N° 1265

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 avril 2025.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)
SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (N° 1196),
DE MME DANIELE OBONO,


visant à condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et à réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples,

 

 

PAR Mme DaniÈle OBONO,

Députée

 

 

 

 

 

 

 

  1.    La composition de la commission figure au verso de la présente page.

 

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pieyre-Alexandre ANGLADE, président ; M. Laurent MAZAURY, Mmes Manon BOUQUIN, Nathalie OZIOL M. Thierry SOTHER, vice-présidents ; MM. Benoît BITEAU, Maxime MICHELET, secrétaires ; MM. Henri ALFANDARI, Gabriel AMARD, David AMIEL, Philippe BALLARD, Karim BENBRAHIM, Guillaume BIGOT, Nicolas BONNET, Mme Colette CAPDEVIELLE, M. François-Xavier CECCOLI, Mmes Sophia CHIKIROU, Nathalie COLIN-OESTERLÉ, MM. Arthur DELAPORTE, Julien DIVE, Nicolas DRAGON, Michel HERBILLON, Mme Mathilde HIGNET, M. Sébastien HUYGHE, Mmes Sylvie JOSSERAND, Marietta KARAMANLI, M. Bastien LACHAUD, Mmes Hélène LAPORTE, Constance LE GRIP, M. Pascal LECAMP, Mme Brigitte LISO, MM. Alexandre LOUBET, Mathieu MARCHIO, Patrice MARTIN, Emmanuel MAUREL, Mmes Yaël MENACHÉ, Danièle OBONO, M. Frédéric PETIT, Mme Anna PIC, Mmes Isabelle RAUCH, Marie-Ange ROUSSELOT, MM. Alexandre SABATOU, Charles SITZENSTUHL, Mmes Michèle TABAROT, Sophie TAILLÉ‑POLIAN, Liliana TANGUY, Sabine THILLAYE, Estelle YOUSSOUFFA.

 


SOMMAIRE

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 Pages

Introduction

Une remise en cause frontale du droit international et de l’ordre multilatéral

I. Des violations du droit international et du multilatéralisme sans précédent

A. Une remise en cause systématique du droit international

1. Le mépris des organisations et conventions internationales

2. Le rejet des juridictions internationales

3. Le contournement du droit international humanitaire

B. Un unilatéralisme agressif au service de logiques de puissance

1. Le soutien aux annexions illégales et le désaveu des résolutions de l’ONU

2. Le projet de « prise de contrôle » de territoires et la menace d’un nettoyage ethnique

3. La multiplication des déclarations menaçantes depuis le début du deuxième mandat

II. Un impact déstabilisateur sur la paix mondiale et l’équilibre géopolitique

A. le retrait de l’Accord de Paris et le sabotage des efforts environnementaux

B. La montée des tensions commerciales

C. Déséquilibre des puissances et remise en cause du multilatéralisme

Refonder la position internationale de l’Europe  face au désordre mondial

I. Condamner les violations américaines et défendre le droit international

II. Réaffirmer les engagements de l’UE en faveur de la paix, de la justice et de la coopération

A. Renforcer l’action pour la paix et la sécurité internationale

B. Soutenir les institutions internationales de justice et de droits humains

III. Réengager un partenariat avec l’Amérique progressiste

Conclusion

EXAMEN EN COMMISSION

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE INITIALE

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR LA COMMISSION

 


   Introduction

 

 

 

Mesdames, Messieurs,

L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis en 2016 avait marqué un tournant dans les relations internationales, avec une mise à distance assumée du multilatéralisme et des normes internationales. Son premier mandat (2017-2021) a été ponctué de décisions unilatérales, souvent en rupture avec les engagements pris par les États-Unis dans le cadre d’accords internationaux, notamment en matière de climat, de sécurité ou de droits humains.

Sa seconde présidence s’annonce encore plus préoccupante pour l’ordre international. Dès les premiers mois, des décisions spectaculaires ont confirmé une volonté d’accentuer le désengagement américain des institutions multilatérales, comme en témoignent la suspension des contributions à certaines agences de l’ONU et le boycott de forums internationaux.

Le retrait d’accords de sécurité régionaux, combiné à un soutien assumé à des régimes autoritaires ou à des États bafouant le droit international, affaiblit davantage la cohésion des alliances occidentales. La remise en cause explicite de principes fondamentaux du droit international humanitaire, l’intensification des attaques contre la Cour pénale internationale ou encore les sanctions économiques extraterritoriales décidées sans concertation accentuent cette dérive. Enfin, l’usage stratégique de la désinformation et l’instrumentalisation de la diplomatie pour des objectifs de politique intérieure aggravent l’instabilité globale.

Face à cela, l’Union européenne doit réaffirmer avec force ses propres valeurs et engagements. La présente résolution vise à inviter l’Europe à répondre à ces défis en condamnant les dérives du président Trump contraires au droit, en renforçant son action diplomatique pour la paix et la justice, et en affirmant son autonomie afin de réduire sa dépendance vis-à-vis d’un partenaire devenu incertain.

 

 


   Une remise en cause frontale du droit international et de l’ordre multilatéral

I.   Des violations du droit international et du multilatéralisme sans précédent

Au cours de chacun de ses deux mandats, Donald Trump s’est affranchi constamment des normes du droit international, transformant ses deux présidences en un défi permanent lancé aux institutions et traités censés régir les relations entre nations. Plusieurs exemples emblématiques illustrent cette tendance générale.

A.   Une remise en cause systématique du droit international

1.   Le mépris des organisations et conventions internationales

Lors de son premier mandat, Donald Trump a retiré son pays de plusieurs instances multilatérales, fragilisant la coopération internationale. En juin 2018, les États-Unis ont quitté le Conseil des droits humains de l’ONU et cessé de coopérer avec ses experts. Le président a également mis fin à la participation des États-Unis à l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) fin 2018 et suspendu le financement de plusieurs agences onusiennes, dont l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), privant cette dernière d’une part essentielle de ses ressources.

Revenu au pouvoir en janvier 2025, Donald Trump a confirmé sa ligne de rupture avec le système onusien. Le 4 février 2025, il a signé un décret exécutif prolongeant la suspension du financement américain à l’UNRWA et ordonné le retrait des États-Unis du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Dans le même élan, il a annoncé un nouveau désengagement de l’Organisation mondiale de la santé, renouant ainsi avec la politique de retrait amorcée en 2020. Par ailleurs, après avoir réintégré l’UNESCO en 2023 sous la présidence Biden, les États-Unis ont laissé, sous l’administration Trump, cette réadhésion sans suite, confirmant ainsi sa distance vis-à-vis de l’organisation.

2.   Le rejet des juridictions internationales

Dès son premier mandat, l’administration Trump a exprimé une hostilité marquée envers la justice pénale internationale, en particulier la Cour pénale internationale (CPI). En 2020, alors que la CPI enquêtait sur des crimes de guerre en Afghanistan et en Israël et Palestine, Donald Trump a signé un décret autorisant des sanctions contre ses hauts responsables ([1]) . Ces mesures ont été condamnées par la communauté internationale. Le Haut représentant de l’Union européenne a exprimé sa « grave préoccupation » et réaffirmé le soutien de l’Union à la Cour  ([2])  . Human Rights Watch a dénoncé une attaque contre les victimes de crimes atroces en quête de justice.

En 2025, Donald Trump a réactivé cette politique en signant un nouveau décret exécutif étendant les sanctions à d'autres responsables de la Cour, en réponse au dépôt par le procureur général de la CPI Karim Khan contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et son ministre de la Défense Yoav Gallant.

3.   Le contournement du droit international humanitaire

Plusieurs décisions de Trump peuvent être considérées comme des violations directes du droit international.

En janvier 2020, Trump a ainsi ordonné l’assassinat ciblé du général iranien Qassem Soleimani sur le sol irakien, sans autorisation de ce pays, un acte qualifié par de nombreux juristes d’exécution extrajudiciaire violant la souveraineté de l’Irak et la Charte de l’ONU. Agnès Callamard, rapporteur spécial de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a ainsi conclu dans son rapport de 2020 que cette frappe américaine était illégale au regard du droit international ([3]) .

Par ailleurs, en fin de mandat, Donald Trump a gracié des militaires américains condamnés pour crimes de guerre, envoyant un signal délétère d’impunité totale vis-à-vis des Conventions de Genève. Amnesty International a fermement critiqué ces pardons présidentiels, estimant qu’ils constituaient un blanc-seing pour les violations du droit humanitaire et sapaient la crédibilité des États-Unis lorsqu’ils condamnent les exactions d’autres pays.

B.   Un unilatéralisme agressif au service de logiques de puissance

1.   Le soutien aux annexions illégales et le désaveu des résolutions de l’ONU

Donald Trump a intensifié le soutien américain à la politique israélienne en apportant un appui explicite aux violations du droit international par Israël.

En décembre 2017, il a unilatéralement reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël et transféré l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem. Ce faisant, il a agi en contradiction avec plusieurs résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale des Nations unies, en particulier la récente résolution 2334 du Conseil de Sécurité ([4]) . Cette annonce a été qualifiée de « violation dangereuse du droit international » par les ministres arabes des Affaires étrangères réunis au Caire ([5]) .

Quelques mois plus tard, le 25 mars 2019, il a récidivé en reconnaissant la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan syrien occupé depuis 1967, proclamation qui contrevient directement à la résolution 497 du Conseil de sécurité qui déclarait en 1981 « nulle et non avenue » l’annexion de ce territoire par Israël ([6])  . L’Union européenne, par la voix de Federica Mogherini, alors Haute représentante, a indiqué qu’elle ne reconnaîtrait pas cette décision américaine ([7]) .

Les actes de Donald Trump reviennent ainsi à entériner des faits accomplis condamnés par le droit international, sapant du même coup l’autorité des Nations unies et encourageant d’éventuelles futures violations du droit par des États alliés.

2.   Le projet de « prise de contrôle » de territoires et la menace d’un nettoyage ethnique

En février 2025, Donald Trump est allé jusqu’à suggérer un plan américain de « prise de contrôle » de la bande de Gaza pour régler le conflit actuellement en cours dans cette région, évoquant le transfert forcé des populations palestiniennes de Gaza vers le Sinaï égyptien. Cette idée, assimilable à un projet de déplacement massif de population contraire au droit international (la déportation ou le transfert forcé de population étant un crime contre l’humanité, considéré comme tel par les Conventions de Genève et le Statut de Rome), a suscité de vives réactions. Bien qu’il ait ensuite modéré ses propos sur l’expulsion des Palestiniens, aucun démenti ferme n’a confirmé l’abandon de cette perspective ([8]) .

Les experts de l’ONU ont averti qu’une telle proposition américaine « anéantirait les règles fondamentales du droit international », comparant son issue potentielle aux tragédies qu’ont été les déplacements de populations forcés en Europe au XXe siècle ([9]) . Ils ont ainsi rappelé que de tels actes pourraient s’apparenter aux pires heures de la Seconde guerre mondiale, jugeant crucial que « le monde ne tolère jamais un retour à l’absence de droit dominée par la force brutale ». Ce langage onusien, d’une rare sévérité envers un dirigeant américain, montre à quel point les menaces proférées par Donald Trump heurtent le socle même du droit international.

En se détournant ainsi des institutions internationales et en piétinant les engagements juridiques internationaux, Donald Trump a affaibli le principe selon lequel les différends doivent se résoudre par la négociation et l’application du droit plutôt que par l’intimidation ou le fait accompli.

L’administration Trump a justifié de façon habituelle ces retraits et mesures au nom de la « souveraineté » américaine, arguant que les accords multilatéraux contraignaient injustement les États-Unis ou que les organisations internationales portaient atteinte à leurs intérêts nationaux. Le président américain a ainsi déclaré à la tribune de l’ONU en 2018 : « Nous rejetons l’idéologie du mondialisme pour embrasser le patriotisme », revendiquant explicitement le droit des États-Unis à s’affranchir des règles communes ([10])

Cette vision extrême a entraîné un profond recul du leadership américain traditionnellement exercé ou affiché dans la promotion de l’ordre juridique international depuis 1945.

