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N° 624

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 novembre 2024.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi visant à la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse,

 

 

 

 

Par M. Paul-André COLOMBANI,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro : 341.

 

 


– 1 –

SOMMAIRE

___

Pages

Avant-propos

I. La population corse se trouve dans une situation inÉquitable au regard de l’accÈs aux soins

A. Les spÉcificitÉs de la corse font peser une tension inÉdite sur le systÈme de soins

1. L’insularité et le relief, sources de complexité, de délais et de surcoûts

2. Un profil démographique atypique

3. Une précarité très importante

4. Le système de santé de la Corse n’est pas structuré pour répondre à ces défis

B. Il en rÉsulte une situation grave et injuste pour la population corse

1. La multiplication des transferts médicaux, symptôme des lacunes du système de soins

2. Des pertes de chances et des renoncements aux soins manifestes, bien que difficiles à quantifier

3. Les associations appelées à se substituer aux carences de l’État et de l’assurance maladie

II. Le rÉinvestissement rÉcent n’est pas À la hauteur des dÉfis qui attendent l’Île

A. La rÉcente mobilisation politique doit Être saluÉe

1. Un réinvestissement dans les établissements de santé corses

2. Un engagement dans la formation en santé

3. Le développement de filières hospitalo-universitaires et d’hyperspécialités

B. Des rÉponses encore trop fragiles et ponctuelles

1. Des filières hospitalo-universitaires fragiles

2. Des progrès tributaires des fluctuations de la mobilisation politique

III. il faut aujourd’hui aller rÉsolument vers la crÉation d’un centre hospitalier universitaire en corse

A. Un consensus autour des bÉnÉfices À attendre de la crÉation d’un centre hospitalier universitaire

1. Un facteur d’attractivité médicale

2. Un facteur d’amélioration de l’accès aux soins et de la confiance

B. Un terreau favorable en corse

1. Les centres hospitaliers généraux de Corse ont déjà des activités de centre hospitalier universitaire

2. Une dynamique de coopération importante sur le territoire

3. Un potentiel de recherche

C. Vers Un modÈle de centre hospitalier universitaire innovant, progressivement dÉployÉ d’ici 2030

1. La création d’un centre hospitalier universitaire de Corse

2. Vers un modèle innovant de centre hospitalier universitaire

3. Une mise en place nécessairement progressive

Commentaire des articles

Article 1er Principe d’au moins un centre hospitalier universitaire par région

Article 2 Mise en œuvre du centre hospitalier universitaire de Corse d’ici 2030

Article 3 Gage financier

travaux de la commission

ANNEXE N°1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNéES PAR Le RAPPORTEUR

Annexe  2 : textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen DE LA PROPOSITION DE LOI

 


– 1 –

   Avant-propos

Adoptée à l’unanimité en commission des affaires sociales le 5 juin 2024, la première proposition de loi visant à la création d’un centre hospitalier universitaire (CHU) en Corse ([1]) a malheureusement vu son parcours législatif interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale.

Déjà cosignée à l’époque par près de 125 députés de tous bords, cette proposition de loi transpartisane fait l’objet d’un nouveau dépôt sous cette nouvelle XVIIe législature, forte des modifications adoptées par la commission des affaires sociales.

Parmi ces évolutions figurent :

– l’obligation de doter chaque région d’au moins un CHU et non plus l’obligation de créer un CHU « par chef-lieu ». Cette formulation souhaitée par votre rapporteur et ses collègues Jean-Félix Acquaviva, Michel Castellani et Laurent Marcangeli laisse plus de souplesse quant à la déclinaison territoriale et conduira, de la même manière, à la nécessité de doter la Corse d’un CHU ;

– toujours à l’initiative du rapporteur et de ses collègues Jean-Félix Acquaviva, Michel Castellani et Laurent Marcangeli, l’entrée en vigueur de cette obligation a été reportée au 1er janvier 2030 au lieu du 1er janvier 2027 afin de fixer un objectif aussi ambitieux qu’atteignable ;

– enfin, le contenu du décret d’application a été précisé pour clarifier d’une part, le fait que la création de ce CHU doit être achevée au 1er janvier 2030 et, d’autre part, pour garantir que les modalités envisagées tiendront compte des spécificités locales.

Sur le fond, le constat établi au printemps dernier est toujours d’actualité. Aussi, le rapporteur présente-t-il ici des conclusions similaires, agrémentées de deux auditions menées dans le cadre des travaux préparatoires à l’examen de cette nouvelle proposition de loi.

L’égal accès à des soins de qualité pour tous était un principe fondateur de l’assurance maladie, lorsqu’elle a vu le jour en 1945. Ce principe est aujourd’hui mis à mal dans de nombreux territoires en raison, notamment, de la désertification médicale qui prive certains de nos concitoyens de soins dispensés à une distance ou dans des délais raisonnables, et qui précipite l’émergence d’une médecine à deux vitesses.

Il est cependant des territoires où la difficulté est telle que l’injustice en est criante. Incontestablement, de l’aveu général, la Corse en fait partie. Insularité, relief montagneux, précarité, population fluctuante et vieillissante sont autant de spécificités qui mettent fortement en tension un système de santé globalement mal structuré pour répondre à ces défis.

Chaque année, 26 000 patients sont transférés sur le Continent, faute de prise en charge adaptée en Corse. Toutes les familles de l’île, ou presque, sont confrontées à ces transferts qui induisent des difficultés considérables – parfois insurmontables – pour des personnes déjà éprouvées par la maladie. Il en résulte des pertes de chances et des renoncements aux soins, appelés à s’accroître à mesure que la population corse vieillira et perdra en mobilité.

Face à ce constat préoccupant, le fatalisme n’est pas de mise. La Corse a pour elle de nombreux atouts. Au-delà de ses agréments naturels, elle dispose d’acteurs, dans le public et le privé, à l’hôpital et en ville, habitués à coopérer et qui se sentent investis d’une même responsabilité envers la population. Elle a su développer, au sein de ses hôpitaux, des spécialités qui relèvent habituellement des centres hospitaliers universitaires (CHU), avec un même niveau de qualité et de sécurité pour les patients. L’Université de Corse a su prendre en charge, avec succès, la formation des étudiants de première année de médecine, et développer de nouveaux champs de recherche. Ce dynamisme incontestable a été porté, depuis plusieurs années, par une volonté politique qu’il faut saluer, au niveau national comme au niveau local.

Cependant, il manque à la Corse un élément dont disposent toutes les autres régions de France ; un élément qui permettrait de bâtir, sur ce terreau favorable, un système de soins résilient et adapté aux spécificités de l’île. La Corse n’a pas de centre hospitalier universitaire. Elle est rattachée à ceux de Marseille et de Nice, éloignés de 250 kilomètres.

Il est temps de remédier à cette situation profondément inéquitable, qui nuit gravement à l’attractivité médicale et universitaire de l’île. Le travail accompli et les engagements souscrits par l’ancienne majorité gouvernementale sont appréciables. Mais une approche de court terme, soumise aux aléas de la vie politique, renforcés ces derniers mois, ne saurait suffire à créer le choc d’attractivité et de confiance dont la Corse a besoin. Il faut désormais, comme cela a été fait dans toutes les régions de France, fixer un cap : celui d’un centre hospitalier universitaire en Corse d’ici 2030.


I.   La population corse se trouve dans une situation inÉquitable au regard de l’accÈs aux soins

Certaines spécificités de la Corse viennent aggraver les difficultés rencontrées partout en France par le système de soins, au point que la population locale subit aujourd’hui une situation profondément inéquitable sur le plan de l’accès aux soins.

A.   Les spÉcificitÉs de la corse font peser une tension inÉdite sur le systÈme de soins

1.   L’insularité et le relief, sources de complexité, de délais et de surcoûts

L’insularité est, à l’évidence, la première spécificité corse qui vient compliquer la problématique de l’accès aux soins. L’île est située à 250 kilomètres du Continent. Si cela ne représente qu’une heure d’avion lorsque les conditions sont réunies, tel n’est pas toujours les cas et les aléas, notamment météorologiques, perturbent régulièrement les transports. Cette insularité suppose que la Corse dispose sur son territoire de l’ensemble des ressources médicales nécessaires, matérielles et humaines, pour faire face aux situations urgentes.

En outre, il faut ajouter à l’insularité le relief : la Corse a le statut d’« île‑montagne » ([2]). L’altitude moyenne de 568 mètres vient considérablement compliquer les déplacements au sein du territoire. Ainsi, si 150 kilomètres seulement séparent Ajaccio de Bastia, il faut compter près de trois heures par la route pour effectuer ce trajet.

Cette double caractéristique géographique a des répercussions importantes en termes financiers. Les surcoûts ont été globalement estimés entre 8 et 9 % pour les établissements de santé corses par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) ([3]). Son rapport relève que ces surcoûts recouvrent principalement « les charges de personnel, les charges à caractère médical, les charges à caractère hôtelier et général (énergie, alimentation), ainsi que les charges immobilières ». Ils résultent par exemple de coûts d’approvisionnement et de stockage, ou encore de la nécessité de rémunérer davantage le personnel médical, dans une situation de faible attractivité.

