestion des finances publiques modifiés.

 

Article 45 et état G : Liste des objectifs et des indicateurs de performance

 

Amendement II-CF1208 de Mme Mathilde Feld

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Le présent amendement vise à créer un indicateur relatif au coût de collecte des recettes issues de la fraude fiscale.

La commission adopte l’amendement.

 

Après l’article 60

 

Amendement II-CF1466 de M. Peio Dufau

Mme Dieynaba Diop (SOC). L’amendement II-CF1466 vise à obtenir un rapport sur les opérations de contrôle fiscal relatives à la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et à ses majorations, ainsi qu’à la taxe sur les plus-values immobilières. Ce rapport préciserait notamment le nombre de contrôles sur place et sur pièces réalisés, le nombre d’agents affectés et, le cas échéant, le nombre de cas transmis à l’autorité judiciaire aux fins de poursuites pénales.

Nous voulons une photographie de l’action du Gouvernement contre la fraude et l’évasion fiscales.

Mme Mathilde Feld, rapporteure spéciale. Je vous propose de retirer votre amendement. Les rapports tendent le plus souvent à partager des données dans un domaine précis ; il est sans doute plus adéquat ici de demander aux cabinets des ministres concernés la liste des actions visées. Par ailleurs, votre amendement visant à renforcer les contrôles a été adopté.

L’amendement est retiré.

 

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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Direction générale des finances publiques (DGFiP) :

– Mme Amélie Verdier, directrice générale des finances publiques ;

– M. Xavier Michelet, sous-directeur du budget, de l’achat et de l’immobilier.

 

Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) :

– M. Florian Colas, directeur général des douanes et des droits indirects ;

– Mme Géraldine Cecconi, sous-directrice des finances et des achats.

 

Secrétariat général des ministères économiques et financiers (SGMEF) :

– Mme Anne Blondy-Touret, secrétaire générale ;

– M. Fabrice Beaulieu, chef du service des achats et des finances.

 

Agence française anticorruption (AFA) :

– Mme Isabelle Jegouzo, directrice ;

– M. Philippe Beuzelin.

 

Solidaires DGFiP : Mme Sandra Demarcq ; M. David Boilet ; M. Guyot Welke.

 

CGT DGFiP: M. Laurent Perrin ; M. Michael Wicke.

 

FO DGFiP : M. Olivier Brunelle, secrétaire générale ; M. Jean-Paul Philidet ; M. Étienne Taillebourg.

 

CFDT DGFiP : Mme Florence Bochnakian, secrétaire nationale.

 

 

 

 

 

Table ronde des organisations syndicales de la Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) :

CGT : Mme Manuela Dona.

UFO : M. Laurent Joly, secrétaire général adjoint ; Mme Anne-Marie Vaudour, permanente syndicale.

Solidaires : M. Yannick Devergnas ; M. François Schallebaum ; M. Fabien Millin.


([1]) Enquête AMF « Les relations des communes et des intercommunalités avec la Direction générale des finances publiques » – octobre 2024.

([2]) Enquête annuelle de l’Observatoire interne des ministères économiques et financiers – édition 2024. À titre de comparaison, 66 % des agents de la fonction publique d’État estiment au contraire que leur administration évolue dans le bon sens.

([3]) Rapport d’information n° 303 de la session ordinaire 2023-2024, Sénat, 2024, page 15.

([4]) « L’action de la direction générale des finances publiques auprès du bloc communal », Cour des comptes, 2024, page 75.

([5]) Les relations des communes et des intercommunalités avec la Direction générale des finances publiques, AMF,2024, page 8.

([6]) « L’action de la direction générale des finances publiques auprès du bloc communal », Cour des comptes, 2024, page 38.

([7]) Sous l’égide de la Mission France Recouvrement, la DGFiP, la DGDDI et l’ACOSS ont développé un portail unique du recouvrement des créances fiscales et sociales « PortailPro.gouv.fr ».

([8]) L’article 4 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite Sapin 2, prévoit expressément la faculté pour l’AFA de recourir à des « personnes ou autorités qualifiées », qui sont alors astreintes au secret professionnel et à des règles déontologiques strictes.

([9]) Source : réponses de la DGDDI aux questionnaires budgétaires.