3.   La multiplication des déclarations menaçantes depuis le début du deuxième mandat

Depuis sa réélection en janvier 2025, le président Donald Trump a par ailleurs prononcé des déclarations inquiétantes à propos de projets d’expansion territoriale concernant le Groenland, le canal de Panama et le Canada.

Depuis la première déclaration de Donald Trump en 2019 évoquant le souhait d’acheter le Groenland au Danemark — proposition considérée par le Danemark comme inenvisageable et aussitôt rejetée —, le sujet était resté en suspens jusqu’à son retour au pouvoir en 2025 ([11]) . Dès février de cette année, Trump a relancé publiquement l’idée, allant jusqu’à affirmer que les États-Unis devaient « obtenir le Groenland, d’une manière ou d’une autre » en invoquant des raisons stratégiques.

Face à cette pression, la Première ministre danoise Mette Frederiksen a annoncé une visite de soutien au territoire, tandis que le vice-président J. D. Vance s’est rendu à la base américaine de Thulé fin mars, ravivant les tensions avec Copenhague.

En ce qui concerne le canal de Panama, Donald Trump, alors président élu, a ravivé dès décembre 2024 une ancienne controverse en affirmant que les États-Unis devraient reprendre le contrôle du canal de Panama, accusant le Panama de surfacturer les navires américains et dénonçant l’influence chinoise dans la région ([12]) . Il a réitéré cette position lors de son discours d’investiture en janvier 2025, déclarant que le transfert du canal au Panama avait été une erreur.

En février, son secrétaire d’État Marco Rubio s’est rendu à Panama pour faire valoir les préoccupations américaines. Peu après, le gouvernement panaméen a annoncé qu’il ne renouvellerait pas son accord avec la Chine signé en 2017 — une décision saluée par Washington mais vivement critiquée par Pékin ([13])  En mars 2025, Trump a confirmé devant le Congrès que son administration allait « reprendre » le canal, affirmant que le processus était déjà engagé, suscitant de vives tensions diplomatiques en Amérique latine.

Enfin, en ce qui concerne le Canada, le président Trump a suggéré à demi-mot et à plusieurs reprises que ce pays devrait être « le 51ᵉ État des États-Unis », idée bien sûr rejetée par le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, déclarant qu'il n'y avait « pas une chance sur un million » que le Canada rejoigne les États-Unis.

II.   Un impact déstabilisateur sur la paix mondiale et l’équilibre géopolitique

Au-delà de leurs aspects purement juridiques, les choix de Donald Trump ont eu des répercussions concrètes sur la stabilité du monde, en fragilisant des équilibres géostratégiques et en aggravant certaines menaces planétaires. Plusieurs domaines clefs illustrent la façon dont les États-Unis, sous l’administration Trump, ont ébranlé l’ordre international existant : la lutte contre le changement climatique, le système d’alliances de sécurité, le commerce mondial, ainsi que l’équilibre des puissances face à la Chine ou la Russie.

A.   le retrait de l’Accord de Paris et le sabotage des efforts environnementaux

En juin 2017, Donald Trump a annoncé le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat, signé par près de 200 pays en 2015. Cette décision a suscité une consternation internationale : l’Accord de Paris, bien qu’imparfait, était alors considéré comme le pilier de la lutte mondiale contre le réchauffement climatique. L’Union européenne et la Chine, entre autres, ont immédiatement réaffirmé leur engagement envers l’accord, rejetant les propositions de renégociation avancées par Trump.

Bruxelles a refusé catégoriquement de « rouvrir » l’Accord de Paris à la demande de Washington, Donald Tusk, président du Conseil européen, qualifiant alors le retrait américain de « grave erreur » ([14]) . En pratique, ce désengagement américain a affaibli la portée universelle de l’Accord et ouvert le risque d’inciter d’autres pays à revoir à la baisse leurs efforts climatiques. Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) a exprimé sa préoccupation face au retrait des États-Unis de l’Accord de Paris, soulignant que la coopération de tous les grands émetteurs est essentielle pour atteindre les objectifs climatiques ([15]) .

L’administration Trump a par ailleurs annulé de nombreuses réglementations environnementales nationales, relançant l’exploitation du charbon, autorisant des forages pétroliers dans des zones protégées et supprimant les normes limitant les émissions industrielles. Ces politiques ont été dénoncées lors des COP successives, tandis que le secrétaire général de l’ONU António Guterres avertissait en 2019 que la crise climatique « allait bien au-delà des frontières » et qu’aucun pays ne pouvait se permettre de faire cavalier seul.

Pendant quatre ans, le gouvernement Trump a tenu un discours climatosceptique, minorant l’urgence climatique malgré les rapports alarmants du GIEC. La diplomatie climatique internationale a dû par conséquent se réorganiser sans les États-Unis, l’UE s’érigeant en leader alternatif aux côtés de la Chine et des États insulaires vulnérables. À titre d’exemple, dès 2017, l’UE a décidé de coopérer directement avec des acteurs américains non fédéraux – comme les États fédérés, villes et entreprises pro-climat – afin de tenir les objectifs de Paris malgré l’administration Trump.

Cette démarche inédite consistant à contourner la Maison Blanche pour travailler avec la société civile américaine atteste de l’urgence de sauvegarder un bien public mondial menacé par le revirement des États-Unis. La présente résolution invite à poursuivre cet effort.

Cette dynamique renvoie au concept d’« autonomie stratégique » de l’Europe, né précisément de la diminution de la fiabilité perçue des États-Unis sous Trump. En effet, face à un partenaire américain oscillant entre exigences financières et tentation isolationniste, les Européens ont pris conscience de leur dépendance critique en matière de sécurité et de la nécessité, du moins peut-on l’espérer, d’y mettre fin.

B.   La montée des tensions commerciales

Suivant son slogan « America First », Donald Trump a engagé les États-Unis dans une série de guerres commerciales. Il a notamment lancé dès 2018 une confrontation tarifaire massive contre la Chine, imposant des droits de douane punitifs sur des centaines de milliards de dollars de produits chinois, auxquels Pékin a répliqué par des taxes équivalentes sur les produits américains.

Cette escalade tarifaire entre les deux premières économies mondiales a perturbé les chaînes d’approvisionnement internationales et freiné la croissance globale. Le Fonds monétaire international a estimé que le conflit commercial sino-américain avait contribué au ralentissement de la croissance mondiale, passée de 4 % en 2017 à 3,6 % en 2018, les incertitudes pesant sur l’investissement et le commerce international.

Invoquant la sécurité nationale, le président Trump a également taxé lourdement l’acier et l’aluminium importés d’Europe, du Canada et du Mexique. Il a également menacé à plusieurs reprises d’imposer des droits de douane de 25 % sur les automobiles européennes, un coup dur potentiel pour des pays comme l’Allemagne. Ces méthodes de négociation brutales – assimilées à du chantage économique – ont fragilisé le système commercial.

En bloquant par ailleurs la nomination des juges à l’Organe d’appel de l’OMC, Washington a paralysé à partir de fin 2019 le mécanisme de règlement des différends de l’Organisation, réduisant de facto sa capacité à faire respecter les règles commerciales par voie juridique ([16]) . L’Union européenne s’est retrouvée dans une position délicate, cherchant tant bien que mal à défendre le système de l’OMC tout en évitant la confrontation directe avec l’administration Trump. Certaines mesures de rétorsion ciblées ont toutefois été prises (taxes sur le bourbon, les motos Harley-Davidson ou les jeans américains en réponse aux taxes acier).

Fraîchement réélu en 2025, Donald Trump a menacé d’instaurer des tarifs douaniers prohibitifs de 200 % sur les vins et spiritueux français, en réponse à des désaccords commerciaux ([17]) . Une telle mesure démontre la volonté de Donald Trump de cibler spécifiquement les économies européennes jugées « déloyales ». La nouvelle ère Trump se caractérise par un protectionnisme brutal et autoritaire qui menace de fragmenter le marché mondial.

Le 2 avril 2025, l’administration Trump a confirmé son unilatéralisme économique en annonçant une augmentation générale des tarifs douaniers appliquée à la quasi-totalité des produits importés. Ces mesures risquent de conduire à de fortes inflations et déstabilisations des filières.

C.   Déséquilibre des puissances et remise en cause du multilatéralisme

Sur le plan géopolitique, Donald Trump a adopté des positions hégémonistes qui affaiblissent le multilatéralisme.

Il a conduit avec la Chine des négociations commerciales bilatérales sans consultation avec ses autres partenaires. Cet unilatéralisme a pu faire craindre que le monde n’évolue vers une forme de partage du monde entre Washington et Pékin, amicale ou non. Le Secrétaire général de l’ONU avait ainsi mis en garde en 2019 contre le risque d’une « grande fracture du monde en deux sphères économiques rivales menées par les États-Unis et la Chine », observant avec inquiétude la dérive nationaliste des deux pays ([18]) .

Sous Donald Trump, les États-Unis ont par ailleurs abandonné des traités de contrôle des armements hérités de la guerre froide, tels que le Traité sur les Forces Nucléaires à portée Intermédiaire (FNI) dénoncé en 2019, suscitant la crainte d’une nouvelle course aux armements entre Washington, Moscou et Pékin. Donald Trump n’a en outre pas prolongé le traité New START avec la Russie, qu’il a laissé expirer en 2021, même s’il a été sauvé in extremis par son successeur. Le désintérêt de Donald Trump pour la maîtrise multilatérale des armements–– a pu à juste titre inquiéter l’Europe quant à sa propre sécurité nucléaire.

Concernant le Moyen-Orient, Donald Trump a renforcé la polarisation de la région à travers le retrait américain de l’accord nucléaire avec l’Iran en 2018, suivi de sanctions maximales contre Téhéran, ce qui a ravivé les tensions dans le Golfe et accru la possibilité d’un conflit armé direct. L’Europe a pour sa part tenté de sauver l’accord iranien en mettant en place un mécanisme financier spécial (INSTEX) permettant de poursuivre les échanges avec l’Iran malgré les sanctions américaines, mais avec un succès limité.

Au niveau global, l’attitude de Donald Trump a été perçue comme un facteur de désordre mondial : au lieu de jouer son rôle stabilisateur traditionnel, la puissance américaine a donné le sentiment d’adhérer à une vision du monde dans laquelle la force l’emporte sur le droit. Cette perception est confirmée par des experts internationaux : Trump se présente comme un « faiseur de paix » réaliste pour qui « la loi du plus fort est la meilleure », note Al Jazeera en 2025, soulignant son indifférence au principe de souveraineté des nations et son empressement à « trahir l’Ukraine » en pleine invasion russe.

En tournant le dos aux principes du droit et en flattant les rapports de puissance bruts, Trump semble s’inscrire dans une logique de retour au Machtpolitik du XIXe siècle, évoquant un monde où les grands empires imposaient leur loi sans contrainte morale – une régression historique que l’ONU et l’UE ne peuvent accepter sans réagir ([19]) .

Le bilan de la présidence Trump du point de vue européen apparaît donc accablant : un affaiblissement du droit international et des institutions multilatérales, combiné à une multiplication de crises ou tensions (climat ignoré, conflits attisés au Moyen-Orient, alliances ébranlées, rivalités exacerbées). Face à ce constat, il est nécessaire de condamner fermement ces dérives et de réaffirmer, par contraste, l’attachement de l’Union européenne aux valeurs de paix, de justice et de coopération internationales. La présente proposition de résolution européenne vise précisément à formuler cette réponse.

 


   Refonder la position internationale de l’Europe
face au désordre mondial

L’élection de Donald Trump et son retour au pouvoir ont mis en lumière l’extrême vulnérabilité de l’Union européenne, trop dépendante des États-Unis dans des domaines essentiels : diplomatie, économie, énergie, technologies. Loin de tout réflexe atlantiste, la résolution appelle à construire une autonomie stratégique qui ne soit pas militaire mais politique, économique et écologique. Il ne s’agit pas de rivaliser avec les États-Unis, ni d’entrer dans une logique de puissance, mais de se libérer des tutelles qui empêchent l’Europe de défendre ses propres choix démocratiques et ses engagements en faveur de la paix, du droit international et de la justice climatique.