Cependant, cette estimation des surcoûts ne tient pas compte des effets de seuil liés à la tarification à l’activité (T2A). Du fait de son insularité, la Corse doit entretenir des plateaux techniques complets pour une activité relativement faible, ce qui retarde beaucoup leur amortissement. Comme l’a souligné lors de son audition en juin dernier, M. Jean Canarelli, directeur de clinique à Ajaccio, « les quatre cinquièmes de nos activités ont un effet de seuil, et nous sommes toujours en dessous ». M. Canarelli a fourni l’exemple des prothèses de hanche : alors que les établissements du Continent en posent en moyenne 131 par an, ce chiffre tombe à 27 pour les hôpitaux corses, pour des investissements identiques.

Au total, si l’on tient compte de cet effet de seuil, les surcoûts assumés par les établissements de santé corses seraient plutôt de l’ordre de 25 %.

Effets de seuil dans les hôpitaux généraux corses

L’avis de la chambre régionale des comptes sur la situation du centre hospitalier d’Ajaccio

« L’insularité impose des surcoûts à l’établissement, qui justifient l’application d’un coefficient géographique majorant les produits. Par ailleurs, certaines activités, entrant dans le champ de la permanence des soins, ne peuvent trouver un équilibre financier en raison d’un seuil d’activité trop bas. [...]

« Le centre hospitalier d’Ajaccio joue le rôle de recours sur son territoire, dépourvu de centre hospitalier universitaire (CHU) de référence, en développant des activités qu’à capacité égale sur le Continent, il n’assumerait pas, et ce afin d’assurer la permanence des soins. Certaines de ces activités peuvent engendrer pour l’établissement des coûts importants au regard du faible nombre d’actes réalisés et des surcoûts liés à l’insularité.

« Par exemple, la maternité est classée en niveau 2B, ce qui signifie qu’elle dispose de trois lits de néonatalogie et de trois lits de soins intensifs pour la prise en charge de nouveau-nés présentant des pathologies plus lourdes. Avec seulement 179 séjours en néonatalogie et 52 séjours en soins intensifs en 2019, ces activités se concrétisent par des recettes de tarification à l’activité (T2A) respectivement de 0,56 M€ et 0,17 M€. Ces recettes interviennent en complément des dotations allouées alors que les besoins en personnel sont importants et que des contraintes matérielles sont imposées par la règlementation. [...] »

Source : chambre régionale des comptes de Corse, « Centre hospitalier d’Ajaccio, département de la Corse-du-Sud, exercices 2017 et suivants », février 2023.

Les déficits liés à l’effet de seuil au sein du centre hospitalier de Bastia

« Pour l’exercice 2022, il peut être cité au titre des activités dites à effet de seuil, c’est-à-dire qui ne peuvent au regard des contraintes de continuité et de permanence des soins et du bassin de population desservi, atteindre un volume suffisant pour assurer un équilibre budgétaire :

«  La neurochirurgie, qui présente un déficit de 437 000 euros ;

«  La maternité de niveau 2B : déficit de 3 millions d’euros ;

«  La pédiatrie et la néonatologie : déficit de 3 millions d’euros ;

«  La cardiologie dont interventionnelle (indispensable à la prise en charge en urgence des activités de coronarographie) : déficit de 1,5 million d’euros. »

Source : données transmises par le centre hospitalier de Bastia.

2.   Un profil démographique atypique

Si la Corse compte environ 350 000 habitants actuellement, ce qui en fait la région de France métropolitaine la moins peuplée, sa population présente certaines caractéristiques distinctives.

En premier lieu, elle est particulièrement vieillissante. Selon les statistiques de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) publiées en février 2024, la Corse est la région la plus touchée par le vieillissement avec 117 personnes de 65 ans ou plus pour 100 jeunes de moins de vingt ans. Si cette tendance se poursuit, l’île comptera 40 % de seniors à l’horizon 2040.

Dans le même temps, la Corse est la région dont la croissance démographique est la plus dynamique de France métropolitaine, avec une augmentation moyenne de 1 % par an entre 2015 et 2021 ([4]). Cette progression est exclusivement due au solde migratoire, le solde naturel étant nul.

Enfin, la population de Corse se caractérise par une très forte variabilité saisonnière, du fait notamment de l’afflux de touristes au cours du printemps et de l’été. Entre avril et septembre 2023, trois millions de nuitées ont été dénombrées dans les hébergements de l’île ([5]). Au-delà des touristes, la Corse compte une population importante de « semi-résidents » : des habitants qui disposent d’une résidence secondaire sur l’île, où ils passent plusieurs mois de l’année, tout en étant affiliés à une caisse de sécurité sociale sur le Continent.

Ces caractéristiques démographiques ont un impact important sur le système de soins, particulièrement mis en tension l’été, et dont les capacités doivent être suffisamment élastiques pour prendre en charge des besoins nettement supérieurs à ceux des seuls assurés sociaux de Corse. Au total, la population de l’île lissée sur l’année se situerait plutôt aux alentours de 600 000 habitants. Par ailleurs, le vieillissement démographique très prononcé constitue un défi singulier alors que la plupart des seniors corses restent à domicile, et du fait des difficultés de transport susmentionnées.

3.   Une précarité très importante

La Corse se singularise également par une précarité supérieure à la moyenne nationale. En 2020, 18 % des ménages y vivent sous le seuil de pauvreté, soit le taux le plus élevé des régions métropolitaines ([6]). Autre spécificité, les personnes de plus de 75 ans sont particulièrement représentées dans cette catégorie. En 2020, près de 9 % des personnes âgées de plus de 62 ans percevaient le minimum vieillesse sur l’île contre 3,3 % sur l’ensemble du territoire français ([7]).

4.   Le système de santé de la Corse n’est pas structuré pour répondre à ces défis

Le système de santé de la Corse est globalement mal structuré face à l’ensemble de ces défis. L’île compte deux principaux hôpitaux publics, Bastia et Ajaccio, rayonnant respectivement sur la Haute-Corse et la Corse du Sud. Par ailleurs, le secteur privé à but lucratif représente une part importante des hospitalisations – de l’ordre de 50 % – et certaines activités sont quasi-exclusivement mises en œuvre par le privé.

Si l’île est plutôt correctement dotée en médecins généralistes, elle accuse un déficit important en spécialistes. Le professeur Laurent Papazian, médecin intensiviste-réanimateur au centre hospitalier de Bastia, a ainsi souligné lors de son audition en juin dernier que « des spécialités élémentaires [étaient] dépourvues, ou presque, de praticiens ». Ce défaut de spécialistes est appelé à s’accentuer au cours des prochaines années : 100 % des rhumatologues ont plus de 55 ans, de même que 80 % des gynécologues et 65 % des endocrinologues et des gériatres ([8]).

Ce manque de spécialistes est à mettre en relation avec la faible attractivité du territoire pour les internes en médecine. Si la Corse dispose de 90 agréments hospitaliers pour la formation d’internes, elle n’en accueille généralement qu’une dizaine hors médecine générale.

La Corse est donc particulièrement confrontée à la problématique de la désertification médicale. Les zonages publiés par l’agence régionale de santé (ARS) Corse ([9]), définissant des zones d’intervention prioritaire (ZIP) – caractérisées par une faible accessibilité aux soins – ainsi que des zones d’action complémentaire (ZAC), en situation fragile, illustrent les lacunes constatées sur le territoire. Seuls les bassins ajacciens et bastiais apparaissent épargnés.

zones caractérisées par une offre de soins insuffisante
ou par des difficultés d’accès aux soins en corse (Avril 2023)

Source : ARS Corse.

L’île accuse également un déficit en infrastructures médicales de qualité. Si l’hôpital d’Ajaccio a été récemment reconstruit, celui de Bastia, âgé de plus de quarante ans, connaît une vétusté avancée. Certains équipements indispensables au diagnostic, notamment de cancers, continuent à faire défaut. La Corse est, par exemple, dépourvue de TEP‑scan ([10]).

B.   Il en rÉsulte une situation grave et injuste pour la population corse

1.   La multiplication des transferts médicaux, symptôme des lacunes du système de soins

Le manque de spécialistes et d’équipements adaptés pour répondre aux besoins de santé de la population se traduit par la multiplication des transferts médicaux, souvent à destination de Marseille. En 2019, le taux de recours aux soins hors Corse atteignait 20 % en moyenne ; il était particulièrement élevé pour la rhumatologie (45 %), les soins endocriniens (43,5 %), la neurologie, l’hématologie et les douleurs chroniques ([11]).

On compte environ 26 000 transferts médicaux par an, représentant, pour la sécurité sociale, un budget de 30 millions d’euros. Votre rapporteur tient à rapprocher ce chiffre de la population insulaire : 26 000 transferts, cela concerne un résident corse sur huit, soit 26 000 familles touchées. Autrement dit, pratiquement toutes les familles corses sont confrontées à la réalité des transferts médicaux.

Ces transferts engendrent des difficultés considérables. Si la sécurité sociale prend en charge le transport du résident et, dans certaines conditions, d’un ou deux accompagnants, elle ne finance ni l’hébergement ni la restauration. Elle ne résout pas, non plus, lorsqu’un parent doit accompagner son enfant sur le Continent, la question de la garde des frères et des sœurs. Toutes ces questions, qui ont des implications financières difficilement supportables pour des personnes en situation de précarité, viennent ajouter un stress considérable à celui causé par la maladie.

Comme l’a souligné lors de son audition en juin dernier, Mme Catherine Riera, présidente de l’association La Marie Do, qui vient en aide aux malades du cancer et à leurs familles, « on s’attend à une meilleure prise en charge dans une France moderne, qui prône l’égalité d’accès aux soins ».