Dans cet esprit, l’Union doit se doter d’outils de souveraineté lui permettant de résister aux sanctions extraterritoriales, de garantir sa sécurité économique, de protéger ses chaînes d’approvisionnement essentielles et de mener une diplomatie indépendante, notamment vis-à-vis des grandes puissances. Face aux menaces répétées contre le multilatéralisme, l’Europe a le devoir de montrer l’exemple en matière de coopération, de désescalade et de respect du droit international. Construire cette autonomie, ce n’est pas préparer une rupture avec les États-Unis : c’est se doter de la capacité à agir pour la paix, la solidarité et les biens communs, même lorsque l’allié américain s’en détourne.

Consciente de la gravité des atteintes portées par Donald Trump au système international, l’Union européenne doit proposer une réponse forte, cohérente et fondée sur ses valeurs. La présente proposition de résolution européenne traduit cette volonté en formulant un certain nombre d’objectifs et de mesures devant être défendus au niveau européen. Cette résolution condamne explicitement les remises en cause du droit international par le président Trump, mais, surtout, elle invite les institutions européennes et le gouvernement français à prendre une série d’initiatives visant à réaffirmer les engagements de l’UE en faveur de la paix, des droits humains, de la justice internationale et de la coopération multilatérale. L’Europe peut et doit se positionner en garant de l’ordre international face aux dérives de l’administration Trump, tout en renforçant sa propre résilience stratégique pour l’avenir.

I.   Condamner les violations américaines et défendre le droit international

La présente résolution vise en premier lieu à condamner solennellement les politiques de Donald Trump contraires au droit international. Cette condamnation est nécessaire pour marquer une distance nette vis-à-vis de la politique américaine. Il s’agit pour la France et l’Union européenne d’envoyer un signal clair : les atteintes répétées de l’administration Trump aux règles communes ne sauraient être banalisées ni tolérées. Souligner l’attachement au respect du droit aura un impact politique, fût-il symbolique, et soulignera l’isolement de la position américaine sur la scène mondiale.

L’UE a ainsi déjà réagi à certains actes de Trump : quand il a menacé en 2020 de sanctionner la CPI, Bruxelles a exprimé publiquement sa « grave préoccupation » et réitéré son soutien indéfectible à la Cour ([20]) . De même, lors de l’annonce du transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem, l’ensemble des États membres de l’UE ont réaffirmé leur non-reconnaissance des modifications unilatérales du statut de la ville.

Cette résolution s’inscrit donc dans cette continuité en demandant d’aller plus loin dans la dénonciation des dérives américaines. Elle propose notamment que l’UE condamne explicitement le recul des États-Unis en matière des droits humains , que manifestent par exemple le retrait du Conseil des droits de l’homme de l’ONU et la politique de démantèlement des institutions judiciaires internationales menée sous Trump, qui vise à « déstabiliser profondément les mécanismes de protection universels de nos droits et de la redevabilité », pour reprendre les termes d’Amnesty International ([21]).

En appuyant cette condamnation, l’Europe se pose en gardienne de l’ordre juridique international. Lorsque la première puissance mondiale fait défaut, il incombe aux autres acteurs majeurs, et notamment à l’UE, de défendre activement le système multilatéral. C’est ce qu’a souligné le Secrétaire général de l’ONU António Guterres devant le Parlement européen en 2022, appelant l’Europe à « prendre la tête du combat pour le multilatéralisme et l’État de droit international face à la montée des nationalismes » ([22])

La présente résolution assume cette responsabilité en demandant à l’UE de rehausser son discours : il ne suffit pas de « déplorer » en privé les actions de Donald Trump, il faut publiquement les qualifier de ce qu’elles sont – des entorses graves à la légalité internationale – afin de défendre la primauté du droit.

Ainsi, condamner les violations du droit international par Donald Trump, ce n’est pas seulement critiquer un homme ou son administration, c’est réaffirmer des principes universels : le respect des résolutions de l’ONU, le refus de l’annexion de territoires par la force, la défense des droits humains et du droit humanitaire, le respect de la parole donnée dans les accords internationaux, qu’il s’agisse de l’Accord de Paris ou de l’accord nucléaire iranien. Cette résolution rappelle ainsi que ces principes ne sont pas négociables et que l’UE ne transigera pas avec eux, même si son allié historique décide de s’en affranchir.

Cette posture de fermeté morale rejoint les appels des experts onusiens qui exhortent « tous les pays attachés aux droits humains et à l’État de droit international à s’opposer résolument aux menaces illégales du président américain » ([23]) . En d’autres termes, l’Europe se fait ici l’écho de la communauté internationale pour dire que nul, pas même les États-Unis, n’est au-dessus des lois internationales.

II.   Réaffirmer les engagements de l’UE en faveur de la paix, de la justice et de la coopération

Au-delà de la condamnation, la résolution appelle l’Union européenne à redoubler d’efforts pour promouvoir la paix et le multilatéralisme, afin de combler le vide laissé par le retrait américain. Il s’agit d’une part de renforcer les actions diplomatiques et humanitaires de l’Europe pour la résolution des conflits et, d’autre part, de soutenir activement les instances internationales garantes de la justice et des droits (comme la CPI ou l’ONU) que Trump a tenté d’affaiblir.

A.   Renforcer l’action pour la paix et la sécurité internationale

L’Union européenne est invitée à intensifier son rôle de puissance d’impulsion diplomatique sur les grands dossiers de conflit et de désarmement, compensant l’absence ou l’unilatéralisme des États-Unis. Concrètement, cela implique de s’impliquer davantage dans les médiations de paix (au Moyen-Orient, en Afrique, en Asie), de soutenir les processus de négociation multilatéraux (par exemple la réactivation du dialogue sur le nucléaire iranien ou les pourparlers de paix israélo-palestiniens sur la base du droit international), et de poursuivre les efforts de désarmement.

Sur ce dernier point, l’Europe pourrait prendre des initiatives pour relancer des traités abandonnés par Trump – par exemple, militer pour la reprise de discussions sur un traité successeur du FNI concernant les missiles de portée intermédiaire en Europe, ou promouvoir l’adhésion de nouvelles puissances au Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN).

Par son poids économique et diplomatique, l’UE peut également encourager la réduction des tensions : en maintenant le dialogue avec l’Iran malgré la politique américaine de « pression maximale », les Européens ont cherché à éviter une escalade militaire dans le Golfe.

De même, face aux menaces nord-coréennes (initialement exacerbées par la rhétorique belliqueuse de Trump en 2017 avant l’accalmie des sommets de 2018), l’UE a soutenu les efforts de paix en offrant son concours de facilitateur. En appelant au renforcement de l’action pour la paix, cette résolution rejoint également la volonté européenne de peser davantage en matière de prévention des conflits.

Réaffirmer l’engagement de l’UE en faveur de la paix, c’est donc proclamer que malgré le désengagement des États-Unis d’Amérique, l’Europe demeure déterminée à chercher des solutions diplomatiques aux conflits sur tous les continents, fidèle à sa vocation de « puissance civile » de paix ([24]) . Cette orientation correspond aussi aux attentes de l’ONU. De même que l’UE a pris le leadership sur le dossier climatique après le retrait américain, elle est désormais attendue pour prendre plus fermement le leadership sur les dossiers de paix et de sécurité.

B.   Soutenir les institutions internationales de justice et de droits humains

Un des volets cruciaux de la résolution consiste à appeler l’Europe à soutenir activement la Cour pénale internationale (CPI), la Cour internationale de Justice (CIJ) et plus généralement le système onusien mis à mal par l’administration Trump. Dans la pratique, cela signifie que l’UE doit fournir les moyens financiers, politiques et diplomatiques à ces institutions pour accomplir leur mandat malgré l’hostilité ou l’absence américaine.

L’Union européenne est déjà le principal bailleur de fonds de nombreuses agences onusiennes : elle contribue pour plus du quart au budget de fonctionnement de la CPI via les contributions de ses États membres, et pour une part significative à celui du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. La résolution l’encourage à accroître cet appui si nécessaire, de façon à compenser les retraits de financement décidés par Donald Trump – par exemple, après la décision américaine de cesser de financer l’UNRWA en 2018, l’UE et ses États membres ont augmenté leurs contributions pour combler une partie du déficit ([25])

De même, suite au gel par Washington de sa quote-part à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en pleine pandémie, l’Europe a mobilisé des fonds additionnels en 2020 au bénéfice de cette dernière. Au-delà des moyens, le soutien politique est tout aussi important. La proposition de résolution souligne ainsi le cas de la CPI, cible de l’hostilité de Trump. En effet, en juin 2020, Donald Trump qualifiait la CPI de « bureaucratie internationale illégitime » et signait l’ordre de sanctionner ses magistrats. En réaction, Josep Borrell, Haut représentant de l’UE, a ainsi exprimé sa « sérieuse inquiétude » quant à la décision américaine et réaffirmé l’appui total de l’UE à la CPI ([26]) .

La présente résolution invite à passer du stade déclaratif à des actions plus concrètes : par exemple, envisager des contre-mesures européennes si les sanctions américaines contre la CPI devaient reprendre (telles que la protection juridique des personnels de la CPI sur le sol européen, ou des sanctions symétriques contre les auteurs américains de telles mesures). Elle appelle en outre au renforcement de la coopération entre l’UE et la CPI. Plus largement, soutenir la justice internationale implique aussi que l’UE encourage tous les États à rejoindre la CPI, puisque beaucoup de pays alliés des États-Unis n’en sont pas membres, ayant ainsi cédé à la pression américaine.

La résolution rappelle enfin la nécessité de dialoguer avec la société civile américaine qui partage ces valeurs de justice : de nombreuses ONG ainsi que des juristes américains ont en effet combattu les mesures hostiles à la CPI prises par Donald Trump, à l’image de l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) qui a contesté en justice l’ordre exécutif du président américain sanctionnant la CPI. En intensifiant le dialogue transatlantique au niveau des sociétés civiles, l’Europe peut aider à créer un front commun au sein de l’opinion publique en faveur de la justice internationale, pouvant à terme influencer les décideurs américains eux-mêmes.

III.   Réengager un partenariat avec l’Amérique progressiste

La résolution suggère en effet de développer le dialogue avec la société civile américaine et les autorités locales ou régionales qui restent attachées aux valeurs universelles. Cette approche vise à compenser l’attitude de l’administration fédérale en s’appuyant sur l’autre Amérique – celle des villes, des États, des ONG, des universités, des entreprises responsables.

On l’a vu dans le domaine climatique : dès la sortie de l’Accord de Paris, des dizaines de grandes villes américaines (comme New York, Los Angeles, Chicago) et d’États (Californie, Washington, New York…) se sont engagées via des coalitions telles que We Are Still In à respecter les objectifs climatiques. L’UE a saisi cette perche et a coopéré directement avec eux pour maintenir les efforts environnementaux ([27]) .

Il est proposé d’étendre ce mode opératoire à d’autres domaines, par exemple en matière de droits humains, en renforçant les liens avec les ONG américaines (Human Rights Watch, ACLU, Amnesty USA) afin de coordonner les efforts de plaidoyer contre les politiques de régression (séparation des familles migrantes à la frontière, restrictions du droit d’asile ou reprise de l’application de la peine de mort fédérale).

Sur la question israélo-palestinienne, il s’agit de dialoguer avec la partie de l’opinion américaine en désaccord avec les décisions de Donald Trump. Il s’agit en effet de faire en sorte que l’Europe ne coupe pas les ponts avec les États-Unis au motif de désaccords avec son président, mais préserve au contraire l’alliance.

Cela peut prendre la forme de forums transatlantiques réguliers entre parlementaires européens et américains d’opposition, de programmes d’échanges accrus avec les universités et la jeunesse américaines engagées. À court terme, cette stratégie peut permettre d’atténuer les effets néfastes des politiques trumpiennes en établissant une relation directe avec celles et ceux qui les contournent aux États-Unis même.

À plus long terme, il s’agit d’un investissement sur l’avenir : le mandat Donald Trump ne durera pas éternellement, et lorsque les États-Unis reviendront à une ligne plus respectueuse de l’ordre international, les liens tissés avec la société civile faciliteront une relance rapide de la coopération officielle. En somme, l’appel au dialogue avec la société civile américaine vise à préserver l’amitié entre peuples au-delà des divergences entre gouvernements, et à encourager les forces progressistes américaines qui œuvrent pour un retour de leur pays dans le concert multilatéral.

 


   Conclusion

La proposition de résolution qui vous est soumise vise à dénoncer fermement les atteintes de Donald Trump au droit international tout en projetant l’Union européenne comme un acteur central et proactif de la gouvernance mondiale.

Nous avons vu la présidence Trump ébranler les fondements de l’ordre international bâti après 1945, en reniant des accords clefs (climat, nucléaire iranien), en attaquant des institutions (ONU, CPI) et en privilégiant la loi du plus fort au détriment du droit. Ces remises en cause répétées du droit international ont suscité l’indignation de la communauté internationale et menacent la stabilité du monde.

Face à ces dangers, l’Union européenne apparaît, avec l’ONU, comme l’un des derniers défenseurs du système multilatéral fondé sur des règles. Il s’agit donc, à travers cette résolution, d’appeler l’UE à jouer ce rôle de rempart à laquelle l’invitent les experts de l’ONU qui dénoncent les actes « illégaux » de Trump et enjoignent le monde de s’y opposer, ainsi que les organisations de défense des droits qui alertent sur « le démantèlement en cours des cadres internationaux de justice ».

La résolution propose donc une série de mesures fortes, qui sont autant de pistes d’action pour l’UE : condamner les violations du droit commises par l’administration Trump, car le silence vaudrait complicité et affaiblirait la norme, renforcer l’engagement européen pour la paix car l’absence américaine ne doit pas entraîner l’inaction de l’Europe qui doit combler le vide pour éviter que le monde ne replonge dans la loi de la jungle, affirmer l’indépendance stratégique de l’Europe, soutenir sans faille la justice internationale afin que l’impunité ne triomphe pas et que des instances comme la CPI continuent de rendre des comptes aux criminels de guerre malgré l’hostilité de Washington, et enfin maintenir le lien avec les citoyens américains épris de démocratie et de multilatéralisme.

En adoptant une telle résolution, nous enverrons un message clair : les valeurs de paix, de justice, de droits humains et de solidarité entre les peuples ne sont pas négociables. Ni les pressions économiques, ni les menaces diplomatiques d’un président américain, fut-il le dirigeant de la première puissance mondiale, ne feront fléchir l’engagement européen envers ces principes.

L’Union européenne doit se poser en gardienne de l’ordre international fondé sur le droit, prête à prendre le relais lorsque d’autres acteurs font défaut. Cette posture, loin d’être belliqueuse, est au contraire un appel à un sursaut collectif pour sauver le multilatéralisme : l’Europe tend la main aux partenaires, y compris aux États-Unis d’après Trump, pour reconstruire un ordre mondial stable et prévisible, seul à même de garantir la paix et la prospérité à long terme.

En somme, la période troublée de la présidence Trump aura eu le mérite de rappeler combien les acquis de la coopération internationale sont fragiles et précieux. Elle a aussi réveillé en Europe une conscience d’elle-même en tant que puissance normative. Il appartient désormais à l’UE de donner suite à ces recommandations : condamner lorsque le droit est bafoué, et agir avec détermination pour bâtir un monde plus pacifique, plus juste et plus solidaire, conformément à ses engagements fondateurs.

La présente proposition de résolution s’inscrit précisément dans cet effort pour tenir bon, et mérite à ce titre notre soutien.

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

La Commission s’est réunie le mardi 8 avril 2025, sous la présidence de M. Pieyre-Alexandre Anglade, président, pour examiner la présente proposition de résolution européenne.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Nous examinons à présent la proposition de résolution européenne condamnant les remises en cause répétée du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump, et réaffirmant le réengagement de l’UE en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et des libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples.

Mme Danièle Obono, rapporteure. La proposition de résolution présentée vise à condamner les remises en cause répétées du cadre international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et à réaffirmer le réengagement de l’Union en faveur de la paix, de la justice, de la coopération internationale et des droits fondamentaux. En effet, depuis son retour au pouvoir, M. Donald Trump a engagé son pays dans une trajectoire de rupture encore plus marquée qu’au cours de son premier mandat. Une trajectoire fondée sur le rejet du multilatéralisme, du mépris des engagements internationaux, et une affirmation brutale de la domination géopolitique.

Cette résolution part du constat que les actions de la présidence Trump ne sont pas des actions isolées mais font partie d’un projet cohérent et systématique de démantèlement de l’ordre international fondé sur le droit. Elle s’inscrit dans une démarche de vigilance et de responsabilité. Vigilance face aux dangers que fait peser cette politique sur les équilibres mondiaux. Responsabilité parce que l’Union européenne ne peut plus se contenter d’être spectatrice, elle doit se positionner comme une actrice à part entière du maintien de la paix et du respect du droit.

Le texte s'appuie sur plusieurs constats.

D’abord sur le recul massif des droits humains, tant aux États-Unis qu’à l’international. Les premiers décrets du président Trump ont ciblé des minorités, des personnes migrantes, des personnes transgenres. Les ONG de défense de droit humain ont dénoncé une attaque systématique contre les droits fondamentaux. Ce recul s’étend au rejet de la justice internationale. En février dernier, M. Donald Trump a ainsi signé un décret visant à sanctionner la Cour pénale internationale après qu’un mandat d’arrêt a été émis contre le premier ministre israélien pour crime contre l’humanité. Il menace de sanctions toute personne, ONG, ou institutions coopérant avec la Cour. Ce n’est rien d’autre qu’un sabotage de l’indépendance de la justice internationale.

Ensuite, le président Trump a renoué avec un expansionnisme territorial agressif. Il a évoqué la prise de contrôle du canal de Panama, la volonté d’annexer le Groenland, et le Canada. Concernant la bande de Gaza, ses déclarations sur le transfert forcé des populations palestiniennes vers des pays tiers relève d’une violation manifeste du droit international humanitaire. Ce ne sont pas des provocations rhétoriques, ce sont des menaces concrètes à la stabilité internationale.

Enfin, la rupture environnementale est à considérer. M. Donald Trump a décidé de retirer les États-Unis de l’accord de Paris. Il s’attaque à toute régulation environnementale, et relance à marche forcée l’exploitation des énergies fossiles. Cette politique menace directement l’objectif de limitation du réchauffement climatique, et des engagements de justice climatique envers les pays du Sud.

Nous ne pouvons rester silencieux face à une politique climatique qui hypothèque l’avenir de la planète.

Enfin, sur le plan géopolitique, les choix de l’administration Trump fragilisent les alliances historiques, privilégient une logique de puissances fondée sur un rapport de force brutal et alimentent les tensions commerciales, en particulier avec la Chine mais également avec le reste du monde, notamment l’Union européenne depuis l’annonce des nouveaux tarifs douaniers le 2 avril 2025. Cette instabilité affecte directement l’économie et la sécurité de l’Europe. Face à cela, la résolution propose une série de positions claires.

Elle invite tout d’abord le Gouvernement français, l’Union européenne et ses États membres à condamner fermement la politique de discrimination, de persécution et d’expansionnisme territorial des États-Unis. Elle appelle à condamner, sans équivoque, les violations du droit international, notamment en Palestine, et à défendre le rôle de la Cour pénale internationale.

Elle invite ensuite à agir pour la paix en soutenant les processus diplomatiques, notamment en Ukraine, en Israël et en Palestine, et à faire respecter la souveraineté des États et des droits des peuples. Elle appelle aussi à affirmer l’indépendance stratégique de l’Union européenne en matières économique, industrielle, numérique et diplomatique. Il ne s’agit pas de rompre avec les États-Unis mais de construire une autonomie qui permette à l’Europe de défendre ses valeurs et ses intérêts.

Elle appelle enfin à soutenir la société civile aux États-Unis qui reste attachée aux droits humains, à la justice climatique et au droit international. En effet, il existe une autre Amérique, progressiste, que nous devons continuer à soutenir et avec laquelle nous devons continuer à dialoguer. Cette résolution est donc une prise de position forte, mais juste. Elle ne vise pas à alimenter une confrontation mais à rappeler les fondements du droit international. Elle demande à l’Europe de rester fidèle à ses engagements : la paix, les droits, la coopération et la solidarité. Notre silence nous rendrait complices, notre voix peut, à l’inverse, contribuer à faire exister une alternative ; une Europe qui ne se contente pas de réagir mais qui propose, qui défend des principes, qui agit en actrice responsable de la scène internationale.

C’est pourquoi je vous invite à soutenir cette proposition de résolution afin que la France et l’Europe fassent entendre une voix claire, humaniste et solidaire face aux dérives inquiétantes du président Trump. Une voix qui dit simplement, mais fermement : le droit prime sur la force, la justice est universelle, la paix est un engagement et non une option.

 

L’exposé de la rapporteure a été suivi d’un débat.

 

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). La proposition de résolution que nous examinons aujourd’hui vise à condamner les atteintes répétées de droit international de la part de l’administration américaine et à réaffirmer l’attachement de l’Union européenne à ses principes fondamentaux. Notre groupe partage en grande partie le constat d’un durcissement préoccupant de la ligne américaine sous le second mandat du président Trump.

Nous avons documenté ce durcissement par plusieurs amendements, qu’il s’agisse de commerce, de climat, de multilatéralisme. Le retrait de l’Accord de Paris, la sortie de l’OMS ou encore l’instauration unilatérale de droits de douane généralisés mettent à l’épreuve la stabilité du cadre international. Ces actes ne peuvent pas rester sans réponse. Ils appellent, de la part de l’Union européenne, une réaction ferme et lucide, stratégique, fondée sur la préservation de ses intérêts et la défense du droit international. Cependant, cette réponse ne saurait se réduire à une posture de dénonciation caricaturale. Il est essentiel de dépasser cette logique pour privilégier une approche plus fine, plus constructive et plus crédible sur la scène internationale.

L’Europe ne sera forte que si elle se montre responsable, mesurée et claire dans ses priorités. Nous devons alerter sur les dérives, sans jamais rompre le fil du dialogue avec notre partenaire historique. Rappelons enfin que cette proposition a, par nature, une portée européenne. Elle invite chaque État membre à condamner la politique américaine sous Donald Trump. Or, l’Union européenne repose sur une culture du consensus, de la nuance et de la diplomatie. Il est donc essentiel de s’exprimer collectivement dans une forme adaptée à l’esprit de l’Union européenne et d’écarter toute digression idéologique qui affaiblirait la portée du texte plutôt que de la renforcer.

Notre position est donc celle d’un rééquilibrage sans rupture. Nous défendons une autonomie stratégique de l’Europe, dans le respect du lien transatlantique. Ce lien, nous voulons le repenser, pas l’effacer. Ainsi, notre groupe formulera plusieurs propositions visant à enrichir le texte de la nécessaire nuance qu’appelle l’importance du sujet et dont l’adoption conditionnera notre positionnement final. Nous croyons que la force d’une résolution ne se mesure pas à son niveau d’indignation mais à sa capacité à tracer des perspectives d’action, cohérentes, exigeantes et à la hauteur de la complexité du monde.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Il faut être conscient du choc et de la gravité de la situation. Nous sommes à un tournant, pour la France, l’Europe, le reste du monde, étant donné l’importance des États-Unis et les responsabilités que ce pays exerce vis-à-vis du reste du monde. Nous sommes à un moment clé, où l’Union européenne doit s’engager et prendre le leadership que les États-Unis ont décidé d’abandonner, en tout cas temporairement sous Trump.

Pour cette raison, la résolution insiste sur la nécessité de ne pas s’inscrire en rupture mais de continuer à développer et renforcer les liens avec la société civile, y compris les interlocuteurs institutionnels et politiques, mais en tenant un langage clair. Nous pouvons nous retrouver sur la nécessité de participer, en tant qu’Assemblée nationale, aux discussions pour que l’Union européenne parvienne à faire entendre une voix forte. Nous pouvons construire ensemble cette résolution. L’essentiel, dans l’exposé des motifs, est ce que nous portons vis-à-vis du Gouvernement français et de la Commission européenne.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Nous en passons à l’examen de la proposition de résolution européenne et des amendements qui ont été déposés.