2.   Des pertes de chances et des renoncements aux soins manifestes, bien que difficiles à quantifier

Dans un rapport consacré aux déplacements médicaux vers le Continent paru en 2018 ([12]), le Conseil économique, social, environnemental et culturel de Corse (Cesec) dénonçait « une rupture d’équité territoriale inacceptable qui entraîne des phénomènes de précarité et de renoncement aux soins ».

Dans la foulée de cette publication, votre rapporteur avait déposé une proposition de loi visant à améliorer la prise en charge de ces déplacements médicaux ([13]). Cette mobilisation a permis de confier à la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam), via un abondement des fonds d’action sanitaire et sociale des deux caisses primaires d’assurance maladie corses, le transport d’un second accompagnant lorsque des enfants doivent bénéficier de soins de longue durée sur le Continent.

Ce petit pas est appréciable. Il sera indispensable de le pérenniser en ouvrant une ligne budgétaire dédiée, qui n’ait pas à être renégociée chaque année. Cependant, cette avancée est encore loin de couvrir les restes à charge associés à ces transports médicaux.

Du fait de cette problématique financière, et aussi en raison du caractère éprouvant d’un déplacement pour des personnes fragiles, des pertes de chances et des renoncements aux soins sont à déplorer. Ce point a été mis en lumière par la thèse présentée en novembre 2023 par le docteur Francesca Ferrandi ([14]). Ce travail de recherche montre que certains patients sont morts plus rapidement, faute d’avoir pu bénéficier d’un TAVI ([15]) en Corse, parce qu’ils étaient trop fragiles pour envisager un déplacement médical en direction de Marseille ou de Nice.

La directrice générale de l’ARS Corse, Mme Marie‑Hélène Lecenne, a souligné lors de son audition en juin dernier que ces renoncements aux soins et pertes de chances risquaient de s’accentuer avec le vieillissement de la population : « Sur certaines filières, les personnes âgées ne vont plus avoir la ressource pour aller se faire soigner sur le Continent ; elles vont de moins en moins pouvoir y avoir recours. »

Au-delà des transferts médicaux, les pertes de chances résultent aussi de l’absence d’essais cliniques en Corse. Lors de son audition, Mme Catherine Riera a souligné qu’il était souvent hors de portée, pour les malades atteints de cancers, de participer à des essais cliniques sur le Continent en raison des déplacements qu’ils impliquent.

Les pertes de chances sont enfin la conséquence des retards diagnostiques induits par des plateaux techniques incomplets. Face à une suspicion de cancer, un patient marseillais aura accès à l’ensemble des examens et débutera son traitement en une semaine quand il faudra, en Corse, plusieurs semaines, ne serait-ce que pour obtenir les résultats de l’examen d’anatomopathologie.

3.   Les associations appelées à se substituer aux carences de l’État et de l’assurance maladie

Votre rapporteur salue l’action de plusieurs associations bénévoles qui se mobilisent pour venir en aide aux patients et à leurs familles, pour réduire ces restes à charges et ces pertes de chances liés aux lacunes du système de santé. Il a, à ce titre, auditionné les associations La Marie‑Do et Inseme, qui soutiennent respectivement les malades du cancer et les personnes appelées à se rendre sur le Continent pour raison médicale.

Ces associations ont mis en place des dispositifs variés destinés à pallier les manques de la puissance publique : financement voire achat d’hébergements, de billets pour les accompagnants, d’un dispositif permettant d’envoyer les lames d’anatomopathologie sur le Continent, etc.

Cependant, comme l’ont souligné Mmes Catherine Riera et Laura Ponzevera Franceschini, qui dirigent ces associations, leur action ne saurait se substituer durablement à celle de la puissance publique. Or, si elles disparaissent, il n’y aura plus rien. Comme le formule Mme Riera, « la solidarité ne peut pas remplacer durablement la responsabilité politique. Les pouvoirs publics doivent travailler à structurer le système de santé, il y a trop de trous dans la raquette. »

II.   Le rÉinvestissement rÉcent n’est pas À la hauteur des dÉfis qui attendent l’Île

A.   La rÉcente mobilisation politique doit Être saluÉe

Votre rapporteur se félicite de la volonté politique marquée, depuis 2022, pour apporter des réponses aux défaillances du système de santé de la Corse. Plusieurs avancées en découlent.

1.   Un réinvestissement dans les établissements de santé corses

Le Gouvernement précédent a engagé depuis plusieurs années une dynamique d’investissement dans les établissements de santé situés en Corse, renforcée dans le cadre du Ségur de la santé, à hauteur de 158 millions d’euros. La construction du nouvel hôpital d’Ajaccio a bénéficié d’une aide financière de l’État de 150 millions d’euros. S’agissant de la reconstruction/rénovation de l’hôpital de Bastia, un projet est en cours d’accompagnement par le Conseil stratégique des industries de santé.

2.   Un engagement dans la formation en santé

Depuis 2004, l’Université de Corse dispense la première année de médecine dans le cadre d’un partenariat avec plusieurs universités du Continent. Elle forme actuellement des promotions d’une quarantaine d’étudiants qui poursuivront ensuite leurs études à Aix-Marseille, Paris, Nice ou Montpellier.

Vingt ans après sa création, cette première année en Corse est considérée comme un succès : les étudiants formés ont un niveau comparable à celui des autres universités, avec des taux d’abandon très faibles (de l’ordre de 3 %). En outre, comme le révèle une étude de l’Université de Corse, 80 % des médecins généralistes ayant suivi leur première année d’études dans l’île reviennent y exercer une fois diplômés.

Forte de cette expérience, l’Université de Corse a demandé à pouvoir proposer l’intégralité du premier cycle des études de médecine à compter de la rentrée 2025. Les étudiants corses seraient ensuite tous rassemblés à l’Université d’Aix-Marseille pour y suivre second cycle. Si ce projet doit encore bénéficier d’un agrément officiel, il a fait l’objet d’un engagement oral de la part de l’ancienne ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Sylvie Retailleau, à l’occasion de sa venue en Corse le 6 novembre 2023.

Votre rapporteur regrette qu’à la mi-novembre 2024, le dossier présenté devant le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) pour valider le principe d’ouverture de ces deux années universitaires n’ait toujours pas été accrédité, menaçant la possibilité d’ouvrir l’intégralité du premier cycle à la rentrée 2025.

Le développement des études médicales en Corse apparaît de nature à favoriser le retour des jeunes médecins sur le territoire. En effet, lors des stages effectués en premier cycle, ils auront l’occasion d’apprendre à connaître les hôpitaux locaux et de tisser des liens avec leurs personnels.

3.   Le développement de filières hospitalo-universitaires et d’hyperspécialités

Outre cet investissement sur la formation médicale, le Gouvernement met en avant sa volonté de faire de la Corse un territoire hospitalo-universitaire avec l’appui de professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PU‑PH) de l’Assistance publique–Hôpitaux de Marseille (AP‑HM), pour structurer quelques filières hospitalo-universitaires en Corse.

Plusieurs filières d’hyperspécialité ont d’ores et déjà été déployées ou le seront prochainement : le centre de procréation médicalement assistée de Bastia, le centre de ressources et de compétences sclérose en plaques d’Ajaccio, l’activité de neuroradiologie interventionnelle à Bastia et Ajaccio. Elles fonctionnent avec le renfort de médecins très spécialisés déployés en Corse dans le cadre de temps partagés.

B.   Des rÉponses encore trop fragiles et ponctuelles

Votre rapporteur estime que les évolutions susmentionnées vont dans la bonne direction. Néanmoins, à défaut de fixer, de manière claire et engagée, l’objectif de création d’un centre hospitalier universitaire (CHU), elles demeurent fragiles et soumises à de nombreux aléas.

1.   Des filières hospitalo-universitaires fragiles

Votre rapporteur note la fragilité des filières hospitalo-universitaires, qui reposent sur une ressource externe peu nombreuse. Elles sont souvent dépendantes d’un ou deux praticiens et menacent de s’effondrer à leur départ.

Lors de son audition, le professeur Papazian a partagé ce point de vue, estimant que les filières hospitalo-universitaires étaient « des cas d’exception, du bricolage ». Il a souligné que les médecins déployés dans ce cadre n’étaient là « que dans le cadre d’un passage, pour quelques années ». Il a mis en avant l’absence de statut clair de ces PU‑PH, qui doivent normalement être rattachés à un centre hospitalier universitaire dans le cadre de leurs activités. Lui-même est actuellement mis à disposition du centre hospitalier de Bastia par l’AP‑HM et l’Université d’Aix‑Marseille ; cette position est nécessairement limitée dans le temps. Au-delà, rester en Corse impliquerait une démission.

Votre rapporteur partage l’avis exprimé par Mme Bianca Fazi, conseillère exécutive de Corse en charge de la santé et du social, lors de son audition en juin dernier : « Les filières sont importantes mais elles ne doivent pas devenir la règle ; il faut qu’on arrive à modéliser un nouveau système de santé. On a trop souvent fonctionné avec des rustines ; or, il y a toujours une fuite quelque part. Il faut arrêter l’hémorragie médicale et paramédicale, on a besoin de modèles stabilisés. »

2.   Des progrès tributaires des fluctuations de la mobilisation politique

Pour appréciables qu’ils soient, les progrès récents reposent sur la bonne volonté de ministres, et ne sauraient être considérés définitivement acquis. De même, en l’absence d’objectif affirmé de manière solennelle, la trajectoire peut sans cesse être remise en question, au gré des fluctuations de la vie politique. Or, la création d’un centre hospitalier universitaire est une œuvre de longue haleine, qui suppose un engagement sur la durée. C’est pourquoi votre rapporteur estime ne pouvoir se satisfaire de paroles et de promesses.