Amendement n° 2 de Mme Marie-Ange Rousselot

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Cet amendement élargit la portée de l’alinéa initial afin d’y inclure l’ensemble des organisations internationales et multilatérales visées par les annonces de retrait ou de désengagement de l’administration américaine. Il s’agit ici de pointer les conséquences désastreuses du retrait américain du financement d’un grand nombre d’agences mondiales et des répercussions négatives de ces retraits sur des enjeux importants. Ces orientations font peser un risque sérieux sur la stabilité, le fonctionnement et l’efficacité de ces structures multilatérales déjà fragilisées par des tensions géopolitiques croissantes.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Avis favorable.

L’amendement n° 2 est adopté.

Amendement n° 1 de Mme Marie-Ange Rousselot

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Cet amendement ajoute un alinéa qui dénonce les récentes décisions commerciales de l’administration Trump : l’instauration de droits de douane d’au moins 10 % sur l’ensemble des importations aux États-Unis, une mesure sans précédent depuis les années 1930. Nous souhaitons alerter la représentation nationale et les Français sur les dangers de cette escalade et guerre commerciale en réponse à laquelle l’Union européenne a fait preuve de retenue, ne ciblant que les produits emblématiques américains tels que les motocycles ou le bourbon.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Avis favorable. Il nous semblait important de nous concentrer sur la question des droits fondamentaux mais étant donné l’actualité, ces annonces participent du choix et des réorientations hostiles au multilatéralisme.

L’amendement n° 1 est adopté.

Amendement n° 4 de Mme Marie-Ange Rousselot

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Cet amendement propose de modifier la rédaction de l’alinéa 31 en adoptant une approche plus nuancée et géopolitiquement responsable de l’analyse des relations entre les États-Unis et la Chine. La formulation actuelle évoque directement les risques d’un conflit armé. Une telle hypothèse reste hautement spéculative et pourrait apparaître comme alarmiste ou excessivement simplificatrice. Il est préférable d’évoquer les risques à l’échelle mondiale afin d’élargir la focale et d’alerter sur les conséquences systémiques potentielles de ces tensions pour l’ensemble de l’ordre international.

Mme Danièle Obono, rapporteure. La rédaction de l’amendement respecte l’esprit de l’alinéa 31 et, à ce titre, j’émets un avis favorable à cette proposition de modification.

L’amendement n° 4 est adopté.

Amendement n° 5 de Mme Marie-Ange Rousselot

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Cet amendement vise à adapter le ton de l’alinéa 33 pour mieux refléter la complexité des dynamiques politiques internes aux États-Unis tout en maintenant une vigilance affirmée sur le respect des droits fondamentaux. La France et les États-Unis restent des alliés dans cette période internationale troublée. Forte d’une longue histoire, notre relation mérite davantage que des mots simplistes qui ne reflètent pas la complexité de la situation intérieure américaine. Notre approche doit être complexe et plurielle car la situation internationale l’est également. Il y va de notre crédibilité et de celle des institutions européennes en matière de droits humains.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Nous ne devons pas hésiter à critiquer une situation lorsque les circonstances l’exigent. Nous avons par ailleurs rappelé dans cette proposition de résolution la nécessité de renforcer nos liens avec la société civile et ses différentes composantes. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement, à moins que vous ne le retiriez.

L’amendement n° 5 est adopté

Amendement n° 11 de M. Thierry Sother

M. Thierry Sother (SOC). L’administration américaine, qui place ses fidèles à des postes clés, se prépare par ailleurs à d’importantes coupes budgétaires et à des réductions de postes. Une purge est actuellement menée par le DOGE d’Elon Musk. Ce dernier, dont les actes sont couverts par l’immunité de Donald Trump, n’occupe pourtant aucune place officielle dans l’organigramme officiel. Cet amendement vise à dénoncer cet état de fait.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Cette situation ayant des effets déstabilisateurs à l’échelle américaine et internationale, j’émets un avis favorable.

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Mon groupe se prononcera contre cet amendement car le terme de purge semble un peu excessif. Par ailleurs, cela pourrait être assimilé à de l’ingérence.

L’amendement n° 11 n’est pas adopté.

Amendement n° 7 de Mme Marie-Ange Rousselot

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Cet amendement ajoute un alinéa qui vise à envoyer un signal politique fort. Nous ne souhaitons aucune guerre commerciale ni aucune escalade. Cependant, nous devons créer au niveau européen un rapport de force économique et commercial en adoptant des mesures importantes et symboliques afin d’affirmer notre statut de partenaire solide et sérieux. Cela passe donc par des mesures commerciales adaptées permettant de préserver les intérêts économiques et industriels de l’Union européenne et de garantir la réciprocité dans les échanges.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Je suis favorable à cet amendement.

L’amendement n° 7 est adopté.

Amendement n° 3 de Mme Marie-Ange Rousselot

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Cet amendement supprime les alinéas 36 et 38 de cet article pour des raisons de cohérence. Il s’agit plus précisément de ne pas interférer avec le fond de cette proposition de résolution qui, je le rappelle, concerne les dérives de la politique extérieure américaine depuis le second mandat de Donald Trump. Nous soutenons la paix et la défense du droit international sur tous les fronts et nous l’avons démontré à maintes reprises par des actes politiques forts. Mais pour préserver la force d’impact de cette résolution et se conformer davantage à la culture politique qui prévaut au sein de l’Union, il nous semble incohérent de mentionner les États tiers ou d’y mêler plusieurs théâtres d’action. Cela ne rend service ni à la démocratie parlementaire ni à la qualité de nos débats.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement de suppression car l’alinéa 36 vise directement des violations du droit international explicitement encouragées par l’administration Trump. Ces violations font donc intégralement partie de la politique externe de la présidence américaine actuelle, en opposition totale aux valeurs portées par l’Union européenne. Ces précisions ne sont donc pas superflues.

L’amendement n° 3 est adopté.

Amendement n° 10 de M. Thierry Sother

M. Thierry Sother (SOC). L’offensive de l’administration Trump contre la liberté académique aux États-Unis est sans précédent. Le secrétaire d’État à l’éducation a pour première mission de fermer son département. L’utilisation du concept transgenre est totalement bannie si bien que les statistiques portant sur les recherches contre le VIH sont supprimées tout comme les articles de chercheurs d’Harvard qui y font référence. Quant au réchauffement climatique dont Trump nie l’existence, les mentions sont retirées des sites gouvernementaux tandis que les financements des agences des étudiants sont coupés. Par ailleurs, il ne se contente pas d’encadrer les recherches universitaires, il entend également peser sur leurs mesures disciplinaires. L’Université de Columbia s’est ainsi vue menacer de perdre ses versements fédéraux si elle n’engageait pas des poursuites contre les étudiants impliqués dans les manifestations pro-palestiniennes. Face à cette situation, il nous appartient de condamner les attaques contre la liberté académique et scientifique, valeur constitutionnelle en France. Nous devons également mettre en place des dispositifs d’accueil des chercheurs qui quitteront les États-Unis pour continuer leurs recherches. C’est ce que propose cet amendement.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Cet amendement complète de façon pertinente l’alinéa 4 qui vise également la poursuite du dialogue avec la société civile américaine. J’y suis donc favorable.

M. Charles Sitzenstuhl (EPR). Nous allons soutenir cet amendement car nous partageons ce qui vient d’être dit tant par notre collègue socialiste que par la rapporteure. C’est un sujet majeur. L’Union européenne doit réagir de façon plus proactive si elle ne souhaite pas se retrouver un jour dans un monde où la liberté académique ne serait plus garantie que sur son propre territoire et quelques autres rares endroits de la planète, comme en Australie ou au Canada.

L’amendement n° 10 est adopté.

Amendement n° 6 de Mme Marie-Ange Rousselot

Mme Marie-Ange Rousselot (EPR). Cet amendement ajoute un alinéa qui invite les institutions européennes et les États membres à prendre la mesure des conséquences sérieuses du désengagement financier américain des organisations de coopérations multilatérales et onusiennes en renforçant leurs propres engagements au sein de celles-ci. Les causes défendues par ces organisations sont vitales, au sens où elles sauvent des vies : éducation, droit humanitaire, santé globale, enjeux climatiques, enjeux migratoires… Il s’agit aussi pour l’Union européenne de préserver son influence et de s’affirmer comme un acteur de premier plan.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Je suis favorable à cet amendement.

L’amendement n° 6 est adopté.

 

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Je donne la parole à notre collègue Pierre-Yves Cadalen pour une explication de vote au nom du groupe de la France insoumise.

M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). De quoi Donald Trump est-il le nom ? Cette question est posée au monde entier par la brutalité sans frein dont fait preuve le nouveau président des États-Unis d’Amérique. Lorsqu’il est arrivé au pouvoir, Trump a multiplié les déclarations hostiles contre le Danemark, le Mexique, l’Europe, la Chine et plus généralement contre tous les pays qui lui semblait menacer les intérêts des États-Unis. Certains disaient qu’il ne fallait pas s’inquiéter, que ces discours ne devaient pas être pris au sérieux. Ceux-là même changent aujourd’hui d’avis et se posent comme nous cette question : de quoi Donald Trump est-il le nom ?

Sur l’écologie d’abord. Sorti de l’accord de Paris sur le climat, il annonce très vite la couleur avec son « drill, baby, drill » et revendique une contribution intensifiée à la catastrophe climatique. C’est le premier nom de Trump : le carbo-fascisme ou la passion débridée pour le pétrole, le gaz, le charbon et la destruction du vivant.

Sur les droits des femmes ensuite. Trump s’en prend frontalement au droit à l’IVG. Ses sympathisants ne s’en cachent pas, disant vouloir, je cite : « changer de culture pour rendre l’avortement inconcevable ». Le livre de Margaret Atwood, La servante écarlate, a été censuré dans plusieurs États américains, par ceux-là mêmes qui rêvent d’accomplir cette horrible dystopie. C’est le second nom de Trump : le macho-fascisme ou la glorification du patriarcat et l’écrasement du droit des femmes et des LGBT.

Sur la liberté publique également. Trump a ordonné l’arrestation de Mahmoud Khalil. Par ailleurs, 300 visas d’étudiants ont été révoqués pour réprimer le mouvement de solidarité en faveur des Palestiniens. L’offensive contre la science est sans précédent et des mots sont à présent interdits dans travaux financés par des fonds publics : « antiracisme », « femme », « transgenre », « égalité », « sciences politiques », « systémique », « LGBT », « historique ». C’est le troisième nom de Trump : le fascisme obscurantiste, ou l’ennemi des libertés et de la science.

Sur le droit international enfin. Trump projette sa brutalité vers le monde entier. Le programme alimentaire de l’ONU a annoncé ce lundi 7 avril 2025 de nouvelles coupes budgétaires actées par son administration. Pour cette organisation de l’ONU, cela revient à, je cite : « prononcer la peine de mort pour des millions de personnes ». L’humiliation infligée au président Zelenski témoigne d’une brutalité méprisant toute loi commune. Les déclarations de Trump sur Gaza sont non seulement une indignité totale, un mépris pour celles et ceux qui meurent sous les bombes mais également une violation inacceptable du droit international. C’est le quatrième nom de Trump : le fascisme anti-ONU ou le rejet du multilatéralisme et l’éloge de la loi du plus fort.

Oui, le « trumpisme » est un fascisme. Face à lui, l’Union européenne et la France doivent se hisser à la hauteur du moment et opposer : le droit à la force, les lumières à l’obscurité, la paix au bellicisme, la démocratie à l’autoritarisme, la protection du monde contre son annihilation généralisée.

Nous appelons donc à voter cette résolution.

L’article unique de la proposition de résolution européenne est adopté.

La proposition de résolution européenne ainsi modifiée, est par conséquent adoptée.

Mme Danièle Obono, rapporteure. Nous vivons un moment où la France et l’Union doivent se repenser. Ce travail doit être engagé collectivement. En tant qu’Assemblée nationale, nous aurons dans les prochaines semaines et dans les prochains mois à nous prononcer pour déterminer la direction que nous souhaitons prendre pour protéger nos valeurs.

 

 

 


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   PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE INITIALE

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et notamment son article 4, article 18, article 19, article 21, article 24, article 35, et article 37,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et notamment l’article 206, et article 347,

Vu le traité sur l’Union européenne,

Vu la Convention européenne des droits de l’homme de 1950,

Vu la Convention Américaine relative aux droits de l’Homme,

Vu la Déclaration universelle des droits de l’homme,

Vu la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et son protocole relatif au statut de réfugié de 1967,

Vu la Résolution du Parlement européen du 7 juillet 2022 sur la décision de la Cour suprême des États‑Unis de remettre en cause le droit à l’avortement aux États‑Unis (2022/2742),

Vu la Résolution 2048 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 22 avril 2015 intitulée « La discrimination à l’encontre des personnes transgenres en Europe »,

Vu la Résolution du Parlement européen du 18 juillet 2019 sur la situation à la frontière entre les États‑Unis et le Mexique (2019/2733),

Vu le droit humanitaire international, en particulier les conventions de La Haye de 1899 et 1907 et les conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles additionnels,

Vu la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 21 décembre 1965,

Vu le Statut de Rome de la Cour pénale internationale du 17 juillet 1998,

Vu la Charte des Nations unies,

Vu les Résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies,

Vu les Résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies du 25 mars 2024,

Vu la Résolution de l’Assemblée nationale portant sur la reconnaissance de l’État de Palestine du 2 décembre 2014,

Vu la Résolution du Parlement européen du 17 décembre 2014 sur la reconnaissance de l’État palestinien (2014/2964),

Vu l’avis du 19 juillet 2024 rendu par la Cour internationale de justice, saisie en décembre 2022 par l’Assemblée générale des Nations unies, sur les conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem‑Est,

Considérant que la première présidence de Donald Trump a entraîné un recul des droits fondamentaux, une déstabilisation des relations transatlantiques et le désengagement de son pays les États Unis d’Amérique d’accords internationaux ;

Considérant que la ratification de plusieurs décrets du président Trump, comprenant notamment le retrait des États‑Unis de l’Accord de Paris contre le changement climatique et de l’Organisation mondiale de la santé aura des répercussions négatives sur le changement climatique, la biodiversité, la santé mondiale, les inégalités et le multilatéralisme ;

Considérant que la ratification d’un certain nombre de décrets du président Trump a déjà contribué à restreindre sur le territoire états‑unien les droits humains de nombreuses populations parmi lesquelles les plus précaires et vulnérables ;

Considérant que les organisations, associations et institutions publiques dont la mission contribue à assurer la défense et la protection des droits humains aux États‑Unis sont entravés dans l’exercice de leur travail ;

Considérant que chaque État membre a contracté des obligations et des devoirs en vertu du droit international et des traités de l’Union aux fins de respecter, garantir, protéger et mettre en œuvre les droits fondamentaux ;

Considérant que toute acquisition territoriale par la contrainte est contraire au droit international et que le souhait de Donald Trump de prendre le contrôle du canal de Panama et d’annexer le Canada et le Groenland nuirait à l’intégrité et à la souveraineté territoriales d’États reconnus au niveau international ainsi qu’au principe d’autodétermination des peuples ;

Considérant les déclarations de Donald Trump sur une volonté de déplacement forcé de la population palestinienne vers des pays tiers qui constituerait une flagrante violation du droit international ;

Considérant les attaques formulées contre l’indépendance et l’autonomie des institutions judiciaires internationales comme la Cour pénale internationale et la publication d’un décret exécutif visant à imposer des sanctions à ses fonctionnaires et à nuire à leur travail judiciaire indépendant et impartial, alors même que la Cour pénale internationale joue un rôle essentiel dans les affaires internationales ;

Considérant que les menaces répétées à l’égard de la Chine pourraient conduire à une guerre ;

Considérant que la politique internationale états‑unienne hostile au multilatéralisme remettrait en cause la stabilité de l’ordre mondial ;

Invite le Gouvernement français, l’Union européenne et ses États membres à condamner de manière ferme la politique de discrimination et de persécution menée par les États‑Unis d’Amérique à l’égard de leur propre population ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à condamner fermement les intentions américaines visant à l’expansionnisme territorial ;

Encourage le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres, à l’intensification de leur action en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre ;

Appelle le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à condamner sans équivoque la politique de colonisation et les violations du droit international commises par le gouvernement israélien avec le soutien de l’administration américaine ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à s’engager à soutenir l’accès à la justice à toutes les victimes et survivants de crimes internationaux graves, notamment devant la Cour pénale internationale, et à œuvrer pour assurer la continuité des activités de la Cour pénale internationale afin qu’elle puisse continuer à remplir ses fonctions de manière indépendante ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à agir pour créer un cadre diplomatique permettant d’obtenir un cessez‑le‑feu en Ukraine, le retrait des troupes russes de l’ensemble du territoire ukrainien et l’ouverture de négociations en vue d’une paix durable ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à agir pour la paix et à faire respecter l’indépendance des États et la souveraineté des peuples ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à condamner fermement toute politique coloniale visant à déplacer les Palestiniens de leurs territoires ;

Appelle le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à défendre la gestion des régions arctique et antarctique comme des biens communs de l’humanité ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à mettre en œuvre son indépendance économique, industrielle, numérique, militaire et diplomatique, notamment par la diversification de ses partenaires commerciaux et la réduction de sa dépendance ; 

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à poursuivre un dialogue avec les institutions américaines et la société civile aux États‑Unis ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à un engagement en faveur d’une action internationale non alignée, au service de la paix.

 

 

 


—  1  —

 

   AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 2

 

présenté par

Marie-Ange ROUSSELOT

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ARTICLE UNIQUE

À l’alinéa 24, après le mot : « climatique », substituer aux mots : « et de l’Organisation mondiale de la santé », les mots : « , de l’Organisation mondiale de la santé et d’autres organisations internationales, » ;

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement rédactionnel a pour objet d’élargir la portée de l’alinéa initial afin d’y inclure l’ensemble des organisations internationales visées par des annonces de retrait ou de désengagement de l’administration américaine. En effet, plusieurs décrets récents prévoient le retrait des États-Unis du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, ainsi qu’une réévaluation de leur participation à l’UNESCO. Plus largement, ces textes appellent à un réexamen global de l’implication et du financement des États-Unis au sein des institutions onusiennes.

Ces orientations font peser un risque sérieux sur la stabilité, le fonctionnement et l’efficacité de ces structures multilatérales, déjà fragilisées par des tensions géopolitiques croissantes. C’est pourquoi un amendement sera présenté ultérieurement appelant les institutions européennes à prendre acte de ce retrait américain et à se mobiliser pour garantir la pérennité, le financement et l’efficacité de ces instances indispensables à la gouvernance mondiale.

 

 

 

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 1

 

présenté par

Marie-Ange ROUSSELOT

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 30, insérer l’alinéa suivant :

« Considérant les annonces du 2 avril 2025 du président Donald Trump instaurant une politique commerciale agressive et marquant l’ouverture d’une véritable guerre commerciale à l’échelle mondiale, fondée sur des évaluations économiques contestables et dépourvues de fondement scientifique solide ; considérant également que l’Union européenne, partenaire stratégique de longue date des États-Unis et appelée à le rester, figure parmi les principales cibles de cette nouvelle orientation unilatérale de l’administration américaine ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Par l’ajout de ce nouvel alinéa, nous souhaitons dénoncer les récentes décisions commerciales de l’administration Trump. En effet, celle-ci a annoncé l’instauration de droits de douane d’au moins 10 % sur l’ensemble des importations aux États-Unis, une mesure sans précédent depuis les années 1930. Ces nouvelles taxes, entrées en vigueur le samedi 6 avril à 6 heures, constituent un plancher universel — bien que certains produits en soient exemptés — et s’ajoutent aux droits de douane déjà existants.

Nous tirons la sonnette d’alarme face à cette escalade commerciale qui ne repose sur aucune base scientifique solide. Cette stratégie de « guerre commerciale » s’appuie sur des évaluations économiques contestables, renforçant l’inquiétude et l’incompréhension au sein de la communauté internationale.

Jusqu’à présent, l’Union européenne a fait preuve de retenue, en ajustant ses propres droits de douane de manière proportionnée. Bruxelles a ainsi ciblé certains produits emblématiques américains, tels que les motos Harley-Davidson, en réponse aux taxes imposées par les États-Unis sur les métaux industriels. La Commission européenne a néanmoins prévenu que l’Europe se tenait prête à réagir, et qu’elle disposait d’un plan solide pour le faire.

 

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 4

 

présenté par

Marie-Ange ROUSSELOT

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ARTICLE UNIQUE

Rédiger ainsi l’alinéa 31 :

« Considérant la montée des tensions entre les États-Unis et la Chine, nourries notamment par des différends économiques, commerciaux et territoriaux – en particulier en mer de Chine méridionale – et les risques croissants de déstabilisation à l’échelle mondiale que ces tensions font peser sur l’équilibre international ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement propose une modification de la rédaction initiale et propose d’adopter une approche plus nuancée et géopolitiquement responsable dans l’analyse des relations entre les États-Unis et la Chine. Alors que l’ancienne formulation évoquait directement le risque d’un conflit armé, une telle hypothèse, bien que préoccupante, reste hautement spéculative et pourrait apparaître comme alarmiste ou excessivement simplificatrice dans le cadre d’un texte à portée institutionnelle.

Il est préférable de mettre l’accent sur la montée des tensions structurelles entre les deux puissances, en identifiant clairement les facteurs sous-jacents de cette rivalité – différends économiques et commerciaux, rivalités technologiques, et litiges territoriaux, notamment en mer de Chine méridionale. Cette approche permet d’inscrire l’analyse dans une dynamique de long terme et d’en souligner la complexité.

En évoquant plutôt les risques de déstabilisation à l’échelle mondiale, le texte élargit la focale et alerte sur les conséquences systémiques potentielles de ces tensions pour l’ensemble de l’ordre international : insécurité économique, fragmentation des normes multilatérales, tensions régionales accrues, ou encore perturbations du commerce global.

Ce recul analytique permet de mieux s’aligner avec les exigences de mesure, de précision et de responsabilité attendues dans les textes portés ou soutenus par des institutions européennes. Il favorise également une lecture constructive et stratégique des enjeux, en évitant de s’enfermer dans une logique binaire ou exclusivement conflictuelle.

 

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 5

 

présenté par

Marie-Ange ROUSSELOT

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ARTICLE UNIQUE

Rédiger ainsi l’alinéa 33 :

« Invite le Gouvernement français, l’Union européenne et ses États membres à suivre avec attention l’évolution de la situation des droits fondamentaux aux États-Unis, notamment dans le contexte politique actuel, en veillant à défendre partout les principes d’égalité, de justice et de respect des minorités, dans un esprit de dialogue exigeant entre alliés unis par des valeurs démocratiques communes ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement vise à adapter le ton de l’alinéa initial pour mieux refléter la complexité des dynamiques politiques internes aux États-Unis, tout en maintenant une vigilance affirmée sur le respect des droits fondamentaux. Le terme de « persécution », bien qu'exprimant une inquiétude légitime face à certaines évolutions récentes, notamment durant le second mandat de Donald Trump, ne permet pas de rendre compte avec justesse de la réalité plurielle du contexte américain, ni des contre-pouvoirs encore pleinement actifs dans cette démocratie.

En tant qu’alliés historiques et partenaires stratégiques, la France et l’Union européenne ont tout intérêt à adopter un langage de responsabilité, fondé sur l'exigence et le respect mutuel. L’objectif n’est pas de condamner, mais d’encourager un dialogue constructif et critique entre démocraties, fondé sur la défense partagée des libertés, de l’égalité et de la justice.