III.   il faut aujourd’hui aller rÉsolument vers la crÉation d’un centre hospitalier universitaire en corse

Votre rapporteur partage l’approche de court terme prônée par l’ancien Gouvernement et l’ARS Corse à travers le projet régional de santé (PRS), qui vise à faire de la Corse un territoire hospitalo-universitaire et à développer des hyperspécialités. Mais il estime qu’il convient par ailleurs de fixer un cap clair – la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse – et d’en décliner les étapes de manière ambitieuse et réaliste.

A.   Un consensus autour des bÉnÉfices À attendre de la crÉation d’un centre hospitalier universitaire

De l’avis général, la création d’un centre hospitalier universitaire permettrait de donner à la Corse un signal positif, à même d’enclencher un cercle vertueux. Il existe à ce sujet un quasi-consensus en Corse et au-delà, parmi les responsables politiques, médicaux et universitaires.

1.   Un facteur d’attractivité médicale

La création d’un centre hospitalier universitaire serait le meilleur moyen pour remédier au problème d’attractivité médicale de la Corse vis-à-vis des spécialistes. Actuellement, seuls 30 % des spécialistes ayant suivi leur première année d’études de médecine sur l’île reviennent s’y installer.

Tous les interlocuteurs auditionnés l’ont souligné : les plateaux techniques, les perspectives de carrière ne sont pas les mêmes dans un centre hospitalier universitaire. Or, ce sont là des éléments déterminants pour les jeunes professionnels qui s’installent. Un centre hospitalier universitaire permet en outre d’attirer des internes, du fait de la présence de PU‑PH. Ces internes seront ensuite plus spontanément enclins à s’installer sur le territoire. De même, la formation paramédicale serait également facilitée.

Ainsi, comme l’a souligné lors de son audition, le professeur Gilles Capellier, actuellement en exercice au centre hospitalier d’Ajaccio, « la transformation du modèle hospitalier avec une valence universitaire peut bénéficier à l’ensemble de la Corse, avec cet effet d’attractivité ».

2.   Un facteur d’amélioration de l’accès aux soins et de la confiance

À l’heure actuelle, les Corses ont une piètre opinion de leur système de santé. Un sondage faisait apparaître en janvier 2018 que 68 % d’entre eux jugeaient l’offre de soins de mauvaise qualité ([16]). Il n’est pas rare, en effet, d’entendre dire sur l’île que « le meilleur médecin c’est l’avion ». Cette perte de confiance nourrit les déplacements médicaux, y compris pour des soins qui pourraient être dispensés en Corse.

Comme l’a souligné Mme Catherine Riera, « ce serait un acte fort de poser le principe d’un CHU, cela recréerait la confiance ».

B.   Un terreau favorable en corse

Un centre hospitalier universitaire de Corse ne partirait pas de rien. Il existe un terreau favorable dans lequel ce projet pourrait rapidement prendre racine. Outre l’organisation du premier cycle de médecine à l’Université de Corte dès la rentrée 2025, plusieurs atouts peuvent être soulignés.

1.   Les centres hospitaliers généraux de Corse ont déjà des activités de centre hospitalier universitaire

Si les hôpitaux de Bastia et d’Ajaccio ne sont « que » des centres hospitaliers généraux, ils ont déjà été amenés, par la force des choses, du fait de la situation d’insularité et de l’éloignement des centres hospitaliers universitaires de référence, à développer certaines activités qui relèvent normalement de la catégorie supérieure.

Par exemple, la réanimation de l’hôpital d’Ajaccio a mis en place la circulation extracorporelle, et a formé Bastia à le faire. Cette pratique est aujourd’hui déployée dans les établissements avec un même niveau de qualité et de sécurité des soins que dans les grands centres hospitaliers universitaires.

Comme l’a souligné M. Christophe Arnould, directeur du centre hospitalier de Bastia, lors de son audition en juin dernier, le groupe homogène de malades (GHM) « recours CHU » de l’hôpital de Bastia – classification qui permet de distinguer les patients hospitalisés dans le cadre d’une activité de recours – est en réalité similaire à celui des petits centres hospitaliers universitaires, comme Reims ou Nice.

Mme Marie-Hélène Lecenne, directrice générale de l’ARS Corse, a estimé qu’à l’échelle des 350 000 habitants de l’île, il ne serait pas possible de développer, même dans le cadre d’un centre hospitalier universitaire, des plateaux techniques équivalents à ceux du Continent. Votre rapporteur tient néanmoins à souligner qu’il faudrait considérer, pour le recrutement du centre hospitalier universitaire de Corse, non pas les 350 000 habitants permanents, mais plutôt les 600 000 habitants lissés sur l’année. On se situerait alors sur un bassin de population proche de celui des petits centres hospitaliers universitaires.

2.   Une dynamique de coopération importante sur le territoire

Autre atout de la Corse dans la perspective de la création d’un centre hospitalier universitaire, il existe déjà une dynamique de coopération importante entre acteurs de la santé sur le territoire. Si l’hospitalisation privée à but lucratif a un poids important, elle a aussi certaines spécificités. En premier lieu, les établissements privés sont essentiellement détenus par des groupes locaux. En outre, comme l’a souligné Mme Lecenne lors de son audition, ces structures « ont une vision équivalente au public de leur responsabilité territoriale et populationnelle ». Établissements publics et privés ont ainsi l’habitude de coopérer et de se relayer.

De surcroît, s’agissant de l’hospitalisation publique, les deux groupements hospitaliers de territoire (GHT) centrés autour de Bastia et d’Ajaccio sont largement intégrés. De manière générale, l’insularité a induit une interdépendance propice à la coopération.

3.   Un potentiel de recherche

Il existe un potentiel de recherche important autour de l’Université de Corse. Celle-ci a su prouver sa valeur avec la mise en place réussie de la première année de médecine.

Sur la dimension recherche, l’Université a ouvert un laboratoire de virologie qui a récemment été intégré à l’unité mixte de recherche « virus émergents » de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Elle a aussi accentué son positionnement dans les domaines de la santé et de l’environnement, de la gérontologie et de la médecine numérique. La dimension insulaire et le profil de la population offrent un positionnement intéressant à la recherche dans ces domaines.

Par ailleurs, comme l’a souligné M. Christophe Arnould lors de son audition, la ressource humaine nécessaire à cette recherche est disponible. Mais il importe de la retenir : « Nous avons des profils de médecins qui ont un intérêt pour la recherche, mais nous pouvons les perdre faute de pouvoir aller plus loin dans ce champ. » L’infrastructure du centre hospitalier universitaire apparaît ici indispensable.

C.   Vers Un modÈle de centre hospitalier universitaire innovant, progressivement dÉployÉ d’ici 2030

Au bénéfice de l’ensemble de ces observations, votre rapporteur plaide donc, à travers la présente proposition de loi, pour la mise en place d’un centre hospitalier universitaire de Corse d’ici l’année 2030.

1.   La création d’un centre hospitalier universitaire de Corse

Avec cette proposition de loi, votre rapporteur vise à réparer une situation injuste pour les Corses, qui sont les seuls à ne pas disposer d’un CHU, et qui pâtissent en conséquence d’un accès aux soins dégradé.

L’article 1er pose le principe d’au moins un CHU par région française. Son application conduira à reconnaître la nécessité d’un CHU en Corse, seule région à ne pas en avoir.

2.   Vers un modèle innovant de centre hospitalier universitaire

La présente proposition de loi n’a pas pour objet d’entrer dans les modalités de mise en œuvre du CHU de Corse, ni d’en préciser la déclinaison territoriale. Votre rapporteur s’en remet, pour cela, aux travaux conduits par la Collectivité de Corse, en lien avec l’ensemble des acteurs du territoire.

Quelques axes forts font consensus dans ces travaux, que votre rapporteur se bornera à rappeler : le CHU de Corse devra être innovant, car il ne pourra pas tout faire comme les autres, et s’adapter aux spécificités locales.

Il n’aura pas vocation à couvrir l’ensemble des filières, y compris celles pour lesquelles la population corse ne permettrait pas d’atteindre les seuils d’activités établis. Par exemple, on peut anticiper l’absence d’un département d’onco-pédiatrie au regard du faible effectif concerné. Il restera ainsi, à terme, un volet incompressible de transferts médicaux vers les centres hospitaliers universitaires partenaires.

Enfin, le CHU de Corse sera multisites – il aura vocation à regrouper les établissements de santé corses – et reposera sur une coopération étroite entre public et privé.

3.   Une mise en place nécessairement progressive

La mise en place du CHU de Corse ne pourra se faire du jour au lendemain. Elle nécessitera l’agrégation de briques successives, dont l’agencement et l’enchaînement ont vocation à être précisés par un décret d’application qui en fixera les principales étapes.

En ce sens, l’article 2 de la présente proposition de loi fixe un terme à 2030 pour la création du CHU de Corse, tout en renvoyant au règlement le soin de déterminer le calendrier et les modalités précises afin de tenir compte des étapes indispensables à franchir pour la constitution d’un centre hospitalier régional, puis d’un centre hospitalier universitaire.

Votre rapporteur souligne un préalable essentiel à la création du CHU : l’assainissement financier des différents établissements de santé sur lesquels il aura vocation à s’appuyer. À l’heure actuelle, l’ensemble des établissements corses sont fortement déficitaires pour leurs activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), en raison d’un mode de financement qui ne permet pas de prendre en compte les coûts de structure supérieurs en Corse, du fait d’une moindre activité (« effets de seuil »). Il importera de travailler à un mode de financement pérenne pour ces hôpitaux, afin qu’ils ne soient plus tributaires des aides en trésorerie octroyées au fil de l’eau par les tutelles.


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   Commentaire des articles

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article pose le principe selon lequel chaque région doit être dotée d’un centre hospitalier universitaire (CHU) afin de laisser de la souplesse quant à la déclinaison territoriale de cette obligation.

  1.   Le droit existant

Institués par une ordonnance du 30 décembre 1958 ([17]), les centres hospitaliers universitaires (CHU) sont des centres hospitaliers régionaux (CHR), c’est-à-dire des établissements publics de santé ayant passé une convention avec une université ou plusieurs universités. Ils remplissent une triple mission de soins, d’enseignement et de recherche. Ces structures sont régies par des dispositions spécifiques du code de la santé publique et du code de l’éducation.

La France compte actuellement 31 centres hospitaliers universitaires, dont 3 outre-mer. Après la transformation, en 2023, du CHR d’Orléans en CHU, elle ne compte plus qu’un seul centre hospitalier régional à Metz-Thionville dont la transformation en centre hospitalier universitaire est actuellement à l’étude. Les CHU sont, la plupart du temps, implantés dans les anciennes capitales régionales.

Si l’on excepte le centre hospitalier universitaire d’Orléans, les établissements d’outre-mer ont vu le jour plus récemment, souvent par fusion préalable de plusieurs hôpitaux. Ainsi le centre hospitalier universitaire de Guadeloupe a été créé en 2005, celui de La Réunion en 2012, celui de Martinique en 2013, tandis que le centre hospitalier universitaire de Guyane devrait être opérationnel en 2025.

La loi ne précise aucune règle quant à la localisation et à l’organisation territoriale. Elle se borne à énoncer un ressort régional, un centre hospitalier universitaire étant obligatoirement centre hospitalier régional ([18]).

  1.   Le droit proposé

● L’article 1er de la présente proposition de loi dispose que « chaque région comprend au moins un centre hospitalier universitaire ». En posant ce principe général, il permet, par déduction, d’établir la nécessité de doter la Corse – seule région de France à ne pas en disposer – d’un CHU.

Contrairement à ce que prévoyait le dispositif initial de la première proposition de loi, il n’est plus formulé d’obligation d’implanter un centre hospitalier universitaire spécifiquement dans le chef-lieu de région. D’une part, tous les CHU ne sont pas implantés dans des chefs-lieux de région et, d’autre part, il n’était nullement envisagé de circonscrire l’établissement de Corse à Ajaccio, qui en est le chef-lieu. De l’avis général, le centre hospitalier universitaire corse devrait être multisite et rassembler l’ensemble des établissements de l’île.

● La commission a adopté un amendement de coordination juridique du rapporteur.

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Adopté par la commission

Le présent article fixe à 2030 l’échéance à laquelle chaque région devra être dotée d’un centre hospitalier universitaire. Il renvoie à un décret le soin de définir les étapes et les modalités de création de ce centre en Corse.

  1.   Le droit proposé

L’article 2 fixe l’entrée en vigueur de l’article 1er au 1er janvier 2030. À cette date, toutes les régions devront être dotées d’un centre hospitalier universitaire.

Il renvoie à un décret le soin de préciser le calendrier, les étapes et les modalités de mise en œuvre de ce centre, tout en tenant compte des spécificités locales. Cela passera nécessairement, comme le formule l’article 2, par la mise en place préalable d’un centre hospitalier régional, qui signera ensuite une convention avec l’Université de Corse pour devenir un centre hospitalier universitaire.

En moyenne, à partir de la mise en place des premières « briques », la création d’un centre hospitalier universitaire requiert une dizaine d’années. C’est pourquoi, l’entrée en vigueur est prévue à compter du 1er janvier 2030 pour plus de réalisme, même si certaines étapes préliminaires peuvent être considérées déjà franchies en Corse.

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Adopté par la commission avec modifications

Le présent article gage les charges créées par la présente proposition de loi, pour l’État et pour la sécurité sociale, par des augmentations d’impôts à due concurrence.

L’article 3 prévoit le gage destiné à assurer la recevabilité financière de la présente proposition de loi. En posant l’objectif d’un centre hospitalier universitaire par région et en prévoyant la mise en place, à l’horizon 2030, d’un centre hospitalier universitaire en Corse, elle sera coûteuse pour l’État et pour la sécurité sociale, du fait des investissements nécessaires, mais aussi de l’activité supplémentaire qui résultera de l’ouverture de ce centre. Pour cette raison, il est proposé de gager les charges induites par cette proposition de loi par une augmentation, à due concurrence, des taxes sur les tabacs.

 


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   travaux de la commission

Lors de sa réunion du mardi 26 novembre 2024, la commission examine la proposition de loi visant à la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse (n° 341) (M. Paul-André Colombani, rapporteur) ([19]).

M. Paul-André Colombani, rapporteur. Permettez-moi tout d’abord de vous remercier sincèrement, mes chers collègues, vous qui avez été si nombreux à me permettre d’inscrire ce texte à l’ordre du jour de la semaine de l’Assemblée.

En juin dernier, notre commission avait adopté à l’unanimité la première version de cette proposition de loi. Les aléas de la vie politique en ont malheureusement interrompu le parcours législatif ; je vous en présente une nouvelle version tenant compte des modifications que nous avions adoptées. Les Corses ont de grandes attentes en matière d’accès aux soins et suivent nos débats avec attention.

Le texte que je vous présente est tout à fait jacobin. Vous avez l’habitude d’entendre les élus corses demander de déroger au droit commun du fait des spécificités de leur territoire ; il nous est souvent répondu que cela contreviendrait au principe d’égalité. Avec ce texte, la demande est précisément inverse, puisqu’il vise une même obligation légale pour toutes les régions : l’existence d’au moins un centre hospitalier universitaire (CHU) sur leur territoire. La Corse, qui n’en dispose toujours pas, est la seule région à ne pas satisfaire à cette obligation. Trente et un CHU sont répartis sur l’ensemble du territoire national, auxquels s’ajouteront bientôt le CHU de Guyane et celui de Metz-Thionville. La Corse est la grande oubliée de cette répartition territoriale ; cette proposition de loi vise à réparer cette injustice, qui constitue une véritable rupture du principe d’égalité.

Cette situation d’exception sanitaire a de lourdes conséquences. De l’aveu de l’ensemble des acteurs auditionnés, l’absence de CHU est un frein indéniable à l’attractivité médicale de l’île. Dans un contexte de dégradation de la démographie médicale, le déficit en infrastructures médicales de qualité se traduit par un manque de spécialistes, qui s’accentuera nettement au cours des prochaines années. Il se traduit également par une difficulté à attirer des internes pour renouveler les générations : sur les quatre-vingt-dix agréments hospitaliers pour la formation d’internes dont la Corse dispose, elle n’en accueille qu’une dizaine, en raison de l’insuffisance de plateaux techniques, de perspectives de carrière moins avantageuses et de difficultés à faire venir des internes déjà installés ailleurs. La Corse est dépendante de son adossement à des CHU continentaux, notamment celui d’AixMarseille.

La crise sanitaire du covid-19 a tristement révélé les limites d’un tel fonctionnement et a souligné la nécessité de renforcer le système de santé de l’île, qui est caractérisé par des spécificités très défavorables, tant géographiques que sociales et démographiques : l’isolement de l’île, dont le relief complique fortement les déplacements intérieurs, s’accompagne d’une précarité très prégnante – et le mot est faible –, d’un vieillissement et d’une forte croissance de la population, ainsi que d’un phénomène de saisonnalité portant la population de l’île, lissée sur l’année, à 600 000 habitants d’après l’Institut national de la statistique et des études économique (Insee). L’été, celle-ci est décuplée, passant de 350 000 habitants à 3 millions, ce qui représente un extraordinaire défi en matière de prise en charge sanitaire.

L’incapacité du système de santé corse à répondre aux besoins de la population se traduit par deux phénomènes néfastes. Le premier est la multiplication des déplacements médicaux vers le continent pour y être soigné. Les chiffres sont vertigineux : entre 25 000 et 30 000 transferts médicaux ont lieu chaque année entre la Corse et le continent, soit un budget de 30 millions d’euros pour la sécurité sociale. Cela représente un résident sur huit ; presque toutes les familles sont touchées. Je vous laisse imaginer les conséquences humaines et financières dramatiques de ce système : des frais colossaux d’hébergement et de restauration, l’arrêt de l’activité professionnelle, le stress et la souffrance engendrés par ces déplacements.

Le second phénomène, qui en découle directement, est le grand nombre des renoncements aux soins, entraînant des pertes de chance pour les patients trop fragiles pour être déplacés. Et cela risque de s’accentuer avec le vieillissement de la population. Quelles solutions apporter ? Les carences de l’action étatique sont compensées depuis plus de quinze ans par des associations de bénévoles, Inseme et La Marie Do, qui font un travail remarquable pour venir en aide aux patients et à leurs familles. Cependant, comme l’a dit la présidente de La Marie Do, Mme Catherine Riera, la solidarité ne peut pas remplacer durablement la responsabilité politique et les pouvoirs publics doivent travailler à structurer le système de santé.