Cette approche permet également de préserver la crédibilité internationale des institutions européennes en matière de droits humains, en évitant toute forme de simplification ou d’ingérence perçue, tout en affirmant clairement les principes auxquels elles ne sauraient renoncer. Elle inscrit enfin la position européenne dans une tradition diplomatique fondée sur la cohérence, la mesure et la fidélité aux valeurs universelles.

 

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 11

 

présenté par

Thierry SOTHER, Marietta KARAMANLI, Karim BENBRAHIM, Colette CAPDEVIELLE, Anna PIC, Pierre PRIBETICH

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ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 33, insérer l’alinéa suivant :

« Dénonce les purges menées dans l’appareil d’État américain ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à dénoncer les purges menées dans l’appareil d’État par la nouvelle administration américaine.

À l’heure où les attaques hybrides se multiplient, des purges sont ainsi menées dans l’appareil sécuritaire américain : limogeage du directeur de l’agence américaine de renseignement (NSA) et de son numéro 2, de membres du Conseil de sécurité nationale (NSC) ainsi que plusieurs militaires de très haut niveau, dont le chef d’état-major des armées ou encore la cheffe des opérations navale.

Par ailleurs, l’offensive de la nouvelle administration américaine contre les fonctionnaires se durcit ; la Maison-Blanche ayant enjoint les agences fédérales à préparer des suppressions de postes. Cette offensive est notamment conduite par le département de l’efficacité gouvernementale (DOGE) dirigé par Elon Musk.

Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise donc à dénoncer les purges menées dans l’appareil d’État par la nouvelle administration américaine.

 

 

Cet amendement n’a pas été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

 

 

AMENDEMENT

No 7

présenté par

Marie-Ange ROUSSELOT

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 35, insérer l’alinéa suivant :

 

« Invite les institutions de l’Union européenne, en particulier la Commission et le Conseil, à engager une réflexion stratégique en vue de l’adoption d’un ensemble de mesures commerciales adaptées, permettant de préserver les intérêts économiques et industriels de l’Union, de garantir la réciprocité dans les échanges et d’éviter que l’Europe ne subisse les orientations unilatérales et offensives annoncées par la nouvelle administration américaine ; souligne, à cet égard, l’importance d’une réponse ferme, coordonnée et fondée sur le droit international, afin de défendre un ordre commercial fondé sur des règles équitables ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement s’inscrit dans un contexte de rupture majeure dans les relations commerciales internationales, marqué par les annonces du 2 avril 2025 du président Donald Trump. L’administration américaine a en effet déclaré la mise en place d’un droit de douane minimum de 10 % sur l’ensemble des importations à destination des États-Unis, applicable dès le 6 avril 2025 à 6 heures. Cette mesure, inédite depuis les années 1930, marque une volonté claire de l’exécutif américain d’engager une « guerre commerciale globale », avec peu de concertation et sur la base d’analyses chiffrées contestables des flux commerciaux existants.

Ces décisions unilatérales, aux fondements économiques incertains, fragilisent les règles multilatérales en matière de commerce et placent l’Union européenne, pourtant partenaire historique des États-Unis, parmi les cibles privilégiées de cette nouvelle orientation. En réaction, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a rappelé que l’Union disposait d’un « plan solide » pour défendre ses intérêts, tout en appelant à la retenue.


Dans ce contexte, il est indispensable que l’Union européenne adopte une posture à la fois lucide et résolue, en travaillant à un train de mesures commerciales équilibrées, permettant de protéger ses acteurs économiques, ses chaînes de valeur stratégiques et sa souveraineté commerciale. L’objectif n’est pas d’engager une escalade, mais de garantir la réciprocité des échanges, de préserver le tissu productif européen, et d’éviter que l’Europe ne subisse passivement une politique commerciale agressive, dictée par des intérêts unilatéraux.

L’ampleur et le caractère systémique des décisions américaines imposent une réaction collective et coordonnée, au service d’un ordre commercial fondé sur le droit international, la transparence et la loyauté des échanges. Cet amendement vise donc à envoyer un signal politique clair : l’Union européenne ne doit pas seulement réagir, elle doit anticiper et affirmer son autonomie stratégique dans un monde de plus en plus instable.

 

 

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 3

 

présenté par

Marie-Ange ROUSSELOT

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ARTICLE UNIQUE

Supprimer les alinéas 36 et 38.

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Les alinéas 36 et 38 de cette proposition de résolution européenne condamnent d'une part les actions du gouvernement israélien, notamment au regard du droit international et d’autre part demandent le retrait des troupes russes d’Ukraine et l’ouverture d’un processus de paix. Si les deux déclarations sont légitimes, nous tenons à rappeler l'importance, dans un cadre législatif, de la cohérence et de la clarté.

Cette résolution est consacrée aux États-Unis et à l’évolution préoccupante de leur position sur la scène internationale depuis le second mandat de Donald Trump. Il n’est pas souhaitable, pour préserver sa force d’impact, qu’elle intègre ici des considérations relatives aux actions d'états tiers. Le message du texte en est brouillé, au risque d’affaiblir la portée de nos prises de position et d’en détourner le sens initial.

Nous rappelons par ailleurs que le groupe EPR demeure pleinement engagé pour soutenir la mobilisation en faveur de la paix et la défense du droit international sur tous les fronts. Néanmoins, nous estimons que ces mentions ne relèvent pas de l’objet de cette PPRE, qui doit rester recentrée sur les relations entre l’Union européenne et les États-Unis.

Dans une période où la complexité du monde appelle à une parole publique plus lisible, plus structurée, nous défendons une approche fondée sur la rigueur et la spécialisation des débats. Chaque sujet mérite un traitement dédié, à la hauteur de ses enjeux. Empiler les causes ou mêler les théâtres d’action dans un même texte ne rend service ni à la diplomatie parlementaire, ni à la qualité de nos débats. Restons fidèles à l'objet de cette résolution : les relations entre l’Union européenne et les États-Unis d’Amérique. Enfin, nous estimons que la rédaction de l’alinéa 39 satisfait pleinement le but recherché sur ces sujets.

 

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 10

 

présenté par

Thierry SOTHER, Marietta KARAMANLI, Karim BENBRAHIM, Colette CAPDEVIELLE, Anna PIC, Pierre PRIBETICH

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ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 42, insérer l’alinéa suivant :

 

Appelle l’Union européenne et ses États membres à développer des programmes d’accueil de talents, en réponse au ciblage de la recherche aux États-Unis qui comprend aussi bien des restrictions de financement, des atteintes aux libertés académique et scientifique, ainsi que des vagues de licenciements, en particulier dans des domaines essentiels tels que de la santé, la lutte contre le changement climatique, et celle contre les inégalités ;

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à dénoncer les attaques sans précédent à l’encontre de la recherche aux États-Unis.

En effet, alors que de nombreuses agences scientifiques dépendent de l’État fédéral, ces dernières sont affectées par les récentes coupes budgétaires décidées par la nouvelle administration américaine. À titre d’exemple, l’agence fédérale américaine chargée de la recherche médicale a annoncé début février vouloir économiser plus de 4 milliards de dollars par an. Parallèlement, les licenciements se sont multipliés : les instituts nationaux de santé (NIH) se sont séparés de près de 1 200 employés, la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration) de 10 % de ses effectifs, et la NASA a annoncé la fermeture de trois départements. Enfin, depuis le début de son mandat, Donald TRUMP a démontré son hostilité concernant certains thèmes de recherche, qu’il s’agisse de la diversité, du genre ou du climat. L’emploi d’une série de termes ([28]) liés à ces thématiques a également été banni des demandes de subventions pour des projets de recherche.


Par cet amendement, le groupe Socialistes et apparentés souhaite donc :

-         Condamner les atteintes sans précédent à l’encontre de la recherche ;

-         Réaffirmer le caractère essentiel des libertés académique et scientifique, fondements d’une société démocratique éclairée ;

-         Appeler l’Union européenne et ses États membres à développer des programmes d’accueil de talents.

L’Europe a en effet un rôle à jouer pour proposer une vision alternative, fondée sur le savoir et la connaissance.

 

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

8 avril 2025


Condamner les remises en cause répétées du droit international par le président des États-Unis d’Amérique Donald Trump et réaffirmer l’engagement de l’Union européenne en faveur de la paix, de la justice, de la défense des droits et libertés fondamentales, de la coopération et de la solidarité entre les peuples (n° 1196),

 

AMENDEMENT

No 6

 

présenté par

Marie-Ange ROUSSELOT

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 43, insérer l’alinéa suivant :

« Invite les institutions de l’Union européenne, en particulier la Commission et le Conseil, à prendre pleinement acte des récentes annonces de retrait des États-Unis de plusieurs organisations internationales ; appelle, en conséquence, l’ensemble des institutions européennes ainsi que les États membres à renforcer leur engagement et leur participation au sein de ces organisations, afin de garantir la continuité de leur fonctionnement, la réalisation effective de leurs missions et la préservation du multilatéralisme ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet alinéa vise à souligner les conséquences préoccupantes du retrait progressif des États-Unis de plusieurs organisations internationales clés, notamment au sein du système des Nations unies. Ce désengagement, officialisé par une série de décrets récents, remet en cause la stabilité financière et politique de structures essentielles à la coopération multilatérale, telles que le Conseil des droits de l’Homme ou l’UNESCO.

Face à ce repli américain, il est impératif que l’Union européenne, en tant qu’acteur global, renforce sa présence et son engagement au sein de ces enceintes internationales. Il en va non seulement de la continuité des missions fondamentales qu’elles portent – en matière de droits humains, d’éducation, de santé ou de développement durable – mais aussi de la défense des valeurs démocratiques et de l’ordre multilatéral fondé sur des règles.

En appelant les institutions européennes et les États membres à assumer davantage de responsabilités, cet alinéa encourage une réaction politique à la hauteur des défis actuels, afin d’assurer la pérennité de ces organisations et de préserver leur capacité à agir dans un monde en mutation.

 

Cet amendement a été adopté.


—  1  —

 

   PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR LA COMMISSION

 

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et notamment son article 4, article 18, article 19, article 21, article 24, article 35, et article 37,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et notamment l’article 206, et article 347,

Vu le traité sur l’Union européenne,

Vu la Convention européenne des droits de l’homme de 1950,

Vu la Convention Américaine relative aux droits de l’Homme,

Vu la Déclaration universelle des droits de l’homme,

Vu la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et son protocole relatif au statut de réfugié de 1967,

Vu la Résolution du Parlement européen du 7 juillet 2022 sur la décision de la Cour suprême des États‑Unis de remettre en cause le droit à l’avortement aux États‑Unis (2022/2742),

Vu la Résolution 2048 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 22 avril 2015 intitulée « La discrimination à l’encontre des personnes transgenres en Europe »,

Vu la Résolution du Parlement européen du 18 juillet 2019 sur la situation à la frontière entre les États‑Unis et le Mexique (2019/2733),

Vu le droit humanitaire international, en particulier les conventions de La Haye de 1899 et 1907 et les conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles additionnels,

Vu la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 21 décembre 1965,

Vu le Statut de Rome de la Cour pénale internationale du 17 juillet 1998,

Vu la Charte des Nations unies,

Vu les Résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies,

Vu les Résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies du 25 mars 2024,

Vu la Résolution de l’Assemblée nationale portant sur la reconnaissance de l’État de Palestine du 2 décembre 2014,

Vu la Résolution du Parlement européen du 17 décembre 2014 sur la reconnaissance de l’État palestinien (2014/2964),

Vu l’avis du 19 juillet 2024 rendu par la Cour internationale de justice, saisie en décembre 2022 par l’Assemblée générale des Nations unies, sur les conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem‑Est,

Considérant que la première présidence de Donald Trump a entraîné un recul des droits fondamentaux, une déstabilisation des relations transatlantiques et le désengagement de son pays les États Unis d’Amérique d’accords internationaux ;

Considérant que la ratification de plusieurs décrets du président Trump, comprenant notamment le retrait des États‑Unis de l’Accord de Paris contre le changement climatique, de l’Organisation mondiale de la santé et d’autres organisations internationales, aura des répercussions négatives sur le changement climatique, la biodiversité, la santé mondiale, les inégalités et le multilatéralisme ;