Reconnaissons tout de même que certaines lignes sont en train de bouger du côté des pouvoirs publics. Deux événements nous ramènent malheureusement à la nature précaire de ces avancées.

Tout d’abord, le Gouvernement avait annoncé que l’université de Corse pourrait proposer l’intégralité du premier cycle d’études de médecine en 2025, et que les étudiants corses seraient regroupés à l’université d’Aix-Marseille pour le second cycle. Cependant, les acteurs engagés sur ce dossier sont inquiets : le dossier présenté devant le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche pour confirmer le principe d’ouverture de ces deux années universitaires n’a toujours pas été validé, ce qui fait planer une menace sur l’ouverture de l’intégralité du premier cycle dès la rentrée 2025. Je profite de la parole qui m’est donnée pour interpeler le Gouvernement à ce sujet.

Ensuite, la décision du Gouvernement de surtaxer les billets d’avion est vécue comme une profonde injustice, qui accentue les problèmes que je viens de vous présenter. On ne peut pas dire aux Corses que non seulement ils ne bénéficient pas de moyens sanitaires identiques à ceux du continent, mais qu’en plus, ils seront pénalisés financièrement pour se déplacer.

Partir sur le continent pour se soigner ou soigner un proche n’est pas un choix, mais une contrainte. Accompagner sa femme, son père ou son enfant qui y suit une chimiothérapie entraîne des dépenses astronomiques en matière de transport, d’hébergement et de frais divers sur place. Après avoir appris qu’elles‑mêmes ou leur proche était malade, ces personnes doivent faire face à de grandes difficultés logistiques et administratives ; parfois, ils perdent leur emploi ou doivent fermer leur entreprise. Cette taxe supplémentaire sur leurs déplacements est vécue comme une violence inacceptable ; il est grand temps que cesse la triple peine.

Je salue néanmoins la volonté du Gouvernement de faire de la Corse un territoire hospitalo-universitaire, afin de déployer quelques filières d’hyperspécialités qui fonctionnent avec le renfort de médecins issus du continent, dans le cadre de temps partagés. Cela étant, ces filières hospitalo-universitaires sont fragiles, dépendant souvent d’un ou deux praticiens rattachés à d’autres CHU ; ces derniers sont par nature de passage et, s’ils s’en vont, tout menace de s’effondrer.

Les progrès récents reposent largement sur la bonne volonté politique, qui ne peut être considérée comme définitivement acquise compte tenu de l’instabilité actuelle. La création d’un CHU est un travail de longue haleine qui requiert de graver dans le marbre une trajectoire à laquelle nous devrons nous tenir sur la durée. L’objectif de cette proposition de loi est précisément de définir ce cadre, sans toutefois préempter sa future déclinaison territoriale. Sachez qu’il existe un terreau favorable en Corse, dans lequel ce projet pourrait s’épanouir. La collectivité de Corse a déjà créé, en effet, un comité de pilotage associant l’ensemble des acteurs de la santé de Corse pour bâtir un projet de création de CHU adapté à nos spécificités.

En juin dernier, nous avions adopté plusieurs amendements, à la fois pour ne pas empiéter sur les modalités de déploiement du CHU et pour reporter à 2030 l’échéance initialement fixée à 2027, afin d’envisager une temporalité ambitieuse, mais réaliste.

La création d’un CHU en Corse est une revendication historique, qui fait l’objet d’un large consensus. En adoptant ce texte, nous poserions un acte fondateur, un choc de confiance pour des familles corses depuis trop longtemps confrontées à l’inégalité d’accès aux soins. Nous doterions la Corse d’un outil moderne, à la hauteur des niveaux de compétences et d’attractivité prévalant sur le plan international. Nous offririons des perspectives d’excellence, en matière de recherche comme de formation, aux futurs médecins de Corse. Nous garantirions, enfin, aux Corses l’accès à un bien fondamental : la santé. C’est une question de justice et d’égalité.

M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Christophe Bentz (RN). Cette initiative législative essentielle répond à des besoins concrets de nos concitoyens insulaires. La double nature d’île et de montagne de la Corse impose des contraintes spécifiques. Les hôpitaux de Bastia et d’Ajaccio peinent à répondre aux besoins de la population, qui connaît un vieillissement rapide et un isolement géographique. Un CHU permettrait de structurer l’offre de soins, de renforcer les plateaux techniques et d’attirer des spécialistes sur l’île.

Actuellement, 20 % des soins sont réalisés sur le continent, ce qui représente 26 000 transferts médicaux par an, pour un coût de 30 millions d’euros, et entraîne des pertes de chance pour les malades. Certains diagnostics et traitements sont retardés, avec des conséquences parfois dramatiques.

Le développement des études médicales est au cœur de cette proposition de loi. Depuis 2004, la Corse forme avec succès des étudiants en première année de médecine, notamment dans les instituts universitaires de santé. J’avais proposé plusieurs amendements au texte relatif à l’accès aux soins, défendu par M. Yannick Neuder, qui visaient à installer de tels instituts dans tous les départements dépourvus de CHU.

La création d’un CHU en Corse renforcera cet élan en offrant des stages, des infrastructures modernes et des perspectives de carrières attractives, permettant à davantage de jeunes médecins de s’installer durablement sur l’île.

Enfin, cette proposition de loi repose sur une ambition réaliste : elle a vocation, non pas à créer un CHU couvrant toutes les spécialités, mais à répondre aux besoins essentiels de la population corse, en partenariat avec les CHU du continent. L’accès à des soins de qualité doit être garanti pour tous les Français, quel que soit leur lieu d’habitation.

Le groupe Rassemblement National votera ce texte.

Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Nous examinons une proposition de loi visant à créer un CHU en Corse. Sous la précédente législature, le parcours législatif de ce texte important pour la collectivité de Corse n’avait pu aller à son terme, la dissolution ayant empêché son examen en séance publique.

La Corse constitue une exception française : la ville d’Ajaccio est le seul chef-lieu de région, sur l’ensemble du territoire, où il n’existe pas de centre hospitalier régional universitaire (CHRU). La Guyane était également dépourvue d’un tel établissement, mais elle en sera dotée dès l’année prochaine.

Ce texte vise à résoudre non seulement le problème de la justice sanitaire, mais aussi celui de l’égalité d’accès aux soins. La population corse est en constante augmentation, tandis que la densité médicale ne permet pas d’absorber les besoins de santé des habitants, a fortiori lorsqu’ils requièrent des soins spécifiques. L’absence de CHRU en Corse occasionne de très nombreux déplacements de malades vers des établissements en métropole, notamment à Nice et à Marseille, qui connaissent, elles aussi, un afflux touristique estival important, ce qui accentue la pression sur leurs établissements hospitaliers. Cette situation est particulièrement difficile et incommode pour les malades : outre le coût financier du déplacement et la logistique associée, l’éloignement des proches est fréquent, alors même qu’un soutien moral est nécessaire en cas de problème de santé.

Il est par ailleurs nécessaire de renforcer la formation des médecins sur l’île, afin d’améliorer l’attractivité du territoire. La création d’un CHRU en Corse nécessitera la coordination des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche, des acteurs de la santé, des acteurs locaux et de l’exécutif.

Parce qu’il est nécessaire de renforcer l’équilibre territorial en matière d’implantation de CHRU, le groupe Ensemble pour la République soutiendra cette proposition de loi.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Depuis deux siècles et demi, la Corse est privée par le pouvoir central de tout investissement en santé publique. C’est pourquoi le groupe La France insoumise votera cette proposition de loi, fort bienvenue.

Il y a cinquante ans, alors que Paris dressait déjà un premier bilan des vingt-huit CHU continentaux, on envoyait en Corse des blindés plutôt que des médecins ou du matériel médical : une politique du deux poids deux mesures qu’il s’agit de réorienter en rétablissant le principe d’égalité. L’accès aux soins demeure problématique et ce n’est pas fortuit : à la fin des années 1950, les premiers plans d’action régionaux prévoyaient une dimension sanitaire pour toutes les régions à l’exception de la Corse, qui était réduite à un plan de valorisation touristique et à un secteur agricole à faible valeur ajoutée. Au terme de plusieurs décennies d’inaction du pouvoir central, la situation est insupportable, en raison d’un effet de ciseau : les soins ne sont pas accessibles à la population, qui est en outre plus vulnérable qu’ailleurs.

L’offre en matière de santé publique est peu accessible : les médecins sont éloignés des populations et la Corse est le territoire comptant le moins de lits de réanimation. En conséquence, 30 000 Corses se rendent chaque année sur le continent pour s’assurer de la continuité de leur parcours médical. Parallèlement, la population corse est paupérisée – un quart de plus que dans l’Hexagone – et très dispersée puisque de nombreux Corses vivent dans des espaces peu denses, ce qui renforce les difficultés d’accès aux soins, alors même qu’elle est vieillissante. Près de 20 % des seniors vivant à leur domicile se disent en mauvaise ou en très mauvaise santé, ce pourcentage étant le plus élevé du pays.

La santé publique est clairement défaillante en Corse : la création d’un CHU est indispensable, afin de rassembler en un même lieu des praticiens qualifiés, un enseignement complet, une recherche de pointe et un plateau technique avancé.

Ce texte reflète une longue histoire d’exigences populaires, qui remonte à la Révolution : en mai 1789, la revendication numéro 31 des cahiers de doléances de Bastia demandait déjà plus de bureaux de santé en Corse. Voter ce texte permettra de satisfaire cette ancienne requête.

M. Elie Califer (SOC). Ce texte nous invite à faire œuvre de justice sanitaire. La Corse est confrontée à un grave déficit médical et hospitalier, avec seulement 258 médecins en activité régulière pour 100 000 habitants. Ce chiffre se situe bien en dessous de ceux de l’Île-de-France ou de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

De plus, la Corse est la seule région à ne disposer ni d’un centre hospitalier régional ni d’un CHRU. Son offre en réanimation est également l’une des plus faibles du pays, avec seulement 8 lits pour 100 000 habitants. Parallèlement, la Corse cumule plusieurs facteurs de risque qui accentuent la nécessité d’une meilleure infrastructure médicale : sa population augmente de 3 millions d’individus entre mai et septembre en raison de l’activité touristique ; la démographie est très dynamique, marquée par une croissance de 12 % en dix ans, mais aussi par un vieillissement notable : 21 000 personnes âgées supplémentaires devraient être dénombrées d’ici à 2030 ; le taux de pauvreté y est plus élevé que la moyenne nationale, ce qui génère une demande accrue de soins. Le manque d’offre hospitalière a des conséquences directes, parmi lesquelles 30 000 déplacements annuels entre la Corse et l’Hexagone.

La création d’un CHU en Corse permettrait non seulement de renforcer l’offre de soins, grâce à un plateau technique de qualité, mais aussi de soutenir l’enseignement et la recherche en lien avec l’université. Lors des auditions, un intervenant a affirmé que l’absence de CHU en Corse était inexplicable ; il faut mettre fin à cette situation inégalitaire en matière d’offre de soins.

Pour toutes ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés votera cette proposition de loi.

M. Philippe Juvin (DR). Mon collègue François-Xavier Ceccoli et moi-même soutenons cette proposition de loi visant à créer un CHU en Corse, pour une raison très simple : le problème médical majeur de l’île est sa démographie médicale. Les médecins sont peu nombreux et ils vieillissent : entre 2010 et 2024, la proportion de médecins de plus de 60 ans a augmenté de 105 % en Corse-du-Sud et de 163 % en Haute-Corse.

Quel est l’intérêt de créer un CHU en Corse, quelles que soient les difficultés ? Si l’on s’en tient à de stricts ratios de population, la logique voudrait en effet qu’il n’y ait pas de CHU sur l’île. Mais en raison de l’insularité, lorsqu’un étudiant corse est formé en médecine sur le continent, il ne revient pas exercer en Corse : pour inverser ce processus, il faut créer un CHU pour former les médecins sur l’île.

En pratique, il faudra œuvrer à la fois immédiatement et progressivement : créer immédiatement le CHU, pour lever toute ambiguïté, et envoyer progressivement des équipes complètes, composées d’un professeur d’université et d’un chef de clinique, parce que c’est le binôme qui fait l’enseignement. Ce faisant, le CHU et les trois activités qui le composent, à savoir l’enseignement, les soins et la recherche, seront constitués, dotant la Corse d’un véritable pôle de compétitivité et de recherche.

C’est pourquoi le groupe Droite Républicaine soutient sans réserve la proposition de loi de M. Paul-André Colombani.

M. Hendrik Davi (EcoS). Cette proposition de loi vise à créer un CHU en Corse. Nous y sommes favorables, parce que l’égalité est l’un des piliers de notre République : l’égal accès à des soins de qualité pour toutes et tous était un principe fondateur de l’assurance maladie lors de sa création en 1945. Or 26 000 Corses sont contraints chaque année de se rendre sur le continent pour obtenir des soins, faute de spécialistes et de matériel médical dans l’île. La Corse est la seule région à ne pas disposer d’un CHU, alors que ses spécificités justifiant de la création d’un CHU sont nombreuses : une grande pauvreté, une population vieillissante, un afflux de touristes l’été qui porte la population à près d’un million d’habitants, l’insularité, des temps de trajet élevés dus au caractère montagnard de l’île et la présence de maladies émergentes.

L’absence de CHU entraîne des pertes de chance et constitue un motif de renoncement aux soins pour de nombreux patients. Des associations de bénévoles organisent l’hébergement des familles des patients déplacés sur le continent. La création d’un CHU en Corse est une vieille revendication des élus de l’île et correspond à une forte demande populaire.

Pourquoi n’existe-t-il pas de CHU en Corse ? Parce que sa création impliquerait de mobiliser d’importants moyens, pour recruter des professeurs des universités et des soignants, et pour investir dans du matériel médical. Or les derniers gouvernements n’ont pas affiché une telle volonté politique et ont refusé de débloquer les moyens nécessaires. Comme nous l’avons constaté à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la majorité LR-RN-Renaissance refuse d’augmenter les cotisations sociales, notamment patronales, et de taxer les revenus du capital ou le patrimoine des milliardaires.

La création d’un CHU en 2030, comme le propose ce texte, permettrait de former de jeunes médecins directement sur l’île, les incitant à s’y installer durablement. L’université de Corse dispense déjà les enseignements du premier cycle de médecine ; en outre, une unité consacrée aux virus émergents a été ouverte et certaines spécialités enseignées sont déjà à la pointe des techniques.

Parce qu’il faut aller plus loin, le groupe Écologiste et Social soutiendra avec force cette proposition de loi.

M. Philippe Vigier (Dem). Une fois n’est pas coutume, je souscris totalement aux propos tenus par Philippe Juvin.

Plus de vingt ans ont été nécessaires pour qu’un CHU soit créé à Orléans ; c’est chose faite depuis 2021. Une double mission de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection de l’éducation, du sport et de la recherche a été nécessaire, ainsi que la volonté de fer du Premier ministre Jean Castex. Nous serons présents pour accompagner les élus corses : il faut aller vite, sans attendre 2030 et ne rien lâcher.

L’été, la Corse n’accueille pas un, mais trois millions de personnes. J’établis un parallèle avec La Réunion, où les évacuations sanitaires depuis Mayotte sont très nombreuses. Par ailleurs je suis heureux d’apprendre que la Guyane accueillera un CHU à compter du 1er janvier 2025.

Avec un CHU en Corse, de jeunes médecins pourront vivre et travailler au pays. De plus, la création d’une filière de recherche est indispensable. La Corse fait partie des territoires ultramarins : il n’est pas acceptable qu’elle ne dispose pas d’une capacité de prise en charge identique à celle de l’Hexagone. Cette dernière n’est cependant pas parfaite, puisque la région Centre-Val de Loire ne comptait qu’un seul CHU pour 2,8 millions d’habitants il y a encore quelques mois.

La création d’un CHU en Corse fait l’objet d’un partenariat entre l’université de Corte et la collectivité de Corse, ce qui témoigne du soutien de l’ensemble de la population.

Parce que cette exigence doit être rapidement concrétisée, le groupe Les Démocrates votera ce texte.

M. Laurent Marcangeli (HOR). Je me réjouis des différentes prises de parole, qui annoncent une probable unanimité.

Trente-trois CHU sont répartis sur l’ensemble du territoire national, mais il n’y en a aucun en Corse, région métropolitaine qui fait face à des défis spécifiques à l’insularité : les distances, les temps de déplacement pour accéder à des services de santé spécialisés et la fatigue qu’ils entraînent. Nous sommes nombreux à considérer que les Corses doivent bénéficier d’un traitement égalitaire.

La création d’un CHU en Corse permettra à celle-ci de bénéficier des mêmes avantages que les autres régions en matière de soins spécialisés, de formation et de recherche, réduisant ainsi les inégalités sanitaires territoriales qui nous posent tant de problèmes.

La situation hospitalière en Corse est préoccupante. Dès 2017, la Cour des comptes soulignait les graves difficultés financières des hôpitaux d’Ajaccio et de Bastia, malgré de fréquentes aides exceptionnelles. Contrairement à ce qui a été dit, nous n’avons pas été abandonnés : ainsi, en tant que maire d’Ajaccio, j’ai inauguré un hôpital neuf, entièrement financé par l’État. Cependant, nous devons mieux faire.

La création d’un CHU entraînerait une meilleure gestion financière opérationnelle des établissements de santé de l’île, grâce à des financements spécifiques et des partenariats académiques. L’égalité d’accès aux soins est un principe fondamental ; la Corse, malgré ses particularités, mérite de bénéficier des mêmes investissements et des mêmes infrastructures que les autres régions. C’est pourquoi le groupe Horizons & Indépendants votera ce texte.

M. Stéphane Viry (LIOT). Il y a six mois, le groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires avait présenté une proposition de loi visant à créer un CHU en Corse, largement adoptée par notre commission, mais dont la concrétisation avait été empêchée par la dissolution. Nous déplorons le temps perdu, qui ne fait que retarder une décision attendue, répondant à une revendication ancienne ayant fait l’objet de plusieurs délibérations unanimes de l’Assemblée de Corse. Un groupe de travail s’est constitué, réunissant médecins, élus, professeurs ; sur le terrain, tout le monde est prêt à accueillir le CHU.

Passer par la loi pour créer un CHU peut sembler baroque et surprenant, mais ce choix s’impose à nous comme il s’est imposé à Paul-André Colombani. Comment expliquer l’anomalie faisant de la Corse la seule région dépourvue de CHU et de CHRU ? Tout plaide pour cette création, qui représente un enjeu d’attractivité dans un territoire marqué par la désertification médicale, alors même que les besoins de la population sont croissants ; la population vieillissante et le tourisme sont des raisons supplémentaires. Il s’agit avant tout de garantir un égal accès aux soins à une population souvent contrainte de se rendre sur le continent pour être soignée, ce qui entraîne des coûts très élevés.