Considérant que la ratification d’un certain nombre de décrets du président Trump a déjà contribué à restreindre sur le territoire états‑unien les droits humains de nombreuses populations parmi lesquelles les plus précaires et vulnérables ;

Considérant que les organisations, associations et institutions publiques dont la mission contribue à assurer la défense et la protection des droits humains aux États‑Unis sont entravés dans l’exercice de leur travail ;

Considérant que chaque État membre a contracté des obligations et des devoirs en vertu du droit international et des traités de l’Union aux fins de respecter, garantir, protéger et mettre en œuvre les droits fondamentaux ;

Considérant que toute acquisition territoriale par la contrainte est contraire au droit international et que le souhait de Donald Trump de prendre le contrôle du canal de Panama et d’annexer le Canada et le Groenland nuirait à l’intégrité et à la souveraineté territoriales d’États reconnus au niveau international ainsi qu’au principe d’autodétermination des peuples ;

Considérant les déclarations de Donald Trump sur une volonté de déplacement forcé de la population palestinienne vers des pays tiers qui constituerait une flagrante violation du droit international ;

Considérant les attaques formulées contre l’indépendance et l’autonomie des institutions judiciaires internationales comme la Cour pénale internationale et la publication d’un décret exécutif visant à imposer des sanctions à ses fonctionnaires et à nuire à leur travail judiciaire indépendant et impartial, alors même que la Cour pénale internationale joue un rôle essentiel dans les affaires internationales ;

Considérant les annonces du 2 avril 2025 du président Donald Trump instaurant une politique commerciale agressive et marquant l’ouverture d’une véritable guerre commerciale à l’échelle mondiale, fondée sur des évaluations économiques contestables et dépourvues de fondement scientifique solide ; considérant également que l’Union européenne, partenaire stratégique de longue date des États-Unis et appelée à le rester, figure parmi les principales cibles de cette nouvelle orientation unilatérale de l’administration américaine ;

Considérant la montée des tensions entre les États-Unis et la Chine, nourries notamment par des différends économiques, commerciaux et territoriaux – en particulier en mer de Chine méridionale – et les risques croissants de déstabilisation à l’échelle mondiale que ces tensions font peser sur l’équilibre international ;

Considérant que la politique internationale états‑unienne hostile au multilatéralisme remettrait en cause la stabilité de l’ordre mondial ;

Invite le Gouvernement français, l’Union européenne et ses États membres à suivre avec attention l’évolution de la situation des droits fondamentaux aux États-Unis, notamment dans le contexte politique actuel, en veillant à défendre partout les principes d’égalité, de justice et de respect des minorités, dans un esprit de dialogue exigeant entre alliés unis par des valeurs démocratiques communes ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à condamner fermement les intentions américaines visant à l’expansionnisme territorial ;

Encourage le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres, à l’intensification de leur action en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre ;

Invite les institutions de l’Union européenne, en particulier la Commission et le Conseil, à engager une réflexion stratégique en vue de l’adoption d’un ensemble de mesures commerciales adaptées, permettant de préserver les intérêts économiques et industriels de l’Union, de garantir la réciprocité dans les échanges et d’éviter que l’Europe ne subisse les orientations unilatérales et offensives annoncées par la nouvelle administration américaine ; souligne, à cet égard, l’importance d’une réponse ferme, coordonnée et fondée sur le droit international, afin de défendre un ordre commercial fondé sur des règles équitables ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à s’engager à soutenir l’accès à la justice à toutes les victimes et survivants de crimes internationaux graves, notamment devant la Cour pénale internationale, et à œuvrer pour assurer la continuité des activités de la Cour pénale internationale afin qu’elle puisse continuer à remplir ses fonctions de manière indépendante ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à agir pour la paix et à faire respecter l’indépendance des États et la souveraineté des peuples ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à condamner fermement toute politique coloniale visant à déplacer les Palestiniens de leurs territoires ;

Appelle le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à défendre la gestion des régions arctique et antarctique comme des biens communs de l’humanité ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à mettre en œuvre son indépendance économique, industrielle, numérique, militaire et diplomatique, notamment par la diversification de ses partenaires commerciaux et la réduction de sa dépendance ;

Appelle l’Union européenne et ses États membres à développer des programmes d’accueil de talents, en réponse au ciblage de la recherche aux États-Unis qui comprend aussi bien des restrictions de financement, des atteintes aux libertés académique et scientifique, ainsi que des vagues de licenciements, en particulier dans des domaines essentiels tels que de la santé, la lutte contre le changement climatique, et celle contre les inégalités ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à poursuivre un dialogue avec les institutions américaines et la société civile aux États‑Unis ;

Invite les institutions de l’Union européenne, en particulier la Commission et le Conseil, à prendre pleinement acte des récentes annonces de retrait des États-Unis de plusieurs organisations internationales ; appelle, en conséquence, l’ensemble des institutions européennes ainsi que les États membres à renforcer leur engagement et leur participation au sein de ces organisations, afin de garantir la continuité de leur fonctionnement, la réalisation effective de leurs missions et la préservation du multilatéralisme ;

Invite le Gouvernement, l’Union européenne et ses États membres à un engagement en faveur d’une action internationale non alignée, au service de la paix.

 


([1])  Le 11 juin 2020, le président américain Donald Trump a signé l'Executive Order 13928, intitulé « Blocking Property of Certain Persons Associated With the International Criminal Court ». Ce décret autorisait des sanctions économiques, telles que le gel des avoirs et des restrictions de visa, contre des membres du personnel de la Cour pénale internationale (CPI) impliqués dans des enquêtes visant des citoyens américains ou des ressortissants de pays alliés n'ayant pas ratifié le Statut de Rome.

([2])  Service européen pour l’action extérieure (SEAE), « International Criminal Justice: Statement by the High Representative following the US decision on possible sanctions related to the ICC », 16 juin 2020. Disponible en ligne : https://www.eeas.europa.eu/eeas/international-criminal-justice-statement-high-representative-following-us-decision-possible_en (consulté en mars 2025).

([3])  Callamard, Agnès. « Rapport de la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires », Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, 44ᵉ session, document A/HRC/44/38, 9 juillet 2020.

([4])  Conseil de sécurité des Nations unies, résolution 2334 (2016), 23 décembre 2016, S/RES/2334 (2016).

([5])  The Guardian, Bethan McKernan, « Trump Jerusalem move ‘a dangerous violation of international law’, say Arab League foreign ministers », 10 décembre 2017. Disponible en ligne : https://www.theguardian.com/world/2017/dec/10/trump-jerusalem-arab-league-dangerous-violation-international-law (consulté en mars 2025).

([6])  Conseil de sécurité des Nations unies, résolution 497 (1981), adoptée à l’unanimité le 17 décembre 1981, S/RES/497(1981).

([7])  The Times of Israel, « EU says it will not follow Trump in recognizing Israeli sovereignty over Golan », 27 mars 2019. Disponible en ligne : https://www.timesofisrael.com/eu-says-it-will-not-follow-trump-in-recognizing-israeli-sovereignty-over-golan (consulté en mars 2025).

([8])  Al Jazeera, « Is Trump the end of the international rules-based order? », 16 mars 2025. Disponible en ligne : https://www.aljazeera.com/news/2025/3/16/is-trump-the-end-of-the-international-rules-based-order (consulté en mars 2025).

([9])  Communiqué de presse du 11 février 2025, https://www.ohchr.org/en/press-releases/2025/02/us-proposal-take-over-gaza-would-shatter-fundamental-rules-international.

([10])  Phrase prononcée par Donald Trump le 25 septembre 2018, lors de son discours devant l'Assemblée générale des Nations unies à New York.

([11])  Le Groenland est depuis 1979 un territoire autonome au sein du Royaume du Danemark, doté d'un gouvernement et d'un parlement propres, bien que le Danemark conserve des compétences en matière de défense, de politique étrangère et de politique monétaire.

([12])  Le canal de Panama a été cédé aux autorités panaméennes dans le cadre des traités Torrijos–Carter, signés le 7 septembre 1977 entre le président américain Jimmy Carter et le général panaméen Omar Torrijos. Conformément à ces traités, les États-Unis ont transféré progressivement le contrôle du canal, qui a été entièrement remis au Panama le 31 décembre 1999.

([13])  L’accord signé en 2017 entre le Panama et la Chine dans le cadre des « nouvelles routes de la soie », visait à développer les infrastructures logistiques et portuaires panaméennes, notamment autour du canal, en renforçant les investissements chinois dans la région.

([14])  The Guardian, « European leaders vow to keep fighting global warming despite US withdrawal », 2 juin 2017. Disponible en ligne : https://www.theguardian.com/environment/2017/jun/02/european-leaders-vow-to-keep-fighting-global-warming-despite-us-withdrawal (consulté en mars 2025).

([15])  Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), The Emissions Gap Report 2017, Nairobi, novembre 2017, p. xiv. Disponible en ligne : https://www.unep.org/resources/emissions-gap-report-2017.

([16])  Peterson Institute for International Economics (PIIE), Chad P. Bown, « Why did Trump end the WTO’s Appellate Body? », blog Trade and Investment Policy Watch, 10 décembre 2020. Disponible en ligne : https://www.piie.com/blogs/trade-and-investment-policy-watch/2020/why-did-trump-end-wtos-appellate-body-tariffs (consulté en mars 2025).

([17])  Politico Europe, Victor Jack, « France’s push for strategic autonomy crumbles under Donald Trump’s booze tariffs », 21 mars 2025. Disponible en ligne : https://www.politico.eu/article/france-push-strategic-autonomy-crumbles-under-donald-trump-booze-tariffs (consulté en mars 2025).

([18])  Nations Unies, « Warning against ‘Great Fracture’, Secretary-General Urges World Leaders to Do Everything Possible to Avoid Dividing Globe into Two Separate and Competing Worlds », communiqué de presse GA/12183, 24 septembre 2019. Disponible en ligne : https://press.un.org/en/2019/ga12183.doc.htm (consulté en mars 2025).

([19])  Al Jazeera, op. cit., Is Trump the end of the international rules-based order?

([20])  Service européen pour l’Action extérieure (SEAE), « International Criminal Justice: Statement by the High Representative following the US decision on possible sanctions related to the ICC », 16 juin 2020. Disponible en ligne : https://www.eeas.europa.eu/eeas/international-criminal-justice-statement-high-representative-following-us-decision-possible_en (consulté en mars 2025).

([21])  The Hindu, Nihal Rodrigo, « The assault on multilateralism and international law », 24 février 2024. Disponible en ligne : https://www.thehindu.com/opinion/op-ed/the-assault-on-multilateralism-and-international-law/article69354730.ece (consulté en mars 2025).

([22])  Discours du Secrétaire général des Nations unies devant le Conseil des droits de l'homme à Genève, le 24 février 2025.

([23])  GE2P2 Center, The Sentinel – Period ending 16 Feb 2025, compilation de sources et déclarations d’experts onusiens, 16 février 2025, p. 10. Disponible en ligne : https://ge2p2-center.net/wp-content/uploads/2025/02/the-sentinel_-period-ending-16-feb-2025.pdf (consulté en mars 2025).

([24])  Selon l’expression de Louis-François Duchêne : Louis-François Duchêne, ‘Europe’s Role in World Peace’ in Richard Mayne (ed), Europe tomorrow: sixteen Europeans look ahead (London 1972).

([25])  ACLU, op. cit.

([26])  SEAE, op. cit., déclaration du 16 juin 2020 sur les sanctions américaines visant la CPI ; Politico, David M. Herszenhorn, « EU has ‘serious concern’ about US sanctions against International Criminal Court », 11 juin 2020. Disponible en ligne : https://www.politico.com/news/2020/06/11/eu-has-serious-concern-about-us-sanctions-against-international-criminal-court-313692 (consulté en mars 2025).

([27])  The Guardian, op. cit., article du 2 juin 2017 sur le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris.

([28]) The New York Times, These words are disappearing in the New Trump administration, 7.03.2025, url