Pour conclure, je voudrais saluer le long combat mené par les députés corses du groupe LIOT, qui ont su rallier de nombreux soutiens transpartisans. Je souhaite que cette proposition de loi soit adoptée et aille enfin à son terme.

Mme Karine Lebon (GDR). Cette proposition de loi vise à réparer une injustice, puisque la Corse demeure la seule région de France à ne pas être dotée d’un CHU, alors même qu’elle remplit tous les critères nécessaires. Elle avait été examinée en commission en juin dernier, mais son parcours législatif a été interrompu par la dissolution. Le texte présenté aujourd’hui intègre les amendements alors adoptés par la commission, mais nous avons perdu un temps précieux.

La situation extrêmement dégradée en matière d’accès aux soins justifie pleinement l’ouverture d’un CHU, qui permettra notamment de corriger la démographie médicale de l’île. En tant qu’élue d’un territoire d’outre-mer, je connais les problèmes des habitants de l’île, en particulier en matière d’éloignement. Au coût des évacuations sanitaires s’ajoutent des pertes de chance inadmissibles. Plus de 30 000 déplacements sont effectués chaque année entre la Corse et le continent.

Le consensus autour de cette proposition de loi va sans doute au-delà de la volonté de corriger une inégalité de traitement entre l’île et le reste du territoire. Ce texte prend appui sur l’exception corse pour consacrer une obligation légale de faire de chaque région le siège d’au moins un CHU. Pour répondre à l’impératif d’égalité d’accès aux soins pour toutes et tous sur l’ensemble du territoire, en particulier pour les personnes les plus vulnérables, les députés du groupe de la Gauche Démocrate et Républicaine voteront cette proposition de loi.

Article 1er : Principe d’au moins un centre hospitalier universitaire par région

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS5 de M. Pierre-André Colombani.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Mise en œuvre du centre hospitalier universitaire de Corse d’ici 2030

Amendements AS3 et AS4 de M. Philippe Juvin

M. Philippe Juvin (DR). Ces amendements visent à apporter des précisions sur l’universitarisation progressive de l’établissement, en complément des propos du rapporteur.

Il faut dix à quinze ans pour faire un professeur d’université et dix à douze pour un chef de clinique. La progressivité de l’affectation du personnel du CHU doit figurer dans la loi, faute de quoi les doyens d’université risquent de refuser de céder des postes de chefs de clinique et de professeurs d’université-praticiens hospitaliers (PU‑PH) au bénéfice de ce nouveau CHU. Il serait judicieux de prendre exemple sur la façon dont ont été constituées les équipes du CHU du Havre : les chefs de cliniques et les PU‑PH y ont été affectés service par service.

M. le rapporteur. Ces deux amendements sont partiellement satisfaits, puisqu’on ne peut faire autrement que progressivement. La proposition de loi vise désormais une échéance en 2030 et prévoit qu’un décret établira le calendrier des différentes étapes de création.

J’entends la crainte des doyens d’université, mais ce problème ne peut être réglé au détriment de la Corse. Nous augmenterons le nombre de postes si c’est nécessaire. En tout état de cause, nous devrons coconstruire, comme nous l’avons fait pour les filières vasculaires : le professeur Collart, du CHU d’Aix-Marseille, consacre une partie de son temps aux hôpitaux de Bastia et d’Ajaccio, contribuant au développement de ces filières. Il y a quelques mois, une thèse a démontré que cette pratique avait contribué à diminuer le nombre de renoncements aux soins.

Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Philippe Juvin (DR). Il serait erroné de penser que la nomination de professeurs de médecine suffise à créer un CHU. Ce sont des équipes qu’il faut installer, sous peine de rencontrer de grandes difficultés.

J’ai néanmoins entendu votre argument, monsieur le rapporteur, et je retire les deux amendements.

Les amendements AS3 et AS4 sont retirés.

La commission adopte l’article 2 non modifié.

Après l’article 2

Amendement AS1 de M. Hadrien Clouet

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’amendement a pour objet de demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport présentant l’ensemble des moyens matériels, humains et financiers alloués aux différents CHU de France, notamment au nouveau CHU de Corse. L’objectif est de s’assurer que les missions dévolues à ce nouveau centre bénéficient des moyens indispensables à leur conduite.

M. le rapporteur. L’amendement a déjà été présenté en juin : j’y suis défavorable car son champ sort du cadre de la proposition de loi. Je souhaiterais que la commission adopte le même texte que celui voté cet été.

L’amendement est retiré.

Amendement AS2 de M. Philippe Juvin

M. François-Xavier Ceccoli (DR). Nous souhaitons veiller à ne pas déshabiller Pierre pour habiller Paul : les moyens humains alloués au futur CHU ne devront pas être ponctionnés sur ceux des hôpitaux continentaux.

L’amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport étudiant la possibilité d’affecter des effectifs hospitaliers universitaires au CHU de Corse sans les retirer des CHU existants.

M. le rapporteur. Il n’est bien entendu pas question de déshabiller Pierre pour habiller Paul. La méthode de la coconstruction et du partage, déjà éprouvée dans différentes filières, doit prévaloir. Nous souhaitons augmenter le nombre de filières dans les années à venir.

L’avis est défavorable.

L’amendement est retiré.

Article 3 : Gage financier

La commission adopte l’article 3 non modifié.

M. François-Xavier Ceccoli (DR). Je souhaiterais ajouter deux éléments avant le vote sur l’ensemble. Pendant la crise du covid, le Gouvernement a dû affréter un bateau militaire pour évacuer des malades car l’île ne comptait qu’une trentaine de lits de réanimation. Or il est plus difficile d’évacuer des personnes depuis une île que depuis un département continental.

Par ailleurs, la Corse ne dispose d’aucun scanner de tomographie par émission de positons (PET-scan) : pour passer ce simple examen, il faut prendre l’avion, donc engager des coûts et subir de la fatigue.

La commission adopte à l’unanimité l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

M. le rapporteur. Je vous remercie pour votre soutien unanime, qui m’a beaucoup simplifié la tâche. Je vous donne rendez-vous mardi prochain pour l’examen du texte en séance publique. La création d’un CHU est très attendue en Corse.

*

*     *

En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la proposition de loi figurant dans le document annexé au présent rapport.

– Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/v968N3

– Texte comparatif : https://assnat.fr/SgSVP5


– 1 –

   ANNEXE N°1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNéES PAR Le RAPPORTEUR

(Par ordre chronologique)

 

       M. Dominique Federici, président de l’Université de Corse

       Table ronde réunissant des médecins universitaires :

 Dr Xavier Emmanuelli, médecin, fondateur du SAMU social de Paris

 Dr Didier Houssin, professeur des universités en chirurgie, président d’AP‑HP International

 Dr François Pernin, cardiologue

       Mme Laetita Cucchi, présidente de l’association INSEME

 


– 1 –

Annexe N° 2 :
textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen DE LA PROPOSITION DE LOI

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de la santé publique

L. 6132-3 et L. 6141‑2

 

 


([1])  Proposition de loi n° 921 visant à la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse, enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 mars 2023.

([2]) Art. 8 bis de la loi n° 85‑30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne : « Sans préjudice de la présente loi, et pour l’application et l’interprétation de celle-ci notamment, la spécificité de la Corse, territoire montagneux et insulaire présentant le caractère d’"île-montagne", par suite soumise à un cumul de contraintes, est prise en considération conformément à l’article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. » 

([3]) « Actualisation des coefficients géographiques des départements d’Outre-mer et de Corse – Révision de la méthodologie d’objectivation des surcoûts supportés par les établissements de santé des DROM et de Corse », Drees, novembre 2023.

([4]) Statistiques Insee, 2024.

([5]) Statistiques Insee, 2023.

([6]) Statistiques Insee, 2024.

([7]) « Les retraités et leur retraite », Drees, édition 2020.

([8]) « Projet de création du CHRU de Corse », rapport final, Collectivité de Corse, juillet 2023.

([9]) Arrêté n° 2023/123 du 20 avril 2023, ARS Corse.

([10]) Tomographe à émission de positrons.

([11]) « Projet de création du CHRU de Corse », rapport final, Collectivité de Corse, juillet 2023.

([12]) « Déplacements médicaux vers le continent : innover pour supprimer les inégalités territoriales », Cesec, 2018.

([13]) Proposition de loi n° 1346 relative au rétablissement de la continuité territoriale des soins en matière de déplacements médicaux depuis la Corse vers le continent, déposée le 24 octobre 2018.

([14]) « Prise en charge des patients atteints d’un rétrécissement aortique en Corse : efficience et sécurité de la filière TAVI », Dr Francesca Ferrandi, novembre 2023.

([15]) Transcatheter aortic valve implantation (implantation percutanée d’une prothèse valvulaire aortique).

([16]) Sondage Paroles de Corse-Opinion of Corsica – C2C.

([17]) Ordonnance n° 58‑1373 du 30 décembre 1958 relative à la création des centres hospitaliers et universitaires, à la réforme de l’enseignement médical et au développement de la recherche médicale.

([18]) Article L. 6141‑2 du code de la santé publique.

([19]) https://assnat.fr/XTFcfD